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ART. UNIQUEN° 7

ASSEMBLÉE NATIONALE
3 février 2012

RESPONSABILITÉ CIVILE DES PRATIQUANTS SPORTIFS - (N° 4231)

Commission
 
Gouvernement
 

Rejeté

AMENDEMENT N° 7

présenté par

M. Deguilhem, Mme Fourneyron, M. Juanico, M. Bloche et M. Rogemont et les membres du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

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ARTICLE UNIQUE

Rédiger ainsi cet article :

« Après l’article L. 321‑1 du code du sport, il est inséré un article L. 321‑1‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 321‑1‑1. – Les pratiquants ne peuvent être tenus pour responsables, sauf faute caractérisée par une violation des règles du jeu qui leur soit personnellement imputable, des dommages causés à un autre pratiquant par le fait d’une chose qu’ils ont sous leur garde au sens du premier alinéa de l’article 1384 du code civil, à l’occasion de l’exercice par ceux-ci d’une pratique sportive sur un lieu réservé de manière permanente ou temporaire à cette pratique. ».

EXPOSÉ SOMMAIRE

La Cour de cassation, par un arrêt rendu le 4 novembre 2010, a initié un important revirement de la jurisprudence en matière de responsabilité civile applicable au sport, en retenant que l’acceptation des risques par la victime n’est pas de nature à faire obstacle à la responsabilité du gardien de la chose au sens de l’article 1384 alinéa 1er du code civil. Ce faisant, la Haute juridiction a partiellement abandonné la théorie de l’acceptation des risques inhérents à la pratique sportive.

Il convient de rappeler que sur le fondement du même article, la Haute juridiction dans un arrêt du 29 juin 2007 avait insisté sur la nécessité de « relever l’existence d’une faute caractérisée par une violation des règles du jeu commise par un ou plusieurs joueurs, même non identifiés  » pour engager la responsabilité d’une association sportive. 

Aussi, cette évolution jurisprudentielle du 4 novembre 2010, au-delà de son manque de cohérence dû à la coexistence de deux régimes distincts de responsabilité dans le sport selon que le sportif auteur d’un dommage utilise ou non une chose, est de nature à mettre en danger la pérennité du sport et l’existence des compétitions sportives. La Cour de cassation amorcerait-elle un mouvement général d’abandon de la théorie de l’acceptation des risques, y compris pour les dommages causés par le fait personnel des sportifs. ?

Le mouvement sportif pourra-t-il faire face à cette évolution qui menace fondamentalement la pratique du sport en compétition et même en loisirs, ainsi que la situation financière des fédérations sportives et de tous les organisateurs de compétitions ?

Les fédérations d’abord, soumises à une obligation d’assurance, devront assumer la réparation intégrale des dommages matériels et corporels résultant d’accidents survenus en compétition et lors des entraînements. Or, à l’évidence, cette charge conduira à une augmentation exponentielle des primes d’assurances, que la plupart des fédérations sportives ne pourront financer, sauf à trouver des solutions palliatives de financement comme l’augmentation du prix des licences, ce qui n’est pas souhaitable.

Il n’est pas exclu également de voir les compagnies d’assurance refuser de garantir les pratiques sportives les plus risquées.

Les sportifs ensuite seront incités à renoncer à la pratique du sport afin de ne pas risquer de voir leur responsabilité engagée en cas d’un dommage pourtant causé dans le cadre d’un exercice normal des règles du jeu.

Enfin, les organisateurs de grandes compétitions internationales pourraient être réticents à confier à la France l’accueil de telles manifestations, en considération d’un tel régime de responsabilité et de ses incidences à leur égard.

Il faut souligner que le texte adopté par la commission des affaires culturelles et de l’éducation, qui ne prévoit une exclusion de responsabilité que pour les dommages matériels et immatériels causés par une chose gardée par un sportif, acte par une interprétation a contrario la reconnaissance d’une responsabilité de plein droit du fait des choses pour les dommages corporels.

Ce faisant, ce texte graverait dans le marbre la disparition de la théorie de l’acceptation des risques dans le sport et donnerait libre cours à une extension du droit commun de la responsabilité civile à tous les types de dommages causés par des sportifs, laissant le problème soulevé par la jurisprudence de la Cour de cassation en grande partie sans réponse.

Or, il est absolument vital pour le sport de lui appliquer un régime spécial de responsabilité pour les accidents résultant de la pratique sportive, causés ou non par une chose, dans des lieux réservés de manière permanente ou temporaire à cette pratique.

C’est pourquoi le présent amendement prévoit que la responsabilité d’un sportif à l’égard d’un autre sportif ne peut être engagée, en cas de dommage causé par la chose dont il a la garde à l’occasion de l’exercice d’une activité sportive en compétition ou lors d’entraînements, qu’en cas de faute caractérisée par une violation des règles du jeu. Ce texte resterait en cohérence avec la position retenue par la Cour de cassation en 2007 et permettrait de préserver l’indemnisation des victimes lorsqu’une violation des règles du jeu est établie.