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N° 280

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189)

TOME VIII

DÉFENSE

ÉQUIPEMENT DES FORCES

ESPACE, COMMUNICATIONS, DISSUASION

PAR M. Michel SAINTE-MARIE,

Député.

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Voir le numéro : 276 (annexe n° 9)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. —  LA DISSUASION : LE MAINTIEN DE LA POSTURE FRANÇAISE DANS UN CONTEXTE GÉNÉRAL DE MODERNISATION ET DE PROLIFÉRATION 7

A. LE POIDS ET LA DISSÉMINATION DES ARSENAUX NUCLÉAIRES 7

1. Une modernisation significative des arsenaux des États dotés 7

2. La prolifération nucléaire et balistique 11

3. Le développement de défenses antimissile 13

B. LE RENOUVELLEMENT TRÈS AVANCÉ DE LA DISSUASION FRANÇAISE 16

1. L’évolution des crédits 16

2. La modernisation des composantes de la dissuasion 19

3. Le programme de simulation 23

II. —  LES PROGRAMMES SPATIAUX : DES LACUNES PERSISTANTES 27

A. LE DISPOSITIF ACTUEL ET SON FINANCEMENT 27

1. Le renforcement récent des capacités 27

2. Un effort budgétaire en demi-teinte 29

B. LES LACUNES ET L’AVENIR DES MOYENS SPATIAUX MILITAIRES 30

1. L’acquisition d’une maîtrise technologique comme palliatif temporaire 31

2. Les décisions à prendre en matière de nouveaux programmes 32

TRAVAUX DE LA COMMISSION 35

I. —  AUDITION DE M. HERVÉ MORIN, MINISTRE DE LA DÉFENSE 35

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 49

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET RENCONTRÉES 51

INTRODUCTION

La dissuasion nucléaire et l’espace sont intimement liés. D’un point de vue historique tout d’abord, puisque les compétences françaises en matière de lanceurs ont toujours été duales. Quant aux premiers satellites d’observation, ils avaient pour mission essentielle la définition des cibles potentielles. Le lien est aujourd’hui encore plus fort car les deux domaines participent directement à l’autonomie stratégique de la France. Si la dissuasion reste la garantie ultime de la préservation de nos intérêts vitaux, la maîtrise de l’espace est devenue également un moyen de protéger ces derniers grâce aux possibilités d’anticipation et de suivi des crises qu’elle autorise, sans parler de son caractère désormais indispensable pour la conduite des opérations.

Pourtant, des différences sensibles se manifestent sur le plan du traitement budgétaire. La dissuasion fait traditionnellement, et à juste titre, l’objet d’une grande attention afin de maintenir sa crédibilité. Cela se manifeste par des dotations budgétaires qui n’échappent certes pas à la volonté d’utiliser au mieux les deniers publics, mais sans jamais porter atteinte au respect des calendriers et à la disponibilité des matériels.

L’espace est placé dans une situation moins confortable et les arbitrages ne lui sont pas toujours favorables. Cet état de fait n’a pas empêché la France de se doter d’un dispositif spatial militaire unique en Europe, même s’il ne couvre pas l’ensemble des domaines d’intérêt. Des choix importants doivent être effectués à court et moyen terme pour renouveler les capacités existantes et tenter de répondre à l’échelle européenne aux besoins non satisfaits. En raison de la complexité industrielle, budgétaire et politique de ces dossiers, seule une volonté politique affirmée permettra de répondre à l’ampleur des défis.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2007, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 30 réponses étaient parvenues, soit un taux de 90,9 %.

I. —  LA DISSUASION : LE MAINTIEN DE LA POSTURE FRANÇAISE DANS UN CONTEXTE GÉNÉRAL DE MODERNISATION ET DE PROLIFÉRATION

Œuvre de longue haleine, la modernisation de l’outil de dissuasion se poursuit. Les échéances cruciales de 2010 se rapprochent s’agissant de la composante océanique, ce qui se traduit par l’arrivée en phase d’essais de programmes majeurs comme le missile M51. Le processus de renouvellement a de ce fait acquis une forme de visibilité qui ne doit pas faire oublier que l’ensemble des opérations menées s’inscrit dans un cadre de stricte suffisance. La France a consenti des efforts de désarmement nucléaire considérables avec l’abandon de la composante terrestre, l’arrêt des essais et le démantèlement du centre d’essais du Pacifique ainsi que des installations de production de matières fissiles. La plupart des autres États dotés de l’arme nucléaire n’ont pas pris les mêmes décisions irréversibles et ils modernisent en profondeur leurs dispositifs. Enfin et surtout, la prolifération reste une préoccupation sérieuse qui justifie pleinement de ne pas baisser la garde.

A. LE POIDS ET LA DISSÉMINATION DES ARSENAUX NUCLÉAIRES

1. Une modernisation significative des arsenaux des États dotés

L’effort d’adaptation réalisé par la France pour mettre sa dissuasion à niveau n’est pas isolé. Parmi les cinq États dotés de l’arme nucléaire au sens du traité de non prolifération (TNP), les États-Unis et la Russie réduisent certes les arsenaux considérables et vieillissants hérités de la guerre froide, mais ils lancent dans le même temps des programmes destinés à pérenniser et assurer la crédibilité de leur dissuasion. Le Royaume-Uni vient de décider un nouveau cycle d’investissement afin de conserver des forces nucléaires jusqu’à l’horizon 2050. Quant à la Chine, l’ampleur et la nature de la modernisation de son dispositif restent peu connues mais ne font guère de doute.

• Les États-Unis et la Russie continuent à être les principaux détenteurs d’armes nucléaires : parmi les quatre États précités, ils détiennent presque 95 % des têtes stratégiques déployées en 2007, soit 5 024 têtes pour les États-Unis et 3 281 pour la Russie. Par rapport à 2003, la réduction du nombre de têtes stratégiques déployées par la Chine, le Royaume-Uni, les États-Unis et la Russie s’élève à près de 19 %.

Ce mouvement de diminution continue des arsenaux s’explique par deux facteurs. D’une part, les États-Unis et la Russie ont conclu le 24 mai 2002 à Moscou un traité de réduction des armes nucléaires (Strategic Offensive Reductions Treaty – SORT) aux termes duquel ils s’engagent à ramener leurs arsenaux à l’horizon 2012 à un niveau maximal de 2 200 têtes déployées chacun, sans pour autant s’engager à détruire les armes restantes ni les vecteurs en trop. D’autre part et peut-être surtout, il s’explique par les difficultés techniques et budgétaires à maintenir des arsenaux vieillissants. C’est particulièrement le cas pour la Russie, qui procède au retrait progressif des missiles intercontinentaux SS-18 Satan et SS-19 Stiletto datant de la fin des années 1970 et qui constituaient l’épine dorsale de sa dissuasion. Par rapport à 2003, la Russie a ainsi réduit d’environ un tiers le nombre de ses têtes nucléaires stratégiques opérationnelles.

Il n’en reste pas moins que tant la Russie que les États-Unis procèdent à une modernisation en profondeur de leur outil de dissuasion.

• Les États-Unis ont rendu publique en 2002 une Nuclear Posture Review (NPR) qui définit les orientations dans le domaine militaire pour les dix ans à venir et réaffirme le caractère central de l’arme nucléaire. Toutefois, celle-ci s’inscrit dans un ensemble dissuasif plus large baptisé « nouvelle triade » et succédant aux trois composantes nucléaires aérienne, océanique et sol-sol. Elle comprend un arsenal offensif associant les armes nucléaires et les capacités classiques de frappe de précision et/ou de longue portée, des systèmes de défense antimissile et une infrastructure nucléaire, industrielle et de recherche plus réactive. Complétée par la Quadrennial Defence Review de 2006, cette stratégie d’ensemble se traduit par un effort considérable de modernisation et de renouvellement des vecteurs (six milliards de dollars en tout pour la modernisation des Minuteman III ; développement du Minuteman IV vers 2020, d’une nouvelle classe de sous-marin lanceur d’engins vers 2030 et lancement d’un nouveau bombardier vers 2040).

En ce qui concerne la gestion du stock de têtes, les États-Unis se sont dans un premier temps engagés dans un programme de maintenance des modèles en service afin d’en étendre la durée de vie (Stockpile Stewardship Program). Face aux coûts et aux contraintes du vieillissement des armes, ils ont récemment débuté un programme de tête robuste (Reliable Replacement Warhead – RRW). Pour l’année fiscale 2007, le Congrès avait alloué 119 millions de dollars à ce projet, soit un montant supérieur aux demandes initiales de l’administration. Le changement de majorité intervenu à l’occasion des élections de l’automne 2006 a toutefois modifié la situation et, en juin 2007, le Sénat et la Chambre des représentants ont critiqué les projets de l’administration en la matière et procédé à d’importantes réductions par rapport aux 80 millions de dollars de crédits demandés. Plusieurs facteurs expliquent ces votes, qui renvoient probablement à 2008 les véritables décisions sur l’avenir du programme RRW. Tout d’abord, certains opposants s’inquiètent de l’effet politique d’une décision de renouvellement de l’arsenal nucléaire américain sur les efforts menés par ailleurs en vue de limiter la prolifération de ces armes. Ensuite, d’aucuns craignent une possible reprise des essais nucléaires visant à valider ce nouveau concept d’armes et à disposer des données nécessaires pour mener le programme de simulation qui en est en quelque sorte le pendant. Enfin, et dans un autre ordre d’idées, des doutes se manifestent sur la capacité du département de l’énergie à pouvoir mener de front la gestion des stocks actuels et le développement industriel d’une nouvelle catégorie d’armes. Dans la perspective de la poursuite de ce débat, les départements de l’énergie, de la défense et le département d’État ont publié en juillet 2007 une déclaration commune, préfigurant un rapport plus complet, affirmant la nécessité du programme RRW au regard des exigences de sûreté, de sécurité et de fiabilité de la dissuasion américaine, ainsi que pour atteindre une taille plus réduite de celle-ci sans affecter pour autant sa crédibilité (1). Il y est également mentionné que des retards sur le programme RRW augmentent la probabilité de devoir recourir de nouveau aux tests souterrains afin de garantir le bon fonctionnement des armes en service.

• Depuis 2001, la Russie a clairement affirmé la priorité stratégique que constituent ses forces nucléaires, ce dont témoigne l’abandon en 2000 de la doctrine de non emploi en premier des armes nucléaires, adoptée en 1993. Si les cours des hydrocarbures lui offrent des ressources financières importantes pour mener à bien les programmes de modernisation de sa dissuasion, la Russie doit toutefois faire face au défi que constitue la mise en œuvre de nouveaux matériels assez rapidement pour compenser l’érosion continue de ses capacités en raison de l’âge avancé des systèmes en service.

Les programmes engagés sont d’autant plus lourds qu’ils doivent permettre un renouvellement des trois composantes de sa dissuasion. En ce qui concerne la composante sol-sol, le programme Topol-M se poursuit sans problème technique mais le rythme de production des missiles est plus lent que prévu. Commencé en 1998, le déploiement en silos a permis d’installer 42 missiles à ce jour et il est prévu de l’arrêter à 60. Une version mobile améliorée prend désormais le relais et devrait être mirvée à partir de 2009. La modernisation de la composante océanique repose sur une nouvelle classe de sous marin nucléaires lanceur d’engins (type Borey), dont trois unités sont en construction, la première devant être mise en service actif en 2008. Ces navires devraient être équipés du nouveau missile balistique Bulava, dont le début de la phase de production a été annoncé pour 2008 alors que les essais ont mis en évidence des difficultés techniques. Sur six tirs, quatre ont été des échecs, dont les trois derniers. Une certaine perte de savoir-faire découle de la dislocation de l’Union soviétique et de la perte de centres de production situés en Ukraine. De plus, il semble que ce nouveau missile soit technologiquement très ambitieux, avec une grande portée et une masse réduite. Enfin, une nouvelle charge utile devant équiper aussi bien les missiles Topol-M que Bulava est en cours de développement. Missiles comme charges utiles seraient capables de percer les systèmes de défense anti-balistique les plus perfectionnés.

• La Chine a maintenu une stratégie de dissuasion minimale essentiellement défensive depuis la création de sa force nucléaire. Elle n’a jamais remis en question la posture de non emploi en premier affirmée en 1964.

L’arsenal nucléaire chinois comprendrait environ 250 têtes stratégiques. La composante aéroportée s’appuie sur des bombardiers lourds de conception ancienne. La composante sol-sol comprend pour l’essentiel des missiles à moyenne portée, mais compte aussi une vingtaine de missiles DF-5.2 intercontinentaux (13 000 kilomètres de portée). Un nouveau missile mobile intercontinental à propulsion solide DF-31 est en cours de déploiement. De manière générale, les vecteurs chinois sont tous dotés d’une seule tête nucléaire et leur imprécision relative est compensée par la puissance de la charge thermonucléaire.

Des travaux de modernisation sont en cours, avec la mise au point d’un nouveau missile sol-sol intercontinental DF-31A et vraisemblablement des études pour le doter de têtes multiples et d’aides à la pénétration. En ce qui concerne la composante océanique, la Chine dispose déjà d’un sous marin nucléaire lanceur d’engins de la classe Xian, aux capacités limitées, et elle développe une nouvelle classe Jin dont le premier exemplaire est en construction. Il pourrait emporter jusqu’à douze exemplaires d’un nouveau missile mer-sol JL-2, mirvé et dont la portée serait de 8 000 kilomètres. L’ensemble de ces efforts indique la volonté de se doter d’une capacité de frappe en second. Compte tenu des programmes en cours, l’arsenal chinois pourrait compter de l’ordre de 500 têtes stratégiques à l’horizon 2015.

• Le Royaume-Uni vient de choisir de pérenniser sa force de dissuasion.

En juin 2005, le Premier ministre avait annoncé qu’un débat aurait lieu au Parlement avant toute décision sur une éventuelle modernisation du dispositif britannique. La commission de la défense de la Chambre des communes avait rédigé un rapport sur le sujet (2) et le Gouvernement a publié un Livre blanc sur l’avenir de la dissuasion britannique le 4 décembre 2006. Dans une déclaration au Parlement accompagnant ce document, le Premier ministre a jugé que le maintien d’une dissuasion crédible et « opérationnellement indépendante » était nécessaire au regard des menaces présentes et possibles. Parmi celles-ci figurent la prolifération nucléaire et balistique, ainsi que l’impossibilité d’exclure complètement l’hypothèse de la reconstitution d’une menace nucléaire majeure sur les intérêts britanniques. En outre, la dissuasion nucléaire peut concerner des États transférant des armes ou technologies nucléaires à des groupes terroristes, ces derniers étant dès lors considérés comme un vecteur.

Le Livre blanc étudie quatre options ainsi que leurs avantages et inconvénients en termes de capacités et de coûts :

- trois navires de surface dotés de missile balistiques : la permanence à la mer est possible avec un coût équivalant à celui des SNLE compte tenu de l’escorte nécessaire, mais la vulnérabilité est plus grande ;

- des missiles balistiques installés dans des silos terrestres : avec un devis supérieur à la première option la vulnérabilité de ce dispositif serait grande, l’exiguïté du royaume empêchant une dispersion suffisante des installations. Un tel choix présenterait en outre un aspect déstabilisant lors d’une crise de par la nécessité d’une décision de riposte quasi immédiate en cas de menace, sous peine de perdre toute capacité de frappe ;

- une flotte de vingt avions à long rayon d’action (de type airbus modifiés) dotés de missile de croisière à longue portée : ce choix n’assurerait pas de permanence de la dissuasion et ses vecteurs, d’une portée plus réduite que celle des missiles balistiques, seraient nettement plus vulnérables aux défenses adverses. Il s’agit de la solution de loin la plus chère ;

- les SNLE offrent finalement le meilleur compromis en termes de portée, de coût et de vulnérabilité (permanence de la capacité dissuasive de frappe en second).

Depuis 1998 et l’abandon de la composante aérienne, la dissuasion britannique repose exclusivement sur quatre SNLE de la classe Vanguard, dotés de missiles américains Trident II D5 et de têtes de fabrication britannique (3). Ces dernières peuvent rester en service au moins jusqu’à la fin des années 2020, tandis que la durée de vie des missiles sera prolongée jusqu’en 2042. Il n’en est pas de même pour les sous-marins, dont le remplacement progressif est jugé nécessaire au milieu de la décennie 2020. Un vote du Parlement, intervenu le 14 mars 2007, permet le lancement d’un nouveau programme de SNLE. Le gouvernement britannique a précisé qu’il entend maintenir la permanence à la mer, tout en étudiant la possibilité technique de la garantir avec trois navires de nouvelle génération. Il a également été annoncé que le nombre de têtes opérationnellement disponibles sera ramené à 160, soit une diminution de 20 % par rapport à la posture actuelle, découlant de la Strategic Defence Review de 1998. Le coût estimé du programme de renouvellement des plates-formes représenterait entre 15 à 20 milliards de livres sur 30 ans pour quatre bâtiments, soit 3 % du budget annuel de la défense, l’essentiel de l’effort budgétaire devant être réalisé entre 2011 et 2027.

2. La prolifération nucléaire et balistique

• En ce qui concerne la prolifération des armes nucléaires, deux dossiers principaux continuent à avoir des implications sur la stabilité de régions entières et un impact sur l’avenir du régime de non prolifération.

La république populaire démocratique de Corée (RPDC) a mené de longue date un programme nucléaire soupçonné d’applications militaires, alors même qu’elle était partie au TNP. Elle a décidé en janvier 2003 de ne plus se soumettre à ce dernier. Les soupçons de constitution d’un stock de plutonium suffisant pour réaliser une ou plusieurs armes ont été confirmés par l’explosion du 9 novembre 2006. Bien que de très faible puissance, celle-ci est probablement le résultat d’un essai nucléaire, et elle a entraîné l’adoption dès le 14 octobre de la résolution 1718 du Conseil de sécurité des Nations unies, prévoyant une série de sanctions économiques et commerciales et exigeant que la Corée du nord élimine « toute ses armes nucléaires et son programme nucléaire d’une façon complète, vérifiable et irréversible ». Le paradoxe réside dans le fait qu’après ce défi adressé à la communauté internationale, la situation semble évoluer dans le sens d’une moindre tension dans la région. Les « pourparlers à six », associant les deux Corée, la Chine, la Russie, le Japon et les États-Unis, ont permis l’adoption le 13 février 2007 d’un accord par lequel la RPDC s’engageait à abandonner son programme nucléaire. Le 3 octobre dernier, les négociations ont encore progressé avec l’acceptation du démantèlement du site nucléaire de Yongbyon et l’engagement de fournir une liste complète des installations nucléaires d’ici à la fin de l’année. Il reste à voir désormais si ces engagements seront tenus et comment seront organisées les vérifications, notamment afin d’éviter des transferts de technologies et/ou de matières fissiles.

Le cas le plus préoccupant est celui de l’Iran. Son programme nucléaire, officiellement civil, a longtemps compris des aspects clandestins et présente des caractéristiques techniques inquiétantes : larges capacités d’enrichissement de l’uranium par centrifugeuses (l’Iran a annoncé disposer de 3 000 centrifugeuses opérationnelles et vouloir poursuivre le développement de ce programme) et construction en cours d’un réacteur à eau lourde susceptible de produire du plutonium de qualité militaire. Dans son dernier rapport sur l’Iran, publié en mai 2007, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a une nouvelle fois indiqué qu’elle n’était pas en mesure de donner l’assurance qu’il n’existait pas d’activités ou de matières non déclarées dans ce pays. Les sanctions décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies en décembre 2006 (résolution 1737) ont été accrues par la résolution 1747 du 24 mars 2007 ; des négociations sont en cours pour les renforcer et mieux en cibler les effets.

En plus de ces nouveaux acteurs dans le domaine nucléaire militaire existent aussi des détenteurs plus anciens de ce type d’armes qui ne sont pas des États dotés au sens du TNP, dont ils ne font pas partie. L’État d’Israël maintient sa politique dite d’ambiguïté stratégique et continue à affirmer qu’il ne serait pas le premier à introduire l’arme nucléaire au Proche-Orient. L’Inde et le Pakistan ont réalisé en mai 1998 une série d’essais d’armes et modernisent de façon significative leurs arsenaux. La première détiendrait de l’ordre d’une centaine d’armes, tandis que le second en aurait environ 70 tout en essayant de se doter de capacités de production de plutonium. Les deux États portent aussi leurs efforts sur l’amélioration et la diversification de leurs vecteurs.

• La prolifération balistique est inséparable de celle du nucléaire, même si elle peut également contribuer à des programmes chimiques ou classiques.

La course aux missiles entre l’Inde et le Pakistan en est un exemple bien connu. La première dispose désormais d’une gamme de missiles à courte portée Prithvi ainsi que de missiles de moyenne portée Agni I et II. Elle travaille sur une troisième version de ce dernier dont la portée serait comprise entre 3 500 et 5 000 kilomètres et a annoncé vouloir se doter à terme de trois composantes pour ses forces nucléaires (aérienne, sol-sol et océanique). L’Inde développe ainsi un Advanced Technology Vehicle (ATV), qui constitue un prototype de SNLE pouvant embarquer un missile balistique. Le projet connaît certaines difficultés techniques, mais la volonté politique est réelle. Le Pakistan a pour sa part débuté son programme balistique grâce à l’achat de missiles nord-coréens rebaptisés Ghauri, puis a développé une série d’engins à propulsion solide dont les plus avancés sont les missiles Shaheen-1 ; une version à portée accrue (2 000 kilomètres) est en cours de développement. De plus, le Pakistan mène activement un projet de missile de croisière à capacité nucléaire (Babur), dont plusieurs tirs d’essai sont intervenus depuis 2005.

Les développements de missiles balistiques par la Corée du nord ont été largement médiatisés. Outre les missiles Scud B et C de courte et moyenne portée et les missiles Nodong de moyenne portée (jusqu’à 1 300 kilomètres), elle a procédé à plusieurs essais de missiles à longue portée. Un engin de type Taepodong-1 a été lancé le 31 août 1998 et, plus récemment, un missile Taepodong-2 s’est abîmé en mer le 5 juillet 2006. Cette dernière version est supposée pouvoir atteindre l’Alaska, voire Hawaii. D’autres programmes seraient en cours, qu’il s’agisse d’un missile à moyenne portée dénommé BM-25, dérivé d’un système soviétique SSN-6 remontant aux années 1960, ou d’un nouveau missile de courte portée à propulsion solide. La Corée du nord reste l’un des acteurs majeurs de la prolifération balistique dans le monde et tout particulièrement au Moyen-Orient.

Ainsi, l’Iran s’est au départ procuré des missiles nord coréens, mais son programme balistique s’appuie désormais largement sur une capacité locale de production. Il dispose d’une gamme de vecteurs Shahab, dérivés des Nodong, dont la portée atteint 1 300 kilomètres pour la version 3 ; des essais sont en cours pour en accroître la portée. Par ailleurs, des programmes de développement de missiles de portée accrue, supposant de maîtriser les techniques de séparation entre étages, seraient en cours tandis que l’acquisition de missiles BM-25 à la Corée du nord a été évoquée. Enfin, des travaux ont été menés à bien dans le domaine de la propulsion solide pour des missiles de courte portée.

3. Le développement de défenses antimissile

Le développement de technologies et de systèmes antimissile est intimement lié à la prolifération des engins balistiques. Les programmes en cours ne sont pas limités aux projets considérables menés par les États-Unis et la défense antimissile tend à devenir un élément à part entière des stratégies de dissuasion.

• Les États-Unis occupent une place à part dans ce domaine en raison des investissements considérables réalisés au profit de leur système global de défense antimissile. L’architecture retenue est multicouche, c’est à dire qu’elle associe des systèmes différents consacrés au traitement de chaque phase de la trajectoire d’un missile balistique assaillant, et la mise en œuvre du programme s’inscrit dans une logique de déploiement par étapes.

S’agissant des moyens d’alerte et de détection, la composante spatiale comprend des satellites destinés à la détection du lancement de missiles (4) et d’autres chargés du suivi des trajectoires. Elle est complétée au sol par des radars d’alerte avancée et des radars en bande X, ces derniers étant affectés à la poursuite et à la discrimination des cortèges balistiques ainsi qu’au guidage des intercepteurs. Pour ces derniers une très large palette de solutions a été retenue. Pour l’interception lors de la phase de propulsion du missile, des travaux sont menés sur l’interception au moyen d’un laser de puissance monté sur un Boeing 747 (Airborne Laser) mais le premier test de destruction d’un objectif en vol a été repoussé à 2009. Le missile GBMI (Ground Based Midcourse Interceptor) intervient pour traiter la phase balistique du missile assaillant. 17 exemplaires ont été déployés en Alaska et deux en Californie. Les résultats ont été jusqu’ici mitigés, avec six succès sur onze tests. Le système a toutefois réussi une interception qui serait proche de conditions réelles le 28 septembre dernier. On notera le développement d’un projet MKV (Multiple Kill Vehicle), destiné à équiper ces intercepteurs d’une capacité à faire face à une attaque complexe (présence de leurres et de contre-mesures). Enfin, une composante navale, reposant sur l’emport de missiles SM-3 par des croiseurs Aegis, a montré son efficacité pour l’interception exo atmosphérique de missiles balistiques de 3 500 kilomètres de portée.

• Les États-Unis ont proposé d’étendre leur système de défense antimissile à l’Europe. Ils ont engagé officiellement des discussions bilatérales avec la Pologne et la République tchèque, afin d’y installer respectivement un site de 10 intercepteurs GBMI et un radar en bande X à l’horizon 2011. Il est prévu que les négociations aboutissent avant la fin de l’année 2007. Selon les États-Unis, ce troisième site serait destiné à compléter la couverture du territoire américain et à assurer une protection du continent européen. La protection étant partielle (le flanc sud-est de l’Europe ne serait pas protégé), ils ont proposé que l’OTAN assure le complément nécessaire, grâce au programme ALTBMD (Active Layered Theatre Balistic Missile Defense). La perspective de l’installation de défenses antimissile américaines en Europe a provoqué une vigoureuse réaction de la Russie, qui considère que les sites installés par les Américains en Europe visent son territoire et menace la crédibilité de sa dissuasion nucléaire. La Russie, tout en menaçant de se retirer de certains traités de limitation des armements, a proposé aux États-Unis de mettre à leur disposition un radar d’alerte avancée à Gabala, en Azerbaïdjan, pour surveiller l’émergence des capacités balistiques iraniennes, et de partager certaines données issues de leur propre système en échange du retrait du projet de déploiement en Europe.

• D’autres programmes importants de défense antimissile à l’échelle régionale sont moins connus et n’ont pas la même ampleur mais répondent aussi directement aux craintes suscitées par la prolifération des vecteurs balistiques.

En Europe, l’OTAN a engagé le projet précité ALTBMD, qui prévoit d’agréger autour d’un centre de contrôle de l’Alliance des capacités nationales de défense antimissile. L’objectif est de disposer d’ici 2012 d’une capacité de protection des troupes, y compris celles déployées, contre les missiles balistiques à courte et moyenne portée. La France apportera ses missiles SAMP-T.

Le Japon mène un programme ambitieux en étroite liaison avec les États-Unis, afin de faire face à la menace nord-coréenne. Le Livre blanc annuel du ministère de la défense, paru début juillet 2007, indique qu’« il est nécessaire de finir de déployer une défense antimissile au plus vite ». Le système japonais s’appuie sur deux composantes. La composante navale repose sur la modernisation de quatre destroyers de la classe Kongo, déjà équipés du système Aegis en les dotant de missiles intercepteurs SM-3. Cette modernisation pourrait être achevée à la fin de l’année 2007 et deux autres navires pourraient suivre. Cette composante, qui permettra des interceptions de missiles balistiques à mi-course en phase endo-atmosphérique, couvrira à terme l’ensemble du territoire. Un premier essai réussi du missile a eu lieu le 8 mars 2006. La composante terrestre sera constituée de systèmes Patriot PAC-2 et PAC-3 (220 intercepteurs déployés vers 2010). Les premiers systèmes ont été installés fin mars 2007 dans la région de Tokyo. En matière d’alerte avancée, le Japon envisage de moderniser sept de ses sites actuels et de mettre progressivement en service, à compter de 2007, quatre radars d’alerte avancée en bande X, qui devraient être déployés en bordure de la mer de Chine.

Quant à l’État d’Israël, il a entamé le développement de son système antimissile Arrow dès 1988. Une version plus avancée Arrow-2 est désormais en service et offre des capacités d’interception en phase terminale d’une grande efficacité. Elle serait capable de poursuivre jusqu’à 14 missiles assaillants d’une portée de 1 500 kilomètres et sa portée maximale d’interception serait de 90 kilomètres. Israël s’appuie également sur le système Patriot PAC-3, qui constitue la partie couche basse de son système de défense antimissile. Le 11 février 2007, un Arrow-2 a réussi l’interception d’une cible simulant un missile iranien Shahab-3. Ce quatorzième succès, sur quinze tests, a été effectué en haute altitude, ce qui permettait d’envisager en cas d’échec de tenter un nouveau tir.

B. LE RENOUVELLEMENT TRÈS AVANCÉ DE LA DISSUASION FRANÇAISE

Engagé depuis le milieu des années 1990, l’effort de modernisation de la force de dissuasion est une opération particulièrement lourde sur le plan budgétaire, puisqu’elle mobilise chaque année en moyenne de l’ordre de 20 % des dépenses d’investissement du budget de la défense. Elle s’inscrit dans la durée tant en raison des délais de réalisation des principaux programmes, qui s’étalent pour la plupart sur au moins quinze ans, que du fait qu’il s’agit au fond de pérenniser à long terme une force de dissuasion indépendante.

1. L’évolution des crédits

• Avec l’arrivée à son terme de la loi de programmation militaire 2003-2008, il n’est pas inutile d’esquisser un premier bilan de cette dernière. Son exécution n’a pas échappé aux difficultés traditionnelles que constituent le traitement des risques rencontrés au sein des programmes, les variations des financements dues aux besoins rencontrés ou les retards d’engagements. Au total, les crédits consommés sur la période au sein de l’agrégat nucléaire devraient être supérieurs de 6,8 % aux prévisions initiales en raison notamment :

– de l’impact fiscal du changement de statut de DCN (facturation de la TVA, taxe professionnelle), qui représente environ 500 millions d’euros et concerne principalement la construction et l’entretien des sous-marin lanceur d’engins de nouvelle génération (SNLE-NG);

– de difficultés ponctuelles rencontrées dans le développement du missile M51 et de l’évolution défavorable des indices de prix contractuels sur ce programme, qui se sont traduites globalement pour l’ensemble constitué par le M51 et le programme de tête nucléaire océanique (TNO) par une augmentation du besoin de crédits de 350 millions d’euros ;

– de l’augmentation du coût du maintien en condition opérationnelle (MCO) concernant la composante aérienne de la dissuasion, avec un impact évalué à 100 millions d’euros ;

– de la sous-estimation dans la LPM du coût l’adaptation au M51 et de la rénovation des infrastructures de l’Île Longue ; elles ont constitué un chantier plus important que prévu, pour un montant de 250 millions d’euros supplémentaires.

Au total, les surcoûts par rapport à la LPM s’élèvent à 1,25 milliard d’euros. On notera toutefois que certaines décisions ont permis de limiter les besoins de crédits, comme le report de 2012 à 2015 de l’ignition à pleine puissance du laser mégajoule (LMJ).

• Le poids budgétaire de la dissuasion serait très similaire entre 2007 et 2008 : il représente 20,5 % des crédits de paiement du titre 5 de la mission Défense dans le budget voté pour 2007 et s’élèverait à 20,9 % de ces mêmes crédits en 2008. En revanche, les exercices 2009 et 2010 seront probablement marqués par une tendance à l’accroissement du poids relatif de la dissuasion, liée à la mise en service du Terrible, du M51 et de l’ASMP-A, au passage à la phase de développement du M51.2 et à la montée en puissance du programme de LMJ.

Le tableau ci-après détaille l’évolution des moyens consacrés à la dissuasion, par programme, action et sous action.

Les autorisations d’engagement diminuent fortement (- 32 %). De fait alors que l’exercice 2007 a été marqué par des commandes et actions importantes (entretien du Téméraire, contractualisation d’une tranche de MCO pour le M51, commande d’un lot d’ASMP-A), 2008 devrait être une année relativement calme pour les commandes. En revanche, les fabrications pèsent sur les besoins, ce qui se traduit par une progression de 2,9 % des crédits de paiement.

Pour l’essentiel, les moyens consacrés à la dissuasion figurent dans le programme 146 « Équipement des forces », avec 87 % des crédits de paiement en 2008. On remarquera à cet égard que la nomenclature budgétaire de ce programme est désormais organisée en systèmes de forces et non plus par responsable organique, ce qui permet une lecture plus directe des crédits. La quasi-totalité des activités liées à la dissuasion du programme 146 est désormais retracée par l’action 6, avec cinq opérations d’armement décrites par des sous actions (SNLE-NG, missile M51, adaptation des SNLE-NG au M51, version K3 du Mirage 2000 et missile ASMP-A) auquel il faut ajouter une sous action retraçant les crédits du programme de simulation.

L’organisation et le poids budgétaire de la dissuasion en 2007 et 2008

(en millions d’euros)

Programme

Action

Sous action

Libellé

AE

CP

Évolution

LFI

PLF

LFI

PLF

en %

2007

2008

2007

2008

AE

CP

144

2

20

Prospective des systèmes de forces

1,50

2,75

2,75

2,75

83,33

0,00

Total action 2 - Prospective des systèmes de forces

1,50

2,75

2,75

2,75

83,33

0,00

4

42

Études amont nucléaire

56,75

93,21

37,32

60,36

64,25

61,72

Total action 4 - Maintien des capacités technologiques et industrielles

56,75

93,21

37,32

60,36

64,25

61,72

Total programme 144 - Environnement et prospective de la politique de défense

58,25

95,96

40,07

63,11

64,74

57,48

146

6

13

SNLE-NG

257,44

109,21

351,09

346,81

- 57,58

- 1,22

14

M51

190,07

199,45

701,43

654,00

4,93

- 6,76

15

Adaptation des SNLE-NG au M51

107,89

120,17

79,15

121,79

11,38

53,87

16

Mirage 2000N K3

19,97

31,86

27,31

41,01

59,49

50,17

17

ASMP-A

287,73

90,86

189,38

231,90

- 68,42

22,45

18

Simulation

402,68

460,11

436,17

448,60

14,26

2,85

19

Autres opérations

550,12

483,59

563,02

549,85

- 12,09

- 2,34

22

Soutien et mise en œuvre des forces toutes opérations

977,81

229,53

330,07

382,59

- 76,53

15,91

23

Crédibilité technique de la posture toutes opérations

97,49

89,45

98,59

116,80

- 8,25

18,47

7

28

Commander et conduire - autres opérations

1,49

0,70

5,01

3,72

- 53,02

- 25,75

8

53

Maintenir le potentiel ami et autre - autres opérations

81,35

4,50

20,31

20,96

- 94,47

3,20

9

59

Frapper à distance - Rafale

21,48

0,00

18,56

23,10

- 100,00

24,46

Total programme 146 - Équipement des forces

2 995,54

1 819,43

2 820,09

2 941,13

- 39,26

4,29

178

1

12

Posture de dissuasion nucléaire

5,95

3,41

5,95

3,41

- 42,71

- 42,71

Total action 1 - Planification des moyens et conduite des opérations

5,95

3,41

5,95

3,41

- 42,71

- 42,71

3

49

Soutien de la force sous-marine

156,38

249,11

230,73

203,25

- 53,30

- 11,91

Total action 3 - Préparation des forces navales

156,38

249,11

230,73

203,25

59,30

- 11,91

4

62

Activité des forces aériennes stratégiques

92,24

73,03

96,64

97,69

- 20,83

1,09

Total action 4 - Préparation des forces aériennes

92,24

73,03

96,64

97,69

- 20,83

1,09

Total programme 178 - Préparation et emploi des forces

254,57

325,55

333,32

304,35

27,88

- 8,69

212

1

10

Direction et pilotage

3,59

3,21

2,92

3,61

- 10,58

23,63

Total action 1- Direction et pilotage

3,59

3,21

2,92

3,61

- 10,58

23,63

4

2

Infrastructure

60,86

45,75

79,07

59,23

- 24,83

- 25,09

Total action 4 - Politique immobilière

60,86

45,75

79,07

59,23

- 24,83

- 25,09

Total programme 212 - Soutien de la politique de défense

64,45

48,96

81,99

62,84

- 24,03

- 23,36

TOTAL DISSUASION NUCLEAIRE

3 372,81

2 289,89

3 275,47

3 371,43

- 32,11

2,93

Source : documents budgétaires et ministère de la défense.

Ces actions conservent toutefois un caractère assez global qui ne permet pas d’identifier directement le coût précis de certaines opérations d’armement. Ainsi, la sous action 14, qui regroupe les crédits affectés au missile M51 comprend également ceux destinés au développement, à la fabrication et au MCO de sa future charge utile, la tête nucléaire océanique (TNO). Une solution similaire a été retenue pour la sous action 17 correspondant au programme ASMP-A, qui traite également de la tête nucléaire aéroportée (TNA) associée à ce vecteur. Le tableau ci-après permet de mieux individualiser le coût des principales opérations d’armement menées.

Les crédits de la dissuasion en 2007 et 2008 :
Répartition des crédits d’équipement par programme

(en millions d’euros courants)

 

AE

CP

Évolution en %

LFI 2007

PLF 2008

LFI 2007

PLF 2008

AE

CP

M51

35,36

26,46

531,77

456,07

- 25,17

- 14,24

SNLE-NG et son environnement

257,44

109,21

351,09

346,81

- 57,58

- 1,22

Adaptation au M51 des SNLE-NG

107,89

120,17

79,15

121,79

11,38

53,87

ASMP-A

198,70

27,74

124,92

160,25

- 86,04

28,28

Rafale (adaptation à l’ASMPA)

21,48

0,00

18,56

23,10

- 100,00

24,46

Mirage 2000 K3 (part nucléaire)

19,97

18,48

27,31

40,18

- 7,46

47,13

Évolution RAMSES III

32,61

10,85

51,40

49,82

- 66,73

- 3,07

RAMSES IV

8,00

10,86

0,00

0,40

35,75

ns

Source : ministère de la défense.

L’ensemble des crédits consacrés à la dissuasion concoure à deux objectifs, le renouvellement des deux composantes de la dissuasion, d’une part, et le programme de simulation, d’autre part.

2. La modernisation des composantes de la dissuasion

La France a choisi jusqu’à présent de conserver deux composantes pour sa force de dissuasion en raison de leur complémentarité. La composante océanique continue à garantir la permanence de la dissuasion, avec la présence à la mer d’au moins un SNLE, et une capacité de frappe en second. Elle a fait récemment l’objet d’évolutions vers davantage de souplesse, avec notamment la possibilité de moduler les frappes. La composante aérienne a, pour sa part, toujours été caractérisée par son caractère démonstratif et sa réversibilité. Elle autorise toute une gradation dans la posture en cas de crise qui peut avoir une fonction éminemment dissuasive, auquel il faut ajouter une plus grande précision de tir permettant de cibler des centres de pouvoir. On peut ajouter que cette souplesse d’emploi pourrait éventuellement jouer un rôle dans le cas où la défense de pays alliés serait considérée comme faisant partie de celle de nos intérêts vitaux.

• Si la force océanique stratégique (FOST) ne constitue pas historiquement la première composante de la dissuasion française, elle occupe assurément le premier rang par son poids budgétaire, le nombre de têtes qu’elle peut mettre en œuvre et le rôle stratégique qui lui est assigné. On peut souligner que plus de 400 patrouilles opérationnelles ont été réalisées depuis 1972 et que la permanence à la mer n’a connu aucune interruption.

Sur le plan budgétaire, en s’en tenant au périmètre de la marine, en 2008 la FOST représente 26 % des autorisations d’engagement et 27,5 % des crédits de paiement de la dissuasion. Si l’on ajoute les montants consacrés au missile M51 et à la TNO, ces proportions atteignent respectivement 34,7 % et 46 %.

La modernisation de la FOST repose tout d’abord sur le programme SNLE-NG, largement entamé puisque trois exemplaires sont déjà en service. L’Inflexible, dernier exemplaire de la génération précédente, a achevé son ultime patrouille et son désarmement débutera au début de 2008. D’ici à l’entrée en service du Terrible, la FOST fonctionnera avec trois sous-marins de nouvelle génération et aucun ne sera en cycle d’entretien.

La construction du quatrième SNLE-NG se poursuit sans difficulté particulière, même s’il convient de rester vigilant compte tenu de l’absence de marge calendaire. Le groupe de propulsion construit à DCN-Indret a été intégré au bâtiment en 2007. Les principales opérations prévues pour 2008 portent, d’une part, sur le chargement du cœur du réacteur ainsi que la divergence de ce dernier et, d’autre part, sur la mise à l’eau du bâtiment en août. L’admission au service actif reste prévue pour le début du deuxième semestre 2010, avec des essais à la mer commençant au début de 2009. Le Terrible sera doté d’un nouveau système de combat, notamment lié à l’arrivée du M51.

Le MCO de la FOST reste un poste important de dépenses, tant en raison des exigences de sûreté et de sécurité nucléaire que de la nécessité de maintenir la permanence à la mer. L’IPER du Téméraire est le deuxième exercice de ce type pour les bâtiments de nouvelle génération. Celle du Triomphant avait pour ainsi dire été un prototype. Grâce au retour d’expérience, ainsi qu’aux progrès réalisés dans la chaîne industrielle et en matière de contractualisation, des améliorations sensibles ont été obtenues en termes de durée (ramené de 36 mois à 21 mois) et de coût (310 millions d’euros dans le premier cas, 256 dans le second). L’IPER du Téméraire représente de l’ordre de deux millions d’heures de travail. 90 % des jalons techniques sont acquis, les essais en mer ont été faits et les dernières opérations destinées à permettre au bâtiment de réintégrer le cycle opérationnel auront lieu fin novembre 2007. La prochaine opération de ce type n’interviendra qu’en 2010, après l’entrée en service du Terrible.

Le deuxième programme destiné à moderniser la FOST est le missile M51, destiné à succéder aux missiles M45 actuels afin de pouvoir emporter les TNO et permettre une augmentation de l’« allonge » de la dissuasion. La version M51.1, livrée dans un premier temps, continuera à emporter la TN75 actuellement en service.

Le M51 représente un coût de 8,7 milliards d’euros sur sa durée de réalisation. Il convient de rappeler que l’opération de réduction d’ensemble des coûts dite Minos a permis d’étaler et de redimensionner l’ensemble du programme, avec pour contrepartie un nombre réduit d’essais comparé aux quinze essais réalisés pour la génération M4-M45. Il est vrai que les moyens de simulation numérique disponibles aujourd’hui sont sans commune mesure avec ce qui existait auparavant. De plus, de nombreux essais de composants sont effectués, de même que des essais de sortie de tube à partir du caisson immergé Cétacé. Le choix d’une approche séquentielle d’essais, assortie de quelques tirs d’essais suppose d’assumer des risques mais est un facteur d’économies.

Trois tirs de développement doivent être complétés par un essai de synthèse. Les deux premiers tirs ont été des succès et le retour d’expérience est très positif. Le prochain essai devrait avoir lieu en 2008 à partir du bassin construit au centre d’essais de lancement de missiles (CELM). En 2009 devrait avoir lieu un tir de synthèse, depuis le Terrible.

Le troisième lot de missiles sera commandé en 2009, tandis que des tranches de MCO le seront en 2010 et 2012. En outre, les négociations ont débuté avec l’industriel sur la conception et le développement de la version M51.2, afin de tenir le rendez-vous de l’entrée en service de la TNO, prévu en 2015.

L’arrivée du M51 a conduit à d’importants travaux d’infrastructures sur la base de l’Île Longue, visant également une remise à niveau des installations. Les opérations se déroulent conformément au calendrier prévisionnel, même si un léger retard est enregistré pour la réalisation d’un des nouveaux bâtiments, sans que cela ait des conséquences sur l’activité opérationnelle et le respect des principales échéances. La fin des travaux est prévue pour 2010 ; les principales étapes ont été réalisées au cours des exercices 2006 et 2007, avec une décroissance progressive des besoins en crédits à partir de 2008. Le projet de loi de finances prévoit 59,2 millions d’euros de crédits de paiement au titre des infrastructures de la FOST, soit une baisse de 25 %.

D’une manière générale, on peut souligner que le calendrier d’ensemble du renouvellement de la FOST est particulièrement serré, avec les difficultés inhérentes à la convergence des échéances de deux programmes aussi complexes que le SNLE-NG et le M51.

• La composante aérienne est constituée principalement par les forces aériennes stratégiques (FAS) mais également par la force aéronavale nucléaire (FANU). Complémentaires et intégrées au sein d’une même programmation stratégique, les deux forces mettent en œuvre le missile ASMP, emporté par les Mirage 2000N dans le premier cas, par les Super Étendard modernisés dans le second.

La modernisation en cours porte principalement sur le vecteur, avec le missile ASMP-A, doté de la TNA, qui devrait permettre un accroissement sensible de la portée et de la précision. S’agissant du missile, le programme se déroule sans incident. Une commande d’un premier lot a déjà été effectuée et elle devrait être complétée par un deuxième lot en 2007. Huit tirs de développement ont eu lieu avec succès et trois tirs d’essais restent à réaliser. Quant à la TNA, qui constitue la première arme nucléaire dont le fonctionnement est garanti par la simulation, 90 % des crédits prévus ont déjà été consommés. En 2008 a débuté la phase de fabrication, la mise en service devant intervenir en 2009.

S’agissant des FAS, l’ASMP-A équipera tout d’abord un escadron de Mirage 2000N (standard K3) en 2009, puis un escadron de Rafale F3 en 2010. Un second escadron emportera l’ASMP-A sous Mirage 2000N en 2011. Pour la FANU, l’arrivée à la fin de l’IPER du Charles de Gaule du couple formé par l’ASMP-A et le Rafale au standard F3 en 2010 constituera une étape importante. Pour 2008 le coût de l’adaptation du Rafale à l’ASMP-A (standard F3) s’élève à 23 millions d’euros en crédits de paiement, tandis que la mise au standard K3 des Mirage 2000N représente 40,2 millions d’euros.

Si l’on prend en considération le financement des missiles, des têtes et de l’adaptation des avions à l’emport des vecteurs, la composante aérienne représente 420 millions d’euros, soit 15 % des crédits d’équipement de l’agrégat nucléaire.

On soulignera que le maintien des capacités technologiques est nécessaire au travers d’études amont afin de préparer dans un premier temps des évolutions à mi-vie de l’ASMP-A et, à plus long terme, un éventuel successeur de ce missile. De nombreuses nations se sont lancées dans des recherches sur le vol hypersonique et il serait regrettable que la France ne capitalise pas sur le véritable savoir faire dont elle dispose aujourd’hui dans le domaine de la propulsion par statoréacteur, voire qu’elle perde progressivement ses compétences.

• Les transmissions sont un élément clé de la crédibilité de la dissuasion, au point qu’on pourrait les qualifier de composante à part entière. En 2006 le système de dernier recours (SYDEREC) a été déclaré opérationnel. A partir de 2009 de nouvelles opérations d’investissement seront nécessaires pour renouveler certaines composantes des transmissions nucléaires. Des réflexions sont en cours pour le système RAMSES IV, dont le coût d’ensemble pourrait représenter de l’ordre de 400 millions d’euros sur la période 2010-2020, ainsi que sur la modernisation de systèmes de transmission des FAS et de la FOST. Les études portent aussi sur les possibilités de mutualisation d’une partie des transmissions nucléaires avec d’autres systèmes de commandement et d’information interarmées.

3. Le programme de simulation

• La décision de ratifier le traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) dans sa version la plus contraignante (dite option zéro) a conduit à l’ultime campagne d’essais de 1995 et au programme de simulation. Ce dernier avait été préparé en amont durant les années 1990 au travers du programme de préparation à l’arrêt des essais nucléaires (PALEN).

La pérennité de la dissuasion dans un contexte d’interdiction des essais suppose de prendre en considération les contraintes liées au vieillissement des armes. Le plutonium se dégrade et engendre la formation de bulles d’hélium affectant la structure et le comportement du métal d’une façon telle qu’au-delà de 25 ans, la garantie de bon fonctionnement des armes devient très difficile. En outre, avec le temps, les rayonnements augmentent et rendent plus délicates les opérations effectuées sur les armes. Dans la mesure où il n’est pas possible de garantir le fonctionnement de TN75 « refabriquées » à l’identique sans essais réels, la stratégie de renouvellement des armes repose sur le concept d’armes dites robustes.

Celles-ci « pardonnent » davantage en raison de tolérances de fonctionnement plus importantes que les armes actuellement en service, caractérisées au contraire par leur haut degré d’optimisation. De ce point de vue, l’ultime campagne d’essais a permis d’amasser les données suffisantes pour la mise en place du programme de simulation. Par ailleurs, une cinquantaine d’essais précédents suffisamment instrumentés permettent de conduire la simulation au travers de la réinterprétation des essais du passé. Le passage d’une optimisation extrême aux têtes robustes a constitué en quelque sorte une révolution culturelle pour les équipes de concepteurs. Toutefois, en raison de la connaissance beaucoup plus fine des phénomènes physiques fournie par le programme de simulation, il ne s’agit pas d’une régression technique.

• La mise en œuvre du programme de simulation s’appuie sur trois grands outils.

La machine radiographique Airix concerne l’étude du fonctionnement de la partie non nucléaire des armes. Le premier tir a eu lieu le 1er décembre 1999 et il a permis d’atteindre toutes les spécifications demandées. Des études sont en cours pour la réalisation à moyen terme d’un deuxième axe, permettant de disposer d’une meilleure vision des phénomènes et de pouvoir effectuer des prises de vue à deux moments différents d’un même « tir froid ». Les États disposant de capacités similaires sont les États-Unis (Nevada), le Royaume-Uni (Aldermaston) et la Russie (Nouvelle-Zemble).

Le LMJ, qui constitue de loin l’investissement le plus important du programme de simulation, permet de reproduire à une échelle très réduite le fonctionnement de la partie thermonucléaire des armes. La réalisation préalable de la ligne d’intégration laser (LIL) a permis de valider les choix technologiques. Il est apparu que les puissances constatées, aussi bien en ultra violet qu’en infra rouge dépassaient les puissances requises. Aussi, le LMJ pourra fonctionner de manière courante en utilisant 22 chaînes laser, soit un total de 176 faisceaux, ce qui permettra d’optimiser les coûts de fonctionnement (augmentation de la durée de vie des cristaux, notamment). Une première expérience de physique des armes a été réalisée sur la LIL en 2004. S’agissant du calendrier de réalisation du LMJ, les travaux de génie civil devraient s’achever en 2008, l’installation des lasers est en cours depuis mars 2007 et la première expérience d’ignition est prévue en 2012. Elle marquera le début d’une phase de montée en puissance progressive jusqu’en 2015.

Une coopération fructueuse a été mise en œuvre avec les États-Unis dans ce domaine, au travers d’échanges scientifiques (peer review) et d’une association pour la fabrication en commun des verres au néodyme. Pour leurs travaux sur la fusion, les Britanniques ont choisi de s’appuyer sur l’équivalent américain du LMJ, le NIF (National Ignition Facility), tout en réalisant sur leur sol un laser de moindre puissance (projet Orion), comparable à celle de la LIL. En revanche, le Royaume-Uni a construit une machine radiographique équivalente à AIRIX. D’éventuelles coopérations en matière de simulation avec la France apparaissent donc difficiles, d’autant que les accords bilatéraux avec les États-Unis sont stricts. On remarquera que l’Atomic Weapons Establishment, pour partie privatisé, emploie 5 300 personnes, soit davantage que la direction des applications militaires du CEA, et ce malgré des responsabilités moindres liées à l’absence d’autonomie stratégique du Royaume-Uni.

La simulation numérique est essentielle car elle permet de reproduire par le calcul les différentes étapes du fonctionnement d’une arme. La puissance nécessaire suppose une multiplication par 10 000 des capacités de calcul de la DAM entre 1996 et 2010. A la mi-2001, la première étape du projet TERA a permis d’atteindre une puissance de cinq téraflops. La machine TERA 10 qui lui a succédé en 2005 constitue le calculateur français le plus puissant, avec 50 téraflops. L’appel d’offres international a été remporté par Bull face à IBM. La nouvelle machine est significativement plus fiable que le modèle précédent. TERA 10 comprend 8 704 processeurs et 544 nœuds de seize processeurs. Son coût complet de possession sur quatre ans est de l’ordre de 45 millions d’euros dont un investissement initial de 35 millions d’euros. En 2010 une troisième tranche du projet TERA permettra d’atteindre les 100 téraflops. Les puissances de calcul considérable demandées s’expliquent, d’une part, par la quantité de calcul à faire pour chaque simulation et, d’autre part, par la nécessité pour les concepteurs d’armes de bénéficier des résultats dans des délais raisonnables. Des réflexions sont en cours sur les besoins de puissance et l’architecture d’une éventuelle nouvelle étape dans les capacités de calcul à l’horizon 2015.

Parallèlement à la machine consacrée intégralement aux besoins de la défense, l’expertise acquise a été utilisée pour mettre en place une seconde machine de calcul massif, servant aux besoins civils du CEA mais largement ouverte aux industriels, sous réserve d’une contribution représentative des frais de fonctionnement et d’amortissement. Plusieurs entreprises utilisent cette faculté, principalement dans le secteur aérospatial.

• Le bilan actuel du programme de simulation fait apparaître que l’ensemble des spécifications techniques a été atteint avec succès, tandis que le calendrier était respecté. Sur le plan financier, en 2000 le comité des prix de revient des fabrications d’armement avait estimé à 5,75 milliards d’euros 2007 le coût total du programme. Fin 2006, ce coût a été revu à la hausse (5,92 milliards d’euros 2007), de même qu’en 2007 (+ 0,27 milliard d’euros). Au total il s’établirait donc désormais à 6,19 milliards d’euros 2007, soit une hausse de 7,6 % à prix constants. Pour l’essentiel, ce phénomène s’explique par l’augmentation du prix des matériaux de construction et de l’énergie.

II. —  LES PROGRAMMES SPATIAUX : DES LACUNES PERSISTANTES

Le caractère déterminant de la maîtrise de l’espace ne fait aucun doute. Celle-ci conditionne désormais directement l’efficacité opérationnelle des forces, tout en constituant un élément indispensable d’autonomie stratégique au travers notamment de la capacité de renseignement et d’analyse des situations. La loi de programmation militaire 2003-2008 s’est certes traduite par une modernisation des moyens spatiaux, mais des lacunes importantes subsistent et ne pourront être comblées que dans le cadre d’une plus grande coopération à l’échelle européenne.

A. LE DISPOSITIF ACTUEL ET SON FINANCEMENT

1. Le renforcement récent des capacités

Le renseignement d’origine image apparaît comme le domaine où la situation est la plus satisfaisante grâce à la mise en service du premier satellite Hélios II, mais aussi avec l’arrivée très prochaine des premiers échanges d’images avec des capacités radar allemande et italienne.

• Le système Hélios est le seul système militaire de renseignement satellitaire en opération en Europe. Les autres satellites d’observation européens en service sont civils et ont des performances moindres. Il constitue pour les pays participant au programme un outil stratégique unique permettant d’obtenir des images de grande qualité de tout point du globe.

Le programme Hélios II a permis d’améliorer la résolution des images optiques (très haute résolution et stéréo haute résolution) tout un introduisant une précieuse capacité d’observation infrarouge. Il est mené en coopération avec la Belgique et l’Espagne depuis 2001, avec l’Italie depuis juin 2005, et avec la Grèce depuis mars 2007. Les taux de participation des cinq pays sont les suivants : 90 % pour la France et 2,5 % respectivement pour la Belgique, l’Espagne, l’Italie et la Grèce. L’Allemagne fait partie de la communauté Hélios par le biais d’un échange de capacités. Le premier satellite a été lancé en décembre 2004 et le tir du second est prévu pour mars 2009.

Afin de compléter ces capacités optiques par des capacités radar, deux accords de partage ont été signés, l’un avec l’Italie (accord de Turin du 29 janvier 2001), l’autre avec l’Allemagne (accord de Schwerin du 30 juillet 2002). Ils définissent les principes d’un échange de droits de programmation entre les systèmes radar COSMO-SkyMed et SAR-Lupe, d’une part, et le système Hélios II, d’autre part. Le programme segment sol d’observation (SSO) a pour objet de concrétiser ces accords.

Le premier des quatre satellites de la constellation COSMO-SkyMed a été lancé le 7 juin 2007, le second devrait l’être en décembre de la même année et les deux derniers exemplaires en 2008. Pour l’Italie, déjà partenaire financier d’Hélios II à hauteur de 2,5 %, l’accord de Turin se traduit par une augmentation de son quota d’images. L’échange de capacités avec la France devrait être effectif à partir du début de 2008. S’agissant du programme SAR-Lupe, les deux premiers satellites ont été respectivement lancés en décembre 2006 et en juillet 2007. La constellation complète comprendra cinq satellites et le système devrait entrer en phase finale opérationnelle fin 2008. Le segment sol français permettant l’accès direct au système devrait être déployé à l’horizon 2010. Un accord d’application signé en août 2006 permet pendant une phase transitoire un échange d’images, les premières devant être disponibles pour la France à la fin de 2007.

• Dans le domaine des télécommunications, la période récente a été marquée par la mise en service des deux satellites Syracuse III. Le premier exemplaire de la série, Syracuse III-A, a été lancé avec succès le 13 octobre 2005. Le tir du second satellite, Syracuse III-B, a été réalisé le 12 août 2006. Ce système permet aux forces de disposer d’un service de télécommunications par satellites d’un bien meilleur niveau, grâce à des performances accrues en termes de débit de transmission, de souplesse d’utilisation, de protection et de sécurisation. On rappellera que Syracuse III a été choisi par l’OTAN en mai 2004 pour assurer ses communications spatiales, en association avec les systèmes du Royaume-Uni (Skynet 5) et de l’Italie (SICRAL), l’offre européenne ayant été préférée à celle présentée par les Américains pour le renouvellement de la constellation NATO IV.

On remarquera cependant que si les deux satellites ont bien été mis en service, les ambitions ont été singulièrement réduites s’agissant des stations sol. Lors du lancement du projet en 2004, il avait été prévu de déployer 587 stations sol entre 2006 et 2014. En 2007, cette cible a été réduite à 489 stations « suite à une nouvelle évaluation du besoin », plus probablement pour des raisons d’ordre budgétaire. Cette mesure est complétée par un étalement plus grand des commandes et des livraisons. Elle conduit aussi à utiliser plus longtemps les anciennes stations Syracuse II, qui ne permettent pas une exploitation optimale des capacités offertes par les nouveaux satellites. De plus, les dernières stations sol devraient être commandées en 2015, soit seulement deux ans avant la fin de vie prévisible des satellites.

La LPM 2003-2008 prévoyait qu’à partir de 2006 serait engagée une deuxième étape destinée à améliorer les débits et l’étendue des zones d’exploitation. En cours de programmation, il a été renoncé à la construction d’un troisième satellite Syracuse, un temps envisagée. Le conseil de défense de juillet 2005 a demandé qu’il soit procédé à une étude des différentes solutions permettant d’obtenir une capacité complémentaire aux deux satellites existants, afin de garantir les performances requises en matières de débits disponibles et la pérennité du service. Un dossier comparant les diverses possibilités (partenariat public-privé, externalisation proposée par la société Paradigm dans le cadre du programme britannique Skynet, acquisition en pleine possession d’un troisième satellite et coopération avec l’Italie) a été remis au ministre de la défense en mars 2007. Il a conclu à l’avantage du choix d’une coopération avec l’Italie, une telle solution revenant nettement moins cher que l’acquisition d’un troisième satellite Syracuse III-C. Elle permet également une meilleure maîtrise opérationnelle ainsi qu’une plus grande cohérence technique avec le système Syracuse au regard de la possibilité d’une location de ressources provenant de Skynet 5, à coût équivalent.

Cette coopération consiste, d’une part, à contribuer à hauteur de la moitié du coût de la réalisation d’un satellite de télécommunications militaires protégées SICRAL 2 et, d’autre part, à la réalisation en commun par le CNES et l’agence spatiale italienne d’un satellite ATHENA-FIDUS (French Italian Dual Use Satellite), destiné à fournir une capacité Internet haut débit par satellite, non protégée. Un Memorandum of Understanding a été signé entre la France et l’Italie pour le premier projet en juillet 2007. La participation française à SICRAL 2 s’élève à 117,8 millions d’euros et ce satellite, dont la mise en service est prévue en 2011, emportera une charge utile italienne ainsi qu’une charge utile française, semblable à celle de Syracuse III.

2. Un effort budgétaire en demi-teinte

• La LPM 2003-2008 prévoyait un montant moyen annuel de crédits de paiement sur la période de 450 millions d’euros environ (hors BCRD mais y compris les études amont). La ressource disponible a en moyenne atteint de l’ordre de 440 millions d’euros par an de 2003 à 2007 et les crédits effectivement consommés un peu plus de 370 millions d’euros jusqu’en 2006.

Le tableau ci-après récapitule l’évolution des crédits de paiement consacrés au secteur spatial militaire depuis 2003. Il fait dans l’ensemble apparaître une tendance à l’augmentation des budgets votés, mais aussi et de façon plus préoccupante l’accroissement très net de l’écart entre ces crédits votés et la consommation réelle des crédits. Ce mouvement s’explique tout d’abord par les retards rencontrés dans l’exécution de certains programmes. Par exemple, ceux de COSMO-SkyMed, de SAR-Lupe et de Pléïades ont conduit à décaler la réalisation du segment sol d’observation (SSO). Ensuite, le report du tir du deuxième satellite Hélios II ainsi que la participation de l’Italie et de la Grèce à ce programme ont contribué à limiter les besoins en paiements. Au total, de 2003 à 2006, l’écart en euros courants entre crédits votés et consommés représente 302,32 millions d’euros soit 67 % d’une annuité moyenne de crédits votés sur cette période. On observera de surcroît que l’écart entre crédits votés et consommés était relativement faible au début de la programmation mais qu’il n’a cessé depuis de croître, année après année. Il est vrai que les principales échéances des programmes se situaient en début de programmation.

Évolution des crédits de paiement consommés en matière spatiale militaire

(en millions d’euros courants)

Année

2003

2004

2005

2006

2007

Budget voté (a)

(hors BCRD) (1)

436,20

402,30

469,33

489,05

469,01

Annulations, reports et ajustements

- 38,39

- 23,59

- 43,92

26,38

80,66 (2)

Ressources disponibles

397,31

378,71

423,73

515,43

486,67 (2)

Budget réalisé (b)

398,70

330,37

374,07

391,41

274,58 (2)

Écarts (a - b)

37,50

71,93

95,26

97,63

185,15 (2)

(1) Budget civil de recherche et développement.

(2) A la fin de juin 2007.

Source : ministère de la défense.

• Le projet de loi de finances interrompt la tendance à la hausse des dotations initiales pour le secteur spatial militaire observée depuis 2004. Si l’on prend en considération les crédits de paiement figurant au sein du programme 146 « Équipement des forces » ainsi que ceux du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » (pour l’essentiel les études amont espace et, plus marginalement, une partie des études technico-opérationnelles), leur total s’élève en 2008 à presque 393 millions d’euros, soit une baisse de 16,2 % par rapport à la loi de finances pour 2007. Le phénomène est encore plus marqué s’agissant des autorisations d’engagement : elles représentent 154,84 millions d’euros, soit une diminution de 70,3 %.

L’achèvement des principaux programmes de la LPM explique largement ce phénomène, d’autant que les besoins de crédits liés au MCO des systèmes qui viennent d’être mis en service pèseront essentiellement sur la prochaine programmation. Il reste que les mesures précitées d’étalement de certains aspects des programmes jouent également un rôle dans la limitation des besoins de crédits. Enfin et surtout, il est à craindre que des dotations calculées au plus juste entraînent des décalages dans le calendrier de renouvellement des moyens actuels, tout particulièrement en ce qui concerne la composante optique.

B. LES LACUNES ET L’AVENIR DES MOYENS SPATIAUX MILITAIRES

Malgré un dispositif militaire spatial beaucoup plus complet que celui de ses principaux partenaires européens, la France continue à souffrir de lacunes graves dans quatre domaines : la surveillance de l’espace, la navigation, l’alerte avancée et le renseignement d’origine électromagnétique (ROEM). Ces lacunes sont également celles de l’Union européenne considérée dans son ensemble. Diverses mesures palliatives ont été prises pour se doter d’embryons de capacités ou des connaissances nécessaires, mais aucun véritable programme opérationnel n’a pour l’instant été lancé dans ces domaines. Les besoins sont bien identifiés, tout comme la nécessité de ne pas laisser l’Europe marginalisée face aux ambitions d’acteurs de plus en plus nombreux en matière spatiale. Les décisions à prendre se heurtent cependant aux difficultés inhérentes à la mise en place de programmes en coopération et à des contraintes budgétaires d’autant plus grandes qu’il faut aussi s’attacher au renouvellement à moyen terme des systèmes actuellement en service.

1. L’acquisition d’une maîtrise technologique comme palliatif temporaire

La politique de recherche et technologie a permis de financer l’acquisition d’un certain nombres de « briques » technologiques et de les valider au travers d’une politique active de démonstrateurs. Les résultats obtenus sont inégaux selon les domaines.

Ainsi, en matière d’alerte avancée le premier démonstrateur devrait être livré et lancé en 2008. Cofinancé par le CNES, dont il utilise la plate-forme microsatellite Myriade, il constitue une étape de recherche très en amont, destinée à la caractérisation du « bruit de fond » infrarouge de la terre. Il n’offrira aucune forme de capacité opérationnelle.

Le radar GRAVES (grand réseau adapté à la veille spatiale) fournit une première capacité de surveillance de l’espace. Il a été développé par l’ONERA dans le cadre d’un programme d’étude amont, pour un coût d’environ 30 millions d’euros. Compte tenu de ses performances, l’armée de l’air a décidé de l’employer de manière opérationnelle depuis 2005. S’il a permis un certain nombre d’avancées, il reste cantonné à la cartographie d’objets assez volumineux et ne permet de les identifier que par recoupement avec des catalogues accessibles en source ouverte. Or, les besoins sont considérables compte tenu de la croissance du nombre de débris en orbite. Ceux-ci obligent souvent à manœuvrer les satellites pour éviter des collisions et l’Europe est pour l’instant complètement dépendante des informations transmises par le commandement de la défense aérospatiale nord-américain (NORAD). Seule l’Allemagne dispose pour l’instant d’une capacité embryonnaire dans le domaine de l’identification, grâce au radar à vocation duale TIRA (Tracking and Imaging Radar). Sans maîtrise de l’identification, il ne peut y avoir de mesures de protection contre les menaces visant les dispositifs spatiaux. L’interception d’un satellite réalisée par la Chine en janvier 2007 montre qu’il ne s’agit pas d’une hypothèse d’école. Les États-Unis disposent de capacités antisatellite, la Russie a au moins gardé un savoir faire et d’autres acteurs spatiaux pourraient assez rapidement maîtriser les technologies nécessaires.

C’est dans le domaine du ROEM spatial qu’a été menée la politique la plus suivie d’études amont. Les recherches se sont notamment traduites par le lancement en démonstrateur ESSAIM en 2004. Il a pour objectif d’étudier l’interception d’émissions dans les bandes basses (essentiellement par des émetteurs de communication et certains radars). La phase d’exploitation est en cours. Cette première opération devrait être complétée en matière de détection des radars par le démonstrateur ELISA (Electronic Intelligence Satellite), dont le lancement est prévu pour 2010. ELISA traitera des émissions dans les bandes hautes, c’est-à-dire des radars.

2. Les décisions à prendre en matière de nouveaux programmes

• Le cas de Galileo est très particulier dans la mesure où par son état d’avancement technique il ne peut être qualifié de démonstrateur, tout en n’étant pas encore un véritable programme en raison des difficultés bien connues affectant son financement. En juin 2007, le Conseil a en effet abandonné le recours à un partenariat public privé pour se tourner vers un financement par le budget de l’Union européenne. Pour l’instant, aucun accord n’a pu être trouvé en raison de la question pendante des modalités de partage du travail entre les industries des États intéressés. S’il s’agit bien d’un programme civil, il offre également des perspectives importantes dans les domaines de la sécurité et de la défense. Le document de politique spatiale européenne, adopté par les ministres de l’Union européenne réunis en conseil espace le 22 mai 2007, reconnaît expressément que certains programmes duaux, comme Galileo et GMES (Global Monitoring for Environment and Security), pourraient avoir des applications militaires. Pour l’instant, Galileo accuse un retard d’au moins trois ans, ce qui est regrettable au regard des enjeux économiques mais aussi d’autonomie stratégique. On peut noter à cet égard que la Chine, initialement partenaire de Galileo, a finalement décidé de développer sa propre constellation COMPASS, en utilisant les fréquences du projet européen et plus particulièrement du signal PRS (Public Regulated Service – ou service gouvernemental) (5). Elle n’est pas la seule a considérer ce domaine comme éminemment stratégique, puisque les États-Unis ont engagé le développement d’un standard plus précis que le GPS actuel, destiné notamment au marché de la navigation aérienne (GPS III), et que la Russie modernise son système de navigation globale par satellite (Glonass), avec douze satellites en service et six devant être lancés d’ici la fin de l’année.

• Le degré d’urgence des décisions à prendre pour les nouveaux programmes est très variable selon les domaines.

S’agissant du ROEM, il s’agit désormais de capitaliser sur l’expérience acquise grâce aux démonstrateurs technologiques. Un objectif d’état-major a été approuvé par le comité d’architecture des systèmes de forces (CASF) en juin 2007. La mise en service de ce projet nouveau, baptisé CERES (capacité ROEM spatiale) est prévue pour 2013. Durant la phase de préparation qui vient de débuter, l’ouverture à une coopération avec des partenaires européens est étudiée.

Pour la succession de Syracuse III, les échéances sont encore assez lointaines. Les réflexions devraient véritablement commencer en 2009 et les choix sont très ouverts. La recherche de coopérations à l’échelle européenne doit là aussi être privilégiée et ce d’autant plus que les calendriers de renouvellement des capacités de télécommunications militaires des principaux acteurs sont compatibles. Le programme Syracuse III doit rester en service jusqu’à l’horizon 2018, comme le réseau britannique Skynet 5, tandis que l’Allemagne devra remplacer ses satellites SATCOM-BW à partir de 2020.

C’est dans le domaine de l’imagerie spatiale que l’urgence est réelle. La succession d’Hélios II suppose qu’un nouveau programme puisse en prendre le relais opérationnel à partir de 2015.

Le projet MUSIS (Multinational Spacebased Imaging System) a été lancé en 2005 avec la définition d’un objectif d’état-major, puis en 2006 d’un besoin opérationnel commun aux six nations participant au programme Hélios. Il vise à répondre à l’ensemble des besoins de capacités d’observation, optique et radar. Les premières études d’architecture et sur le segment sol ont été lancées, tandis que la France a mené des études préalables pour la composante optique au travers des crédits du BCRD affectés au CNES.

Durant l’été 2007, le chef d’état-major des armées et le délégué général pour l’armement ont adressé un lettre aux partenaires précités en vue d’aller plus loin dans la coopération européenne et de créer une « Europe de la confiance » en matière de renseignement optique, y compris dans des domaines relevant traditionnellement de la souveraineté des États comme la programmation des prises de vue. Les bénéfices d’une plus grande intégration seraient à la fois budgétaires (réduction du coût de réalisation et de fonctionnement des futures capacités) et opérationnels (passage d’une logique restrictive d’échanges de produits à une logique plus ambitieuse de partage des capacités). Enfin, il ne faut pas négliger la dimension politique de la question, une intégration des capacités de renseignement contribuant à la construction de l’Europe de la défense. L’amélioration de la coordination en matière de programmation des images dépendra sans doute beaucoup d’avancées technologiques qui ne sont pour l’instant pas acquises.

En ce qui concerne la composante optique, le budget de la défense doit désormais prendre le relais pour la phase de conception. L’exercice 2008 devrait en effet être marqué par l’adoption d’un document de lancement. Sur ce point, l’évolution des dotations affectées à l’espace dans le projet de loi de finances n’est guère rassurante et il conviendra de veiller strictement à ce que la recherche d’économies limitées ne se traduise pas par une perte de capacité en 2015, fût-elle temporaire, dans un domaine aussi essentiel que le renseignement optique.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. —  AUDITION DE M. HERVÉ MORIN, MINISTRE DE LA DÉFENSE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Hervé Morin, ministre de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2008 (n° 189).

Le président Guy Teissier a souligné que l’examen du budget 2008 s’inscrit dans un contexte particulier de réflexion globale sur la défense menée par l’équipe de travail du Livre blanc. Ces travaux aboutiront à un nouveau projet de loi de programmation militaire (LPM) au printemps 2008.

Par ailleurs, la réforme des institutions devrait conférer des pouvoirs accrus au Parlement. Les opérations extérieures (OPEX) font l’objet d’une inscription de crédits conséquente, avec 360 millions d’euros, ce qui améliore l’information du Parlement ainsi que sa capacité de contrôle. Nul doute cependant qu’il faudra aller plus loin ; un groupe de travail au sein de la commission sera constitué sur ce sujet.

S’agissant des dépenses d’équipement, il s’est interrogé sur les programmes qui pourront être financés et livrés en 2008. Il s’est félicité par ailleurs des efforts qui seront faits en 2008 pour améliorer la condition des personnels civils et militaires.

M. Hervé Morin a rappelé que le contexte budgétaire est exigeant, avec pour objectifs le retour à l’équilibre en 2012, voire en 2010 si la croissance le permet, et de ramener l’endettement public en dessous de 60 % du PIB. Les moyens du ministère de la défense, c’est-à-dire l’effort de défense du pays, seront cependant maintenus, comme le Président de la République s’y était engagé lors de la campagne électorale. Le budget atteindra 48,065 milliards d’euros, soit une stabilité globale en valeur – si l’on négligeait l’impact de la hausse des pensions, il serait même possible de le présenter en augmentation.

Ce projet de budget s’inscrit dans la continuité de l’exercice précédent et de la LPM adoptée en 2003. C’est un budget de transition qui assure la dernière annuité de la LPM, ce qui n’empêche que l’effort de réflexion en cours sur la transformation et la modernisation de l’outil de défense est indispensable et même salutaire. Le président de la commission de la défense et un membre éminent de l’opposition sont d’ailleurs associés à l’élaboration du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Il s’agit d’un travail sans tabou ni préjugé, que le Président de la République a voulu le plus ouvert possible, ce qui se traduit notamment par l’organisation d’auditions publiques.

La revue des programmes d’armement, menée sous l’autorité du ministre de la défense, reconsidère systématiquement l’opportunité des calendriers des programmes en cours ou à lancer, en vue notamment de réduire la fameuse « bosse » budgétaire annoncée pour les exercices 2009 et 2010.

Quant à la révision générale des politiques publiques (RGPP), exercice commun à tous les ministères mais qui avait été engagé par le ministère de la défense avant même la décision du Premier ministre, elle doit permettre de dégager des marges de manœuvre au profit des unités opérationnelles.

Il a précisé que cet exercice sera achevé en début d’année 2008, tandis que l’essentiel de la revue des programmes d’armement sera terminé dès la fin de l’année 2007. Le Livre blanc sera, quant à lui, rendu public en mars 2008. La synthèse de ces trois exercices permettra de soumettre au Parlement un projet de loi de programmation militaire au printemps prochain.

Le premier trait caractéristique du projet de loi de finances pour 2008, commun à toutes les administrations de l’État, est une réduction d’effectifs : la moitié des départs à la retraite ne seront pas remplacés, ce qui représente un effort de 6 037 emplois, soit 3 037 équivalents temps plein travaillé, répartis de manière équilibrée entre personnel civil et personnel militaire – 621 pour la première catégorie et 2 416 pour la seconde. Ces réductions d’effectifs porteront uniquement sur les fonctions de soutien et d’administration : les chefs d’état-major ont pour consigne de ne pas toucher aux forces opérationnelles.

Cela suppose des rationalisations, qui seront assurées dans le cadre de la RGPP, et un renforcement de l’interarmisation afin d’améliorer le ratio entre back-office et frontline, qui s’établit aujourd’hui à 62/38. Cette réduction d’effectifs permettra de revaloriser considérablement la condition du personnel, avec une somme exceptionnelle de 102 millions d’euros de mesures catégorielles. Un effort sera consenti au profit des militaires du rang et des jeunes sous-officiers, ce qui correspond à la mise en œuvre de la première étape des recommandations émises en janvier par le Haut comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM) : dès 2008, les parcours indiciaires des caporaux, des caporaux-chefs ainsi que des gendarmes et des sergents seront à parité avec ceux des autres personnels en tenue. Pour les autres sous-officiers et les officiers, il faut commencer par modifier les statuts particuliers, ce qui requiert une procédure interministérielle pouvant aboutir à une deuxième tranche d’amélioration de la condition du personnel, présentée dans le budget 2009.

Le plan d’amélioration de la condition militaire (PACM) bénéficie de 25 millions d’euros, ce qui permettra d’atteindre précisément les objectifs fixés en 2002 pour la revalorisation du taux non logé de l’indemnité pour charges militaires. La dernière tranche du fonds de consolidation de la professionnalisation est achevée, avec 4 millions d’euros.

Enfin, pour la gendarmerie un certain nombre de mesures catégorielles sont prises dans le cadre du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) et concernent 500 postes d’officiers et 550 postes de sous-officiers supérieurs.

Les mesures en faveur du personnel civil atteindront 16 millions d’euros, montant jamais atteint depuis dix ans. Le ministère de la défense a donc fait beaucoup mieux que prévu, grâce à un arbitrage personnel du Premier ministre : alors que seulement la moitié des gains consécutifs aux suppressions d’emplois devait être récupérée, plus du double l’a finalement été. Au demeurant, le ministère de la défense restera probablement le premier recruteur du pays, avec un peu plus de 30 000 embauches de militaires et un peu plus de 2 000 embauches de civils.

Abordant les dépenses d’équipement, le ministre a précisé qu’elles sont pratiquement conformes à la programmation 2003-2008. Les crédits de paiement atteignent 15,9 milliards d’euros, soit une progression de 0,8 % des crédits de la LPM stricto sensu. Celle-ci prévoyait une actualisation de 0,8 % en volume ; compte tenu de l’inflation, il manque donc 250 millions d’euros pour respecter intégralement la programmation. Cette somme doit toutefois être mise en regard de la décision du Président de la République de lever la réserve de 1,15 milliard d’euros sur le budget 2007 et de la décision du Premier ministre d’ouvrir des crédits supplémentaires dans le collectif budgétaire de 2007 pour les frégates multimissions (FREMM), à hauteur des « treize dix-neuvièmes », c’est-à-dire pour un montant attendu de 338 millions d’euros.

Les autorisations d’engagement ont été fixées à 15 milliards d’euros, contre 15,6 milliards en 2007. Sur ce total, un montant conditionnel de 3 milliards d’euros a été prévu et correspond notamment à une provision pour la commande du deuxième porte-avions (PA2), étant entendu que le programme ne sera éventuellement lancé qu’au vu des conclusions de la commission du Livre blanc et des arbitrages du Président de la République. L’article 8 de la loi organique relative aux lois de finances impose en effet d’engager la totalité des crédits d’un ensemble cohérent. Plus généralement, les autorisations d’engagement pourront être revues et corrigées en fonction des conclusions de la commission du Livre blanc et du projet de LPM.

Il a annoncé les principales livraisons prévues pour 2008 : 14 Rafale, 6 Tigre, 240 armements air-sol modulaires, 57 chars AMX 10 RC rénovés, 358 équipements de fantassin FELIN et une frégate Horizon.

Les principales commandes porteront sur huit Rafale, 36 AMX 10 RC rénovés, 116 véhicules blindés de combat d’infanterie, 5 000 équipements FELIN et 22 hélicoptères NH 90, qui viendront compléter les douze appareils dont la commande est prévue dans le budget 2007 – ces trente-quatre appareils en version terrestre doivent être livrés pour la fin de 2011. Les difficultés rencontrées sur le radar de la version marine du NH 90 conduisent à prévoir le retrait des Super Frelon en 2011 au plus tôt.

Dans le domaine du maintien en condition opérationnelle (MCO), doté de 3,3 milliards d’euros, il faudra poursuivre les efforts de rationalisation en cours, afin de rompre avec la culture héritée du passé et de mener à bien l’interarmisation. La nouvelle politique d’emploi et de gestion des parcs de l’armée de terre se met en place. La consolidation des nouveaux modes de contractualisation du MCO naval fonctionne très bien. La création du service industriel de l’aéronautique (SIAé) est prévue dès ce budget et constitue une étape importante. D’autres devront être franchies.

Enfin, l’enveloppe des crédits d’études amont est identique à celle de 2007, avec 700 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Pour la gendarmerie, l’effort d’équipement est lié à la mise en œuvre à la fois de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) et de la LPM. Au total, la gendarmerie disposera de 448 millions d’euros de crédits d’équipement, montant inférieur à celui de 2007 mais voisin de celui des années 2003 à 2005. Les perspectives en matière d’équipement devront s’inscrire dans le cadre de la future LOPSI que le Président de la République a demandé au ministre de l’intérieur de préparer. Il conviendra à cette occasion de clarifier nettement ce qui relève de la LPM de ce qui relève d’un autre support de programmation en matière de sécurité intérieure. Au sein de la mission « Sécurité », une lettre plafond unique couvrira la police et la gendarmerie, même si cette dernière conservera évidemment son statut militaire. S’agissant du fonctionnement, l’effort d’économie qui est demandé à la mission « Défense » est d’une cinquantaine de millions d’euros sur un total de 3,1 milliards d’euros, ce qui représente une diminution de 1,6 %. Ces économies porteront uniquement sur des fonctions de soutien et ne remettront donc pas en cause l’activité générale de forces.

La gendarmerie, confrontée à des tensions sur ses loyers, bénéficiera d’une progression de 30 millions d’euros de ses dotations de fonctionnement, pour atteindre 911 millions, soit une progression de 3,4 %, sensiblement supérieure à l’inflation.

Abordant les OPEX, le ministre a indiqué que le présent budget inscrit leur financement à un niveau proche des deux tiers des surcoûts moyens des trois dernières années. Le Premier ministre a d’ores et déjà décidé que les surcoûts enregistrés en 2007 seront intégralement compensés en collectif budgétaire et que la défense disposera d’une autorisation supplémentaire de consommation des reports de crédits de 265 millions d’euros.

Il a ensuite présenté les priorités du ministère de la défense pour les prochaines années.

Un plan pour l’égalité de chances a été lancé au Prytanée militaire de la Flèche, afin de permettre à des jeunes de condition modeste d’accéder aux plus belles écoles militaires. Le tutorat sera développé : des jeunes officiers sortant de ces grandes écoles aideront les lycéens à intégrer les classes préparatoires. De plus, des classes tampon de remise à niveau seront créées dans les lycées militaires. Il ne s’agit nullement de discrimination positive car tous les jeunes de condition modeste sont concernés, sans distinction d’origines. Le recrutement des lycées sera modifié : la proportion des enfants de militaires restera stable, autour de 70 %, mais les enfants d’agents civils du ministère de la défense – souvent de catégorie B ou C – bénéficieront de 20 % des places, 10 % étant désormais ouverts au reste de la population. Les préparations militaires seront développées avec l’ouverture de 15 000 places pour une durée de deux à quatre semaines. Enfin, les agents du ministère qui le souhaitent retrouveront la possibilité de préparer et de passer le baccalauréat dans les lycées militaires, ce qui n’était plus possible depuis la suppression de l’école de Strasbourg, en 1983.

Le deuxième chantier concerne les exportations d’armement. L’industrie française perd des parts de marché depuis quelques années, dans un contexte dynamique de réarmement général. Le ministère de la défense a demandé l’élaboration d’un plan stratégique de soutien aux exportations. Le Premier ministre vient d’installer, le 1er octobre, la commission interministérielle pour le soutien aux exportations de sécurité (CIEDES). La délégation générale pour l’armement (DGA) renforcera les dispositifs spécifiques de soutien aux PME-PMI et améliorera le système des avances remboursables et des aides à la promotion. Cinq points méritent des efforts : la réduction des délais d’instruction des dossiers ; l’adaptation des procédures selon les pays destinataires ; l’allégement des contrôles s’appliquant à des matériels dont l’exportation n’est que la conséquence d’autorisations déjà accordées ; la révision des nomenclatures ; la possibilité de rendre très rapidement des arbitrages définitifs sur le financement de contrats.

Pour ce qui concerne les PME-PMI, une vingtaine de chefs d’entreprise ont été reçus et trois groupes de travail mixtes entreprises–DGA ont été mis sur pied, chargés respectivement de l’accès direct aux marchés publics, de l’accès aux programmes d’études amont (PEA) et de l’amélioration des relations entre les PME et les grands donneurs d’ordre, notamment en termes de délais de paiement.

Enfin, le plan d’action en faveur de la promotion du développement durable dans tous les secteurs d’activité de la défense sera présenté en novembre. Sans toucher aux impératifs opérationnels, le ministère a un grand rôle à jouer, compte tenu du nombre important de ses implantations, de son parc immobilier considérable et du volume de ses commandes publiques ; un régiment de l’armée de terre et une base aérienne pourront être sélectionnés afin de servir de modèle pour nos armées dans ce domaine.

Il a conclu en évoquant la réflexion en cours sur les propositions que la France pourrait avancer dans le cadre de la présidence de l’Union européenne. Depuis l’accord de Saint-Malo, la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) a certes progressé mais pas à la hauteur des ambitions. L’Europe ne doit pas être simplement une puissance économique mais aussi une puissance politique, capable de porter ses valeurs et de défendre ses intérêts dans l’ensemble du monde.

Le président Guy Teissier a appelé l’attention du ministre sur les petits programmes de cohérence opérationnelle, qui permettent aux grands équipements de fonctionner. Sur les 404 millions d’euros prévus dans la LPM pour l’armée de terre, seuls 52 millions ont été à ce jour dépensés. Cela concerne notamment les munitions, qu’elles soient de combat ou d’entraînement.

Il a par ailleurs souhaité évoquer la situation des OPEX. L’Union européenne a décidé d’envoyer très prochainement des troupes à l’est du Tchad, où la situation et le nombre des déplacés sont préoccupants et créent des déséquilibres très graves. Dans quelles conditions les troupes françaises seront-elles déployées ? Quelles missions leur seront dévolues ? Les moyens de l’opération Épervier seront-ils mobilisés ? Quelles sont les difficultés rencontrées pour obtenir les effectifs nécessaires auprès de nos partenaires européens ? Cette opération aura sans doute une influence négative sur les capacités opérationnelles de l’armée de terre, déjà assez malmenée. En outre, le surcoût sera forcément important, alors que les crédits de fonctionnement de l’armée de terre accusent un recul. Elle devra donc accomplir de nouveaux sacrifices, qui toucheront l’entraînement et risquent de remettre en question le respect de l’objectif de 100 jours d’entraînement par an, essentiel pour l’efficacité et la sécurité de nos troupes déployées à l’extérieur.

Le ministre a confirmé l’importance majeure des programmes de cohérence opérationnelle, qui conditionnent la vie quotidienne des militaires dans leur activité opérationnelle. La revue des programmes d’armement se penche sur l’intégralité de la nomenclature des programmes, y compris les centaines de petits programmes de cohérence opérationnelle. Il n’est pas question de doter les armées de magnifiques matériels qu’elles seraient dans l’incapacité de faire fonctionner faute de ces équipements d’accompagnement, au risque de surcroît de devoir réaliser des programmes coûteux dans l’urgence en fonction des besoins opérationnels.

Lors de la réunion des ministres de la défense de l’Union européenne de ce week-end, la France s’est efforcée de convaincre un certain nombre de ses partenaires de participer à l’opération envisagée au Tchad et en république Centrafricaine. La France et le Royaume-Uni ont présenté la résolution 1778 au nom de l’Union européenne devant le Conseil de sécurité des Nations unies et elle a été adoptée à l’unanimité. La communauté internationale a donc confié à l’Europe une mission majeure qui requiert de 3 000 à 4 000 hommes sur le terrain. Des hésitations ou des atermoiements sur la constitution de la force constitueraient un message d’impuissance terrible en direction de la communauté internationale. Les Français devraient être environ 1 500, les Suédois 150, les Irlandais 300 à 400, les Roumains 50, les Polonais 300, les Allemands et les Italiens mettraient quelques officiers à disposition, tandis que les Espagnols fourniraient deux avions de transport Casa et les Roumains des hélicoptères. Les pays baltes sont également intéressés par cette mission de la PESD. Le commandement pourrait être confié à l’Irlande. Pour 2008, il est prévu quatre-vingt-seize jours d’ activité par homme, 160 heures de vol par pilote d’hélicoptère, comme les années antérieures et le budget d d’entraînement de l’armée de terre sera en hausse de 0,8 % et non en baisse.

M. François Lamy a estimé qu’un meilleur contrôle parlementaire peut également renforcer l’action de l’exécutif. Tous les effectifs énumérés par le ministre à propos de l’intervention au Tchad étaient annoncés dans Le Monde la semaine dernière. Il est même arrivé que Paris Match publie le récit de l’activité des membres des forces spéciales en Afghanistan alors que la commission s’entendait dire qu’aucun militaire français ne combattait sur le terrain dans ce pays.

Le projet de budget 2008 de la défense est-il sincère ? Ne sera-t-il pas revu à la baisse en cours d’exécution ?

M. Bernard Cazeneuve a relevé les particularités de l’élaboration du projet de budget 2008 : la revue des programmes n’est pas achevée ; le projet de budget n’en est pas la déclinaison ; aucun de ces deux exercices n’est en cohérence avec les orientations d’un Livre blanc dont la rédaction est en cours.

Dans La Tribune du 14 septembre 2007, le ministre de la défense a évoqué la « bosse » budgétaire : entre les engagements pris et les capacités de financement mobilisées, il manque 5 à 6 milliards d’euros par an pour tenir la future LPM, ce qui signifie qu’une hausse de 30 % par an du titre 5 serait nécessaire. Or celui-ci, dans le projet de budget 2008, ne progresse que de 0,8 %. Il manque donc 29 %. Quels programmes sont menacés ? Qu’en est-il du Rafale ? Au cours de la législature précédente, des programmes marine ont été lancés alors qu’ils ne figuraient pas dans la LPM, d’autres ont été engagés alors qu’ils étaient simplement profilés dans la LPM, d’autres encore, qui étaient initialement certains, ont été annoncés en fin de LPM, comme celui du Barracuda. Quelles sont les intentions du Gouvernement en ce qui concerne ces programmes ? Quels arbitrages se profilent ?

Le ministre a assuré que le projet de budget est sincère, sincérité qui conduit à reconnaître, sans dissimulation derrière les habituelles mesures de périmètre, un manque de 250 millions d’euros pour respecter pleinement la LPM. Des arbitrages qui n’étaient pas gagnés d’avance ont tout de même permis de lever la mise en réserve de 1,15 milliard d’euros et de financer la totalité des OPEX ainsi que treize dix-neuvièmes des FREMM. Il n’empêche que des mesures de régulation budgétaire interviendront probablement, comme chaque année.

Le budget 2008 est un budget de conclusion et de transition : il a été conçu sous l’empire de la précédente LPM tout en anticipant les réorientations qui interviendront à partir de 2009.

La bosse n’apparaît qu’à partir de 2009 puisque les besoins de paiement établis par la version actualisée du référentiel (VAR) s’établiront à 19,1 milliards d’euros en 2009, à 21,4 milliards d’euros en 2010, à 22,2 milliards d’euros en 2011 et à 23 milliards d’euros en 2012. La moyenne annuelle se situera donc autour de 40 % d’augmentation sur toute la durée de la future LPM. Si la France connaît une croissance exceptionnelle, ce que chacun souhaite, elle pourra affecter des excédents budgétaires à sa défense. La défense a un prix mais, pour conserver son rang sur la scène internationale, un pays doit pouvoir s’appuyer sur une armée crédible.

La revue des programmes d’armement recherche cependant les économies potentielles, notamment en raisonnant davantage en interarmées. Les besoins en moyens aériens de l’aéronavale et de l’armée de l’air sont similaires car elles sont appelées à mener les mêmes opérations. De même, les flottes d’hélicoptères de l’armée de terre, de l’armée de l’air et de la marine doivent pouvoir être utilisées de façon plus coordonnée et l’état-major des armées conduit une réflexion sur la mutualisation des flottes. Certains programmes subiront des coupes, d’autres seront lancés en fonction des besoins opérationnels et des conclusions du Livre blanc, mais, à ce stade de l’exercice, il est impossible de le savoir avec précision. En tout état de cause, les allégations récemment publiées sur un arbitrage définitif concernant le nombre de FREMM sont absolument dénuées de tout fondement.

M. Yves Fromion a fait valoir que, même si des lacunes demeurent, la majorité, après cinq ans, peut faire état d’un bilan des plus honorables : la réputation et la crédibilité de l’instrument de défense français ont été rétablies et sont incontestables.

Dans les documents budgétaires, il apparaît que les crédits de recherche, qui ont très nettement augmenté depuis cinq ans, ne sont pas en recul ni en stagnation mais que leur progression ralentit, alors que l’objectif fixé était de tendre vers un milliard d’euros. Or, il est regrettable qu’un discours sur la trop grande sophistication de nos matériels se développe. La maîtrise des hautes technologies est vitale pour nos industries de défense et pour les forces armées, dans un souci d’interopérabilité avec nos partenaires et, plus généralement, de crédibilité de la dissuasion.

M. Christian Ménard a fait part du mécontentement croissant des gendarmes qui jugent que leur situation est désavantageuse : ils sont moins rémunérés que les policiers, pour des horaires supérieurs.

Le ministre a expliqué que la première tranche de mesures catégorielles en faveur des gendarmes s’applique aux catégories dont les statuts particuliers ne requièrent pas de modification. Mais l’ensemble des propositions contenues dans les conclusions du rapport du HCECM ont été retenues, ce qui représente quelque 45 millions d’euros pour les militaires et gendarmes jusqu’au grade de sergent. Cela permettra d’arriver à une parité globale entre gendarmerie et police. Le ministère de la défense se refuse néanmoins à prendre d’autres mesures particulières pour la gendarmerie afin de ne pas créer de fracture au sein des armées et de ne pas remettre en cause son statut militaire. A moins que la République française ne considère un jour qu’elle n’a plus besoin de deux forces de sécurité intérieure, ce qui serait une erreur. L’effort engagé est important et il faut aussi tenir compte du PAGRE. Quant aux rapports sur l’état du moral de la gendarmerie, ils varient beaucoup d’un département à l’autre.

Le total des crédits de l’agrégat recherche et développement s’élèveront à 3,62 milliards d’euros contre 3,45 milliards en 2007, mais il est vrai que les études amont subiront une légère baisse des crédits. Il faut pourtant leur attribuer un maximum de moyens pour maintenir les compétences, le savoir-faire et l’avance technologique de la France. Il est d’ailleurs possible d’envisager un investissement plus important dans ces recherches, quitte à ne pas retenir les spécifications les plus pointues et les plus coûteuses lors du lancement des programmes. Dans le cycle des discussions entre la DGA, les états-majors et les industriels, il serait souhaitable d’examiner si certaines spécifications sont vraiment nécessaires, de façon à parvenir à des cibles satisfaisantes, permettant d’équiper convenablement et rapidement les forces tout en maintenant les compétences des équipes de chercheurs : l’enjeu est de concevoir des armements parfaitement opérationnels mais sans atteindre le niveau extrême de la sophistication technologique, qui coûte parfois à lui seul 25 à 30 % du programme.

M. Gilbert Le Bris a demandé des précisions sur le programme Rafale, les différentes récentes annonces ayant quelque peu obscurci les perspectives, ainsi que sur l’A400M et les drones, les efforts réalisés pour ces derniers n’étant pas au niveau des besoins.

Mme Françoise Olivier-Coupeau s’est interrogée sur l’annonce par le journal Ouest France du 1er septembre de l’abandon de la deuxième tranche de FREMM.

Le ministre a répété que cette information, tirée d’un blog, est erronée.

En quoi consiste une revue de programmes ? Il s’agit de prendre chaque programme et de faire le point sur les dépenses déjà engagées, celles à venir, la cible, le début des commandes, le début des livraisons et les clauses de dédit. Ensuite, à partir d’hypothèses de réductions de volume ou de cadencement, on évalue les économies qui pourraient être accomplies. Ce travail en quelque sorte radiographique permettra ultérieurement les arbitrages en conseil de défense, en fonction des priorités fixées dans le Livre blanc.

Les commandes et les livraisons de Rafale sont parfaitement conformes aux prévisions de la LPM.

L’A400M subit quelques difficultés de mise au point et M. Louis Gallois espère que le retard sera inférieur à un an.

M. Michel Voisin a observé que les crédits consacrés à la défense représentent presque 1,7 % du PIB alors qu’un taux de 2 % serait nécessaire. Qu’attend le Gouvernement pour prendre cette décision ? Il faut tenir un discours de vérité et éviter de recourir aux artifices utilisés par tous les gouvernements depuis vingt ans.

Le ministre a suggéré que les parlementaires inscrivent cette mesure – qui coûterait 6 milliards d’euros, c’est-à-dire l’équivalent du budget de la justice – dans la LPM ou en discutent avec le Président de la République et le Premier ministre.

M. Jean-Claude Viollet a craint que la revue de programme en cours, le budget 2008 et les décisions qui interviendront dans les prochains mois n’anticipent sur la réflexion stratégique du Livre blanc. Au-delà des quatre sièges concédés aux parlementaires dans la commission du Livre blanc, comment les commissions de la défense de l’Assemblée nationale et du Sénat peuvent-elles être associées à ce travail fondamental, qui se traduira par une nouvelle programmation ? Le cœur de la réflexion doit être le Livre blanc et la revue de programmes ne doit servir qu’à éclairer cet exercice.

Pour le Rafale, les prévisions sont tenues, prétend le Gouvernement. Mais la commande de huit exemplaires constitue la simple correction de l’accord dit « feuille de route » d’octobre 2006. Combien de Rafale seront commandés en 2009 ? L’affichage de la quatrième commande de soixante appareils sera stratégique, à double titre : parce qu’elle sera globale et parce qu’elle marquera le passage au standard F3.

Les 3 milliards d’euros du PA2 correspondent-ils à des autorisations d’engagement ou à une provision d’autorisations d’engagement ?

Des quotidiens régionaux ont aussi évoqué des fermetures de bases et des dissolutions de régiments. Il s’agit d’un véritable sujet de réflexion dans le cadre du Livre blanc et de la future LPM. Mais il est nécessaire de rappeler qu’aucune décision n’est prise et que la représentation nationale doit pouvoir se prononcer, y compris sur les conséquences territoriales de telles mesures.

Le ministre a acquiescé : le Livre blanc sera le point de départ de la réflexion ; la revue de programmes n’engage, quant à elle, aucune décision.

Les commandes de Rafale correspondent effectivement à un rattrapage, ce qui n’est déjà pas si mal.

Des dispositifs complémentaires d’accompagnement social devront être mis en œuvre parallèlement aux réorganisations territoriales. Les militaires et les états-majors souhaitent voir leur ministère se réorganiser, se rationaliser et s’interarmiser. En revanche, ils n’accepteront pas que les mesures de réorganisation territoriale soient menées dans le seul souci d’aménagement du territoire et non pas en fonction de l’impératif opérationnel, car cela reviendrait à sacrifier l’efficacité des armées pour des considérations politiques.

Le projet de budget contient bien 3 milliards d’euros d’autorisations d’engagement au titre du PA2 mais on peut parler de provision dans la mesure où la décision de construire ce bâtiment n’a pas encore été prise.

Le président Guy Teissier a observé que les parlementaires seront associés pour la première fois à l’élaboration d’un Livre blanc, ce qui constitue une véritable avancée. Plusieurs chantiers s’annoncent : l’examen du budget et la LPM. Compte tenu de la complexité des travaux de rédaction du Livre blanc, les membres de la commission de la défense ne pourront pas le suivre au même rythme mais des réunions pourront être organisées au sein de la commission, à partir de fin novembre, sur différents thèmes, permettant ainsi aux députés membres de la commission du Livre blanc d’être les porte-parole de leurs collègues.

M. Michel Sainte-Marie a évoqué les difficultés du programme spatial Galileo, qui sont certes d’ordre financier mais tiennent également à la concurrence du programme chinois Compass, qui utilise la même bande de fréquence que le signal de précision PRS, ce qui est lourd de conséquences pour les applications de sécurité militaire. Quelle est l’analyse du Gouvernement sur ce dossier ?

Le programme MUSIS (Multinational Spacebased Imaging System) en cours d’élaboration doit assurer la succession d’Helios II à l’horizon 2015. Or, les crédits prévus pour l’espace diminueront sensiblement en 2008. La France ne risque-t-elle pas de perdre temporairement des capacités en matière de renseignement image satellitaire lorsque Hélios II arrivera en fin de vie ?

Le ministre a rappelé que la proposition française consistait à consacrer une partie des crédits de la politique agricole commune à un grand programme d’équipement de haute technologie, Galileo, et a regretté que les Allemands, pourtant critiques sur la PAC, s’opposent à ce financement. Au demeurant, Galileo est un programme civil, même si son effet sur les capacités militaires est indéniable.

Le programme MUSIS sera lancé à temps pour assurer la succession d’Hélios. La France souhaiterait la mise en œuvre d’un grand programme spatial européen et, lors de la présidence française de l’Union, elle proposera un rapprochement des politiques spatiales nationales.

Le président Guy Teissier a souligné l’importance de ce domaine pour l’indépendance de la France : si la France abandonne ses savoir-faire, elle souffrira d’un déficit capacitaire aux alentours de 2015.

M. Michel Grall a noté que le ministère de la défense passe les deux tiers des marchés publics de l’État. La France a besoin de ses grands groupes internationaux mais aussi d’un tissu de PME diversifiées et indépendantes. Le ministère prévoit-il de développer des mesures de soutien aux PME ?

Le ministre a indiqué que sa rencontre avec une vingtaine de dirigeants de PME représentatives lui a permis de mieux comprendre leurs difficultés et leurs attentes. Trois sujets sont apparus prioritaires : les délais de paiement des grands donneurs d’ordres ; l’accès aux études amont, notamment aux PEA, pour lequel la DGA ne joue pas toujours le jeu ; l’accès direct à la commande publique, sans être obligé d’intervenir comme sous-traitant d’un grand donneur d’ordres. Trois groupes de travail ont donc été créés et rendront leurs conclusions en fin d’année.

M. Alain Rousset a demandé si le ministère, dans le cadre de sa revue de programmes, déterminera une liste des technologies critiques dont la France souhaite conserver la maîtrise, notamment dans les domaines de la propulsion, des systèmes embarqués ou des matériaux. Cela fournirait un éclairage à quinze ou vingt ans sur les stratégies de capacités de la défense nationale. Un véritable problème de stratégie industrielle et technologique se pose dans ce domaine, alors même que des pays comme l’Italie et l’Espagne mènent une politique très volontariste pour acquérir des savoirs de pointe.

La France est en train de perdre sa compétence sur les matériaux composites, au bénéfice de l’Espagne, et un risque similaire pèse sur la propulsion nucléaire, le spatial et bien d’autres domaines ayant des retombées civiles. Cela tient aux modalités de la commande publique mais aussi à la structuration de l’appareil industriel : les PME françaises ne possèdent pas la taille critique nécessaire pour faire face à la commande des donneurs d’ordres. La PME moyenne, avec ses trente-cinq ou ses cinquante-cinq salariés, est incapable d’accéder à la commande publique, de supporter des tensions de paiement ou de livraisons de pièce et surtout de faire face au partage des risques. Il est urgent que la DGA fasse des efforts en la matière et que le processus de restructuration de l’industrie civile et militaire française s’accélère, ce qui renvoie à la faiblesse du dispositif étatique d’appui aux fonds propres. Ensuite, les régions assureront le relais pour tisser les liens nécessaires avec les PME.

Un programme militaire ne peut plus être conçu sans une réflexion sur sa déconstruction, sans une intégration de la dimension du développement durable. Ainsi, on ne sait pas désintégrer les matériaux composites : après avoir été utilisés deux ou trois fois, ils s’empilent sur un site du nord de la France. Un effort de recherche s’impose donc.

Plus généralement, une réflexion doit être menée au sujet de l’industrie duale, comme cela se fait aux Etats-Unis. Désormais, c’est davantage le secteur civil qui tire le secteur militaire.

Le ministre a indiqué qu’un des groupes de travail de la commission du Livre blanc travaille sur les technologies et les compétences stratégiques. La taille des lots des appels d’offres peut aussi conduire à évincer des entreprises ; il suffirait de constituer des « briques » plus réduites pour que des PME puissent faire acte de candidature, mais cela suppose un changement de culture de la DGA et des grands donneurs d’ordres.

M. Francis Hillmeyer s’est enquis de l’état d’avancement de l’interarmisation du soutien logistique, à l’instar de ce qui a été réalisé en Grande-Bretagne ou en Allemagne.

Le ministre a répondu que ce travail est en cours et que certains résultats ont déjà été obtenus, comme en témoigne la création du SIAé. C’est l’un des secteurs clés ou l’interarmisation et les économies sont possibles sans affecter la capacité opérationnelle des armées.

——fpfp——

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Michel Sainte-Marie, les crédits de la Mission « Défense » : « Équipement des forces (espace, communications, dissuasion) » pour 2008, au cours de sa réunion du 30 octobre 2007.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur pour avis.

M. Gilbert Le Bris a considéré que la période était également charnière pour la dissuasion nucléaire. L’évolution du contexte stratégique a conduit dans le passé à l’abandon de la composante terrestre. Il n’est pas envisageable que la commission du Livre blanc fasse l’économie d’une réflexion sur l’utilité du maintien de la composante aérienne. Un choix devra donc être effectué en 2008 au regard de l’amélioration du potentiel de la composante océanique, des scénarios d’utilisation potentielle et de l’état des finances publiques.

Le président Guy Teissier a reconnu qu’il s’agit d’un véritable débat. Il a en outre indiqué qu’en réponse aux nombreux souhaits d’une meilleure association de la commission de la défense aux travaux d’élaboration du Livre blanc, une audition de son président, M. Jean-Claude Mallet, serait organisée prochainement. Elle sera suivie par des réunions permettant d’entendre différents responsables civils et militaires participant à ce travail de prospective.

Le rapporteur s’en étant remis à la sagesse de la commission, celle-ci a donné un avis favorable au programme « Équipement des forces (espace, communications et dissuasion) ».

*

La commission de la défense a ensuite donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mission « Défense ».

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET RENCONTRÉES

• Déplacement au centre de Bruyères-le-Châtel, direction des applications militaires du CEA, le mardi 18 septembre 2007 :

– M. Daniel Verwaerde, directeur des applications militaires ;

– Mme Edwige Bonnevie, directeur adjoint des applications militaires ;

– M. François Geleznikoff, directeur des armes nucléaires ;

– M. Etienne Pochon, directeur d’objectifs transversaux « sécurité et non prolifération » ;

– M. Patrick Donguy, directeur du contrôle de gestion ;

– M. Christophe Béhar, directeur du centre CEA/DAM – Île de France ;

– M. Pierre Leca, chef du département sciences de la simulation et de l’information ;

– M. Jean-Philippe Verger, chef du service conception et garantie des armes au sein du département conception et simulation des armes ;

– M. Bruno Feignier, chef du département analyse et surveillance de l’environnement ;

– M. Jean-Pierre Vigouroux, responsable des relations avec le Parlement.

• État-major des armées :

 le mardi 25 septembre 2007 :

– contre-amiral Philippe Arnould, chef de la division espace et programmes interarmées, et colonel Inaky Garcia-Brotons, adjoint espace.

 le mercredi 26 septembre 2007 :

– contre-amiral Henri-Georges Mouton, chef de la division forces nucléaires, capitaine de vaisseau Vincent Larnaudie-Eiffel, officier de cohérence opérationnelle du système de force dissuasion pour la composante océanique, et M. l’ingénieur en chef de l’armement Jérôme Avrin, adjoint finances.

• État-major de la marine, le mardi 9 octobre 2007 :

– amiral Alain Oudot de Dainville, chef d’état-major de la marine ;

– capitaine de vaisseau Olivier Beauchesne, chargé d’études au cabinet du chef d’état-major de la marine ;

– capitaine de vaisseau Éric Dupont, chef du bureau Cœlacanthe.

• CNES, le mercredi 10 octobre 2007 :

– M. Yannick d’Escatha, président directeur général du CNES ;

– M. Stéphane Janichewski, directeur général délégué et directeur des programmes et des relations internationales ;

– M. Laurent Germain, directeur financier ;

– M. Pierre Tréfouret, directeur de la communication externe ;

– Mme Elisabeth Moussine-Pouchkine, chargée des relations avec le Parlement.

• MBDA, le mardi 23 octobre 2007 :

– M. Antoine Bouvier, président de MBDA ;

– M. Patrick Tramier, directeur groupe des secteurs de produit ;

– général Gérard Resnier (2S), conseiller défense du président ;

– Mme Patricia Chollet, chargée des relations avec le Parlement.

• EADS Astrium Satellites, le mercredi 24 octobre 2007 :

– M. Bruno Le Stradic, directeur de l’observation de la terre & science ;

– M. Pierre Faucoup, chef de la division des programmes de satellites militaires.

© Assemblée nationale

1 () National security and nuclear weapons : maintaining deterrence in the 21st century.

2 () L’avenir de la dissuasion nucléaire du Royaume-Uni : le contexte stratégique, 20 juin 2006.

3 () Le Royaume-Uni ne réalise pas lui-même les corps de rentrée de ses têtes.

4 () Dont le remplacement a pris du retard, les satellites AIRSS (Alternative Infra Red Space System) devant être lancés à partir de 2008 et non de 2006.

5 () L’Union européenne bénéficie de l’antériorité de la réservation des fréquences auprès de l’Union internationale des transmissions (UIT).