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N° 280

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189)

TOME VI

DÉFENSE

PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

AIR

PAR M. Jean-Claude VIOLLET,

Député.

——

Voir le numéro : 276 (annexe n° 10)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES 7

A. LES RESSOURCES HUMAINES 10

1. Les effectifs 10

2. Le moral des troupes et les mesures en faveur de la condition militaire 13

B. LE FONCTIONNEMENT COURANT ET L’ACTIVITÉ DES FORCES 15

1. Des moyens fortement contraints par l’incertitude sur les carburants 15

2. Un maintien au plus juste des entraînements 16

C. LA MAINTENANCE DES ÉQUIPEMENTS 18

1. Des crédits de maintien en condition opérationnelle (MCO) en légère réduction 18

2. Un retour à l’équilibre de la SIMMAD en 2009 19

3. Une disponibilité technique des appareils stabilisée 20

II. —  LES ÉQUIPEMENTS 24

A. LA DISSUASION 25

B. L’AÉROMOBILITÉ 25

C. LA CAPACITÉ D’ENGAGEMENT ET D’INTERVENTION 26

1. La modernisation des moyens de commandement et de formation 26

2. La poursuite au ralenti du programme Rafale 27

3. La remise à niveau des Mirage 2000D et 2000-5 28

4. La rénovation des systèmes d’armes 28

III. —  DÉFIS ET PERSPECTIVES 31

A. POURSUIVRE LES MODERNISATIONS EN COURS 31

1. L’achèvement du projet Air 2010 et la restructuration des implantations 31

2. La recherche d’un soutien optimisé 33

3. Les opportunités d’une externalisation réussie 34

4. Des équipements au juste coût 35

B. QUELLE STRATÉGIE D’ÉQUIPEMENT POUR L’ARMÉE DE L’AIR ? 37

1.  Le Rafale, un outil de rationalisation de la flotte d’avions de combat 37

2.  L’urgence de l’aéromobilité 39

3. Les drones : vers la fin de l’errance ? 41

4. Quelles perspectives en matière de missiles ? 45

TRAVAUX DE LA COMMISSION 47

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL STÉPHANE ABRIAL, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE L’AIR 47

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 63

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 65

INTRODUCTION

L’examen du projet de budget de la défense pour 2008 intervient cette année dans un contexte particulier, tout à la fois de bilan de la loi de programmation militaire 2003-2008 et de préparation de l’avenir, à travers la revue des programmes et l’élaboration du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale actuellement en cours, en préalable à la prochaine loi de programmation qui doit être présentée au Parlement au printemps 2008.

L’armée de l’air, par sa maîtrise de la troisième dimension, est aujourd’hui une composante essentielle des forces armées et joue un rôle déterminant dans l’accomplissement des missions de dissuasion, de protection et d’intervention qui permettent d’assurer la défense et la sécurité nationales. Dans une époque où la maîtrise du temps réel est devenue déterminante, l’armée de l’air dispose d’une rapidité de déplacement et d’une capacité de réactivité inégalable, qu’il convient de préserver et de renforcer par le biais des moyens humains, matériels et financiers suffisants et adaptés.

Au sein de la nomenclature budgétaire issue de la loi organique relative aux lois de finances, en vigueur depuis 2006, les crédits destinés à l’armée de l’air sont répartis entre plusieurs programmes de la mission « Défense », principalement le programme 178 de « Préparation et emploi des forces » et le programme 146 d’« Équipement des forces ».

Le programme « Soutien de la politique de la défense » (212) s’avère plus largement interarmées mais comprend également des moyens destinés à l’armée de l’air, principalement en matière de politique immobilière et de systèmes d’information.

A l’occasion de l’examen de ce budget que beaucoup qualifient volontiers de « budget de transition », le rapporteur a souhaité, au-delà de la présentation et de l’analyse des moyens destinés en 2008 à l’armée de l’air au sein des programmes 178 et 146, se livrer à quelques réflexions de nature plus prospective sur les défis et perspectives de l’armée de l’air dans les prochaines années.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2007, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 35 réponses lui étaient parvenues, soit un taux de 92 %., supérieur au niveau atteint l’an passé.

I. —  PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

Au sein du programme 178, l’action 4, dénommée « préparation des forces aériennes », a pour finalité de maintenir et renforcer les capacités opérationnelles de l’armée de l’air ; 5 095,8 millions d’euros de crédits de paiement et 4 969 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 2008, en baisse, respectivement, de 0,94 % et 0,37 % par rapport à 2007. Au total, cette action représente 23,7 % des crédits du programme.

Sur l’ensemble de l’action, les crédits se répartissent ainsi entre les différents titres :  

Évolution des crédits alloués à la préparation
et à l’emploi des forces aériennes

(en millions d’euros)

Programme 178-4

2007

2008

Évolution

Autorisations d’engagement

titre 2*

3 204,51

3 231,96

0,86 %

titre 3

1 737,85

1 679,43

- 3,36 %

titre 5

74,31

57,59

- 22,50 %

total

5 016,68

4 968,99

- 0,95 %

Crédits de paiement

titre 2*

3 204,51

3 231,96

0,86 %

titre 3

1 831,90

1 774,83

- 3,12 %

titre 5

77,82

88,95

14,30 %

total

5 114,23

5 095,74

- 0,36 %

* y compris civils et pensions

Source : PLF 2008.

L’augmentation des crédits de titre 2 (28 millions d’euros) s’explique par 39 millions d’euros de mesures nouvelles « CAS pensions » et des mesures d’ajustement, de transfert et de rééquilibrage des dépenses de personnel au sein du programme.

Hors titre 2, les crédits de paiement se répartissent entre les périmètres de la loi de programmation militaire (LPM) (1278,72 millions d’euros) et hors LPM (585,10 millions d’euros). Les ressources consacrées à l’entretien programmé des matériels représentent l’essentiel du périmètre LPM (1 123 millions d’euros). Le périmètre hors LPM recouvre les dépenses de fonctionnement courant et d’activités de préparation opérationnelle des forces, au sein desquelles les crédits de carburant représentent 39 %.

La baisse des crédits hors titre 2 par rapport à 2007 s’explique tout d’abord par un moindre besoin sur les dépenses de LPM (- 57 millions d’euros au titre du maintien en condition opérationnelle). Les besoins exprimés sont cohérents avec les besoins de soutien des équipements aéronautiques et l’objectif de retour à l’équilibre de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle du matériel aéronautique (SIMMAD).

Les crédits du titre 3, en baisse de 3,12  % par rapport à 2007, comprennent également des mesures d’économies structurelles et des gains de productivité de l’ordre de 2,5 %. L’augmentation des cours des carburants pourrait cependant nécessiter des ajustements en gestion. Des tensions sur les moyens de fonctionnement sont donc une nouvelle fois à prévoir !

Douze sous-actions, présentées dans le tableau ci-après, permettent de détailler la ventilation des crédits de l’action 4.

Ventilation des crédits de paiement de l’action « préparation des forces aériennes »

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé
des sous-actions

Titre 2 (personnel)

Titre 3 (fonctionnement)

Titre 5 (investissement)

TOTAL

2007

2008

2007

2008

2007

2008

2007

2008

Évolution en %

04-60

Commandement

134,68

90,00

51,46

45,42

 

 

186,15

135,43

- 27,25 %

04-61

Activités des forces aériennes de combat

289,52

280,77

116,67

110,31

 

 

406,20

391,08

- 3,72 %

04-62

Activités des forces aériennes stratégiques

112,04

106,38

142,47

145,72

 

 

254,51

252,10

- 0,95 %

04-63

Activités des forces aériennes de projection

282,80

214,14

66,38

60,73

 

 

349,19

274,88

- 21,28 %

04-64

Activités des forces de protection

271,79

400,84

13,20

8,42

 

 

285,00

409,27

43,60 %

04-65

Activités des forces de détection

456,02

442,65

20,49

20,59

 

 

476,52

463,25

- 2,78 %

04-66

Formation du personnel

296,34

258,84

28,10

25,95

 

 

324,45

284,80

- 12,22 %

04-67

Gestion, recrutement, fidélisation et reconversion des RH

162,62

92,67

25,80

25,16

 

 

188,43

117,83

- 37,47 %

04-70

Soutien des matériels aéronautiques

28,53

28,70

1 088,65

1 045,77

17,10

19,22

1 134,34

1 093,69

- 3,58 %

04-72

Soutien non aéronautique

315,67

303,55

98,02

90,45

57,24

66,41

470,94

460,42

- 2,23 %

04-74

Soutien du réseau des bases

854,37

928,22

180,60

196,25

3,48

3,31

1 038,46

1 127,78

8,60 %

04-75

Service de la maintenance aéronautique – rémunérations

 

85,15

 

 

 

 

 

85,15

100,00 %

TOTAL

3 204,51

3 231,96

1 831,90

1 774,83

77,82

88,95

5 114,20

5 095,74

- 0,36 %

Source : PLF 2008.

Ces sous-actions peuvent être regroupées de façon fonctionnelle de la façon suivante :

– la fonction de commandement et de gestion des ressources humaines rassemble les sous-actions relatives au commandement (60), à la formation du personnel (66) et à la gestion, au recrutement et à la reconversion (67), représentant 538 millions d’euros de crédits de paiement, contre 699 millions d’euros en 2007 (soit une baisse de 23 %) ;

– la fonction logistique réunit les sous-actions concernant le soutien des matériels aéronautiques (70) et non aéronautiques (72) ainsi que le soutien du réseau des bases aériennes (74) pour 2,682 milliards d’euros, contre 2,643 milliards d’euros en 2007 (1) ;

– l’activité des forces, regroupant les sous-actions portant sur les forces aériennes de combat (61), les forces stratégiques (62), les forces de projection (63), celles de protection (64) et de détection (65), à hauteur de 1,79 milliard d’euros, contre 1,77 milliard d’euros en 2007.

A. LES RESSOURCES HUMAINES

1. Les effectifs

La loi organique relative aux lois de finances substitue à la notion d’effectifs budgétaires une logique de plafond d’emplois autorisés, conduisant à définir une dotation limitative pour les rémunérations et charges sociales, ainsi que les pensions. Les responsables de programme ne peuvent dépasser cette enveloppe, la fongibilité applicable au sein des programmes étant asymétrique et ne pouvant se traduire par un redéploiement des moyens en faveur du titre 2.

Au total, les effectifs de l’armée de l’air se trouvent ventilés dans pas moins de 19 budgets opérationnels de programme (BOP). Plus de 96 % de ces effectifs se trouvent toutefois rassemblés au sein du BOP 178.31C qui, correspondant à la préparation des forces aériennes (178.4), est placé sous la responsabilité du major général de l’armée de l’air.

Pour ce BOP, le plafond d’emplois autorisés par le projet de loi de finances s’élève à 63 552 ETPT (postes en équivalent temps plein) en 2008, dont 55 162 militaires, contre 64 702 ETPT en loi de finances initiale 2007, soit une diminution de 1 150 ETPT.

Évolution du plafond d’emploi du BOP 178.31C

 

PEA 2007

PEA 2008

Total militaire

56 167

55 162

Total civil

8 535

8 390

TOTAL

64 702

63 552

Source : ministère de la défense.

La diminution du plafond d’emplois autorisés en 2008 s’explique par des transferts internes ou externes au programme 178 (- 184 militaires et + 215 civils), par la suppression de 508 ETPT (455 militaires et 53 civils) correspondant à la participation du BOP aux économies ministérielles (non remplacement d’un départ à la retraite sur deux) et enfin par la suppression de 672 emplois vacants, correspondant à l’ajustement technique du plafond d’emploi.

Cette diminution des effectifs est cohérente avec la fermeture durant l’été 2008 de certaines unités, dont les régions aériennes, prévues dans le cadre d’Air 2010.

Si l’on compare les effectifs moyens réalisés prévisionnels au 30 juin 2007 et pour 2008, on constate une baisse de près de 700 postes de militaires et une légère hausse des personnels civils (+ 178 ETPT).

Effectifs détaillés de l’armée de l’air (BOP 178.31C)

 

20061

20072

20083

MILITAIRES

56 190

55 854

55 162

Officiers

6 485

6 706

6 684

Sous-officiers

32 007

32 298

31 379

Militaires du rang

16 778

15 935

16 246

Volontaires

920

915

853

CIVILS

8 236

8 212

8 390

Catégorie A

446

457

465

Catégorie B

961

999

1 029

Catégorie C

2 106

2 163

2 142

Ouvriers de l’État

4 723

4 593

4 754

TOTAL GÉNÉRAL

64 426

64 066

63 552

1 effectif moyen réalisé en 2006

2 effectif moyen réalisé prévisionnel 2007 établi au 30 juin 2007

3 effectif moyen réalisé prévisionnel 2008

Source : ministère de la défense.

Les variations entre 2007 et 2008 correspondent au solde des mesures d’économie réelle (participation à la réduction ministérielle des 6 000 postes en année pleine) et des différentes mesures de transferts internes ou externes au programme.

Ainsi, pour les civils, la création du service industriel de l’aéronautique (SIAé) en janvier 2008 a engendré le transfert de 237 ETPT au profit du BOP 178.31C. Au total, le solde résultant des transferts et des économies s’élève à 178 ETPT supplémentaires.

S’agissant des militaires, la réduction nette de 455 postes s’ajoute au solde des transferts (- 185 ETPT) et aux mesures d’effectifs (- 42 ETPT) pour une diminution globale de 682 ETPT. Les principales mesures des transferts concernent la montée en puissance de la Direction interarmées de réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information (DIRISI, -71 ETPT), l’intégration au service de santé des armées des élèves de l’école du personnel paramédical des armées (- 104 ETPT) et la création du SIAé (+ 90 ETPT).

Enfin, 100 postes de sous-officiers ont été transformés en 15 postes d’officiers et 85 postes de militaires du rang et 42 postes de militaires dans la fonction « ressources humaines » (2 officiers et 40 sous-officiers) ont été transformés en emplois civils.

• Le recrutement

L’année 2007 a été marquée par une légère augmentation pour les officiers en raison de l’évolution des besoins en officiers mécaniciens de haut niveau. En ce qui concerne les sous-officiers, la réduction du format de l’armée de l’air à partir de 2006 et la redistribution des tâches d’exécution entre les sous-officiers et les militaires du rang ont conduit à une diminution des recrutements. En revanche, l’armée de l’air a mis en place depuis 1997 un recrutement de militaires techniciens de l’air pour remplir ces tâches d’exécution. Les spécialités fusilier-commando et conducteur de chien représentent 25 % des postes. Le volume important de ces spécialités et les exigences professionnelles associées génèrent un flux de recrutement annuel important. Une prime d’attractivité a été mise en place depuis 2004 pour satisfaire ce besoin particulier.

• La féminisation

Au sein de l’Armée de l’air, toutes les spécialités sont accessibles au personnel féminin, ce qui explique l’augmentation du taux de féminisation.

Celui-ci est cependant très variable selon les types d’emplois, et tend à se réduire en montant dans la hiérarchie, comme l’indique le tableau ci-après.

Taux de féminisation de l’armée de l’air

 

2003

2004

2005

2006

2007

MILITAIRES

17,40 %

18,10 %

19,20 %

19,29 %

20,14 %

Officiers

6,60 %

7,50 %

8,42 %

8,49 %

10,38 %

Sous-officiers

13,30 %

14,20 %

15,42 %

15,40 %

16,56 %

Militaires du rang

28,40 %

28,10 %

30,06 %

30,19 %

31,34 %

Volontaires

50,70 %

54,00 %

52,44 %

50,43 %

58,12 %

Source : ministère de la défense.

La poursuite de l’action menée par le ministère dans le processus de recrutement, de promotion et de représentation des femmes ainsi que pour mieux prendre en compte leurs conditions de vie dans les centres opérationnels ainsi que la maternité ou des congés parentaux semble marquer la volonté d’améliorer encore ce résultat. L’état-major affirme cependant qu’aucun objectif chiffré n’est recherché et que le volume en personnel féminin découle principalement du taux de réussite aux différents concours ou des sélections à l’entrée de l’institution.

2. Le moral des troupes et les mesures en faveur de la condition militaire

Pour la période 2006-2007, l’état-major de l’armée de l’air note une stabilisation du moral de ses troupes, qui met fin à une tendance à la baisse constatée depuis plusieurs années. Les aspirations sont identiques à celles relevées dans la société civile et tendent à privilégier le pouvoir d’achat, le logement et la famille parfois au détriment de leur vie professionnelle, notamment chez les plus jeunes militaires. En outre, l’ensemble du personnel attend un juste retour de la Nation par rapport aux contraintes générées par la vie militaire pour le militaire et sa famille.

Dans le domaine des conditions de travail, le sentiment de paupérisation de certaines bases aériennes ainsi que les difficultés d’approvisionnement en pièces de rechange constituent des sujets d’inquiétude et une source de démotivation qui affecte le moral du personnel. Ils génèrent également des interrogations quant aux capacités futures et au devenir d’une armée à laquelle le personnel est profondément attaché.

S’agissant du personnel civil, l’absence de perspectives de carrière, la stagnation des rémunérations et les inquiétudes vis-à-vis de la démarche d’externalisation des fonctions de soutien général constituent les principaux sujets de préoccupation.

Au total, malgré de réels signes d’inquiétude et une stagnation du moral, des conditions de travail parfois dégradées et pour une part d’entre eux un engagement en opérations au rythme soutenu, le personnel de l’armée de l’air demeure disponible et dévoué. Les mesures en faveur de la condition militaire n’en sont que plus nécessaires et attendues.

• Le pouvoir d’achat

Plus de la moitié du personnel a le sentiment que son niveau de vie a baissé ces deux dernières années et moins d’un tiers juge que sa rémunération lui permet d’avoir des conditions de vie satisfaisantes. En outre, le personnel s’inquiète de la baisse de revenu subie au moment du départ en retraite ; la demande d’intégration des primes et indemnités dans l’assiette de calcul de la pension reste d’actualité. Une nouvelle évolution de leur régime de pension en 2008 fait également l’objet de craintes.

Le budget 2008 traduit, pour le personnel militaire, la volonté du ministère de la défense de poursuivre l’effort d’amélioration de la condition militaire :

- le plan d’amélioration de la condition militaire (PACM) : destiné à la revalorisation de l’indemnité pour charges militaires (ICM), ce plan sera doté de 5,52 millions d’euros pour l’armée de l’air en 2008 ; sur l’ensemble du plan (2002 – 2008), cette mesure aura permis de revaloriser l’ICM de 35 % en région parisienne et de 23 % en province ;

- le fond de consolidation de la professionnalisation (FCP) concerne uniquement, en 2008, le plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) et sera doté de 0,82 million d’euros pour l’armée de l’air.

• Le logement et l’hébergement

Dans ce domaine, les attentes restent inchangées : accroissement des aides (majoration de l’indemnité pour charges militaires), réhabilitation des logements domaniaux, prise en compte des familles recomposées dans l’attribution des logements défense, accompagnement du célibat géographique.

Pour répondre à la hausse des prix du marché immobilier, le ministère a ouvert la possibilité d’obtenir des prêts sans intérêt afin de faciliter l’accession à la propriété et le financement de travaux d’amélioration du logement.

Par ailleurs, un schéma directeur de modernisation des capacités d’hébergement sur les bases aériennes a débuté en 2002. Il a permis de construire ou de rénover des chambres individuelles de 16 m2, comprenant un espace repos, un bureau, des rangements et des sanitaires complets. En 2007, l’état d’avancement de ce schéma directeur porte à environ 80 % du parc total immobilier le nombre de chambres ainsi rénovées.

• La mobilité et la vie familiale

Davantage que son principe, globalement accepté par le personnel, c’est la mise en œuvre et l’accompagnement de la mobilité qui préoccupent aujourd’hui le personnel de l’armée de l’air, tant pour les militaires eux-mêmes que pour leurs conjoints. En la matière, quelques efforts peuvent être soulignés, comme l’assouplissement des règles d’octroi et l’extension du nombre de bénéficiaires du prêt à la mobilité et de l’aide liée à la reconnaissance d’une nouvelle affectation ou encore l’augmentation du nombre de cellules d’accompagnement destinées aux conjoints de militaires et civils de la défense privés d’emploi par suite de la mobilité.

Dans le domaine de la garde des jeunes enfants, de plus en plus problématique avec l’élévation du taux d’activité du conjoint et la multiplication de couples de militaires, astreints à des horaires atypiques, le ministère intervient pour compléter l’action des collectivités locales selon trois modes d’action :

- la réservation de berceaux dans des crèches gérés par des associations, des collectivités locales ou par des entreprises,

- l’accueil des enfants dans les crèches et haltes-garderies propres au ministère de la défense,

- et enfin le versement de prestations financières interministérielles et ministérielles telles que la prestation « garde d’enfants pendant les horaires atypiques ».

B. LE FONCTIONNEMENT COURANT ET L’ACTIVITÉ DES FORCES

1. Des moyens fortement contraints par l’incertitude sur les carburants

Les crédits de fonctionnement prévus pour la préparation des forces aériennes figurent principalement à l’action 4 du programme 178 :

Crédits de fonctionnement hors LPM (en CP)
répartis par Opérations budgétaires d’investissement (OBI*)

(en millions d’euros)

Intitulé OBI*

LFI 2007

PLF 2008

PLF 2008 / LFI 2007

Alimentation

51,75

51,75

-

Carburant opérationnel

226,18

219,94

- 6,24

Fonctionnement

284,51

268,68

- 15,83

SNCF

30,46

32,92

2,46

Externalisation Cognac

5,58

11,76

6,18

TOTAL

598,48

585,06

- 13,40

* ventilation fonctionnelle des crédits du BOP utilisée par le ministère de la défense dans le cadre d’un accord LOLF

Source : armée de l’air.

Hors mesure de transfert (- 5,89 millions d’euros), ces moyens subissent en 2008 une double contrainte : des économies structurelles à hauteur de 7,5 millions d’euros et une augmentation sous enveloppe de l’indemnité compensatrice SNCF pour 2,4 millions d’euros.

Sur ce périmètre du fonctionnement, la seule marge de manœuvre disponible portait sur l’alimentation, le fonctionnement courant et le carburant opérationnel. L’armée de l’air a donc dû arbitrer entre les conditions de travail et de vie du personnel, d’une part, et l’activité opérationnelle des forces aériennes, d’autre part. Le poids des économies prévues dans le budget 2008 (dont 3,76 millions d’euros de réduction du carburant opérationnel prise sur stocks) et de l’augmentation de la dotation compensatrice SNCF a ainsi été réparti entre les dépenses de carburant (pour 2,4 millions d’euros) et le fonctionnement courant (pour 3,75 millions d’euros).

• Les carburants

Crédits de carburants destinés à l’armée de l’air

(en millions d’euros)

 

LFI 2007

PLF 2008

- carburants opérationnels

226,2

215,0

- carburants non opérationnels (terrestres)

16,5

16,6

- total carburants

242,7

231,6

- combustible de chauffage (fioul domestique)

9,3

7,5

Source : ministère de la défense.

En 2008, l’estimation des besoins budgétaires en carburants opérationnels est fondé sur un cours du baril de Brent à 65 dollars avec une parité de 1,3 $/€, ce qui est une équation relativement serrée. Même si l’enveloppe tient compte des marges de manœuvre qui pourront être dégagées en gestion, notamment par une gestion adaptée des stocks de carburant du ministère, il y a fort à craindre que, comme en 2006 et en 2007, cette dotation ait besoin d’un ajustement en cours d’année. Souhaitons que celui-ci ne se fasse pas, une nouvelle fois, au détriment des moyens de fonctionnement, déjà fortement contraints cette année.

En tout état de cause, les mouvements du prix du baril et de la parité euro/dollar ne sauraient entraîner de réduction des heures de vol, dont la réalisation est un objectif prioritaire de l’armée de l’air.

2. Un maintien au plus juste des entraînements

La qualité d’une armée professionnelle repose largement sur l’entraînement opérationnel de ses forces et c’est à ce titre que la loi de programmation militaire pour 2003-2008 définit des objectifs quantitatifs d’entraînement des équipages : le nombre annuel d’heures de vol est fixé à 180 pour les pilotes de chasse – norme qui est également celle de l’OTAN –, à 400 pour les pilotes de transport et à 200 pour les pilotes d’hélicoptère. Ces objectifs figurent parmi les indicateurs du programme 178, au titre de la préparation et de l’activité opérationnelle des différentes armées. Les résultats depuis 2005 sont synthétisés dans le tableau ci-après.

Activité moyenne des pilotes de l’armée de l’air

(en heures de vol)

 

Objectif LPM

2005 réalisé

2006 réalisé

2007 prévision LFI

2007 prévision actualisée

2008 Prévision PLF

Pilote de chasse

180

171

175

180

178

180

Pilote de transport

400

281

284

320

290

320

Pilote d’hélicoptère

200

187

190

200

195

200

Source : PLF 2008.

De façon générale, plusieurs raisons expliquent le décalage entre le réalisé et les objectifs de la LPM :

- le coût des activités à l’étranger, très supérieur à celui des exercices en métropole ;

- le coût des carburants dans la mesure où ils interviennent ;

- l’augmentation des coûts du MCO et des optimisations nécessaires des dépenses pour les maintenir dans les enveloppes allouées ;

- l’insuffisance de disponibilité technique de certains matériels ;

- les tensions sur l’activité de certaines flottes, compte tenu des évolutions sensibles, sans préavis, en fonction des menaces, des risques, et des engagements, en particulier internationaux.

Ces contraintes ont ainsi conduit à réviser à la baisse (320 heures de vol au lieu de 400 prévues dans la LPM) les heures d’activité des pilotes de transport de l’armée de l’air.

Par ailleurs, les valeurs moyennes présentées recouvrent d’importantes disparités au sein d’une même spécialité. Pour les pilotes de chasse par exemple, l’activité varie de plusieurs dizaines d’heures en raison d’une disponibilité technique variable selon les appareils. De même, l’activité des pilotes d’hélicoptère est variable selon les affectations (activité plus forte outre-mer et en OPEX et sur le Fennec en particulier). La diversité des sites d’implantation des appareils et le vieillissement de la flotte des Puma rendent également plus difficile l’obtention d’une disponibilité technique satisfaisante.

L’activité des pilotes de transport reste la plus problématique. Son niveau, nettement inférieur aux objectifs LPM, s’explique par une forte augmentation du coût de MCO de certaines flottes vieillissantes. Des mesures internes ont été prises pour pallier les difficultés : ainsi, chaque vol opérationnel est mis à profit pour réaliser de l’instruction au profit des plus jeunes et les pilotes à l’instruction réalisent un grand nombre d’heures de simulateur dans le cadre de leur formation. Dans l’attente de l’arrivée de l’A400M, une activité opérationnelle permettant de satisfaire les besoins d’aérotransport des armées a été préservée sur la flotte de C160 Transall actuellement en déflation, ce qui permet également d’assurer une activité minimale aux équipages.

Pour 2008, l’état-major de l’armée de l’air estime que, compte tenu du format de l’armée de l’air (dissolution d’unités en 2007 et 2008), le volume de carburant opérationnel autorisé par les crédits inscrits dans le projet de budget devrait permettre d’atteindre les objectifs opérationnels fixés par la LPM (avec un objectif révisé d’environ 300 heures pour le transport), sous réserve d’une évolution raisonnable des cours des produits pétroliers.

C. LA MAINTENANCE DES ÉQUIPEMENTS

1. Des crédits de maintien en condition opérationnelle (MCO) en légère réduction

Les crédits de MCO ont fait l’objet depuis 2002 d’un effort financier soutenu afin d’assurer le redressement de la disponibilité des matériels de l’aéronautique. Ainsi, en 2007, les autorisations d’engagement et les crédits de paiement ont observé une hausse d’environ 22 % par rapport à 2006.

Il n’en sera pas de même en 2008 puisque les crédits de MCO connaîtront une relative stabilité en autorisations d’engagement (1 029,7 millions d’euros soit - 1 %) et une baisse assez nette en crédits de paiement (1 126,9 millions d’euros soit - 4 %).

Crédits pour le MCO des équipements de l’armée de l’air

(en millions d’euros)

Programme

Action

2008

S/Action

2008

Titre

OBJET

AE
LFI 2007

AE
PLF 2008

Évolution

des AE

CP LFI 2007

CP PLF 2008

Évolution des CP

146

7

35

III

MCO SIC1

8,78

4,00

- 54 %

20,27

17,29

- 14,7 %

178

4

62

III

MCO FAS2

92,24

73,04

- 21 %

96,64

97,69

+ 1 %

70

III

MCO matériel aérien

903,25

909,92

+ 1 %

1 012,07

958,17

- 5 %

III

MCO missiles

32,93

42,75

+ 3 %

51,81

53,70

+ 4 %

       

Total

1 037,20

1 029,70

- 1 %

1 180,79

1 126,90

- 4 %

1. SIS : systèmes d’information et de communication

2. FAS : forces aériennes stratégiques

Source : ministère de la défense.

L’évolution des crédits consacrés au MCO répond aux objectifs fixés par la loi de programmation militaire. L’augmentation de la ressource au profit du MCO Missiles provient de la prise en compte par l’armée de l’air de l’ensemble des systèmes SAMP/T (initialement répartis entre l’armée de terre et l’armée de l’air). Elle tient également compte du plan de résorption du report de charges de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense (SIMMAD).

2. Un retour à l’équilibre de la SIMMAD en 2009

La SIMMAD a maintenu en 2007 ses efforts pour réduire ses reports de charges accumulés entre sa création, en 2000, et l’année 2004 et opérer un retour à l’équilibre de ses comptes en 2009. En 2007, les crédits de paiement s’élèvent à 1 616 millions d’euros alors que le besoin en paiement est évalué par la SIMMAD à 1 747 millions d’euros. Le report de charge devrait donc atteindre 131 millions en fin d’année, ce qui est conforme au plan de retour à l’équilibre. Néanmoins, dans l’hypothèse où les crédits mis en réserve ne seraient pas débloqués (88,5 millions), le report de charge augmenterait d’autant. Les crédits de paiement inscrits dans le budget pour 2008 devraient permettre de tenir cet objectif… si de nouvelles mesures de régulation n’interviennent pas en cours d’année.

Par ailleurs, si les autorisations d’engagement inscrites dans ce projet de budget peuvent être complétées par une partie du report autorisé en construction (soit 220 millions d’euros), la SIMMAD devrait pouvoir réaliser les engagements nécessaires à la réalisation des objectifs en heures de vol de l’armée de l’air dans les années à venir et couvrir, en outre, le besoin supplémentaire de 50 millions d’euros engendré par les hausses économiques prévisibles en 2008.

En 2007, la SIMMAD avait la responsabilité d’entretenir 1680 aéronefs de 47 types différents (avions de combat, de transport, de soutien opérationnel, avions école et hélicoptères), dont 849 relevant de l’armée de l’air, ainsi que les missiles et autres armements air-air, air-sol et sol-air, les SIC des différentes armées et les matériels d’environnement de la marine. Au cours de l’année 2006-2007, elle a pris en compte l’arrivée du Rafale F2 dans l’armée de l’air ainsi que la montée en puissance de la flotte d’hélicoptères Tigre dans l’armée de terre.

S’agissant du réapprovisionnement en pièces de rechanges dites « consommables », le dispositif ORRMA (2) a continué sa montée en puissance de manière satisfaisante et vient d’entrer dans sa phase de paiement forfaitaire à l’heure de vol. Le titulaire du marché (INEO) est soumis à un régime particulièrement novateur en termes de pénalités et d’intéressement. En effet, les pièces dont l’absence rend un aéronef indisponible donnent lieu à une pénalité à hauteur des heures de vol non réalisées (et non au coût de la pièce manquante). Les niveaux de stock non tenus donnent également lieu à pénalités financières.

En 2006, la SIMMAD a réalisé à 99 % ses engagements auprès des quatre armes (air, terre, mer et gendarmerie) ; 80 % de ses crédits de paiement sont allés vers l’industrie privée, le solde étant destiné au service de la maintenance aéronautique.

Au 1er septembre 2007, les effectifs théoriques de la SIMMAD s’élevaient à 992 personnes, dont 205 personnels civils. En réalisé, les effectifs ne sont que de 926 car la SIMMAD est confrontée, comme l’armée de l’air, à de réelles difficultés d’embauche sur certains métiers et de fidélisation de ses personnels face à la concurrence du secteur privé.

3. Une disponibilité technique des appareils stabilisée

Depuis 2002, la disponibilité globale des aéronefs de l’armée de l’air – c’est-à-dire le rapport entre le nombre d’aéronefs disponibles dans les unités ou pouvant être rendus disponibles dans un délai de six heures et le nombre d’appareils en service dans les flottes – est passée d’un aéronef sur deux à deux aéronefs sur trois. On assiste depuis à une stabilisation autour de 60 %, la priorité étant mise sur la disponibilité en OPEX (90 %) alors que la disponibilité des appareils en métropole doit avant tout répondre aux besoins de réalisation des objectifs d’entraînement.

Le taux de disponibilité des aéronefs majeurs de l’armée de l’air s’établit à 59 % au premier trimestre 2007, en léger fléchissement par rapport à 2006 (objectif LPM : 75 %). Ce résultat s’explique essentiellement par les exigences de maintenance des moteurs de l’aviation de chasse (Rafale, Mirage 2000 et F1) et par le vieillissement de certaines flottes (26 ans pour les avions de transport tactiques C130 et C160, 44 ans pour les ravitailleurs C135), dont le MCO devient progressivement plus difficile (problème de disponibilité des pièces) et plus coûteux.

La situation est relativement contrastée selon les types d’aéronefs, comme le détaille le tableau ci-après.

Évolution du taux de disponibilité des aéronefs

Type
d’aéronef

DISPONIBILITÉ

Avions

Année 2005

Année 2006

1er sem. 2007

Avions de combat

Rafale

 

44,8 %

45,6 %

Mirage 2000 B/C

59,5 %

49,7 %

53,1 %

Mirage 2000 -5F

53,0 %

54,8 %

45,8 %

Mirage 2000 D

54,0 %

47,1 %

43,4 %

Mirage 2000 N

69,5 %

63,8 %

60,0 %

Mirage F1 B

61,5 %

66,2 %

53,1 %

Mirage F1CR

55,8 %

58,1 %

51,2 %

Mirage F1 CT

65,6 %

62,3 %

60,9 %

TOTAL

60,1 %

54,6 %

51,7 %

Avions école

Alphajet

69,4 %

71,5 %

72,6 %

Tucano

50,4 %

63,9 %

74,9 %

Jodel

77,0 %

72,6 %

73,8 %

Xingu

68,9 %

74,1 %

75,7 %

Epsilon

59,8 %

64,8 %

 

Cap 10B, 231, 232

67,9 %

   

TOTAL

63,1 %

68,6 %

73,7 %

Avions de support

TBM 700

81,6 %

71,3 %

63,6 %

DHC6

80,2 %

80,0 %

88,6 %

Falcon 900

96,4 %

95,3 %

94,3 %

Falcon 50

99,7 %

98,6 %

94,5 %

Mystère XX

68,4 %

63,4 %

 

E3F

79,6 %

84,9 %

87,1 %

A 319

99,6 %

99,6 %

99,3 %

A 310

93,8 %

93,8 %

79,0 %

A 340

 

97,2 %

96,8 %

KC 135

77,3 %

65,5 %

67,6 %

TOTAL

80,9 %

77,8 %

77,5 %

Avions de transport

tactique

C 130

74,4 %

64,7 %

48,6 %

C 160

55,7 %

59,7 %

52,8 %

Casa

68,3 %

74,4 %

71,4 %

TOTAL

60,7 %

63,5 %

56,2 %

Hélicoptères

Fennec

71,7 %

69,9 %

62,7 %

Super puma / Cougar

63,3 %

64,1 %

 

Puma

59,3 %

57,2 %

55,0 %

Super puma

   

64,3 %

Cougar

   

84,6 %

EC 725 Resco Air

 

56,1 %

75,2 %

TOTAL

66,3 %

64,2 %

61,7 %

TOTAL ARMÉE DE L’AIR

62,3 %

61,6 %

59,8 %

Source : ministère de la défense.

Sur les trois flottes de chasse, la difficulté concerne la disponibilité des moteurs ; pour chacun d’entre eux (M88, M53 et Atar) des plans d’action ont été mis en œuvre et devraient produire leurs effets à partir de 2008. Pour les avions de support, malgré les difficultés actuelles sur la flotte de C135 concernée par des travaux d’entretien majeurs, la disponibilité globale est stabilisée à un bon niveau. En revanche, la disponibilité des appareils de transport tactique est en chute nette sous l’effet conjugué d’une baisse de performance du soutien du C130 et des problèmes de vieillissement de la flotte de C160. Enfin, le recul de la disponibilité des flottes d’hélicoptères est dû, en partie, à une tension sur le niveau de reconstitution des stocks de rechanges.

Concernant le Rafale, il convient de rappeler que le format et la capacité opérationnelle de la flotte de combat reposent essentiellement sur ces appareils et que la diminution des coûts de maintenance, aujourd’hui élevés, se fera au cours de la montée en puissance de cette flotte. Cela permettra de lisser les effets de seuil que l’on rencontre en début de vie d’un nouveau matériel.

Si le taux de disponibilité des aéronefs constitue un indicateur indispensable pour prendre la mesure de lacunes éventuelles, il faut néanmoins l’apprécier avec discernement. Ainsi, la variation d’un point du taux global, à la hausse ou à la baisse, n’est pas nécessairement significative ; c’est avant tout la réalisation du contrat opérationnel des forces aériennes qui doit primer, ce qui suppose d’assurer une disponibilité optimale des appareils en opérations, tout en ajustant si nécessaire les besoins sur les bases aériennes.

L’état-major de l’armée de l’air estime que la conjugaison des efforts financiers consentis par le ministère de la défense, de la mise en œuvre des réorganisations au sein de l’armée de l’air (Air 2010 et redéfinition des niveaux de soutien) et des évolutions de la maintenance (optimisation du plan d’entretien des aéronefs) devrait permettre de reprendre l’amélioration de la disponibilité des aéronefs dans les années qui viennent tout en contenant les coûts du MCO à un niveau supportable.

II. —  LES ÉQUIPEMENTS

Un bouleversement complet de la nomenclature du programme 146, passée d’une présentation par armées en 2007 à une ventilation par « systèmes de forces et capacités maîtresses », destinée apparemment à assurer une meilleure information du Parlement, ne permet plus au rapporteur de disposer d’une base de référence claire pour les crédits d’équipement destinés à l’armée de l’air. Si l’on peut comprendre la volonté de valoriser la dimension inter-armée qui sous-tend cette présentation, un tableau comparatif aurait été le bienvenu pour assurer la transition entre les deux nomenclatures et parfaire, ainsi, l’information du Parlement…

Compte tenu des nombreux travaux de remise à plat et de réflexion stratégique qui se déroulent actuellement, la construction du budget de la défense pour 2008 a été soumise à de forts éléments de contexte, qui laissent planer bien des interrogations sur les autorisations d’engagement, voire sur les crédits de paiement inscrits dans le programme 146, tant pour l’armée de l’air que pour les autres armées.

En témoignent, par exemple, la nouvelle notion de « provision sur autorisations d’engagement » utilisée pour réserver 3 milliards d’euros pour l’éventuel second porte-avions ou encore, pour de nombreux programmes, la construction des plans d’engagement 2008 sur des hypothèses de report d’autorisations antérieures, qui ne sont pas acquises à l’heure de la présentation du budget. Tout cela n’est guère encourageant !

Le rapporteur se contentera donc ici de résumer l’état des principales opérations d’équipement destinées à l’armée de l’air dans le programme 146 avant de revenir, de façon plus prospective, sur les grands programmes d’équipements de l’armée de l’air dans la troisième partie de ce rapport.

Commandes et livraisons d’équipements destinés à l’armée de l’air
en 2007 et 2008

Équipements

Commandes

Livraisons

2007

2008

2007

2008

C135FR (rénov. 1ème tranche)

14

0

2

11

C135FR (rénov. 2ème tranche)

-

11

-

0

C130 (rénovation)

14

-

0

-

SDCA (rénov. à mi-vie)

-

1

-

0

RAFALE (Air)

0

6

6

7

TLRA

0

-

1

-

AASM

0

0

76

240

MICA

0

0

241

60

SCALP EG

0

-

50

-

SCCOA3/CLA

7

0

4

4

SAMP/T(système/munition)1

4/200

0

1/20

2/66

COUGAR (rénovation)

-

3

-

0

Alpha jet (rénovation)

-

20

-

0

UAV SIDM2

-

0

-

1

1. système initialement prévu pour l’armée de terre et livré à l’armée de l’air qui désormais prend en compte la globalité des systèmes sol/air moyenne portée SAMP/T

2. Système intérimaire de drones MALE

Source : ministère de la défense.

A. LA DISSUASION

Concernant la dissuasion, l’année 2008 verra, pour l’armée de l’air, la poursuite de la production du missile air sol moyenne portée amélioré ASMPA, en cohérence avec l’adaptation du Mirage 2000N au standard K3.

Ainsi, la sous-action 17 de l’action 06 (Dissuasion) comprend 90,85 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 231,9 millions d’euros de crédits de paiement pour le développement du programme ASPMA (développement et fabrication du vecteur, installation de tir et moyens de mise en œuvre, y compris les travaux d’intégration sur les avions Mirage 2000N et Rafale F3) et celui de sa charge nucléaire de nouvelle génération TNA. Ce système remplacera, en 2009, le système ASPM actuellement en service.

La sous-action 16 prévoit quant à elle 31,58 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 41 millions d’euros de crédits de paiement pour le développement du standard K3 du Mirage 2000N incluant l’intégration du missile nucléaire ASMPA, l’industrialisation et la mise en série des modifications des avions et des équipements ainsi que la mise en place du soutien. La première capacité opérationnelle significative des Mirage 2000N K3 est attendue pour 2009.

B. L’AÉROMOBILITÉ

La sous-action 42 de l’action 8 (Projeter les forces) comprend 3 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 461,46 millions d’euros de crédits de paiement pour la poursuite du programme d’avion de transport A400M ainsi que la commande des prestations de soutien initial de la flotte, pour laquelle une approche internationale est recherchée. 50 appareils ont été commandés en 2003 et les premières livraisons à la France sont actuellement prévues pour 2009, contre mai 2007 initialement.

La sous-action 43 prévoit 24,8 millions d’euros de crédits de paiement pour la poursuite de l’opération TLRA qui permet la mise à disposition, sous forme de location, de deux appareils de la gamme civile commerciale à grande capacité et long rayon d’action (type A340-200) et 14,2 millions d’euros de crédits de paiement pour la rénovation de 14 avions de transport C130, qui permettra de prolonger leur exploitation jusqu’en 2020-2025.

L’action 8 comprend également des crédits (fondus dans la sous-action 53) destinés à la rénovation des ravitailleurs C135. La commande était initialement prévue pour 2007 mais, comme l’explique succinctement le PAP du programme 146, « la gestion des priorités opérée en cours de gestion 2007 a conduit à reporter la notification de la rénovation des C135 à début 2008 » …

L’ensemble des opérations des TLRA, C130 et C135 sont destinées à « gérer » l’attente du futur MRTT (avion multirôle de transport et de ravitaillement) dont le PAP assure qu’il « fera l’objet d’un suivi particulier en 2009 (pas besoin de crédits en 2008) » : dont acte !

C. LA CAPACITÉ D’ENGAGEMENT ET D’INTERVENTION

1. La modernisation des moyens de commandement et de formation

La sous-action 24 de l’action 7 (Commandement et maîtrise de l’information) prévoit 24 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 156,5 millions d’euros de crédits de paiement pour la poursuite de la modernisation du système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA).

Ce nouveau dispositif est destiné à doter l’armée de l’air d’une capacité de gestion globale des systèmes d’armes à partir d’un commandement unique, fortement automatisé, rapidement renseigné et jouissant d’un niveau d’interopérabilité élevé avec les armées françaises et alliées. Engagées en 2006, les différentes opérations de ce programme devraient se terminer en 2013 (le calendrier initial du programme étant prévu sur les années 2004-2007).

La sous-action 61 de l’action 9 (Engagement et combat) prévoit par ailleurs 8 millions d’euros de crédits de paiement pour la rénovation des 20 Alphajet permettant la formation des pilotes de chasse et des navigateurs et officiers de systèmes d’armes (NOSA) dans le cadre de l’école franco-belge à Cazaux. Les avions rénovés permettront, en phase finale de formation, d’entraîner les élèves sur un système proche des avions de combat moderne.

Le PAP du programme 146 précise que le plan d’engagement de cette rénovation, d’un montant total de 30,45 millions d’euros sur 3 ans, est construit sur une hypothèse de reports d’autorisations d’engagement. Il n’y a donc pas d’autorisations d’engagement spécifiquement prévues pour ce programme dans le budget 2008.

2. La poursuite au ralenti du programme Rafale

La mise en service opérationnel du premier escadron de Rafale de l’armée de l’air a été prononcée officiellement le 27 juin 2006. Les capacités de l’appareil sont, aujourd’hui, centrées sur la défense aérienne, la posture permanente de sûreté et le tir du missile de croisière SCALP, auxquelles a été ajoutée début 2007 une première capacité d’emploi d’armements guidés laser de type GBU12 et GBU22.

Le Rafale a participé à des exercices de grande ampleur tels que le NATO Tiger Meet en Espagne fin 2006, au cours desquels l’avion a fait forte impression par sa polyvalence, et le Tactical Leadership Program en Belgique début 2007. Le premier déploiement opérationnel du standard F2 s’est déroulé de mars à fin juin 2007 en Afghanistan où six bombes ont été tirées avec succès. La mise en œuvre de bombes AASM guidées GPS et tirées à distance de sécurité sur coordonnées est prévue tout début 2008.

À ce jour, 82 Rafale ont été commandés pour l’armée de l’air ; ils ont été ou devraient être livrés conformément au calendrier suivant :

Calendrier de livraison des Rafale

 

Avant 2005

2005

2006

20071

2008

Après 2008

Année

6

10

13

6

7

40

Cumul

6

16

29

35

42

82

1. Au 1er octobre 2007, 34 avions avaient été livrés

Source : ministère de la défense.

845,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 1 294,9 millions d’euros de crédits de paiement sont inscrits sur la sous-action 59 de l’action 9, ce qui permettra la livraison à l’armée de l’air des 7 appareils prévus ainsi que la commande de 6 appareils supplémentaires. Ceux-ci correspondent aux appareils précédemment « mis en réserve » sur la troisième commande notifiée en 2004 afin d’assurer le financement de la « feuille de route » signée avec l’industriel en octobre 2006 et destinée à permettre le développement des équipements de nouvelle génération pour le Rafale F3. Il s’agit donc simplement ici du rattrapage d’un étalement de commande.

3. La remise à niveau des Mirage 2000D et 2000-5

La sous-action 79 de l’action 10 (Protection et sauvegarde) comprend des crédits destinés à poursuivre la rénovation des capacités opérationnelles des Mirage 2000D et 2000-5, éléments clés de la sécurité des approches aériennes du territoire national.

Pour le Mirage 2000D, 25,2 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 53,1 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus pour poursuivre les évolutions «Post R2» de l’appareil (capacité de tir du missile SCALP EG, transmission de données par liaison 16 et phonie protégée par SATURN).

Pour le Mirage 2000-5, 10 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 23,8 millions d’euros de crédits de paiement sont destinés à financer l’intégration du système MIDS de transmission de données par liaison 16, permettant la réalisation de missions en réseau centré, notamment en milieu interallié.

Sur ces deux opérations, les plans d’engagement 2008 seront complétés par des reports d’autorisations d’engagement… si ceux-ci sont autorisés !

4. La rénovation des systèmes d’armes

Missiles destinés à l’armée de l’air – crédits 2008

(en millions d’euros)

Imputation

2008

Programme

Action

Sous-action

intitulé

AE

CP

146

9

58

Frappe à distance - AASM

6,70

14,87

61

Frappe à distance – autres (SCALP-EG)

24,47

12,42

10

78

MICA

11,10

59,34

82

Famille systèmes sol-air futurs

30,00

21,20

178

4

70

Soutien matériel aéronautique

0,00

2,24

TOTAL

72,27

110,07

Source : ministère de la défense.

L’armement air sol modulaire (AASM) a pour mission de détruire ou de neutraliser des cibles terrestres. Il est complémentaire des missiles de la famille SCALP/APACHE réservés, en priorité, aux objectifs de grande valeur situés dans la profondeur d’un territoire ou d’un dispositif adverse. Il sera mis en œuvre à partir du Rafale.

Missile d’interception, de combat et d’autodéfense, le MICA constitue l’armement principal du Rafale dans ses missions de défense aérienne et l’armement d’autodéfense dans ses missions d’intervention et d’attaque au sol. Il équipe également le Mirage 2000-5. La sous-action 78 reprend les parties air et marine du programme MICA qui étaient séparées en 2 sous-actions dans l’ancienne nomenclature. Le calendrier de livraisons des missiles a été recalé à la suite de difficultés techniques rencontrées par l’industriel et désormais résolues. Le calendrier contractuel de livraisons des MICA devrait être totalement rattrapé en décembre 2007.

Le SAMP/T est un système de défense antiaérienne du corps de bataille et des bases aériennes utilisant les munitions Aster 30. Suite à la réorganisation de la composante sol-air des armées, l’intégralité des 10 systèmes SAMP/T commandés jusqu’à présent est transférée à l’armée de l’air. Une livraison de 2 systèmes et de 66 munitions est prévue pour 2008. Selon le PAP, la limitation de la commande 2007 à 2 systèmes au lieu de 4 est en examen ; les 2 derniers systèmes seraient alors confirmés d’ici à 2010. Rappelons que le programme a déjà connu une première réduction en 2006 avec le passage de 12 à 10 systèmes. À l’heure actuelle, seul un système a été livré.

III. —  DÉFIS ET PERSPECTIVES

La poursuite de la transformation de l’armée de l’air constitue un enjeu fort pour la période à venir. Cette démarche concerne tous les aspects de l’armée de l’air, de la réécriture des concepts à la définition des besoins capacitaires, en passant par une réorganisation en profondeur qui entraîne d’importantes modifications dans l’organisation et affecte par là même le personnel.

En ce qui concerne les opérations d’armements, l’armée de l’air doit préparer l’avenir autour de deux axes d’effort principaux : la modernisation des moyens pérennes et l’adéquation des équipements nouveaux au juste besoin.

Le juste besoin implique de ne pas s’enfermer dans une logique de programmes de matériels ou de format mais bien de strict respect des contrats opérationnels en ayant soin de mesurer systématiquement le rapport coût-efficacité.

Selon le rapporteur, les priorités pourraient être les suivantes : assurer la crédibilité de la composante aéroportée de la dissuasion, rétablir la capacité de transport, disposer d’un système de combat polyvalent et adaptable, assurer la protection du territoire national et acquérir la maîtrise de l’information en temps réel au niveau du théâtre (notamment par l’utilisation des drones en complément des autres capteurs de renseignement image et électromagnétique).

A. POURSUIVRE LES MODERNISATIONS EN COURS

1. L’achèvement du projet Air 2010 et la restructuration des implantations

Le plan AIR 2010, décidé en 2000, avait pour but de moderniser les structures de l’armée de l’air, devenues très complexes tant dans l’organisation de son commandement que dans les pratiques de management, afin de la faire passer d’une logique de segmentation du territoire et des responsabilités à une logique de cohérence des métiers et de décentralisation. En simplifiant les structures et les processus, l’armée de l’air a décidé de consacrer l’essentiel de ses moyens au service des opérations aériennes en liaison avec les forces françaises ou alliées. Ce projet rassemble donc des familles de métiers, en cohérence avec les trois grandes fonctions qui caractérisent l’action des forces (préparer, opérer et soutenir) et avec les deux fonctions transverses (gestion des ressources humaines et soutien administratif et financier).

AIR 2010 a ainsi transformé treize commandements et directions en cinq entités : commandement des opérations (stratégiques et conventionnelles), commandement des forces, commandement du soutien, direction des ressources humaines et service de l’administration générale et des finances. Le regroupement fonctionnel par métiers, privilégié dans la réorganisation, a conduit à redistribuer dans ces cinq nouvelles structures les multiples attributions confiées aux régions aériennes amenées à disparaître. Les textes réglementaires associés doivent être publiés en fin d’année 2007 (4 des 5 décrets ont été publiés avant l’été) pour une mise en application au 1er janvier 2008.

Le gain en effectifs est d’environ 200 ETP, dont 103 ont déjà été supprimés des droits du BOP de l’armée de l’air. Toutefois, tous les gains induits par cette transformation n’ont pas encore étés récoltés. En effet, la somme des effectifs inclus dans le périmètre du projet est de 3 735 personnes. À l’issue de la réorganisation, 3 441 personnes armeront les nouvelles structures mises en place, soit un gain brut de 294 équivalents temps plein (ETP) auxquels il convient de retrancher 98 ETP transférés à la DIRISI à l’été 2007. En conséquence, le rapport de gain net en effectif à périmètre constant est d’un peu plus de 5 %.

Cette nouvelle organisation est d’ores et déjà en fonctionnement et l’état-major de l’armée de l’air enregistre désormais les premiers retours d’expérience. Ils confirment la pertinence des choix effectués et les gains d’efficacité sont réels (meilleur pilotage, meilleure préparation pour les opérations extérieures, etc.). Au-delà des interrogations inévitables devant tout changement, la compréhension semble maintenant réalisée et la décentralisation recueille une forte adhésion si l’on en croit les premières tendances de volontariat du personnel pour armer les structures décentralisées.

Le prolongement naturel d’AIR 2010 est bien évidemment la rationalisation des bases aériennes.

Il faut tout d’abord rappeler que l’implantation des bases sur le territoire français est marquée par l’histoire de l’après guerre : jusqu’au début des années quatre-vingt-dix, le réseau des bases aériennes s’est structuré pour faire face aux menaces d’invasions massives venant de l’Est. Cet héritage marque, encore aujourd’hui, la répartition des plates-formes de l’armée de l’air sur le territoire national.

Il existe aujourd’hui 37 bases aériennes en métropole, dont 24 plateformes aéronautiques, et 7 en outre-mer.

La base aérienne est le lieu de stationnement, de mise en œuvre et d’engagement des moyens pour la réalisation des missions confiées à l’armée de l’air, dont certaines revêtent un caractère invariable comme la posture permanente de sûreté. La base aérienne est donc un maillon essentiel de l’engagement opérationnel de l’armée de l’air.

Une base répond avant tout à une logique de milieu. Elle ne doit pas être considérée comme une entité indépendante dotée d’une mission propre et de moyens dédiés. Il s’agit au contraire d’une structure dont l’efficacité est étroitement dépendante du fonctionnement des autres bases aériennes. L’efficacité du réseau repose donc sur un maillage géographique et fonctionnel équilibré, adapté à l’engagement des moyens aériens.

Les choix de rationalisation devront donc avant tout s’inscrire dans la logique du milieu aérospatial. Les perspectives pourraient être fondées sur un resserrement du dispositif autour d’un plus petit nombre de bases plus compactes, plus polyvalentes, plus réactives, tout en préservant les exigences de permanence (PPS, dissuasion, continuité temps de paix-temps de crise) et de réactivité (projection de force et de puissance).

Par ailleurs, en raison du caractère irréversible de l’abandon d’une plateforme aéronautique, le maillage du réseau des bases plates-formes doit ménager une marge de manœuvre suffisante permettant une adaptation à des missions et des contraintes nouvelles.

Enfin, la restructuration devra prendre en considération les interactions qui s’établissent entre la base aérienne et son environnement (saturation de l’espace aérien, nuisances sonores, etc.)

C’est en analysant et en hiérarchisant ces différents éléments que les choix concernant l’avenir des implantations des bases de l’armée de l’air seront finalisés. Un premier projet de restructuration sera présenté en 2008 par l’état-major de l’armée de l’air avant de passer au filtre des examens interarmées et interministériel. En outre, un délai minimum de deux ans sera respecté entre l’annonce d’une décision et la fermeture effective d’une base.

2. La recherche d’un soutien optimisé

Les travaux de la mission de modernisation du MCO aéronautique se sont poursuivis en 2007 et ont conforté la SIMMAD dans son rôle d’acteur central du MCO, en particulier en tant que responsable du pilotage des maîtres d’œuvre industriels et des travaux d’harmonisation de la réglementation.

Un pas supplémentaire dans la rationalisation du MCO aéronautique sera franchi en janvier 2008 avec la mise en place du Service industriel de l’aéronautique (SIAé) destiné à rassembler au sein d’une organisation unique l’ensemble des acteurs étatiques du volet industriel du MCO dans une logique de rationalisation et d’économies de moyens.

Le SIAé va tout d’abord regrouper les entités suivantes : le service de la maintenance aéronautique (SMA) avec les trois ateliers industriels de l’aéronautique de Clermont-Ferrand, Cuers et Bordeaux ; l’essentiel des activités du site d’Ambérieu pour l’armée de l’air ; l’atelier de réparation de l’aéronautique navale de Cuers-Pierrefeu ; les éléments de soutien aéronautique des détachements de Toul et Phasbourg appartenant à la 15e base de soutien du matériel ; l’activité de visite des Dauphin, Lynx et Panther de la base aéronautique navale d’Hyères. S’ajouteront progressivement des activités d’entretien préventif actuellement réalisées dans les escadrons de soutien technique spécialisé de l’armée de l’air.

Service de soutien à vocation interarmées mais rattaché organiquement à l’armée de l’air, le SIAé sera placé sous le régime du compte de commerce. Il a pour objectif de rationaliser tout à la fois l’activité et l’outil de MCO aéronautique industriel par l’application d’un principe général de mutualisation et de non-duplication :

- rationalisation de l’activité par une modification du contenu et des cycles d’entretien (rapprochement des acteurs des petites et grandes visites), un lissage des charges, un effet de série et des externalisations accrues (pour le soutien général et l’électronique notamment),

- rationalisation de l’outil par des gains sur les coûts d’infrastructures et de fonctionnement, une diminution des stocks, un renforcement des synergies entre les programmes, les moyens et les équipes.

Le SIAé regroupera à terme environ 4 000 personnes, dont 600 militaires et affichera un chiffre d’affaires prévisionnel de 400 millions d’euros environ, soit 12 % du coût annuel du MCO aéronautique militaire.

En appliquant les meilleures pratiques industrielles, garantie de compétitivité, il permettra à l’État de conserver une expertise technique indépendante des constructeurs et, partant, de lui garantir une maîtrise suffisante des coûts du MCO aéronautique militaire.

La constitution du SIAé est un bon exemple des voies de modernisation ouvertes aux armées. Sans départir l’État d’un outil performant et efficace, elle permet un regroupement des savoir-faire et une rationalisation des pratiques afin d’assurer une meilleure qualité de service à moindre coût.

La prochaine évolution du MCO aéronautique devrait être son passage à un niveau international, ou tout du moins européen. Dans l’avenir, en effet, les équipements seront de plus en plus le résultat de programmes communs à différents pays et la logique voudra que leur entretien prenne également une dimension internationale, que ce soit pour la fabrication puis pour le stockage et la distribution des pièces de grande assurance ou pour la mise à disposition d’un volant de rechanges via un guichet unique géré par un opérateur unique.

Il serait regrettable qu’un tel schéma de coopération, garant d’économies et, plus encore, d’interopérabilité des matériels ne se mette pas en place pour les programmes européens en cours tels que les hélicoptères Tigre et NH90 et l’avion de transport A400M.

3. Les opportunités d’une externalisation réussie

L’externalisation est une pratique déjà ancienne au sein de l’armée de l’air. Les fonctions de soutien des bases aériennes sont déjà largement concernées (entretien des locaux et des espaces verts, ramassage des ordures ménagères et industrielles, nettoyage des tenues notamment) et d’autres domaines ont fait l’objet d’externalisations partielles. Ainsi, dans le domaine de la maintenance aéronautique, plus de 30 % de la flotte de transport de l’armée de l’air fait l’objet de contrats externes d’entretien total ou partiel.

En 2007, outre la mise en place du marché des véhicules de la gamme commerciale piloté par les services du secrétariat général pour l’administration, l’année est marquée par la première annuité du marché de maintenance des avions écoles de Cognac. Dans ce cadre, 100 % de la mise en œuvre et de la maintenance de l’outil de formation (avions et entraîneurs de vol) de l’école ont été transférés à un maître d’œuvre industriel. La formation des pilotes et la sécurité des vols continuent par contre d’être assurées par des moniteurs et un encadrement militaires. Par ailleurs, afin d’adapter la formation dispensée à l’école aux évolutions de la réglementation aérienne, la société titulaire du contrat s’est engagée à mettre à la disposition de l’armée de l’air une flotte de 18 avions Grob 120 (en complément des 33 Epsilon remis à niveau) ainsi que trois entraîneurs de vol modernes dont le niveau d’homologation permet de transférer sur entraîneur des heures auparavant réalisées en vol.

Depuis le début du projet en septembre 2004, une démarche très spécifique de « dialogue compétitif » durant la phase d’appel d’offres puis de coopération poussée entre la base et l’industrie a été mise en œuvre. Plus que le processus d’externalisation lui-même, ce sont les méthodes employées qui ont été particulièrement novatrices. Ce sont elles qui ont notamment permis la signature du contrat dans des délais particulièrement courts (18 mois) et le transfert progressif des compétences entre militaires et industriels à compter de l’été 2006 sans rupture de service. Seule une adhésion de tous les acteurs du projet (sur la base, dans l’école, à la SIMMAD et chez l’industriel) permet le montage et l’aboutissement de projets de ce type, dans lesquels un esprit de partenariat doit prévaloir.

Le premier bilan de cette réalisation est positif. En effet, sur la base d’un engagement annuel (après montée en puissance) de l’ordre de 21 000 heures de vol et de 5 500 heures de formation au simulateur, le coût du contrat est de 14,7 millions d’euros, soit un prix moyen de l’heure de vol de 650 euros et de l’heure de simulateur de 172 euros. Cela correspond actuellement à un gain de 35 % par rapport au coût de l’activité technique en régie (MCO, rémunérations, charges sociales et pensions comprises). Cette externalisation a été financée par les crédits alloués initialement au MCO des avions Epsilon et par les RCS correspondant à 206 équivalents temps plein.

D’autres projets visent à développer l’externalisation, notamment pour le soutien des infrastructures de base aérienne ou le soutien des réseaux Internet protocol au moyen d’un contrat de partenariat public-privé (projet porté par la DIRISI).

Les moyens budgétaires affectés à l’externalisation par le projet de loi de finances pour 2008 s’élèvent à 66 millions d’euros. Ils comprennent 59 millions d’euros pour la reconduction des mesures précédentes auxquels s’ajouteront les 7 millions d’euros nécessaires au financement de l’externalisation des véhicules de la gamme commerciale.

L’externalisation n’est pas la panacée et doit s’accompagner d’une démarche claire et volontaire de coopération des deux parties intéressées, l’armée et l’industriel. Pour les activités qui ne relèvent pas du cœur de métier de la mission défense, elle peut néanmoins être une bonne opportunité de rationaliser les pratiques, d’alléger les charges de gestion courante et, ainsi, de concentrer les moyens sur l’opérationnel.

4. Des équipements au juste coût

Outil quasiment unique au sein de l’administration française, le Bureau de l’expertise des coûts (BEDC) de la Délégation générale à l’armement (DGA) a été créé en 2005 à la suite d’une réorganisation de la DGA mais est le lointain successeur des services d’enquêtes de prix de la défense créés entre 1935 et 1939.

Composé d’une quarantaine d’enquêteurs de prix recrutés sur des profils d’experts comptable et d’ingénieurs, le BEDC est chargé de réaliser, à la demande des services acheteurs du ministère de la défense (DGA, structures de soutien comme la SIMMAD, le SSF et le DCMAT) des contrôles de coûts de revient sur les marchés négociés sans mise en concurrence de matériels et équipements militaires. Il peut s’agir d’enquêtes de coûts de revient ou de coûts de valorisation réalisées a posteriori ainsi que d’avis de prix sur les offres des industriels avant négociation.

Le périmètre d’intervention du BEDC couvre 7 milliards d’euros par an répartis sur 500 marchés négociés sans mise en concurrence (soit environ 50 % des marchés du secteur) et une centaine d’industriels.

En ce qui concerne plus spécifiquement l’armée de l’air, le BEDC a été amené, ces dernières années, à enquêter régulièrement sur les programmes Mirage III, IV, 2000, Jaguar, Alpha Jet, Etendard, Transall NG et ATL, des phases de développement aux phases de séries. Les résultats de ces enquêtes ont servi de bases aux négociations de nouveaux marchés et, pour le MCO, le service a validé les répertoires de prix des rechanges. Le programme Rafale a également fait l’objet d’enquêtes au niveau du développement pour vérifier que les principaux industriels avaient bien vérifié leur engagement d’autofinancement à hauteur de 25 %. Actuellement, des enquêtes de coût de revient sont en cours sur la production des 28 premiers appareils de la seconde commande notifiée en 1999 à Dassault Aviation ainsi que sur la production des moteurs (SNECMA), des systèmes de navigation (THALES) et d’autodéfense (SAGEM) et des missiles intégrés (MBDA). Dans certains cas, le constat de coûts de revient inférieurs aux coûts envisagés ont permis, sur les marchés suivants, de négocier des prix inférieurs aux prix de référence, permettant ainsi des gains non négligeables de plusieurs dizaines de millions d’euros.

Des avis de prix ou enquêtes sont également réalisés au profit et à la demande des services acheteurs étrangers de matériels de défense (États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, par exemple) dans le cadre d’accords de réciprocité. Ainsi, des avis de prix sont demandés par l’OCCAR sur des projets de marchés concernant l’A400M et les hélicoptères Tigre et NH90.

Cette intervention du BEDC, en crédibilisant les offres des industriels français, évite que les services enquêteurs étrangers accèdent à leurs comptabilités. Cette transparence a cependant ses limites car chaque pays a sa propre réglementation en matière d’enquête (les Britanniques, par exemple, ne peuvent pas faire d’enquête a posteriori mais mènent systématiquement un étude de coût a priori) et chacun protège, in fine, ses industriels (et le secret sur leurs marges réelles). La constitution d’un corps européen d’enquêteurs de coûts indépendants ainsi que d’un corpus de règles communes serait ainsi une belle ambition pour la présidence française de l’Union !

Outre l’aide qu’elle peut apporter à l’exportation des matériels français, l’intervention du BEDC permet donc bien souvent de réduire les coûts des programmes d’armement en apportant une vision claire des coûts constatés et des références pour les marchés futurs, en veillant à la maîtrise des coûts improductifs des industriels. Avec un ratio de périmètre d’intervention de 170 millions d’euros par enquêteurs et par an, le BEDC fait preuve d’une « rentabilité » bien plus élevée que les services équivalents existant au Royaume-Uni (20 millions d’euros par enquêteurs et par an), en Allemagne (60 millions d’euros) ou aux États-Unis (40 millions d’euros). Il convient donc de préserver ses effectifs et ses moyens d’action, d’autant que ce service pourrait avoir un intérêt pour d’autres services acheteurs ministériels en quête de transparence.

B. QUELLE STRATÉGIE D’ÉQUIPEMENT POUR L’ARMÉE DE L’AIR ?

La préparation du futur Livre blanc est l’occasion d’une mise en perspective de l’ensemble de notre politique de défense et de sécurité au vu du contexte stratégique actuel et des menaces futures auxquelles nous pourrions être confrontés. Une fois adopté, ce Livre blanc servira de base à la rédaction de la prochaine loi de programmation militaire pour les années 2008-2013, qui définira le format et l’organisation de nos armées ainsi que leurs besoins en matière d’équipement.

Curieusement, cet exercice projectif et prospectif est conduit en même temps qu’une revue des programmes d’armement destinée à remettre à plat les calendriers des programmes en cours ou à venir. À cela s’ajoute l’actuelle Révision générale des politiques publiques (RGPP) qui doit permettre au ministère de la défense de dégager des marges de manœuvre au profit des unités opérationnelles.

Cela fait beaucoup et les calendriers, voire les objectifs, risquent de se télescoper. Le rapporteur espère quant à lui que la revue de programme et la RGPP n’anticiperont pas sur les décisions stratégiques à venir par des rabotages, décalages et autres étalements, ce qui obérerait une nouvelle fois les chances de combler nos lacunes capacitaires tout en modernisant nos moyens opérationnels et en restructurant l’industrie de défense française et européenne.

1.  Le Rafale, un outil de rationalisation de la flotte d’avions de combat

Le Rafale a été conçu comme un outil de rationalisation de la flotte de combat et de dissuasion. Il s’agit en effet d’un appareil multirôle (contrairement à l’Eurofighter, par exemple), capable de faire face à toute espèce de menace et destiné à remplacer 7 types d’appareil différents dans une logique de stricte suffisance opérationnelle des états-majors. À la fin du programme (c’est-à-dire, initialement, en 2025), le nombre total d’avions de combat serait ainsi de 294, contre 687 actuellement, soit une baisse de près de 60 %, ratio que l’on peut comparer aux prévisions britanniques (370 appareils contre 563 actuellement, soit une baisse de 34 %).

Le programme a déjà dix ans de retard, plusieurs étalements ayant été décidés pour des raisons budgétaires. Le coût du programme demeure quant à lui maîtrisé à 4 % près, le coût unitaire d’un appareil s’élevant à 89 millions d’euros, contre 145 millions d’euros pour un Eurofighter et 282,5 millions de dollars pour un F22 américain.

Les objectifs initiaux de la LPM 2003-2008 étaient de 125 appareils commandés et de 76 livrés (dont 57 pour l’armée de l’air). Compte tenu des difficultés rencontrées en début de programme, du coût plus élevé que prévu de la production au standard F2 et de la nécessité de prendre en compte le retour d’expérience des premiers Rafale Marine, une réduction du volume de commandes (59 appareils commandés en 2004) et du rythme de production (1,5 avion par mois, contre 2 au départ) a été négociée avec l’industriel en 2004. De fait, le nombre total d’appareils livrés sur la totalité de la période ne sera que de 56 (dont 41 pour l’armée de l’air, soit 17 avions de moins que prévu) et le rythme de production n’a jamais dépassé 1,2 avion par mois.

La LPM prévoyait également la mise en service opérationnel du deuxième escadron de F3 au début de l’année 2008 et du troisième à la mi-2009. En réalité, le deuxième escadron, stationné à Saint-Dizier, devrait disposer de 20 Rafale fin 2008 mais les nouvelles capacités du standard F3 ne seront déclarées opérationnelles qu’en 2009, voire mi-2010 pour la capacité nucléaire. Les deux premiers escadrons débuteront à cette échéance la mise en œuvre du standard F3 et une remontée du standard F2 vers le standard F3 des appareils déjà livrés sera organisée en parallèle. Quant au troisième escadron, sa date de mise en service opérationnel n’est plus annoncée…

Les prochaines étapes d’amélioration capacitaire du Rafale ne figurent pas dans la LPM 2003-2008. Elles ne font donc pas pour l’instant l’objet d’un cadrage financier mais pourraient, pour partie, entrer dans le cadre du suivi en service, afin de tirer partie des enseignements opérationnels et poursuivre les améliorations des fonctions existantes et les extensions de capacités.

On peut néanmoins considérer qu’en matière de dissuasion, l’essentiel des efforts est désormais accompli. Ce serait donc vraiment dommage de s’interroger maintenant sur l’opportunité de conserver un vecteur aéroporté…

La quatrième commande globale de Rafale (ramenée à 60 appareils – 51 pour l’armée de l’air et 9 pour la marine – au lieu des 66 initialement envisagés) n’apparaît pas dans le projet de loi de finances pour 2008. Dans l’attente des orientations du Livre blanc et des décisions de la LPM, ce programme d’équipement majeur, tant pour la dissuasion que pour la capacité de frappe en profondeur, va donc connaître un « trou » qui n’est pas sans conséquences pour ses conditions de fabrication.

En effet, en deçà de 1,5 avion par mois, la fabrication a du mal à se poursuivre sur un niveau de qualité satisfaisant. Les équipementiers, qui travaillent en même temps pour 130 autres commandes aéronautiques, civiles et militaires, ne considèrent plus le programme Rafale comme une priorité. En conséquence, les approvisionnements en pièces sont ralentis et des défauts de fonctionnement peuvent apparaître à la livraison des appareils, ce qui ne peut qu’alimenter les critiques.

Le volume de la quatrième commande (60 appareils au total) a été arrêté pour obtenir le meilleur coût, le principe d’une commande globale permettant de maintenir la cohérence industrielle et économique du projet. Le débat actuel sur la cible finale du programme Rafale est dangereux tout à la fois sur plan industriel et sur celui des exportations. C’est en effet chaque commande globale qui importe, par les évolutions capacitaires et stratégiques qu’elle autorise.

L’arrivée des Rafale F3 et des 51 appareils de la quatrième commande permettrait d’avancer dans la rationalisation des forces en permettant le désarmement des Mirage F1, seuls appareils actuellement capables de faire de la reconnaissance. En l’absence des Rafale F3, il faudra maintenir en service les Mirage F1, pour un coût de MCO élevé et avec le risque de faire de la sur-maintenance dans l’incertitude des décisions à venir. En termes strictement budgétaires, les économies sur le programme 146 ont donc des conséquences directes sur les dépenses du programme 178.

2.  L’urgence de l’aéromobilité

La capacité de projection mise en œuvre par l’armée de l’air repose sur un ensemble de vecteurs qui concourent à la mobilité globale des forces. Aujourd’hui, les armées françaises disposent d’une flotte de projection disparate et vieillissante (40 ans d’âge pour les C160 et C135), offrant une faible disponibilité (50 à 65 %) avec des coûts de MCO élevés.

Flotte de projection de l’armée de l’air

Type d’avion

Nombre

Type de mission

C135

KC135

11

3

Ravitaillement en vol

A340

A310

21

3

Projection stratégique

C1602

C130H

55

14

Mobilité tactique avec une faible capacité de projection

CN 235

19

Mobilité logistique intra théâtre + entraînement des parachutistes

1 En location

2 Sur une flotte initiale de 67 ; déflation commencée en 2005 jusqu’en 2015

Source : armée de l’air

Ces moyens ne permettent pas de remplir nos objectifs capacitaires, malgré le recours à l’affrètement. Si l’on prend comme référence les besoins de la Force de Réaction Immédiate (FRI), contrat le plus dimensionnant (3), la flotte actuelle ne permet de remplir que très partiellement les contrats puisque seuls 30 % du fret de la FRI sont réalisables. En outre, les KC 135 sont inexploitables hors territoire métropolitain et les C135 sont inadaptés à la projection des Rafale à 5 000 kilomètres.

À titre de comparaison, la capacité de projection française est au tiers de la capacité anglaise et à la moitié de la capacité allemande… et il ne faut guère espérer de mutualisation européenne efficace à court terme, car la capacité de l’Union atteint à peine aujourd’hui 25 % de ses ambitions.

L’A400M et le MRTT (avion multirôle de transport et de ravitaillement) sont donc deux programmes majeurs de rétablissement des capacités de transport et de ravitaillement en vol de la France et de l’Europe.

Les cibles des programmes pris séparément étaient initialement de 62 A400M pour le contrat de projection de la Force de Réaction Rapide (FRI) et de 20 avions ravitailleurs (loi de programmation militaire). Par optimisation, le couple A400M–MRTT permet de réduire les cibles à 50 A400M et une quinzaine de ravitailleurs (14 de type A330 ou 16 KC 767).

• L’A400M est le plus important programme industriel militaire jamais engagé en coopération européenne. Le contrat, signé en 2003 entre l’OCCAR (organisation conjointe de coopération en armement), et Airbus Military, s’élève à 20 milliards d’euros et comprend pour le moment 180 appareils commandés (60 par l’Allemagne, 50 par la France, 27 par l’Espagne, 25 par le Royaume-Uni, 10 par la Turquie, 7 par la Belgique et un par le Luxembourg).

Le programme est aujourd’hui en phase de développement final. L’industriel vient d’annoncer un retard officiel de 6 à 12 mois minimum sur les premières livraisons, initialement prévues en octobre 2009. Les difficultés rencontrées se situent notamment dans la mise au point des moteurs. Dans l’attente de la livraison des A400M, aucune mesure conservatoire n’étant prévue à ce stade, la capacité de la flotte française de transport va continuer à diminuer, principalement à cause de la déflation des C160. Les C130 et les C135 seront rénovés pour répondre aux exigences opérationnelles et règlementaires, mais à quel prix !

Au total, la capacité de projection de fret de la FRI ne sera plus que de 26 % en 2011. Au-delà d’un retard de 12 mois, la capacité de projection de fret de la FRI descendrait à 24 % en 2012. Les conséquences organiques sur l’activité des équipages seraient telles que la reprise capacitaire espérée avec l’A400M serait ralentie jusqu’en 2016 au moins, l’armée de l’air ne pouvant plus, faute de vecteurs, maintenir un nombre d’équipages suffisant pendant la période du déficit.

Le MCO de cet appareil est également un enjeu européen important. En effet, l’A400M ouvre de réelles opportunités de coopération en matière de formation et de soutien en service. Une unité multinationale sous les ordres de l’EATC (European Air Transport Command) serait un symbole politique fort de construction européenne et un levier efficace pour intéresser de nouvelles nations européennes à l’achat d’A400M.

La mutualisation du soutien bute cependant sur les enjeux industriels nationaux importants qui y sont liés. La France négocie donc avec ses partenaires un accord qui garantisse la préservation de notre aptitude à opérer conjointement sur la base d’une gestion commune de la configuration des avions et de celle des rechanges. Par ailleurs, la formation en commun aux normes européennes des mécaniciens devrait permettre une maintenance croisée plus facile des appareils en service.

• La LPM avait évalué à 20 appareils les besoins en avions ravitailleurs afin de remplir le contrat capacitaire de projection et de soutien de 100 avions de combat sur deux théâtres et de 14 appareils pour la composante dissuasion. La polyvalence de vecteurs tels que les MRTT et l’A400M a permis de définir une nouvelle cible qui répond, pour un coût d’achat et d’exploitation moindre, aux deux contrats, soit 14 MRTT type A330 (ou 16 de type B767) plus 8 A400M en ravitailleurs de théâtre. Les 14 MRTT ont également vocation à participer à la projection de la FRI à côté des A400M. Il s’agit donc bien d’un concept de mobilité globale dans lequel l’utilisation combinée de vecteurs modernes et polyvalents est optimisée.

Deux options coexistent actuellement pour le financement, soit entièrement public soit en partenariat avec le privé. Au vu des difficultés de l’expérience britannique en la matière (négociations non finalisées depuis 5 ans, contrat de 20 millions d’euros pour 14 MRTT sur 27 ans), on peut néanmoins s’interroger sur la viabilité du scénario de recours à un partenariat public-privé, compte tenu de son coût global, des difficultés induites par la non-propriété des appareils (utilisation pour la dissuasion, difficultés de modifications opérationnelles…) et des risques d’allongement des délais de mise en place. Une solution pourrait peut-être résider dans l’achat immédiat, par l’État, de quelques appareils, à compléter ensuite par un recours à une solution de service.

Des décisions en la matière sont en tout cas urgentes et devront trouver leur place dans la première annuité de la future LPM.

3. Les drones : vers la fin de l’errance ?

La question des drones semble être, depuis plusieurs années, un terrain privilégié pour la confusion et l’indécision. À l’heure où la plupart des armées modernes se dotent de cette capacité stratégique, il est primordial que la France, qui cherche à occuper une place prépondérante dans la construction de la PESD en tant que nation cadre, ne soit pas absente de ce segment. Chacun sait que l’obtention du renseignement est une fonction de plus en plus essentielle à la défense et à la sécurité d’une nation, et sa maîtrise garantit à un pays l’indépendance opérationnelle et tactique de ses forces armées. Maîtriser la technologie des drones et notre équipement dans ce domaine est donc un enjeu essentiel qui, jusqu’à présent, n’a pas été pris en compte à hauteur de son importance.

De quoi parle-t-on quand on évoque les drones ?

Il convient tout d’abord de distinguer les drones de combat, dits UCAV (Unmanned Combat Air Vehicle), dont l’usage, aujourd’hui encore, n’est pas véritablement fixé, des drones de surveillance, qui, de façon complémentaire des systèmes satellitaires et des vecteurs pilotés, permettent de disposer en permanence d’une surveillance du théâtre d’opération. Cette surveillance, exercée au profit de l’ensemble du dispositif interarmées voire interministériel en cas d’application sur le territoire national, améliore la réactivité et l’efficacité globale des moyens engagés. Ces drones peuvent également, en complément et selon leur format, remplir des fonctions de reconnaissance.

Au sein des drones de surveillance, trois types d’appareils coexistent :

– les drones de théâtre, qui volent très haut, restent longtemps en situation (au moins 24 heures) et transmettent de façon permanente, partout dans le monde, des informations à un centre de commandement ; les systèmes MALE (moyenne altitude longue endurance) et HALE (haute altitude longue endurance) appartiennent à cette catégorie ;

– les mini-drones de contact (moins de 20 kg), qui permettent aux forces en opération d’avoir une vision de ce qui se passe « derrière la colline » ; il s’agit alors de petits appareils qui volent à basse altitude et ont une courte durée d’autonomie ; le programme DRAC (EADS), prochainement livré à l’armée de terre, relève de cette catégorie ;

– les drones tactiques, qui occupent une situation intermédiaire entre les deux catégories précédentes et emportent un équipement plus ou moins sophistiqué (radar et boule optique par exemple) ; ces appareils devraient pouvoir décoller à partir d’un navire.

Les crises afghane et irakienne ont rendu évident le besoin de surveillance de théâtre. Les différents pays intervenant dans ces opérations ont donc renforcé leurs efforts d’équipement en drones MALE, comme l’indique le tableau ci-après.

État des lieux des drones MALE et HALE

PAYS

MATÉRIELS OPÉRATIONNELS

PRÉVISIONS D’ACQUISITIONS

Type1

Dénomination

Nbre

Missions

Etats-Unis

HALE

RQ-4 B GLOBAL HAWK

11

Surveillance

54

MALE

PREDATOR A - MQ-1

150

Surveillance + relais radio, Illumination + tir d’armement guidé laser

158 (2007-2011)

PREDATOR B - MQ-9 REAPER

9

Surveillance + relais radio, Illumination + tir d’armements (laser, JDAM)

Douanes et US Coast guard, US Navy, NASA + 50 à 70 USAF

France

SIDM2

3

Surveillance + relais radio, Illumination laser

Advanced UAV3

Italie

PREDATOR A export

6

Surveillance + relais radio, Illumination laser

 

UK

PREDATOR B

4

Surveillance+ Illumination + tir d’armements (laser, JDAM)

Livraison de 4 PREDATOR jusqu’en 2009

PROGRAMMES EN DEVELOPPEMENT

ECHEANCES

PAYS

Type4

Dénomination

Nbre

Missions

Allemagne

HALE

EURO HAWK

4

ROEM5

2011-2014

MALE

Predator B ou SIDM puis Advanced UAV

16

Surveillance + relais radio, Illumination laser + ESM + options : tir d’armement, brouillage

2010 pour Predator B ou SIDM et 2016 pour Advanced UAV

Espagne

Predator B ou SIDM puis Advanced UAV

16

Surveillance + relais radio, Illumination laser + ESM + options : tir d’armement, ROEM, brouillage

2010 pour Predator B ou SIDM et 2016 pour Advanced UAV

France

Advanced UAV

16

Surveillance + relais radio, Illumination laser + ESM + options : tir d’armement, ROEM, brouillage

2016

1 High Altitude Long Endurance ou Medium Altitude Long Endurance

2 Système Intérimaire de Drone Male, développement EADS et IAI sur la base du drone israélien Héron

3 Programme en coopération France, Allemagne et Espagne, successeur du programme EUROMALE

4 High Altitude Long Endurance ou Medium Altitude Long Endurance

5 Renseignement d’Origine électromagnétique (SIGINT en anglais)

Source : état-major de l’armée de l’air

En France, la stratégie d’acquisition initiale fondée sur une approche incrémentale à partir d’achats sur étagère est aujourd’hui fragilisée par les décalages successifs des deux programmes envisagés. Des mesures doivent être prises rapidement afin d’éviter toute rupture capacitaire.

• Le SIDM (4) : confié à la société EADS, le programme SIDM aura accumulé près de cinq ans de retard fin 2008, date aujourd’hui prévue pour sa mise en service opérationnelle sur la base de Cognac (création d’une unité de 52 personnes mettant en œuvre 3 appareils et 2 stations sol). Ce retard est dû, tout à la fois, à une mauvaise définition du besoin et à une mauvaise évaluation du niveau de complexité d’un tel système (liaison de données satellite) au moment de la passation du contrat. Il faut reconnaître que l’utilisation d’un appel d’offre sur performance n’était pas forcément la bonne solution pour ce type de produit, forcément novateur. Se contenter de laisser les industriels se battre pour remporter le marché, sans aucun dialogue compétitif permettant d’affiner le besoin et les attentes n’est pas une solution satisfaisante sur le long terme. En effet, soit l’industriel refuse la prise de risque technologique et ne propose que ce qu’il sait faire, ce qui bloque toute possibilité d’innovation, soit il avance à l’aveugle et y perd à tous les coups (comme dans le cas du SIDM).

Le programme avait au départ comme objectif de constituer une première capacité intérimaire en attendant la livraison d’un système plus robuste et performant répondant aux besoins exprimés par les armées. Cependant, le retard de ce deuxième programme aidant, il serait aujourd’hui envisagé d’utiliser directement le SIDM de façon opérationnelle. Mais une telle évolution ne saurait fonctionner en l’état : il faut d’ores et déjà remédier aux obsolescences, accroître la robustesse du dispositif, organiser la maintenance et surtout produire de nouveaux vecteurs à un niveau industriel.

Tout cela ne pourra pas être réalisé dans le périmètre actuel du contrat (soit 41 millions d’euros) alors que les pertes d’EADS sur ce programme sont déjà considérables (de l’ordre de 150 millions d’euros). Selon les informations communiquées au rapporteur, des crédits sont apparemment prévus (152 millions d’euros sur 2008-2013) pour permettre de pérenniser la capacité opérationnelle du SIDM et la soutenir jusqu’en 2013. Nous verrons ce qu’il en est dans la prochaine loi de programmation…

Le SDM (5) : le SDM est un système de drones de renseignement répondant à un besoin interarmées de surveillance permanente multi-capteurs, tout temps et de niveau théâtre.

Initialement dénommé Euro-MALE, le projet de SDM porté par EADS était basé sur le rachat d’une technologie israélienne (110 millions d’euros investis en 2005) puis la construction d’une équipe de développement européenne pour le développement d’un outil commun. Dassault Aviation était alors responsable de la partie aéronef. À la suite de difficultés de mise en place de la structure commune, le projet s’est réduit à une coopération avec l’Espagne.

En 2006 néanmoins, au moment où le projet Euro-MALE était remis à la DGA, celle-ci, persévérant dans sa volonté de construire un véritable programme européen, a demandé de réfléchir à un équipement permettant de fusionner les besoins français et espagnol (drone de reconnaissance) et le besoin allemand (fonction complémentaire de reconnaissance rapide à basse altitude). Cela a donné naissance au projet Advanced UAV, de conception relativement différente. Le contrat de transfert de technologie avec la société israélienne a donc été rompu et le schéma industriel du programme revu (sortie de Dassault Aviation notamment, la partie avion devant être fabriquée en Allemagne).

Le nouveau projet semble, pour la première fois, rassembler dans un cadre européen la masse critique nécessaire à sa viabilité financière. Autour des trois partenaires majeurs du projet (France, Allemagne et Espagne), d’autres pays ont manifesté leur intérêt (Italie, Pays-Bas, Turquie…). Pour combler son déficit capacitaire, l’Allemagne a récemment acquis du matériel américain (type Predator), tout en confirmant son implication forte dans le projet européen.

Dans les prochaines semaines, un contrat de réduction de risques devrait être notifié aux trois pays partenaires pour un montant de 60 millions d’euros environ. Un tiers est destiné à la partie française (développée par EADS et Thales), qui porte sur les systèmes de mission et les radars. Néanmoins, un certain nombre de risques (convergence du besoin opérationnel, risques technique, industriel et financier) doivent encore être levés afin de ne pas compromettre le lancement effectif du programme, qui constituerait, pour la première fois, une alternative solide aux produits américains, fortement dominants sur ce marché.

501 millions d’euros seront nécessaires entre 2008 et 2013 pour l’acquisition de 4 systèmes de 4 vecteurs dans le cadre de cette coopération européenne (livraison en 2016). Ici aussi, la future LPM devra prendre en compte ce besoin incontournable et faire enfin la preuve que la France accorde une priorité stratégique, au sein de son projet global de sécurité et de défense, à l’acquisition de moyens indépendants de surveillance de théâtre.

• Le programme NEURON : dans le domaine des drones d’attaque (UCAV), la France participe au financement, en collaboration avec la Suède, l’Italie, l’Espagne, la Grèce et la Suisse, d’un démonstrateur technologique. Il permettra d’acquérir des briques technologiques indispensables et de valider l’intérêt du concept dans le cadre plus large de la réflexion sur l’avion de combat futur.

Le coût total de ce démonstrateur, notamment développé par Dassault, est de 422 millions d’euros dont : 223 millions d’euros pour la France, 54 pour la Suède, 88 pour l’Italie, 33 pour l’Espagne, 20 pour la Grèce et 4 pour la Suisse.

54 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 12,6 millions d’euros de crédits de paiement sont destinés à ce programme dans le projet de loi de finances pour 2008.

4. Quelles perspectives en matière de missiles ?

Pour les années à venir, en matière de missiles conventionnels, les priorités de l’armée de l’air sont concentrées sur quatre objectifs :

– la réalisation des quantités figurant dans le tableau ci-après :

Programmes d’équipement de l’armée de l’air en missiles

Missiles MICA

840

 

Missiles SCALP EG

450

 

Sol-air moyenne portée SAMP (programme FSAF)

475

*

Armement air-sol modulaire AASM (première commande en 2001)

2 000

 

*Augmentation due à la décision de reprise de la totalité de la capacité de défense sol-air moyenne portée par l’armée de l’air.

– la commande de leurres pour avions de combat et de transport ;

– le missile d’interception à domaine élargi (MIDE), complémentaire du missile MICA sur Rafale à l’horizon 2013 ;

– la disponibilité d’un armement métrique tout temps à l’horizon 2013.

Le programme METEOR, quant à lui, reste encore en attente de commande française. Principal programme européen de missile du fait de son contenu technologique, de sa dimension de coopération (6 nations européennes parties prenantes : Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Espagne et Suède) et de son importance industrielle, le missile METEOR, couplé au MICA, devrait permettre d’assurer la supériorité aérienne du Rafale face aux menaces aériennes de dernière génération. La France participe au développement du programme (900 millions d’euros au total) à hauteur de 12,4 %. Le développement et les essais du METEOR se déroulent sans difficulté et les premiers missiles de série devraient sortir à la fin de 2012. Pour l’instant, cependant, seul le Royaume-Uni a passé commande d’une série ; il devrait être suivi par l’Espagne. Pour que la livraison de la commande française (300 missiles envisagés) puisse intervenir à la date prévue, soit en 2014, il conviendrait que la décision soit prise rapidement. Cela fera partie des questions à trancher par la prochaine loi de programme.

Enfin, certains semblent actuellement s’interroger sur l’avenir de la composante aéroportée de la dissuasion – ce qui n’est pas le cas du rapporteur, persuadé de son utilité. Le Livre blanc devra clairement lever le doute sur ce sujet car les choix qui seront faits en la matière conditionnent pour des années les activités de recherche et développement des industriels du secteur.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL STÉPHANE ABRIAL, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE L’AIR

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Stéphane Abrial, chef d’état-major de l’armée de l’air, sur le projet de loi de finances pour 2008 (n° 189) au cours de sa réunion du mercredi 24 octobre 2007.

Le général Stéphane Abrial, chef d’état-major de l’armée de l’air, a souhaité, en cette année de transition, présenter les différentes contributions de l’armée de l’air au service de la France, avant d’évoquer l’emploi des crédits qui lui ont été confiés en 2007 et les orientations que le projet de loi de finances 2008 retient pour son avenir.

Dans le contexte actuel de mondialisation et d’interactions généralisées, la troisième dimension rapproche les hommes. L’avion abolit les distances, le satellite apporte des moyens de communication et de navigation inégalés. Puisque 100 % de notre planète et de sa population baignent dans un environnement aérospatial, une stratégie globale dans ce milieu paraît indispensable. L’emploi de la troisième dimension est devenu essentiel pour la sécurité de nos concitoyens et son champ d’application ne cesse de croître : mobilité, communications, observation, surveillance d’événements particuliers, lutte contre les trafics en tout genre ou la pollution, protection de l’environnement, prévention des phénomènes météorologiques et des catastrophes naturelles – spécialement dans la France d’outre-mer –, participation à la recherche et au sauvetage de nos concitoyens...

Dans le domaine de la défense, la détention d’une puissance aérospatiale crédible est considérée comme stratégique par beaucoup. C’est ainsi que l’on voit, non sans inquiétude, de nombreux États étrangers s’équiper d’avions de chasse de dernière génération extrêmement performants. En cas de crise ou de conflit, certains d’entre eux pourraient menacer les intérêts de la France, voire son territoire, sa suprématie aérienne ou la sécurité des forces de surface. On peut aussi noter que la Russie a choisi de marquer son retour et sa détermination par la reprise des vols de ses bombardiers stratégiques qui viennent, comme au temps de la guerre froide, flirter avec les espaces nationaux des pays d’Europe de l’Ouest. Ces deux exemples montrent bien l’importance de la puissance aérienne en termes de statut.

Le général Stéphane Abrial a constaté que les opérations récentes, qu’elles soient humanitaires ou militaires, ont mis en évidence l’intérêt pour la France de disposer d’une force aérienne de haut niveau pour peser sur la scène internationale. Que ce soit pour soulager les souffrances des populations au Pakistan ou à la Nouvelle-Orléans, pour évacuer rapidement des ressortissants dans des pays éloignés ou pour réduire les moyens d’action d’un ennemi, les vecteurs aériens mettent en œuvre des capacités uniques qui répondent à des besoins à la fois politiques et militaires. De la dissuasion à la surveillance, la maîtrise garantie du milieu aérospatial est un atout majeur pour permettre à la Nation de tenir son rang. Il est souhaitable que cette notion soit reconnue dans la future loi de programmation militaire (LPM), qui transcrira en termes d’effort national l’ambition que le Livre blanc fixera pour la France.

Pour éclairer ses propos, il a évoqué quelques qualités spécifiques de la troisième dimension. Tout d’abord, toute action aérienne apporte un mélange de souplesse, de visibilité graduable et de réversibilité. La meilleure illustration en est certainement, au cœur de la sécurité et de la survie de notre Nation, la dissuasion nucléaire. Ces caractéristiques donnent à la composante aéroportée des atouts propres, différents de ceux de la composante sous-marine. C’est la complémentarité de ces deux ensembles qui garantit la crédibilité de notre outil de dissuasion. Cette mission d’exception revêt pour l’armée de l’air une priorité absolue. L’ensemble de la chaîne de commandement et d’exécution s’entraîne régulièrement lors d’exercices conduits avec la plus grande rigueur, pour être prêts à répondre à tout moment aux ordres du Président de la République.

Deuxièmement, l’action aérienne s’appuie sur la permanence et la capacité d’adaptation. Ainsi, dans le cadre de la sûreté aérienne du territoire, les appareils de l’armée de l’air décollent quotidiennement pour assurer la sécurité des Français et la souveraineté de l’État dans son espace aérien. Mi-octobre 2007, les avions de chasse ont déjà effectué environ 700 décollages sur alerte et 400 pour les hélicoptères. Cette mission demande un entraînement intensif, car il est essentiel que les équipages s’adaptent sans délai à l’environnement. Lorsque l’un des cinq hélicoptères, des huit Rafale ou Mirage en alerte dans le cadre de la posture permanente de sûreté décolle en moins de quelques minutes, le pilote est à la fois les yeux et le bras armé de l’État. Il doit être prêt à porter assistance, s’assurer de l’identité ou des intentions de certains aéronefs, interdire le survol d’une zone sensible, arraisonner un appareil détourné par un terroriste, voire pire. La capacité de l’armée de l’air à surveiller la troisième dimension s’étend aussi dans l’espace extra-atmosphérique. Les aviateurs mettent en œuvre le radar Graves qui observe les satellites en orbite basse et maintient à jour une base de données sur les paramètres orbitaux des mobiles détectés. Les applications sont nombreuses et contribuent à renforcer la souveraineté nationale. La France a pu ainsi évaluer de manière autonome, grâce à la précision des éléments recueillis, les conséquences du tir du missile chinois anti-satellite.

Troisièmement, la réactivité et la rapidité d’exécution sont intrinsèques à l’arme aérienne. Elles sont démontrées chaque jour par les appareils français situés sur le théâtre afghan. Les Mirage et, il y a encore peu de temps les Rafale, effectuent au quotidien des missions de présence, de reconnaissance ou de démonstration de force sans lesquelles la stabilisation du pays exigerait des moyens beaucoup plus importants. Ils luttent contre les Taliban, soit de manière autonome, soit en étroite coopération avec les troupes au sol et participent à la sécurité des soldats engagés. Ainsi, lorsque les troupes de surface sont assaillies, elles font appel à des appareils de la coalition qui viennent sur zone en quelques minutes afin de dissuader, ou bombarder si nécessaire, les adversaires. Sans cette réactivité, qui nécessite aussi de la permanence, un nombre bien supérieur d’hommes de toutes les armées serait en grand danger. La mise en place récente du dispositif des chasseurs à Kandahar vise à améliorer encore cette réactivité. Le dispositif interarmées est complété par des ravitailleurs en vol à Manas, qui sont indispensables pour garantir la permanence, et par deux C-160 à Douchanbé, qui fournissent un soutien logistique aux forces déployées sur place et un appui essentiel dans la capacité à durer.

Le chef d’état-major de l’armée de l’air a également cité l’exemple des hélicoptères EC-725 Caracal, rentrés en France mi-septembre après avoir marqué de leur empreinte leur séjour en Asie Centrale. A peine revenus de l’opération d’évacuation au Liban à l’été et l’automne 2006, ils ont en effet été déployés à Kaboul dès mi-décembre. Tous les acteurs se sont félicités de leur contribution sur le théâtre afghan. Parmi leurs faits d’armes, ils ont très largement contribué en août à la libération d’une otage allemande 24 heures seulement après son enlèvement. Deux jours plus tard, ces mêmes équipages ont récupéré en pleine zone de combats et exfiltré huit militaires italiens, dont deux grièvement blessés à la suite du crash de leur hélicoptère dans les montagnes.

L’ensemble de ces moyens répond parfaitement au « besoin d’agir vite et loin » qui a été rappelé par le Président de la République le 24 août dernier lors de son discours devant la commission du Livre blanc.

Le général Stéphane Abrial a ensuite évoqué l’allonge comme quatrième qualité de la troisième dimension. La partie de l’Afrique subsaharienne où la France est très impliquée, quasiment de Dakar à Djibouti et à Libreville, est tellement vaste qu’elle pourrait être vue comme la juxtaposition de nombreux théâtres qui nécessiteraient une grande quantité de points d’appui. Or l’armée de l’air démontre chaque jour qu’à partir d’une position centrale à N’Djamena, elle peut intervenir sur toute cette zone. Elle surveille régulièrement la frontière entre le Tchad et le Soudan ; elle est intervenue avec des avions et des commandos de l’air lors des deux derniers épisodes de crise en République Centrafricaine. Elle peut également agir sans contrainte sur d’autres lieux – comme en République Démocratique du Congo pendant l’opération de l’Union européenne sous mandat ONU pour la surveillance des élections – si le besoin s’en fait sentir, grâce au soutien des ravitailleurs en vol. Ses moyens de transport assurent la mobilité de ses troupes et participent au soutien sanitaire des populations isolées. Ainsi, avec moins de 400 personnes au sol à N’Djamena, six avions de chasse, trois avions de transport et un ravitailleur, l’armée de l’air offre à la France une capacité inégalable de rayonnement, de stabilisation et d’action pour la sécurité dans la région.

Au total, et au-delà du personnel et des appareils dédiés à la posture permanente de sûreté, ce sont quelque 3 500 aviateurs qui servent hors de métropole et mettent en œuvre environ 80 aéronefs (avions de chasse et de transport, hélicoptères, ravitailleurs). Si on analyse plus en profondeur les opérations auxquelles ils participent, on peut noter que l’armée de l’air offre à chaque fois, avec un rapport coût-efficacité inégalé, des ressources originales au profit des décideurs politiques ou des commandants de théâtre, fondées, tout à la fois, sur sa faible empreinte au sol, qui permet de mesurer au plus juste la quantité des moyens engagés, sur sa capacité à survoler, dans des délais extrêmement réduits et difficilement imaginables autrement, des lieux hors de portée de moyens plus classiques et sur la réversibilité et la graduation de l’action aérienne, qui permettent d’agir sur un spectre très large de missions et d’adapter le niveau de la force utilisée.

Le général Stéphane Abrial a estimé que les retours d’expérience des opérations montrent tout le bénéfice qui peut être tiré d’un bon usage de l’art de la guerre aérienne. En effet, bien intégré dans une manœuvre interarmées, il peut conférer un formidable avantage comparatif sur tout le spectre des missions. Les adversaires de la France qui ne peuvent opposer des moyens aériens performants l’ont bien compris, puisqu’ils refusent les affrontements décisifs et cherchent à survivre modestement pour durer. C’est le cas du Hezbollah au sud-Liban et des Taliban en Afghanistan, qui sacrifient leur propre mobilité pour se réfugier dans des grottes ou des souterrains.

Il a estimé important, pour préserver les capacités d’action de la France, de conserver cette aptitude, qui peut s’exercer aussi bien de manière indépendante qu’en coalition. Dans ce dernier cas, un élément important est la capacité de l’armée de l’air à œuvrer de concert, c’est à dire à être interopérable. La troisième dimension est certainement le domaine où le besoin d’interopérabilité s’est imposé naturellement, sans doute du fait de l’absence de toute frontière physique. Ainsi, même après 1967, les aviateurs français n’ont jamais cessé de travailler avec leurs homologues américains et européens de l’OTAN. Les armées de l’air utilisent des procédures communes, des standards communs, s’exercent régulièrement ensemble, au quotidien et dans de nombreux exercices majeurs. Les bénéfices de cet état de fait ont été flagrants dans le Golfe en 1990 et 91 et au Kosovo en 1999.

Le savoir-faire de l’armée de l’air française est apprécié au niveau européen, car les aviateurs français sont réputés pour leur expérience des opérations, leur capacité d’adaptation et leur désir d’innovation. Ce savoir-faire a été mis une nouvelle fois en évidence dans le cadre de l’opération Balto, destinée à assurer l’intégrité des approches aériennes des trois pays baltes, qui ne possèdent pas les moyens de faire respecter leur souveraineté dans les airs. Pendant quatre mois, d’avril à juillet, la France a déployé 122 personnes et quatre Mirage 2000 à Siaulai, en Lituanie, où cette formation était prête à faire décoller sur alerte en moins de quinze minutes deux avions de chasse armés. Des contrôleurs aériens baltes ont pu ainsi être formés aux techniques de l’interception.

Le chef d’état-major de l’armée de l’air a estimé que l’Union européenne était une dimension complémentaire à exploiter. En tant qu’européen convaincu, il partage avec ses homologues de l’Union européenne une même vision de l’emploi de l’arme aérienne. Ils sont tous désireux d’aller de l’avant. Après le succès des accords bilatéraux de défense aérienne avec les pays voisins, ils souhaitent étendre cette interopérabilité à d’autres domaines, comme la formation et le commandement. Des projets sont déjà bien avancés pour ce qui concerne la formation. L’école franco-belge de pilotes de chasse – AJeTS – qui a pris son essor depuis 2005, peut servir de référence au niveau européen. Un instructeur italien a ainsi rejoint la France en janvier 2007 et deux stagiaires allemands ont été formés cette année. La Grèce pourrait également être plus étroitement associée. Ce programme ouvre par ailleurs la voie à une initiative encore plus ambitieuse qui regroupe dix pays européens pour l’ensemble de la formation future des pilotes de chasse (AEJPT). L’École de l’aviation de transport d’Avord s’inscrit dans la même dynamique : des pilotes de transport belges et néerlandais sont formés indifféremment avec les élèves français.

Dans le domaine du commandement, qui est un véritable trait d’union entre les nations, il a estimé que l’expérience acquise au sein de l’European Airlift Center devait être utilisée pour constituer un commandement européen du transport aérien. L’armée de l’air française ouvre par ailleurs aux officiers étrangers ses structures fixes et déployables de commandement et de conduite des opérations aériennes. Enfin, le développement de projets nationaux comme le SCCOA, équivalent français de l’ACCS (Air Command and Control System) dans l’OTAN, prouve que les capacités européennes peuvent bénéficier des investissements faits par la France dans certains travaux menés par l’Alliance Atlantique. L’influence militaire de l’Union européenne dépend d’abord des ressources nationales des pays contributeurs et il convient de ne négliger aucune piste.

Le général Stéphane Abrial a ensuite présenté, au vu de l’exécution du budget 2007, la situation de l’armée de l’air et son avenir proche. Il a ainsi estimé qu’après une loi de programmation presque intégralement exécutée, l’effort entrepris par la Nation devait se poursuivre afin d’assurer le renouvellement des moyens d’action de l’État et la rentabilité des investissements réalisés jusqu’ici. L’armée de l’air s’est engagée ces dernières années, grâce aux choix politico-militaires précédents, dans le renouvellement de l’ensemble de ses équipements majeurs et dans une logique de forte réduction de format. En moins de vingt ans, de 1990 à 2008, elle passera ainsi de 600 avions de chasse à 300, diminution permise et compensée par une très grande polyvalence des nouveaux appareils.

C’est le cas du Rafale qui prouve chaque jour l’étendue de ses capacités et possède les performances et le système d’armes indispensables pour remplir tout le spectre des missions, de la dissuasion à la protection, en passant par la stabilisation et la maîtrise de l’espace aérien. Il faut le répéter, cet avion est particulièrement réussi et les Français peuvent en être fiers. C’est sans aucun doute le meilleur avion de chasse européen actuel, le seul en tout cas qui ait fait à ce jour ses preuves sur le champ de bataille. En quatre mois dans le ciel afghan, 550 heures de vol ont été réalisées, démontrant une amélioration capacitaire majeure par rapport aux Mirage 2000 et F1, avec une remarquable disponibilité. Ce retour d’expérience permet de cerner les différentes perspectives d’évolution de cet appareil.

Il a considéré que la polyvalence se retrouve également dans le transport aérien stratégique et tactique. Pour l’instant, la capacité de projection française représente le tiers de celle des britanniques et la moitié de celle des allemands, le tout étant loin de satisfaire les besoins européens. La prochaine génération d’avions de transport à base d’A400M et d’avions multirôles transport et ravitaillement MRTT est donc attendue avec impatience. La conjonction de la polyvalence de ces deux types d’appareils a permis de réduire les cibles initialement envisagées pour remplir les contrats opérationnels dévolus à l’armée de l’air. Pris séparément, il aurait fallu 62 A400M et 20 ravitailleurs en vol ; la complémentarité de leurs capacités a favorisé une diminution de la cible des A400M à 50 exemplaires et celle des ravitailleurs type MRTT à seulement une quinzaine. Ces avions devraient également remplacer les trois A310 et les deux A340 achetés en leasing, dont le deuxième exemplaire a été livré cette année.

L’arrivée à temps de l’ensemble de ces appareils polyvalents est essentielle car elle doit permettre de retirer du service des matériels anciens qui sont de plus en plus difficiles à entretenir et même, pour certains, à bout de souffle. Tout retard ou tout délai dans l’arrivée des avions modernes risque donc d’avoir des conséquences très sensibles en termes de capacités opérationnelles et de budget. L’armée de l’air serait contrainte de maintenir en ligne de vieilles flottes, ce qui se traduirait par des surcoûts inutiles pouvant grever des projets décisifs pour l’avenir.

En conséquence, le chef d’état-major de l’armée de l’air a souligné la nécessité que les livraisons de Rafale se poursuivent selon des cadences suffisamment élevées pour ne pas remettre en cause l’équilibre fragile entretenu pour le moment. Il a de même rappelé que l’armée de l’air avait presque consommé toutes ses marges de manœuvre sur la date d’arrivée de l’A400M. Elle est encore capable, moyennant quelques mesures palliatives, d’absorber un retard de 6 à 12 mois par rapport aux échéances prévues pour les premiers appareils, mais les nouvelles échéances annoncées pour l’A400M doivent être respectées. Les avions ravitailleurs, qui sont plus vieux que le Concorde, arrivent également en fin de vie. Ils vont certes bénéficier d’une rénovation opportune de leur équipement de vol pour respecter les exigences de plus en plus pressantes des normes de navigabilité, mais ces mesures n’auront pas d’effets sur l’état des cellules. Tout doit donc être mis en œuvre pour qu’une acquisition des premiers MRTT soit lancée au plus tôt.

Le MRTT et l’A400M sont deux exemples de programmes qui peuvent aider à un rapprochement européen. Le soutien du second est en particulier un sujet important, tant au plan de la visibilité européenne qu’en matière financière. Il ne faut pas réitérer ici les erreurs commises pour le Transall. C’est pourquoi des discussions sont en cours avec les principaux partenaires de la France afin de promouvoir une gestion commune de la configuration des avions et des pièces de rechange, de sorte que les appareils de toutes nations évoluent de la même manière dans le temps et que leur emploi puisse être aisément mutualisé. Néanmoins, dans ce domaine, force est de reconnaître que les logiques nationales et les enjeux industriels pèsent très lourd. La France devra trouver les arguments nécessaires, tant politiques que militaires, pour à la fois conserver sa maîtrise opérationnelle et développer la coopération européenne.

Le général Stéphane Abrial a ensuite affirmé qu’il fera tout son possible pour que le besoin en drones, absolument stratégique, soit pris en compte lors des prochaines échéances. Il s’agit d’un domaine où la France, qui était en avance sur le reste de l’Europe, accumule aujourd’hui un retard dramatique. C’est pourquoi l’arrivée dans les mois qui viennent, à Mont-de-Marsan, du SIDM (système intérimaire de drones male), composé de trois vecteurs et de deux stations de contrôle, est une source de satisfaction. Ce système, livré avec 5 années de retard par rapport au calendrier initial, offre une première capacité et ouvre de nouvelles perspectives aux armées. Les drones peuvent rester longtemps en vol et susciter de nouveaux modes d’action en assurant une véritable permanence, en occupant dans la durée l’espace aérien. Leur mise en réseau accroît l’efficacité de l’arme aérienne dans les conflits asymétriques.

Les drones sont également parfaitement adaptés à des missions interministérielles de surveillance de vastes étendues, de recherche de personnes disparues, de participation à la protection de l’environnement, de prévention… À terme, des tâches plus complexes pourront sûrement être confiées à ces engins pilotés à distance, quand les technologies et leur coût seront mieux maîtrisés. Des réflexions sont déjà engagées sur l’avenir des drones d’attaque, y compris de manière multinationale. C’est là un domaine où les Américains sont très en avance, ce qui peut préempter le marché européen. Cette capacité, qui occupera une grande place dans les armées de l’air de demain, peut néanmoins jouer un rôle intégrateur fort au niveau européen.

Enfin, le général Stéphane Abrial a évoqué les capacités de commandement des opérations aériennes, essentielles pour tenir sa place dans les coalitions. En Europe, seules la France et le Royaume-Uni présentent dans ce domaine une aptitude à la hauteur de leurs ambitions. L’armée de l’air a continué, cette année, sa montée en puissance pour acquérir une capacité à planifier et conduire des opérations aériennes de grande densité, d’environ 600 vols par jour, qui sera validée la semaine prochaine par l’exercice AIREX 07.

Il s’est donc, en résumé, déclaré favorable à une armée de l’air resserrée, modernisée et ouverte sur l’Europe. Au-delà des équipements évoqués, il a estimé que la rationalisation et l’optimisation devait également porter sur les structures de l’armée de l’air, naturellement organisée autour d’une logique de milieu.

En ce qui concerne les états-majors, le plan Air 2010 est quasiment arrivé à son terme. Les derniers textes réglementaires vont être publiés, permettant son application complète dès le 1er janvier 2008. Cette réforme a été particulièrement bien menée puisqu’elle a atteint 100 % de ses objectifs avec deux ans d’avance. Elle recueille l’adhésion du personnel, en particulier par la décentralisation qu’elle offre, et commence déjà à porter ses fruits, notamment dans le pilotage des projets et la préparation des opérations extérieures.

Dans le domaine de la maintenance, l’armée de l’air poursuit, dans la continuité de la création de la SIMMAD, une réforme profonde qui conduit à une nouvelle articulation en deux niveaux – opérationnel et industriel – au lieu de trois. Pour l’aspect industriel régalien, l’armée de l’air se prépare à accueillir, également au 1er janvier, l’ancien Service du Matériel de l’Aéronautique qui s’élargit en compétence et en volume et devient le Service Industriel de l’Aéronautique.

Enfin, pour ce qui est des implantations, le général Stéphane Abrial a estimé qu’il fallait en adapter le nombre aux missions permanentes confiées à l’armée de l’air et aux nouveaux formats. Un plan global est en préparation afin d’assurer, dans une perspective interarmées, une densification de certaines bases et le retrait de l’armée de l’air de certaines autres. Il s’agit bien de retrait et non de fermetures car d’autres entités, militaires ou civiles, publiques ou privées, pourront reprendre les structures que l’armée de l’air devra laisser.

Les hommes et les femmes travaillant dans les futures implantations seront largement impliqués dans la démarche de développement durable qui est en train de s’affirmer. Dès à présent, des mesures concrètes ont été prises sur différentes bases aériennes, comme la construction d’une aire à feux à gaz à Cazaux, l’utilisation de lampadaires solaires à Dijon ou le chauffage de différents bâtiments en s’appuyant sur le principe de géothermie à Bordeaux. La base d’Orléans, qui doit être rénovée pour accueillir l’A400M, a été choisie pour être la base pilote dans le domaine du développement durable. L’armée de l’air attend les conclusions du Grenelle de l’environnement pour définitivement diffuser sa politique générale en ce domaine. Elle inclura des mesures pour maîtriser la pollution dégagée par les bases aériennes vers l’atmosphère ou les sols environnants, pour assurer la gestion des déchets ou pour contrôler encore mieux les dépenses d’énergie.

Le chef d’état-major de l’armée de l’air a ensuite abordé le projet de loi de finances pour 2008 qui constitue, pour l’armée de l’air, une année de transition.

Il a tout d’abord présenté le programme 178 « Préparation et emploi des forces » qui réunit 93 % du personnel de l’armée de l’air. La masse salariale, qui s’élève à 3 232 millions d’euros, reste stable par rapport à 2007. Les mesures catégorielles en faveur du personnel militaire représentent 15,4 millions d’euros, dont 8,5 millions d’euros consacrés aux mesures indiciaires. Le plafond d’emploi autorisé en 2008 est de 55 163 militaires et 8 390 civils. La fermeture annoncée à l’été 2008 de certaines unités, d’un escadron de chasse et d’un escadron de défense sol-air, dans le cadre du rééquipement des unités opérationnelles, ainsi que la fin de vie des régions aériennes, expliquent la déflation d’effectifs qui s’élève à 522 personnes. La répartition de cette déflation entre les officiers, les sous-officiers et les militaires du rang respecte la politique du personnel décidée par l’armée de l’air, qui s’appuie sur un « repyramidage » entrepris depuis deux ans. La recherche d’efficience a en effet incité à recentrer les sous-officiers sur leur rôle d’encadrement intermédiaire et de haute technicité, tout en confiant aux militaires techniciens de l’air l’ensemble des tâches d’exécution.

Les hommes et les femmes de l’armée de l’air, toutes catégories confondues, sont tous solidaires pour s’impliquer largement dans le plan d’action « égalité des chances » du ministère de la défense. Le lycée militaire de Grenoble, les écoles de sous-officiers et d’officiers et une base aérienne expérimentale développent ainsi des initiatives concrètes au profit des jeunes français issus de familles défavorisées pour soutenir la mixité sociale dans les armées.

Pour ce qui est du maintien en condition opérationnelle (MCO), depuis 2002, la disponibilité globale des aéronefs de l’armée de l’air est passée de 50 % à 65 % grâce aux efforts financiers et de rationalisation entrepris. La disponibilité en opérations extérieures atteint plus de 90 %, y compris pour le Rafale. D’un point de vue financier, les crédits de paiement alloués pour le MCO restent stables avec une valeur d’environ 1 100 millions d’euros en 2008. Ce montant doit permettre, tout en respectant les engagements du retour à l’équilibre de la SIMMAD, fixé pour 2009, de mettre en ligne le nombre d’appareils nécessaires à la réalisation de l’activité aérienne.

Le niveau de l’activité aérienne reste pour le général Stéphane Abrial une priorité car elle est gage d’efficacité, de crédibilité et de sécurité des vols. Il a estimé que ce niveau devrait être sensiblement maintenu en 2008 (239 000 heures de vol au total) pour atteindre les objectifs fixés, soit 180 heures de vol pour les pilotes de chasse, 200 heures de vol pour les pilotes d’hélicoptère et environ 300 pour les pilotes de transport.

En ce qui concerne le carburant opérationnel, le besoin final de financement en 2006 a pu être satisfait par une levée de réserves et un financement complémentaire du BOP OPEX. Ce procédé sera reproduit en 2007 et probablement en 2008. Si ce type de gestion n’a pour l’instant pas grevé l’activité aérienne, il pourrait avoir des conséquences importantes sur le budget de fonctionnement compte tenu de la hausse continue du baril de pétrole, heureusement compensée par la hausse de l’euro.

En ce qui concerne justement les OPEX, dont le financement relève aussi du programme 178, le volume du « surcoût Air » est estimé à 101,37 millions d’euros pour 2007. Il provient pour moitié des dépenses liées aux rémunérations et pour l’autre moitié des dépenses de fonctionnement, d’alimentation, de carburant et de MCO du matériel.

Le chef d’état-major s’est ensuite attaché à commenter le programme 146 « Équipement des forces » et a estimé que, dans ce domaine, le principal objectif à atteindre est le financement des équipements indispensables pour faire échec aux adversaires de la France, en l’air ou en surface, et pour mettre à profit la liberté d’action que ses armées obtiennent ainsi. Cet objectif est partiellement atteint, avec un montant d’autorisations d’engagement concernant l’armée de l’air de 1 288 millions d’euros.

La commande globale de 60 Rafale (Air plus Marine) qui devait être passée en 2008 est repoussée. Cependant, huit avions seront commandés, dont six pour l’armée de l’air, ce qui permettra de compléter la commande réalisée en 2004 à hauteur de 59 appareils. Sept exemplaires supplémentaires de Rafale seront également livrés en 2008 ; ces appareils sont essentiels à la montée en puissance du second escadron, qui sera le premier à vocation nucléaire. La livraison de 160 bombes propulsées de précision AASM et de 60 missiles Mica permettra également de consolider sensiblement les capacités de l’armée de l’air.

Il a enfin commenté l’évolution du programme 212, qui correspond au « Soutien de la politique de défense », avec 121 millions d’euros d’autorisations d’engagement « Air », notamment pour les projets liés à l’infrastructure et l’informatique. En ce qui concerne l’infrastructure, l’armée de l’air poursuit le processus de modernisation de ses capacités d’hébergement sur les bases aériennes, en construisant ou en rénovant depuis 2002 des chambres individuelles de 16 m² comprenant un espace repos, un bureau, des rangements et des sanitaires complets. Le confort qu’elles offrent participe de manière sensible à l’entretien du moral sur les bases aériennes. 80 % du parc ont été modernisés à ce jour et 2008 verra la rénovation de la tour principale du site de Balard (750 chambres), la construction d’un bâtiment cadres-célibataires à Bordeaux et la transformation d’un bâtiment hébergeant auparavant des appelés à Orléans. En revanche, l’état de l’infrastructure opérationnelle est préoccupante et devra, à l’avenir, bénéficier d’une forte priorité.

Pour les affaires liées à l’informatique, l’armée de l’air disposera en 2008 des crédits nécessaires pour financer ses diverses initiatives. Les programmes majeurs, comme Orchestra pour les ressources humaines ou Louvois et Scapin pour les finances, ont pu être financés en 2007 et les crédits 2008, qui se montent à 6,5 millions d’euros de crédits de paiement, devraient être suffisants pour faire face aux engagements.

En conclusion, le général Stéphane Abrial a relevé avec satisfaction les efforts importants que la Nation a entrepris pour se doter d’un outil aérien performant, à la pointe de la modernité. Les aviateurs s’efforcent d’employer au mieux les crédits qui leurs sont accordés. L’armée de l’air évolue et a une vision assez claire de son destin. S’inscrivant totalement dans l’action interarmées et la coopération européenne, elle a entrepris une vaste transformation de son organisation, qui doit continuer à être soutenue à l’heure où les premiers bénéfices en sont retirés. En cette période de grandes réformes, ce soutien est particulièrement nécessaire pour maintenir le moral du personnel de l’armée de l’air. Ces hommes et ces femmes, civils et militaires, constituent son bien le plus précieux et beaucoup d’efforts sont déployés pour leur recrutement, leur formation, leur fidélisation et leur reconversion. Leur moral, actuellement, est bon mais fragile, cette fragilité étant liée à un certain nombre de facteurs.

Le premier est l’importance de l’activité opérationnelle, qui permet à chacun de toucher du doigt le sens de son engagement. Vient ensuite la qualité de l’outil de travail, qui procure, par sa modernité et sa disponibilité, une fierté légitime et une forte motivation. Les conditions de travail sont également essentielles, et c’est pour cela qu’il faut demeurer vigilant sur le montant des crédits alloués pour l’ensemble des postes qui participent à leur amélioration. Des mesures fortes devront être prises pour enrayer dans l’avenir leur lente dégradation.

Parmi les causes de fragilité du moral, figurent également les conditions de vie puisque, comme le disait récemment le Secrétaire à l’US Air Force, si l’armée recrute et forme des aviateurs, ce sont des familles qu’elle doit fidéliser. Les enquêtes menées montrent d’ailleurs depuis peu que la qualité de la vie familiale prend petit à petit le pas sur la vie professionnelle. Dans ce domaine, il faut rendre hommage aux travaux du Haut comité d’évaluation de la condition militaire, qui a eu un retentissement très fort chez les personnels mais qui a également suscité des attentes qui ne peuvent pas être déçues.

Enfin, le chef d’état-major de l’armée de l’air a mentionné, de manière sans doute plus conjoncturelle, l’ensemble des réformes en cours : la transformation de l’armée de l’air, la révision générale des politiques publiques, la préparation du Livre blanc, la révision des implantations et bientôt la LPM sont autant de chantiers qui pèsent sur les personnels à un rythme soutenu. Il a rappelé que les aviateurs ont toujours appliqué avec enthousiasme les mesures décidées pour améliorer les performances de l’armée de l’air et a tenu à souligner la force de leur engagement et le sens du devoir dont ils font preuve en permanence. Il est donc aujourd’hui indispensable qu’ils puissent saisir le bien fondé de ces réformes et en mesurer concrètement les effets bénéfiques.

Le président Guy Teissier s’est félicité de la progression très sensible du taux de disponibilité des matériels et a interrogé le chef d’état-major sur les tensions en matière de recrutement et de fidélisation des personnels éventuellement constatées dans l’armée de l’air.

Les lacunes en matière de transport stratégique sont un sujet de préoccupation constant et ce d’autant plus que les opérations extérieures ont tendance à s’accumuler, comme en témoigne la mise en place d’une force européenne au Tchad. La location de deux A340 ne suffit pas aujourd’hui à pallier les insuffisances et les retards du programme A400M, qui atteindront au minimum six mois et très probablement davantage. Lors de son audition par la commission aujourd’hui même, le délégué général pour l’armement a confirmé que les problèmes de réalisation du moteur étaient à l’origine de ce retard. Il faut néanmoins être compréhensif car sa construction associe quatre industriels et il s’agit d’une innovation technologique importante, puisqu’il constituera le turbopropulseur le plus puissant au monde. Après avoir rappelé que les premiers essais en vol prévus à Istres durant l’été 2008 sont très attendus, le président Guy Teissier a demandé quel est l’impact du retard sur les capacités de l’armée de l’air et quelles mesures palliatives ont été adoptées pour y faire face.

Il a également relevé l’hommage rendu au Rafale puis s’est interrogé sur les raisons du transfert de la flotte de combat française de la base de Douchanbé vers celle de Kandahar, ainsi que sur la nature et la fréquence des missions assignées à ces appareils en Afghanistan.

Le général Stéphane Abrial a indiqué que l’armée de l’air ne connaissait pas de réels problèmes de recrutement ou de fidélisation. Pour le recrutement, le ratio entre candidats et postes disponibles reste de huit pour un s’agissant du personnel navigant, certes en légère baisse mais sans incidence sur la qualité de la ressource, tandis qu’il s’établit à six pour un pour les officiers sous contrat et à plus de quatre pour un pour les sous-officiers. Les problèmes rencontrés restent limités à des secteurs d’activité soumis à une forte concurrence du secteur civil et à une spécialité un peu particulière, comme celle des fusiliers commandos. En ce qui concerne la fidélisation, il n’y a pas aujourd’hui de véritable difficulté mais selon toute probabilité, la croissance prévisible de l’aviation civile dans les prochaines années conduira à une augmentation des flux de départs des personnels navigants. Enfin, il a rappelé que l’armée de l’air était féminisée à hauteur de 20 %.

Un effort tout particulier est consenti en faveur du MCO en opérations, ce qui se traduit par un taux de disponibilité des appareils déployés de 90 à 95 %, mais cet effort pèse en retour sur le taux de disponibilité général des matériels stationnés en métropole.

Les lacunes dans le domaine du transport aérien stratégique sont indiscutables et s’expliquent par l’âge très avancé des principaux matériels, seulement partiellement compensé par les quelques Airbus achetés ou loués. Les contrats opérationnels fixés par le chef d’état-major des armées pour la projection sont respectés s’agissant des personnels mais ne sont remplis qu’à hauteur de 40 % pour le fret. Ce résultat souligne l’urgence des programmes MRTT et A400M. Le retard de ce dernier peut être absorbé pendant une durée n’excédant pas six mois à un an, en prolongeant la durée d’utilisation des Transall. Au-delà de cette marge, il faudrait redonner du potentiel à des appareils dont la fin de vie était programmée, ce qui serait extrêmement coûteux. Les Transall français se caractérisent par leur usure beaucoup plus prononcée que celle des Transall allemands, qui ont été deux fois moins utilisés et dans des conditions moins pénalisantes pour les structures des appareils.

Répondant à une question du président Guy Teissier sur le rachat éventuel de Transall allemands d’occasion, le général Stéphane Abrial a indiqué que les avions étaient certes identiques à l’origine mais que la gestion des évolutions des deux flottes a été totalement divergente si bien que les appareils sont désormais dissemblables à plus de 60 %. En cas d’acquisition par la France, il serait nécessaire de créer une chaîne logistique spécifique, ce qui aurait un coût exorbitant. La mise en œuvre de l’accord SALIS permet de son côté une certaine mutualisation des moyens de transport à l’échelle européenne mais elle atteint rapidement ses limites en cas de crise importante. Pour combler le trou capacitaire, il pourrait être envisagé de louer des appareils C17 dans le cadre du consortium associant plusieurs pays de l’OTAN, mais cette solution n’est pas vraiment satisfaisante. Cet appareil dispose certes d’une capacité d’emport trois fois supérieure à celle de l’A400M, mais son coût d’exploitation l’est également, ce qui ne permet pas d’économie. De plus, son gabarit de soute n’est pas plus grand que celui de l’avion européen, ce qui signifie qu’il faudrait continuer à recourir à l’affrètement d’Antonov pour les charges très volumineuses. Enfin, les États membres de l’OTAN qui ont choisi cette voie se sont engagés pour trente ans. L’armée de l’air s’adaptera donc à la situation, même si cela est difficile et entraîne des difficultés pour la gestion des équipages.

Le général Stéphane Abrial a ensuite confirmé que le Rafale donne entière satisfaction, surtout si on le compare à son principal concurrent européen. En Afghanistan, les avions déployés ont demandé 12 heures d’entretien par heure de vol, contre 11 heures pour les Mirage 2000. C’est un résultat remarquable si l’on considère que les premiers sont en service depuis un an tandis que la maintenance des seconds s’appuie sur vingt-cinq ans d’expérience ; il prouve la qualité du concept de maintenance du Rafale.

Le déploiement d’appareils de combat à Kandahar vise à améliorer l’efficacité au travers du partage des tâches de soutien avec nos alliés et à garantir une meilleure réactivité en se rapprochant des zones d’opérations. L’évolution du dispositif a permis de rapatrier une cinquantaine de personnes ainsi qu’un des deux ravitailleurs stationnés à Manas. Un détachement reste présent à Douchanbé pour le soutien logistique. Les missions assurées par nos forces vont de la présence en vol au tir de munitions de précision, soit de manière autonome en cas de détection d’objectifs le justifiant, soit à la demande des forces engagées au sol, qu’elles soient afghanes ou appartiennent à la coalition. Dans le cas d’une demande d’appui aérien, une attention toute particulière est portée à l’analyse de la situation et aux conséquences d’une frappe. Dans bien des cas, une démonstration de puissance à basse altitude suffit à faire comprendre aux assaillants qu’il vaut mieux renoncer. Les appareils français assurent de quatre à six vols par jour et un à deux tirs ont lieu chaque semaine.

M. Jean-Claude Viollet a rappelé que la commande de huit Rafale qui doit intervenir en 2008 ne fait que rattraper le décalage d’une partie de la commande globale passée en 2004. Le passage du standard F2 au standard F3 devrait permettre au deuxième escadron de Rafale, opérationnel en 2009, d’être intégré dans la dissuasion nucléaire en 2010. Toutefois, le report de la quatrième commande globale de 60 appareils conduit à s’interroger sur l’avenir du troisième escadron et plus globalement sur les conséquences d’un tel étalement pour les industriels, pour les exportations et pour les forces. Dans pareille hypothèse, l’armée de l’air serait notamment contrainte de prolonger la durée de vie du Mirage 2000, ce qui nécessiterait une hausse conséquente des dépenses de MCO. La LPM doit donc prioritairement clarifier l’objectif réel pour les Rafale, les récentes déconvenues à l’exportation ne devant nullement remettre en cause la cible définie initialement.

Il a ensuite évoqué les avions de transport et les ravitailleurs actuellement en service qui, âgés et fortement sollicités, ne permettent pas de remplir dans de bonnes conditions les missions assignées à la force de réaction rapide. Le retard du programme A400M ne fait qu’aggraver ce déficit capacitaire. En ce qui concerne les ravitailleurs, il est urgent de déterminer les modalités d’acquisition du futur MRTT, qu’il s’agisse d’un achat patrimonial ou d’une solution partenariale. Face à l’urgence des besoins, ne serait-il pas pertinent de procéder dans un premier temps à un nombre réduit d’acquisitions avant de mettre en place un contrat partenarial à plus long terme ?

Il a souhaité faire le point sur le programme de drones SIDM qui enregistre à ce jour un retard de cinq ans, ce qui conduit certains pays européens à préférer acheter des systèmes Prédator. Le futur système de drone Male connaît un tel retard qu’il semble désormais envisagé d’utiliser le SIDM sur des théâtres d’opérations mais une telle évolution ne se fera pas sans investissement supplémentaire.

Se félicitant des commandes de missiles prévues en 2008, il a néanmoins fait valoir qu’aucune décision de long terme n’était prise et que l’absence d’une commande ferme de missiles Meteor pèserait nécessairement sur les capacités des avions de combat, aussi perfectionnés soient-ils.

Un effort de rationalisation de la maintenance et de l’entretien est actuellement en cours avec la création du service industriel aéronautique, sa mise en service effective étant prévue le 1er janvier 2008. Cette date sera-t-elle respectée ? L’ensemble des textes fondateurs ont-ils été publiés ? Cette création ouvre-t-elle des pistes de réflexion en matière d’interarmisation au-delà du seul cadre aéronaval, voire sur le plan européen, notamment pour le soutien des A400M et des NH 90 ?

Le plan « Air 2010 » met en place une réorganisation des superstructures de l’armée de l’air à compter du 1er janvier 2008 et doit être suivie d’une remise à plat du schéma d’implantation des bases aériennes. Quels seront l’importance, le calendrier et les critères de choix de cette réorganisation territoriale ?

Le général Stéphane Abrial a jugé nécessaire la commande de Rafale en 2009. Si la commande n’est pas passée, la montée en puissance au-delà du troisième escadron sera très fortement contrainte. Compte tenu des impératifs de formation, d’affectation ou de fonctionnement, il est indispensable de disposer d’un nombre suffisant d’appareils et de respecter le calendrier de livraisons. Tout retard nécessiterait de prolonger les appareils actuellement en fin de vie, ce qui générerait un fort surcoût de maintien en condition opérationnelle et limiterait les capacités opérationnelles de l’armée de l’air. Au vu de l’âge avancé et de l’usure de certains matériels, la sécurité des personnels pourrait en outre être amoindrie. Enfin, les précédents ralentissements de la cadence de livraisons ont montré que la production passait alors d’un stade industriel à un stade artisanal, la qualité des appareils livrés étant extrêmement variable d’un avion à l’autre.

En ce qui concerne les ravitailleurs, seuls deux appareils répondent aux besoins actuels : l’Airbus A330 et le Boeing 767, avec des caractéristiques et des capacités différentes. Ce programme connaît aujourd’hui un problème de financement. Une acquisition patrimoniale poserait moins un problème d’autorisations d’engagements que de crédits de paiement. À l’inverse, la solution partenariale permettrait de lisser les paiements mais imposerait de dégager initialement une masse considérable d’autorisations d’engagement. Ces appareils participant à la dissuasion nucléaire, il convient par ailleurs de s’interroger sur l’opportunité de leur possession par un partenaire privé. En tout état de cause, l’âge et l’usure de la flotte exigent qu’une solution rapide soit trouvée, le remplacement des trois plus vieux C 135 ne pouvant être reporté après 2011.

Le chef d’état-major de l’armée de l’air a ensuite confirmé que les difficultés rencontrées pour le développement d’un programme européen de drones de surveillance n’étaient pas encore surmontées. La France, l’Allemagne et l’Espagne, partenaires au sein du projet Advanced UAV, s’accordent en effet sur la nécessité du besoin mais il reste à le définir précisément. Pendant ce temps, les produits américains conquièrent le marché européen. Néanmoins, ces difficultés ne doivent pas conduire à l’abandon de ces technologies, stratégiques pour l’avenir, et même si plusieurs pays européens ont choisi de s’équiper d’appareils américains, le développement d’un programme européen de drone de surveillance doit se poursuivre car la France aurait des difficultés à assumer seule l’ensemble de l’effort nécessaire.

Concernant les missiles, les Mica qui équipent aujourd’hui certains Mirage 2000 et les Rafale donnent entière satisfaction mais ne permettent pas de faire face à de nouveaux systèmes d’armes ayant des portées à trois chiffres. Seul le missile Meteor permettra de rétablir la parité des armements. La cible de 300 missiles Meteor reste maintenue même si la France n’a pas encore passé commande, contrairement au Royaume-Uni.

Il a ensuite confirmé que le service industriel aéronautique, organisme de l’armée de l’air à vocation interarmées dont le comité de direction sera co-présidé par le délégué général à l’armement et par le chef d’état-major des armées, prendra en charge la maintenance étatique de niveau industriel de toutes les flottes aéronautiques à compter du 1er janvier 2008.

Concernant « Air 2010 », l’essentiel des textes réglementaires nécessaires au démarrage en début d’année 2008 a été publié. Cette réorganisation des superstructures va effectivement être suivie d’une réflexion sur l’organisation territoriale de l’armée de l’air, qui apparaît relativement surdimensionnée et doit être densifiée. Les études préalables prendront en compte la qualité des infrastructures, l’insertion de la base dans les réseaux de l’armée de l’air, sa position géographique mais aussi la situation socio-économique des différents bassins d’implantation. Les propositions de l’armée de l’air seront ensuite examinées au niveau interarmées avant de faire l’objet d’arbitrages ministériels et interministériels. Le regroupement de certaines unités peut permettre à d’autres services du ministère de la défense, voire à d’autres services de l’État, comme les douanes ou la sécurité civile, de disposer d’infrastructures conséquentes et de plates-formes étendues. Le général Stéphane Abrial a estimé qu’une annonce globale de l’ensemble de la réorganisation serait nécessaire pour donner à tout le personnel mais aussi aux différents partenaires une vision de long terme. En tout état de cause, il a souhaité qu’un délai minimum de deux ans soit observé entre l’annonce d’une fermeture et son exécution.

M. Nicolas Dhuicq a observé qu’à l’inverse des États-Unis, la France n’avait pas développé de systèmes de destruction des défenses anti-aériennes adverses pour ses avions de combat et a souhaité connaître les raisons de ce choix. Il a également posé une question sur les capacités françaises de protection anti-balistique. Il a enfin remarqué que le futur A400M ne permettra pas l’emport de charges particulièrement lourdes telles que des chars Leclerc.

Le général Stéphane Abrial a précisé que la France a, depuis longtemps, privilégié le développement de systèmes d’autoprotection de ses appareils, qui réduisent le besoin de systèmes de destruction des défenses anti-aériennes. Dans cette logique, il a rappelé la nécessité d’engager rapidement une réflexion sur les brouilleurs offensifs.

La composante sol-air a récemment été réorganisée : les systèmes de missiles à très courte portée relèvent désormais de l’armée de terre alors que les systèmes de moyenne portée (SAMP-T) ont été rattachés à l’armée de l’air. La priorité va à la protection des forces en OPEX. En effet, ces forces sont vulnérables aux attaques par missiles balistiques de courte portée. Par contre, affronter une menace balistique longue portée supposerait un système de défense plus complet dont la France ne dispose pas. Le développement d’un tel outil est envisageable mais n’est pas actuellement une priorité.

Le transport d’un char Leclerc ne figure pas dans le contrat opérationnel de projection de la Force de réaction immédiate. D’autres pays ont d’ailleurs tendance à alléger leurs charges aérotransportables. L’envoi du char sur un théâtre d’opération pourra néanmoins se faire par mer, les nouveaux BPC étant en mesure de les transporter.

M. Michel Grall a souligné l’exemplarité du programme A400M, modèle de coopération européenne pour un matériel stratégique indispensable. Il a souhaité savoir sur quels leviers, techniques, industriels ou politiques, il convenait de porter l’effort pour améliorer encore la mutualisation des équipements au niveau européen.

Le général Stéphane Abrial a considéré que l’expression d’un besoin capacitaire commun était le préalable indispensable à tout programme de coopération européenne. Le programme A400M a bénéficié d’une concordance des besoins et des calendriers d’une dizaine de nations, ce qui est exceptionnel. Pour encadrer l’étude des besoins communs, une structure est néanmoins nécessaire et l’Agence européenne de défense peut jouer ce rôle essentiel. Il convient également que les différentes armées se disciplinent afin de ne pas faire surgir trop d’exigences divergentes. Une volonté commune doit ensuite perdurer tout au long de la vie de l’appareil et, pour cela, une volonté politique forte est nécessaire. La formation, les choix opérationnels et le soutien doivent obéir à cette démarche de coopération. Il importera, sur le programme A400M, de ne pas reproduire l’erreur commise avec les Transall. Enfin, il semble préférable que les industriels mettent leur compétence au service du programme commun plutôt que de chercher à acquérir celles détenues par leurs partenaires.

Après avoir souligné les efforts consentis pour maintenir la qualité de l’armée de l’air dans un contexte budgétaire contraint, M. Yves Fromion a fait remarquer le peu de place qu’occupait l’espace dans les différentes auditions budgétaires menées par la commission. L’absence d’affichage clair du positionnement de l’espace dans les forces armées et de désignation d’un responsable est préjudiciable. Afin d’assurer une identification de cet enjeu majeur, il convient d’en attribuer la responsabilité soit au chef d’état-major de l’armée de l’air soit à une personnalité placée auprès du chef d’état-major des armées.

Le général Abrial a rappelé qu’en France, l’espace relève du CEMA. Seule la surveillance de l’espace est de la responsabilité de l’armée de l’air. Il a considéré qu’il faut se placer dans une logique de fournisseur de service. Ainsi, aujourd’hui, tout le monde bénéficie des informations du GPS, mais, personne ne se soucie de savoir qui gère la constellation de satellites.

Le chef d’état-major a abordé l’importance de l’espace virtuel. Un commandement du cyberespace a récemment été créé au sein de l’US Air Force. La défense peut légitimement se préoccuper de ce domaine car ses systèmes sont vulnérables aux « cyberattaques » ; elle doit donc s’en protéger et être en mesure de riposter par des actions de même nature.

——fpfp——

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Claude Viollet, les crédits du programme « Préparation et emploi des forces (air) » pour 2008, au cours de sa réunion du 30 octobre 2007.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

Deux systèmes aéronautiques coexistant, l’armée de l’air et l’aéronavale, M. Philippe Vitel a demandé s’il était envisagé de les réunir au sein d’une même structure.

Après avoir considéré que les efforts d’interarmisation doivent être encouragés, le rapporteur a estimé que la constitution du SIAé participe de cette démarche pour ce qui est du MCO des forces aéronautiques.

A ce sujet, le président Guy Teissier a estimé que les comportements évoluent : alors que chaque année, les armées de terre et de l’air réalisaient leurs démonstrations en parallèle, à Mourmelon et à Orléans, elles ont cette année présenté une prestation commune. Cet évènement témoigne d’une volonté d’interarmisation harmonieuse et intelligente.

M. Jean-Claude Viollet a souhaité en conclusion rendre hommage au travail réalisé par M. Jean-Louis Bernard, son prédécesseur sous la précédente législature.

Le rapporteur s’en étant remis à la sagesse de la commission, celle-ci a donné un avis favorable au programme « Préparation et emploi des forces (air) ».

*

La commission de la défense a ensuite donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mission « Défense ».

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

— M. Charles Edelstenne, président-directeur général de Dassault Aviation, accompagné de M. Bruno Giorgianni, conseiller pour les affaires politiques et institutionnelles, le mercredi 19 septembre 2007 ; 

— le général Jean Verhaeghe, directeur de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD), accompagné du colonel Garnier, chargé de mission, le mardi 2 octobre 2007 ;

— M. Antoine Bouvier, président-directeur général de MBDA, accompagné du général Gérard Resnier, de M. Patrick Tramier, directeur secteur de produits, et de Mme Patricia Chollet, chargée des relations avec le Parlement, le mardi 2 octobre 2007 ;

— le général Stéphane Abrial, chef d’état-major de l’armée de l’air, le mercredi 3 octobre 2007 ;

— M. Philippe Coq, vice-président, directeur de EADS/Military Air System France, le mardi 9 octobre 2007 ;

— M. Christian Chabbert, directeur du service de la maintenance aéronautique à la Délégation générale à l’armement, chargé de la préfiguration du Service industriel de l’aéronautique (SIAé), le mardi 16 octobre 2007 ;

— M. Philippe Cosson, sous-directeur des achats, et M. Pascal Rigo, chef du bureau de l’expertise des coûts à la Délégation générale à l’armement, le mardi 16 octobre 2007 ;

— M. Denis Verret, directeur délégué aux affaires publiques-France du groupe EADS, accompagné du général Philippe Tilly, conseiller Air, et de Mme Annick Perrimond du Breuil, directrice des affaires institutionnelles d’EADS, le mardi 16 octobre 2007.

Sur la base aérienne de Cognac, le jeudi 20 septembre 2007 :

— le colonel Christophe de Cugnac, commandant la base, accompagné du lieutenant-colonel Francis Michaux, commandant l’école de pilotage et du capitaine Olivier Castagnet, chef de l’équipe étatique de suivi de contrat ;

— M. Philippe Coq, vice-président, directeur de EADS/Military Air System France, accompagné de MM. Julien Porcher, président-directeur général de EADS Air Services, et Laurent Blattner, directeur général délégué EADS Cognac Aviation Training Services.

© Assemblée nationale

1 () La sous-action 75 (rémunération des personnels du service de la maintenance aéronautique), nouvelle cette année, permet de prendre en compte la période transitoire de constitution du Service industriel de l’aéronautique (SIAé) qui a vocation à absorber progressivement les ateliers du service de la maintenance aéronautique, relevant de la DGA.

2 ()Le contrat ORRMA (Optimisation du Réapprovisionnement des Rechanges du Matériel Aéronautique), innovant, rassemble en une seule prestation externalisée l’approvisionnement en pièces de rechange dites « consommables » (joints, rondelles, …) provenant de multiples fournisseurs.

3 () L’objectif est de projeter, de manière autonome, 20 avions de chasse, 2 200 hommes et 3 400 tonnes de matériels, à 5 000 km et en moins de 72 heures. Avec l’arrivée des A400M, la capacité de projection sera réalisée à 100 %.

4 () SIDM : système intérimaire de Drones MALE

5 () SDM : système de Drones MALE