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N° 280

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189)

TOME IV

DÉFENSE

PREPARATION ET EMPLOI DES FORCES

FORCES TERRESTRES

PAR M. Jean-Louis BERNARD,

Député.

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Voir le numéro : 276 (annexe n° 10)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. —  UN BUDGET D’ATTENTE 7

A. UN CHANGEMENT DE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE 7

B. UN BUDGET STABLE MALGRÉ UNE PRESSION SUR LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT 8

1. Les rémunérations et charges sociales 9

2. Un budget de fonctionnement hors loi de programmation militaire fortement contraint 10

a) Le fonctionnement courant 10

b) Les crédits consacrés aux munitions 11

3. Un achèvement partiel des investissements prévus par la loi de programmation militaire 11

C. LE DÉVELOPPEMENT DE LA GESTION PAR LA PERFORMANCE 12

1. Le commissariat de l’armée de terre 12

2. Un exemple d’interarmisation 13

3. Le pilotage par la performance 14

II. —  DES EFFECTIFS EN LÉGÈRE BAISSE 17

A. DONNÉES GÉNÉRALES 17

B. L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS MILITAIRES PAR CATÉGORIE 18

1. Les officiers 18

2. Les sous-officiers 19

3. Les militaires du rang 20

a) Les engagés volontaires de l’armée de terre (EVAT) 20

b) Les volontaires de l’armée de terre (VDAT) 21

c) La fidélisation des militaires du rang 21

4. Les réserves 23

5. Les civils 24

III. —  LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS 27

A. ASPECTS GÉNÉRAUX 27

B. UNE SITUATION ALARMANTE POUR L’AVIATION LÉGÈRE DE L’ARMÉE DE TERRE 29

C. LES AUTRES PRINCIPAUX MATÉRIELS 30

IV. —  L’ACTIVITÉ DES FORCES 33

A. UNE ARMÉE FORTEMENT SOLLICITÉE TANT EN OPÉRATIONS EXTÉRIEURES QU’EN OPÉRATIONS INTÉRIEURES 33

1. Le contrat opérationnel de l’armée de terre 33

2. Les opérations extérieures 34

3. Les opérations intérieures 37

B. L’ENTRAÎNEMENT DES FORCES DE PLUS EN PLUS CONTRAINT 38

1. Des capacités d’entraînement et de formation remarquables 38

2. Une réduction prévisible de l’activité des forces 39

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL BRUNO CUCHE, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE TERRE 41

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 53

INTRODUCTION

En 2007, l’armée de terre déploie hors du territoire métropolitain plus de 17 000 personnels dont 8 631 en opérations. Placées sous mandat de l’ONU, de l’OTAN, de l’Union européenne ou sous mandat national, les forces projetées assurent des missions de stabilisation, de maintien de la paix ou de formation des armées nationales. Dans les collectivités d’Outre-mer, ces troupes apportent également un soutien indispensable aux différentes autorités civiles et remplissent des missions de sécurité civile ou participent à la défense et à la sécurité du territoire. L’augmentation constante du nombre mais aussi de la complexité des tâches assignées à l’armée de terre nécessite une adaptation permanente de ses militaires mais aussi de ses matériels qui sont fortement sollicités malgré une moyenne d’âge souvent élevée.

Les effectifs de l’armée de terre diminuent dans la mesure où elle participe à l’effort global de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux. En contrepartie de cet effort, les personnels bénéficient d’une amélioration sensible de leurs conditions de travail : les crédits du plan d’amélioration de la condition militaire augmentent significativement et les personnels civils bénéficient d’une revalorisation de leurs rémunérations. Les mesures de fidélisation sont par ailleurs étendues, en particulier pour les militaires du rang. Le plan « égalité des chances » annoncé par le ministre de la défense devrait d’ailleurs faciliter l’accès aux métiers de la défense pour les jeunes issus de milieux défavorisés mais aussi favoriser la promotion au mérite au sein du ministère.

Malgré une réduction du budget de fonctionnement courant, les crédits de l’armée de terre apparaissent globalement stabilisés. En ce qui concerne les investissements, la loi de programmation militaire a permis d’améliorer la disponibilité de certains équipements mais le report de commandes conséquentes, notamment en termes d’aéromobilité ou de transport terrestre, fait aujourd’hui peser de fortes incertitudes sur l’avenir des capacités opérationnelles de l’armée de terre. Le projet de loi de finances pour 2008 ne fait aucun choix de long terme, dans l’attente des conclusions du Livre blanc et des choix stratégiques qui en découleront. La réorganisation annoncée des implantations de l’armée de terre devrait d’ailleurs permettre d’entamer une réflexion plus profonde sur ses modalités d’emploi, sur son format et sur ses moyens.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2007, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 39 réponses étaient parvenues, soit un taux de 100 %.

I. —  UN BUDGET D’ATTENTE

L’armée de terre dispose en 2008, tous programmes confondus, d’un budget en très légère progression par rapport à 2007 avec 9,195 milliards d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et 9,2 milliards d’euros de crédits de paiement (CP). Les arbitrages budgétaires permettent de maintenir les efforts engagés durant les dernières années mais n’opèrent aucun choix ni de moyen ni de long terme, dans l’attente des conclusions du Livre blanc et de la prochaine loi de programmation militaire. Le périmètre budgétaire de l’armée de terre semble stabilisé même si la présentation budgétaire évolue, en particulier pour les équipements qui sont désormais présentés par système de forces et non par armées.

A. UN CHANGEMENT DE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE

Les crédits alloués à l’armée de terre sont regroupés au sein de deux programmes : le programme 178 « Préparation et emploi des forces » et le programme 146 « Équipement des forces ». Le premier comprend une sous-action n° 2 « Préparation et emploi des forces terrestres » alors que le second privilégie, à compter de 2008, une approche interarmées.

• Le périmètre du programme 178 apparaît donc globalement stabilisé et permet d’établir des comparaisons pertinentes pour les crédits de rémunération et de fonctionnement courant. L’action 2 s’organise en 12 sous-actions qui concourent aux quatre fonctions nécessaires à la préparation des forces terrestres.

— La fonction « Commandement » regroupe non seulement les états-majors mais aussi les commissions et les inspections.

— La fonction « Activités » rassemble 5 sous-actions décrivant les moyens attribués aux forces opérationnelles de l’armée de terre pour atteindre les niveaux de préparation opérationnelle fixés par le chef d’état-major des armées et dont les grands principes ont été arrêtés par la loi de programmation militaire 2003-2008. Elles intègrent l’organisation et la planification des activités selon un cycle qui alterne périodes de préparation opérationnelle et périodes d’alerte ou de projection.

— La fonction « Ressources humaines » retrace les actions de formation, de recrutement, de gestion, de fidélisation et de reconversion des personnels de l’armée de terre. Ses deux sous-actions cherchent à répondre qualitativement et quantitativement aux besoins de l’armée.

— La fonction « Soutien » est déclinée en quatre sous-actions ; les deux premières concernant l’entretien des matériels terrestres et l’entretien des matériels aéronautiques ; la troisième assurant le « Soutien de l’homme » qui comprend la gestion de la solde, l’habillement ou l’alimentation ; la quatrième regroupant des unités de soutien technique et des organismes à vocation sociale.

L’architecture du programme 146 est en revanche profondément bouleversée puisqu’elle abandonne un découpage en cinq composantes, avec une action spécifique pour chaque armée et privilégie désormais une approche transversale selon une logique de capacités en utilisant le référentiel des systèmes de forces. Ce changement permet de faire un lien direct avec le référentiel de programmation militaire et la future loi de programmation militaire, mais il rend plus difficile le suivi des programmes d’armement propres à chaque armée, même si les crédits de 2007 sont présentés dans la nouvelle nomenclature par destination.

• En 2007, les crédits d’équipement étaient présentés en 11 grandes fonctions opérationnelles et 21 sous-actions identifiant huit programmes d’armement. Les fonctions opérationnelles sont réparties en 2008 au sein des systèmes de force regroupés dans les actions numérotées de 6 à 10 : dissuasion, commandement et maîtrise de l’information, projection-mobilité-soutien, engagement et combat, et protection et sauvegarde. Les programmes phares de l’armée de terre sont concentrés dans la huitième action pour le NH 90, la rénovation du Cougar et la modernisation des porteurs polyvalents terrestres (camions) et dans la neuvième action pour le Tigre, la rénovation des AMX 10 RC et les équipements Félin.

La onzième action « Préparation et conduite des opérations d’armement » comprend une sous-action 11-93 « Soutien – expérimentation Terre » qui prend en charge les crédits de rémunération et de charges sociales ainsi que les crédits de fonctionnement des différents organismes chargés principalement des évaluations technico-opérationnelles relevant de la responsabilité du chef d’état-major de l’armée de terre avant l’admission au service opérationnel des matériels.

B. UN BUDGET STABLE MALGRÉ UNE PRESSION SUR LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT

Malgré les difficultés de comparaison liées au changement de nomenclature budgétaire, les crédits attribués à l’armée de terre restent globalement stables avec toutefois des variations nettes en fonction de la nature des dépenses. Les dépenses de personnel bénéficient d’un effort de revalorisation et d’amélioration de la condition civile et militaire alors que les dépenses de fonctionnement sont fortement contraintes notamment en ce qui concerne le fonctionnement courant. Les crédits d’investissement permettent de préserver l’essentiel des grands programmes sans que l’ensemble des programmes prévus par la loi de programmation militaire ne soient achevés.

Le tableau suivant récapitule pour chaque titre l’évolution des crédits de l’armée de terre.

Crédits de l’armée de terre

(en millions d’euros courants)

Programme

Titre

AE

CP

PLF 2007

PLF 2008

Évolution

PLF 2007

PLF 2008

Évolution

178

Titre 2 (1)

7 308,00

7 402,00

+ 1,3 %

7 308,00

7 402,00

+ 1,3 %

Titre 3

1 568,00

1 589,00

+ 1,3 %

1 543,00

1 555,00

+ 0,8 %

Titre 5

197,00

148,00

- 24,9 %

168,00

195,00

+ 16,1 %

Titre 6

0,38

0,97

+ 155,3 %

0,38

0,97

+ 155,3 %

Sous-total

9 073,00

9 143,00

+ 0,8 %

9 019,00

9 156,00

+ 1,5 %

146

Titre 2 (1)

49,70

48,30

- 2,8 %

49,70

48,30

- 2,8 %

Titre 3

4,70

3,90

- 17,0 %

4,50

4,00

- 11,1 %

Sous-total

54,40

52,20

- 4,0 %

54,20

52,30

- 3,5 %

TOTAL

9 127,00

9 195,00

+ 0,7 %

9 073,00

9 208,00

+ 1,5 %

(1) civils et pensions inclus.

Source : ministère de la défense.

1. Les rémunérations et charges sociales

• Les dépenses de titre 2, c’est-à-dire les rémunérations et les charges sociales, augmentent de 92,6 millions d’euros pour les deux programmes. La réorganisation de la section technique de l’armée de terre explique que les crédits du programme 146 diminuent de 1,4 million d’euros. Le plan d’amélioration de la condition militaire et les mesures catégorielles justifient une hausse des crédits du programme 178, bien que ses effectifs diminuent dans le même temps.

L’armée de terre participe au non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux : le plafond d’emplois autorisés pour 2008 est amputé de 4 674 équivalents temps plein (ETP), soit une baisse de 3,1 %, cet effort permettant d’économiser 25 millions d’euros. En cours de gestion, des économies avaient d’ores et déjà été réalisées en 2007. Ajoutées aux transferts entre les programmes de la mission, elles expliquent la suppression de 302,5 ETP militaires et de 106 ETP civils. Ces modifications sont intégrées au plafond ministériel d’emplois autorisés (PMEA) pour 2008, les mesures nouvelles d’économie ne concernant donc que 900 ETP militaires et 134 ETP civils.

Le plan de modernisation des soutiens de l’armée de terre, matériel et commissariat, a par ailleurs conduit à la fermeture de trois établissements du commissariat et à la réorganisation de treize formations, ces mesures ayant concerné entre 2005 et 2008 382 ETP militaires et 940 ETP civils.

• Conformément aux recommandations du haut comité d’évaluation de la condition militaire, les crédits du plan d’amélioration de la condition militaire ont été significativement augmentés en 2008. Plus de 12 millions d’euros sont consacrés à la revalorisation de l’indemnité pour charges militaires, le fonds de consolidation de la professionnalisation reçoit un million d’euros de crédits supplémentaires. Par ailleurs, les grilles indiciaires des sous-officiers subalternes sont revalorisées à hauteur de 23 millions d’euros. Les personnels civils bénéficient de mesures similaires à hauteur de 3 millions d’euros.

Le tableau suivant récapitule l’ensemble des mouvements de crédits de titre 2 prévus pour 2008.

Mesures nouvelles pour le titre 2 - PLF 2008

(en millions d’euros)

Mesures d’ajustement général (notamment revalorisation du point d’indice et des bas salaires)

+ 24

Mesures catégorielles

+ 39

Plan d’amélioration de la condition militaire

+ 12

Fonds de consolidation de la professionnalisation

+ 1

Plan catégoriel civil

+ 3

Grilles indiciaires

+ 23

Réductions d’effectifs

- 25

Transferts (mesures techniques d’ajustement entre les programmes de la mission)

+ 64

Total des mesures nouvelles

+ 102

Source : ministère de la défense.

 

2. Un budget de fonctionnement hors loi de programmation militaire fortement contraint

a) Le fonctionnement courant

Globalement, les CP du titre 3 sont en augmentation de 25 millions d’euros courants. Il convient toutefois de noter que si les crédits du périmètre financier de la loi de programmation militaire, majoritairement consacrés au maintien en condition opérationnelle des équipements, augmentent, les crédits hors loi de programmation militaire (LPM) connaissent une baisse de 23,5 millions d’euros sans tenir compte de la non-actualisation. Les transferts de crédits vers d’autres programmes, notamment l’externalisation des véhicules de la gamme commerciale, expliquent la baisse de 12 millions d’euros, les transferts vers le titre 2 justifient une réduction de 6 millions d’euros et les économies structurelles permettent d’économiser 7 millions d’euros. Outre ces économies, l’armée de terre doit augmenter de 5 millions d’euros sa prestation compensatrice versée à la SNCF.

En tenant compte de l’actualisation, l’armée de terre voit ainsi son budget de fonctionnement amputé de 34,7 millions d’euros, soit une baisse de 4,5 %. Les réductions de crédits de fonctionnement imposées au cours des deux dernières années équivalent au budget de fonctionnement de 13 régiments. À moins de renoncer à entretenir, même a minima, les infrastructures, il ne sera pas possible de maintenir avec une telle enveloppe budgétaire l’activité des troupes au même niveau qu’en 2007. Les 112 millions consacrés à l’activité des forces en 2008 ne garantiront que 88 jours d’activités au lieu des 100 jours fixés par la loi de programmation militaire, même si des apports de gestion devraient permettre de minimiser cette baisse. Alors que l’entraînement des unités apparaît de plus en plus comme une condition de leur opérabilité, il ne pourra pas échapper à des restrictions et générera de fortes perturbations en cours de gestion avec l’annulation d’exercices prévus, faute de crédits.

Outre les implications opérationnelles, il ne semble pas concevable de voir les conditions de vie des militaires se dégrader au quotidien, ce qui serait en contradiction flagrante avec les efforts faits au nom du plan d’amélioration de la condition militaire.

b) Les crédits consacrés aux munitions

La réduction des crédits de fonctionnement risque de peser plus fortement encore sur les crédits consacrés aux munitions. Alors que les unités font d’ores et déjà état de contraintes fortes pour les munitions d’exercice mais également pour les munitions réelles, toute nouvelle baisse des crédits aurait des conséquences sur les capacités opérationnelles des troupes projetées mais aussi sur la sécurité de leurs personnels. Les munitions en fin de vie ou de moindre qualité ne donnent pas les mêmes garanties et ne permettent pas de tirer à la même distance.

L’absence de munitions à blanc fausse les entraînements et contraint à des simulations peu convaincantes. Plus préoccupante est la situation en opérations extérieures (OPEX) : les militaires français aujourd’hui engagés en Afghanistan ne sont pas suffisamment dotés de munitions pour pouvoir être engagés dans des zones de conflit de plus haute intensité.

Par ailleurs, une réflexion plus globale sur les munitions doit être menée, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement, l’armée de terre faisant état de certaines difficultés à trouver des industriels français à même de lui fournir des munitions de petits calibres, mais aussi en ce qui concerne la gestion des stocks, certaines munitions étant arrivées en fin de vie sans qu’une solution de recyclage soit proposée.

3. Un achèvement partiel des investissements prévus par la loi de programmation militaire

Les AE de titre 3 et de titre 5 entrant dans le champ de la loi de programmation militaire progressent de 32 millions d’euros entre 2007 et 2008 pour atteindre 961 millions d’euros. Ces AE sont essentiellement consacrées au maintien en condition opérationnelle qui mobilise 63 % de la ressource, 38 % pour le matériel terrestre et 25 % pour le matériel aérien. Les acquisitions ne représentent que 144 millions d’euros, soit 15 %.

Les CP augmentent pour leur part de 11 %, soit 107 millions d’euros pour atteindre 1, 009 milliard d’euros. Cette hausse permet de financer les programmes engagés les années précédentes et qui commencent à être livrés comme les premiers véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI).

Les efforts consentis pour les grands programmes d’armement font oublier que les petits programmes de cohérence opérationnelle ont constamment fait l’objet d’arbitrages défavorables et que les besoins sont encore largement minorés dans le projet de loi de finances : seuls 52 millions d’euros sont disponibles alors que 400 millions d’euros sont nécessaires. Ces programmes ne bénéficient certes pas de la même visibilité que les grands programmes mais ils sont essentiels car ils assurent l’opérationnalité des équipements. Les premiers matériels étant livrés, les conséquences de ces réductions ne sont pas encore visibles mais apparaîtront avec force lors de la mise en service opérationnelle. Il sera alors impossible de rattraper le retard accumulé et cela impactera nécessairement sur les capacités opérationnelles des matériels.

C. LE DÉVELOPPEMENT DE LA GESTION PAR LA PERFORMANCE

1. Le commissariat de l’armée de terre

• Héritier de l’intendance militaire et créé en 1984, le commissariat de l’armée de terre (CAT) est en charge du soutien logistique opérationnel et de la gestion administrative, financière et juridique des unités de l’armée de terre.

Sur le plan financier, il met en place les crédits de fonctionnement dans les trésoreries des formations à l’exception des dépenses relevant d’un autre service des armées ou des dépenses de rémunération (traitements et indemnités) qui sont traitées par cinq centres spécialisés. Les unités du commissariat pilotent également l’ensemble des procédures de marchés publics, de l’appel d’offre ou de la mise en concurrence au paiement comptable des services faits ainsi que l’ensemble des marchés de transport multimodal ou de surface.

Sur le plan administratif, le CAT rédige les instructions pour la mise en œuvre des textes législatifs et réglementaires relatifs aux droits individuels et instruit les contentieux de son domaine devant la commission de recours des militaires et le contentieux général devant les juridictions administratives. Il met également au point les instructions relatives au fonctionnement des formations et organismes et en surveille l’application.

En matière de soutien opérationnel, les établissements spécialisés du commissariat de l’armée de terre (ESCAT) procèdent aux études, à l’achat, au stockage et à la distribution des effets et équipements de combat ainsi que des matériels de vie en campagne dont ils assurent par ailleurs la maintenance, les autres besoins faisant l’objet d’achats directs. En outre, le service d’édition et d’impression de l’armée de terre lui est rattaché.

• La direction centrale du commissariat de l’armée de terre (DCCAT) assure des fonctions de pilotage, de synthèse et de réglementation générale. Elle comprend cinq sous-directions respectivement en charge des ressources humaines, de l’administration générale et de la formation, du budget et de la tenue des comptes, de la logistique et des systèmes d’information. Le commissariat emploie à ce jour plus de 6 700 personnels dont 73 % de civils qui sont recrutés par la direction des ressources humaines du ministère et mis à la disposition des services du commissariat. Parmi les 1 905 militaires, outre les officiers du corps technique et administratif de l’armée de terre, les officiers des armes et les sous-officiers et militaires du rang ayant une spécialité « commissariat », on dénombre surtout 490 commissaires désormais recrutés par un concours spécifique et affectés exclusivement dans les services du commissariat. Par ailleurs, malgré des efforts de gestion prévisionnelle des effectifs, le commissariat est conduit à employer des officiers sous contrat pour compenser certaines difficultés de recrutement essentiellement liées à la spécificité des missions.

2. Un exemple d’interarmisation

Le commissariat de l’armée de terre s’est engagé dans une politique résolue d’interarmisation tant au niveau du recrutement et de la formation que de la mutualisation des compétences et des services.

Le recrutement des commissaires se fait depuis 1984 par la voie exclusive d’un concours commun aux armées de l’air, de terre et de la marine, alors que les commissaires étant auparavant sélectionnés parmi les officiers des différents corps d’armes. Avant même de commencer leur formation, les candidats admis au concours commun choisissent leur armée d’affectation et intégrent soit l’école de Montpellier pour l’armée de terre, celle de Brest pour la marine ou celle de Salon-de-Provence pour l’armée de l’air. Ce système conduit à multiplier les structures d’accueil et de formation alors que seuls une quarantaine de commissaires sont recrutés tous les ans. Pour améliorer la mutualisation des formations, une formation interarmées de huit semaines a été mise en place pour l’ensemble des élèves-commissaires. Organisée en 2007 par la marine, elle aura lieu en janvier 2008 au sein de l’école de l’armée de terre, à Montpellier. L’effort réalisé pour la formation initiale a été prolongé en 2007 avec la création d’une formation supérieure commune au sein du collège interarmées de défense (CID). Désormais, tous les officiers sont préparés à occuper un poste de chef de bureau ou d’adjoint dans une administration centrale ou un état-major sans tenir compte de leur armée d’origine.

Sur le plan opérationnel, l’interarmisation est de principe outre-mer avec les directions du commissariat à vocation interarmées qui établissent notamment des instructions communes à l’ensemble des services. En opérations extérieures, la même logique prévaut même si le commissariat de l’armée de terre reste souvent la structure de base, dans la mesure où l’essentiel des troupes projetées sont issues de l’armée de terre. La généralisation de ces bonnes pratiques se heurte à plus de résistance en métropole malgré des avancées significatives, même si la moitié des missions du CAT se fait au profit d’autres organismes du ministère, notamment dans le domaine du transport ou du contentieux. Le CAT gère entre autres les rémunérations, les formations et les cercles de la gendarmerie ; en outre, son organisation territoriale lui permet de prendre en charge les organismes qui ne sont pas rattachés aux autres armées et à la gendarmerie.

Le « comité de coordination des commissariats » cherche à améliorer cette mutualisation et cette rationalisation des moyens. Les neuf sous-comités techniques devraient proposer des pistes concrètes tenant compte des spécificités de chaque armée et de chaque secteur d’activité. Au sein de l’état-major des armées a été parallèlement créé un bureau spécialisé qui pourrait constituer à terme le noyau d’une direction centrale interarmées des commissariats. Il semble en effet tout à fait pertinent que les commissariats aujourd’hui intégrés aux différentes armées soient regroupés en une entité unique mise à disposition des forces selon leurs besoins sur le modèle du service de santé des armées.

3. Le pilotage par la performance

Organisme financier de l’armée de terre, le commissariat a dû profondément modifier ses structures budgétaires et comptables pour répondre aux nouvelles exigences de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Au-delà des difficultés initiales liées au nouveau découpage en programmes et budgets opérationnels de programme (BOP), la direction centrale s’est engagée dans une démarche ambitieuse de pilotage par la performance et de contrôle de gestion infra-annuel.

Le CAT s’apprête ainsi à mettre en place un contrôle interne comptable et à créer un service d’audit interne comptable dans tous les domaines et sur tous les organismes relevant de sa compétence. Ce service remplacera et dépassera ses activités traditionnelles de vérification des comptes et de surveillance administrative. Dans ce cadre, une attention particulière est portée aux systèmes d’information : le commissariat s’insère dans le processus de pilotage et de contrôle de gestion du ministère (PITAGORE) qui remplace le système actuel basé sur la transmission électronique d’indicateurs excel. Il anticipe également la modernisation des circuits comptables des administrations centrales. Un nouvel outil informatique de gestion budgétaire et comptable intégrant les nouveautés induites par la LOLF a été installé auprès des ordonnateurs secondaires en métropole. Les applications budgétaires propres à l’outre-mer ou aux opérations extérieures ont également intégré les nouvelles dispositions organiques, notamment en ce qui concerne les travaux de mandatement. Ces travaux de modernisation ont été réalisés en 2005 de manière à valider les procédures mises en œuvre avant l’ouverture de la gestion 2006. Dans le même temps, d’importants travaux sont en cours pour la mise en place du logiciel unique à vocation interarmées de la solde dit « Louvois » qui devrait aboutir dans le courant de l’année 2009.

À terme, l’ensemble de ces systèmes pourra être rattaché au système interministériel d’information et de gestion comptable Chorus. Au vu de la complexité et de la diversité des systèmes comptables propres à chaque ministère voire à chaque service, le système Chorus ne devrait être opérationnel qu’à l’horizon de 2012 ou de 2014. Il reste que le système comptable commun des finances publiques est mal adapté au fonctionnement des unités et que le maintien de procédures d’exception au profit des armées s’impose.

Ces systèmes assurent une remontée rapide et complète d’informations permettant la tenue concomitantes des trois comptabilités voulues par la LOLF : une comptabilité patrimoniale, une comptabilité de caisse et une comptabilité analytique. Les informations délivrées par ces systèmes d’informations concourent à améliorer l’information à la fois des gestionnaires et des décideurs publics et permettent d’optimiser la gestion infra-annuelle des crédits gérés par le commissariat.

II. —  DES EFFECTIFS EN LÉGÈRE BAISSE

L’armée de terre emploie plus de 50 % des personnels du programme 178 et plus de 34 % des personnels de l’ensemble du ministère. En 2007 les militaires représentent 83% de ses effectifs avec près de 125 000 ETP et les civils 17 % avec 24 500 postes. Elle participe à la politique de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux avec la disparition de 4 674 équivalents temps plein dont 3 428 militaires, soit une baisse globale de plus de 3 %. L’impact de ces mesures sur les catégories reste disparate et ne fait que renforcer les situations préexistantes.

A. DONNÉES GÉNÉRALES

Le plafond d’emplois autorisés pour 2008 baisse de 2,6 % pour les militaires et de 4,9 % pour les civils pour se stabiliser à 145 278 ETP. La baisse des effectifs prend en compte le fait qu’en 2007 près de 3 100 ETP n’ont pas été pourvus, même si pour certaines catégories ces décalages sont liés à des difficultés de recrutement et ne traduisent nullement une sur-dotation initiale. Seule une analyse par catégorie permet d’appréhender l’impact réel de ces réductions d’effectifs. Le tableau suivant récapitule l’évolution générale des effectifs de l’armée de terre.

Effectifs de l’armée de terre*

 

(en équivalents temps plein (ETP))

 

2007

2008

Évolution

Officiers

13 520

13 329

- 191

Sous-officiers

42 637

41 321

- 1 316

Militaires du rang

66 438

64 764

- 1 674

Volontaires

1 896

1 649

- 247

Sous-total des militaires

124 491

121 063

- 3 428

Catégorie A

1 314

1 073

- 241

Catégorie B

2 883

2 939

+ 56

Catégorie C

9 630

9 456

- 174

Ouvriers de l’État

11 634

10 747

- 887

Sous-total des civils

25 461

24 215

- 1 246

Total Action 2

149 952

145 278

- 4 674

* Les effectifs sont ceux de l’action 2 « préparation et emploi des forces terrestres » du programme 178 « Préparation et emploi des forces ».

Source : ministère de la défense.

   

La réduction de 4 674 ETP qui intervient en 2008 doit être tempérée dans la mesure où elle prend en compte les corrections intervenues en 2007 en cours de gestion : pour les militaires ont été intégrées des mesures d’économies pour 329 équivalents temps plein travaillés (ETPT), la suppression de 788 postes vacants et le transfert de 1 228 ETPT vers d’autres programmes du ministère, soit une diminution en cours de gestion de 2 345 ETPT. La gestion des personnels civils a permis des mesures d’économie pour 224 ETPT, la suppression de 200 postes vacants et le transfert vers d’autres programmes de 980 personnels, soit une baisse en cours de gestion de 1 404 ETPT.

B. L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS MILITAIRES PAR CATÉGORIE

1. Les officiers

• En 2007, l’armée de terre emploie 13 362 officiers, soit près de 11 % de ses effectifs militaires, ce qui reste globalement conforme aux objectifs de la loi de programmation militaire, même si l’augmentation des départs observée à la fin de 2006 se poursuit pour atteindre un déficit prévisionnel de 158 ETP cette année. Les recrutements, organisés une à deux années à l’avance, ne permettent pas de corriger ces écarts constants à moyen terme. Comme le montre le tableau suivant, malgré une légère amélioration constatée en 2007, la détérioration de la balance entre les départs et les entrées dans le corps des officiers semble se prolonger en 2008.

Recrutement des officiers par origine depuis 2004

 

2004

2005

2006

Prév. 2007 (6)

Prév. 2008 (6)

Direct (1)

206

208

193

196

184

Semi direct (2)

231

213

211

205

217

OAEA (3), OAES (4), rang

225

187

162

181

183

OSC (5)

225

254

240

246

245

Total des recrutements

887

862

806

828

829

Départs

794

848

897

802

890

Solde

+ 93

+ 14

- 91

+ 26

- 61

(1) École spéciale militaire (Saint-Cyr), école polytechnique, école nationale supérieure des arts et métiers, commissariat de l’armée de terre (voie directe), corps technique et administratif (voie directe), à l’exception des places pour la Gendarmerie.
(2) École militaire interarmes (EMIA), commissariat de l’armée de terre (voie semi-

directe). Corps technique et administratif (voie semi directe).
(3) Officier d’active en école d’arme.
(4) Officier d’active en école de spécialité.
(5) Officier sous contrat.

(6)Prévisions arrêtées au 31 mai 2007.

Source : ministère de la défense.

• L’emploi d’officiers sous contrat permet de compenser au moins partiellement ces pénuries, notamment dans certaines spécialités exigeant un haut niveau technique, répondant à la fois au besoin impératif de maintenir l’âge moyen des officiers à un niveau bas et aux exigences propres des structures pyramidales de l’armée de terre adaptées aux besoins du contrat opérationnel.

Le recrutement des officiers sous contrat, issus du milieu civil, s’effectue au titre de deux filières distinctes :

— la filière « encadrement » est ouverte aux titulaires, au minimum, d’un bac + 3 bien que 60 % des dossiers sélectionnés soient ceux de titulaires de diplômes de deuxième cycle (bac + 4 ou bac + 5). Ces officiers sont destinés à occuper des fonctions à caractère opérationnel ;

— la filière « spécialiste » est ouverte aux titulaires au minimum d’un bac + 3. Ces officiers servent dans des domaines de spécialité correspondant à leurs qualifications, parfois dans des unités à vocation opérationnelle.

Les officiers sous contrat constituent, tant sur le plan qualitatif que quantitatif, le complément indispensable de la population des officiers de carrière de l’armée de terre, notamment subalternes, en contribuant à sa richesse et à sa diversité. Par ailleurs, le recrutement d’officiers sous contrat participe de manière significative au maintien du lien entre l’armée et la nation. Ces officiers se révèlent en effet, une fois rendus à la vie civile, des ambassadeurs de l’armée de terre ainsi que des relais d’opinion précieux.

• L’emploi des officiers est fortement lié à leur grade, 58 % des officiers subalternes contre 30 % des officiers supérieurs étant affectés dans les états-majors et les unités à caractère opérationnel. La majorité des 215 officiers généraux assurent des tâches fonctionnelles ou d’administration centrale, seuls 54 d’entre eux servant au sein d’états-majors à caractère opérationnel.

2. Les sous-officiers

Près de 42 000 sous-officiers sont employés dans l’armée de terre en 2007, soit 34 % des personnels militaires. La diminution du nombre de sous-officiers engagée depuis 2003 se prolonge en 2008 avec la suppression de 1 316 ETP par rapport au plafond d’emplois autorisés pour 2007. Les difficultés de recrutement ne parviennent pas à compenser les départs puisqu’en 2007 ne sont recrutés que 2 398 sous-officiers quand 3 122 quittent l’armée de terre et qu’en 2008 les 2460 entrées prévues ne compenseront pas les 3 200 départs.

Évolution du recrutement des sous-officiers

 

2004

2005

2006

Prév. 2007

Prév. 2008

Voie école

1 595

1 297

1 264

1 233

1 294

Voie corps de troupe

1 820

1 156

1 113

1 165

1 166

Total

3 415

2 453

2 377

2 398

2 460

Départs

3 234

3 225

3 105

3 122

3 200

Solde

+ 181

- 772

- 728

- 724

- 740

Source : ministère de la défense.

Les sous-officiers sont sélectionnés pour moitié parmi les militaires du rang et par la voie du concours d’entrée dans les écoles de sous-officiers. Pour les civils, le taux de sélection varie entre 21 et 26 % depuis 2006. La cible de recrutement fixée en 2005 à 2 500 sous-officiers par an est maintenue et permet, tout en stabilisant le plan de charge des écoles de formation, de garantir l’équilibre de la gestion des sous-officiers sans pour autant compenser l’intégralité des départs prévus.

3. Les militaires du rang

Les 65 000 militaires du rang et les quelque 2 000 volontaires qui constituent la principale catégorie de l’armée de terre représentent 55 % des militaires.

a) Les engagés volontaires de l’armée de terre (EVAT)

Depuis que l’armée de terre a atteint ses objectifs de fin de professionnalisation, le volume global de militaires du rang recrutés sur une année s’est stabilisé au niveau nécessaire au remplacement des départs par fin de contrat ou par recrutement comme sous-officier.

En 2006, l’armée de terre a atteint ses effectifs cibles. Les prévisions au 30 juin permettent de penser que tel sera également le cas pour 2007.

Bilan du recrutement et des départs des EVAT

 

2004

2005

2006

2007 (3)

Engagés volontaires initiaux (1)

6 877

8 386

7 697

4 057

Engagés volontaires ultérieurs (2)

1 510

1 115

1 398

707

Total des recrutements

8 387

9 501

9 095

4 764

Total des départs

8 569

8 265

10 321(4)

9 943

Dont EVAT admis dans le corps des sous-officiers

1 823

1 156

1 113

1 151

Écart entre les recrutements et les départs

- 182

1 236

- 1 226

+ 5179 

(1) Le recrutement initial se fait à partir du secteur civil.

     

(2) Le recrutement ultérieur se fait à partir du personnel appelé ou parmi les VDAT.

 

(3) Données arrêtées au 30 juin 2007 pour le recrutement et au 31 mai 2007 pour les départs.

(4) Les départs incluant 1 343 EVAT temporairement indisponibles pour une longue période (maternité, longue maladie…)

Source : ministère de la défense.

       

Le taux de sélection des EVAT reste faible puisque plus d’un candidat sur deux signe effectivement un contrat d’engagement. Le niveau scolaire des candidats, en constante augmentation, semble se stabiliser, 62,4 % des candidats retenus en 2006 détenant le brevet des collèges, un CAP ou un BEP. Seuls 27,1 % ont atteint au moins la classe de terminale. L’élévation du niveau scolaire favorise les perspectives de carrière notamment par l’accès au corps des sous-officiers par la voie semi-directe. Le plan « égalité des chances » annoncé par le ministre de la défense devrait renforcer ces possibilités de promotion interne puisque, dans le cadre d’un projet professionnel, les personnels du ministère qui ne sont pas titulaires du baccalauréat pourront intégrer un lycée militaire, préparer et présenter cet examen.

b) Les volontaires de l’armée de terre (VDAT)

L’effectif de volontaires de l’armée de terre continue de diminuer avec 1 649 ETP prévus dans le projet de loi de finances, soit une diminution de 13 % par rapport au plafond d’emplois autorisés pour 2007. Les recrutements de VDAT sont en légère augmentation depuis 2006 pour compenser la transformation de nombreux contrats en engagements volontaires : en 2006, 1 398 VDATont ainsi changé de statut, expliquant 71 % des départs annuels.

c) La fidélisation des militaires du rang

• Au terme du premier contrat de cinq ans (1), l’armée de terre cherche à renouveler 70 % des contrats des engagés volontaires avec un objectif d’engagement moyen de huit ans. Si la durée moyenne évolue favorablement, le taux de dénonciation au cours de la période probatoire des EVAT, c’est-à-dire au cours des six premiers mois de service, est en augmentation régulière. Elle s’explique par une diminution du vivier de recrutement et une augmentation de la concurrence due à une conjoncture économique plus favorable. Par ailleurs, les contraintes du métier de soldat professionnel, disponibilité et rigueur, limitent l’attrait de cette carrière pour une partie de la jeunesse.

• Les crédits alloués en 2008 au plan d’amélioration de la condition militaire permettront de prolonger les efforts engagés cette année et contribueront à valoriser les missions mais aussi les carrières de engagés volontaires. Trois types de mesures ont en effet été prises en janvier 2007 pour fidéliser les engagés et réduire le taux des départs :

— la durée des contrats a été assouplie. Pour un contrat de cinq ans, il est possible de s’engager soit en une seule fois soit en deux fois, avec deux contrats, l’un de trois ans, l’autre de deux ans. À l’issue de ces cinq ans, les engagés peuvent signer un nouveau contrat de six ans ou signer successivement deux contrats de trois ans ;

— la lisibilité du parcours professionnel a été renforcée en associant à chaque étape un grade, une formation et une reconnaissance de l’expérience acquise que ce soit au travers d’un certificat militaire, d’un certificat technique ou d’un brevet ;

— des mesures financières ont enfin permis, par exemple, d’attribuer l’indemnité de départ du personnel non-officier (IDPNO) aux caporaux chefs non autorisés à servir au-delà de 11 ans de service. A également été créé un échelon exceptionnel attribué aux caporaux-chefs après 22 ans de service.

Il est à noter que la fidélisation des EVAT s’avère moins difficile une fois passé le cap de cinq ans de service. En effet, l’immense majorité de ceux qui ont servi jusqu’à 11 ans souhaitent ensuite poursuivre jusqu’à 17,5 ans de service en moyenne.

• La durée moyenne des services des engagés, qui s’était stabilisée autour de 5 ans et 11 mois en 2005, augmente progressivement pour atteindre 6 ans et 5 mois en 2006.

Durée moyenne de service des EVAT(1)

(1) Engagés volontaires de larmée de terre.


Source : ministère de la défense.

4. Les réserves

• La loi n° 2006-449 du 18 avril 2006 a modifié l’organisation de la réserve militaire et du service de défense prévue par la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999. Elle a amélioré le dispositif de la réserve militaire, d’une part en adaptant les conditions d’emploi de la réserve opérationnelle aux besoins des forces armées, d’autre part en facilitant l’accès à la réserve citoyenne. Le nombre de réservistes des forces terrestres demeure inférieur aux besoins puisque l’objectif intermédiaire est de 22 050 réservistes en 2008 et de 29 000 en 2012. L’objectif de 16 800 réservistes au 31 décembre 2005 n’a pas été tenu.

Le tableau ci-après dresse un bilan des engagements à servir dans la réserve (ESR) dans l’armée de terre souscrits pour les années 2003 à 2006, bilan arrêté au 31 décembre de chaque année, avec les objectifs pour 2007 et 2008.

Réserves de l’armée de terre

   

(en nombre d’engagements à servir dans la réserve (ESR))

 

2003

2004

2005

2006

2007*

Objectif 2008

Officiers

5 115

5 368

5 387

5 062

5 100

5 875

Sous-officiers

5 186

5 735

5 991

5 900

6 000

7 828

Militaires du rang

3 003

4 336

5 107

6 040

6 900

9 296

Total

13 304

15 439

16 485

17 002

18 000

21 999

* Les chiffres de l’année 2007 sont à atteindre au 31 décembre.

Source : ministère de la défense.

• Le nombre moyen de jours d’activité des réservistes est en constante augmentation depuis 2004 et devrait atteindre 24 jours en 2007. Il regroupe toutefois des situations très diverses, certains réservistes totalisant même 120 jours d’activité en opérations extérieures. La publication du décret d’application le 7 octobre (2) dernier facilitera l’emploi de longue durée des réservistes notamment dans le cadre d’opérations internationales puisque, conformément à son article 10, la durée d’emploi d’un réserviste peut être portée à 210 jours lorsque son emploi « présente un intérêt de portée nationale ou internationale ».

De nombreux réservistes ont déjà été engagés à titre individuel en opérations extérieures, mais, pour la première fois en 2007, l’armée de terre projette un peloton exclusivement constitué de réservistes en Bosnie pour prendre en charge des opérations de chargement, d’acheminement et de déchargement de containers entre Mostar et le port de Ploce. Le peloton est constitué de personnels de la 1re brigade logistique qui sont placés sous les ordres du commandement de la force logistique terrestre.

5. Les civils

Au 31 mai 2007, l’armée de terre emploie 24 472 personnels civils titulaires et contractuels, le plafond ministériel d’emplois autorisés pour 2007 étant fixé à 25 749 ETP. Compte tenu des recrutements qui doivent intervenir avant la fin de l’année, l’armée de terre enregistrera un déficit de 811 personnels civils, l’écart se concentrant sur les personnels de catégorie A. Pour cette catégorie, le déficit de 273 civils s’explique par la vacance de 120 emplois et par l’absence de recrutement pour 153 ETP, faute de candidats ; les emplois proposés par voie de mobilité au sein de l’armée de terre ou par voie de concours semblant peu attractifs.

En 2006, l’armée de terre avait bénéficié d’un important plan de recrutement à hauteur de 768 agents, dont 558 fonctionnaires et 210 ouvriers d’État. Le plan de recrutement pour 2007 ne prévoit pas de combler l’écart entre les effectifs moyens réalisés et le plafond d’emplois, ce dernier ne constituant pas un objectif mais un plafond de gestion. 314 agents devraient intégrer l’armée de terre cette année, dont 171 ouvriers d’État, 128 fonctionnaires recrutés sur concours et 15 « Pacte » (3) titularisés dans le corps des adjoints administratifs.

III. —  LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS

A. ASPECTS GÉNÉRAUX

• Les crédits de fonctionnement affectés au maintien en condition opérationnelle (MCO) augmentent légèrement en 2008 et atteignent 3,362 milliards d’euros pour l’ensemble de la mission défense. La hausse s’explique en partie par l’augmentation des prix contractuels pour des prestations égales (hausse du coût des matières premières, monopole industriel…), par l’augmentation continue des besoins liés au MCO des systèmes d’information et de communication, par le coût plus élevé du soutien des matériels nouveaux et par l’utilisation intensive de parcs vieillissants, même en OPEX.

En 2008, 608 millions d’euros d’AE sont consacrés à l’entretien programmé du matériel, soit 63 % des AE entrant dans le champ de la LPM. L’entretien du matériel terrestre dispose de 370 millions d’euros d’AE et l’entretien du matériel aérien de 238 millions d’euros d’AE. Les CP augmentent quant à eux de 11 % pour atteindre plus d’un milliard d’euros. Dans ce schéma, les acquisitions ne représentent que 15 % de l’agrégat, soit 144 millions d’euros.

• La loi de programmation militaire fixe des objectifs de disponibilité élevés, en particulier pour les matériels projetés en OPEX. Malgré une augmentation constante des crédits alloués au MCO, force est de constater que la disponibilité globale n’augmente que faiblement et de manière très hétérogène. La disponibilité moyenne reste au même niveau qu’en 2007 en s’établissant à 72 %. Le tableau suivant retrace l’évolution des taux de disponibilité des principaux équipements depuis 2005.

Évolution du taux de disponibilité opérationnelle des matériels de l’armée de terre

 

2003

2004

2005

2006

2007

Objectif LPM

Matériels en OPEX

90 %

93 %

93 %

93%

91%

Sup.90 %

Matériels majeurs (hors aéronefs), hors OPEX

74 %

70 %

72 %

71%

70%

75 %

Matériels de « combat de contact » (LECLERC, AMX, VAB, ERC SAGAIE)

68 %

63 %

66 %

62%

61%

69 %

Matériels d’« appui feux et actions dans la profondeur » (Ex.: AUF1,TRF1, LRM)

60 %

58 %

54 %

61%

60%

68 %

Matériels d’« appui à la mobilité et contrôle de zone » (Ex.: moyens du Génie)

77 %

67 %

64 %

61%

57%

60 %

Matériels de « logistique et soutien »

76 %

72 %

71 %

70%

70%

75 %

Aéronefs

57 %

60 %

63 %

61%

59%

62 %

Source : ministère de la défense.

Les retards successifs des plans d’équipement en matériels neufs ont accru l’âge moyen des parcs terrestres et aériens de l’armée de terre. Les hélicoptères Puma sont âgés de plus de 34 ans en moyenne et les camions GBC 8 KT ont plus de 47 ans. Or la plupart des parcs n’avaient pas été conçus pour une telle durée de vie. Dans le même temps, la sollicitation de ces matériels en OPEX s’est fortement accrue et a nécessité une augmentation très forte des crédits d’entretien et de maintenance.

Deux types de parcs sont particulièrement touchés par cette suractivité : les engins blindés et les hélicoptères. Les engins blindés de type AMX 10 RC et AMX 30 D sont dans une situation critique : outre l’obsolescence du parc, il devient difficile, voire impossible, de se procurer les pièces de rechange et les programmes de valorisation et de rénovation accumulent les retards. La situation des véhicules à roues est également préoccupante. Le développement de parcs de haute technologie a par ailleurs révélé des problèmes de maîtrise industrielle et la nécessité de former les personnels à ces nouveaux circuits de maintenance. La disponibilité des matériels aéronautiques connaît quant à elle de très fortes variations infra-annuelles liées notamment aux opérations préventives d’entretien qui immobilisent les appareils pour une assez longue durée.

• L’amélioration de la disponibilité de ces matériels ne pourra s’inscrire dans la durée que si les crédits consacrés au MCO sont préservés. En effet, de fortes contraintes pèsent toujours sur les matériels comme :

 — les retards de nombreux programmes d’équipement des forces qui ne permettent pas de remplacer en temps voulu les matériels anciens ;

 — la difficile reconstitution des stocks de rechanges, compte tenu du niveau élevé des consommations courantes ;

 — la poursuite d’un taux d’activité élevé, compte tenu du niveau d’engagement des forces terrestres en opérations extérieures et de l’usure accélérée des matériels qui y sont utilisés  ;

 — le soutien plus difficile des matériels anciens, notamment pour les AMX et les PUMA ;

 — l’augmentation des besoins liés aux nouveaux équipements numériques.

Le renouvellement progressif des matériels anciens, la rationalisation de la gestion des parcs et les travaux de mutualisation actuellement en cours devraient permettre d’améliorer marginalement la disponibilité des équipements, mais seules les livraisons des principaux matériels commandés ou en cours de commande pourront structurellement l’amener au niveau fixé par la LPM.

B. UNE SITUATION ALARMANTE POUR L’AVIATION LÉGÈRE DE L’ARMÉE DE TERRE

• Lors de sa visite du commandement de l’aviation légère de l’armée de terre (ALAT), le rapporteur a pu mesurer la dégradation de la disponibilité des hélicoptères. L’armée de terre apparaît, dès aujourd’hui, en limite de capacité en ce qui concerne l’aéromobilité et ne parvient à doter ses forces en OPEX des matériels nécessaires qu’au prix de restrictions métropolitaines drastiques.

Le potentiel des principaux aéronefs apparaît en effet en nette diminution depuis 2004, la baisse s’accélérant en 2008. Seule la disponibilité du Tigre s’améliore puisqu’il commence à être livré aux unités et entre progressivement en service. Le tableau suivant présente le potentiel en heures de vol annuelles des quatre principaux hélicoptères de l’ALAT.

Potentiel des appareils de l’ALAT

   

(en heures de vol par an)

Appareils

2004

2005

2006

2007

2008

GAZELLE

76 410

75 230

59 368

56 880

52 048

PUMA

28 270

27 019

18 880

18 132

17 889

COUGAR

6 900

6 210

5 170

4 739

4 787

TIGRE

/

/

/

3 400

6 000

Source : ministère de la défense.

     

• Les difficultés se concentrent essentiellement sur les hélicoptères de manœuvre. Ceux aujourd’hui en service ne répondront plus aux normes européennes de circulation d’ici 2010. Dans la mesure où les premiers NH 90 destinés à remplacer les PUMA ne pourront pas être livrés avant 2011, il est indispensable de prolonger la durée de vie de certains appareils. La mise en conformité de 45 Puma a donc été planifiée mais elle n’est pas encore contractualisée. Par ailleurs, la rénovation des 24 Cougar, déjà repoussée l’année dernière, devrait être notifiée avant la fin de l’année et permettrait une première livraison en 2009. Cette rénovation vise à prolonger la durée de vie du Cougar d’au moins 20 ans. Ces opérations ne constituent que des solutions d’attente qui ne peuvent être pérennisées. Le remplacement des hélicoptères de manœuvre est aujourd’hui indispensable.

Après avoir été reportée en 2006, la première commande de NH 90  version terrestre devrait être signée en 2007 pour 12 appareils et serait complétée en 2008 par la commande de 22 autres appareils. La livraison ne pouvant intervenir que 48 mois après la commande, les premiers appareils devraient être livrés, avec difficultés, à la fin de l’année 2011. Leur mise en service opérationnelle ne pourra toutefois pas intervenir avant 2012. Il serait d’ailleurs juste que l’industriel soit attentif aux besoins de la France qui a contribué à plus de 40 % aux dépenses de recherche et de développement du programme.

En ce qui concerne le programme Tigre, hélicoptère d’appui et de protection, les premiers sont aujourd’hui livrés dans les unités et dans les centres de formation. Les expérimentations tactiques commencent et les hélicoptères devraient être pleinement opérationnels dans le courant de l’année 2009, la première escadrille devant pour sa part être constituée à la fin de l’année 2009.

C. LES AUTRES PRINCIPAUX MATÉRIELS

L’année 2008 devrait être une année de livraison pour de nombreux programmes dont le très symbolique véhicule blindé de combat d’infanterie (VBCI) qui a connu de très sérieux problèmes industriels et techniques. Le programme se décline en deux versions, le véhicule de combat d’infanterie (VCI, 550 exemplaires prévus) et le véhicule poste de commandement (VPC, 150 exemplaires prévus). 65 commandes ont été passées avant 2002, 117 commandes devraient intervenir en 2007 et 116 en 2008. Les premières livraisons auront lieu en 2008 avec l’arrivée de 41 véhicules et devraient se poursuivre les années suivantes. La mise en service attendue de cet équipement permettra de retirer progressivement du service les AMX 10 P dont la durée de vie avait été prolongée dans l’attente des VBCI. En outre, les nouveaux blindés intégreront les nouveaux systèmes de numérisation du champ de bataille qui permettront de faire de cet engin le véhicule principal de combat.

Dans le même temps, la rénovation des blindés AMX 10 RC se poursuit et 57 chars rénovés seront livrés l’année prochaine. Les AE disponibles permettront également de commander la rénovation de 36 véhicules.

L’équipement personnel des militaires Félin, qui intègre lui aussi les derniers systèmes d’information et de numérisation, devrait être mis en service en 2008 avec la livraison de 358 collections qui seront progressivement complétées grâce à la commande de 5 045 exemplaires l’année prochaine. Ce programme ne peut souffrir aucun retard car il assure la sécurité des soldats sur les théâtres d’opérations.

En ce qui concerne l’appui, les 16 premiers canons Caesar seront livrés aux unités en 2008, ce qui permettra d’améliorer nettement les capacités opérationnelles de l’artillerie. Même si ce canon est assez peu utilisé, il est actuellement déployé en OPEX et constitue un élément majeur de dissuasion.

Néanmoins, et malgré ce bilan positif, il est nécessaire de poursuivre le processus de modernisation des équipements, l’effort consenti au profit des programmes majeurs des autres armées n’étant pas sans conséquence. À court terme, il se fait en partie au détriment des programmes de cohérence opérationnelle et des capacités de commandement. Ces « petits programmes » nécessitaient l’engagement de 400 millions d’euros mais seuls 52 millions d’euros leur ont été effectivement consacrés. Or ces programmes sont à forte valeur ajoutée et conditionnent l’opérationnalité des programmes lourds d’équipement. Comment un char peut-il fonctionner sans système de visée ou sans moyens de communication sécurisés ?

Une réflexion doit aussi être engagée en ce qui concerne, d’une part, les missiles et, d’autre part, les drones. Ces deux équipements nécessitent en effet des investissements lourds et leurs conditions d’utilisation ne sont pas aujourd’hui suffisamment clarifiées. Les retards de développement des drones ne doivent pas pour autant conduire à renoncer à tout effort de recherche et de développement, leur utilisation devant vraisemblablement se généraliser dans les années à venir.

Globalement la situation immédiate des équipements de l’armée de terre est stable, même si de fortes incertitudes demeurent quant au maintien des capacités opérationnelles à moyen et à long terme. Le renouvellement des parcs et les efforts d’investissement doivent être prolongés pour permettre à l’armée de terre de répondre efficacement et en sécurité aux missions de plus en plus complexes qui lui sont confiées.

IV. —  L’ACTIVITÉ DES FORCES

A. UNE ARMÉE FORTEMENT SOLLICITÉE TANT EN OPÉRATIONS EXTÉRIEURES QU’EN OPÉRATIONS INTÉRIEURES

1. Le contrat opérationnel de l’armée de terre

• Conformément au contrat opérationnel fixé par la loi de programmation militaire, l’armée de terre doit pouvoir projeter, hors du territoire national :

— soit jusqu’à 20 000 hommes, simultanément et sans limitation de durée sur plusieurs théâtres, dans le cadre d’une opération nationale (1 000 à 5 000 hommes) ou d’une opération multinationale (12 à 15  000  hommes). Cet effectif peut être porté jusqu’à 26 00 hommes pour une période limitée à une année, pour respecter un taux d’activité moyen des unités n’excédant pas quatre mois de déploiement annuels ;

— soit plus de 50 000 hommes, sans relève, pour un conflit majeur dans le cadre de l’Alliance atlantique ou de l’Union européenne.

Sur le territoire national, dans le cadre de la posture permanente de sécurité sur le territoire national (PPS/TN), l’armée de terre mobilise 14 unités élémentaires PROTERRE (UE) (4) de 61 hommes, 14 groupements d’intervention spécialisés dans la neutralisation, l’enlèvement et la destruction d’explosifs (NEDEX), soit entre 28 et 42 hommes et un groupement de 10 hommes chargés du sauvetage aéroterrestre. S’y ajoutent, conformément aux renforcements prévus dans les plans nationaux, six sous-groupements PROTERRE, une unité élémentaire de juin à septembre 2007 et une section antiaérienne sol-air à très courte portée de 20 hommes environ.

• Dans le cadre de l’alliance atlantique, la France participe au concept de force de réaction rapide de l’OTAN (NATO Response Force – NRF) depuis novembre 2002 et peut être amenée à placer « en disponibilité » tous les 6 mois des moyens spécifiques après une phase de préparation multinationale de 6 mois. À ce titre, elle a par exemple mis en astreinte un bataillon amphibie d’environ 900 hommes de janvier à juin 2007. Par ailleurs, à partir de février 2008, l’armée de terre assurera le commandement de la composante terrestre de la NRF 11, ce qui mobilisera quelque 7 000 hommes et un bataillon spécialisé NRBC (5). Actuellement, elle participe à deux opérations de l’OTAN : l’opération TRIDENT au Kosovo et l’opération PAMIR en Afghanistan.

Lors du sommet d’Helsinki de décembre 1999, les États membres ont décidé de doter l’Union européenne, à partir de 2003, d’une force d’intervention de l’ordre de cinquante à soixante mille hommes, déployables en 60 jours, pour une durée d’au moins un an, afin d’être en mesure d’effectuer les missions de gestion de crises. Un réservoir de forces d’environ 100 000 hommes a ainsi été constitué, la contribution française s’élevant à 12 000 hommes.

2. Les opérations extérieures

Au 1er juillet 2007, l’armée de terre déploie hors de métropole 17 156 personnels dont 8 631 en opérations sous mandat de l’ONU, de l’OTAN, de l’Union européenne ou sous mandat national. Les opérations Trident au Kosovo, Licorne en Côte–d’Ivoire et la participation à la FINUL renforcée au Liban mobilisent plus de 64 % des troupes projetées. Les tableaux suivants récapitulent l’ensemble des forces et des équipements déployés.

Effectifs de l’armée de terre engagés par catégories de forces (à la date du 1er juillet 2007)

Opérations extérieures

Forces

Aires

Opérations

TOTAL

OTAN

Europe

KOSOVO TRIDENT

1 593

Autres opérations

20

Asie

KABOUL PAMIR

975

Sous-total OTAN

2 588

UE

Europe

EUFOR BiH

282

Afrique

RDC Kinshasa

8

Hors OTAN

Moyen-Orient

FMO Sinaï

2

Asie

HERACLES, Tampa, Pakistan, Tadjikistan

54

KABOUL EPIDOTE

36

Sous-total UE et Hors OTAN

382

National

Afrique

TCHAD EPERVIER

721

CAMEROUN ARAMIS

46

RCI LICORNE (dont mod 1A et 1B)

2 398

RCA BOALI

419

Sous-total National

3 584

Forces ONU

Afrique

217

Moyen-Orient dont FINUL renforcée

1 590

Amériques

8

Europe

1

Sous-total Forces ONU

1 816

Forces spéciales

261

Sous-total Forces en Opérations

8 631

Dispositif national

Forces de présence

Afrique

FFCV Sénégal

592

6° BIMa Gabon

689

MISLOG Cameroun

2

FFCI ( hors mod 1A et 1B)

194

FFDJ Djibouti

1 701

Sous-total Forces de Présence

3 178

Forces de souveraineté

Amérique

41° BIMa Guadeloupe

354

33° RIMa Martinique

695

3° REI - 9° RIMa Guyane

1 470

Pacifique

RIMaP/P Polynésie

705

RIMaP/NC Nouvelle Calédonie

1 034

Océan Indien

2° RPIMa La Réunion

802

DLEM Mayotte

240

Sous-total forces de souveraineté

5 300

Sous-total Dispositif National

8 478

Sous-total Forces OPEX + Dispositif National

17 109

Divers

Ambassades et AMTBRI

5

Coopération en MCD

33

Force embarquée

9

Sous-total Hors Métropole

17 156

Source : ministère de la défense.

Principaux matériels en OPEX (au 1er juillet 2007)

 

République centrafricaine

Bosnie

Kosovo

Afghanistan

Tchad

Côte d’Ivoire

Liban

TOTAL

Véhicules légers

VLTT P4

31

40

234

30

64

208

121

728

Blindés légers

VBL

0

0

39

60

0

58

34

191

Blindés légers

ERC 90

0

0

0

0

12

12

0

24

Blindés légers

AMX 10 RC

0

0

0

0

0

14

0

14

Blindés légers

AMX 10P

0

0

15

0

0

12

38

65

Véhicule de transport blindé VAB

5

0

55

56

14

124

48

302

Camionnette

26

2

105

33

72

119

17

374

Camion

5

11

127

17

45

220

161

586

Hélicoptère lourd

0

0

3

0

3

9

0

15

Hélicoptère léger

0

0

2

0

0

9

0

11

Engin du Génie

2

0

15

3

0

26

15

61

Armes antichar

14

0

26

25

17

13

14

109

Canon 20mm

0

0

18

1

6

10

43

78

Mortier 120

0

0

0

0

8

4

0

12

Mortier 81

4

0

2

4

2

7

4

23

Groupes électrogènes

13

15

70

5

1

57

57

218

TOTAL

100

68

711

234

244

902

569

2 828

Source : ministère de la défense.


Les surcoûts des opérations extérieures ne donnant pas lieu, malgré une hausse significative en 2007 pour atteindre 375 millions d’euros, à des ouvertures de crédits suffisantes en loi de finances initiale, l’armée de terre doit avancer la plus grande partie des sommes nécessaires. Toutefois, si les frais de fonctionnement sont intégralement remboursés, il n’en est pas de même des dépenses liées à l’usure du matériel (titre 5), qui ne font l’objet d’aucune compensation financière.

Le montant global des surcoûts des OPEX pour l’ensemble des armées était de 555 millions d’euros en 2005, 603 millions d’euros en 2006 et il devrait atteindre 662 millions d’euros en 2007. Comme l’indique le tableau ci-après, le surcoût pour la seule armée de terre représente 64 % du total en 2005, 54 % en 2006 et 53,5 % en 2007.

Surcoût OPEX pour l’armée de terre

(en millions d’euros)

 

2005

2006

Prévisions 2007

Titre 2

247,66

234,28

235.48

Titre 3

98,56

86,66

102,31

Titre 5*

11,34

3,20

16,48

Total

357,56

324,14

354,27

En % du total du surcoût OPEX

64,0 %

54,0 %

53,5 %

Remboursements obtenus

346,00

321,00

Non connu

* Les surcoûts de titre 5 ne donnent pas lieu à remboursement.

Source : ministère de la défense.

   

Les opérations en cours imposent donc aux unités et aux matériels de l’armée de terre de fortes contraintes. Dans un contexte budgétaire tendu et compte tenu de l’état d’usure de certains matériels, un nouvel engagement massif, comme par exemple au Darfour, apparaît délicat et ne pourrait se faire qu’au prix d’économies et de restrictions drastiques en métropole. L’armée de terre se consacrerait alors quasi exclusivement aux opérations extérieures et ne pourrait plus renforcer, même temporairement, les opérations nationales. Cette limitation serait particulièrement nette pour les hélicoptères de transport et de manœuvre, la vétusté du parc de Puma empêchant notamment de maintenir un parc permettant de répondre à tous les besoins.

3. Les opérations intérieures

Dans le cadre du plan Vigipirate, l’armée de terre mobilise 788 hommes sur l’ensemble du territoire, ce qui représente un surcoût annuel de 7,8 millions d’euros. Pour lutter contre les incendies de forêt durant l’été 2007, elle a également mis à la disposition des autorités civiles 113 hommes, un hélicoptère léger et deux hélicoptères de manœuvre. La participation à ces opérations « Héphaïstos » constitue un surcoût évalué à 341 405 euros en 2007. Enfin l’armée de terre prend à sa charge le groupement interarmées d’hélicoptères qui comprend 47 hommes et six hélicoptères de manœuvre. Cette formation assure l’aéromobilité du groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) pour un budget annuel de 231 476 euros. L’ensemble des opérations intérieures induit donc un surcoût global de 8,4 millions d’euros par an.

La provision initiale de 90 000 euros ne permet de couvrir qu’une partie des dépenses de titre 2 occasionnées par le missions intérieures. Les opérations non remboursées sont financées sur le budget « activités des forces » de l’armée de terre.

B. L’ENTRAÎNEMENT DES FORCES DE PLUS EN PLUS CONTRAINT

1. Des capacités d’entraînement et de formation remarquables

• Outre les entraînements propres à chaque unité, l’armée de terre a développé des centres spécialement dédiés à l’entraînement opérationnel des forces. Créé le 1er juillet 1997, le centre de préparation des forces (CPF) implanté à Mailly-le-Camp, réunit sous un même commandement les centres chargés de préparer les forces aux opérations :

— le centre d’entraînement des postes de commandement (CEPC), implanté à Mailly, est chargé de l’entraînement des états-majors opérationnels : PC des états-majors de force, PC des brigades interarmes et PC des groupements tactiques de combat ;

— le centre d’entraînement au combat (CENTAC), installé à Mailly, est chargé de la préparation opérationnelle des sous-groupements tactiques interarmes (SGTIA) aux opérations de terrain ouvert ;

— le centre d’entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB), installé à Sissonne, est chargé de la préparation opérationnelle des SGTIA aux opérations en zone urbaine ;

— le centre d’entraînement des brigades (CEB), implanté sur le camp de Mourmelon et englobant également les camps de Suippes et de Moronvilliers, permet aux brigades et groupements tactiques interarmes (GTIA) de disposer d’espaces d’entraînement à la manœuvre et au tir.

Les centres préparent en priorité aux opérations de coercition de forces, c’est-à-dire au combat en haute intensité, mais dispensent également un enseignement permettant d’assurer des opérations de maîtrise de la violence, c’est-à-dire du combat de basse intensité.

• Les centres d’entraînement utilisent des moyens de simulation de très haut niveau technologique qui permettent de placer les unités dans des situations très proches du combat réel. Les unités s’entraînent avec des systèmes d’armes qu’elles utilisent pour les missions réelles, qu’il s’agisse des équipements lourds comme les véhicules blindés, les chars ou les hélicoptères ou des équipements individuels comme le Félin ou le fusil d’assaut de la manufacture d’armes de Saint-Étienne (FAMAS). L’ensemble des matériels sont équipés de simulateurs qui permettent d’enregistrer le tir, mais aussi de l’interdire lorsque le combattant ne dispose plus de munitions virtuelles. À terme, chaque militaire portera une combinaison permettant de simuler non seulement la mort mais aussi des blessures qui pourront même s’aggraver si le militaire ne se soigne pas. L’utilisation des systèmes d’information et de commandement de dernière génération est également systématisée. Les observateurs placés sur le terrain et ceux qui coordonnent l’exercice ont accès à l’ensemble des données informatiques. Ils peuvent ainsi apprécier en temps réel les choix tactiques retenus par le commandant de groupement. Ces éléments sont enregistrés et font l’objet d’une analyse après action systématique. Elle est l’occasion de souligner les points forts et de proposer des pistes d’amélioration des points plus faibles.

Les unités déployées en exercice sont opposées à des forces adverses (FORAD) composées de soldats professionnels expérimentés qui jouent en grandeur nature le rôle de différents types d’ennemis susceptibles d’être rencontrés en opérations. Lors de son déplacement au camp de Mailly en septembre dernier, le rapporteur a pu constater que les unités étaient formées à réagir à une attaque massive de blindés mais également à assurer la sécurité des troupes et des équipements contre des attaques suicide ou contre des attentats. En outre, les militaires ont dû faire face à des manifestations de protestation qui ne réunissaient que des civils, empêchant toute action coercitive ordinaire.

2. Une réduction prévisible de l’activité des forces

Les crédits de fonctionnement consacrés à l’activité des forces sont en diminution constante depuis 2001. Le graphique suivant récapitule l’évolution des dépenses d’activité.

Évolution des crédits consacrés à l’activité

Source : ministère de la défense.

Les 126 millions d’euros consacrés à l’activité ont permis à l’armée de terre d’atteindre 96 jours d’activité en 2007, se rapprochant ainsi significativement de l’objectif de 100 jours annuels fixé par la loi de programmation militaire. Les crédits baissant de 14 millions d’euros en 2008, l’objectif risque d’être ramené à 88 jours d’activité, soit une baisse de plus de 8 %. Outre l’impact symbolique fort, cette réduction risque de perturber le rythme d’entraînement et de démobiliser à la fois les troupes qui ne pourront plus réaliser d’exercices mais aussi les personnels des centres d’entraînement. Des crédits devraient permettre de compenser cette réduction en gestion mais sans qu’aucun engagement formel n’ait été pris. Dans ce contexte, la programmation des exercices de grande ampleur devrait être extrêmement délicate : des exercices programmés pourront être annulés au dernier moment, faute de crédits.

Ces impératifs budgétaires sont incompatibles avec un maintien optimal des capacités opérationnelles des unités alors que l’armée de terre doit remplir des missions de plus en plus hétérogènes, tant en OPEX que sur le territoire national.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL BRUNO CUCHE, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE TERRE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Bruno Cuche, chef d’état–major de l’armée de terre, sur le projet de loi de finances pour 2008 (n° 189), au cours de sa réunion du mercredi 17 octobre 2007.

Après avoir rappelé que le projet de budget pour 2008 apparaît comme un budget d’attente, le président Guy Teissier a souhaité connaître les conséquences sur l’état des forces en métropole d’une nouvelle opération extérieure au Tchad.

Le général Bruno Cuche a souligné en préambule qu’il convenait de replacer ce projet de loi de finances dans son contexte : il s’agit en effet d’un projet de budget de transition qui marque la fin d’un cycle exemplaire, celui de la loi de programmation militaire 2003-2008, et qui préserve l’essentiel, dans l’attente des conclusions des travaux en cours du Livre blanc, de la revue de programme et de la revue générale des politiques publiques qui fixeront les grandes orientations stratégiques pour les années à venir.

Il a cependant considéré que ce projet de budget apparaît contrasté pour l’armée de terre, dans le prolongement d’un budget 2007 déjà tendu, confirmant ainsi la nécessité d’accélérer les réformes lancées l’année dernière afin de mieux mettre en corrélation les ambitions et les besoins.

Abordant dans un premier temps la question des effectifs et du fonctionnement, il a observé que l’armée de terre contribue significativement à l’effort gouvernemental de baisse des effectifs de la fonction publique. La relative stabilité de la masse salariale contraint en effet mécaniquement à un abattement de plus de 2 000 postes, parmi lesquels 1 800 militaires et 268 personnels civils. Cette déflation sera appliquée prioritairement aux états-majors, à l’administration et au soutien, qui enregistreront notamment une baisse de 1 000 personnels dans la fonction gestion des ressources humaines. Il sera procédé simultanément à des rééquilibrages internes, en fonction des priorités opérationnelles qui sont au cœur des missions de l’armée de Terre : le renforcement des capacités de combat débarqué sera poursuivi et de nouvelles unités de renseignement de brigade interarmes seront créées. Compte tenu du schéma d’organisation actuel de l’armée de terre, il n’est pas possible d’aller au-delà de ces efforts, d’autant plus qu’ils portent essentiellement sur des personnels contractuels. Or, seuls 20 % des personnels militaires, appartenant aux fonctions de soutien et administratives sont contractuels alors que 80 % des personnels des unités de combat sont contractuels.

L’effort public consenti au titre de la revalorisation de la condition militaire ne peut qu’être relevé : avec 23 millions d’euros prévus pour améliorer les indices de solde des sergents et des engagés volontaires, l’armée de terre bénéficie d’un retour raisonnable sur les économies générées par les abattements de postes. Il s’est félicité de ce premier pas, conforme à l’esprit des déclarations du Président de la République, qu’il a jugé être la juste reconnaissance de l’engagement quotidien des soldats pour la défense et la sécurité de nos concitoyens.

Pour autant, l’effort suivant devra porter en priorité sur la revalorisation des rémunérations des officiers de l’armée de terre, dont le haut comité d’évaluation de la condition militaire a pu constater que le niveau, en comparaison du reste de la fonction publique, n’est pas à la hauteur des responsabilités exercées. C’est en effet sur eux qu’il faudra s’appuyer pour conduire les réformes futures, pour maintenir la disponibilité opérationnelle des forces et leur cohésion, et surtout pour commander en opération dans des configurations toujours plus difficiles.

S’agissant du fonctionnement courant des forces, c’est à dire les crédits de la vie courante des unités et ceux dédiés à l’entraînement, la situation semble critique. Le général Bruno Cuche a rappelé qu’il avait déjà, lors de l’examen du budget pour 2007, alerté la commission sur les conséquences de la stagnation des crédits de fonctionnement qui doit cesser, sauf à reconsidérer l’organisation globale. Pour 2008, le projet de budget prévoit des économies de 23,5 millions d’euros sur un montant total de 770 millions d’euros consacrés au fonctionnement.

Se refusant à faire supporter exclusivement les conséquences de ces économies forcées sur les hommes et les femmes de l’armée de terre, il s’est dit prêt, en étroite coordination avec l’EMA, à réévaluer les seuils d’entraînement des forces en cours d’année, si les financements supplémentaires n’étaient pas confirmés. L’armée de terre tient, malgré ces difficultés, à conserver un objectif de 96 jours d’activité et de 160 heures de vol pour les pilotes d’hélicoptères. En outre, cette baisse des crédits de fonctionnement rend incertaine la pérennité de la politique d’externalisation dont le financement n’est plus à la hauteur des ambitions initiales et de la hausse constante des prix des services.

Il a souhaité attirer l’attention des membres de la commission sur les conséquences qu’entraînent, pour le moment, cette diminution sensible et cette rigidité du budget de fonctionnement de l’armée de terre. Le général Cuche a tenu cependant à souligner la hausse globale d’environ 0,8 % des autorisations d’engagement affectées à l’action 2 du programme 178.

Il a ensuite évoqué la situation des équipements, le projet de loi apparaissant encourageant pour les livraisons et les commandes d’équipements majeurs. L’effort consenti permettra de poursuivre la réalisation des principales capacités, tout en ménageant des marges de manœuvre nécessaires aux adaptations découlant des futures conclusions du Livre blanc. Le projet de budget traduit fidèlement les priorités opérationnelles actuelles : la commande de 22 hélicoptères NH90 en 2008, qui suivra celle de 12 appareils attendue pour la fin de l’année 2007, de 100 porteurs polyvalents terrestres et de 232 petits véhicules protégés renforcera à moyen terme les capacités duales, permettant de remplir à la fois des missions de défense et de sécurité. L’accélération tardive du programme NH90 ne compensera cependant pas l’obsolescence des Puma, dont l’âge moyen est de 33 ans. S’il n’y est pas pris garde, l’armée de terre devra faire face à une très sérieuse baisse capacitaire qui la rendrait provisoirement tributaire de ses alliés, en cas de besoin exceptionnel, en opération ou sur le territoire national.

En 2008, l’armée de terre va prendre livraison et passer commande d’équipements plus adaptés aux engagements actuels des forces permettant de combattre au milieu des populations, avec la puissance de feu et la précision requises, tout en garantissant le maximum de protection aux soldats. Les 41 premiers véhicules blindés de combat d’infanterie, qu’il conviendrait d’appeler véhicule principal de combat, auxquels vont s’associer 358 collections Félin, 57 chars AMX 10 RC rénovés, 16 canons CAESAR et 6 hélicoptères Tigre (ce qui portera leur nombre total à 20) seront ainsi mis en service en 2008. Les crédits disponibles permettront en outre de commander 5 045 Félin, 116 VBCI et 36 AMX 10 RC rénovés.

Cette dynamique positive est à mettre en perspective avec l’effort budgétaire consenti au profit du maintien en condition opérationnelle. L’arrivée de nouveaux équipements facilitera le transfert de crédits de maintenance de matériels anciens vers les matériels les plus modernes. La dotation budgétaire permettra également de mettre en œuvre la nouvelle politique d’emploi et de gestion des parcs dont le double objectif est d’améliorer la disponibilité des matériels les plus sollicités en opération et de contenir les dépenses.

Néanmoins, et malgré ce bilan positif, il est nécessaire de poursuivre le processus de modernisation des équipements, l’effort consenti au profit des programmes majeurs des autres armées n’étant pas sans conséquence. À court terme, il se fait en partie au détriment des programmes de cohérence opérationnelle et des capacités de commandement. Concrètement, cette distorsion se traduira par le report de commandes de munitions, sujet critique, d’armements légers et de moyens de communication. L’armée de terre se trouve ainsi placée dans la situation d’un consommateur qui achète un ordinateur dernier cri mais ne dispose pas des liquidités suffisantes pour payer l’imprimante, l’abonnement Internet ou les cartouches d’encre. Pour le moyen terme, il faut lever rapidement l’incertitude sur le niveau réel des autorisations d’engagement en 2008 qui sont indispensables à la poursuite du renouvellement des parcs, alors que l’on observe depuis plusieurs années une tendance au ralentissement des grands programmes. Elles conditionnent, de plus, le développement de la prochaine génération de systèmes d’armes.

Abordant l’avenir de l’armée de terre, il a souhaité réaffirmer son engagement à lancer une réforme en profondeur, répondant au double impératif de maîtrise des finances publiques et d’adaptation de l’outil militaire à l’évolution de la situation sécuritaire et stratégique, telle qu’elle sera définie par la commission du Livre blanc et acceptée par le Président de la République. Il faut saisir aujourd’hui, collectivement, l’opportunité de convergence entre le temps politique et le temps militaire.

L’axe principal de cette réforme portera sur une redéfinition de la posture de l’armée de terre sur le territoire national. Il s’agira, d’une part, de réviser le schéma des implantations, pour en limiter les coûts de fonctionnement et, d’autre part, de se repositionner au sein de l’appareil d’État, à un niveau plus conforme à la contribution, avérée et potentielle, de l’armée de terre à la sécurité de nos concitoyens sur le territoire national en particulier.

Mais au-delà de ce projet, dont les contours restent à préciser par le chef de l’État, se dégagent déjà quelques principes fondateurs de cette démarche réformatrice, quelle qu’en soit l’ampleur, permettant de mobiliser la communauté militaire. En premier lieu, il faudra contractualiser la réforme dans sa globalité, et inscrire résolument les problématiques salariales, d’effectifs et de fonctionnement dans une vision pluriannuelle, comme le prévoit d’ailleurs la LOLF ; toute réforme ayant un coût avant de générer des économies. En cas de financement de la réforme sous enveloppe, l’armée de terre subira mécaniquement une baisse de capacité alors qu’elle occupe une place centrale dans toutes les opérations extérieures en cours.

La réforme qui sera entreprise aura nécessairement un coût social que la nation devra assumer. L’armée de terre réorganisée en 1996 était une armée de conscription, tandis que celle de 2007 est une armée professionnelle, voire une communauté de soldats et de familles, tous professionnels, imposant d’accompagner socialement la mobilité exceptionnelle de milliers de militaires et de leurs familles, ainsi que d’éventuels départs.

Cette réforme devra également s’accompagner d’une nouvelle politique d’acquisition des matériels, plus réactive et assise sur un nouvel équilibre dans la nature des investissements. Depuis des années, ils ont porté essentiellement sur des équipements lourds et sophistiqués destinés au combat conventionnel classique. L’armée de terre a investi quasi exclusivement dans l’assurance vie et doit désormais diversifier son portefeuille en investissant dans l’épargne à vue, c’est-à-dire sur des matériels de technologie adaptée mais robustes, immédiatement employables. Car l’armée de Terre est confrontée à la tyrannie du présent, dont l’enjeu partagé avec le CEMA, reste bien le succès des opérations et la sécurité de ses soldats particulièrement exposés. Le général Cuche a souligné que le temps est venu de s’intéresser plus aux utilisateurs des matériels qu’à ceux qui les fabriquent ou les financent.

En conclusion, le général Cuche a insisté sur l’enjeu opérationnel des choix à faire dans les prochains mois au moment où les Israéliens, ainsi que les alliés américains ou britanniques tirent les leçons des guerres au Liban, en Irak et en Afghanistan, en renforçant significativement leurs forces terrestres. Mais plus encore, ces décisions constitueront un signal politique très fort, à l’égard des alliés, de la communauté des forces terrestres et de l’ensemble de la population.

Le président Guy Teissier a observé que les commandes d’hélicoptères NH 90 qui doivent être passées en 2007 et 2008 ne permettront pas de faire face au déficit capacitaire causé par l’épuisement des hélicoptères Puma. Pour éviter une rupture capacitaire, une rénovation des Puma est-elle envisagée ? Il a également souhaité connaître la date de mise en service opérationnel de la première escadrille d’hélicoptères de combat Tigre.

Il a par ailleurs relevé que les 16 canons Caesar qui seront livrés en 2008 ne figuraient pas dans la loi de programmation militaire et s’est interrogé sur la pertinence d’un pareil choix alors que l’artillerie est de moins en moins sollicitée en opérations.

Il s’est enfin inquiété du fait que les unités ne semblent pas disposer de suffisamment de munitions d’entraînement ni de suffisamment de munitions réelles, obérant ainsi leurs capacités opérationnelles.

Le général Bruno Cuche a tout d’abord souligné que l’hélicoptère de manœuvre offre des capacités exceptionnelles qui dépassent le seul emploi militaire puisqu’il peut également être mobilisé pour des missions de sécurité civile ou de secours à la population, y compris sur le territoire national. Les Puma sont aujourd’hui âgés de 33 ans en moyenne et, à compter de 2009, ils ne répondront plus aux normes européennes de circulation aérienne, empêchant leur utilisation sur l’ensemble du continent même s’ils pourront encore être employés en opérations extérieures. Ces difficultés devraient être compensées avec la livraison des premiers NH 90 qui, compte tenu du délai de 48 mois entre la signature de la commande et la livraison effective, devrait intervenir à la fin de l’année 2011, réduisant le déficit capacitaire lié au retrait progressif des Puma. Dans le même temps, le programme de rénovation des Cougar devrait permettre de limiter la baisse de capacités pour l’aéromobilité. Tout décalage soit des livraisons des NH 90, soit de la rénovation des Cougar conduirait à transformer le déficit en rupture capacitaire provisoire.

Les premiers Tigre, hélicoptère d’appui et de protection, sont aujourd’hui livrés dans les unités et dans les centres de formation. Les expérimentations tactiques commencent et les hélicoptères devraient être pleinement opérationnels dans le courant de l’année 2009, la première escadrille devant pour sa part être constituée à la fin de l’année 2009.

L’évolution des besoins opérationnels a conduit à remplacer l’artillerie de saturation que permettait l’AUF 1 par une artillerie de précision et d’appui à longue distance en développant le programme Caesar, qui en LPM s’est substitué de fait à la modernisation d’une partie des AUF1. Même si l’artillerie ne ‘est pas fréquemment employée, elle est cependant déployée en OPEX, notamment au Liban, où elle constitue un outil majeur de dissuasion. À terme, l’armée de terre devrait disposer de 77 canons Caesar en parc, soit 72 en ligne. Par ailleurs, le lance-roquettes multiples va évoluer vers un lance-roquettes unique d’une portée de 70 kilomètres et d’une précision infra-décamétrique, en complément indispensable d’autres vecteurs de frappe dans la profondeur.

Pour les munitions, l’armée de terre doit faire face à deux difficultés qui concernent la gestion des stocks et la fabrication. Les stocks actuels ne permettent pas de fournir aux unités l’intégralité des munitions requises pour s’entraîner et intervenir dans des conditions optimales. Une réflexion est engagée avec l’état-major des armées pour mieux adapter les stocks aux besoins capacitaires. On peut s’inquiéter de voir disparaître des savoir-faire industriels en France, l’armée de terre étant aujourd’hui contrainte de se fournir en munitions auprès d’entreprises étrangères.

M. Jean-Louis Bernard a rappelé que les crédits de fonctionnement baissent de 23,5 millions en valeur brute, et de 34,5 millions d’euros en tenant compte de la non actualisation, soit une diminution de 4,5 %. Il a demandé quelles en seront les conséquences sur l’activité des forces terrestres et si ces réductions pèseront sur l’entraînement des unités.

Il a ensuite attiré l’attention du chef d’état-major de l’armée de terre sur l’importance des petits matériels qui pâtissent souvent d’arbitrages défavorables alors qu’ils jouent un rôle essentiel dans le maintien quotidien du moral des troupes.

La société Eurocopter a reçu à ce jour 495 commandes d’hélicoptères. Si les commandes françaises sont effectivement signées dans les délais prévus, compte tenu de ses capacités de production, l’industriel sera-t-il en mesure de respecter les délais de livraison ?

Il a enfin souhaité connaître les perspectives d’utilisation des drones dans l’armée de terre.

Le général Bruno Cuche a précisé que la baisse de 23,5 millions d’euros pèse sur le fonctionnement courant et les activités globales qui représentent un budget global de 770 millions d’euros, montant qui n’a pas été actualisé depuis 2004. Dans ce cadre, la priorité sera donnée à l’activité des forces et au contrat opérationnel : les objectifs de 96 jours d’activité et de 160 heures de vol pour les pilotes d’hélicoptères sont ainsi maintenus. Les efforts porteront sur le fonctionnement courant des unités même si des ajustements en gestion devraient en atténuer partiellement les effets. Il a toutefois souligné que ces ajustements en gestion se feraient sous l’autorité du responsable de programme, le chef d’état-major des armées.

Il a ensuite rappelé son attachement aux petits matériels qui, comme les programmes de cohérence opérationnelle, apportent une forte valeur ajoutée à l’ensemble des équipements. Toutefois, l’armée de terre est contrainte d’intégrer les arbitrages rendus par le responsable du programme 146 « équipement des forces » qui définit les priorités en fonction des besoins de l’ensemble des armées. Il n’en reste pas moins qu’une attention particulière est portée au sein de l’armée de terre aux moyens opérationnels des forces et notamment aux munitions.

Même si l’aéromobilité reste un sujet d’inquiétudes, la livraison des NH 90 devrait pouvoir intervenir dans les délais prévus ; il serait juste d’ailleurs qu’une attention particulière soit apportée aux besoins de la France qui a contribué à plus de 40 % des dépenses de recherche et de développement du programme.

Deux types de drones sont aujourd’hui utilisés par l’armée de terre : des drones de portée lointaine à vol rapide comme le CL 289 et des drones tactiques comme le système de drone tactique intermédiaire (SDTI) qui a été employé en opérations extérieures mais aussi sur le territoire pour assurer la sécurité des sommets d’Évian ou de Nice. Ces deux systèmes devraient être remplacés à partir de 2011 par le système de drone tactique (SDT), qui possède les mêmes caractéristiques générales. À l’avenir, l’armée de terre privilégiera aussi les petits drones tactiques de courte portée comme le drone de reconnaissance et de contact (DRAC) permettant de « voir au-delà de la vue directe ».

M. François Lamy s’est interrogé sur l’évolution de la durée des missions en OPEX, une prolongation de quatre à six mois étant régulièrement évoquée, notamment dans le cadre des diverses réflexions en cours qu’il s’agisse du Livre blanc, de la revue des programmes ou de la RGPP.

En ce qui concerne les chars Leclerc, seuls treize d’entre eux sont engagés au Liban ; où sont les autres et à quoi sont-ils employés ?

La réforme annoncée de l’armée de terre aura nécessairement un coût social ainsi qu’un coût politique, et avant de générer des économies, elle nécessite un fort investissement financier. À ce jour, aucun élément n’est venu préciser ni l’ampleur ni la méthode présidant à cette réforme. Quels seront les critères de choix ? Les recommandations du Livre blanc pèseront-elles sur les options retenues ? Alors que des annonces publiques ont déjà été faites et que semble régner une certaine confusion entre les différents groupes de travail, il a souhaité connaître l’état d’avancement de la réflexion au sein de l’état-major.

Le Général Bruno Cuche s’est montré défavorable à une prolongation à six mois des missions en OPEX pour les troupes, observant que la plupart des armées étrangères envisagent aujourd’hui de réduire cette durée. En revanche, les officiers affectés en état-major ou auprès d’autorités locales, notamment les officiers généraux et les officiers supérieurs occupant un poste stratégique, dont la durée de mission est déjà de six mois, pourraient dans certains cas la voir prolongée à un an .

En ce qui concerne les chars Leclerc, seuls deux groupes de treize chars ont été projetés, mais on ne peut considérer que trente chars suffisent pour remplir toutes les missions qui peuvent leur être confiées. Les Britanniques ont en effet déployé 116 chars en Irak pour appuyer 40 000 hommes. Le contrat opérationnel de l’armée de terre portant sur 50 000 soldats, si la France devait s’engager dans une opération similaire à celle d’Irak, elle aurait besoin d’au moins 320 chars dans ses parcs pour pouvoir en engager immédiatement un nombre suffisant. Les Israéliens ont tiré les leçons de leur engagement au Liban, et malgré des pertes de blindés, ils ont considéré qu’il fallait prioritairement revaloriser leurs chars. Par ailleurs, le chef d’état-major des armées considérant que la France n’est pas aujourd’hui à l’abri d’un conflit à caractère conventionnel, le général Cuche a rappelé que des matériels comme le Leclerc seraient alors indispensables.

Actuellement l’armée de terre dispose de 406 Leclerc dont 320 en ligne. Les principaux pays européens maintiennent un nombre de chars proche de 400, le Royaume-Uni en possédant à ce jour 394, la Turquie 406 et l’Allemagne 796 même si une réduction à 400 chars est en cours. Le Livre blanc devra déterminer plus précisément la cible à atteindre pour l’armée française compte tenu des évolutions géopolitiques.

Le général Bruno Cuche a souligné qu’actuellement, le contrat opérationnel de l’armée de terre est rempli de façon satisfaisante : les équipements fonctionnent correctement, même si certains sont vétustes, et les troupes sont convenablement entraînées et le demeureront à condition que le niveau de crédits soit suffisant. En revanche, des efforts restent à faire en ce qui concerne le fonctionnement. Le redéploiement de l’armée de terre doit donc répondre à trois objectifs. Le premier vise à la maintenir dans la nation, en métropole comme outre-mer, où on constate une augmentation des missions liées à la sécurité. Il s’agit d’une option opposée à celle retenue par les Américains qui établissent de grandes bases au milieu d’endroits désertiques. Le deuxième objectif doit consister à regrouper les unités actuellement dispersées, la dispersion se révélant coûteuse. Ainsi, la région terre Nord-Est, pour des raisons historiques, concentre par exemple 40 % des forces vives de l’armée de terre. Le troisième objectif consiste à renforcer le ratio existant entre les forces projetables et les personnels affectés au soutien général. La plupart des personnels de ce soutien général étant protégés par leur statut, ces réorganisations doivent être menées dans un esprit de concertation et de dialogue, les évolutions devant par ailleurs permettre de donner toute leur place aux 24 000 personnels civils de l’armée de terre. Dans ce cadre, même si l’externalisation ne doit pas être érigée en règle de gestion, elle peut être envisagée pour certaines fonctions.

Les conclusions du Livre blanc conduiront à des choix de rééquilibrages capacitaires même si une réflexion a d’ores et déjà été engagée avec par exemple la création au sein des brigades interarmes d’unités de renseignement. Ces modifications restent marginales et ne pourront prendre corps qu’une fois l’ensemble des réflexions achevées et les choix stratégiques clairement définis. En ce qui concerne les programmes d’armement, le général Bruno Cuche a souligné qu’à sa connaissance, la revue des programmes, conduite par le chef d’état-major des armées et le délégué général pour l’armement, cherche aujourd’hui à établir un état des lieux.

M. Yves Fromion a considéré, qu’à l’heure où s’ouvre une réflexion sur la réforme de l’armée de terre, il convient de garder à l’esprit qu’elle fournit l’effort le plus important en opérations et que sa qualité et son efficacité sont reconnues par l’ensemble de nos partenaires. C’est donc avec prudence qu’il faut envisager les perspectives d’une modification de son format.

En ce qui concerne les hélicoptères de manœuvre, il faut être extrêmement vigilant aux capacités réelles de production de l’industriel qui semble peiner à honorer ses commandes.

Il s’est enfin demandé si l’armée de terre britannique peut constituer un modèle pour la réforme à venir, d’autant que les troupes britanniques ont montré leur efficacité et leur capacité à s’engager dans des combats de haute intensité. L’armée de terre du Royaume-Uni a su améliorer son ratio entre le front office et le back office et la condition de ses militaires est meilleure que celle des soldats français. La comparaison doit néanmoins être nuancée, ne serait-ce que parce que le budget de la défense française ne représente que 75 % du budget de la défense britannique.

Le général Bruno Cuche a fait part de sa grande estime pour l’armée britannique. Il a relevé que si son ratio entre forces opérationnelles et soutien est de 70/30, ce rapport ne prend pas en compte les activités externalisées, dont le poids est considérable outre-Manche. Le budget militaire français ne représente effectivement que 75 % de l’effort britannique et le poids de la dissuasion nucléaire est plus important en France, mais il convient surtout de noter que sur les dix milliards d’euros d’écart de dépenses militaires, huit milliards portent sur le fonctionnement. L’efficacité opérationnelle britannique, qui est réelle, s’explique très largement par cette différence. Il faut toutefois observer que l’armée de terre britannique connaît de fortes tensions en raison de l’intervention en Irak, même si un redéploiement progressif des forces vers l’Afghanistan est en cours.

M. Nicolas Dhuicq a souhaité obtenir des précisions sur l’état d’avancement du projet Séquoia.

M. Jean-Pierre Soisson a estimé qu’au vu des effets de la compression continue des dépenses de fonctionnement sur les capacités opérationnelles des armées, il n’était pas concevable de continuer plus longtemps dans cette voie, sous peine notamment d’annuler les effets bénéfiques des nécessaires mesures prises pour l’amélioration de la condition militaire. L’armée semble ne plus avoir les moyens de montrer son existence à nos compatriotes, alors même qu’une présence régulière et visible permettrait sans aucun doute de renforcer leur acceptation de la nécessité des dépenses militaires.

Le général Bruno Cuche a indiqué que le projet Séquoia, déjà fort ancien, visait à éliminer les vieilles munitions présentant des risques en termes de sécurité et de pollution. Sa mise en œuvre reste entravée par des contraintes réglementaires et communautaires de protection de l’environnement et de protection des espèces végétales dans la zone où doit être construite l’usine, contraintes sur la pertinence desquelles on peut s’interroger au regard des objectifs louables du programme, notamment en matière de protection des populations.

Les budgets de fonctionnement n’ayant pas été actualisés depuis 2004, il faut aujourd’hui s’orienter vers des réformes qui permettent de limiter les coûts fixes. La situation ne doit pas être dramatisée et n’a pas par exemple conduit à la fermeture d’installations.

Il a ensuite fait part de son grand attachement à la présence des armées dans le tissu local. Il ne serait pas souhaitable de créer des « déserts militaires » dans certaines régions ni de s’aligner sur le modèle américain de bases géantes vivant en quasi autarcie. Malgré une action résolue au travers de prises d’armes et de manœuvres, des progrès doivent encore être réalisés pour améliorer la visibilité des armées dans certains départements. Il a néanmoins relevé que l’activité des centres départementaux d’information et de recrutement de l’armée de terre est soutenue.

Le président Guy Teissier a rappelé que récemment, une démonstration avait été faite à Reims et à Mourmelon qui associait pour la première fois l’armée de terre et l’armée de l’air sur les thèmes de la protection et de la projection.

Le général Bruno Cuche a souligné qu’il s’agissait de montrer à quel point la question de l’action interarmées était importante d’un point de vue opérationnel. Les préoccupations relatives à la maîtrise du coût de ce type de démonstration étaient également présentes. La prochaine manifestation de ce genre pourrait associer les trois armées, et donc avoir lieu dans le Sud de la France.

M. Loïc Bouvard a regretté que le thème de l’Europe n’ait pas été davantage abordé, et ce alors même que le défilé du 14 juillet 2007 a été marqué par la participation très symbolique d’unités de l’ensemble des États membres de l’Union européenne. Quelle est la place occupée par la dimension européenne dans les réflexions de l’armée de terre, notamment en ce qui concerne l’interopérabilité des forces ?

M. Alain Marty a fait valoir que les réflexions légitimes sur un meilleur équilibre de la répartition des implantations de l’armée de terre sur le territoire ne pouvaient être menées en faisant abstraction des implantations des industries de défense, qui sont à l’origine de nombreux emplois. De ce point de vue, si l’Est de la France dispose de nombreuses unités de l’armée de terre, il est dépourvu d’industries d’armement.

Le général Bruno Cuche a indiqué qu’il était personnellement très attaché à l’idée européenne et a rappelé qu’il était à l’origine, lorsqu’il était commandant de l’école spéciale militaire de Saint-Cyr, de la première conférence des académies militaires de l’Union européenne. La capacité à engager conjointement des forces de divers pays européens est désormais très satisfaisante, comme en témoigne la création des « groupements tactiques 1 500 », multinationaux et rapidement projetables. La réflexion sur le meilleur degré d’interopérabilité est permanente et s’exerce notamment au travers du groupe FINABEL, qui réunit la France, l’Italie, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et l’Espagne, et que le Royaume-Uni et les pays d’Europe centrale et orientale sont en train de rejoindre. Le deuxième axe d’effort pour le renforcement de l’intégration des armées européennes passe par les matériels et, de ce point de vue, l’Agence européenne de défense doit voir son rôle renforcé. Les difficultés de certains programmes menés en coopération ne doivent pas décourager mais bien au contraire inciter à aller plus loin et à progresser. Enfin, la question d’une formation européenne commune est majeure. Le ministre de la défense a fait de la formation militaire à l’échelle européenne une priorité et la présidence française de l’Union au second semestre 2008 devrait permettre de lancer une initiative s’apparentant au programme ERASMUS pour l’échange d’officiers dans les écoles et académies.

Si l’armée de terre a effectivement mené plusieurs études sur des hypothèses de redéploiement, ces travaux sont restés internes. Ils devront bien entendu être mis en cohérence avec les projets des autres armées, les arbitrages relevant de l’état-major des armées. Enfin, l’ensemble des problématiques de développement des territoires seront prises en compte grâce à l’intervention du délégué interministériel aux restructurations de défense.

——fpfp——

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de la Mission « Défense » : « préparation et emploi des forces (forces terrestres) » pour 2008, au cours de sa réunion du 7 novembre 2007.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

Après avoir souligné l’importance des drones dont le Neuron est une déclinaison, le président Guy Teissier a suggéré que la commission travaille avec la délégation générale pour l’armement et les industriels afin d’identifier les motifs des retards constatés. Il a également relevé le déficit capacitaire manifeste en matière d’aéromobilité et a proposé d’y consacrer une journée de travail comprenant les visites de l’usine Eurocopter de Marignane et de l’école franco-allemande du Luc, cette dernière permettant d’apprécier les capacités de manœuvre du Tigre et de découvrir le fonctionnement de cette école européenne.

M. Jean-Louis Bernard a fait observer que l’aéromobilité doit être différemment appréciée selon qu’elle concerne les actions en OPEX, pour lesquelles le taux de disponibilité oscille entre 75 % et 80 %, ou l’activité sur le territoire métropolitain où la disponibilité technique opérationnelle du Puma n’est que de 48 %.

M. Michel Voisin a rappelé qu’à l’occasion de la professionnalisation des armées, il avait été estimé qu’il s’écoulerait plus de 70 ans avant que les restructurations des bases ne génèrent des économies. Les restructurations à venir seront-elles soumises à un calendrier similaire ?

M. Jean-Louis Bernard a signalé que la réflexion actuellement engagée n’aboutira vraisemblablement pas avant le deuxième trimestre de l’année 2008. L’armée de terre souhaite faire évoluer ses structures héritées de l’époque de la guerre froide vers un dispositif adapté à l’interarmisation particulièrement mise en évidence par la mise en service de l’A 400 M, matériel de l’armée de l’air essentiellement destiné au transport de matériels terrestres. Il a enfin souligné que les restructurations seront onéreuses dans un premier temps, les économies n’apparaissant qu’à long terme.

M. Pierre Forgues a relevé la contradiction existant entre l’accroissement du nombre et de la complexité des OPEX et la réduction du budget de fonctionnement de 35 millions d’euros. Dans ces circonstances, il a estimé difficile de se prononcer favorablement sur les crédits prévus pour l’armée de terre. Ils ne devraient permettre de maintenir que 88 jours d’activité alors que l’objectif de la LPM est de 100 jours. Par ailleurs le matériel est vieillissant : les Puma ont en moyenne 34 années de service et les camions plus de 40 années. L’appareil industriel français actuel n’arrive plus, comme auparavant, à produire des matériels nombreux et complexes à l’exemple des chars. Il est à ce titre révélateur que les matériels commandés ne soient pas livrés dans les délais impartis. Il a enfin regretté qu’en matière de défense, les exigences de court terme prennent le pas sur celles de long terme.

Malgré les insuffisances, les lacunes et les retards indéniables, M. Yves Fromion a rappelé que les matériels industriels français se distinguent par leurs qualités opérationnelles et que les capacités françaises de production sont encore très satisfaisantes. L’outil industriel a dû être restructuré afin d’adapter son dimensionnement aux nouveaux besoins, mais les savoir-faire ont été préservés, y compris en matière d’armement terrestre. Tempérant toute analyse excessive, il a estimé que l’armée de terre se distinguait, notamment en OPEX, par sa compétence, son efficacité et son professionnalisme et qu’il convenait de s’en féliciter. De même, les efforts déployés en faveur de l’industrie d’armement et des troupes doivent être appréciés à leur juste valeur. Il n’en demeure pas moins que les parlementaires doivent rester vigilants sur l’évolution des moyens qui sont attribués à l’armée de terre.

Après avoir appuyé l’appel à l’objectivité lancé par M. Fromion et relayé par le président, M. Philippe Vitel a relativisé la restriction actuelle de 35 millions d’euros, en observant que c’est à peu près une année de LPM qui avait été sacrifiée sous la XIe législature. Par ailleurs, de nombreux travaux prospectifs sont actuellement menés, qu’il s’agisse du Livre blanc ou de la revue de programmes, et on ne peut donc considérer que la politique de défense ne fait que répondre à des exigences de court terme.

M. Jean-Claude Viollet a adhéré à la proposition du président d’organiser une journée de travail sur les hélicoptères mais a estimé que l’aéromobilité, sujet sur lequel une mission d’information lui a été confiée en collaboration avec deux autres rapporteurs, ne peut se réduire à ces seuls appareils. Sauf à creuser le déficit capacitaire déjà constaté, des choix doivent être rapidement retenus pour les MRTT et des précisions apportées en ce qui concerne la mise en service et le soutien de l’A 400 M.

Il a par ailleurs estimé nécessaire que la commission engage une réflexion approfondie sur les drones, sujet qui est au cœur de la problématique de « défense et sécurité ». Des propositions doivent être faites dans les plus brefs délais pour s’intégrer aux travaux du futur Livre blanc et à la préparation de la prochaine LPM.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission de la défense a alors donné un avis favorable au programme « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) ».

*

La commission de la défense a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Défense ».

© Assemblée nationale

1 () Les premiers contrats sont signés pour une durée de trois ou cinq ans.

2 () Décret n° 2007-1442 du 5 octobre 2007 modifiant le décret n° 2000-1170 du 1er  décembre 2000 relatif aux conditions de recrutement, d’exercice d’activités, d’avancement, d’accès à l’honorariat et de radiation du personnel de la réserve militaire.

3 ()

4 () Les unités élémentaires PROTERRE sont capables de remplir des missions communes à l'armée de terre qui sont définies comme des missions opérationnelles pouvant être confiées en tout lieu aux unités engagées, uniquement dans un contexte de basse intensité, en dehors de leur domaine de spécialité et sans moyens spécialisés.

5 () Nucléaire, radiologique, bactériologique chimique.