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N° 280

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189)

TOME IX

SÉCURITÉ

GENDARMERIE NATIONALE

PAR M. Alain MOYNE-BRESSAND,

Député.

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Voir le numéro : 276 (annexe n° 39)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. —  LA GENDARMERIE CONTRIBUE EFFICACEMENT À LA MISSION DE SÉCURITÉ 7

A. UNE CULTURE DE PERFORMANCE QUI SE TRADUIT PAR UNE CONSTANTE AMÉLIORATION DES RÉSULTATS 7

1. La lutte contre l’insécurité routière reste une préoccupation prioritaire 7

2. Les résultats enregistrés dans la lutte contre la délinquance progressent encore 8

a) L’adaptation des moyens 8

b) Des résultats en constante progression 9

B. LA GENDARMERIE DISPOSE D’UNITÉS EXCEPTIONNELLES QUI PARTICIPENT À CES BONS RÉSULTATS 10

1. Les compétences remarquables et le haut niveau d’expertise de l’IRCGN contribuent efficacement à la mission de police judiciaire 10

a) L’organisation et les moyens 10

b) Les compétences particulières 11

2. La réforme du GIGN répond à l’évolution des menaces 12

a) Le « nouveau GIGN » 12

b) le groupe interarmées d’hélicoptères (GIH) 14

C. MALGRÉ DE RÉCENTES AMÉLIORATIONS, LE SOUTIEN SANITAIRE RESTE PERFECTIBLE 15

1. L’organisation, les moyens et les caractéristiques du soutien sanitaire de la gendarmerie 15

2. L’adaptation aux besoins doit être poursuivie 17

D. DES MESURES VOLONTARISTES SONT NÉCESSAIRES POUR RATIONALISER LES MISSIONS DE TRANSFÈREMENTS ET D’EXTRACTIONS 19

1. Les missions de transfèrements et d’extractions 19

2. Les incohérences et dysfonctionnement de cette charge et leur impact sur l’organisation du service de la gendarmerie 21

3. L’efficacité de cette mission doit impérativement être améliorée 22

II. —  UN BUDGET EN RÉGRESSION 25

A. MALGRÉ UNE RÉDUCTION SIGNIFICATIVE DES EFFECTIFS, LES CRÉDITS DESTINÉS AU PERSONNEL PROGRESSENT 26

1. La gendarmerie participe à l’effort de réduction des effectifs 26

a) L’évolution globale des effectifs 26

b) Une moindre progression de la réserve 28

2. Les dépenses de personnel 29

B. LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT 30

1. L’évolution des crédits de fonctionnement 30

2. La croissance des loyers 33

C. LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT 34

1. Les principaux investissements hors immobilier 34

2. Le renouvellement des véhicules blindés est encore différé 36

3. L’immobilier 36

a) Les crédits ne permettent pas d’améliorer significativement l’état du casernement 37

b) L’évolution des mises en chantier et des livraisons 38

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL GUY PARAYRE, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE 41

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 55

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 79

INTRODUCTION

Le projet de budget de la gendarmerie pour 2008 n’échappe pas à un plan de restrictions budgétaires qui s’inscrit dans un contexte de dégradation généralisée des finances publiques. Bien qu’en régression, les moyens alloués à la gendarmerie lui permettront de poursuivre l’exécution du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) et le renouvellement d’équipements. Toutefois, aucune dotation n’est inscrite pour le renouvellement des blindés et les crédits destinés aux dépenses immobilières sont insuffisants pour améliorer l’état du casernement. Enfin, avec une diminution prévue de 965 emplois, la gendarmerie participe à l’effort de réduction des effectifs

Les résultats obtenus par la gendarmerie dans la lutte contre la délinquance et l’insécurité routière témoignent de l’engagement des militaires et de leur contribution efficace à la sécurité de leurs concitoyens. Afin de ne pas obérer les capacités opérationnelles de l’arme, il convient d’orienter les efforts qu’elle doit consentir vers une meilleure rationalisation de ses missions. À l’occasion de ses travaux, le rapporteur a constaté des incohérences et des dysfonctionnements inacceptables dans l’exécution des missions de transfèrements et d’extractions. Il estime indispensable d’imposer quelques règles de bonne gestion et de responsabiliser les magistrats sur cette question.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2007, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 42 réponses étaient parvenues, soit un taux de 100 %.

I. —  LA GENDARMERIE CONTRIBUE EFFICACEMENT À LA MISSION DE SÉCURITÉ

A. UNE CULTURE DE PERFORMANCE QUI SE TRADUIT PAR UNE CONSTANTE AMÉLIORATION DES RÉSULTATS

1. La lutte contre l’insécurité routière reste une préoccupation prioritaire

Avec une baisse de 10,84 % du nombre de personnes tuées sur l’ensemble du réseau national, le bilan de l’année 2006 est très favorable ; en zone gendarmerie, la baisse de plus de 11 % du nombre des tués est deux fois supérieure à celle de 2005. Le nombre de blessés a diminué de 4,63 % sur l’ensemble du territoire ; sur le réseau surveillé par la gendarmerie, la baisse enregistrée est de 10,56 %. Ces bons résultats témoignent de l'engagement des militaires de toutes les unités qui ont accru leur activité en sécurité routière pour atteindre, en 2006, 15,07 % de l'activité missionnelle. Cette augmentation concerne à la fois les unités spécialisées (+ 5,1 %) et les communautés de brigades (+ 6,5 %).

L’amélioration des capacités de lutte contre l’insécurité routière se traduit en 2007 par la création de 5 pelotons d'autoroute et de 2 brigades rapides d'intervention (BRI) sur les nouvelles voies routières et autoroutières. La gendarmerie compte aujourd’hui 56 BRI pour un effectif total de 199 militaires. Ces unités, placées sous l’autorité directe des commandants des escadrons départementaux de sécurité routière (EDSR), sont dotées de véhicules rapides d’intervention (VRI). Le parc des VRI a été modernisé afin de maintenir la capacité de la gendarmerie à dissuader et agir contre les comportements les plus graves et les plus dangereux de la délinquance routière : 63 véhicules rapides SUBARU Impreza WRX ont été déployés en 2006 et 2007 pour remplacer les PEUGEOT 306 S 16 et les RENAULT Mégane coupé. Les résultats obtenus par les BRI dans le domaine de la lutte contre l’insécurité routière sont très significatifs. Ainsi, depuis le début de l’année 2006, l’ensemble de ces brigades a constaté 17 400 infractions, et procédé à plus de 1 300 rétentions de permis et 2 500 immobilisations. Le nombre de rétentions opérées par un pilote de BRI est supérieur de 50 % à celui d’un motocycliste de brigade motorisée et 4 fois supérieur à celui réalisé par un gendarme en peloton d'autoroute. En outre, l'existence de ces unités, particulièrement médiatisée, et leur présence sur le réseau, ostensible, s’avèrent très dissuasives.

La prise de conscience des méfaits de la drogue au volant a permis de grands progrès ces dernières années en matière de stupéfiants : le dispositif légal a été renforcé, les contrôles ciblés ont augmenté et des équipements nouveaux ont été expérimentés. Le nombre des dépistages opérés par les unités de gendarmerie s’est accru de manière considérable depuis 2003. En 2006, 15 284 dépistages ont été effectués pour 4 427 infractions relevées. Le taux de dépistages positifs atteint 70 % sur les contrôles à l'initiative des forces de l'ordre (suspicion d'usage de stupéfiant sans commission préalable d'infraction). La gendarmerie est engagée, aux côtés de la police, dans l’expérimentation des kits de dépistage salivaire des produits stupéfiants dans les régions Centre, Lorraine et Pays de la Loire. Celle-ci devrait déboucher sur l'équipement des forces de sécurité intérieure en 2008. La mise en place de ces kits devrait faciliter les contrôles qui demeurent pour l'heure trop contraignants pour envisager leur généralisation.

L’exercice de la police sur la route en tenue civile, à bord de véhicules banalisés de tous types, se généralise. Le port de la tenue civile est limité à l’observation et à la constatation de l’infraction ; l’interception et l’audition sont assurées par des militaires agissant conjointement en tenue. Enfin, l'emploi de l'hélicoptère permet de compléter les dispositifs.

2. Les résultats enregistrés dans la lutte contre la délinquance progressent encore

a) L’adaptation des moyens

Pour lutter toujours plus efficacement contre la délinquance, la gendarmerie ne cesse d’améliorer son dispositif et a récemment restructuré sa filière criminalistique. Elle dispose d’une chaîne organisée depuis l’échelon élémentaire, brigade de recherche, jusqu’au service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD) et l’institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) ayant une compétence nationale, en passant par les brigades départementales de recherches et d'investigation judiciaires (BDRIJ) et les sections de recherche (SR). Dans le premier type d’unité et les SR, les militaires disposent de moyens de gel des lieux, de prélèvements digitaux simples et de prélèvements biologiques. Les BDRIJ regroupent l’ensemble des compétences locales et disposent de moyens plus élaborés de constatations, de prélèvements et de gestion de scène de crime ; elles comprennent les techniciens en identification criminelle (TIC) (1) et les coordinateurs de la criminalistique (COCrim).

Le concept de COCrim a été mis en oeuvre afin d'optimiser la gestion de scènes de crime et d’améliorer les opérations de prélèvement effectuées en vue de transmettre les indices les plus pertinents dans les meilleurs délais et selon une répartition optimale vers les laboratoires. Le COCrim a également un rôle de conseiller scientifique auprès des magistrats et directeurs d'enquête. Ce nouvel intervenant doit recevoir une formation universitaire de six semaines, dont les premiers enseignements débutent en octobre 2007, sous la tutelle de l’université de Paris V Descartes. La majorité de l’enseignement est assurée par les experts de l’IRCGN. Plus de 120 personnels doivent être formés sur cinq ans.

L'unité nationale d'investigation criminelle (UNIC), dépendant de l’IRCGN, a été créée afin de renforcer le potentiel de criminalistique des unités territoriales par une capacité de projection de moyens portables de laboratoire et de personnels hautement qualifiés. Cette unité est destinée à intervenir dans le cadre de scènes de crimes graves ou particulièrement complexes et permet notamment de disposer d'outils capables d'examiner, au plus près de la scène, les premiers indices prélevés, afin d'orienter les analyses qui seront effectuées ultérieurement dans les laboratoires et de renseigner en temps réel le directeur d'enquête. Elle peut aussi constituer un moyen de police technique et scientifique particulièrement efficace en cas de scènes d'attentats multiples.

b) Des résultats en constante progression

Le nombre de crimes et délits constatés baisse chaque année de façon ininterrompue depuis 2003 et atteste des efforts déployés par les personnels de la gendarmerie.

La tendance à la baisse relevée en 2006 (- 1,27 %) se poursuit en 2007. Le nombre de faits constatés par la gendarmerie nationale a diminué de 1,5 % pour le premier semestre 2007 par rapport à la même période de 2006.

La délinquance de voie publique, 43,3 % du total des faits signalés en 2006, après avoir diminué de 5,77 % cette même année, recule de 2,1 % au premier semestre 2007. Sur la même période, avec 300 357 faits constatés, les vols, quoiqu’en baisse de 2,5 %, représentent l’infraction la plus courante (61,2 % des cas).

L’évolution des atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) enregistrée sur les six premiers mois de l’année 2007 reste préoccupante (+ 7,6 %) ; en revanche le nombre de faits élucidés progresse de 3,1 % et atteint 73,78 %.

Pour le premier semestre 2007, les infractions révélées par l’action des services sont en baisse de 10,7 %. Les unités de gendarmerie ont cependant fourni un effort significatif en matière de lutte contre les trafics locaux et nationaux de drogues, de lutte contre le travail illégal et de lutte contre l’immigration irrégulière. Ainsi, les infractions relatives à la police des étrangers ont augmenté de 8,1 % pour atteindre 4 042 procédures en France métropolitaine.

En matière d’infractions à la législation sur les stupéfiants, le nombre de faits enregistrés baisse de 12,7 % avec un moindre volume d’usages simples constatés. Les enquêtes ont plus ciblé les trafiquants et les revendeurs.

Seul le taux d’élucidation des crimes et délits évolue défavorablement et diminue de 2,8 points pour atteindre 37,7 % au premier semestre 2007. Ce résultat traduit la nécessité de préserver la qualité du travail d'investigation et d'initiative.

B. LA GENDARMERIE DISPOSE D’UNITÉS EXCEPTIONNELLES QUI PARTICIPENT À CES BONS RÉSULTATS

1. Les compétences remarquables et le haut niveau d’expertise de l’IRCGN contribuent efficacement à la mission de police judiciaire

La prise en compte des nouvelles technologies pour renforcer l’efficacité opérationnelle est l’un des axes du budget 2008. Les moyens d’investigation technique et scientifique seront renforcés.

L’IRCGN succède en 1990 à la section technique d’investigation criminelle de la gendarmerie (STICG) créée en 1987 et initialement chargée de développer les techniques utilisées en criminalistique. Disposant de compétences de très haut niveau, de moyens uniques en gendarmerie et assurant une veille technologique permanente, l’Institut (2) est l’unité d’élite d’investigation scientifique et technique de la gendarmerie. Reconnu pôle d’excellence, il apporte son concours à l’administration centrale et participe à divers travaux interministériels portant notamment sur la cybercriminalité, la vidéosurveillance, la fraude documentaire, les engins explosifs improvisés.

a) L’organisation et les moyens

L’IRCGN est organisé en 4 divisions : 3 criminalistiques - physique et chimie, ingénierie et numérique, identification humaine – et un service organisation. Il effectue, dans le respect des règles en vigueur, des examens techniques ou scientifiques ainsi que des expertises. Environ 14 500 dossiers sont traités chaque année, dont 6 000 à 6 500 ne relevant pas du domaine génétique, représentant 60 000 examens en laboratoire. Il apporte aux directeurs d’enquête le soutien nécessaire au bon déroulement des opérations de police technique ou d’identification des victimes en cas de crime grave ou de catastrophe. L’UNIC est constituée par prélèvement de compétences au sein des différents laboratoires, ce qui impacte nécessairement le fonctionnement des entités concernées.

Le personnel de l’Institut est composé de 67 officiers, 6 officiers du service de santé des armées, 113 sous-officiers dont 9 relevant du corps technique et administratif de la gendarmerie, 29 civils et 10 gendarmes adjoints volontaires. Parmi les officiers, une vingtaine sont des officiers sous contrat recrutés en raison de leurs compétences techniques ou scientifiques particulières. Cette situation présente l’inconvénient de limiter leur présence au sein de la gendarmerie à 20 années, durée maximale possible de leur engagement. Or, l’expérience acquise sur le long terme est précieuse et certains obtiennent, au terme d’une longue démarche, leur inscription comme expert auprès du Parquet. Il est donc souhaitable que la gendarmerie puisse les intégrer dans la carrière afin de s’attacher leurs compétences au-delà des 20 années de contrat. Le nombre de personnel à intégrer est restreint puisque, sur une période de 15 ans, une dizaine seulement de personnels sont concernés ; 2 intégrations sont actuellement en cours.

L’Institut dispose d’un budget de fonctionnement de 1,55 million d’euros. Toutefois, l’enrichissement du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) a nécessité un abondement conséquent de 1,7 million d’euros en 2006 et 3 millions d’euros en 2007 incluant notamment le marché d’externalisation. Le coût d’une analyse génétique comprend celui du kit de prélèvement, soit 6,50 euros, et celui de l’analyse, établi entre 40 et 50 euros. Les contrats de maintenance représentent une charge significative sur le budget de fonctionnement mais sont indispensables pour maintenir la qualité des résultats et garantir l’efficacité opérationnelle de l’unité soumise à de nombreuses sollicitations. Le budget moyen d’investissement est compris entre 0,5 et 0,6 million d’euros avec quelques pics lors de l’acquisition de matériels particulièrement lourds et coûteux.

Les installations actuelles dans lesquelles s’est développé l’Institut ne sont pas adaptées aux besoins d’un laboratoire ni à son adaptation aux modifications réglementaires susceptibles d’intervenir. Pour garantir la poursuite de son activité dans de bonnes conditions, le transfert de l’activité sur Pontoise est envisagé à l’horizon 2012.

b) Les compétences particulières

L’IRCGN a développé des compétences de très haut niveau. Certaines sont uniques en France ; la gendarmerie est ainsi la seule spécialiste de morpho-analyse (3). Toutes les procédures d’analyse et d’essais sont retracées dans le manuel qualité de l’Institut. 4 départements – balistique, documents, signal-image-parole et entomologie – sont accrédités par le comité français d’accréditation (COFRAC) et d’autres procédures d’essais sont en cours d’accréditation. Cette unité doit désormais maintenir le haut niveau de qualité qu’elle a atteint et poursuivre son activité dans le strict respect des règles et standards en vigueur en s’adaptant à leur évolution. Elle doit également tenir compte du rôle majeur qu’est appelé à jouer l’élément matériel pour la preuve scientifique dans les procès pénaux.

L’Institut a amélioré les moyens de traque de la pédo-pornographie sur l’Internet en développant un logiciel baptisé MARINA. Outre un accroissement de la rapidité et de la fiabilité de la recherche liée à son automatisation, cet outil présente l’avantage de limiter l’exposition des personnels à des images particulièrement dures et ayant un impact psychologique réel contre lequel ils bénéficient d’ailleurs d’un soutien particulier.

Au lendemain de la catastrophe du Mont-Sainte-Odile en 1992, l’unité de gendarmerie d’identification des victimes de catastrophe (UGIVC) (4) a été créée au sein de l’IRCGN. Cette unité est composée de personnels des divers départements de l’Institut renforcés par un vivier de réservistes, médecins et dentistes. Elle intervient en permanence, sur réquisition judiciaire, et est projetable en deux heures. Pour protéger le personnel, l’équipe intervenante est divisée en deux entités, ante et post mortem, afin que les militaires ne créent pas de liens entre un corps et la souffrance d’une famille. Cette cellule utilise un logiciel qui, après intégration des données ante et post mortem recueillies propose des « candidats » à l’identification.

L’IRCGN alimente le FNAEG dont la montée en puissance a imposé l’augmentation des capacités d’analyse des empreintes génétiques et la création d’une unité de génotypage de masse, en fonction depuis le 1er septembre 2007. La gendarmerie contribue à hauteur de 68 000 profils annuels à l’enrichissement du fichier (5). Le service central d’analyses génétiques devrait être prochainement installé dans de nouveaux locaux proches du service central de préservation des prélèvements biologiques, à Pontoise.

2. La réforme du GIGN répond à l’évolution des menaces

a) Le « nouveau GIGN »

La gendarmerie a créé successivement le groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) en 1974, le détachement gendarmerie du groupe de sécurité de la Présidence de la République (GSPR) en 1983 et l'escadron parachutiste de la gendarmerie nationale (EPIGN) en 1984. Ces unités étaient, avec le groupe d’instruction et de sécurité des activités (GISA), regroupées dans une seule entité, le groupement de sécurité et d'intervention de la gendarmerie nationale (GSIGN), fortement engagé dans la lutte contre le terrorisme et le grand banditisme ainsi que dans la protection de personnalités et des intérêts nationaux dans un environnement fortement dégradé en France comme à l'étranger.

Les prises d’otages massives, l’augmentation de la menace terroriste et les modifications de ses moyens et modes opératoires comme ceux du grand banditisme ont conduit la gendarmerie à entamer une réflexion globale sur l’intervention spécialisée. En réorganisant, le 1er septembre 2007, le GSIGN en un « nouveau GIGN », la gendarmerie adapte son dispositif d’élite à l’évolution des menaces et se donne les moyens de disposer d'un outil cohérent, adapté et capable d’anticiper, déterminant et décisif pour la gestion des situations d'exception. Elle confirme ainsi son positionnement d'acteur majeur tant au plan national qu'international. La subordination directe du GIGN à la direction générale de la gendarmerie permet une chaîne de commandement et de décision la plus courte possible.

Quatre forces - intervention, sécurité-protection, observation-recherche et appui - susceptibles de s'appuyer ou de se renforcer mutuellement regroupent les savoir-faire existants. Cette organisation permet de disposer d'une ressource conséquente, très modulable et sans redondance. Avec 378 militaires, l’effectif du GIGN permet d'envisager la réalisation d'un large champ de missions, en France comme à l’étranger, y compris en milieu pollué. La primo-affectation de tous les gendarmes recrutés au Groupe sera désormais l’intervention ; maîtrisant ainsi tous cette compétence, l’ensemble du personnel pourra être engagé sur une crise de grande ampleur. Le commandant du GIGN dispose d'un état-major opérationnel disponible en permanence et responsable de la conception et de la mise en oeuvre des moyens ; projetable, cet état-major arme, selon le niveau d'engagement, un poste de commandement au plus près de la crise.

Utilisant toutes les compétences et expertises, le GIGN peut mener, dans une planification ou dans des délais contraints, plusieurs missions : la négociation ou l'appui à la négociation, l'intervention d'urgence, l'appui aux enquêteurs en combinant l'observation, la recherche et l'intervention si besoin et, enfin, la projection d'un détachement opérationnel de protection rapprochée en France ou dans des pays dont le niveau de sécurité est fortement dégradé et menace les intérêts nationaux. Il est engagé dans une dizaine de missions par semaine. Les missions d’intervention représentent entre 60 et 70 opérations par an, plus d’une cinquantaine relevant de la police judiciaire – interpellations – les autres concernant la réduction de forcenés ou des prises d’otages. Il est également fréquemment engagé au profit des sections de recherches.

Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, le GIGN participe aux actions nationales ou internationales et développe des synergies avec les forces extérieures à la gendarmerie comme le commandement des opérations spéciales, avec lequel il travaille sur l’interopérabilité, ou le groupe Atlas (6).

Le contrat opérationnel du GIGN fixe différents niveaux d’alerte. Le délai de réaction du détachement d’intervention d’urgence de 25 hommes est de 30 minutes s’il part en voiture, une heure si le transport est assuré par hélicoptères et de deux heures s’il recourt à des moyens lourds de l’armée de l’air. Le délai d’alerte du détachement de circonstance est de deux heures et celui du détachement d’observation et de recherches est de quatre heures. Pour une projection hors du territoire métropolitain ou outre-mer, le délai est de 12 à 24 heures selon la destination.

Des opérations immobilières sont actuellement en cours. Elles visent à regrouper d’ici la fin de l’année 2009 l'ensemble des personnels et des structures technico-opérationnelles à côté de la caserne actuelle. Ce regroupement sur une même emprise est essentiel au bon fonctionnement du GIGN et participera à l’unité du groupe. Une première tranche de travaux sera achevée fin 2007 ; elle porte sur l’installation d’une salle opérationnelle et des locaux des commandements de l’unité et des différentes forces. Le rapporteur veillera à ce que la deuxième tranche soit achevée dans les délais annoncés.

Certaines règles de gestion doivent encore faire l’objet d’une réflexion approfondie. Ainsi, l’anonymisation des achats doit être favorisé au maximum afin de préserver l’anonymat des personnels, protégé par décret, et d’éviter les recoupements sur les approvisionnements pouvant conduire à l’acquisition de renseignements sur les moyens dont dispose l’unité ou ses actions.

b) le groupe interarmées d’hélicoptères (GIH)

Pour garantir l’aéromobilité du GIGN, celui-ci bénéficie, depuis le 1er février 2006, du concours d'une unité d'hélicoptères de manœuvre implantée à Villacoublay, le groupe interarmées d’hélicoptères (GIH). Organisme à vocation interarmées de l’armée de terre rattaché au détachement de l’aviation légère de l’armée de terre des opérations spéciales, implanté sur une base de l’armée de l’air et travaillant au profit des gendarmes, cette unité est un véritable laboratoire de l’interarmisation. Elle en relève tous les défis et fournit un travail important d’harmonisation des réglementations et des procédures.

Initialement composé de 4 appareils, ce GIH est monté en puissance à 6 hélicoptères en provenance de l'armée de terre (4) et de l'armée de l'air (2) et comprend aujourd’hui 8 Puma, dont 2 sont dédiés aux entraînements. S’agissant d’appareils vieillissants, le taux de disponibilité est parfois insuffisant ; ainsi, il n’était que de 64 % entre janvier et mai 2007 imposant d’utiliser les machines d’alerte pour les entraînements. Il est armé par 41 personnels, les deux tiers provenant de l’armée de terre, les autres de l’armée de l’air. Ces personnels étant soumis à des contraintes de réactivité fortes liées à celles du GIGN, les armées s’efforcent de faciliter leur logement à proximité de la base aérienne. Utilisés soit dans le cadre d’un concours, soit sur réquisition de l’autorité administrative ou judiciaire, l’emploi de ces moyens se décline en entraînement opérationnel du GIGN, soutien avec projection de personnels sans engagement des vecteurs dans l’intervention ou appui avec projection de personnels (en environnement sécurisé ou non) s’accompagnant d’un engagement des appareils en appui renseignement ou feu. Depuis sa mise en œuvre, le GIH a acquis 80 % des savoir-faire indispensables à son action avec le GIGN. Il dispose de capacités de survol des zones maritimes, d’évolution en milieu contaminé et de dispositifs d’autoprotection mais rencontre des difficultés pour s’équiper convenablement en jumelles de vision nocturne.

La contrainte de projection est fixée à 25 hommes et 2,2 tonnes de fret dans un rayon de 400 kilomètres avec un délai d’alerte d’une heure. Elle nécessite la disponibilité opérationnelle permanente de 4 aéronefs. Sur un contrat de 600 heures de vol, le GIGN en a utilisé 555 en entraînement et en missions opérationnelles.

Depuis sa création, le GIH a participé à 7 engagements opérationnels. Son périmètre d’emploi pourrait être élargi. Il serait ainsi utile d’engager des hélicoptères dans des opérations de police judiciaire comme la poursuite aérienne de raids à grande vitesse de trafiquants de stupéfiants (« go-fast »).

C. MALGRÉ DE RÉCENTES AMÉLIORATIONS, LE SOUTIEN SANITAIRE RESTE PERFECTIBLE

Compte tenu des traumatismes auxquels ils peuvent être exposés, les gendarmes doivent bénéficier d’un soutien sanitaire convenable.

1. L’organisation, les moyens et les caractéristiques du soutien sanitaire de la gendarmerie

Le soutien santé de la gendarmerie date d’environ 35 ans. Initialement assuré par les services médicaux d’unité de l’armée de terre, il s’est progressivement individualisé avec la mise en place d'un médecin par légion de gendarmerie complété de médecins du contingent. Les droits budgétaires en personnels du service de santé des armées (SSA) calculés en fonction d’un effectif de personnels à soutenir par médecin, établi à 635 pour la gendarmerie, ont fixé l’effectif théorique initial à 180 médecins. Un ajustement a été opéré en 2002 et cette cible réduite à 159 médecins métropolitains. Une nouvelle instruction portant sur l’organisation et le fonctionnement du service de santé est en cours de finalisation. Chaque commandant de région ou groupement de gendarmerie disposera d’un médecin référent, permettant ainsi une meilleure coordination entre l’unité sanitaire et le commandement.

Jusque dans les années 2000, les infirmiers relevaient de chaque armée mais le milieu de l’infirmerie militaire ayant évolué pour s’adapter au civil, le corps d’infirmier de la gendarmerie a été voué à s’éteindre. Aujourd’hui, tous les infirmiers de la gendarmerie sont en principe des militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA). La maquette d’effectifs établie en 2005 fixe à 144 le nombre de MITHA mais cette donnée n’a qu’un caractère indicatif et peut varier annuellement d’un commun accord entre le SSA et la gendarmerie.

Les gendarmes assument des charges de travail importantes et peuvent être confrontés à des situations difficiles ; leurs traumatismes psychologiques doivent être suivis. L’intervention des psychologues cliniciennes de la gendarmerie ne donne pas lieu à l’établissement d’un rapport écrit. Le commandement ou le médecin peuvent les solliciter. Une commission nationale de prévention regroupant des gendarmes, des psychologues et des médecins a été mise en place ; elle est relayée, à l’échelon des régions, par les comités locaux de prévention. L’objectif est de mettre en place un psychologue par région ; une expérimentation est actuellement menée à Metz, Rennes et Bordeaux.

La gendarmerie dispose également de vétérinaires. Leurs missions revêtent des réalités très variées : au sein de la garde républicaine ils participent au choix des chevaux et assument également tout ce qui concerne la santé équine. Un vétérinaire est également affecté au centre de formation cynophile de Gramat. Enfin, ils contrôlent les cercles mixtes de la gendarmerie et jouent un rôle majeur en matière d’hygiène en OPEX.

Le soutien sanitaire de la gendarmerie est organisé en deux types d’unités :

- les centres médicaux régionaux de gendarmerie, au nombre de 22, auxquels il convient d’ajouter 28 centres médicaux complémentaires et ceux de la direction générale de la gendarmerie (DGGN), de son Centre administratif (CAGN) du Blanc et de son centre technique (CTGN) de Rosny. 6 unités sont également déployées outre-mer ;

- les centres médicaux des écoles, soit 13 unités. Le Centre national d’instruction nautique de la gendarmerie (CNING), dont les besoins sont particuliers, relève de cette catégorie.

Afin de conserver la maîtrise de ses dépenses de fourniture de santé, la gendarmerie a initialement retenu un mode de fonctionnement particulier et équipé directement ses centres médicaux ; cette situation engendre aujourd’hui quelques difficultés de maintenance des matériels. Des transferts budgétaires, identiques à ceux pratiqués par les armées (7), vont désormais être effectués et chaque service médical d’unité (SMU) disposera d’un compte en valeur ouvert auprès des établissements de ravitaillement sanitaire pour l’achat des médicaments et des petits équipements médicaux. La somme versée par la DGGN au SSA au titre du compte en valeur global au profit des centres médicaux est de 1,5 million d'euros pour l'année 2007.

L’activité du SSA au sein de la gendarmerie se décline en trois domaines :

- La médecine d’aptitude pratiquée lors du recrutement, dans le cadre de la visite médicale initiale des postulants. Elle examine à ce titre environ 10 000 candidats tous les ans. L’importante contrainte physique et psychologique s’exerçant sur les gendarmes est toujours prise en compte lors de ces visites.

- La médecine du travail comprend les visites systématiques annuelles et celles effectuées lors du renouvellement de contrat des gendarmes adjoints volontaires. Aujourd’hui, dans chaque région de gendarmerie, un médecin suit, dans ce cadre, en moyenne 1 500 gendarmes. À Grenoble, les deux médecins du service médical suivent 1 900 gendarmes, soit le personnel du groupement de l’Isère et de deux escadrons de gendarmerie mobile, ainsi que 300 réservistes (8). Ils examinent également les candidats aux écoles militaires et les postulants de la gendarmerie relevant de leur secteur, soit entre 250 et 300 personnes par an.

- La médecine de soins. Les centres médicaux de la gendarmerie ne disposent plus suffisamment de temps pour assurer une médecine de soins auprès des familles ; toutefois, le plus souvent, les services médicaux implantés dans un escadron assurent cette tâche. Les personnels retraités bénéficient d’un suivi sanitaire par le service de santé quand ils sont atteints d’affections ou de maladies contractées dans le cadre du service.

Un soutien sanitaire spécialisé est assuré auprès d’unités particulières. L’extrême pression psychologique subie par certains militaires a conduit à l’instauration d’un suivi spécifique Ainsi, pour les militaires du STRJD chargés de la lutte contre la pédo-pornographie sur l’Internet une journée est réservée tous les deux ou trois mois aux travaux de groupe et aux entretiens individuels prévus avec la cellule de psychologues de la direction générale de la gendarmerie. De même, des réunions régulières sont programmées pour les gendarmes de l’unité d’identification des victimes de catastrophes de l’IRCGN ; lors d’interventions lourdes ou si besoin est, un soutien médico-psychologique supplémentaire est mis en œuvre. Enfin, aucune intervention du GIGN ne s’effectuant sans un soutien médical, une structure lui est dédiée ; ses personnels sont soumis aux mêmes contraintes d’alerte.

2. L’adaptation aux besoins doit être poursuivie

Le nombre de médecins servant au sein de la gendarmerie reste insuffisant. Sur un effectif théorique de 159 médecins, elle ne compte que 119 médecins au 20 août 2007, présentant ainsi, au regard des objectifs fixés, le déficit le plus important, établi à 25,2 %(9). La comparaison du nombre de personnels soutenus par médecin révèle des disparités très fortes : alors que la gendarmerie dispose d’un médecin pour 830 personnels et l’armée de l’air d’un médecin pour 519 militaires, l’armée de terre et la marine bénéficient d’un soutien plus étoffé avec respectivement 346 et 303 militaires par médecin. En revanche, aucune difficulté particulière n’a été signalée au rapporteur s’agissant des infirmiers dont l’effectif s’élève à 141 MITHA à la même date.

Compte tenu des impératifs liés à la projection, il paraît difficile d’opérer des transferts d’effectifs supplémentaires vers la gendarmerie au détriment des armées. C’est pourquoi ont été mises en place des solutions fonctionnelles comme le regroupement des médecins dans les centres médicaux principaux avec des détachements, autant que de besoin, vers des centres médicaux annexes, ou encore la prise en charge, selon une logique géographique, d’une partie des activités par des médecins servant au sein des trois armées ou enfin le recours à des médecins de réserve.

La mutualisation des services médicaux permet de gagner en efficience et en qualité du soutien. Cette démarche entreprise depuis 2003 outre-mer a fait la preuve de son efficacité. Un centre médical interarmées (CMIA) sera bientôt créé en Guyane. Regroupant tous les services médicaux des unités déployées sur Cayenne, ce CMIA donnera plus de souplesse dans la mise en œuvre du soutien sanitaire et permettra ainsi une meilleure réponse opérationnelle. Aujourd’hui, les moyens actuels ne permettant pas d’assurer le soutien de tous les déploiements de la gendarmerie, notamment les opérations anaconda, avec un médecin, il est en général confié à un personnel secouriste.

Bien que l’organisation du soutien sanitaire de la gendarmerie soit compliquée par la répartition des effectifs sur le territoire national, sa rationalisation doit être poursuivie. L’organisation du fonctionnement des SMU fondée sur la proximité géographique plutôt que sur l’organisation de l’institution permet une meilleure répartition de la charge sur les différents services. Une déclinaison de ce principe est mise en œuvre en Isère : sur 3 escadrons de gendarmerie mobile, deux sont suivis par le service médical de Grenoble, le 3e, situé à Pontcharra, l’étant par celui de Chambéry dont il est plus proche. À Antibes, le soutien des 1 400 gendarmes départementaux et mobiles relevant du secteur géographique de compétence du centre médical du CNING devrait être transféré sur le centre médical de l’armée de l’air à Roquebrune-Cap Martin, le centre médical d’Antibes conservant 150 dossiers. Cette mesure est indispensable. En effet, certaines missions, en particulier en milieu subaquatique, imposent un dimensionnement et une technicité particulière des cellules médicales répondant aux critères de la directive du ministère de la défense relative au soutien sanitaire des activités à risque dans les armées (10). Le respect de la réglementation se traduit par une forte mobilisation des personnels de santé au profit d’effectifs réduits pratiquant les activités à risque répertoriées.

Outre le soutien classique, les moyens alloués au GIGN couvrent les nécessités opérationnelles liées aux interventions. Ils doivent également permettre de faire face à un besoin aléatoire mais réel et essentiel dans le cadre de missions de sécurisation d’emprises françaises à l’étranger : le soutien d’une équipe hors du territoire. Il apparaît disproportionné de mobiliser une antenne médicale permanente lorsqu’un détachement est déployé mais il reste impératif qu’un médecin soit dépêché sur le lieu de la mission pour définir techniquement les conditions du soutien sanitaire. Ce type de tâche impose que ce médecin puisse consacrer plusieurs jours à établir les procédures de secours et les partenariats nécessaires avec les moyens médicaux locaux.

Les services médicaux d’unité rencontrent des difficultés matérielles qui perturbent le bon fonctionnement du service. Ainsi, faute de personnel administratif dédié, le secrétariat médical est assuré par des gendarmes adjoints volontaires non formés à ces fonctions et qui ne peuvent être fidélisés dans ces activités puisque leur contrat est limité à 1 an renouvelable 4 fois. Ces tâches pourraient utilement être confiées à des personnels civils qualifiés, non mutables et non soumis aux contraintes liées aux OPEX. Outre ces perturbations fonctionnelles, les services manquent régulièrement de fournitures de base. Ainsi, depuis deux ans, les médecins du service médical de Grenoble pallient le manque d’ordonnances auto-duplicantes par des photocopies. Pour ce type de petites fournitures, l’achat dans le cadre de marchés nationaux n’est pas pertinent. Le rapporteur préconise d’accorder aux unités une marge d’autonomie en confiant aux groupements un budget de fonctionnement pour les petits achats. Outre une plus grande réactivité, cette solution permettrait également une responsabilisation accrue.

Certaines unités rencontrent des difficultés pour fidéliser leurs infirmiers : ceux-ci, relevant du SSA, ne peuvent prétendre, sauf dispositions particulières, à un logement pour nécessité absolue de service et doivent, pour répondre à leurs contraintes opérationnelles, se loger à leurs frais dans des conditions particulièrement onéreuses compte tenu de l’état du marché de l’immobilier du lieu où ils sont contraints de résider. Le niveau de leur solde est généralement insuffisant pour leur assurer un niveau de vie juste convenable et cette situation les contraint bien souvent à abréger dès que possible leur séjour dans ces unités. Or, l’obligation qu’ont ces infirmiers de détenir des compétences particulières complique le recrutement. En effet, certains, affectés au GIGN, sont parachutistes brevetés par l’école des troupes aéroportées de Pau et d’autres, au CNING, sont qualifiés soit infirmier de sécurité de la plongée, soit infirmier plongeur hyperbariste.

D. DES MESURES VOLONTARISTES SONT NÉCESSAIRES POUR RATIONALISER LES MISSIONS DE TRANSFÈREMENTS ET D’EXTRACTIONS

1. Les missions de transfèrements et d’extractions

Les conduites sous escorte sont une des missions historiques de la gendarmerie. La charge des transfèrements et extractions (11) incombe aujourd’hui à la force de sécurité responsable de la zone d’implantation de la maison d’arrêt. Les prisons les plus anciennes sont en général situées en centre ville et relèvent donc, pour la plupart, de la police. Par contre, l’implantation des nouveaux établissements pénitentiaires s’effectue le plus souvent en périphérie, en zone gendarmerie. Cette situation génère un accroissement de la charge lui incombant.

Les opérations de transfèrements et d’extractions, auxquelles il convient d’ajouter les escortes d’étrangers en situation irrégulière (ESI), sont très coûteuses en personnel et en temps. Une circulaire interne de la gendarmerie (12) détermine les conditions d’exécution de ces missions. Ainsi, toute escorte mobilise trois militaires pour assurer la sécurité de l’individu, celle du public et, s’il y a lieu, la présentation devant le magistrat ; l’un d’entre eux remplit les fonctions de chauffeur. En Isère, les deux maisons d’arrêt, situées à Saint-Quentin-Fallavier et Varces (13) relèvent de la compétence de la gendarmerie et pèsent particulièrement sur deux compagnies, celle de Bourgoin-Jallieu et celle de Grenoble. La première partage la mission avec deux compagnies voisines au prorata de leurs effectifs ; ainsi, l’unité de Bourgoin supporte 50 % de la charge tandis que celle de Vienne en assume 30 %, les 20 % restant incombant à la compagnie de La Tour du Pin. Elles effectuent annuellement respectivement 500, 320 et 200 escortes. Sur ces trois compagnies, des travaux réalisés il y a deux ans ont permis d’évaluer à 15 gendarmes par jour – soit 5 escortes - l’effectif maximal de militaires susceptibles d’être engagés sur ces missions sans obérer les capacités opérationnelles de ces unités ; ce potentiel correspond à 15 % de l’effectif disponible engagé quotidiennement. La compagnie de Grenoble a relevé 2 855 jours-gendarmes consacrés à cette mission sur l’année ; elle y dédie un effectif quotidien de 13 militaires renforcés si besoin par des personnels des compagnies de La Mûre, Saint-Marcellin ou Meylan. Les destinations ne se limitent pas aux juridictions compétentes ou lieux de rétention administrative les plus proches. À titre d’exemple, la compagnie de Bourgoin assure fréquemment des missions sur Lyon, Vienne ou encore Valence. Lorsque le centre de rétention administrative de Saint-Exupéry ne dispose plus de places, les étrangers en situation irrégulière sont conduits vers d’autres centres et il arrive que les gendarmes isérois assurent des escortes jusqu’à Toulouse ou encore Lille.

À compter de 2008, la part des escortes d’ESI et celles liées à l’hospitalisation dans les unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) (14) diminueront. Aujourd’hui, le service interpellateur conserve la charge des mouvements des personnes placées en CRA quelque soit l’établissement qui les accueille, ce qui impose parfois des mouvements importants à travers la France pour une simple présentation. À compter du 1er janvier 2008, les CRA et les services les gérant seront chargés des escortes. Le rapporteur se félicite de ce progrès mais suggère d’étudier dans quelle mesure il pourrait être recouru au bracelet électronique pour suivre les ESI et, pour ceux placés en CRA, aux moyens de visioconférence pour les procédures. Les escortes vers les UHSI sont des transfèrements administratifs dont la charge devait incomber normalement à l’administration pénitentiaire. En 2006, un arbitrage interministériel a prévu que l'administration pénitentiaire reprenne à son compte l'ensemble des missions UHSI. Pour l'année 2007, les charges corrélatives aux UHSI de Marseille et Toulouse ont déjà été transférées. L'année 2008 concernera les sites de Paris et de Lille, l'année 2009 ceux de Nancy, Lyon, Bordeaux et Rennes.

Une diminution de 3,7 % du nombre d’opérations de transfèrements et extractions a été enregistrée en 2006 : 119 349 mouvements ont été comptabilisés contre 123 924 en 2005. La gendarmerie y a consacré 1 813 348 heures/gendarme contre 1 938 746 en 2005, soit une diminution de 6,47 %. Les escortes administratives représentent 8,6 % de l’ensemble des opérations. Ces résultats et les perspectives favorables concernant l’évolution des missions liées à l’hospitalisation en UHSI constituent un élément encourageant mais insuffisant. Toutes les voies permettant de limiter cette mission afin de redéployer les gendarmes sur des missions de sécurité publique générale doivent être explorées.

2. Les incohérences et dysfonctionnement de cette charge et leur impact sur l’organisation du service de la gendarmerie

Les statistiques d’activité remises au rapporteur montrent que la charge est irrégulièrement répartie sur l’année : des pics d’activité sont constatés en mars, juin et, dans une moindre mesure, en novembre. La gendarmerie n’a aucune prise sur l’augmentation des charges de transfèrements et extractions. En outre, les magistrats ne transmettant aucun élément relatif à leur programme de convocation, les demandes ne peuvent être préalablement prises en compte et les effectifs prévus en conséquence. L’absence de toute planification ne permet aucune optimisation.

Les pertes de temps signalées au rapporteur sont inacceptables. L’absence de rationalisation des transfèrements et extractions conduit à des amplifications inadmissibles de la charge lorsque les magistrats demandent la présentation de plusieurs détenus à autant d’horaires différents dans une même journée entraînant, de fait, une mobilisation importante. Il est en outre impossible de tenir compte de la durée de ces missions pour l’organisation du service : parfois longue, lorsqu’il s’agit d’une comparution immédiate, elle peut être limitée à 5 ou 6 heures pour une présentation mais reste très variable. De fait, les gendarmes affectés à cette tâche sont considérés comme non disponibles pour d’autres missions le même jour. Le non-respect de leurs horaires de convocation par les magistrats entraîne un allongement indu de la durée de nombreuses extractions. De même, la multiplication des déplacements pour présenter des prévenus pour des notifications ne nécessitant qu’une dizaine de minutes est très regrettable.

Le GIGN est également sollicité pour des escortes de détenus particulièrement dangereux. Sa charge s’est allégée depuis la mise en œuvre des pelotons d’intervention interrégionaux de la gendarmerie (PI2G). Il a toutefois indiqué au rapporteur l’importance des moyens mobilisés, le temps nécessaire et les risques encourus pour une présentation formelle ou une notification, qui pourraient être effectuées sans un déploiement de force disproportionné au regard de l’acte judiciaire qui l’a motivé.

3. L’efficacité de cette mission doit impérativement être améliorée

5 000 à 6 000 personnes, dont 1 000 gendarmes, sont mobilisées quotidiennement à temps plein sur ces tâches. Quelle que soit la solution retenue, le rapporteur estime urgent de desserrer la contrainte liée aux transfèrements et extractions pesant sur la gendarmerie. L’arme est confrontée au manque de souplesse de l’autorité judiciaire qui se comporte comme si elle disposait d’un droit de tirage illimité sur le potentiel de la gendarmerie et refuse, au nom de son indépendance, de rendre compte de l’emploi des moyens mis à sa disposition. Cette situation n’est plus supportable.

La mise en œuvre de moyens de visioconférence permettrait de limiter les mouvements de détenus. Cet outil n’en est encore qu’au stade expérimental : une expérimentation a débuté depuis le 16 janvier 2006 (15) dans le ressort de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Nancy entre les juridictions équipées et les établissements pénitentiaires de Metz et de Nancy. À la suite d'un rapport, de juin 2006, de la mission interministérielle d'audit sur l'utilisation de la visioconférence dans les services judiciaires, le ministère de la justice a décidé de relancer les travaux communs avec la police et la gendarmerie pour une utilisation plus intensive de cette visioconférence. À compter d'octobre 2007, une expérimentation complémentaire, plus significative que la précédente, devrait être menée et intégrer, outre le recours à la visioconférence entre juridictions et établissements pénitentiaires, l'utilisation de cette technique également entre les services de police ou unités de gendarmerie et les juridictions. Le rapporteur soutient cette démarche mais constate que la lenteur de la mise en œuvre de ce moyen technologique moderne se heurte à des habitudes et mentalités qu’il souhaite voir évoluer.

Plutôt que de déplacer de nombreux détenus, il apparaît plus rationnel d’organiser la venue d’un magistrat à la maison d’arrêt. Le rapporteur propose de remédier à leur refus d’aller au justiciable par l’aménagement, à proximité de la prison, d’un local adapté à la présentation des détenus. Couplée avec les possibilités ouvertes par les articles 664, 712 et D. 298 du code de procédure pénale permettant aux magistrats initialement saisis de déléguer un acte de procédure ou de transférer l’ensemble d’une procédure aux juridictions du lieu de détention de la personne, cette mesure permettrait de limiter les mouvements de détenus. En Isère, la gendarmerie serait prête à assumer l’escorte du magistrat jusqu’au local adapté.

Il est impératif que l’autorité judiciaire prenne conscience de la charge exorbitante que représentent les transfèrements et extractions et que soient mises en œuvre des mesures de bonne gestion. Le simple respect d’un préavis pour toute demande de mouvement d’un détenu permettrait d’optimiser l’organisation du service. Le traitement des comparutions escortées prioritairement aux comparutions libres serait de nature à limiter la durée de mobilisation des gendarmes. Une meilleure organisation de ces missions, par des efforts de mutualisation ou l’instauration de jours de convocation, pourrait être confiée à un bureau spécifique. Enfin, le rapporteur suggère de confier aux magistrats la responsabilité des transfèrements en leur attribuant un plafond de dépenses.

Il se félicite qu’en juillet 2007, le ministre de l'intérieur ait demandé au ministre de la justice de conduire conjointement une étude sur les conditions dans lesquelles les mesures de transfèrements judiciaires, actuellement assurées par la police et la gendarmerie, pourraient être confiées au ministère de la justice et suivra la progression du dossier avec attention.

II. —  UN BUDGET EN RÉGRESSION

Hors fonds de concours et autorisations de dépenses prévisionnelles, les dotations inscrites dans le projet de loi de finances, pour le programme gendarmerie, s’élèvent à 7,709 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 7,465 milliards d’euros en crédits de paiement. Les crédits ouverts dans la loi de finance initiale pour 2007 s’élevaient respectivement à 7,909 et 7,509 milliards d’euros. Les dotations diminuent donc de 2,53 % pour les autorisations d’engagement et de 0,59 % pour les crédits de paiement. En 2007, la progression des dotations en autorisations d’engagement s’était élevée à 6,18 % et à 2,92 % pour les crédits de paiement. Pour le budget 2008, l’évolution globale enregistrée par la mission défense est de + 0,43 % pour les autorisations d’engagement et de + 1,46 % pour les crédits de paiement. La gendarmerie participe à la politique générale de maîtrise des dépenses de l’État mais la baisse constatée des crédits est préoccupante. Le tableau ci-après retrace leur ventilation par action.

Ventilation des crédits par action

(en millions d’euros)

Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ordre et sécurité publics

2 766

2 766

Sécurité routière

741

741

Police judiciaire et concours à la justice

1 531

1 531

Commandement, ressources humaines et logistique

2 542

2 298

Exercice des missions militaires

129

129

Total

7 709

7 465

Source : ministère du budget.

A. MALGRÉ UNE RÉDUCTION SIGNIFICATIVE DES EFFECTIFS, LES CRÉDITS DESTINÉS AU PERSONNEL PROGRESSENT

1. La gendarmerie participe à l’effort de réduction des effectifs

a) L’évolution globale des effectifs

L’examen de l’évolution des effectifs évaluée en ETPT (16) fait apparaître pour 2008 une régression de 965 emplois, soit une réduction de près de 1 % du personnel. La gendarmerie perdra 666 sous-officiers, 331 volontaires, 43 ouvriers d’État et 8 personnels civils de catégorie A. À l’inverse, elle comptera 29 officiers, 46 personnels civils de catégorie C et 8 de catégorie B supplémentaires. Alors que 475 emplois, résultant de l’extension en année pleine des créations d’emplois réalisées au titre de la LOPSI en 2007, sont consolidés, 512 postes, 10 civils et 502 militaires, sont supprimés au titre du non renouvellement d’un départ à la retraite sur deux pour 475 d’entre eux, la suppression des 37 autres postes résultant d’un ajustement aux besoins. En outre, 29 transferts sont opérés vers deux autres programmes : 27 vers le programme 178 « préparation et emploi des forces » et 2 vers le programme 212 « soutien de la politique de défense ». Enfin, un ajustement technique de 900 postes en moins est réalisé sans incidence budgétaire, ces emplois étant vacants et sans masse salariale associée.

Le plafond ministériel d’emploi autorisé pour 2008 est de 101 136 ETPT, répartis en 99 208 personnels militaires et 1 928 personnels civils. Le rapporteur regrette que les informations dont il dispose ne permettent pas de connaître la répartition par action des personnels en fonction de leur statut, militaire ou civil, ou de leur catégorie, officier, sous-officier ou volontaire. Le tableau suivant présente la répartition globale des emplois entre les cinq actions du programme.

Répartition globale des emplois

Actions

2007

2008

Variation

Ordre et sécurité publics

46 123

47 051

+ 928

Sécurité routière

12 592

12 364

- 228

Police judiciaire et concours à la justice

24 628

23 272

- 1 356

Commandement, ressources humaines et logistique

16 786

16 453

- 333

Exercice des missions militaires

1 972

1 996

+ 24

Total programme 152

102 101

101 136

- 965

Source : ministère du budget.

La quatrième annuité du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) se traduit, pour 2008, par la transformation de 500 postes de sous-officiers en postes d’officiers et le repyramidage de 593 postes de sous-officiers subalternes en sous-officiers supérieurs. Ainsi, les effectifs militaires se répartiront en 2008 en 6,8 % d’officiers, 78,7 % de sous-officiers et 14,5 % de gendarmes adjoints volontaires. À la fin de l’année 2008, le bilan d’exécution du PAGRE sera le suivant.

Bilan de l’exécution du PAGRE

 

2005

2006

2007

2008

Objectif 2012

Nombre de postes d’officier créés

1 000

750

750

500

5 000

Taux de réalisation/objectif

20 %

35 %

50 %

60 %

 

Nombre de postes de sous-officier repyramidés

1 208

906

634

593

6 051

Taux de réalisation/objectif

20 %

35 %

45 %

55 %

 

Source : ministère de la défense.

L’effectif moyen réalisé des gendarmes adjoints volontaires du programme 152 ne devrait pas connaître d’évolution majeure. 40 % des élèves gendarmes étant issus des rangs des volontaires, les besoins en recrutement de ces personnels sont étroitement liés au volume de recrutement de sous-officiers et à son cadencement. En 2006, 1 625 volontaires ont été recrutés en qualité de sous-officier de gendarmerie, soit 40,5 % des 4 017 élèves gendarmes incorporés. Compte tenu de ces éléments et de la durée limitée des contrats, les besoins de recrutement pour 2008 sont évalués à 6 800 civils, âgés de 18 à 26 ans. Ces projections sont proches des prévisions établies pour 2007 estimant à environ 6 850 volontaires, dont 113 aspirants de gendarmerie issus du volontariat, les besoins en recrutement.

b) Une moindre progression de la réserve

Afin d’atteindre l’objectif de 40 000 réservistes d’ici 2012, la croissance des effectifs de la réserve devrait se poursuivre en 2008. À la fin de l’année 2006, 22 503 engagements à servir dans la réserve avaient été souscrits ; ce résultat est supérieur à l’objectif fixé de 22 000 réservistes. La cible 2007 est fixée à 25 000 engagements. Au 30 juin 2007, 23 554 engagements étaient souscrits, soit une progression de 1 051 personnes par rapport à la fin de l’année 2006, correspondant à 42 % des 2 497 contrats d’engagement supplémentaires nécessaires sur l’année. L’objectif fixé pour la fin de l’année 2008 est de 28 000 réservistes. Il est peu vraisemblable qu’il soit atteint, rompant ainsi avec la dynamique de recrutement des réservistes constatée jusqu’ici, puisque sur les 3 000 nouveaux engagements initialement prévus, seulement 1 000 à 2 000 devraient être réalisés. Alors que les dotations budgétaires destinées aux rémunérations des réservistes s’établissaient à 40,8 millions d’euros en 2006, elles sont de 48,1 millions d’euros en 2007, soit 7,3 millions d’euros supplémentaires, permettant de porter de 22 000 à 25 000 le nombre de réservistes. Pour 2008, le projet de loi de finances limite les crédits de soldes et indemnités des réservistes à 49,2 millions d’euros, soit une progression de 1,1 million d’euros ne permettant pas de financer 3000 nouveaux recrutements. En outre, la gendarmerie doit consentir des efforts financiers accrus en faveur de la formation initiale et continue des réservistes. Cet investissement permet de valoriser les aptitudes techniques de ces personnels. La nouvelle qualification d’agent de police judicaire adjoint (APJA) accordée par la loi aux réservistes de la gendarmerie a conduit celle-ci à mettre en place un module spécifique de formation qui sera généralisé à compter de la fin de l'année 2007.

Le rapporteur regrette ce ralentissement du développement de la réserve. Elle constitue en effet un renfort appréciable et indispensable à la gendarmerie. En 2006 et 2007, les réservistes de la gendarmerie ont été engagés sur diverses missions. Le renforcement des unités territoriales, en particulier en période estivale, mobilise plusieurs centaines d’entre eux. Ils sont également sollicités pour la sécurisation de zones sensibles lors d’évènements comme le salon du Bourget, pour lequel un escadron de réserve de gendarmerie mobile de 60 personnels a été mobilisé, ou la protection de points sensibles de circonstance à l’occasion de manifestations comme le Tour de France cycliste, le Grand Prix de formule 1 ou les 24 heures du Mans. Ils prennent également en charge des gardes statiques en substitution d’escadrons de gendarmerie mobile afin de libérer ces militaires pour d’autres misions. Enfin, ils augmentent les capacités de renseignement et d’intervention des unités d’active, notamment en matière d’intelligence économique territoriale. La durée moyenne d’activité poursuit sa progression et atteint 22,94 jours en 2006. L’effort reste cependant inégalement réparti : la moyenne est de 21,52 jours pour les officiers, 28,89 jours pour les sous-officiers, et 19,06 jours pour les militaires du rang. Le tableau suivant retrace l’évolution des effectifs de la réserve et de la durée moyenne d’activité depuis 2004.

Évolution des effectifs de la réserve et de la durée moyenne d’activité

 

2004

2005

2006

 

Effectifs

Durée d'activité

(en jours)

Effectifs

Durée d'activité

(en jours)

Effectifs

Durée d'activité

(en jours)

Officiers

1 467

14,83

1 467

17,75

1 549

21,52

Sous-officiers

6 243

24,01

7 427

26,41

8 497

28,89

Militaires du rang

8 720

16,26

10 401

18,58

12 457

19,06

Total effectif

16 430

 

19 295

 

22 503

 

Durée moyenne d'activité

 

19,08

 

21,53

 

22,94

Source : ministère de la défense.

2. Les dépenses de personnel

Les crédits demandés pour 2008 au titre des dépenses de personnel s’élèvent à 6 107 millions d’euros. Avec 49 millions d’euros d’augmentation enregistrés par rapport à 2007, ils progressent de 0,81 %. Hors pensions, la hausse est de 24,1 millions d’euros. L’application du principe de non renouvellement d’un départ à la retraite sur deux permet une économie de 14,5 millions d’euros.

9,68 millions d’euros sont dédiés à la prise en compte de diverses revalorisations comme celle du point fonction publique, des salaires ouvriers et des bas salaires, du taux de cotisation des employeurs publics au Fonds national d’aide au logement. 5,8 millions d’euros sont consacrés à la revalorisation des deux premiers échelons de gendarme de la grille indiciaire. Les moyens dédiés au financement de la quatrième annuité du PAGRE s’élèvent à 8,465 millions d’euros hors pensions. Ils sont en nette régression au regard des moyens alloués depuis 2005 : le coût de la mesure était de 20,6 millions d’euros en 2005, 15,4 millions d’euros en 2006 et 15,5 millions d’euros en 2007. Toutefois, à la fin de l’année 2008, la moitié de la durée prévue pour la mise en œuvre du plan se sera écoulée et plus de 50 % des objectifs auront été remplis.

La gendarmerie bénéficie à nouveau d’une tranche de crédits de 3 millions d’euros consacrés à la prime de résultats exceptionnels. Créée par le décret n° 2004-1073 du 11 octobre 2004, et versée annuellement, cette prime récompense soit des services exceptionnels rendus dans l’exercice des missions opérationnelles ou de soutien, soit des résultats hors du commun, évalués par rapport aux objectifs fixés par le commandement ou par les autorités d’emploi, et mesurés autant que possible par des indicateurs pertinents et transparents ; l’appréciation tient compte du niveau d’engagement, de l’activité déployée et des contraintes subies. Elle peut être attribuée à titre collectif, individuel ou exceptionnel et n’est pas exclusive des récompenses décernées au titre du règlement de discipline générale dans les armées.

Au titre de la participation de la gendarmerie aux opérations extérieures, une provision de 11 millions d’euros destinée à couvrir une partie des dépenses de RCS est reconduite.

B. LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT

1. L’évolution des crédits de fonctionnement

Les crédits de fonctionnement pour le programme gendarmerie s’élèvent à 964,18 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 954,33 millions d’euros en crédits de paiement, soit respectivement une augmentation de 1,87 % et une diminution de 0,9 % par rapport à la loi de finance initiale de 2007. Les crédits destinés au financement des prestations liées à l’homme s’élèvent à 575,5 millions d’euros, ceux concernant les prestations liées à la structure atteignent 232 millions d’euros et 99,2 millions d’euros sont inscrits au titre des prestations liées à l’activité. La provision de 4 millions d’euros au titre des OPEX est reconduite en 2008. Des moyens nouveaux sont accordés à hauteur de 30 millions d’euros, dont 4 millions d’euros au titre de la compensatrice SNCF.

Le montant alloué en crédits de paiement prend en compte le transfert de la charge de la gestion des centres de rétention administrative vers le ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement à hauteur de 2,522 millions ainsi que le transfert vers le programme 212 « soutien de la politique de la défense » de 1,144 million d’euros au titre de la mutualisation du financement de l’externalisation des véhicules de la gamme commerciale.

Le tableau ci-après retrace la ventilation des crédits de fonctionnement, hors OPEX, sur les différents postes de dépenses.

Ventilation des crédits de fonctionnement hors LPM

(en millions d’euros)

Type de prestations

Crédits

Prestations liées aux infrastructures :

 

 

Énergie (dont FOD)

52,1

 

Télécommunications et transmissions

28,6

 

Loyers – bureaux et locaux techniques

107,6

 

Loyers budgétaires

3,5

 

Entretien, maintenance et travaux immobiliers

40,4

Sous-total

232,2

Prestations liées à l’homme :

 

 

Entretien du personnel

82,3

 

Loyers - logements

322,7

 

Télématique, informatique, bureautique

29,2

 

Déplacements et transports

141,3

Sous-total

575,5

Prestations liées à l’activité :

 

 

Carburants

46,0

 

Déplacements et transports

24,5

 

Frais de communication, documentation et relations publiques

6,5

 

Achat, location et entretien des matériels

22,2

Sous-total

99,2

Total général

906,9

Source : ministère du budget.

Au titre de la LPM, 52 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 43,45 millions d’euros de crédits de paiement sont consacrés, pour 58 % des montants, à l’entretien programmé du matériel, et un tiers des crédits sont réservés à l’entretien programmé du personnel. Le tableau suivant retrace la ventilation de ces crédits.

Ventilation des crédits de fonctionnement
relevant du périmètre de la LPM

(en millions d’euros)

 

AE

CP

Entretien programmé du matériel

29,84

25,03

MCO des moyens aériens

10,00

7,07

MCO des systèmes informatiques

8,38

6,06

MCO des moyens de télécommunication

11,46

11,90

Entretien programmé du personnel

17,70

15,65

Couchage et menus équipements

0,10

4,00

Équipement de l’homme (habillement)

17,60

11,65

Infrastructures

1,50

1,50

Munitions

3,17

1,27

Total

52,21

43,45

Source : ministère du budget.

2. La croissance des loyers

Depuis 2000, les dépenses de loyers ne cessent d’augmenter. Le coût des loyers des logements, des bureaux et des locaux techniques est évalué pour 2008 à 430,8 millions d’euros. Le tableau suivant retrace cette évolution et précise le nombre d’unités-logements mises en chantier et livrées par les collectivités territoriales et les particuliers depuis 2000.

UL mises en chantier et livrées
et évolution des dépenses de loyers

 

Unités-logement

Loyers

 

Mises en chantier

Livrées

Dépenses
(en millions d'euros)

Évolution

2000

280

300

257,6

 

2001

492

409

277,3

+ 7,6%

2002

470

498

289,4

+ 4,4%

2003

592

492

310,5

+ 7,3%

2004

517

796

327,2

+ 5,4%

2005

1 757

666

351,9

+ 7,5%

2006

2 450

817

371,4

+ 5,5%

2007 (Prévisions)

3 345

1 505

402,5

+ 8,4%

2008 (Prévisions)

3 012

2 779

430,3

+ 6,9%

Source : ministères de la défense et du budget.

Plusieurs facteurs expliquent l’évolution de ces dépenses. Les mesures de redéploiement, la mise en place des communautés de brigades et le renforcement des unités se traduisent, dans un premier temps, par la prise à bail ponctuelle de logements hors caserne pour permettre l’affectation des militaires concernés et, le cas échéant, l’adaptation des locaux. La sortie d’invariabilité d’un certain nombre de baux, l’augmentation annuelle de l’indice du coût de la construction, la livraison de nouvelles casernes et l’accroissement du recours à la procédure du BEA entraînent une augmentation des dépenses de loyers. On observe d’ailleurs depuis 2004 un très net glissement des investissements de collectivités locales du décret de 1993 vers les BEA. Cette situation est préoccupante : en 2007, le coût unitaire moyen de l'unité-logement (UL) en BEA est évalué à 14 220 euros alors qu'il s'établit à 9 588 euros pour une UL en décret de 1993. Un alourdissement sensible du poste des loyers dans les années à venir est inéluctable. Toutefois, la transformation, en 2007, de 250 emplois de sous officiers de gendarmerie en postes de sous officiers du corps technique et administratif de la gendarmerie génèrera une économie de 2,23 millions d’euros (17) sur les locations immobilières permettant de financer une partie de l’évolution des dépenses de loyers. En effet, contrairement aux sous-officiers de gendarmerie, les militaires du corps technique et administratif ne sont pas logés. L'accroissement de l'emploi de personnels civils, également non logés, sera de nature à diminuer encore les dépenses de locations immobilières de la gendarmerie. Un rééquilibrage entre les différents dispositifs offerts aux collectivités territoriales doit être opéré afin d’améliorer leur participation tout en maîtrisant les dépenses immobilières locatives.

C. LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT

Les crédits d’investissement demandés pour 2008 s’élèvent à 612,745 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 386,496 millions d’euros en crédits de paiement. Au regard des dotations inscrites en loi de finance initiale pour 2007, ils régressent respectivement de 30,74 % et 17,34 %.

88 millions d’euros de crédits de paiement sont destinés à honorer les engagements pris au titre de la LOPSI 2002-2007. À la fin de l’année 2008, la gendarmerie aura bénéficié de 816 millions d’euros sur une cible de 1 020 millions d’euros. 45 % des autorisations d’engagement, soit 526 millions d’euros, étaient destinés au « plan de sauvetage de l’immobilier ». En réalité, les crédits d’infrastructure se sont élevés à 30,3 % de l’enveloppe initiale (18) et le rattrapage annoncé pour l’immobilier n’a pas été réalisé. Les objectifs fixés par la LOPSI n’ont été remplis qu’à hauteur de 76 % pour les autorisations d’engagement et de 80 % pour les crédits de paiement pour les dotations et respectivement 71 % et 76 % en consommation de crédits. Ces données seront à confirmer après réalisation des exercices 2007 et 2008. Les programmes de remplacement des véhicules de la gendarmerie mobile, des nouvelles tenues et d’armement en pistolets automatiques sont achevés. D’autres programmes d’armement et le programme d’infrastructure sont en cours. Le remplacement des véhicules blindés, l’achat de fusils mitrailleurs et de caméras thermiques ne sont pas réalisés.

1. Les principaux investissements hors immobilier

Au titre de la LPM, les autorisations d’engagement s’élèvent à 320,745 millions d’euros et les crédits de paiement à 386,496 millions d’euros.

Les principaux programmes sont les suivants.

- Les programmes informatiques et bureautiques majeurs seront poursuivis. 25,5 millions d’euros sont réservés à cet effet. 7 millions d’euros concernent l’infrastructure du réseau RUBIS et 6 millions d’euros le réseau ATHENA de gestion opérationnelle départementale.

- Le renouvellement d’une partie des terminaux opérationnels et de bureautique sera engagé pour un montant de 10,5 millions d’euros.

- L’achat de 750 véhicules de brigade et de police de la route consommera 15 millions d’euros.

Enfin, 20,11 millions d’euros sont dédiés aux besoins incompressibles des unités et aux minima contractuels des marchés en cours et concernent l’acquisition de 420 motocyclettes, l’armement et la protection individuelle – dont 7 670 gilets pare-balles à port discret et 3 000 à port apparent (19) ainsi que 2 600 casques de maintien de l’ordre – et des matériels techniques, principalement des éthylomètres embarquables.

Les crédits permettent d’assurer le paiement des engagements antérieurs suivants.

- Les programmes de remplacement des hélicoptères seront poursuivis. La livraison de la deuxième tranche du programme de renouvellement des hélicoptères Alouette III par des appareils EC145 est échelonnée sur 2007 et 2008. Elle fait suite à une première acquisition de 8 appareils dont la livraison s’est achevée en 2003 et porte sur 7 aéronefs ainsi que des prestations de formation, de documentation et de maintien en conditions opérationnelles. La gendarmerie disposera, à l’échéance 2008, de 15 hélicoptères de sauvetage et d’intervention. Parallèlement, un marché d’acquisition de 12 appareils EC135 de surveillance et intervention a été notifié à la société Eurocopter fin 2006 pour un montant global de 125 millions d’euros. Il comprend également des prestations de soutien et de maintien en conditions opérationnelles. Les livraisons doivent s’échelonner entre 2008 et 2010. Une tranche conditionnelle de 25 autres appareils est notifiable en 2009 pour un montant minimum actuellement évalué à 200 millions d’euros ; elle permettrait d’atteindre, à l’horizon 2012, l’objectif de 37 appareils de surveillance et d’intervention, conformément au schéma directeur de la gendarmerie. La mise en œuvre de ces deux types d’hélicoptères répond aux besoins liés, d’une part, à la vétusté des Alouette III et des Écureuil et, d’autre part, à l’évolution de la réglementation européenne qui interdit le survol de certaines zones, notamment les secteurs urbanisés, aux appareils monoturbines. Au total, 69,87 millions d’euros sont dédiés en 2008 aux moyens aériens de la gendarmerie.

- Le financement de la livraison de 228 véhicules de groupe destinés à la gendarmerie mobile est inscrit pour un montant de 25,04 millions d’euros.

- L’informatique opérationnelle bénéficie de 42,99 millions d’euros de crédits.

- 7 597 pistolets à impulsion électrique seront livrés.

2. Le renouvellement des véhicules blindés est encore différé

La double programmation LPM et LOPSI prévoyait le remplacement des véhicules blindés à roues de la gendarmerie dont la vétusté et le taux de disponibilité sont particulièrement préoccupants. La cible initiale de 122 véhicules blindés de la gendarmerie a été abaissée à 92 engins. Ce volume répond aux besoins opérationnels. Le contrat devait être signé en 2007 et les premières livraisons intervenir en 2008 ou 2009.

Plusieurs candidats français et étrangers ont répondu à l’appel d’offres publié au bulletin officiel d'annonces des marchés publics et auprès de l’agence européenne de défense. Début 2007, la délégation générale pour l’armement (DGA) et la gendarmerie ont retenu le candidat qu’elles considéraient comme le meilleur répondant aux critères classiques de coût/délais/performances. Deux autres candidats non retenus ont initié fin avril 2007 une procédure de référé. Cette dernière ne portait pas sur la procédure de passation du marché proprement dit, mais sur une différence dans l'interprétation du besoin exprimé dans l'avis d'appel public à la concurrence. Par décision rendue le 9 mai 2007, le juge des référés a explicitement ordonné à la DGA d'annuler la procédure de marché. Un nouvel appel à candidature a été rédigé. La notification éventuelle du marché devrait être effective au 1er trimestre 2008.

Aucun crédit n’est inscrit au titre de ce programme qui enregistre déjà un retard de 9 mois. La notification, si elle a lieu, sera financée par reports de crédits.

3. L’immobilier

Le parc immobilier de la gendarmerie est composé, au 1er juillet 2007, de 4 127 casernes comprenant 62 426 logements et 17 579 logements hors caserne. 730 casernes domaniales regroupent 33 167 logements et 29 259 logements sont répartis dans 3 397 casernes locatives.

Les crédits destinés aux dépenses immobilières s’élèvent à 233,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement. 171 millions d’euros sont réservés au lancement de nouvelles opérations de construction domaniale représentant environ 1 070 UL. La maintenance immobilière est dotée de 58 millions d’euros. Les crédits de paiement s’élèvent à 190,4 millions d’euros.

Il convient d’ajouter à ces crédits 292 millions d’euros d’autorisations d’engagement destinés aux opérations recourant aux dispositifs d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public et de location avec option d’achat suivantes : l’engagement des deux opérations prévues en 2007 mais décalées du transfert de l’état-major de la gendarmerie du Rhône de Bron vers Sathonay et le lancement de la construction du nouveau siège de la direction générale de la gendarmerie à Issy-les-Moulineaux, pour un montant de 270 millions d’euros, les 22 millions d’euros restant étant réservés à l’engagement de nouvelles opérations programmées en 2008, soit la construction de nouvelles casernes pour les compagnies de Mulhouse et Montluçon. Ces engagements n’entraînent pas de dépenses en crédits de paiement la même année.

a) Les crédits ne permettent pas d’améliorer significativement l’état du casernement

Le tableau ci-après retrace l’évolution de l’état du casernement entre le 1er mars 2006 et le 1er janvier 2007.

Évolution de l’état du casernement entre le 1er mars 2006 et le 1er janvier 2007

 

Parc considéré

Très bon

Bon

Mauvais

Vétuste

2006

2007

2006

2007

2006

2007

2006

2007

2006

2007

Casernes domaniales

729

734

82

83

354

351

184

190

109

110

 

 

11,25 %

11,30 %

48,56 %

47,82 %

25,24 %

25,88 %

14,95 %

15,00 %

Casernes locatives

3 337

3 368

404

450

1 949

1 933

741

752

243

233

 

 

12,11 %

13,00 %

58,41 %

57,00 %

22,20 %

23,00 %

7,28 %

7,00 %

Casernes mixtes (1)

23

18

1

0

15

15

5

3

2

0

 

 

4,35 %

0,00 %

65,21 %

83,00 %

21,74 %

17,00 %

8,70 %

0,00 %

(1) Casernes constituées d’une partie locative et d’une partie domaniale.

Source : ministère de la défense.

L’état général du casernement n’a pas connu d’évolution sensible entre mars 2006 et janvier 2007. La part des logements en mauvais état ou vétustes reste établie à près d’un tiers du parc. Un marché de diagnostic technique des emprises domaniales de métropole a été passé en 2004 avec la société SOCOTEC. Il a permis de dresser un état des lieux du parc domanial et de déterminer le montant des travaux de maintenance et de réhabilitation qui seraient nécessaires. L’investissement sur trente ans est évalué à 2 039 millions d’euros, dont 635 millions pour procéder aux travaux de conservation et de remise à niveau du parc sur les cinq premières années. La mise en œuvre de ces conclusions supposerait un effort de 127 millions d’euros en 2008. Or, les dotations d’entretien des casernements restent inférieures. Le tableau ci-après retrace l’évolution des crédits consacrés à l’entretien des casernements depuis 2004.

Évolution des crédits d’entretien des casernements

(en millions d’euros)

 

2004

2005

2006

2007

en cours d’exécution

2008

prévisions

 

Maintenance lourde et/ou spécialisée

45,50

20,55

35,00

49,00

52,00

Maintenance courante

19,20

5,80

10,80

11,80

6,25

Sous-total titre 5

64,70

26,35

45,80

60,80

58,25

Entretien courant (titre 3)

34,61

37,47

38,97

39,00

40,40

Entretien ménager (titre 3)

8,28

8,86

8,96

8,96

8,96

Sous-total titre 3

42,89

46,33

47,93

40,96

49,36

Total

107,59

72,68

96,93

101,76

107,61

Source : ministère de la défense.

Les crédits inscrits au titre 5 permettront de conduire 140 opérations de maintenance. Par ailleurs, un plan de rénovation portant sur plus de 4 500 logements initié en 2007 sera poursuivi. Les études sont diligentées pendant les années 2007 et 2008 ; le financement sera mis en place en 2009 ; les livraisons seront échelonnées entre 2010 et 2014 par tranches successives.

b) L’évolution des mises en chantier et des livraisons

Les crédits prévus dans le projet de loi de finances permettront d’engager la mise en chantier de 1 117 unités-logements. 562 sont des réalisations domaniales classiques. 555 relèvent de l’application du dispositif avec autorisation d’occupation temporaire du domaine public concernant les opérations d’Issy-les-Moulineaux, Lyon-Sathonay, Montluçon et Mulhouse. Le tableau suivant précise le nombre d’unités logements mises en chantier et livrées depuis 2000.

Nombre d’UL mises en chantier et livrées depuis 2000

 

Mises en chantier

Livraisons

Année

État

Collectivités territoriales et particuliers

Total

État

Collectivités territoriales et particuliers

Total

2000

780

280

1 060

901

300

1 201

2001

787

492

1 279

788

409

1 197

2002

468

470

938

502

498

1 000

2003

725

592

1 317

754

492

1 246

2004

757

517

1 274

536

796

1 332

2005

110

1 757

1 867

438

666

1 104

2006

156

2 450

2 606

152

817

969

2007 (Prévisions)

712

3 345

4 057

138

1 505

1 643

2008 (Prévisions)

1 117 (1)

3 012

4 129

287

2 779

3 066

(1) Les opérations d’Issy-les-Moulineaux, Lyon-Sathonay, Montluçon et Mulhouse sont incluses à hauteur de 555 UL.

Source : ministère de la défense.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL GUY PARAYRE, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Guy Parayre, directeur général de la gendarmerie nationale, sur le projet de loi de finances pour 2008 (n° 189), le 10 octobre 2007.

Le président Guy Teissier a relevé que les crédits dont disposera la gendarmerie nationale en 2008 sont en légère régression. En revanche, les dépenses de fonctionnement sont en forte augmentation pour le paiement des loyers, puisque 2 802 unités logement devraient être livrées l’an prochain. Les engagements pris par Mme Alliot-Marie ont donc été tenus et les gendarmes sont convenablement logés.

Si l’aboutissement de la LOPSI explique la baisse des dépenses d’investissement, les crédits permettent toutefois le maintien des opérations immobilières et, notamment, le développement du système informatique ainsi que le remplacement des véhicules de groupe de la gendarmerie mobile. À cet égard, le président a souhaité connaître les motifs du remplacement de leurs cars par des minibus.

Le général Guy Parayre a rappelé, en préambule, que l’année 2008 marquera une transition pour le budget de la gendarmerie. Elle s’insérera en effet entre la fin d’exécution de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) de 2002, dont l’exécution s’est poursuivie jusqu’en 2007, et le début de la mise en œuvre de la loi de programmation et de performance pour la sécurité intérieure (LOPPSI) annoncée par le Premier ministre dans son discours de politique générale. Le projet de loi de finances répond aux grandes orientations données par le Président de la République. Il se caractérise par la recherche d’un équilibre entre deux priorités bien identifiées : le maintien de l’effort pour améliorer la sécurité des Français et la participation à la politique volontariste conduite par le Gouvernement pour maîtriser les dépenses budgétaires et réduire les déficits.

Les résultats obtenus en 2006 par la gendarmerie dans l’exécution de son budget, comme dans son activité ont confirmé les tendances positives observées depuis 2002.

Tant dans la lutte contre la délinquance que dans celle contre l’insécurité routière, c’est un travail de fond qui est conduit dans la durée. Après cinq années de progrès constants, les marges d’amélioration se réduisent. Il faut donc être encore plus imaginatifs et développer de nouvelles armes, techniques et juridiques, notamment, pour accroître la performance. Ce sera l’essentiel du travail entrepris, en concertation étroite avec la police nationale, dans la préparation de la future LOPPSI.

La baisse de la délinquance s’est confirmée en 2006 : une réduction de 1,27 % de la délinquance générale et de 5,77 % de celle de voie publique ont été enregistrées. Cette diminution constante est à mettre en parallèle avec l’amélioration régulière des indicateurs et, en particulier, la hausse du taux global d’élucidation qui a gagné un point en passant de 40,62 % à 41,47 %. Ces résultats témoignent de l’engagement des gendarmes, tous grades et unités confondus.

Ces bons résultats sont d’autant plus remarquables que d’autres efforts ont été demandés à la gendarmerie depuis 2002. La priorité accordée à la lutte contre l’immigration irrégulière s’est ainsi traduite, en 2006, par une augmentation de 49,94 % du nombre des personnes mises en cause. L’investissement est très lourd, mais la mobilisation importante de moyens humains et matériels se fait sans obérer la capacité des unités à faire face à leurs autres missions. L’effort sera poursuivi en 2008.

Autre axe majeur de la politique gouvernementale, la sécurité routière a également confirmé les progrès constatés ces dernières années : le nombre des accidents a baissé de 10,6 % en 2006, le nombre de tués diminuant de 11 % et celui des blessés de 9,8 %. Les progrès réalisés sont avant tout le fruit d’une politique cohérente à laquelle les Français adhéreront si la répression, indispensable, est menée avec tout le discernement nécessaire.

Au-delà des bons résultats opérationnels obtenus par la gendarmerie, l’institution a poursuivi son évolution en 2006 et 2007. Outre les grandes réformes structurelles – réforme du commandement territorial et mise en œuvre des communautés de brigades –, il s’agit de s’adapter aux évolutions de la société et de la délinquance.

La gendarmerie a entrepris, dès la fin de l’année 2006, une réflexion pour améliorer son efficacité et la lutte contre l’insécurité sous toutes ses formes, certaines pistes étant explorées en étroite collaboration avec la police nationale. La LOPPSI en cours de préparation mais aussi les travaux du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale déboucheront sans doute sur une évolution importante de l’architecture du système de sécurité et de défense. De même, la revue générale des politiques publiques (RGPP) aboutira certainement à des réformes permettant un fonctionnement plus rationnel de l’État.

Les observations rendues au Président de la République au début de l’année 2007 par le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire ont suscité une grande attente au sein de la gendarmerie, du fait du décalage constaté entre la progression de la condition des militaires et celle des fonctionnaires civils en tenue. Les corrections annoncées seront étalées dans le temps, mais il était bon que les premières mesures viennent marquer l’attention portée à cette question. Dans l’attente de celles à venir, la gendarmerie mettra en œuvre dès 2008 des dispositions destinées à accélérer les carrières afin de valoriser davantage l’investissement personnel.

Abordant le projet loi de finances pour 2008, il a indiqué que l’exécution de la LOPSI de 2002 se poursuivra encore puisque 475 emplois, correspondant à l’extension en année pleine des 950 postes créés en 2007, seront financés.

S’agissant des rémunérations et des charges sociales (RCS), les effectifs moyens réalisés seront maintenus au niveau de 2007 alors qu’ils tendent à diminuer dans la plupart des corps de la fonction publique : l’extension en année pleine des 950 créations d’emploi de 2007 correspond, en effet, au non remplacement d’une partie des départs à la retraite, soit 475 postes. Au total, le plafond d’emploi s’élèvera à 101 136 emplois temps plein travaillé (ETPT).

Les RCS hors pensions, augmentent de 24,1 millions d’euros, en raison notamment de l’augmentation du point d’indice et de l’exécution des mesures catégorielles. Parmi ces dernières, la quatrième annuité du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées – PAGRE – mérite une attention particulière. Au terme de cet exercice, plus de 3 000 postes d’officier auront été créés. La poursuite de ce plan est essentielle car l’évolution de la condition des militaires de la gendarmerie n’est pas seulement une affaire de grille indiciaire, le pyramidage des corps et le rythme des carrières jouent également un grand rôle.

Les crédits de fonctionnement s’élèveront à 911 millions d’euros. À périmètre constant, les moyens nouveaux accordés à la gendarmerie représentent 30 millions d’euros, soit une hausse de 3,4 %. Cette augmentation élevée au regard de la progression du budget de l’État est en fait mesurée par rapport aux besoins opérationnels.

L’enveloppe budgétaire allouée à la gendarmerie au titre des investissements en 2008 s’élève à 397,95 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 447,20 millions d’euros en crédits de paiement. Elle sera consacrée au renouvellement d’une partie des matériels et au maintien opérationnel des programmes les plus sensibles. 750 voitures opérationnelles, 420 motocyclettes, 8 000 postes informatiques opérationnels et de bureautique, ainsi que des équipements pour les gendarmes mobiles et pour la sécurité du personnel seront commandés. Par ailleurs, 6 millions d’euros sont consacrés à la poursuite du projet Athéna de rénovation et d’augmentation capacitaire des centres opérationnels départementaux. Pour leur part, les crédits d’infrastructure augmentent légèrement, permettant de lancer la construction de plus de 1 000 équivalents unité logement.

L’équilibre auquel parvient le projet de budget de la gendarmerie pour 2008 a nécessité d’opérer des choix qui garantissent le maintien de la capacité opérationnelle des formations. L’exécution sera sans doute délicate puisqu’elle sera marquée par le lancement d’une politique volontariste de lutte contre les déficits. C’est pourquoi, au-delà du travail budgétaire, de nombreuses réflexions sont en cours pour poursuivre la rationalisation de l’institution, pour améliorer ses performances et pour alléger ses coûts de fonctionnement.

Enfin, s’agissant des véhicules de la gendarmerie mobile, le directeur a indiqué que le remplacement de trois grands cars transportant chacun un peloton par huit petits cars, répond à un objectif opérationnel – même si le confort du personnel n’est pas oublié. Un fractionnement des unités répond mieux aux engagements actuels les plus fréquents, que ce soit en maintien de l’ordre ou en renfort des unités départementales.

Le président Guy Teissier a souhaité connaître la situation du projet d’externalisation concernant le parc immobilier, notamment pour son entretien. Cette externalisation a été maintes fois évoquée et repoussée sans cesse pour des raisons notamment juridiques. Il a également demandé des précisions sur le projet de regroupement de tous les services de la direction générale de la gendarmerie à Issy-les-Moulineaux, opération s’inscrivant dans un contexte budgétaire contraint.

Le général Guy Parayre lui a apporté les précisions suivantes. L’externalisation est en partie réalisée puisqu’un tiers des logements sont gérés par les opérateurs privés ou les collectivités locales qui les ont construits. L’état global du parc locatif s’est amélioré ces dernières années mais il reste des marges de progrès pour le parc domanial. Pour ce dernier, le précédent ministre avait décidé de lancer une expérimentation, en dépit des problèmes juridiques que l’externalisation soulève et de son coût élevé puisque les estimations réalisées ont évalué à 60 millions d’euros le surcoût de l’externalisation par rapport au maintien de la gestion immobilière au sein de la gendarmerie.

Le nouveau ministre doit maintenant choisir soit de lancer au printemps 2008 les expérimentations prévues dans quatre régions, soit de concentrer l’effort sur une seule région. Le choix sera politique, mais il reste à savoir si cette différence de coût de 60 millions d’euros sera couverte par le ministère du budget ou si la gendarmerie devra la supporter sur son propre budget, au détriment d’autres actions, sachant que, d’ores et déjà, alors que rien n’a encore été externalisé, une centaine de postes budgétaires ont été rendus par anticipation. Le surcoût attendu parait prohibitif.

Le projet d’installation à Issy-les-Moulineaux a d’autant plus de sens que la direction générale de la gendarmerie est répartie sur douze sites à Paris et dans la région parisienne. Il permettra à la fois de regrouper les services et de vendre, notamment dans le XVIe arrondissement, certaines emprises ainsi libérées. Les appels d’offres avaient permis, l’année dernière, de retenir un projet parmi les cinq présentés par des groupements d’entreprises. La procédure a dû être reprise en raison de certaines dissensions entre les entreprises. Aujourd’hui quatre concurrents sont en lice et déposeront leurs offres à la fin du mois d’octobre. L’autorisation d’occupation temporaire (AOT) devrait être signée avant l’été 2008 et trente mois de travaux seront ensuite nécessaires.

M. Christian Ménard, évoquant la grogne des gendarmes du fait de l’écart grandissant entre leurs salaires et ceux des policiers alors qu’ils travaillent plus, a demandé s’il allait être remédié à ce problème.

Le général Guy Parayre a préféré parler d’inquiétude plutôt que de grogne, tout en comprenant l’attente des gendarmes. Appelés depuis 2002 à obéir au ministre de l’intérieur et à travailler de façon étroite avec les policiers tout en restant des militaires, il leur avait été alors affirmé, afin de les motiver, qu’ils seraient traités de façon équilibrée par rapport aux personnels de la police nationale. Mais dernièrement le haut comité d’évaluation de la condition militaire a malgré tout relevé un décalage récurrent, qui doit être aujourd’hui comblé.

Toutefois, un statut militaire ne peut être que différent d’un statut civil. Les grilles indiciaires, si elles doivent être équilibrées, ne doivent pas forcément être identiques. Pour calmer l’inquiétude des gendarmes, il convient cependant de disposer d’une grille indiciaire permettant un traitement équilibré à grade équivalent et de faire en sorte que la répartition des personnels par grade et que le rythme de progression d’un grade au suivant soient équivalents.

À cet égard, deux voies sont possibles : soit le projet de grille retenu par Mme Alliot-Marie, à condition toutefois de veiller à équilibrer les volumes dans chaque grade ainsi que le rythme d’accession à ces grades, ce qui implique de travailler sur chacun des statuts particuliers ; soit, de façon plus radicale, la création d’une grille distincte, qui permet de répercuter de façon quasi automatique les avancées obtenues par les syndicats de la police nationale. Les sous-officiers côtoyant souvent leurs homologues de la police, il importe de veiller à ce que les évolutions les concernant soient coordonnées. S’il faut un rapprochement, il convient cependant de ne pas aller trop loin, au risque de ne plus disposer que de civils. Si l’on veut conserver deux forces distinctes, l’une militaire, l’autre civile, la première voie semble préférable, d’autant qu’avec le nouveau directeur général de la police nationale, elle est rendue possible. Sur le plan politique, il faut qu’il soit établi que, malgré une communauté d’objectifs et un nécessaire partage des informations, police et gendarmerie doivent rester distinctes.

Le président Guy Teissier est convenu que disposer de deux forces de police, l’une militaire, l’autre civile, est le gage d’un bon équilibre démocratique. Il a estimé nécessaire d’insister auprès des jeunes qui choisissent le métier de gendarme sur le fait que la condition militaire, si elle comporte des inconvénients et un statut particulier, a également certains avantages, notamment celui du logement et correspond certainement à leurs inclinations personnelles. Il a regretté que les militaires, y compris les gendarmes, ne soient pas bien payés, encore que ces derniers, comme les militaires du rang, qui sont des smicards, et les sous-officiers subalternes, seront les premiers à voir leur condition améliorée dans le cadre de la revalorisation de la condition militaire. L’effort que la nation pourra consentir devra être réalisé au bénéfice de l’ensemble des soldats.

Le général Guy Parayre a estimé que le logement par nécessité absolue de service ne peut être considéré comme un avantage. Il permet simplement de disposer de gendarmes sur l’ensemble du territoire. Dans certains endroits, et plus que dans les armées, le conjoint ne peut travailler et les enfants doivent effectuer de longs trajets pour rejoindre leur collège ou leur lycée, voire être pensionnaires. Si la gendarmerie ne disposait pas de logements par elle-même, cela lui reviendrait certainement au moins aussi cher, voire plus, qu’à l’heure actuelle du fait des primes au taux « non logé » qu’il faudrait alors verser en contrepartie aux gendarmes et des effectifs supplémentaires à prévoir pour maintenir le même niveau de sécurité publique.

Sans vouloir opposer le risque qu’encourt un gendarme au quotidien à celui que peut affronter un militaire en OPEX, il n’en reste pas moins que, dans la société d’aujourd’hui, la fonction de police revêt un certain danger, ne serait-ce qu’en Guyane où des échanges de tirs ont lieu quotidiennement. Contrairement aux militaires en OPEX qui perçoivent certaines indemnités spécifiques, il n’est pas versé aux 100 000 gendarmes pour faire leur guerre tous les jours une indemnité d’un niveau équivalent, même s'il existe des choses par ailleurs. Pourtant, une loi de 1995 reconnaît que la sécurité intérieure conduit à des sujétions particulières qui nécessitent, en faveur des policiers, un traitement différencié par rapport au reste de la fonction publique. À cet égard, le candidat Nicolas Sarkozy a souligné que, puisque deux forces de sécurité existent en France, il n’est pas invraisemblable que ce qui est admis pour la force civile le soit pour la force militaire. Il faut trouver une solution équilibrée qui permette à toutes les forces – police, gendarmerie et armées – de fonctionner et d’évoluer dans le même sens.

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis des crédits de la gendarmerie, a fait part de la reconnaissance et de la gratitude de la commission à l’égard du travail effectué par les gendarmes au quotidien et a demandé si l’importance des loyers dans l’ensemble des crédits ne risque pas d’aboutir au blocage de nouvelles constructions de gendarmeries dans les années à venir.

Si le budget est stabilisé, il n’en faut pas moins des hommes sur le terrain. Certaines mesures pourraient être prises qui aboutiraient à une présence plus importante sur le terrain. Ainsi, les rédactions de procès-verbaux pourraient, à l’instar de ce qui se pratique au Royaume-Uni, être confiées à des secrétariats ; de même, le nombre de gardes statiques pourrait être diminué. La charge que représentent les transfèrements et extractions de prisonniers – mission qui occupe un millier de gendarmes à l’année – doit être allégée par la mise en œuvre de moyens de visioconférence, la création dans les Cours d’appel de bureaux de transfèrements chargés d’organiser les mouvements, ou encore la création d’annexes des tribunaux à côté des prisons.

Le général Guy Parayre a estimé que la question des loyers, qui représenteront 413 millions d’euros en 2008, soit une part importante des 910 millions d’euros de dépenses de fonctionnement, doit être traitée, si l’on veut la maîtriser, au niveau interministériel. Cette maîtrise devra être un compromis entre ce qui relève, d’une part, des crédits budgétaires, dont la diminution est recherchée à tous niveaux, et, d’autre part, de l’externalisation, sachant que la dépendance en matière de coût des loyers sera alors grande vis-à-vis du marché. La solution retenue devra s’inscrire dans le long ou, au moins, le moyen terme. La gendarmerie ne cherche pas à mettre un frein à l’amélioration des conditions de logement, mais à mieux maîtriser la dépense.

Malgré le besoin de sécurité qu’expriment nos concitoyens, il est peu probable, compte tenu de la situation financière de l’État, que des moyens humains en nombre plus important soient obtenus. Il convient donc, à moyens égaux, d’améliorer la performance en travaillant dans plusieurs directions.

Les efforts seront d’abord poursuivis en matière de simplification des tâches administratives. De même, afin d’améliorer significativement le taux de résolution des affaires, il a été proposé au directeur général de la police que la gendarmerie et la police se dotent de fichiers communs. Il n’existe pas aujourd’hui de fichier informatique répertoriant l’environnement de toutes les affaires judiciaires ; il serait pourtant grandement utile pour réduire les actes de petite et moyenne délinquance. Une loi sera nécessaire et toutes les garanties seront données pour que les fichiers soient traçables et ne servent qu’à traiter des affaires judiciaires.

S’agissant des transfèrements, une seule solution est possible, faute de croire encore à un aboutissement des discussions avec la justice : faire payer le service rendu. Il ne servirait à rien de donner la charge des transfèrements à l’administration pénitentiaire : là où 1 000 ou 1 500 gendarmes suffisent compte tenu de leur statut militaire, il faudrait alors 2 000 ou 3 000 personnels de la pénitentiaire, ce qui coûterait trop cher au budget de l’État. Toutefois, si les magistrats, tant du siège que du parquet, continuent à refuser de s’organiser en fonction des nécessités d’économie des forces de l’ordre, il faut, la LOLF aidant, leur confier la responsabilité pleine et entière des transfèrements et faire payer l’escorte au magistrat qui la commande. C’est ce qui s’est passé pour les frais de justice : alors qu’ils explosaient, il a été décidé que les présidents de cour ne pourraient pas dépasser un certain plafond de dépenses. Aujourd’hui, une certaine régulation commence à apparaître en la matière.

Si on ne peut qu’être favorable à la visioconférence, elle reste une problématique interne à la justice. Aujourd’hui, lorsqu’elle est établie entre les unités de gendarmerie et les juges, il s’agit encore d’une solution de confort qui ne permet pas de réelle économie, le délinquant devant toujours, à un moment ou à un autre, être conduit devant un magistrat. La solution serait qu’un détenu puisse être conduit dans des endroits bien définis, géographiquement proches du lieu de détention, pour discuter au moyen de la visioconférence avec un magistrat.

Quant aux gardes statiques, il faut accepter de regarder de plus près chaque situation, car l’on peut en économiser un certain nombre, même s’il convient de préserver une bonne sécurité des palais nationaux. Faute, demain, de disposer de gendarmes supplémentaires, alors que les charges s’accroîtront, il faudra bien redéployer des personnels, tout en continuant à garantir la sécurité, mais de manière différente.

M. Philippe Vitel a souligné à cet égard que le ministre faisait souvent part de sa tristesse de voir des unités d’élite militaires utilisées à des tâches parfois sans intérêt et peu qualifiées. Il est aujourd’hui important de revoir les missions opérationnelles des gendarmes. L’utilisation de la visioconférence, de la vidéosurveillance et l’externalisation sont des pistes à explorer.

Si le redéploiement des forces de police et de gendarmerie s’est particulièrement bien passé dans le Var, avec de bons résultats opérationnels et des forces bien logées, ce redéploiement est-il terminé sur tout le territoire ou existe-t-il encore des zones où l’équilibre entre les forces n’a pas encore été trouvé ?

Le général Guy Parayre a souligné que le redéploiement, effectué pour rendre cohérent le dispositif mis en place entre police et gendarmerie, est une réussite, même si l’on n’est pas parvenu à la cohérence absolue. La gendarmerie a plutôt été conçue pour tenir les grands espaces avec de petites unités. La police est, elle, plus adaptée aux grandes agglomérations et à un espace plus réduit. Les derniers problèmes seront résolus au cas par cas après détermination des limites d’agglomération.

M. Christophe Guilloteau a souhaité connaître l’état d’avancement du transfert de l’état-major de la gendarmerie du Rhône à Sathonay et demandé des précisions sur le projet de loi en préparation concernant la gendarmerie évoqué par le ministre devant la commission.

Par ailleurs, il s’est interrogé sur l’existence de doublons entre police et gendarmerie, en particulier en matière de laboratoires Existe-t-il dans ce domaine des économies à réaliser en termes de moyens ?

Enfin, il a attiré l’attention sur les regroupements en communautés de brigades auxquels ont assisté les élus ruraux attachés à leur propre brigade.

Le général Guy Parayre a indiqué que s’agissant du transfert de l’état-major de Bron à Sathonay, l’AOT devrait être signée en 2008, les travaux devant durer deux ans et demi ou trois ans.

Pour ce qui est de la loi sur la gendarmerie, l’initiative en revient au Président de la République qui a demandé aux ministres de l’intérieur et de la défense d’y travailler. Certains ont suggéré de réécrire le décret du 20 mai 1903 et même de reconsidérer tout le fonctionnement de la gendarmerie. Aujourd’hui, l’idée est plutôt de faire une loi de principe – de seulement quelques articles relatifs, par exemple, au statut – affirmant que la France tient à deux institutions, l’une militaire, l’autre civile. Si le ministre de l’intérieur peut avoir une plus grande influence sur le budget des deux forces, la gendarmerie doit, dans le même temps, rester dans l’environnement militaire.

Entendre sans cesse parler de doublons à propos de la police et de la gendarmerie est quelque peu irritant, car les vrais doublons ne sont pas si nombreux. Ainsi, en matière de preuve scientifique, la France n’a pas trop de laboratoires. Elle n’en a même pas assez puisque, même si l’on en compte un dans la gendarmerie et sept dans la police nationale, cela reste insuffisant pour couvrir les besoins sur les plans tant de la proximité que de l’autonomie. Il convient de ne pas dépendre des laboratoires privés, notamment pour des raisons de coût. À titre d’exemple, leurs prix astronomiques ont été divisés par trois lorsque les chaînes de génotypage – deux au sein de la gendarmerie et une au sein de la police – ont été créées. De même, en matière de renseignement, celui de la gendarmerie n’est pas de même nature que celui des renseignements généraux.

D’autres pistes sont à explorer, notamment en matière d’implantation des forces. Certaines brigades de gendarmerie sont, en effet, encore en zone de police. Elles doivent physiquement rejoindre les zones de la gendarmerie, sauf à laisser dans certaines zones de police quelques éléments indispensables, comme à Paris où des gendarmes doivent pouvoir terminer des enquêtes.

Le regroupement en communautés de brigades, qui est une réussite et permet des gains capacitaires, doit être poursuivi. Les difficultés actuelles relèvent du commandement : certains commandants de brigade aujourd’hui ne sont plus chefs comme dans le système ancien. Ils doivent le comprendre, même s’ils estiment que leur commandant de communauté de brigades n’est pas à la hauteur. Si des erreurs de casting ont été commises en la matière, il convient, en tout cas, de lever toute ambiguïté : désormais, la communauté de brigades est l’unité élémentaire dont le chef est le commandant de la communauté de brigades, et non le chef de telle ou telle brigade de proximité. Il y a un moment où les réformes doivent être menées à leur terme.

M. Jean-Claude Viollet a présenté trois observations.

La gendarmerie a une mission de défense et une autre de sécurité. Il convient de veiller à respecter l’équilibre entre ces deux missions et, à cet égard, si le maintien du statut militaire des gendarmes est une condition nécessaire, elle n’est pas suffisante. Il conviendra de veiller à ce que la mission défense soit garantie et que la mission sécurité préserve les intérêts de la gendarmerie, force indispensable à la mission de défense.

Le Président de la République, lors du congrès des sapeurs-pompiers, a parlé de la mise en place, d’ici trois ans, d’un réseau radio crypté ANTARES destiné à améliorer l’articulation entre pompiers et SAMU, police et gendarmerie. Or, la police est sur Acropol et la gendarmerie sur Rubis. Ces réseaux sont-ils interopérables ?

La Charente est un département expérimental pour la mise en place de la chaîne Cassiopée. En 2008, tous les TGI seront ainsi en réseau et auront accès à toutes les procédures. Cet outil est essentiel à la sécurité du territoire, à la protection des victimes et à la poursuite des délinquants. La gendarmerie sera-t-elle au rendez-vous ?

Le général Guy Parayre a acquiescé au nécessaire équilibre à trouver entre sécurité et défense, même si une partie seulement des crédits de programmation de la gendarmerie sont appelés à relever de la défense.

Pour ce qui est des réseaux, des passerelles existent entre Acropol et Rubis et le réseau du futur sera complètement mixé.

Quant à l’accès aux procédures, le système voulu au départ par la justice pour le traitement informatisé des procédures était incompatible avec celui de la gendarmerie et de la police. Aujourd’hui, Cassiopée est heureusement accessible par l’Internet, ce qui ne pose pas de problème puisque toutes les brigades ont accès à l’Internet. La gendarmerie poursuit son étroite collaboration avec la justice en matière de dématérialisation des procédures et de leur suivi sur un même support depuis l’enquêteur jusqu’au jugement.

M. Francis Hillmeyer a souhaité savoir ce qu’il fallait entendre par développement « de nouvelles armes techniques et juridiques » pour lutter contre l’insécurité et en connaître les moyens financiers.

Le général Guy Parayre a souligné que, s’agissant des moyens juridiques, l’avant-projet de loi sur la gendarmerie doit ouvrir quelques pistes afin, notamment, d’améliorer le taux de résolution des affaires. Quant aux moyens techniques, ils portent, en particulier, sur la vidéosurveillance et sur tout ce qui a trait à l’optimisation des moyens sur le terrain, qu’il s’agisse de la géolocalisation, des liens entre les patrouilles et les centres opérationnels ou encore des possibilités de consultation des fichiers par les personnels, y compris les motocyclistes, à partir des terminaux embarqués – au moyen en particulier de la carte « quatre en un » – permettant d’immobiliser moins longtemps l’usager. De même, toujours en fonction des possibilités budgétaires, des pistes existent pour améliorer la technologie en matière de police scientifique et technique.

M. Jean-Pierre Soisson, après avoir rappelé qu’il tenait d’autant plus au statut militaire de la gendarmerie que celle-ci lui avait sauvé la vie en Algérie, a souligné que le malaise des gendarmes de base dans les campagnes était réel. On ne peut continuer à les faire lanterner alors qu’il leur avait été promis que s’ils devenaient des militaires au service du ministère de l’intérieur, leurs rémunérations seraient à peu près égales à celles de la police. Si rien n’est sérieusement fait l’an prochain, le risque est grand d’avoir un même problème qu’au temps de Jean-Pierre Chevènement.

La loi sur la gendarmerie, telle qu’elle se profile, est bonne, car elle ne se perd pas dans les détails. Il faut impérativement qu’elle spécifie bien que le statut militaire de la gendarmerie est maintenu.

S’agissant enfin des transfèrements, la seule solution est, à l’instar des frais de justice, de les faire prendre en compte par le budget de la justice.

Le général Guy Parayre a estimé que l’on avait en effet assez fait patienter les gendarmes. Il faut qu’en 2008, une réponse leur soit apportée, de façon mesurée, c’est-à-dire sans créer plus de problèmes qu’il n’en est résolu.

M. Patrick Beaudouin a rappelé que la gendarmerie avait mobilisé plus de 2 300 réservistes en juillet et que la LPM, si elle est respectée, porterait à 43 % le taux d’emploi des réservistes. Or la montée en puissance de la réserve opérationnelle, mais aussi de la réserve citoyenne, demande des moyens financiers et un support juridique ferme. Alors que les décrets d’application de la loi sur les réserves viennent d’être publiés, la loi sur la gendarmerie donnera-t-elle à cette dernière des moyens financiers et juridiques supplémentaires facilitant l’emploi des réservistes ?

Il a par ailleurs souhaité des précisions sur la situation en Guyane.

Le général Guy Parayre a indiqué que la réserve est un exemple de politique réussie. La nouvelle doctrine d’appel est totalement adaptée aux besoins de la gendarmerie en permettant l’emploi, sous contrat et pour un temps donné, de réservistes rendant le même service que les gendarmes en activité, ce qui autorise une souplesse extraordinaire. L’objectif pour 2010 a été fixé à 40 000 engagements à servir dans la réserve (ESR), avec une montée en puissance progressive. Aujourd’hui, ce sont en moyenne 25 000 réservistes qui sont employés sur des contrats de 23 jours par an, ce qui est un renfort non négligeable pour l’active. L’apport de la loi et de ses décrets d’application portera surtout sur l’accompagnement – les personnels de réserve sont demandeurs en ce domaine. Même si les moyens sont réduits en 2008 puisque les recrutements se limiteront à 1 000 ou 2 000 réservistes, l’objectif final de 40 000 ESR n’est pas remis en question.

Le président Guy Teissier ayant demandé si les jeunes répondent aux sollicitations de la gendarmerie, le général Guy Parayre a précisé que si certains viennent à la réserve par le bouche à oreille – on ne compte que 5 000 ou 6 000 anciens gendarmes sur les 25 000 réservistes – la gendarmerie mène une politique de recrutement volontariste et séduit les candidats, notamment certains étudiants, par des perspectives de formation et de rémunération. Il est en tout cas réconfortant de constater que les stages de préparation militaire réunissent 200 ou 300 jeunes désireux de servir leur pays.

C’est un problème de souveraineté qui se pose en Guyane. La gendarmerie y est fortement engagée aux côtés des forces armées pour lutter contre la présence de clandestins venus du Surinam ou du Brésil aux fins d’exploiter nos richesses – les sites d’orpaillage et, dans une moindre mesure, la pêche au large - et générant des problèmes environnementaux par le déversement chaque année de tonnes de mercure, également à l’origine de problèmes de santé publique. La gendarmerie et les forces armées doivent pouvoir tenir les points d’entrée, grâce à des moyens du génie plus lourds, et détruire les installations par le biais d’opérations combinées utilisant notamment des moyens aériens. Il sera donc proposé au Gouvernement, dans les jours qui viennent, de mener une action encore plus forte qu’à l’heure actuelle.

M. Michel Voisin a souhaité, face aux demandes des élus ruraux de disposer de toujours plus de gendarmes, une politique de communication plus approfondie qu’aujourd’hui.

Quant aux retraités, leur leitmotiv est que les grades de la police nationale dévalorisent ceux de la gendarmerie.

Le général Guy Parayre a indiqué que les directives données aux commandants de région et de groupement sont d’aller justement au-devant des élus. Les habitudes, nées en particulier du travail informatique, doivent changer, et les personnels retrouver le sens du contact.

Il faut que les retraités comprennent que la guerre des grades a été perdue. Et si le grade est dévalorisé, l’indice, lui, est meilleur. En outre, l’inspecteur de police, qui était recruté à leur époque au niveau du bac, ne peut être comparé aux lieutenants d’aujourd’hui recrutés au niveau de la licence.

Le débat sur les grades est finalement le même que celui sur le redéploiement. Lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l’intérieur, il lui a été expliqué qu’il n’était pas utile de remplacer les policiers en partance par un même nombre de gendarmes puisque ces derniers travaillaient plus. Il a estimé qu’il était impossible d’imposer cela aux élus et retenu le principe du remplacement à effectif égal. Le redéploiement s’est effectué à ce prix, avec la complicité tacite de chacun. Il en va de même aujourd’hui : l’armée a laissé faire en matière de grades, il faut en payer les conséquences et veiller maintenant à l’adéquation des indices.

M. Philippe Folliot s’est demandé si le très fort déséquilibre entre police et gendarmerie constaté notamment dans l’exécution de la LOPSI ne va pas s’aggraver à moyen terme.

S’agissant des forces mobiles, aujourd’hui sous commandement de la police, il a observé que les CRS sous employés dans des situations de basse ou moyenne intensité et les gendarmes mobiles dans des situations de haute intensité ou lorsque le temps de mobilisation est plus contraignant. N’y a-t-il pas un autre risque de déséquilibre si les liens se distendent avec la défense ?

Le général Guy Parayre a souligné que si ce risque est d’ordre structurel, il appartient cependant au directeur général de faire entendre sa voix dans le cas où une distorsion trop importante dans l’utilisation des moyens apparaîtrait.

Tout le monde souhaitant une gendarmerie militaire et une police civile, il est toutefois normal que les préfets ou le ministre de l’intérieur tirent profit des avantages de l’un ou de l’autre statut. C’est la règle du jeu et tout est question de mesure. Il est d’ailleurs normal d’envoyer des gendarmes lorsque la situation est plus dure ou dans les endroits les plus sensibles comme certaines ambassades - en Irak actuellement, au Liban si la situation l’exige - si des difficultés surviennent pour trouver un personnel policier civil.

En outre-mer, seize escadrons sont présents en permanence pour des séjours de trois mois. Il a été décidé au niveau politique qu’il ne s’agirait que de gendarmes alors qu’il aurait été préférable, pour des raisons budgétaires, qu’il s’agisse, à parts égales, de gendarmes et de CRS. L’envoi en urgence de deux escadrons en 24 heures à Nouméa, par exemple, est très onéreux et l’achat de matériel serait préférable. En l’occurrence, la logique des statuts prévaut et compte tenu de la situation en Guyane, des risques de flambée de violence en Polynésie ou en Nouvelle-Calédonie, il est normal que ce soient des gendarmes qui y soient projetés.

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II. —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a procédé, en commission élargie à l’ensemble des députés, lors de la séance du mardi 23 octobre 2007, à l’audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, et de M. Hervé Morin, ministre de la défense, sur les crédits du programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité ».

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Je suis heureux, au nom de la commission des finances mais également de MM. Warsmann, président de la commission des lois, et Teissier, président de la commission de la défense, d’accueillir Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, ainsi que M. Hervé Morin, ministre de la défense. Cette commission élargie vise donc à débattre, au titre de la seconde partie du projet de loi de finances, des crédits de la sécurité. Une telle procédure tendant à instaurer un débat dynamique entre les ministres et les députés à partir de questions et de réponses précises a vocation à être étendue l’année prochaine à toutes les discussions budgétaires. M. Morin devant partir à 10 heures afin de se rendre à Cherbourg, les questions lui seront adressées en priorité. M. Warsmann doit, quant à lui, se rendre en séance publique pour assister à la CMP sur le projet relatif à la maîtrise de l’immigration.

Mme Delphine Batho – Je regrette que la commission élargie, sur un sujet aussi important que la sécurité, se déroule en même temps que la séance publique, consacrée à la CMP sur le projet relatif à la maîtrise de l’immigration et à laquelle participent nombre de parlementaires membres de la commission des lois qui ne peuvent donc être parmi nous. Une telle situation est d’autant plus regrettable que le texte débattu en séance publique aura des conséquences sur le budget de la mission sécurité.

M. le président de la commission des finances – C’est en effet une coïncidence malheureuse mais l’organisation de l’ordre du jour est particulièrement délicate.

M. Guy Teissier, président de la commission de la défense - Je suis très satisfait de coprésider cette commission élargie, cette procédure constituant une première pour la commission de la défense.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois – Je suis également très heureux de cette audition commune des ministres de l’intérieur et de la défense. Mais, devant me rendre en séance publique à 9 heures 30, c’est M. Bénisti qui me succèdera. Nous serons en particulier très attentifs aux annonces de Mme la ministre s’agissant du calendrier et du contenu de la future LOPPSI.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la commission des finances – Si la LOPSI 1 a été un succès par les moyens dégagés et les résultats obtenus, la LOPPSI 2 se prépare dans un contexte budgétaire plus contraint, notamment en matière d’effectifs. Qu’en sera-t-il précisément ? En quoi les premières conclusions de la Révision générale des politiques publiques influeront-elles sur le contenu de la LOPPSI 2 ?

La police et la gendarmerie ont en outre souvent été concurrentes et séparées, or, les maîtres mots sont aujourd’hui le rapprochement, le redéploiement et la mutualisation : mise en place d’un système commun d’analyses et de recherches criminelles, moyens aériens et nautiques, procédure de passations des marchés, formations des personnels. Un domaine échappe néanmoins à cette mutualisation : la police scientifique, les laboratoires de la police et de la gendarmerie relevant d’autorités séparées. Les arguments donnés pour justifier la pérennité de cette situation ne sont néanmoins guère convaincants et en particulier celui de la contre-expertise, devant être effectuée par le service relevant d’une autorité différente.

Depuis 2002, les pouvoirs du ministère de l’intérieur s’élargissent : responsabilité de l’emploi dans la gendarmerie et définition conjointe avec le ministre de la défense de l’attribution des moyens budgétaires de la gendarmerie. Ne faut-il pas envisager, à terme, de confier l’intégralité de la responsabilité budgétaire de la gendarmerie au ministre de l’intérieur, le ministre de la défense restant l’autorité hiérarchique et le gestionnaire des forces ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la commission des lois –  La police nationale a à peu près intégralement accompli le programme fixé par la LOPSI et la gendarmerie à 90% environ. La LOPPSI 2 permettra-t-elle d’opérer en l’occurrence quelques rattrapages ?

Si l’essentiel du rapprochement entre les forces de police et de gendarmerie a déjà été opéré, on peut se demander comment les redéploiements qui sont encore possibles seront effectués et comment la future LOPPSI les encouragera. Il s’agit en particulier de mieux prendre en compte l’évolution de la délinquance pour définir les effectifs nécessaires sur le terrain.

En ce qui concerne la fusion entre la DST et les Renseignements généraux, les résultats de l’expérimentation en cours sont plutôt bons. Il faudrait toutefois s’assurer que les policiers des renseignements généraux affectés au sein du dispositif de sécurité publique ne se verront pas confier des missions traditionnelles, au détriment des missions départementales des renseignements généraux.

La future LOPPSI devrait rechercher une performance accrue. Comment, dans ces conditions, rapprocher les politiques de formation de la gendarmerie et de la police nationale afin de créer une véritable continuité dans le parcours de formation, voire d’aller jusqu’à une mutualisation ?

Enfin, n’est-il pas maintenant envisageable de parachever le mouvement lancé en 2002 en regroupant les deux forces de sécurité, civile et militaire, au sein d’un grand ministère unique de la sécurité intérieure ?

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la commission de la Défense – La gendarmerie n’échappe pas à un plan de restriction budgétaire qui s’inscrit dans un contexte de dégradation générale des finances publiques. Afin de ne pas obérer ses capacités opérationnelles, il convient d’orienter les efforts vers une rationalisation de ses missions.

Je souhaite donc insister particulièrement sur la charge que représentent les transfèrements et les extractions de détenus : les incohérences et les dysfonctionnements dans leur exécution ne sont plus acceptables.

Ces opérations, auxquelles il convient d’ajouter les escortes d’étrangers en situation irrégulière, sont très coûteuses en personnel et en temps : 5 000 à 6 000 personnes dont 1 000 gendarmes sont mobilisées quotidiennement, à temps plein, pour ces tâches. En 2006, la gendarmerie a réalisé 119 349 mouvements auxquels elle a consacré 1 813 348 heures. Toute escorte mobilise trois militaires dont l’un remplit les fonctions de chauffeur. Les destinations ne se limitent pas aux juridictions et aux lieux de rétention les plus proches.

Ne pourrait-on recourir au bracelet électronique pour suivre les étrangers en situation irrégulière et à la visioconférence pour les procédures visant ceux qui sont déjà placés en centre de rétention administrative ?

La gendarmerie n’a aucun moyen d’anticiper l’augmentation des charges liées à ces missions et l’absence de toute planification empêche l’optimisation des effectifs. Faute de rationalisation, les magistrats demandent la présentation de plusieurs détenus à des horaires différents et la charge qui en résulte est inadmissible.

La multiplication des déplacements pour des présentations ou des notifications ne nécessitant qu’une dizaine de minutes est très regrettable et le GIGN a déploré un déploiement de forces disproportionné.

Les pertes de temps perturbent le fonctionnement des unités : dans la mesure où il est impossible de prévoir la durée des missions, les gendarmes qui y sont affectés sont considérés comme indisponibles pour toute la journée. Le non-respect des horaires de convocation par les magistrats entraîne un allongement indu de nombreuses extractions.

Il est urgent de desserrer la contrainte qui pèse de la sorte sur la gendarmerie. L’autorité judiciaire doit prendre conscience de la charge exorbitante que cela représente.

La visioconférence est actuellement expérimentée dans le ressort de Nancy entre les juridictions équipées et les établissements pénitentiaires de Metz et de Nancy. Le ministère de la justice a décidé de relancer les travaux communs avec la police et la gendarmerie pour un recours plus intensif à cette technique. Je soutiens cette démarche et je regrette qu’elle se heurte à des habitudes et à des mentalités qui devraient évoluer.

Plutôt que de déplacer de nombreux détenus, il serait plus rationnel d’organiser la venue des magistrats à la maison d’arrêt. Pour remédier à leur refus d’aller vers le justiciable, on pourrait aménager, à proximité de la prison, un local adapté à la présentation des détenus. Couplée avec les possibilités ouvertes par le code de procédure pénale de déléguer un acte de procédure ou de transférer l’ensemble d’une procédure aux juridictions du lieu de détention, cette solution permettrait de limiter les mouvements de détenus.

Le respect d’un préavis pour toute demande de mouvement, le traitement prioritaire des comparutions escortées et l’instauration de jours de convocations seraient des mesures de bonne gestion. On pourrait également confier aux magistrats la responsabilité des transfèrements en leur attribuant un plafond de dépenses.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales La première LOPSI a été intégralement exécutée en dehors d’un retard pour les effectifs de gendarmerie puisqu’il manque 950 emplois sur les 7 000 prévus. La création en 2008 de 475 ETPT, pour un budget de 20,2 millions d’euros devrait permettre de boucler pratiquement le programme prévu.

Cette loi a permis, de 2002 à 2008, une baisse sensible de la délinquance et une augmentation du taux d’élucidation. Ce mouvement se poursuit et il s’est même amplifié au cours des trois derniers mois.

Il faut donc poursuivre en ce sens avec la LOPPSI 2, qui vient d’être transmise au Président de la République et au Premier ministre. Elle devrait être examinée en Conseil de ministres courant novembre et sera présentée au Parlement dès que le calendrier le permettra.

La première orientation de ce texte est la modernisation. Il est en effet indispensable, face aux nouvelles formes de la délinquance, de donner aux forces de police et de gendarmerie les moyens de disposer d’un temps d’avance. La délinquance est de plus en plus mobile et transfrontalière ; la cybercriminalité se développe ; les risques liés au terrorisme évoluent, en particulier avec l’éventualité d’un recours aux armes nucléaires, biologiques et chimiques. Il convient donc que les forces de police et de gendarmerie disposent de tous les moyens nécessaires. La police scientifique et technique, en particulier, sera développée.

La LOPPSI 2 met aussi l’accent sur la mutualisation. En effet, pour des raisons d’efficacité mais aussi de bonne utilisation de l’argent public, des synergies doivent être recherchées. La plus grande compatibilité entre la police et la gendarmerie a précisément pour but de leur permettre de mieux s’adapter aux nouveaux enjeux de la délinquance.

Enfin, la nouvelle loi d’orientation vise à améliorer le management. La police et la gendarmerie, ce sont en effet d’abord les personnels, dont les compétences doivent être renforcées. Pour cela, un effort important sera fait en faveur de la formation permanente, du déroulement des carrières et d’un recentrage des missions sur les tâches qui ne peuvent être assurées que par des agents en uniforme.

L’amélioration du management concerne également les aspects internationaux : une plus grande efficacité de nos forces de police suppose des relations plus étroites avec les autres pays d’Europe. La présidence française de l’Union, à compter de l’été 2008, doit être l’occasion de renforcer les synergies et de mener des actions concrètes avec nos voisins.

En ce qui concerne l’articulation entre la police et la gendarmerie, plusieurs d’entre vous ont évoqué les compétences réciproques du ministre de la Défense et du ministre de l’Intérieur. Pour ma part, même s’il est sans doute fort rare qu’un ministre refuse qu’on élargisse le périmètre de son action, je demeure convaincue que l’existence de deux forces de sécurité ayant un statut différent, civil et militaire, est une garantie pour la démocratie. Je suis également persuadée que la gendarmerie doit demeurer rattachée au ministère de la Défense pour tout ce qui a trait au statut des personnels.

Cela ne signifie pas que le ministre de l’Intérieur ne doit pas être compétent en ce qui concerne un certain nombre d’aspects, notamment opérationnels, de la gendarmerie.

Le rapprochement avait été entrepris dès 2002 : le périmètre de mon ministère avait été élargi, surtout en matière budgétaire et d’affectation du personnel d’encadrement. La rationalisation doit continuer dans tout le domaine opérationnel, mais dans la limite absolue d’un rattachement significatif du personnel au ministère de la défense. M. Morin et moi-même préparons des propositions pour le Premier ministre. La ligne de partage doit garantir le rattachement des militaires à la défense tout en donnant au ministre de l’intérieur des moyens optimaux pour la lutte contre l’insécurité.

Les redéploiements entre les forces de police et de gendarmerie peuvent se faire d’un point de vue géographique ou thématique. Du point de vue géographique, l’affectation des forces de police en zone urbaine et de la gendarmerie en zone rurale correspond certes à notre tradition, mais surtout à des savoir-faire différents, des cultures, parfois des missions distinctes. L’ancrage territorial de la gendarmerie s’accompagne ainsi d’une mission de renseignements caractéristique de son action. Mais l’évolution de la société rend nécessaire de revoir ces frontières : les gendarmes n’ont rien à faire dans des zones périurbaines qui sont devenues des cités dortoirs. Et ces ajustements devront suivre chaque évolution de la société.

Quant aux redéploiements thématiques, il est évident que le problème des transfèrements que vous avez évoqué coûte beaucoup d’énergie, de temps et d’argent à la gendarmerie et correspond à une vision passéiste de l’organisation judiciaire. Il faut exploiter les moyens modernes de communication et prendre des critères de coût en considération. Plutôt que de déplacer les prisonniers avec toute l’escorte nécessaire, on peut déplacer les juges.

M. le Président de la commission des finances – En avez-vous discuté avec la garde des Sceaux ?

Mme la Ministre – Oui. Le projet avance. Des salles spécifiques sont notamment prévues dans les prisons nouvelles ou réhabilitées, et se généraliseront au fur et à mesure. Des évolutions sont aussi à prévoir pour ce qui concerne le dispositif des gardes statiques. Certaines resteront indispensables, mais il faut développer la vidéo-surveillance ou le recours à l’externalisation, comme cela se fait déjà dans certains tribunaux. Cela permettra de recentrer la police et la gendarmerie sur leur cœur de métier, qui n’est pas de rester immobile devant un immeuble.

En matière de police scientifique et technique, un évident souci de mutualisation doit permettre de renforcer les synergies et d’éviter le gaspillage d’argent, de compétences et d’énergie. Il faut réfléchir à rapprocher le plus possible les deux instituts, l’INPS et l’IRCGN, voire à les intégrer, mais en tenant compte de contraintes telles que les demandes de contre-expertise. Le travail est en cours, sans tabou. Tout ce que nous recherchons est une plus grande efficacité.

Je veux aussi développer la formation, qui est la garantie non seulement de l’efficacité des forces de police et de gendarmerie mais aussi de leur propre sécurité. La formation continue est en outre un moyen de promotion professionnelle, donc sociale qui est importante pour le personnel et tout autant pour le pays. Dans certains cas, la mutualisation est facile, surtout pour ce qui concerne les corps de soutien. Il est évident de mutualiser les formations à l’entretien du matériel ou à la passation des marchés publics. Pour les forces opérationnelles aussi, la mutualisation peut être très facile. Le centre d’entraînement de Saint-Astier pourrait ainsi assurer une formation commune à la sécurité en cas de violences urbaines. En revanche, d’autres domaines peuvent poser problème. C’est le cas de la formation permanente, qui est de 26 jours par an en moyenne dans la gendarmerie et de 16 jours pour la police. Je souhaite que l’adaptation permette de relever la durée et le niveau de la formation.

Le rapprochement de la DST et des RG vise à la fois à recentrer les deux forces au sein d’une direction centrale de la sécurité intérieure tout en gardant leurs savoir-faire spécifiques. Il ne s’agit pas de faire faire le même travail à tous, mais qu’ils continuent à faire ce qu’ils font le mieux. En matière de terrorisme par exemple, ils travailleront au sein de la même mission, mais en conservant le maillage territorial des RG et les méthodes de la DST. Le problème se pose d’un certain nombre de missions assurées par tradition par les RG mais qui ne relèvent pas à proprement parler du renseignement. C’est le cas du contrôle des jeux et des courses par exemple, ou du suivi des manifestations. Mais il reste important de continuer à recueillir des informations dans ces domaines. Le personnel qui assure ces fonctions pourra, sur la base du volontariat, partir dans les services chargés des jeux et des courses ou de la sécurité publique mais continuera à utiliser son savoir-faire propre et à faire du renseignement.

M. Hervé Morin, ministre de la défense  Si je suis obligé de partir si vite, c’est pour accueillir le vice-Premier ministre de Malaisie à l’occasion de la livraison du premier Scorpène à Cherbourg. C’est un moment important pour DCNS.

En ce qui concerne le rapprochement de la police et de la gendarmerie, une grande partie du chemin a été faite en matière d’emplois, d’affectations budgétaires, de répartitions des crédits et de conditions de nominations, mais il est évident que nous devons conserver deux forces de sécurité distinctes, l’une civile et l’autre militaire. La mutualisation est une évidence : certaines formations sont communes – celle des maîtres-chiens par exemple – de même que certains emplois et certains services, mais le projet de loi qui sera examiné l’année prochaine réaffirmera le statut militaire de la gendarmerie. La formation initiale notamment doit rester militaire. Les gendarmes ont des spécialisations propres, telles que la prévôté ou l’éventualité de partir en opération extérieure – je viens de signer le traité créant la force de gendarmerie européenne, susceptible d’intervenir par exemple au Kosovo – et les compétences propres de la gendarmerie aérienne et maritime sont aussi par nature militaires. Conserver le statut militaire ne se fait donc pas seulement au nom de grands principes, mais de ce genre de contingences. Dans ce cadre général, la mutualisation doit garantir que chaque euro est dépensé au mieux.

M. le Président de la commission des finances – Voilà qui est très clair !

Mme Delphine Batho – Nous savons que la tâche des deux ministères est difficile, avec la montée de la violence contre les personnes et la délinquance endurcie qui s’est installée sur certaines parties du territoire. C’est l’occasion de rendre hommage aux hommes et femmes de la police et de la gendarmerie qui font preuve de courage et de dévouement dans un contexte très difficile. Les événements récents ont montré que la stratégie de placer des forces de l’ordre très visiblement dans les centres urbains en laissant de côté les autres territoires ne fonctionne pas : les centres urbains sont le théâtre d’affrontements entre bandes. Les policiers que nous avons entendus évoquent un travail à flux tendu, sur le fil du rasoir, avec des difficultés d’intervention considérables : la moindre patrouille ou perquisition nécessite un déploiement de forces important. Le recours aux drones n’est en soi pas condamnable, mais entérine tout de même une situation très dégradée.

De nouveaux chantiers ont été ouverts depuis la nomination du nouveau Gouvernement et nous regrettons de ne pas avoir pu entendre les ministres avant ce matin.

Mme la Ministre - Je suis en permanence à la disposition des commissions.

Mme Delphine Batho – Nous peinons à distinguer les orientations saillantes de la politique de la sécurité. Le budget pour 2008 semble être un budget d’attente avant la nouvelle LOPPSI.

Le Gouvernement a annoncé une deuxième loi de programmation dans un délai assez rapide. Dans ce calendrier serré, la consultation des organisations syndicales est-elle bien prévue ? Plus largement encore, nous nous interrogeons sur le rapprochement envisagé entre forces de police et forces de gendarmerie. En effet, si personne n’avait proposé de remettre en cause le statut de la gendarmerie, l’engagement avait été pris par M. Sarkozy que la gendarmerie serait chapeautée par le ministère de la sécurité. Autant dire que les réponses qui viennent d’être faites à nos collègues laissent perplexe.

Surtout, ce budget est un mauvais signal en ce qu’il prévoit le non-remplacement de 1 400 emplois dans la police, de 140 gardiens de la paix et de 805 ETP dans les forces de sécurité et de paix publique. De surcroît, on envisagerait, d’ici à 2011, la suppression de 8 000 à 10 000 emplois dans la Mission « sécurité » et la suppression de la moitié des brigades de gendarmerie du pays. Étant donné la situation précédemment décrite, nous ne pouvons pourtant baisser la garde. Des réformes de structures sont bien sûr nécessaires mais l’on ne peut ainsi tailler dans les effectifs, défaisant du même coup ce que la même majorité a fait depuis 2002, ce qui serait curieux… Quelles sont donc les intentions réelles du Gouvernement ? L’opposition, qui a voté, en son temps, l’article 2 de la LOPSI, consacrée aux moyens, vous jugera sur vos actes et sur vos résultats. Mais vous avez, Madame la ministre, la redoutable mission de mener à bien des réformes de structures annoncées mais qui n’ont pas été faites par votre prédécesseur. Toute la question est donc de savoir si vous avez la confiance du Président de la République, cette confiance qui vous permettra d’accomplir ce qu’il n’a pas fait lui-même. (Mouvements divers)

M. Christophe Caresche – L’héritage est lourd !

M. Michel Voisin – Je suis très attaché au statut militaire de la gendarmerie. Les missions de sécurité en milieu rural étant très différentes de ce qu’elles sont en milieu urbain, je suis persuadé que si forces de police et de gendarmerie étaient fusionnées, leur efficacité déclinerait. Je souhaite par ailleurs mettre l’accent sur la distension progressive des liens entre élus locaux et gendarmes. Il n’est pas une réunion de maires au cours de laquelle cette évolution n’est évoquée, pour être déplorée. Les maires des zones rurales constituent pourtant un réseau de renseignements inestimable pour la gendarmerie ; la communication doit donc être rétablie et développée entre édiles ruraux et gendarmes.

J’aimerais aussi savoir quels progrès ont été accomplis pour lutter contre l’utilisation virtuose par certaines bandes des nouveaux moyens de communication, qu’il s’agisse des téléphones cellulaires ou de l’informatique.

Enfin, une information diffusée ce matin sur certaines radios m’a effaré. Selon les médias, l’estimation de la vitesse des véhicules diffère singulièrement selon la position donnée aux radars, et il semble que nombre de nos compatriotes ont été sanctionnés pour vitesse excessive alors qu’ils roulaient à la vitesse règlementaire. S’il en est ainsi, non seulement ils ont réglé une amende indue, mais certains ont perdu sans motif les points attachés à leur permis de conduire, ce qui a pu être à l’origine de difficultés considérables dans certaines professions. Qu’en est-il ?

M. Yves Fromion – Ma question portera aussi sur la gendarmerie, ce qui montre tout l’intérêt que les parlementaires portent à cette force d’élite. Le budget qui nous est présenté ne permet pas d’envisager le recrutement de réservistes à la hauteur précédemment fixée ; nous sommes nombreux à le regretter et à souhaiter que l’on aille plus loin. Les réservistes de la gendarmerie apportent un renfort précieux aux brigades lorsque leurs effectifs sont un peu courts ; de plus, leur bonne connaissance du terrain leur permet d’alimenter très utilement l’indispensable renseignement. Comment faire, alors, pour que les réservistes de la gendarmerie soient mieux territorialisés et que, ce faisant, leur nombre soit en meilleure adéquation avec les effectifs des brigades ? La question est d’importance car, de plus en plus souvent, les jeunes gendarmes, nés et élevés en ville, ont une connaissance imprécise du territoire auquel ils sont affectés, et l’efficacité de leur travail s’en ressent.

M. Jean-Claude Viollet – L’année 2008 étant une année de transition entre la LOPSI 1 et la LOPPSI 2, et un Livre blanc étant en cours d’élaboration qui se traduira par une nouvelle loi de programmation, nous devons être particulièrement vigilants et vérifier que l’équilibre des missions « défense » et « sécurité » est préservé. Nous l’avons dit au général Parayre lorsque nous l’avons entendu, nous vous le disons aussi, Madame et Monsieur les ministres. La question n’est pas seulement celle du statut : c’est aussi celle de la complémentarité. Or l’inspecteur des finances François Mongin préconise, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, de « placer la police et la gendarmerie sous l'autorité organique du ministre de l'intérieur ». « Ces propos n’engagent que leur auteur », auriez-vous dit, Madame la ministre. Sans doute, mais ils ont été écrits. Une vigilance particulière s’impose car, s’il faut en effet passer d’une conception statique à une conception dynamique des forces de sécurité, nous devons aussi préserver la dimension de défense attachée à la gendarmerie. À cet égard, la suppression de la moitié des brigades de gendarmerie évoquée par M. Mongin n’est tout simplement pas envisageable, sauf à renoncer à la défense de notre territoire. Nous avons donc besoin d’éclaircissements de la part du Gouvernement. Il me semblerait aussi naturel que les parlementaires disposent, comme la presse, du rapport Mongin.

M. le Ministre - Je partage sans réserve le point de vue exprimé par M. Viollet. Comme nous sommes d’accord, je ne doute qu’il votera avec enthousiasme la LOPPSI 2 et la prochaine loi de programmation militaire. (Sourires) Nous devons mutualiser ce qui peut l’être et privilégier les formations continues communes lorsque c’est possible, mais nous devons aussi préserver le continuum entre défense et sécurité. Cela implique que la gendarmerie conserve son statut militaire.

Parler d’un « rapport Mongin » est excessif. Le principe de la révision générale des politiques publiques est de permettre à tous les esprits brillants de la République de s’exprimer. S’il fallait pour autant porter à la connaissance du Parlement le bouillonnement d’idées permanent qui en résulte, vous auriez de quoi vous agiter quotidiennement ! L’étape actuelle est celle d’une réflexion d’ensemble, mais la sérénité s’impose. Madame Alliot-Marie et moi-même ne nous sommes pas concertés et elle vous répondra à son tour pour ce qui la concerne. Pour ma part, je rappelle que les forces de sécurité sont sanctuarisées en 2008. On peut suggérer de supprimer la moitié des brigades de gendarmerie, mais ce n’est pas dans les intentions du ministre de la défense et je ne pense pas que telle soit non plus la perspective envisagée au ministère de l’intérieur.

L’effectif des réservistes de la gendarmerie, Monsieur Fromion, est de 23 000 hommes et femmes en 2007. Nous espérons qu’il sera de 28 000 en 2008 – avec au moins vingt jours d’emploi par an –, car nous souhaitons le porter à 40 000 à l’horizon 2012. J’ai constaté moi-même l’importance du travail accompli, avec enthousiasme, par les réservistes de la gendarmerie. Ils sont déjà, vous le savez, départementalisés, mais l’idée est séduisante de rapprocher réservistes et compagnies de brigades. Une réflexion pourrait s’engager avec la direction de la gendarmerie nationale à ce sujet. Des pré-affectations pourraient peut-être être envisagées, à condition de conserver une souplesse suffisante, permettant le déploiement des réservistes en d’autres points du département, si nécessaire.

M. Thierry Carcenac – Nous ne le savons que trop, les casernes de gendarmerie sont, pour la plupart, d’une extrême vétusté. Par ailleurs, les travaux de rénovation provoquent de très fortes hausses de loyer. Si l’on souhaite véritablement maintenir la gendarmerie en milieu rural, des moyens supplémentaires sont nécessaires.

M. Christophe Caresche – Nous sommes tous très attachés au maintien du statut militaire de la gendarmerie. Ce qui pose problème, c’est que police et gendarmerie sont en concurrence pour nombre de missions et qu’une mutualisation est nécessaire. Je donnerai pour seul exemple celui des secours en montagne, où interviennent services de la gendarmerie, police nationale et services départementaux.

On se souvient des longues discussions entre le ministre de l’Intérieur et le ministre de la défense pour savoir si la gendarmerie devait ou non appartenir à la mission Sécurité. Maintenir deux programmes différents dans le cadre d’une mission n’incite pas à la rationalisation budgétaire. Ne pourrait-on envisager un programme conjoint entre Police et Gendarmerie ?

M. Christophe Guilloteau – Je présidais hier une réunion d’un syndicat intercommunal qui gère les bâtiments de gendarmerie. Autrefois, les gendarmes avaient quelques moyens pour s’occuper des abords de leurs casernes. Désormais, ils sollicitent les collectivités locales. A-t-on prévu dans ce projet de budget quelques crédits qui permettraient de ne pas transférer l’entretien des abords, pelouses et autres, aux collectivités locales ?

M. le Ministre – Le budget de fonctionnement de la gendarmerie augmente de 3 %, alors que celui des forces armées est en légère diminution. On y trouvera donc peut-être quelques crédits pour la tonte des pelouses… En tant qu’élu local, je considère que ces questions relèvent également des bonnes relations entre gendarmes et élus locaux. Mais si nous pouvons décharger les syndicats intercommunaux de ce genre de tâche, nous le ferons.

S’agissant de l’immobilier, la hausse des loyers nous a effectivement obligés à inscrire 30 millions supplémentaires au budget 2007. Nous avons fait de gros efforts pour le logement locatif ces dernières années et les conditions de logement des gendarmes ont été grandement améliorées. Il reste d’importants efforts à faire pour le parc domanial, et nous allons les poursuivre. Du moins, l’évolution des loyers n’étant plus à la hausse, nous devrions disposer de plus de marges au budget 2008 pour lancer de nouveaux programmes.

M. le Président de la commission des finances – Je vous remercie, Monsieur le ministre.

(M. Morin quitte la séance)

Je donne la parole à Mme Alliot-Marie pour répondre aux questions.

Mme la Ministre – Je le ferai en reprenant les interventions successives.

Madame Batho, tant qu’il y aura des viols et des agressions, la sécurité restera une question difficile. Je me réjouis cependant qu’elle le soit moins qu’il y a quelques années, car j’ai trouvé, à mon entrée en fonctions, une situation meilleure que mon prédécesseur en 2002. La délinquance avait alors sensiblement augmenté. De 2002 à 2006, elle a diminué de 9,44 %, avec les mêmes instruments de mesure. Mais la délinquance change de nature et nous devons nous adapter à ses formes nouvelles.

Il y a quinze ans, la prévention du terrorisme n’était pas un souci quotidien comme aujourd’hui, il y a cinq ou sept ans, la cybercriminalité n’avait pas la même ampleur, il y a trois ans les violences contre les personnes représentaient une part moindre dans la délinquance. J’ai donc demandé à l’Observatoire de la délinquance d’affiner les données, dans un souci de clarté et d’efficacité.

Cela étant, depuis juin dernier, la baisse de la délinquance atteint des proportions considérables, y compris pour les violences contre les personnes qui, en septembre, avaient diminué de 7,45 % par rapport à septembre 2006. Je reste prudente quant à l’avenir, mais je souligne du moins le bon travail des forces de police et de gendarmerie.

Parmi les phénomènes dont la manifestation récente a été soulignée, il y a celui des bandes, mais je l’ai connu entre 1993 et 1995, lorsque j’étais ministre de la jeunesse et des Sports – souvenez-vous de la destruction des commerces du parvis de La Défense. Elles réapparaissent périodiquement. Encore ne faut-il pas qualifier de bande ce qui n’en est pas une. Dans les incidents de Pigalle, il s’agissait d’une bande, à la gare du Nord, non. Leur configuration varie, ici sur fond de trafic de drogue et d’opposition « commerciale », si l’on ose dire, entre réseaux, là sur fond d’oppositions ethniques.

Je fais surveiller ce phénomène de près et il convient d’envisager différentes actions, en liaison avec tous les acteurs de la chaîne de la sécurité, depuis les maires, qui sont les premiers au contact du terrain, jusqu’à la Justice et aux associations de réinsertion, en passant par l’Éducation nationale, les associations, la police ou la gendarmerie.

Vous demandez également quelles sont les orientations saillantes de ce budget.

Il y a d’abord une priorité nettement affirmée en faveur de la police scientifique et technique. Elle le sera plus encore dans la LOPPSI 2. Mais, dès cette année, elle porte sur les matériels et éventuellement les locaux, avec un possible regroupement, en région parisienne, des laboratoires de la police scientifique. Nous avons dégagé un milliard de crédits pour ce secteur, notamment pour regrouper les fichiers d’empreintes génétiques. Nous allons également développer les moyens de vidéosurveillance qui sont très efficaces. Récemment, un maire communiste de Seine-Saint-Denis me disait que cela avait permis d’éliminer totalement la délinquance dans un parking public de sa ville, et on constate, en général, une diminution de 40 %. J’ai dégagé des crédits pour, dès fin 2007, établir des relais entre les centres municipaux qui effectuent cette vidéosurveillance et la police, afin de mieux réagir aux agressions sur le champ et d’améliorer ensuite l’élucidation des affaires.

Une autre orientation de ce budget est de maintenir les effectifs. À ce sujet vos informations semblent inexactes, ou peut-être comprenez-vous mal la distinction entre les emplois et la notion de plafond d’emploi. Il n’y aura aucune diminution du nombre de gardiens de la paix, de policiers et de forces d’encadrement. Mon ministère appliquera effectivement la règle du non remplacement d’un départ en retraite sur deux, mais la diminution portera sur les adjoints de sécurité, que nous avons de toute façon bien du mal à recruter.

Une autre orientation, qui concerne également le personnel, est le renforcement de la formation et des entraînements. J’ai donné des directives à ce sujet aux centres de formation. Il est indispensable désormais d’envisager les questions de sécurité au niveau européen. D’autre part, au cours de sa carrière, un cadre doit cumuler une expérience du terrain, de l’administration, d’autres administrations, et une expérience dans un autre pays ou dans une organisation internationale. Mais, pour renforcer les relations avec d’autres pays, il faut parler des langues étrangères. Les centres de formation renforceront cet aspect et accueilleront également plus d’étrangers en stage ou pour une partie de leur formation.

Une de nos préoccupations, à travers ce budget 2008, est également de mieux prendre en compte les problèmes personnels des policiers afin de les fidéliser. Il n’est pas normal qu’il n’y ait que des policiers en début de carrière dans les zones difficiles. L’obstacle tient moins à la difficulté du travail lui-même qu’aux problèmes de logement, d’accueil de la famille, d’emploi du conjoint et de garde d’enfants. Nous avons donc inscrit à ce budget les crédits nécessaires pour réserver 500 logements pour de jeunes policiers en région parisienne et pour créer 100 places de crèche supplémentaires. Des roulements sont nécessaires, mais il faut que les jeunes puissent s’intégrer à des équipes expérimentées.

Encore une fois, les orientations que je viens de rappeler seront renforcées dans la LOPPSI 2.

S’agissant des fameux propos d’un inspecteur des finances chargé, avec d’autres, de la révision générale des politiques publiques, ils n’engagent que leur auteur. La sécurité des Français est un sujet assez grave pour qu’on ne s’égare pas dans des solutions simplistes et sans rapport avec les contraintes du terrain. Si les personnes les plus intelligentes peuvent se laisser aller à toutes sortes d’élucubrations, tous ceux qui connaissent le terrain sont d’accord pour des solutions qui ne passent certainement pas par des suppressions à la hache. On me connaît assez pour savoir que tout ce bruit ne m’émeut pas.

M. Voisin a abordé le problème des rapports avec les élus locaux. Je parle régulièrement du sujet lors des sorties de promotion. Nous voulons que les gendarmes soient plus visibles, ce qui suppose également qu’ils aient des contacts réguliers avec les élus locaux et les gens qui comptent dans une commune. Dans la lutte contre le terrorisme, en particulier contre l’ETA, cela a déjà donné des résultats. Je rappelle donc régulièrement, y compris par écrit, qu’appendre à établir ces contacts, est une dimension de la formation. On peut comprendre aussi une certaine timidité des jeunes gendarmes. Il faut donc faire un effort de part et d’autre : les élus par exemple doivent songer à inviter les gendarmes à divers manifestations locales.

S’agissant des contrôles routiers, une fiche du service logistique de Metz, faisant état d’un certain nombre de risques de fonctionnement de radars embarqués en cas de changement d’angle de la prise de vue, a été transmise à la DGPN, à l’industriel concepteur et au service de métrologie ; les nécessaires précautions de positionnement et de paramétrages ont, quant à elles, été répétées aux personnels. En cas d’erreur ou de doute sur l’infraction, le centre automatisé de constatation des infractions rejette les messages.

M. Fromion a évoqué les réservistes de la gendarmerie, auxquels je réaffirme mon attachement. La réserve devrait d’ailleurs être développée dans la police, notamment pour les actions de prévention.

Il est important de discuter avec les organismes de gestion et de construction de locaux de gendarmerie qui, souvent, exagèrent le montant des loyers, ceux-ci devant être fixés au prix du marché. Un effort global doit être fait. J’ai en outre demandé à Bercy la modification du décret de 1993 pour permettre aux départements d’intervenir dans les négociations, notamment lorsque les petites communes ne le peuvent pas, mais je n’ai à ce jour reçu aucune réponse.

Je ne partage pas le point de vue de M. Caresche sur l’organisation des secours en montagne. Même si des rivalités se font jour parfois entre les différents services, c’est le bon accomplissement de la mission qui prime d’abord pour l’ensemble d’entre eux. J’étudie également la question des relations entre les SAMU et les pompiers, l’essentiel étant d’additionner les énergies.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial  En cas de « coups de grisou » dans les banlieues ou ailleurs, les moyens départementaux sont vite insuffisants et il faut faire appel aux CRS ou aux gendarmes mobiles. Outre leur temps de mise en place, qui est assez long, ces forces ne connaissent pas toujours les détails du terrain et leurs règles d’emploi sont assez contraignantes. Il est question de créer au sein de la direction centrale de la sécurité publique des compagnies de sécurisation pouvant intervenir par zones ou régions. Qu’en est-il précisément ? De quels moyens disposeront-elles ? Cela supposera-t-il une réorganisation des CRS ?

S’agissant des investigations judiciaires, le protocole national de répartition des compétences entre la police et la gendarmerie est-il susceptible d’aboutir ?

M. Philippe Goujon – Je tiens tout d’abord à rendre hommage aux forces de police et de gendarmerie grâce auxquelles, notamment, la délinquance a baissé. Je me réjouis également de la présentation prochaine de la LOPPSI 2.

Un rapport de l’Inspection générale a récemment été remis à Mme la ministre sur le plan national de vidéo surveillance, dont le déploiement est pleinement justifié pour lutter contre le terrorisme ou mieux sécuriser les sites sensibles. Si des centaines de villes sont équipées, Paris n’en comporte que 330 – hors celles de la RATP et de la SNCF - quand Londres, par exemple, en compte 60 000. Est-il possible d’avoir des précisions sur ce plan et d’accélérer son application, notamment dans la capitale ?

Mme la ministre a organisé une réunion afin d’améliorer la coordination des services de police et de gendarmerie dans la lutte contre les violences urbaines et les bandes organisées en Île-de-France. Ne faut-il pas mettre en place une « police du grand Paris » dont la compétence s’établirait sur une zone plus importante que Paris intra muros ? Cela devrait également s’accompagner de mesures afin de fidéliser les effectifs dans cette région : 500 logements doivent être mis à disposition ainsi que 100 places de crèches. Quelles mesures statutaires et indemnitaires, enfin, peuvent-elles être mises en place de façon à favoriser un meilleur recrutement régional ?

La police ayant évidemment un grand rôle à jouer dans la régulation de la circulation à Paris, les effectifs doivent être renforcés. Qu’en est-il de la réforme en cours devant permettre à terme d’y affecter plusieurs centaines de policiers ?

Mme Arlette Grosskost – Si la délinquance baisse en effet globalement, comme l’attestent les chiffres de l’Observatoire national de la délinquance – le recul a été de 3,3 % sur les trois derniers mois -, la violence faite aux personnes, elle, augmente, notamment dans ma circonscription. Quels seront les moyens mis en œuvre afin de lutter contre ce phénomène ?

M. Jean-Claude Bouchet – La dotation des commissariats de police en moyens humains est fondée essentiellement sur un critère démographique, le nombre de policiers étant proportionnel au nombre d’habitants de la ville dans laquelle ils interviennent. Or cet effectif théorique devrait plutôt être calculé en fonction du niveau et du type de délinquance : on ne peut traiter en effet avec les mêmes moyens une ville de 25 000 habitants comme Cavaillon, exposée à une forte délinquance de voie publique, et une ville de 25 000 habitants dont le climat est plus serein.

À Cavaillon, précisément, la délinquance de voie publique demeure très élevée puisqu’elle représente plus de 60 % de la délinquance globale. Le Gouvernement envisage-t-il donc de définir ainsi l’effectif théorique, ce qui impliquerait par exemple une dotation supplémentaire de cinq agents à Cavaillon ? Est-il envisagé, en outre, de rendre les services de nuit plus attractifs et d’améliorer le système de dotation afin d’éviter qu’un départ entraîne systématiquement une vacance de poste pendant plusieurs mois ?

M. Michel Vergnier – Tout d’abord, il faudrait commencer le classement des départements en matière de sécurité par les plus sûrs d’entre eux, la Creuse obtenant ainsi la première place. En la matière, il importe en outre de maintenir un maillage territorial fort.

Les communautés de brigades se sont mises en place dans la difficulté, voire dans la confusion. Une évaluation de ce dispositif est-elle prévue ? Comment les élus y seront-ils associés ?

Je ne suis pas un nostalgique du gendarme de Saint-Tropez, mais force est de constater qu’avec la politique, légitime, en faveur des jeunes et des femmes, le lien avec la population se distend. Peut-être pourrait-on y remédier en améliorant la formation, en particulier en milieu rural. De même, dans des commissariats, les personnels changent fréquemment et l’on a souvent affaire à des gens moins formés. Sans doute faudrait-il veiller à l’affectation de policiers assez anciens.

Enfin, il ne faut pas que les départements qui présentent les meilleures statistiques soient les variables d’ajustement de ce budget. Laissez-nous donc en tête de classe…

M. Pierre Cardo – S’il y a beaucoup d’éléments positifs dans ce budget, un certain nombre de questions restent en suspens, notamment en ce qui concerne la répartition des effectifs sur le territoire. Ainsi, depuis plus de quinze ans, des rapports font apparaître des inégalités entre Paris, la petite couronne et le grande couronne. Or les populations les plus en difficulté ont été sans cesse éjectées vers la grande couronne, sans que les moyens ne suivent. Au sein de la grande couronne elle-même il existe des disparités. Ainsi les effectifs du secteur de Saint-Germain-en-Laye sont supérieurs à ceux de celui de Conflans-Sainte-Honorine, qui compte pourtant trois quartiers sensibles.

En 2002, face au faible taux d’élucidation constaté dans les quartiers, nous avions souhaité que la police scientifique y soit plus présente et plusieurs brigades spécialisées avaient été créées à cet effet, mais en prélevant leurs effectifs dans les commissariats. Or, aujourd’hui, on voit peu intervenir les différentes polices scientifiques et le GIR est également absent. Du coup, la présence policière se réduit fortement. Qui plus est, les policiers manquent d’indicateurs, les quartiers étant « sécurisés » par les trafiquants de drogue. Il faut d’ailleurs se méfier des statistiques qui peuvent montrer moins une réduction du nombre des actes de délinquance qu’un renforcement de l’omerta. De même, je suis surpris que les GIR n’interviennent pas davantage contre le blanchiment, alors que la vente de commerces est florissante et que j’ai même vu circuler ces derniers jours une Lamborghini dans ma commune…

Si la technologie peut aider, elle ne remplacera jamais la présence humaine. Qui plus est, il n’est pas facile pour les communes dépourvues de ressources de développer la vidéosurveillance.

Si l’on ne peut que se réjouir des efforts accomplis pour lutter conte la délinquance routière, il faut être conscient que la stricte application des retraits de points du permis de conduire a eu pour effet pervers qu’il est de plus en plus courant de conduire sans permis. C’est un sujet qui mérite réflexion.

Enfin, je suis surpris que ma commune soit la seule où une crèche soit ouverte 24 heures sur 24 : les policiers travaillent à des horaires exceptionnels et il conviendrait de prévoir un service public adapté de garde des enfants.

M. Christophe Caresche – Des objectifs quantitatifs ont-ils été fixés quant au nombre des empreintes recueillies dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques ?

Par ailleurs, si la fusion des services de renseignements est une bonne chose, il faut être particulièrement vigilant pour que les missions précédemment dévolues aux renseignements généraux pour tout ce qui a trait à la délinquance, aux phénomènes de bandes et aux violences urbaines continuent à être exercés, car elles sont indispensables à l’action efficace des forces de police.

S’agissant de la vidéosurveillance où peut-on trouver dans ce budget les crédits annoncés par la ministre ? Quel est leur montant ? Ne seront-ils pas ponctionnés sur les crédits destinés à la prévention de la délinquance ?

M. Jean-Christophe Lagarde – Alors que, depuis 2002, l’État a fait d’importants efforts pour augmenter les effectifs, on observe cette fois une diminution de 1 200 emplois d’agents de terrain, même si le nombre des ETPT reste supérieur à celui de 2006. Vous avez fait part de votre choix de ne pas remplacer les adjoints de sécurité pourtant bien utiles dans les commissariats. Dans le cadre de la future LOPPSI 2, il faudra veiller à ce que les suppressions de postes ne nuisent pas à la lutte contre l’insécurité. Mieux vaudrait qu’elles portent sur des personnels administratifs que sur des fonctionnaires de terrain.

M. Cardo a eu raison d’évoquer les GIR. Depuis cinq ans, j’alerte les services de police sur le fait que des commerces de Seine-Saint-Denis sont rachetés à des prix faramineux. Les boutiques où l’on manipule des espèces se multiplient : on compte 74 sandwicheries pour la seule ville de Drancy. Or le GIR s’occupe du contrôle des gens du voyage, mais il ne s’intéresse pas à ces pratiques...

Par ailleurs, les effectifs mobiles ont été calibrés dans les années soixante afin de faire face à une importante contestation sociale et l’on a ensuite eu l’idée de les utiliser comme force de sécurisation des quartiers. Je ne suis pas convaincu de leur utilité pour cette tâche. Cela vaut en particulier pour les CRS, dont l’utilisation est moins souple que celle des gendarmes mobiles, la différence tenant peut-être à leur formation. Peut-être pourrait-on prévoir une diminution de leurs effectifs afin d’augmenter ceux des commissariats. Sans doute se heurterait-on à des questions de statut et à des résistances des syndicats, mais la rupture c’est aussi cela.

Alors que l’indicateur d’élucidation est détaillé par catégorie, je m’étonne que nous ne disposions pas du détail des infractions.

Il y a plusieurs années que j’interviens sur les problèmes de logement des policiers, notamment en Île-de-France. Des crédits sont inscrits, mais on n’a jamais sollicité les élus et les bailleurs sociaux de Seine-Saint-Denis. C’est dommage car certains seraient volontaires pour participer à la politique de réservation, surtout au prix prévu de 41 154 euros, qui paraît deux fois supérieur à ce qui est normalement nécessaire pour réserver un logement. Il y a sans doute là des économies à faire…

Enfin, si tout le monde souhaite une sécurité maximale sur le site de l’aéroport Charles de Gaulle, la politique d’attribution des badges par le sous-préfet chargé de la sécurité aéroportuaire paraît aléatoire et certains refus semblent injustifiés.

Il arrive qu’on puisse faire revenir l’administration sur sa décision, mais c’est très aléatoire. Lutter contre les activités extrémistes est une chose, mettre un employé de trente ans au chômage parce qu’il a fait une bêtise à vingt en est une autre. Beaucoup de gens ont perdu leur emploi sur la plateforme, et la question est plus importante qu’elle n’en a l’air.

M. le Président de la commission des finances – Nous sommes quelque peu sortis du sujet budgétaire.

Mme Delphine Batho – Il a été question de police localisée, ou territorialisée. Pouvez-vous nous en dire plus sur son organisation locale, et sur le lien entre la police et la population ?

Quant à l’économie souterraine, le dispositif qui permet de réaffecter les saisies au budget de l’État semble très difficile à mettre en pratique. Un bilan a-t-il été tiré ?

En ce qui concerne la modernisation des services, les crédits d’investissement sont en baisse pour les salles d’information et de commandement. Les obligations légales des opérateurs privés de téléphonie et d’internet vont-elles être renforcées, pour améliorer leurs tarifs et leurs délais de réponse en cas de réquisition judiciaire ? Les équipements des services en haut débit vont-ils être améliorés, sachant qu’il y a de plus en plus de mails à intercepter et d’adresses IP à contrôler ?

Quant au fichier national des empreintes génétiques, les crédits qui y sont consacrés ne sont pas apparents cette année. À combien se montent-ils ? Est-il vrai qu’un stock de 80 000 à 100 000 empreintes sont en attente pour cause d’engorgement, et que les délais de traitement, hors affaires urgentes, atteignent dix-huit mois ? Il semble que l’ADN des policiers eux-mêmes doive être fiché, pour éviter toute confusion dans les enquêtes. Dans quel cadre légal cela sera-t-il fait ?

M. Claude Bodin – Sept millions de voyageurs empruntent chaque jour les transports en commun franciliens. Dans le Val d’Oise, la gare d’Ermont-Eaubonne voit passer, entre le RER C et les trains des gares du Nord et de Saint-Lazare, 30 000 voyageurs par jour. Un grand nombre d’actes délictueux sont bien sûr commis : vols à la tire, agressions… La sécurité dans les transports est donc un objectif prioritaire. La création en 2003 du service régional de la police des transports a permis un net recul de la délinquance, grâce au déploiement de 1 300 policiers. Malgré cette présence à la fois rassurante et dissuasive, un fort sentiment d’insécurité persiste, surtout en soirée et durant les heures creuses. La présence policière va-t-elle être renforcée ?

M. Patrice Calméjane – Depuis juin, Madame la ministre, vous avez fait plusieurs visites en Seine-Saint-Denis et vous y avez rencontré tous les acteurs locaux. Quelles analyses en avez-vous tiré et quelles orientations comptez-vous prendre ?

Mme la Ministre – Plusieurs d’entre vous m’ont interrogée sur les compagnies de sécurisation : il est vrai qu’en cas de problème, aucun département ne dispose d’une capacité de réaction immédiate suffisante. J’ai commencé à y répondre, en région parisienne, en améliorant la coordination et en organisant une mise en commun plus systématique des capacités de réaction. Le préfet de police de Paris rencontre dorénavant tous les mois les sept préfets de département de la couronne pour un échange permanent d’informations. En cas de problème dans un des départements, la mutualisation des forces sera automatique.

Néanmoins il faut aller plus loin et élargir le dispositif en dehors de la région parisienne. D’où l’idée d’une réorganisation de la police territoriale et de la création de groupements qui permettraient de faire intervenir des forces plus ancrées dans la région que les CRS, mais tout de même mobiles – des groupements intermédiaires pour répondre à des situations intermédiaires. Une partie des forces mobiles devraient être reversée sur ces nouvelles forces. J’attends un rapport sur cette question pour la fin du mois.

Les GIR, qui permettent de faire participer des experts aux compétences très différentes à la même opération, constituent un dispositif très efficace, notamment en matière de drogue. Malgré leurs résultats très intéressants, ils connaissent actuellement une baisse d’activité. Je souhaite les relancer très activement et je suivrai personnellement leur évolution. Quant à la sécurité des transports en commun, le service régional de la police des transports regroupe 1 200 personnes sous un commandement unique. Il a permis de diminuer sensiblement la délinquance sur le réseau ferré. La création d’une salle unique de commandement pour les réseaux de la RATP et de la SNCF sera très utile, notamment en permettant de suivre les déplacements de population dans leur ensemble. Un certain nombre d’équipements locaux de surveillance y seront également connectés.

La RATP et la SNCF ont annoncé un plan d’équipement de plusieurs milliers de caméras : c’est ce qui prime désormais, pour assurer à nos concitoyens la meilleure sécurité possible. Il me semble en effet que les effectifs sont suffisants : il n’y aura jamais une patrouille dans chaque véhicule. C’est la vidéosurveillance qui doit être améliorée, en nombre, bien sûr, mais aussi en qualité : dans le drame récent qui a coûté la vie à un journaliste italien, non seulement il n’y avait pas de caméra au bon endroit mais les images des autres sont trop floues pour être exploitées ! La vidéosurveillance est donc indispensable pour l’optimisation des moyens humains.

J’ai dégagé 4 millions sur la fin du budget de2007 pour raccorder la vidéosurveillance des communes et des sociétés de transport à la police nationale. Pour l’an prochain, 30 millions sont prévus pour des équipements de vidéosurveillance, qui ne seront pas pris sur le fonds de prévention de la délinquance. J’ai aussi voulu que le nombre des caméras soit triplé, non pas en cinq ans, comme cela était proposé, mais en trois. Nous disposerons donc de 20 000 caméras d’ici à la fin 2009. Combinées avec celles des communes, de la RATP et de la SNCF, elles offriront une très large couverture.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué, à propos de la lutte contre les violences urbaines, la question de la fidélisation. Celle-ci peut être encouragée par des mesures en termes de carrière – j’ai demandé des propositions pour la LOPPSI – mais aussi par des efforts en matière de logements ou de crèches par exemple. J’ai fait appel à tous les maires de la Seine-Saint-Denis, Monsieur Lagarde, pour participer à cet effort.

Les policiers et leur famille ne peuvent être logés dans les quartiers, et parfois dans les villes, où ils travaillent sans risquer des agressions verbales ou physiques. Il faut mettre sur pied une sorte de bourse des logements pour leur assurer d’être logés dans un endroit pas trop éloigné et bien desservi, mais où la tranquillité de leur vie de famille ne sera pas compromise. Quant aux crèches, elles doivent d’adapter à des horaires de travail décalés. C’est ce que j’avais fait au ministère de la défense, notamment en faveur du personnel médical de la Défense.

La vidéosurveillance joue un rôle, notamment en région parisienne, dans la lutte contre le terrorisme et la lutte contre les violences, tant à titre préventif qu’en matière d’élucidation, mais elle est également très utile comme aide à la fluidification de la circulation. Paris a connu en la matière des modifications législatives et réglementaires. La loi du 27 février 2002 a transféré les compétences du préfet de police pour la réglementation des conditions de circulation au maire de Paris. La police nationale reste compétente sur les grandes voies.

Pour sa part, le préfet de police de Paris est compétent pour les plans de gestion du trafic et il contribue à la coordination des plans de trafics départementaux en cas de crise ou d’événements majeurs.

Vous avez, Madame Grosskost, évoqué les violences aux personnes. Cette forme de délinquance a effectivement augmenté dans un contexte de baisse générale de la délinquance mais, comme je vous l’ai indiqué, les statistiques de l’Observatoire montrent que cette évolution préoccupante s’est inversée depuis juin, et très fortement depuis septembre. Pour autant, certaines villes peuvent continuer de connaître un accroissement des violences, et c’est pourquoi je souhaite une police plus réactive.

S’agissant des effectifs des commissariats, une norme a été fixée, proportionnelle à la population, mais il va sans dire que nous tenons compte de la réalité de la délinquance et que nous ajustons les effectifs en tant que de besoin, comme le bon sens le commande. La nouvelle organisation doit par ailleurs nous permettre de réagir en évitant, quand elle n’est pas nécessaire, l’intervention disproportionnée des CRS. C’est le sens de la réforme que je souhaite mener à bien.

L’évaluation des communautés de brigade de gendarmerie a eu lieu et le sentiment général est de satisfaction. Nous avons pris note, toutefois, de réflexions justifiées sur un sentiment d’éloignement de la population. Ce sentiment ne peut être lié à une moindre présence sur le terrain, puisque les 13 000 postes supplémentaires prévus dans la LOPSI 1 se retrouvent obligatoirement quelque part. Il s’agit bien davantage d’une question de comportements et il faut, en effet, renforcer les liens, notamment avec les élus. J’ai d’ailleurs fait rédiger une circulaire demandant que les maires des communes rurales soient systématiquement informés des faits de délinquance commis dans le périmètre communal et des arrestations auxquelles il a été procédé.

La réduction des effectifs, quand elle a eu lieu, a porté volontairement sur les adjoints plutôt que sur les policiers formés. La motivation repose aussi sur les perspectives d’évolution professionnelle, qui dépendent elles-mêmes de la formation et si nous ne parvenons pas à recruter des adjoints de sécurité en nombre suffisant c’est que la fonction n’est pas considérée comme assez valorisante. Il faudra donc améliorer la formation proposée, mais aussi la communication sur les métiers de la sécurité. Après avoir créé une Journée « défense nation », je souhaite d’ailleurs créer, sur le même modèle, une Journée « sécurité nation » pour intéresser les jeunes à des métiers méconnus.

S’agissant de la répartition des effectifs, qui intéresse particulièrement M. Cardo, j’ai eu l’occasion d’indiquer ce que nous ferons après avoir pris connaissance des conclusions définitives du rapport du directeur général de la police nationale. J’espère que nous pourrons répondre à ses préoccupations en développant une police de terrain et des capacités de renfort dans la durée, sans avoir obligatoirement recours à des compagnies de CRS que l’on contraint trop souvent à faire un travail qui n’est pas le leur. Je le redis, une plus grande souplesse s’impose, qui permettra une meilleure réactivité. J’ajoute que bien trop nombreux sont les gendarmes et les policiers formés à la sécurité qui occupent des postes d’accueil ou des fonctions administratives ; cela doit cesser. Dans la même optique, j’entends relancer les GIR.

M. Cardo a également évoqué l’omertà, expliquant par ce silence contraint la baisse des actes délictueux, qui ne serait donc qu’apparente. Pourtant, les gens commencent à parler et, dans le même temps, le nombre d’affaires découvertes par les services de sécurité a considérablement augmenté. Autrement dit, la baisse de la délinquance ne provient pas seulement de la réduction du nombre des plaintes, elle est réelle. Des intimidations continuent de se produire qui visent en particulier les gardiens d’immeuble, nous le savons ; mais nous progressons sur ce point. C’est ainsi que, dès le début de l’année prochaine, on pourra déposer des plaintes en ligne, ce qui évitera des déplacements qui se font parfois « sous surveillance ». De même, pour protéger les victimes, j’ai demandé que l’anonymat des témoignages sous X soit totalement garanti ; je précise que le juge continuera bien entendu de connaître l’identité de ces témoins.

En matière de délinquance routière, le permis à points pose des problèmes, c’est vrai, mais il a permis de sauver de très nombreuses vies et d’éviter d’innombrables blessures. Le dispositif est perfectible et nous y travaillons. Ainsi, depuis juillet, tout titulaire d’un permis peut vérifier en ligne combien de points il a perdu. De la sorte, nous souhaitons éviter que des conducteurs roulent sans permis, ignorant de bonne foi qu’il a été annulé. Cette initiative rencontre un succès certain, puisque nous avons enregistré 400 000 consultations du fichier à ce jour. Nous avons également décidé qu’un avertissement serait adressé par courrier à tout conducteur ayant perdu la moitié des points attachés à son permis.

Dans le même temps, je souhaite renforcer sévèrement les sanctions applicables au trafic de points ; un texte vous sera soumis à ce sujet. Nous savons aussi que certains jeunes renoncent à passer le permis de conduire en raison de son coût, hors de leur portée. Pour enrayer ce phénomène, nous envisageons de faire passer une partie du permis au lycée. Plus généralement encore, c’est la conception même du permis de conduire qui doit être repensée ; on pourrait ainsi imaginer d’accorder un bonus aux conducteurs qui ne commettent aucune faute.

Référence a été faite au FNAEG. Il compte actuellement 500 000 empreintes ; notre objectif est de parvenir à deux millions d’empreintes. Ce fichier est d’une utilité avérée, comme on l’a vu lorsqu’il a fallu repérer les auteurs des scandaleuses violences commises à Saint-Dizier. Son utilisation permet d’accroître notablement le taux d’élucidation des affaires. Outre que c’est évidemment important pour les victimes, cela a un impact certain en matière de prévention, car savoir que l’on ne restera pas impuni donne à réfléchir.

Pour traiter des services de renseignement, une séance complète de votre commission serait probablement nécessaire. Pour ce qui me concerne, je suis très favorable à l’organisation de visites des commissaires dans les services.

La question m’a été posée des crédits relatifs à la vidéo-surveillance ; je pense y avoir répondu.

Les discussions relatives aux heures supplémentaires, relancées, ont déjà abouti à des accords. Pour les officiers, 5,2 millions d’heures supplémentaires ont été recensées, et chaque officier a été invité à dire quelle contrepartie il préférait – paiement ou récupération. La moitié d’entre eux a choisi un paiement, qui leur sera réglé avant fin décembre. Comme vous le constatez, nous avons largement progressé sur ce dossier délicat.

Vous m’avez interrogée sur les badges délivrés à Roissy : faute d’indications précises, je ne puis vous répondre.

L’affectation au budget de l’État du produit des saisies opérées au cours de la lutte contre l’économie souterraine se fait, mais elle est longue car rien ne peut être entrepris avant que les actions en justice soient terminées.

L’équipement des salles de commandement a été évoqué, et la baisse de ce budget déplorée. J’observe simplement que, lorsque la modernisation a eu lieu, il n’est plus besoin d’y consacrer un budget ! Or nombreuses sont les salles de commandement à présent correctement équipées.

De même, nous équipons, au fur et à mesure, tous les services en haut débit. Encore faut-il, en zone rurale, que les réseaux soient installés.

S’agissant des fichiers d’empreintes génétiques, le retard initial est en train d’être comblé, grâce aux moyens que nous avons consentis. J’ai dit quels étaient nos objectifs ; nous allons les atteindre rapidement. Depuis 2003, le nombre d’empreintes disponibles a doublé chaque année. Pour éviter des confusions possibles avec des empreintes extérieures, nous avions demandé aux policiers, sur une base volontaire, de donner aussi leur empreintes. Cette opération a été arrêtée. Peut-être faut-il d’abord préciser son cadre légal.

M. Calméjane m’a interrogé sur le résultat des réunions de cohésion en Seine-Saint-Denis. Nous y avons évoqué diverses expériences intéressantes ainsi que les besoins et les problèmes, de fidélisation par exemple, et des demandes de l’encadrement. J’ai mentionné, dans ce cadre, l’utilisation des réservistes. Nous y reviendrons lors de la conférence de cohésion qui se tiendra en novembre 1993 en Seine-Saint-Denis. Je participerai personnellement à celles qui se tiendront ensuite dans les cinq départements les plus sensibles. Ailleurs, les préfets ont également pris les dispositions nécessaires.

J’espère avoir apporté l’essentiel des réponses que vous attendiez.

La sécurité est la première des libertés, c’est pourquoi les Français y sont attachés. Cependant la police ne détient pas seule la réponse. Elle dépend d’une chaîne où chacun doit tenir sa place. Je souhaite donc que, dans nos travaux ultérieurs, qu’il s’agisse du budget ou du fond des questions, nous travaillions étroitement tous ensemble, pour améliorer la sécurité de nos concitoyens.

M. le Président de la commission des finances - Je vous remercie d’avoir répondu à ces très nombreuses questions.

*

* *

À l’issue de l’audition des ministres, la commission de la défense a examiné pour avis, sur le rapport de M. Alain Moyne-Bressand, les crédits pour 2008 du programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité ».

La commission a approuvé les conclusions du rapporteur et a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité ».

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

— Présidence de la République

– M. Claude Guéant, secrétaire général de la Présidence de la République ;

– M. Erard Corbin de Mangoux, conseiller.

— Direction générale de la gendarmerie nationale

– Général Guy Parayre, directeur général de la gendarmerie nationale ;

– Général Jean-Jacques Roucoules, sous-directeur des affaires financières ;

– Général Patrick Lunet, chef de cabinet ;

– Médecin général Jacques Martin, inspecteur du service de santé pour la gendarmerie.

— Visite de l’institut de recherche criminelle de la gendarmerie (IRCGN), le 26 septembre 2007

– Colonel Jacques Hébrard, directeur de l’IRCGN ;

– Lieutenant-colonel Bruno Vanden Berghe, directeur adjoint de l’IRCGN ;

– Lieutenant-colonel Didier Jam, chef de la division criminalistique identification humaine ;

– Chef d’escadron Nicolas Duvinage, chef du département informatique et électronique ;

– Capitaine Alain Pasquier, chef du département balistique ;

– Capitaine Emmanuel Gaudry, chef du département entomologie.

— Visite du groupement de l’Isère, le 27 septembre 2007

– Colonel Jean-Philippe Lecouffe, commandant le groupement de gendarmerie départementale de l’Isère ;

– Lieutenant-colonel Jean Florentin, commandant en second le groupement de gendarmerie départementale de l’Isère ;

– Médecin-chef Sabine Laude, commandant le service médical de Grenoble ;

– Médecin principal Fabienne Fontanel, médecin auprès du service médical de Grenoble ;

– Chef d’escadron Emmanuel Gerber, commandant la compagnie de gendarmerie de Bourgoin-Jallieu ;

– Chef d’escadron Patrick Touak, commandant la compagnie de gendarmerie de Grenoble.

— Visite du groupe d’intervention de la gendarmerie (GIGN), le 16 octobre 2007

• GIGN :

– Colonel Denis Favier, commandant le GIGN ;

– Lieutenant-colonel Lionel Lavergne, commandant en second le GIGN ;

– Lieutenant-colonel F. G., commandant l’état-major opérationnel ;

– Chef d’escadron O. B., commandant la force « sécurité – protection » ;

– Capitaine T. A., commandant la force « observation – recherche ».

• Groupement interarmées d’hélicoptères (GIH) :

– Lieutenant-colonel Arnaud Cazalaà, commandant le GIH.

— Rencontres régulières avec la brigade de gendarmerie de Crémieu

– Major Jean-Luc Peillon, commandant la brigade.

© Assemblée nationale

1 () Ces spécialistes bénéficient d’une formation technique de 6 semaines au centre national de formation de police judiciaire au sein de l’école de gendarmerie de Fontainebleau.

2 () L’IRCGN participe, avec l’Institut national de police scientifique, au conseil supérieur de la police technique et scientifique créé en 1992. Des groupes de travail interlaboratoires police-gendarmerie permettent de standardiser des protocoles d’analyse. Les laboratoires d’État se sont développés dans un esprit de complémentarité des techniques et moyens mis en œuvre et de saine émulation. La dualité existante autorise une liberté de manœuvre des magistrats et des procédures engagées et participe ainsi à une bonne administration de la preuve pénale en France.

3 () La morpho-analyse est l’étude de la projection des traces de sang. La gendarmerie dispose à cet effet de 3 personnels formés aux États-unis ; elle souhaite porter cet effectif à 4.

4 () En 2001, une unité identique a été créée au sein de la police et une convention signée entre les directeurs de la gendarmerie et de la police nationales mettant en œuvre l’unité nationale d’identification des victimes de catastrophe (UNIVC).

5 () L’objectif d’enrichissement annuel du fichier demandé à la police et la gendarmerie est de 125 000 profils.

6 () Atlas est un groupe européen de coopération en matière de lutte contre le terrorisme, piloté par la Belgique, composé essentiellement d’unités de police et au sein duquel le GIGN joue un rôle majeur.

7 () Les armées ont, auprès du SSA un compte en valeur : elles versent une dotation au service de santé et lui adressent leurs commandes, à charge pour lui d’en assurer une gestion centralisée.

8 () Le seul soutien des réservistes mobilise les médecins de ce service deux jours par mois.

9 () Ce déficit est de 24,2 % pour l’armée de l’air, 23,6 % pour l’armée de terre et 16,9 % pour la marine.

10 () Directive ministérielle N° 600/DEF/DCSSA/AST/TEC/EPID du 12 mai 2004.

11 () Les transfèrements sont définis comme des conduites sous escorte de personnes détenues entre deux établissements pénitentiaires tandis que les extractions sont des déplacements de même nature entre un établissement pénitentiaire et une autre destination comme, par exemple, une juridiction ou une unité de soins médicaux.

12 () Circulaire N° 15 500 DEF/GEND/OE/EMP/SERV  du 28/06/1982.

13 () La capacité totale de ces deux établissements est de 500 places. 530 personnes y sont actuellement détenues.

14 () Le dispositif des UHSI a débuté par l’ouverture des quatre premières unités à Nancy, Lille, Lyon et Bordeaux depuis respectivement le 16 février 2004, le 25 octobre 2004, le 9 février 2005 et le 9 mai 2006. Puis, les 4 et 14 décembre 2006, deux autres UHSI ont vu le jour à Marseille et Toulouse. La création de deux autres UHSI à Rennes et Paris est également prévue pour 2008.

15 () Elle devait initialement débuter en septembre 2005.

16 () ETPT : équivalent temps plein travaillé.

17 () L’économie de loyer est calculée en multipliant le coût moyen annuel de prise à bail de nouveaux logements qui s’établit à 8 900 euros en 2007 par le nombre de postes transformés, soit 250.

18 () En 2005, aucune autorisation d’engagement n’a été accordée à ce titre.

19 () Ce lot est pour partie constitué de gilets flottables destinés aux unités intervenant en milieu marin.