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N
° 276

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2007

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 24

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

Rapporteur spécial : Mme BÉATRICE PAVY

Député

____

INTRODUCTION 7

I.– LA MISE EN PLACE DU MINISTÈRE DE L’IMMIGRATION, DE L’INTÉGRATION, DE L’IDENTITÉ NATIONALE ET DU CODÉVELOPPEMENT 11

A.– LE REGROUPEMENT D’ADMINISTRATIONS JUSQU’ALORS DISPERSÉES 11

B.– VERS UNE IMPLANTATION COMMUNE DES SERVICES DU MINISTÈRE 12

II.– PROMOUVOIR L’IMMIGRATION CHOISIE ET CONCERTÉE 15

A.– LE DÉVELOPPEMENT DE L’IMMIGRATION ÉCONOMIQUE 15

B.– UNE IMMIGRATION FAMILIALE MIEUX ENCADRÉE 18

C.– LE DÉVELOPPEMENT DES ACCORDS D’IMMIGRATION CONCERTÉE 19

III.– COMBATTRE L’IMMIGRATION CLANDESTINE 21

A.– LA POURSUITE DE L’AUGMENTATION DU NOMBRE DE PLACES EN CENTRES DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE 21

1.– Une rationalisation souhaitable de la gestion des centres de rétention administrative 21

2.– Un retard regrettable concernant la salle d’audience aménagée à Roissy 23

B.– L’ASSISTANCE SOCIALE ET SANITAIRE AUX PERSONNES RETENUES 24

C.– LE FAIBLE TAUX D’EXÉCUTION DES MESURES D’ÉLOIGNEMENT SOULIGNE LA NÉCESSITÉ DE RÉFORMER LA PROCÉDURE 24

1.– Des reconduites à la frontière en légère baisse à la suite de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie 24

2.– Seule une mesure d’éloignement sur cinq est exécutée 25

3.– Une absence regrettable d’évaluation du coût complet d’un éloignement 27

IV.– GARANTIR L’EXERCICE DU DROIT D’ASILE 29

A.– LE TRAITEMENT DE LA DEMANDE D’ASILE PAR L’OFPRA ET LA COMMISSION DE RECOURS DES RÉFUGIÉS 29

1.– L’évolution de la demande d’asile en 2006-2007 29

a) Une forte diminution de la demande d’asile en 2006 29

b) Une décélération de la baisse en 2007 32

2.– Une subvention en légère diminution pour l’OFPRA 33

a) Un changement de tutelle sans incidence sur l’indépendance fonctionnelle de l’OFPRA 33

b) Une diminution de la subvention justifiée par la baisse de la demande d’asile 34

c) Un coût d’examen par demande en légère augmentation pour l’OFPRA 35

d) La réduction des délais de traitement et la résorption des stocks doivent être poursuivies 36

3.– Vers une indépendance confortée pour la future « Cour nationale du droit d’asile » 36

B.– L’ACCUEIL ET L’HÉBERGEMENT DES DEMANDEURS D’ASILE 37

1.– L’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile : un triplement en cinq ans du nombre de places en CADA 38

a) Un redéploiement progressif d’activité des plates-formes d’accueil associatives vers les plates-formes de l’ANAEM 38

b) Améliorer la gestion des centres d’accueil des demandeurs d’asile afin de diminuer les délais de sortie 38

2.– L’allocation temporaire d’attente 41

V.– RENFORCER L’INTÉGRATION 43

A.– LA MISE EN œUVRE DU CONTRAT D’ACCUEIL ET D’INTÉGRATION PAR L’AGENCE NATIONALE DE L’ACCUEIL DES ÉTRANGERS ET DES MIGRATIONS 43

1.– La montée en puissance du contrat d’accueil et d’intégration 43

2.– Le budget de l’ANAEM 45

3.– Le financement des nouvelles mesures prévues par la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’asile et à l’intégration 45

B.– L’ACTION DE L’AGENCE NATIONALE POUR LA COHÉSION SOCIALE ET L’ÉGALITÉ DES CHANCES EN FAVEUR DE L’INTÉGRATION 46

C.– VALORISER L’ACCÈS À LA NATIONALITÉ 47

VI.– DONNER UN NOUVEL ÉLAN À LA POLITIQUE DE CODÉVELOPPEMENT 51

EXAMEN EN COMMISSION 53

Article 45 : Revalorisation de la taxe perçue au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) lors de la demande de validation de l’attestation d’accueil 55

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 58

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 84 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial. Votre Rapporteur remercie les services du ministère, qui n’est pas encore doté d’une administration centrale, pour leurs efforts lors de la préparation de ce premier exercice budgétaire.

Synthèse

La création de la mission Immigration, asile et intégration est la traduction budgétaire de la mise en place du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement. Elle vise à regrouper l’ensemble des crédits relatifs à ces politiques, qui relevaient jusqu’à présent de quatre ministères différents. Le montant des crédits demandés pour 2008 est de 618 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 609 millions d’euros en crédits de paiement. Le plafond d’autorisation d’emploi exprimé en équivalents temps plein travaillé (ETPT) s’établit à 609.

Le programme Immigration et asile (422 millions d’euros en autorisations d’engagement et 414 millions d’euros en crédits de paiement) inclut principalement les dépenses relatives :

– à la garantie de l’exercice du droit d’asile, c’est-à-dire au traitement des demandes d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) et la Commission de recours des réfugiés, ainsi qu’à l’accueil et à l’hébergement des demandeurs d’asile. Cette action représente 72 % des crédits du programme et la moitié de ceux de la mission, avec 304,5 millions d’euros en crédits de paiement (en baisse de 3,7 % par rapport à 2007 en raison de la diminution de la demande d’asile) ;

– au fonctionnement des centres de rétention administrative et aux reconduites à la frontière (79,1 millions d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 3,1 % par rapport à 2007).

Le programme Intégration et accès à la nationalité, doté de 195,3 millions d’euros en crédits de paiement (soit 32 % du budget de la mission), finance principalement :

– l’accueil des étrangers primo arrivants par la voie du contrat d’accueil et d’intégration mis en œuvre par l’ANAEM, qui a été rendu obligatoire par la loi du 24 juillet 2006 : 44,6 millions d’euros sont prévus pour 2008 en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– l’intégration et la lutte contre les discriminations, pour lesquelles 132,8 millions d’euros sont demandés en 2008, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ces crédits servent notamment à financer l’action menée à ce titre par l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances – dite ACSÉ (105,9 millions d’euros) et par la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (3 millions d’euros), ainsi que les centres provisoires d’hébergement des réfugiés (12,3 millions d’euros), la rémunération des étrangers stagiaires de la formation professionnelle (4,3 millions d’euros), l’aide à la réinsertion des anciens migrants (3 millions d’euros) et l’accès à la nationalité (1,4 million d’euros).

Votre Rapporteur spécial recommande notamment :

– la vigilance en ce qui concerne le choix de la future implantation commune des services du ministère, dont le coût devra être maîtrisé (cf. page 13) ;

– l’ajout d’un indicateur de performance relatif au pourcentage de l’immigration économique par rapport au flux total (cf. page 16) ;

– l’ajout d’un indicateur relatif au taux d’exécution des mesures d’éloignement, qui reste très faible (seule une mesure sur cinq est exécutée), et de réformer la procédure (cf. page 25) ;

– des efforts plus intenses en vue de réduire les délais de traitement des recours par la Commission de recours des réfugiés et les délais de sortie des déboutés et des réfugiés des centres d’accueil des demandeurs d’asile (CADA) (cf. page 31) ;

– une articulation plus rationnelle entre l’ANAEM et l’ACSÉ (cf. page 45).

INTRODUCTION

La création de la mission Immigration, asile et intégration est une conséquence logique de celle du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement. Elle vise à regrouper l’ensemble des crédits concourant à ces politiques, jusqu’alors dispersés entre les missions Solidarité et intégration, Sécurité et Action extérieure de l’État et relevant de quatre ministères différents : le ministère du Travail, des relations sociales et de la solidarité, le ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, le ministère des Affaires étrangères et européennes et le ministère de la Défense.

La mise en place de la mission vient conforter la cohérence apportée par la création d’un ministère unique regroupant l’ensemble des services concernés : le parcours d’un étranger, depuis son entrée sur notre territoire jusqu’à, le cas échéant, son éloignement ou sa naturalisation, est désormais suivi dans sa totalité par une seule administration.

Cette nouvelle organisation s’inspire de celles retenues par de nombreux États, qui se sont également dotés d’un ministère chargé de l’immigration et de l’intégration. C’est le cas notamment au Canada, où ces politiques relèvent du ministère « Citoyenneté et immigration Canada » (CIC), et aux États-Unis, où elles sont confiées au département de la sécurité intérieure (Homeland Security). Elle a été préfigurée, en France, par la création, en 2005 du comité interministériel de contrôle de l’immigration (CICI) et par les rencontres entre préfets et consuls que M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de l’aménagement du territoire, a réunis à trois reprises en 2005, 2006 et 2007.

La dotation de la mission prévue pour 2008 dans le présent projet de loi de finances est de 618 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 609 millions d’euros en crédits de paiement. La mission comporte deux programmes :

– le programme Immigration et asile (422 millions d’euros en autorisations d’engagement et 414 millions en crédits de paiement) regroupe les crédits relatifs aux centres de rétention administrative, aux reconduites à la frontière, au fonctionnement de l’administration des visas, à l’accueil et à l’hébergement des demandeurs d’asile et au traitement de leur demande par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA). Il inclut également 18,3 millions d’euros de dépenses de personnel, correspondant à 370 équivalents temps plein travaillé (ETPT), ainsi que les fonctions support de la future administration centrale du ministère ;

– le programme Intégration et accès à la nationalité, doté de 195 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, finance l’accueil des étrangers par la voie du contrat d’accueil et d’intégration mis en œuvre par l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), ou par le biais d’associations financées par l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, dite ACSÉ. Il inclut également les dépenses relatives à la naturalisation ainsi que les dépenses de personnel de la direction de la population et des migrations, transférées du ministère du Travail, des relations sociales et de la solidarité.

Le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement gère par ailleurs le programme Codéveloppement de la mission Aide publique au développement, dont notre collègue Henri Emmanuelli est Rapporteur spécial (rapport AN n° 276, annexe n° 4).

Le budget prévu pour 2008 traduit les priorités d’action du ministère, telles qu’elles ont été définies par la lettre de mission que le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, a adressée, le 9 juillet 2007, à M. Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement :

– structurer le ministère et faire en sorte que toutes les administrations qui lui sont attachées travaillent dans la même direction ;

– promouvoir l’immigration choisie et concertée ;

– combattre l’immigration clandestine ;

– garantir l’exercice du droit d’asile ;

– renforcer l’intégration des étrangers en France ;

– donner un nouvel élan à la politique de codéveloppement.

RÉCAPITULATION DES CRÉDITS PAR PROGRAMME ET ACTION

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé du programme et de l’action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2007

Demandées pour 2008

FDC et ADP attendus en 2008

Ouvertes en LFI pour 2007

Demandées pour 2008

FDC et ADP attendus en 2008

303 Immigration et asile

414 965 996

422 950 535

3 540 000

411 768 423

414 250 535

3 540 00

01 Circulation des étrangers (nouveaux)

148 500

148 500

 

148 500

148 500

 

02 Garantie de l’exercice du droit d’asile (nouveau)

317 549 647

304 520 000

3 540 000

316 365 402

304 520 000

3 540 000

03 Police des étrangers (nouveau)

76 751 505

80 465 521

 

76 738 177

79 165 521

 

04 Soutien au programme Immigration et asile (nouveau)

20 516 344

37 816 514

 

18 516 344

30 416 514

 

104 Intégration et accès à la nationalité française (libellé modifié)

198 659 148

195 339 486

7 465 000

198 601 721

195 339 486

7 465 000

01 Population et participation à la régulation des migrations (ancien)

           

02 Prise en charge sociale des demandeurs d’asile

           

03 Intégration (ancien)

           

05 Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (ancien)

           

11 Accueil des étrangers primo arrivants (nouveau)

46 608 685

46 608 685

5 555 000

46 608 685

46 608 685

5 555 000

12 Intégration et lutte contre les discriminations (nouveau)

137 509 014

132 874 000

1 910 000

137 451 587

132 874 000

1 910 000

13 Aide au retour et à la réinsertion (nouveau)

 

3 000 000

   

3 000 000

 

14 Naturalisation et accès à la nationalité (nouveau)

1 468 000

1 468 000

 

1 468 000

1 468 000

 

15 Soutien du programme Intégration et accès à la nationalité (nouveau)

13 073 449

13 388 801

 

13 073 449

13 388 801

 

PRÉSENTATION DES CRÉDITS PAR PROGRAMME ET PAR TITRE

Numéro et intitulé du programme et du titre

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2007

Demandées pour 2008

FDC et ADP attendus en 2008

Ouvertes en LFI pour 2007

Demandées pour 2008

FDC et ADP attendus en 2008

303 Immigration et asile

414 965 996

422 950 535

3 540 000

411 768 423

414 250 535

3 540 00

Titre 2 Dépenses de personnel

11 201 239

18 363 514

 

11 201 239

18 363 514

 

Autres dépenses 

403 764 757

404 587 021

3 540 000

400 567 184

395 887 021

3 540 000

Titre 3 Dépenses de fonctionnement

116 288 595

116 813 500

 

116 288 595

116 813 500

 

Titre 5 Dépenses d’investissement

5 442 105

13 000 000

 

3 442 105

5 600 000

 

Titre 6 Dépenses d’intervention

282 034 057

274 773 521

3 540 000

280 836 484

273 473 521

3 540 000

104 Intégration et accès à la nationalité française (libellé modifié)

198 659 148

195 339 486

7 465 000

198 601 721

195 339 486

7 465 000

Titre 2 Dépenses de personnel

12 844 334

13 159 686

 

12 844 334

13 159 686

 

Autres dépenses 

185 814 814

182 179 800

7 465 000

185 757 387

182 179 800

7 465 000

Titre 3 Dépenses de fonctionnement

163 148 299

56 347 800

 

163 148 299

56 347 800

 

Titre 6 Dépenses d’intervention

22 666 515

125 832 000

7 465 000

22 609 088

125 832 000

7 465 000

Totaux pour la mission

613 625 144

618 290 021

11 005 000

610 370 144

609 590 021

11 005 000

Dont :

           

Titre 2 Dépenses de personnel

24 045 573

31 523 200

 

24 045 573

31 523 200

 

Autres dépenses 

589 579 571

586 766 821

11 005 000

586 324 571

578 066 821

 

Titre 3 Dépenses de fonctionnement

279 436 894

173 161 300

 

279 436 894

173 161 300

 

Titre 5 Dépenses d’investissement

5 442 105

13 000 000

 

3 442 105

5 600 000

 

Titre 6 Dépenses d’intervention

304 700 572

400 605 521

11 005 000

303 445 572

399 305 521

11 005 000

I.– LA MISE EN PLACE DU MINISTÈRE DE L’IMMIGRATION, DE L’INTÉGRATION, DE L’IDENTITÉ NATIONALE ET DU CODÉVELOPPEMENT

La création d’un nouveau ministère de plein exercice est un événement peu fréquent sous la VRépublique : le dernier précédent remonte à 1971, avec la création du ministère de l’Environnement. Ce premier exercice budgétaire pour le ministère nouvellement créé sera marqué par la mise en place, à compter du 1er janvier 2008, d’une administration centrale, dont il est actuellement dépourvu. Son secrétaire général sera M. Patrick Stéfanini. L’organigramme de cette administration n’est pas encore finalisé à ce jour, mais les grandes orientations en sont connues.

A.– LE REGROUPEMENT D’ADMINISTRATIONS JUSQU’ALORS DISPERSÉES

La structure du ministère est la traduction du décret n° 2007-999 du 31 mai 2007 déterminant les attributions du ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement. Ce décret donne une compétence très large au ministre, lequel prépare et met en œuvre les règles relatives aux conditions d’entrée, de séjour et d’exercice d’une activité professionnelle en France des étrangers. Il est également compétent en matière d’asile, de protection subsidiaire et de prise en charge sociale des personnes concernées, ainsi que pour l’accueil et l’intégration des populations immigrées. Il a la charge des naturalisations et de l’enregistrement des déclarations de nationalité à raison du mariage, ainsi que du codéveloppement. Le ministre est associé à la politique menée en faveur du rayonnement de la francophonie et participe à la politique de la mémoire et à la promotion de la citoyenneté.

Le décret précise que le ministre a, pour l’exercice de ses attributions, autorité conjointe, avec les ministres concernés, sur la direction des libertés publiques et des affaires juridiques et la direction générale de la police nationale, la direction des Français à l’étranger et des étrangers en France et la direction de la population des migrations. En pratique, certains services – voire la totalité des services s’agissant de la direction de la population et des migrations – de ces directions seront transférés au nouveau ministère.

L’administration centrale du ministère s’appuiera ainsi, en premier lieu, sur des personnels transférés d’autres administrations :

– 231 équivalents temps plein travaillé (ETPT) correspondent à la totalité de la direction de la population et des migrations (DPM) du ministère du Travail, des relations sociales et de la solidarité ;

– 137 ETPT proviennent du service des étrangers en France de la direction des Français à l’étranger et des étrangers en France (DFAE) du ministère des Affaires étrangères ;

– 101 ETPT sont transférés de la sous-direction des étrangers et de la circulation transfrontière de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ) du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;

– des effectifs plus modestes proviennent de la mission « visas biométriques » (8), du haut conseil à l’intégration et du comité interministériel de contrôle de l’immigration (1) ;

– l’ambassadeur au codéveloppement et ses collaborateurs (3) sont également transférés du ministère des Affaires étrangères.

LES EMPLOIS ET LES SERVICES TRANSFÉRÉS

Origine des emplois

Nombre en ETPT

Travail et solidarité (DPM et HCI)

239

Affaires étrangères et européennes (SEF)

140

Intérieur (SDECT et Mission visa)

110

Budget (taxation)

20

Mesures nouvelles

100

Au total, 489 ETPT sont transférés. S’y ajouteront 120 emplois créés(1) (29 A et A+, 29 B et 69 C) dont 50 à 60 seront affectés aux services du cabinet du ministre et 60 à 70 aux services à compétence transversale du secrétariat général. Ceux-ci incluront notamment une direction de l’administration générale, une direction de la stratégie (en charge du contrôle de gestion des statistiques, des études et de la stratégie d’ensemble des systèmes d’information), un département des affaires internationales et du codéveloppement, et un département des affaires européennes, dans la perspective de la présidence française de l’Union européenne au second semestre 2008.

Les dépenses de personnel du ministère s’élèvent, au total, à 31,5 millions d’euros, pour un plafond d’autorisation d’emplois exprimé en équivalents temps plein travaillé (ETPT) de 609 ETPT. Les dépenses de fonctionnement de l’administration centrale sont d’un montant de près de 6,7 millions d’euros.

B.– VERS UNE IMPLANTATION COMMUNE DES SERVICES DU MINISTÈRE

Le ministre souhaite regrouper l’ensemble de ces services, à l’exception de la sous-direction des naturalisations de la direction de la population et des migrations ainsi que de la sous-direction de la circulation des étrangers, qui resteront implantées à Nantes et à Rezé. Cette localisation unique semble effectivement indispensable pour développer une culture commune et mieux faire travailler ensemble ces services.

Votre Rapporteur spécial appelle cependant à la vigilance en ce qui concerne le choix de l’implantation de l’administration centrale du ministère. Une localisation dans le centre de Paris présenterait certes l’avantage de la proximité avec le ministre et son cabinet (situés rue de Grenelle, dans le 7e arrondissement), mais elle renchérirait considérablement le coût de l’opération, qui sera financé par la vente du siège de l’ANAEM, située dans le 15e arrondissement. Ce sujet fera l’objet d’un suivi conjoint avec M. Yves Deniaud, Rapporteur spécial sur la Gestion du patrimoine immobilier de l’État.

II.– PROMOUVOIR L’IMMIGRATION CHOISIE ET CONCERTÉE

La promotion de l’immigration concertée est une priorité fixée par le Président de la République. Sa lettre de mission au ministre l’invite à viser l’objectif que l’immigration économique représente 50 % du flux total des entrées à fin d’installation durable en France (contre 7 % aujourd’hui) à l’horizon 2012, ainsi qu’à fixer chaque année des plafonds d’immigration selon les différents motifs d’installation en France et selon les régions d’origine (ce qui nécessitera sans doute une révision constitutionnelle).

A.– LE DÉVELOPPEMENT DE L’IMMIGRATION ÉCONOMIQUE

L’objectif de parvenir à 50 % d’immigration économique sur l’ensemble des flux des entrées à fin d’installation durable est particulièrement ambitieux : un pays d’immigration de peuplement comme le Canada, par exemple, affiche un taux compris entre 55 et 60 %, mais inclut en réalité dans cette catégorie le conjoint et les enfants du demandeur (qui relèvent du regroupement familial en France). L’immigration économique n’y est en fait que de l’ordre de 25 %(2).

Il s’agit d’un engagement fort du Président de la République, qui nécessitera une véritable « révolution » de notre politique d’immigration. Sa mise en œuvre requiert une inversion de tendance, car la part de l’immigration économique a diminué au cours des dernières années.

PREMIERS TITRES DE SÉJOUR DÉLIVRÉS PAR MOTIFS DE DÉLIVRANCE

 

2004

2005

2006

Économique

13 255

13 645

13 471

Étudiants

52 964

48 892

47 155

Familial

96 608

94 690

98 780

Divers

23 895

22 518

21 855

Réfugiés

13 656

15 184

10 214

Total

200 378

194 929

191 475

La priorité politique ainsi accordée au développement de l’immigration professionnelle n’est pas suffisamment développée dans le projet annuel de performances. Celui-ci ne comporte qu’un indicateur sur ce sujet, relatif à la durée moyenne d’instruction des recours hiérarchiques dirigés vers des décisions de refus d’autorisation de travail.

Cette politique repose en premier lieu sur la mise en œuvre de dispositifs attractifs, visant à simplifier l’immigration professionnelle, telles que les cartes « compétences et talents », « salarié en mission », la procédure « cadre dirigeant et de haut niveau » et l’ouverture du marché du travail aux ressortissants de pays tiers et des nouveaux États membres de l’Union européenne dans les métiers en tension. Ces dispositifs visent non pas à organiser un « pillage des cerveaux », mais à favoriser la circulation des compétences.

La carte « compétences et talents » a été créée par l’article 15 de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, dont le décret d’application n° 2007-372 a été publié le 21 mars 2007. D’une durée de trois ans renouvelable, elle est attribuée en fonction de la personnalité des demandeurs, dont le projet doit être susceptible de contribuer au développement économique de la France ou à son rayonnement. La commission nationale des compétences et talents, présidée par M. Pierre Bellon, président de Sodexho, est en cours de constitution. Elle déterminera les critères permettant la délivrance, avant la fin de l’année 2007, des premières cartes « compétences et talents ».

La loi du 24 juillet 2006 a également créé la carte « salariés en mission » afin de renforcer l’attractivité de notre territoire pour les groupes internationaux, qui ont besoin de pouvoir assurer la mobilité de leurs salariés entre leurs différents établissements. Le projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, en cours d’examen par le Parlement, assouplira encore cette procédure en supprimant l’opposabilité de l’emploi pour ces salariés. L’application de la procédure « cadre dirigeant et de haut niveau » sera également assouplie prochainement, grâce à l’abaissement de son seuil de déclenchement et à son extension à tous les salariés en mission, y compris les détachés.

Les procédures d’introduction de la main-d’œuvre étrangère sur notre marché du travail ont aussi été réformées par la loi du 24 juillet 2006. La situation de l’emploi n’est ainsi plus opposable, dans les secteurs en tension, aux ressortissants des nouveaux États membres de l’Union européenne pour lesquels des dispositions transitoires sont encore applicables (soit, jusqu’au 1er mai 2009, les huit pays d’Europe centrale et orientale ayant adhéré le 1er mai 2004, ainsi que la Bulgarie et la Roumanie jusqu’au 1er janvier 2012). La liste des 62 métiers en tension sera prochainement complétée, à l’issue d’une concertation avec les fédérations professionnelles. Une seconde liste sera en outre établie, par zone géographique, afin d’étendre cette ouverture partielle aux ressortissants de pays tiers à l’Union européenne, dans les secteurs connaissant des difficultés de recrutement.

Les formalités administratives pesant sur les étudiants étrangers ont par ailleurs été réduites par la loi du 24 juillet 2006, précitée. Sont notamment visés les étudiants qui seront passés par les centres pour les études en France (CEF), progressivement mis en place dans l’ensemble de nos ambassades. Les jeunes diplômés étrangers venant de terminer leur master bénéficient en outre d’une autorisation de séjour de six mois pour chercher un travail afin d’acquérir une première expérience professionnelle en relation avec leurs études. Le nombre d’étudiants étrangers en France a augmenté de 75 % en moins de dix ans, pour atteindre 265 000 en 2005, mais il convient de diversifier leur origine et de recruter davantage d’étudiants dans les disciplines scientifiques.

La loi actuellement soumise à l’examen du Conseil constitutionnel comporte d’autres dispositions favorables à l’immigration professionnelle. Le bilan de compétences professionnelles sera ainsi rendu obligatoire pour tous les primo arrivants (sauf exceptions fixées par décret) afin de les orienter vers des secteurs professionnels connaissant une pénurie de main-d’œuvre. Il sera également possible de régulariser, à titre dérogatoire et dans des cas qui devront rester exceptionnels, un étranger en situation irrégulière qui se prévaudrait d’une promesse d’embauche dans un secteur en tension.

Les conséquences budgétaires de cette politique restent modestes, puisque l’action qui lui est consacrée dans la mission, Circulation des étrangers, ne recueille que 148 500 euros. Ces crédits sont relatifs au fonctionnement de l’administration des visas. Il faudrait y ajouter, pour avoir une vision complète, une partie – qu’il n’est pas possible d’estimer en l’absence d’une comptabilité analytique – des dépenses de fonctionnement de la direction de la population et des migrations, notamment chargée de traiter, en liaison avec les préfectures, les demandes d’autorisations de travail et le contentieux y relatif. Il serait par ailleurs souhaitable d’y inclure, lors du prochain exercice budgétaire, les crédits relatifs au développement de l’application « réseau mondial visa », qui restent actuellement dans le cadre de la mission Action extérieure de l’État.

Il serait souhaitable que la priorité accordée au développement de l’immigration économique soit rendue plus visible, grâce à l’introduction d’un indicateur de performance relatif à son pourcentage par rapport au flux total. Cela nécessiterait, bien entendu, de mieux définir ce qui doit être inclus dans l’immigration économique (s’agissant, par exemple, des étudiants étrangers).

Votre Rapporteur spécial recommande par ailleurs que les crédits relatifs à l’application « réseau mondial visa » soient transférés, lors du prochain exercice budgétaire, de la mission Action extérieure de l’État à la mission Immigration, asile et intégration dont ils relèvent davantage.

B.– UNE IMMIGRATION FAMILIALE MIEUX ENCADRÉE

Le renforcement de la part de l’immigration économique doit s’accompagner d’une plus grande maîtrise de l’immigration familiale. Celle-ci comporte trois composantes principales : les familles de Français (conjoints de Français, parents d’enfants français, enfants mineurs ou à charge de Français, ascendants à charge d’un Français ou de son conjoint), les membres de familles (qui constituent le regroupement familial au sens strict) et les étrangers dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser leur séjour porterait à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus.

L’IMMIGRATION FAMILIALE : FLUX D’ENTRÉE CONTRÔLÉS PAR L’ANAEM

 

2004

2005

2006

Regroupement familial

23 485

21 069

17 309

Familles de Français

61 625

56 609

57 995

Liens personnels et familiaux

13 989

14 219

22 041

La loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité a marqué une première étape concernant la maîtrise de l’immigration familiale. Elle a notamment modifié le régime de vérification des conditions de logement et de ressources, dorénavant confié aux maires. Ceux-ci peuvent l’exercer directement ou confier cette mission à l’ANAEM, afin d’émettre un avis motivé au préfet. Elle a soumis les personnes regroupées aux conditions de droit commun pour l’obtention d’une carte de résident, à savoir une présence régulière de cinq ans en France et le respect de la condition d’intégration républicaine. Le législateur a imposé au regroupant de disposer de ressources au moins égales au SMIC et a porté à deux ans (contre un précédemment) la durée de vie commune nécessaire pour que le conjoint étranger d’un Français puisse obtenir une carte de résident. Il a également renforcé le contrôle des mariages de complaisance.

La loi du 24 juillet 2006 a ensuite fait passer de douze à dix-huit mois la durée du séjour nécessaire pour demander le regroupement familial et exclu toutes les prestations sociales du champ de calcul des ressources du regroupant. Elle a modifié la condition de logement, qui varie désormais en fonction de critères géographiques. La loi n° 2006-1376 du 14 novembre 2006 relative au contrôle de la validité des mariages a aussi renforcé la lutte contre les mariages de complaisance et les mariages forcés.

La loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, en cours de contrôle de constitutionnalité, poursuit dans cette voie. Il prévoit notamment de moduler la condition de revenu en fonction de la taille de la famille dans le cadre du regroupement familial et de soumettre la délivrance de la carte de séjour « liens personnels et familiaux » à la connaissance des valeurs de la République.

C.– LE DÉVELOPPEMENT DES ACCORDS D’IMMIGRATION CONCERTÉE

Une politique d’immigration ne peut être efficace que si elle est concertée avec les pays d’origine. Des partenariats doivent être conclus avec les pays en développement sources de l’immigration, pour réguler ensemble, dans l’intérêt des deux parties, les flux migratoires.

Cette politique repose sur la conclusion d’accords de gestion concertée des migrations. Ces accords de nouvelle génération, par rapport aux simples accords de réadmission, comportent des dispositions non seulement sur le retour dans leur pays des étrangers en situation irrégulière, mais aussi sur la circulation des personnes, l’admission au séjour, la surveillance des frontières, la participation des migrants au développement de leur pays d’origine et la coopération pour le développement. Ils intègrent des préoccupations de contrôle des frontières, de maîtrise des flux migratoires à une stratégie plus générale de soutien à des actions conduites par les migrants dans le domaine de la santé, de l’enseignement supérieur et de la formation, de la gouvernance et du développement économique.

Le premier accord de ce type a été signé par M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de l’aménagement du territoire, avec le Sénégal le 23 septembre 2006. Le deuxième a été signé par M. Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, le 5 juillet 2007. Deux autres accords de ce type sont en négociation avec le Bénin et la République du Congo. La signature de six autres accords est envisagée en 2008, avec Haïti, Madagascar, la République démocratique du Congo, le Cameroun et le Togo. Des négociations devraient également s’ouvrir d’ici la fin de l’année avec les Philippines.

Au total, le Gouvernement s’est fixé pour objectif de conclure vingt accords de gestion concertée des flux migratoires au cours de la période 2008-2010 : 6 en 2008, 7 en 2009 et 7 en 2010. Il a fait du taux de conclusion de ces accords l’un des indicateurs de performance du programme Codéveloppement de la mission Aide publique au développement. Chacun de ces accords est accompagné d’un financement d’un montant de 2 millions d’euros en crédits de paiement, soit un total de 12 millions d’euros en crédits de paiement et de 42 millions d’euros en autorisations d’engagement en 2008, figurant dans le programme Codéveloppement.

III.– COMBATTRE L’IMMIGRATION CLANDESTINE

Les crédits relatifs à la lutte contre l’immigration illégale sont regroupés dans l’action n° 3, intitulée Police des étrangers, du programme Immigration et asile. Ils s’élèvent à 80,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 79,1 millions d’euros en crédits de paiement. Ces crédits visent à couvrir les dépenses relatives à la rétention et à l’éloignement des étrangers en situation irrégulière, ainsi qu’à l’accompagnement social des personnes en rétention.

A.– LA POURSUITE DE L’AUGMENTATION DU NOMBRE DE PLACES EN CENTRES DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

1.– Une rationalisation souhaitable de la gestion des centres de rétention administrative

La prévision de crédits prévus au titre du fonctionnement des centres de rétention administrative (CRA) pour 2008 est de 27,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ces montants n’incluent que le fonctionnement dit « hôtelier » (restauration, blanchisserie, maintenance, etc.) des 23 CRA, sous-traité par la direction générale de la police nationale (DGPN) et la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) depuis le 1er janvier 2007. Les coûts de construction des CRA et les crédits relatifs aux agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale concourant au fonctionnement des CRA n’ont en revanche pas été transférés de la mission Sécurité.

Cet éparpillement des crédits entre deux missions ne permet pas d’avoir une vision globale du coût des centres de rétention administrative, et il serait souhaitable qu’au moins les coûts de construction des CRA, une fois achevé le plan triennal d’augmentation du nombre de places en CRA, soient transférés à la mission Immigration.

Le nombre de places en CRA devrait être porté à 2 391 à la mi-2008, dont 2 053 places gérées par la direction générale de la police nationale et 338 par la direction générale de la gendarmerie nationale, soit 2 155 places à financer en année pleine 2008, compte tenu des dates d’ouvertures prévues. Le coût moyen à la place est de 31,50 euros par jour.

La durée moyenne de détention en CRA est d’une dizaine de jours (9,94 jours en moyenne en 2006, contre 5,6 en 2003). Elle reste donc bien en deçà de la durée maximale de rétention, que la loi du 26 novembre 2006 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité a porté à 32 jours, dans certaines circonstances. Cet allongement a cependant renforcé l’efficacité de la procédure de rétention et d’éloignement, en facilitant notamment l’obtention des laissez-passer consulaires (de nombreux consulats expliquant, sous l’empire de la législation antérieure, l’impossibilité de procéder à la délivrance des documents de voyage en raison de la longueur de leur propre procédure en matière de vérification de l’état civil de leurs ressortissants). Le taux global de délivrance des laissez-passer consulaires est ainsi passé de 28,7 % en 2003 à 42 % en 2006.

Les objectifs du plan triennal d’augmentation des places, qui prévoyait de passer de 943 places en juin 2005 à 2 400 places à l’échéance de juin 2008, seront ainsi tenus. L’effort d’investissement prévu en 2008 reste important, avec l’ouverture de 96 nouvelles places sur le site de Coquelles, 30 à Nanterre, 96 à Roissy, 136 à Orly et 95 au CRA de Metz 2. Il vient conforter celui réalisé en 2007, qui s’est traduit par l’ouverture de trois nouveaux CRA (Hendaye, Roissy et Martinique-Lamentin), des extensions (Mesnil Amelot) et des augmentations de places (Rouen, Vincennes et Guyane-Rochambeau).

Le taux d’occupation moyen est de 78 % au premier semestre 2007 (contre 83 % en 2006). Les taux d’occupation réelle varient cependant fortement d’un CRA à l’autre, comme l’illustre le tableau suivant.

TAUX D’OCCUPATION DES CENTRES DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

Centre de
rétention

Taux
d'occupation réelle
(hommes)

Taux
d'occupation réelle
(femmes)

Taux
d'occupation réelle
(familles)

Bobigny

90 %

   

Bordeaux

83 %

   

Coquelles

90 %

73 %

49 %

Geispolsheim

91 %

73 %

 

Le Mesnil Amelot

94 %

41 %

 

Lille Lesquin 1

37 %

 

 

Lille Lesquin 2

81 %

61 %

10 %

Lyon Saint-Exupéry

89 %

70 %

30 %

Marseille Cannet

85 %

13 %

67 %

Nantes

91 %

100 %

 

Nice Auvare

88 %

43 %

 

Palaiseau

80 %

74 %

 

Paris 1

94 %

   

Paris 2

94 %

   

Paris 3

 

71 %

 

Plaisir

103 %

98 %

5 %

Rivesaltes

80 %

23 %

 

Rouen Oissel

81 %

21 %

34 %

Sète

74 %

16 %

 

Toulouse 1

27 %

   

Toulouse Cornebarrieu

85 %

39 %

13 %

Taux moyens

82 %

54 %

30 %

D’une manière générale, l’éclatement de la gestion des CRA entre la direction centrale de la police aux frontières, la direction de la sécurité publique et la gendarmerie nationale ne permet pas d’optimiser leur fonctionnement. Une instance unique de gestion des CRA serait souhaitable et permettrait d’en rationaliser le pilotage. Un recours accru et mieux coordonné à l’externalisation de certaines tâches, non liées à la garde et à l’escorte des personnes retenues, pourrait également être envisagé. Votre Rapporteur spécial recommande que ces pistes soient explorées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques et lors de l’élaboration de l’organigramme du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement.

L’éparpillement des crédits relatifs aux centres de rétention administrative (CRA) entre les missions Sécurité et Immigration, asile et intégration ne permet pas d’avoir une vision complète de leur coût. Votre Rapporteur spécial recommande de regrouper les crédits relatifs à la construction et au fonctionnement des CRA au sein de la mission Immigration, asile et intégration.

L’éclatement de la gestion des CRA entre la direction générale de la police nationale (DGPN) et la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) ne permet pas d’en optimiser le fonctionnement. Une instance unique de gestion des CRA devrait être mise en place pour en rationaliser le pilotage. Un recours accru et mieux coordonné à l’externalisation de certaines tâches devrait également être envisagé.

2.– Un retard regrettable concernant la salle d’audience aménagée à Roissy

La loi n° 92-625 du 6 juillet 1992 prévoit que le magistrat judiciaire compétent – qui est aujourd’hui le juge des libertés et de la détention – peut statuer, en matière de prolongation du maintien d’une personne en zone d’attente, dans une salle d’audience spécialement prévue à cet effet sur l’emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire. Une telle salle a été construite sur le site aéroportuaire de Roissy en 2001. La loi du 26 novembre 2003 a apporté des précisions au dispositif et l’a rendu directement applicable, mais la salle d’audience de Roissy n’est toujours pas utilisée.

Ce retard est fort regrettable et contraste avec la réussite de l’expérience de délocalisation des audiences opérée au centre de rétention administrative de Coquelles (Pas-de-Calais). Les travaux supplémentaires qui ont été engagés à Roissy afin d’adapter ces locaux aux besoins de l’institution judiciaire – qui devaient initialement s’achever au premier trimestre 2007 – devront être terminés au plus vite. Ils visent notamment à matérialiser clairement sur la façade qu’il s’agit d’une annexe du tribunal de grande instance de Bobigny et à permettre un libre accès (néanmoins contrôlé) des avocats et du public aux audiences. Une deuxième salle d’audience de plus grande capacité est également prévue et bénéficiera de la visioconférence. Une navette sera en outre mise en place entre Bobigny et Roissy, afin de faciliter les déplacements des magistrats et fonctionnaires appelés à participer aux audiences. Le ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales prévoit une entrée en service à la fin de l’année 2008.

B.– L’ASSISTANCE SOCIALE ET SANITAIRE AUX PERSONNES RETENUES

Les personnes retenues en centre de rétention administrative bénéficient de prestations d’information, de soutien et d’aide pour préparer les conditions matérielles de leur départ, fournies par l’ANAEM, d’une couverture sanitaire sur place, assurée par voie de convention passée par le préfet territorialement compétent avec un établissement public hospitalier, et enfin de prestations permettant l’exercice effectif de leurs droits, qui sont actuellement assurées par l’association CIMADE.

En ce qui concerne la couverture sanitaire, le coût moyen de la place est estimé à 3 643 euros, ce qui conduit à une prévision de 8 millions d’euros (en incluant les interventions sanitaires sur la zone d’attente pour personnes en instance – ZAPI – de l’aéroport de Roissy) pour 2008, soit une augmentation de 24 % par rapport à 2007, liée à l’augmentation du nombre de places.

La prévision de crédits concernant les actions d’information et de soutien visant à permettre l’exercice effectif de leurs droits par les étrangers retenus dans un CRA s’élève à 5,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 3,8 millions d’euros en crédits de paiement en 2008. Ces actions sont effectuées par la CIMADE dans le cadre d’un marché public avec l’État.

C.– LE FAIBLE TAUX D’EXÉCUTION DES MESURES D’ÉLOIGNEMENT SOULIGNE LA NÉCESSITÉ DE RÉFORMER LA PROCÉDURE

L’éloignement des étrangers en situation irrégulière ayant fait l’objet d’une telle mesure, quelle que soit sa nature (obligation de quitter le territoire français, arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, arrêté ministériel d’expulsion, interdiction du territoire), est une composante clef de la lutte contre l’immigration illégale.

Les crédits prévus à ce titre pour 2008 s’élèvent à 39,6 millions d’euros en 2008, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ils n’incluent que les frais de billetterie d’avion, de train ou de bateau, le coût lié à la rémunération des fonctionnaires mobilisés pour l’escorte des personnes éloignées figurant pour sa part dans la mission Sécurité.

1.– Des reconduites à la frontière en légère baisse à la suite de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie

L’objectif fixé pour 2008 s’élève à 26 000 reconduites effectives à la frontière depuis la métropole, soit une baisse significative par rapport à la prévision initiale du PAP 2007 pour cette année, qui était de 28 000, et une légère augmentation par rapport à la prévision actualisée, qui a été ramenée, de manière plus réaliste, à 25 000. L’adhésion à l’Union européenne le 1er janvier 2007 de la Bulgarie et de la Roumanie, dont les ressortissants ont représenté environ un quart du total des reconduites en 2006, a évidemment entraîné une baisse des reconduites. Au premier semestre 2007, le nombre de reconduites (10 070) a ainsi reculé de 8,4 % par rapport au premier semestre 2006 (11 002). Cette légère décrue fait suite à de fortes hausses depuis 2003 : les éloignements ont doublé en trois ans ( + 103 %), passant de 11 692 mesures exécutées à 23 831 en 2006.

La cible pour 2010 reste ambitieuse, avec 28 000 reconduites.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D'ÉLOIGNEMENTS DES ÉTRANGERS

Les cinq nationalités les plus représentées en 2006 étaient les Roumains, les Algériens, les Marocains, les Turcs et les Bulgares. Au premier semestre 2007, les nationalités algérienne, marocaine, turque, indienne et tunisienne étaient les plus représentées, en dépit d’un certain tassement.

CLASSEMENT DES 5 NATIONALITÉS LES PLUS REPRÉSENTÉES

(Éloignement effectif à partir de la métropole)

Rang

2003

(11 692)

2004

(16 850)

2005

(19 841)

2006

(23 831)

6 mois 2007

(10 070)

1

Algérienne (2 513)

Algérienne (3 581)

Roumaine (3  815)

Roumaine (5 041)

Algérienne (1 481)

2

Roumaine (2 091)

Roumaine (2 487)

Algérienne (3 408)

Algérienne (3 170)

Marocaine (1 185)

3

Marocaine (1 335)

Marocaine (1 575)

Marocaine (2 048)

Marocaine (2 062)

Turque (899)

4

Turque (630)

Turque (1 216)

Turque (1 897)

Turque (2 052)

Indienne (488)

5

Tunisienne (507)

Tunisienne (669)

Bulgare (793)

Bulgare (1 201)

Tunisienne (477)

2.– Seule une mesure d’éloignement sur cinq est exécutée

Un indicateur de performance relatif au taux d’exécution global (rapportant le nombre d’éloignements effectifs au nombre de mesures prononcés) pourrait être utilement ajouté au projet annuel de performances. Il constitue en effet un indicateur de l’efficacité de cette politique et des obstacles rencontrés. Ce taux est de 29,5 % en 2006 et d’environ 20 % au premier semestre 2007. Cela signifie que seule une mesure d’éloignement prononcée sur cinq est exécutée. Ce constat préoccupant souligne qu’il existe encore d’importantes marges de progression.

Les principaux motifs d’échec sont essentiellement exogènes à l’action des préfectures et des services de police et de gendarmerie concernés. Les annulations de procédure par le juge des libertés et de la détention (JLD) et la non-délivrance de laissez-passer consulaires par les autorités du pays concerné sont les deux premières causes d’échec. Le taux de délivrance des laissez-passer consulaires dans les délais, qui avait fortement augmenté entre 2003 et 2005 (de 28,73 % à 45,73 %), a diminué en 2006 (42 %) et au premier semestre 2007 (37 %). Le manque de places en CRA est en revanche un facteur en diminution, compte tenu de l’augmentation des capacités d’accueil des centres.

ÉVOLUTION DU TAUX DE DÉLIVRANCE DES LAISSEZ-PASSER CONSULAIRES

Année

Laissez-passer demandés

Laissez-passer obtenus dans les délais utiles

Laissez-passer obtenus hors délais

Laissez-passer refusés

Demandes laissées sans réponse

Taux de délivrance dans les délais

Taux de délivrance global

2003

16 597

4 773

416

8 005

3 403

28,76 %

31,26%

2004

14 913

5 243

318

5 941

2 408

35,16%

37,29%

2005

14 128

6 461

223

4 058

3 682

45,73%

47,31%

2006

13 551

5 703

245

3 726

3 850

42,09%

43,89%

2007

(1er semestre)

7 015

2 597

139

2 141

2 147

37,02 %

39,00 %

Ces difficultés exigent une mobilisation accrue. S’agissant des laissez-passer consulaires, les pressions exercées sur les pays les moins coopératifs doivent être intensifiées, et les accords de gestion concertée des migrations devraient permettre de renforcer la coopération avec les pays concernés.

Les annulations de procédures par les juridictions administratives et surtout judiciaires pourraient voir leur nombre diminuer grâce la représentation systématique de l’État par l’un de ses agents ou un avocat lors des audiences. Des expériences fructueuses sont déjà menées en ce sens dans plusieurs départements, comme le Rhône, le Nord et le Puy-de-Dôme, où il est notamment fait appel à des réservistes de la police ou de la gendarmerie et où les fonctionnaires concernés sont formés à cette fin.

À plus long terme et de manière plus ambitieuse, l’unification du contentieux de l’entrée, du séjour et de l’éloignement des étrangers au profit d’un seul ordre juridictionnel – qui nécessiterait une révision constitutionnelle préalable, évoquée par le ministre de l’Immigration, de l’asile, de l’identité nationale et du codéveloppement lors du débat au Parlement sur le projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile – permettrait de rationaliser la procédure et d’en accroître l’efficacité. Elle limiterait notamment les multiples va-et-vient entre les juridictions et les CRA.

Votre Rapporteur spécial recommande d’ajouter un indicateur de performance relatif au taux d’exécution global des mesures d’éloignement prononcées.

Le taux de délivrance des laissez-passer consulaires devrait être amélioré grâce à des pressions accrues sur les pays non coopératifs et la conclusion d’accords de gestion concertée des migrations. La représentation systématique de l’État lors des audiences contribuerait également à diminuer le taux d’annulation.

À plus long terme, l’unification du contentieux au profit d’un seul ordre juridictionnel permettrait de rationaliser la procédure d’éloignement.

3.– Une absence regrettable d’évaluation du coût complet d’un éloignement

Des estimations divergentes sur le coût moyen d’une reconduite figurent dans le projet annuel de performances. Ce coût est ainsi estimé à 1 523 euros, dans la partie justification au premier euro consacrée à l’action Police des étrangers, tandis que l’indicateur n° 4.1 évalue le coût moyen d’une reconduite à la frontière à 1 800 euros en 2007 et en 2008, soit 20 % de plus, en ordre de grandeur.

Au-delà de ces divergences, aucune de ces deux estimations n’inclut la totalité des coûts liés à l’éloignement : le coût des heures fonctionnaires, par exemple, n’est pas inclus. D’après les informations transmises à votre Rapporteur spécial, le coût de l’éloignement d’un étranger serait ainsi, pour la seule police aux frontières, d’environ 2 450 euros. Ce coût lui-même reste partiel, puisqu’il ne comptabilise pas :

– les activités d’investigation et d’interpellations réalisées par tous les services de police ou de gendarmerie ;

– les activités d’escorte et de garde à vue des services de police et de gendarmerie, réalisées avant la notification de la décision ministérielle ou préfectorale de reconduite ou d’expulsion ;

– les activités d’escorte des autres directions de police ou de la gendarmerie réalisées après le placement en CRA ;

– les activités de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l’Intérieur directement rattachables à l’éloignement ;

– les activités des bureaux des étrangers et des cabinets des préfets relatives à l’éloignement ;

– les activités des différentes juridictions intervenant au cours de la procédure ;

– les activités d’assistance aux personnes éloignées réalisées par les associations, en partie subventionnées par l’État.

De plus, certaines charges directes n’ont pas pu être estimées, telles que les charges d’amortissement de l’immobilier affecté en totalité au processus de l’éloignement, les charges d’amortissement d’un nombre non négligeable de véhicules, les charges de carburants, etc.

La généralisation de la main courante informatisée à l’ensemble des services de police concernés, le déploiement de l’application informatique ELOI (3) et la mise en place d’une comptabilité analytique devraient permettre, à terme, de connaître l’ensemble des coûts. La présentation d’un coût complet avait été annoncée, en 2007, comme devant figurer dans le PAP 2008. Cet engagement n’a pas été tenu. La Cour des comptes a d’ailleurs déploré, dans son rapport public annuel publié en février 2007, cette absence d’évaluation du coût global de la politique d’éloignement.

L’élaboration d’un document de politique transversale (DPT), annexé au projet de loi de finances pour 2009, pourrait également permettre de progresser sur ce point et d’avoir une vision plus claire du coût global de la politique d’éloignement.

Il est regrettable qu’aucune évaluation fiable du coût complet d’un éloignement, incluant notamment le coût des heures fonctionnaires, n’ait pu être fournie dans le projet annuel de performances. Une estimation de ce coût complet devrait figurer dans le projet annuel de performances pour 2009, ainsi que dans un document de politique transversale.

IV.– GARANTIR L’EXERCICE DU DROIT D’ASILE

L’ensemble des crédits relatifs à l’asile est regroupé dans l’action n° 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile. La création du ministère de l’Immigration, de l’asile, de l’identité nationale et du codéveloppement et de la mission Immigration, asile et intégration permet ainsi d’avoir une vision complète de la politique d’asile, jusque là éclatée entre les missions Solidarité, pour les dépenses d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile, et Action extérieure de l’État, en ce qui concerne la subvention versée à l’OFPRA. Ce regroupement des dépenses illustre la cohérence accrue apportée par la création du nouveau ministère.

Le montant des crédits demandés à ce titre pour 2008 s’élève à 304,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (soit une baisse de 3,7 % par rapport à 2007, justifiée par la diminution de la demande d’asile), dont 43 millions pour la subvention versée à l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), 233 millions d’euros pour l’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile et 28 millions pour l’allocation temporaire d’attente (ATA), en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement. La moitié du budget de la mission est ainsi consacrée aux demandeurs d’asile, conformément à notre tradition ancienne, et jamais démentie, d’accueil des réfugiés politiques et à l’attachement de notre République pour le droit d’asile.

A.– LE TRAITEMENT DE LA DEMANDE D’ASILE PAR L’OFPRA ET LA COMMISSION DE RECOURS DES RÉFUGIÉS

La poursuite de la diminution de la demande d’asile, à un rythme plus modéré qu’en 2006, justifie une légère diminution de la subvention versée à l’OFPRA en 2008. Une importante réforme de la Commission de recours des réfugiés (CRR, appelée à devenir la « Cour nationale de l’asile ») devrait voir le jour en 2008 et conduire à l’autonomie budgétaire de la CRR à l’égard de l’OFPRA.

1.– L’évolution de la demande d’asile en 2006-2007

La forte diminution – de près d’un tiers – de la demande d’asile en 2006 s’est poursuivie à un rythme beaucoup moins élevé en 2007.

a) Une forte diminution de la demande d’asile en 2006

La baisse de la demande d’asile, perceptible à partir de 2005 (59 221 demandes, contre 65 614 en 2004, soit une baisse d’environ 10 %), s’est accélérée en 2006, avec 39 332 demandes enregistrées (dont 30 748 premières demandes, mineurs compris) soit une baisse de 33,6 % par rapport à 2005. La diminution est nettement plus marquée pour les premières demandes (moins 38,3 % par rapport à 2005) que pour les réexamens (moins 9,5 %). Elle a entraîné logiquement une réduction du nombre de recours devant la CRR, avec 30 477 recours en 2006 contre 38 563 en 2005.

DEMANDES D'ASILE ET DÉCISIONS PRISES

2004

demandes d'asile (D.A)

décisions OFPRA

Admissions globales

 

1ères D.A

Mineurs A

Réex

Total

Total

CR

RJ

% accord

AN

Total accords

Europe

18 222

5 490

3 406

27 118

23 665

3 363

20 302

14,2 %

2 128

5 491

Asie

10 220

447

938

11 605

15 154

571

14 583

3,8 %

613

1 184

Afrique

18 567

1 970

2 513

23 050

25 704

2 093

23 611

8,1 %

2 117

4 210

Amériques

3 347

91

206

3 644

3 398

260

3 138

7,7 %

76

336

Section Apatrides

191

 

6

197

197

71

126

36,0 %

 

71

Total

50 547

7 998

7 069

65 614

68 118

6 358

61 760

9,3 %

4 934

11 292

2005

demandes d'asile (D.A)

décisions OFPRA

admissions globales

 

1ères D.A

Mineurs A

Reex

Total

Total

CR

RJ

% accord

AN

Total accords

Europe

15 978

4 836

3 847

24 661

19 845

1 964

17 881

9,9 %

4 339

6 303

Asie

7 366

433

1 687

9 486

9 154

326

8 828

3,6 %

1 581

1 907

Afrique

13 710

1 750

3 669

19 129

18 154

1 565

16 589

8,6 %

3 443

5 008

Amériques

5 269

134

281

5 684

3 919

250

3 669

6,4 %

223

473

section Apatrides

255

2

4

261

200

79

121

39,5 %

 

79

Total

42 578

7 155

9 488

59 221

51 272

4 184

47 088

8,2 %

9 586

13 770

2006

demandes d'asile (D.A)

décisions OFPRA

admissions globales

 

1ères D.A

Mineurs A

Reex

Total

Total

CR

RJ

% accord

AN

Total accords

Europe

9 976

2 922

3 154

16 052

14 087

875

13 212

6,2 %

2 004

2 879

Asie

4 838

315

2 305

7 458

6 590

355

6 235

5,4 %

732

1 087

Afrique

9 010

1 136

2 727

12 873

12 440

1 264

11 176

10,2 %

1 476

2 740

Amériques

2 217

106

398

2 721

4 379

360

4 019

8,2 %

213

573

section Apatrides

228

 

 

228

219

75

144

34,2 %

 

75

Total

26 269

4 479

8 584

39 332

37 715

2 929

34 786

7,8 %

4 425

7 354

1er sem 2007 (*)

demandes d'asile (D.A)

décisions OFPRA

admissions globales

 

1ères D.A

Mineurs A

Reex

Total

Total

CR

RJ

% accord

AN

Total accords

Europe

4 695

1 220

968

6 883

6 074

389

5 685

6,4 %

1 444

1 833

Asie

2 580

170

823

3 573

3 534

424

3 110

12,0 %

605

1 029

Afrique

4 314

526

808

5 648

4 904

639

4 265

13,0 %

891

1 530

Amériques

443

38

221

702

993

93

900

9,4 %

186

279

section Apatrides

116

0

0

116

132

39

93

29,5 %

 

39

Total

12 148

1 954

2 820

16 922

15 637

1 584

14 053

10,1 %

3 126

4 710

2007 (*) données provisoires

Reex = demandes de réexamen - CR = accord ; RJ = rejet ; AN = CR suite à annulation de la Commission des Recours des Réfugiés (C.R.R.)

Taux accord OFPRA depuis 2001 % = CR / total décisions OFPRA (CR + RJ)

Certains des facteurs expliquant cette baisse sont ponctuels : une certaine désorganisation des filières d’immigration au lendemain de l’adoption de la réforme de 2003, le non report de la demande d’asile territorial (essentiellement algérienne) sur la procédure de guichet unique qu’est devenu l’OFPRA. D’autres facteurs de baisse apparaissent plus structurels : réduction des délais d’instruction, adoption de la liste nationale des pays d’origine sûrs, mise en œuvre du fichier dactyloscopique européen EURODAC, lutte accrue contre l’immigration clandestine (démantèlement des filières, lutte contre la fraude à l’identité, développement des procédures d’éloignement à l’égard des déboutés, renforcement des capacités des centres de rétention, etc.). La mise en place de la liste des pays d’origine sûrs par la loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003, qui comprend actuellement dix-sept pays, a par exemple fait chuter la demande émanant de ces pays de 650 demandes mensuelles en 2005 à 121 demandes mensuelles en 2007, tout en garantissant l’examen individuel des demandes dans le cadre d’une procédure prioritaire.

Cette diminution s’inscrit, par ailleurs, dans le cadre d’une évolution plus globale puisque le nombre de demandes diminue dans la plupart des pays industrialisés, et en particulier en Europe (sous réserve d’une brusque montée en Suède), comme l’illustre le tableau suivant :

DEMANDES D’ASILE EN EUROPE

Pays

2005

2006

Évolution %

2006/2005

France

59 221

39 332

- 33,6 %

Allemagne

42 908

30 100

- 29,8 %

Grande-Bretagne (*)

30 459

28 019

- 8,0 %

Suède

17 530

24 322

38,7 %

Pays-Bas

12 347

14 465

17,2 %

Autriche

22 471

13 350

- 40,6 %

Belgique

15 957

11 587

- 27,4 %

Suisse

10 061

10 537

4,7 %

Demandes globales mineurs accompagnants compris (sauf Belgique et Allemagne)

(*) données 9 mois projetées sur 12 mois

Source : homologues respectifs et IGC

Cette diminution globale de la demande d’asile s’explique sans doute par l’évolution de la situation internationale. La réactivité de la communauté internationale s’est accélérée lors des crises internationales, les guerres civiles – durant lesquelles les populations civiles trouvent refuge sur une autre partie du territoire (asile interne) – ont succédé aux guerres conventionnelles et des améliorations sont perceptibles dans certains pays (normalisation en République démocratique du Congo et en Algérie, par exemple).

La France reste cependant le premier pays de destination des demandeurs d’asile, comparée à ses principaux partenaires européens, et prend ainsi plus que sa part dans l’accueil des demandeurs d’asile dans le monde.

Les principaux pays de provenance des demandeurs sont, en 2006, la Turquie, la Serbie et Monténégro, le Sri Lanka, la République démocratique du Congo, Haïti, la Russie, l’Arménie et la Chine.

PRINCIPAUX PAYS DE PROVENANCE DES PRIMO DEMANDEURS D’ASILE

 

2005

2006

Évolution en %

2006/2005

Turquie

3 612

2 570

- 28,8 

Serbie & Montenegro

2 569

2 196

- 14,5 

Sri Lanka

1 894

1 993

5,2

RD Congo

2 563

1 958

- 23,6 

Haïti

4 953

1 808

- 63,5 

Russie

1 980

1 550

- 21,7 

Arménie

1 223

1 232

0,7 

Chine

2 579

1 200

- 53,5 

Algérie

1 777

998

- 43,8 

Côte d’Ivoire

1 086

835

- 23,1 

Autres pays

18 342

9 929

- 45,9 

Total

42 578

26 269

- 38,3 

Toutes données hors mineurs accompagnants.

En 2006, l’Office a admis sous sa protection 2 929 demandeurs, soit un taux d’accord en première instance de 7,8 % contre 8,2 % en 2005. Ce taux moyen est le résultat de la conjonction d’un taux d’accord de 10 % pour les premières demandes en procédure normale et d’un taux d’accord de 1,1 % pour les demandes de réexamen. En tenant compte des décisions d’annulation de la CRR, le taux global d’admission s’établit à 19,5 % en 2006, contre 26,9 % en 2005. Au total, 7 354 demandeurs d’asile ont été placés sous la protection de l’Office en 2006, dont 554 au titre de la protection subsidiaire.

Ce sont les Erythréens qui ont obtenu le taux d’accord de l’OFPRA le plus élevé (71 %), devant les Rwandais (52 %), les Éthiopiens (38,5 %) et les Soudanais (34,1 %). Hors mineurs accompagnants, l’OFPRA assurait, au 31 décembre 2006, la protection de 124 000 personnes dont 123 253 bénéficiant de l’asile conventionnel et 1 147 placées sous protection subsidiaire.

b) Une décélération de la baisse en 2007

La baisse s’est poursuivie au premier semestre 2007, mais à un moindre rythme (moins 21 % par rapport au premier semestre 2006), et cette décélération de la diminution de la demande s’est confirmée lors des mois qui ont suivi (moins 14 % sur les neuf premiers mois de 2007, par rapport à la même période en 2006). Un palier semble avoir été atteint dans la chute de la demande d’asile.

Cette évolution démontre qu’il serait imprudent de compter sur la poursuite, au même rythme qu’en 2006, de la diminution de la demande d’asile lors de l’adoption du budget pour 2008, et qu’un retournement de tendance peut évidemment se produire, en fonction de l’évolution de l’actualité internationale. Dans ces conditions, l’hypothèse retenue par le Gouvernement d’une baisse de 10 % en 2008 par rapport à 2007, n’apparaît certes pas irréaliste, mais sera peut-être infirmée par les faits. En cas de retournement de tendance, des efforts accrus seront nécessaires, s’agissant de la réduction des délais de sortie des centres d’accueil des demandeurs d’asile ou des délais de traitement des recours par la CRR, pour que les dépenses restent au niveau envisagé par le Gouvernement.

Votre Rapporteur spécial relève que le rythme de diminution de la demande d’asile a fortement fléchi au cours des premiers mois de l’année 2007, par rapport à 2006.

Si la décélération se confirme, et plus encore en cas de stabilisation, voire d’augmentation des demandes, des efforts accrus seront nécessaires, s’agissant notamment de la réduction des délais de sortie des centres d’accueil des demandeurs d’asile et des délais de traitement des recours par la Commission de recours des réfugiés, pour que les dépenses restent au niveau envisagé par le Gouvernement.

2.– Une subvention en légère diminution pour l’OFPRA

Créé en 1952, l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) est un établissement public administratif, financé par une subvention de l’État. Il est chargé de reconnaître la qualité de réfugié, d’accorder la protection subsidiaire et de protéger ceux qui en bénéficient. Au plan budgétaire, il est en réalité composé de deux entités : l’OFPRA proprement dit et la Commission de recours des réfugiés (CRR, qui sera prochainement rebaptisée « Cour nationale de l’asile »), juridiction chargée d’examiner les recours contre les décisions de l’OFPRA mais dont les moyens budgétaires se rattachent au budget de l’OFPRA. Cette situation n’est pas satisfaisante et un projet d’autonomie budgétaire est envisagé pour 2009 (v. infra).

a) Un changement de tutelle sans incidence sur l’indépendance fonctionnelle de l’OFPRA

L’OFPRA est actuellement placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères. La loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, actuellement soumise au Conseil constitutionnel, prévoit de le placer auprès du ministre chargé de l’asile. Actuellement, celui-ci est le ministre chargé de l’immigration, et non des affaires étrangères. Le président du conseil d’administration de l’Office sera désormais nommé sur proposition du ministre chargé de l’asile. Le directeur général de l’Office continuera en revanche à être nommé sur proposition conjointe du ministre des Affaires étrangères et du ministre chargé de l’asile, qui se substituera au ministre de l’Intérieur.

Ce changement de tutelle est une conséquence logique de la création du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, auquel la compétence asilaire a été confiée par le décret n° 2007-799 du 31 mai 2007. Naturellement il ne remettra nullement en cause les conditions d’impartialité dans lesquelles les agents de l’OFPRA instruisent les demandes d’asile qui leur sont adressées. L’OFPRA jouira toujours d’une autonomie administrative et financière, restera doté de personnels spécifiques (corps des officiers, secrétaires et adjoints de protection de l’OFPRA) et continuera, bien entendu, à ne recevoir aucune instruction ministérielle relative au taux moyen d’acceptation des demandes qui lui sont soumises.

b) Une diminution de la subvention justifiée par la baisse de la demande d’asile

Le montant de la subvention pour charges de service public versée par l’État à l’OFPRA demandée en 2008 est de 43 millions d’euros (dont 29,5 millions d’euros pour la rémunération des agents et 13,5 millions pour le fonctionnement et les investissements), soit un montant en baisse de 5 % environ (moins 2,5 millions d’euros) par rapport à 2007.

Cette diminution se justifie par la baisse de la demande d’asile enregistrée depuis 2006. Elle fait suite à une forte augmentation de la subvention sur la période 2002-2005, passée de 22,8 millions en 2002 à 52,1 millions en 2005. Cette augmentation était liée aux recrutements massifs opérés pour la résorption des dossiers en instance à l’OFPRA et à la CRR et la mise en œuvre de la réforme de l’asile et aux opérations immobilières qui en ont constitué le corollaire :

– les effectifs de l’OFPRA ont quasiment doublé sur la période 2001-2006, passant de 430 emplois budgétaires (et non ETPT) en 2001 à 749 emplois en 2006 ;

– l’OFPRA a regroupé fin 2003 l’ensemble de ses services sur un seul site, à Fontenay-sous-Bois, alors qu’ils étaient auparavant dispersés sur trois implantations, et la CRR a emménagé dans des locaux plus adaptés à Montreuil-sous-Bois en octobre 2004.

Une décrue s’est amorcée en 2006, suite au départ de 125 agents contractuels, recrutés pour un an à la CRR afin de résorber les stocks de dossiers en instance, et à la fin des opérations immobilières.

ÉVOLUTION DE LA SUBVENTION DE L’ÉTAT À L’OFPRA

(en millions d’euros)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

22,8

34,5

42,2

52,1

49

45,5

 

dont 6 millions d’euros en LFR

dont 4 millions d’euros en DA

dont 5,8 millions d’euros en DA

46 millions d’euros après régulation

 

LFR : loi de finances rectificative - DA : décret d’avance

Les effectifs de l’OFPRA ne diminueront pas pour autant et restent stables, avec 591 ETPT en 2008, comme en 2007. Ces prévisions incluent la transformation de 20 emplois de contractuels et catégorie A et de 20 emplois de catégorie C en emplois de titulaires, dans le cadre du plan de résorption de l’emploi précaire (qui prévoit la transformation, au total, de 120 emplois de contractuels et titulaires sur la période 2003-2006).

Le budget 2007 a été marqué par mise en œuvre de la première phase du projet de numérisation des dossiers et, à terme, de dématérialisation des procédures à l’OFPRA et à la CRR (0,2 million d’euros) par l’aménagement et la sécurisation de la zone d’accueil de la CRR (0,27 million d’euros) et la revalorisation des indemnités de séance versées aux collaborateurs de la CRR (0,26 million d’euros).

Aucun contrat d’objectifs et de moyens n’a été conclu par le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement avec l’OFPRA à ce jour, notamment parce qu’il semble souhaitable d’attendre que la CRR, qui est une juridiction administrative indépendante, ne soit plus rattachée au plan budgétaire à l’OFPRA.

c) Un coût d’examen par demande en légère augmentation pour l’OFPRA

L’indicateur de performance n° 3.2 révèle une tendance à la hausse du coût d’examen d’une demande d’asile par l’OFPRA. Ce coût est passé de 501 euros en 2005 à 663 euros en 2006, et la prévision pour 2007 est de 680 euros. Cette augmentation s’explique par la part importante des frais fixes, difficilement compressibles et qui ne peuvent être ajustés que très graduellement dans un contexte international incertain. La chute de la demande d’asile entraîne ainsi mécaniquement une augmentation du coût moyen par demande, en raison d’un nombre de décisions sensiblement inférieur. Cette tendance haussière a été renforcée par la politique de réduction des stocks et par la priorité accordée aux dossiers les plus anciens, plus complexes à traiter. La prévision pour 2008 est de 600 euros, soit une baisse de l’ordre de 13,3 %, qui sera peut-être rendue possible par la numérisation des dossiers.

Le coût moyen du traitement d’un dossier de recours par la CRR a également augmenté entre 2005 et 2006, passant de 441 euros à 614 euros. Il devrait en revanche diminuer en 2007 et s’établir à 530 euros.

d) La réduction des délais de traitement et la résorption des stocks doivent être poursuivies

Actuellement le délai moyen d’examen des demandes par l’OFPRA est de 108 jours. Il était de 110 jours en 2006, contre 108 en 2005 mais près de onze mois en 2002. L’augmentation des moyens humains et financiers à la disposition de l’OFPRA depuis 2001 a permis de réduire considérablement les délais, qui sont légèrement repartis à la hausse en raison de la priorité donnée, dans le cadre de la réduction des stocks, aux dossiers les plus anciens, souvent plus complexes. La prévision pour 2008 figurant à l’indicateur n° 3.1, fixée à 80 jours, semble cependant ambitieuse. Elle devra reposer sur des gains de productivité, favorisés notamment par la numérisation des dossiers et la dématérialisation des procédures.

Le stock de dossiers en instance a également été significativement réduit. Il est passé de 11 755 au 31 décembre 2005 à 8 411 au 31 décembre 2006, soit une diminution de 28,4 %. Il représentait 2,1 mois d’activité de l’Office fin 2006, contre 2,6 mois fin 2005. L’âge moyen de ce stock a également été réduit : en 2005, 60 % des dossiers avaient une ancienneté supérieure à deux mois, contre 58 % en 2006. Les dossiers dont l’ancienneté est supérieure à un an ne représentent quant à eux plus que 2,5 % du stock en 2006.

Le bilan est moins satisfaisant en ce qui concerne la CRR. Le délai moyen d’examen des recours est actuellement de 10,1 mois pour la CRR (soit près de 330 jours), alors que la prévision initiale du projet annuel de performances était de 90 jours. Il est légèrement supérieur au délai constaté en 2006, qui était de 314 jours, et en 2005, qui était de 283 jours. La prévision pour 2008 est plus réaliste et s’établit à 250 jours, mais exige d’inverser la tendance à l’augmentation du délai depuis le départ, le 31 décembre 2005, des 125 agents contractuels qui avaient été recrutés pour un an fin de résorber les stocks. La généralisation de l’aide juridictionnelle, qui interviendra le 1er décembre 2008, devrait en outre entraîner une augmentation de la proportion des affaires plaidées devant la CRR (qui devrait passer de 60 % à sans doute 90 %), donc à un allongement de la durée des séances.

Le stock des dossiers en instance à la CRR a diminué légèrement entre la fin 2005, où il s’élevait à 21 300, et la fin 2006, où il était de 20 389, soit environ 5 mois d’activité de la Commission.

3.– Vers une indépendance confortée pour la future « Cour nationale du droit d’asile »

La situation actuelle de la CRR n’est pas satisfaisante et pourrait soulever des difficultés au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La CRR est une juridiction administrative spécialisée indépendante, mais elle partage la personnalité morale de l’OFPRA et son budget est inclus dans la dotation budgétaire allouée à l’Office. L’institution contrôlée apparaît ainsi, d’une certaine manière, financer son contrôleur. Le directeur général de l’OFPRA est non seulement ordonnateur des dépenses et des recettes de la CRR, mais « pourvoit aux emplois et gère le personnel » de celle-ci, en application de l’article R. 722-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). De plus, les rapporteurs de la CRR, qui présentent à la formation de jugement les dossiers sur lesquels elle doit statuer, appartiennent au même corps que les officiers de protection de l’OFPRA qui prennent la décision ou non d’accorder le statut de réfugié.

C’est pourquoi le ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, M. Brice Hortefeux, a annoncé son intention de donner une pleine autonomie budgétaire à la CRR. Celle-ci sera rattachée au programme Conseil d’État et autres juridictions administratives de la mission Conseil et contrôle de l’État. Cette réforme, dont la mise en œuvre avait été un moment envisagée dès la loi de finances pour 2008, devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2009. Elle nécessite en effet un important travail de préparation, compte tenu de son impact sur le statut des personnels concernés, de la nécessité d’évaluer le coût des fonctions support exercées par les services communs OFPRA/CRR et enfin de la volonté d’accompagner cette réforme par une professionnalisation progressive des magistrats honoraires actuellement chargés de présider 38 % des quelque 130 formations de jugement de la CRR.

Cette pleine autonomie, dont votre Rapporteur spécial se félicite, s’accompagnera d’un changement symbolique de la dénomination de la Commission de recours des réfugiés, qui deviendra la « Cour nationale de l’asile », à la suite d’un amendement à la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, voté à l’initiative du rapporteur de votre commission des Lois, M. Thierry Mariani.

B.– L’ACCUEIL ET L’HÉBERGEMENT DES DEMANDEURS D’ASILE

La France doit assurer la prise en charge sociale des demandeurs d’asile pendant la durée de l’instruction de leur demande par l’OFPRA et la Commission de recours des réfugiés, conformément à la Convention de Genève et à la directive 2003/9/CE du Conseil, du 29 janvier 2003, relatives à des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les États membres.

Pour 2008, la prévision de crédits est de 233 millions d’euros pour l’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile, en centres d’accueil des demandeurs d’asile (CADA) ou dans les dispositifs d’hébergement d’urgence, et de 28 millions d’euros pour l’allocation temporaire d’attente (ATA), en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

1.– L’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile : un triplement en cinq ans du nombre de places en CADA

a) Un redéploiement progressif d’activité des plates-formes d’accueil associatives vers les plates-formes de l’ANAEM

Dans les départements recevant un flux important de demandeurs d’asile, l’État finance des plates-formes d’accueil. Ces plates-formes de services assurent une fonction de guichet unique, délivrant des prestations d’accueil, d’information sur les modalités de prise en charge sociale, d’enregistrement et d’instruction de la demande d’hébergement en CADA, d’information sur les procédures d’asile et d’orientation vers un hébergement d’urgence et vers les structures ou services utiles (en matière de restauration, de soins, d’aide à l’ouverture des droits à la couverture médicale universelle de transports, etc.). Ces plates-formes conservent un rôle, au-delà de l’accueil des demandeurs d’asile primo arrivants, à l’égard des demandeurs en cours de procédure, qui continuent à bénéficier de leurs services. Elles assurent également l’enregistrement et le suivi de la demande d’hébergement et établissent notamment le diagnostic de la situation personnelle, familiale et sociale des demandeurs d’hébergement en CADA.

Certaines de ces plates-formes sont gérées par l’ANAEM. D’autres sont confiées à des associations, qui bénéficient d’un financement par l’État sur la base d’un forfait de 50 000 euros par plate-forme, complété par une enveloppe de crédits complémentaires répartie en fonction du flux de demandeurs accueillis localement. Le montant des crédits prévus pour 2008 s’élève à 5,2 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, soit une baisse de 6,6 % par rapport à 2007. Cette diminution est justifiée par la baisse du flux des demandeurs et par le redéploiement d’activité des plates-formes associatives vers certaines plates-formes de l’ANAEM, qui assurent un service au moins équivalent pour un moindre coût.

b) Améliorer la gestion des centres d’accueil des demandeurs d’asile afin de diminuer les délais de sortie

Le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile repose notamment sur les 271 centres d’accueil des demandeurs d’asile (CADA), deux centres de transit comportant 246 places et un centre d’accueil et d’orientation pour mineurs isolés demandeurs d’asile (CAOMIDA), situé à Boissy-Saint-Léger et doté d’une capacité d’accueil de 33 places.

La capacité d’accueil des CADA a quasiment quadruplé en sept ans, à la suite d’un effort d’investissement très important : elle était de 5 282 places au 1er janvier 2001 et devrait atteindre 20 410 places à la fin de l’année 2007, avec la création de 1 000 nouvelles places cette année. Les objectifs fixés par le plan de cohésion sociale étant désormais atteints, il n’est pas prévu de créer de nouvelles places de CADA en 2008.

RÉPARTITION DES PLACES DE CADA SUR LE TERRITOIRE (NON COMPRISES LES 246 PLACES DE TRANSIT ET LES 33 PLACES DU CENTRE D’ACCUEIL ET D’ORIENTATION DES MINEURS DEMANDEURS D’ASILE, CAOMIDA)

Région

Population au recensement de 1999

Capacités en CADA au 31/12/2003

Nouvelles places en 2004

Nouvelles places en 2005

Nouvelles places en 2006

Nouvelles places en 2007

Total fin 2007 (prévision)

Alsace

1 734 145

573

160

110

130

186

1 159

Aquitaine

2 908 359

554

53

20

60

9

696

Auvergne

1 308 878

272

65

 

30

5

372

Basse-Normandie

1 422 193

394

55

 

50

2

501

Bourgogne

1 610 067

826

50

 

45

0

921

Bretagne

2 906 197

529

184

50

95

5

863

Centre

2 440 329

758

175

205

99

14

1 251

Champagne-Ardennes

1 342 363

442

73

 

90

84

689

Corse

260 196

           

Franche-Comté

1 117 059

360

105

60

15

0

540

Haute-Normandie

1 780 192

430

265

166

60

19

940

Île-de-France

10 952 011

1 976

451

310

376

191

3 304

Languedoc-Roussillon

2 292 648

376

100

35

35

5

551

Limousin

710 939

189

10

 

0

0

199

Lorraine

2 310 376

510

90

180

90

60

930

Midi-Pyrénées

2 551 687

651

65

25

43

26

810

Nord-Pas-de-Calais

3 996 588

239

8

100

54

51

452

Pays de la Loire

3 222 061

735

299

16

28

45

1 123

Picardie

1 857 834

426

188

147

85

55

901

Poitou-Charentes

1 640 068

261

87

 

43

49

440

PACA

4 506 151

726

416

 

172

50

1 364

Rhône-Alpes

5 645 407

1 243

101

 

340

144

2 404

Antilles Guyane

961 136

   

576

     

Réunion

706 300

           

TOTAL

60 186 184

12 470

3 000

2 000

1 940

1 000

20 410

Le montant prévu pour 2008 au titre des CADA s’élève à 192 millions d’euros. Ce montant repose sur une estimation du nombre de demandeurs d’asile à 30 600, contre 36 600 attendus en 2007, d’une durée moyenne d’hébergement de 13 mois (couvrant à la fois le traitement de la demande, soit 10 mois, et les délais de sortie) et d’un taux d’hébergement en CADA de 62 % du flux de demandeurs d’asile, et sur un coût journalier moyen de 25,48 euros. Ce coût moyen recouvre de fortes disparités de coûts, en raison de la forte hétérogénéité des CADA : certains sont spécialisés dans l’accueil de catégories particulières de populations (personnes isolées, couples ou parents seuls avec enfants), les capacités d’hébergement, en résidence ou ensemble de logements, varient de 12 à 210 places, etc.

L’hébergement en CADA est la solution optimale pour l’hébergement des demandeurs d’asile et celle qui répond le mieux aux normes minimales fixées par la directive 2003/9/CE, précitée : l’objectif est donc de porter le taux d’hébergement dans ces centres à 90 % en 2010. Pour parvenir à ce résultat, il conviendra de réaliser des progrès importants en ce qui concerne l’organisation de la sortie de ces centres des déboutés et des réfugiés. Le taux de présence indue (i.e de demandeurs déboutés ou de réfugiés) dans les CADA s’est en effet légèrement dégradé en 2007 : il est de 26,4 % contre 25,5 % en 2006. L’objectif fixé pour 2008 est de 23 % et la cible pour 2010 de 15 %. De même, les délais de sortie des réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire se sont allongés de trente jours et celui des déboutés de quatre jours. Ils restent très éloignés des délais fixés par le décret n° 2007-399 du 23 mars 2007 relatif aux CADA. Celui-ci prévoit que les personnes déboutées peuvent se maintenir en principe un mois dans le centre, et les réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire trois mois renouvelables une fois, une fois notifiée la fin de leur prise en charge par le gestionnaire du centre, lui-même informé de la décision définitive par le préfet.

L’ÉVOLUTION DU NOMBRE D’ADMISSIONS EN CADA ET DES DÉLAIS DE SORTIE

 

Admissions

Délai de sortie
(réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire)

Délai de sortie
(déboutés)

2005

10 161

208 jours soit 6,9 mois

174 jours soit 5,8 mois

2006

11 810

231 jours soit 7,7 mois

222 jours soit 7,4 mois

Au 30 juin 2007

5 385

261 jours soit 8,7 mois

226 jours soit 7,5 mois

La mise en place d’un système d’information de gestion et de pilotage du dispositif d’hébergement des demandeurs d’asile, autorisé par la loi du 24 juillet 2006 et en cours de développement par l’ANAEM, devrait permettre de renforcer l’efficacité du suivi des demandeurs d’asile hébergés en CADA. Il est en cours d’expérimentation dans les régions Centre et Nord Pas-de-Calais et son déploiement sur l’ensemble du territoire devrait s’achever au début de l’année 2008. Une circulaire interministérielle du 20 janvier 2006 a en outre confié aux préfets de région le soin de piloter le dispositif d’accueil. Le taux d’occupation des places est ainsi passé de 92,6 % en 31 décembre 2005 à 94 % au 31 décembre 2006, et il était de 96 % au 30 juin 2007.

Le parc de places en CADA est complété par un dispositif d’hébergement d’urgence d’une capacité estimée à 5 659 places en 2007. Ce dispositif, doté de 35,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement en 2008, est destiné à accueillir à titre transitoire les demandeurs d’asile préalablement à leur admission éventuelle en CADA, ou dans l’attente d’une place disponible ainsi que, si nécessaire, les personnes sortant de ces centres. Il permet en outre de prendre en charge des demandeurs d’asile ne pouvant bénéficier ni d’un hébergement en CADA ni de l’allocation temporaire d’attente, notamment les personnes placées en procédure prioritaire parce que provenant d’un pays d’origine sûr ou celle placées en procédure Dublin (c’est-à-dire ayant été identifiées dans un autre État membre et en instance de réadmission dans cet État).

Le dispositif d’urgence à gestion nationale (1 500 places) est géré par la société Adoma (ex Sonacotra) et a vocation à accueillir hors Île de France des demandeurs d’asile arrivant en région parisienne, ainsi qu’à prendre en charge des demandeurs d’autres régions accueillant une part importante du flux national ou des étrangers en situation irrégulière se trouvant dans le Calaisis. Les crédits prévus à ce titre en 2008 s’élèvent à 9,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, avec un coût moyen journalier de 17,60 euros.

Le dispositif à gestion déconcentrée consiste en une enveloppe de crédits d’un montant de 25,6 millions d’euros demandés en 2008, à la disposition des préfets afin de financer des dépenses d’hébergement d’urgence en hôtel ou en structures collectives d’hébergement.

2.– L’allocation temporaire d’attente

L’allocation d’insertion a été remplacée par l’allocation temporaire d’attente (ATA) par la loi de finances pour 2006 et le décret n° 2006-1380 du 13 novembre 2006. Le refus de l’offre de prise en charge présentée aux demandeurs d’asile lors de leur admission au séjour entraîne désormais la perte des droits à l’ATA. En contrepartie, l’ATA est versée aux demandeurs d’asile durant toute la procédure d’instruction de leur demande, et non plus pendant un an au maximum, conformément à la direction européenne 2003/9/CE du Conseil, du 27 janvier 2007, relative aux normes minimales d’accueil des demandeurs d’asile.

Le montant demandé pour 2008 est de 28 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, alors qu’un montant de 38 millions avait été inscrit en loi de finances initiale pour 2007, en ce qui concerne les allocataires étrangers bénéficiaires d’une protection internationale (4). Cette baisse se justifie par la diminution de la demande d’asile. Les prévisions retenues se fondent sur une estimation du nombre de bénéficiaires à 13 226, avec une moyenne de versement de l’allocation de 5,75 mois pour les allocataires 2008 et de 7,25 mois pour ceux de 2007. Le montant de l’ATA – gérée par l’Unédic – est de 310,80 euros par mois (contre 306,60 euros en 2007).

Votre Rapporteur spécial se félicite que la plupart des 30 propositions formulées par la Mission d’évaluation et de contrôle (MEC) relative à l’accueil des demandeurs d’asile, sur le rapport de notre collègue Mme Marie-Hélène des Esgaulx, le 6 juillet 2005, aient été mises en œuvre (5).

La création du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement répond, en particulier, à l’une des préoccupations qui avaient été émises par la MEC lors de l’examen du suivi de ses recommandations, le 5 avril 2006 (6), concernant la coordination de ces politiques.

Des progrès restent cependant à accomplir s’agissant de l’établissement d’indicateurs relatifs aux coûts complets entraînés par la politique de l’asile, ainsi qu’en ce qui concerne la salle d’audience aménagée à Roissy.

V.– RENFORCER L’INTÉGRATION

Le deuxième programme de la mission Immigration, asile et intégration, intitulé Intégration et accès à la nationalité, est consacré à l’accueil des étrangers primo arrivants, à leur intégration dans la société française, à la lutte contre les discriminations et, phase ultime de l’intégration, à l’accès à la nationalité française. Il comporte également les dépenses de fonctionnement et de personnel de la direction de la population des migrations, transférée du ministère du Travail, des relations sociales et de la solidarité, et du Haut conseil à l’intégration (soit 13,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement).

Le renforcement de l’intégration repose sur la mise en œuvre du contrat d’accueil et d’intégration (CAI) par l’ANAEM, qui a été généralisé et rendu obligatoire par la loi du 24 juillet 2006. Il s’appuie également sur l’action de l’Agence nationale de la cohésion sociale et l’égalité des chances (ACSÉ), qui assure notamment la formation linguistique des étrangers déjà présents sur le territoire français. Au total, 195,3 millions d’euros sont demandés en 2008 en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour l’intégration et l’accès à la nationalité, soit 32 % des crédits de la mission.

A.– LA MISE EN œUVRE DU CONTRAT D’ACCUEIL ET D’INTÉGRATION PAR L’AGENCE NATIONALE DE L’ACCUEIL DES ÉTRANGERS ET DES MIGRATIONS

1.– La montée en puissance du contrat d’accueil et d’intégration

Avec la création, en avril 2003, du contrat d’accueil et d’intégration, consacré par la loi n° 2005-35 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, la politique d’intégration a pris un nouvel essor. Une formation civique, une formation linguistique, une journée d’information sur la vie en France (destinée à présenter aux nouveaux arrivants les principaux services publics, notamment en matière de santé, de protection sociale et d’école) et, le cas échéant, un bilan de compétences professionnelles sont désormais proposés à l’ensemble des primo arrivants afin de favoriser leur intégration dans la société française. Ces prestations sont mises en œuvre par l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), établissement public administratif de l’État créé par la loi du 18 janvier 2005, qui a succédé à l’Office des migrations internationales (OMI).

En 2006, 95 693 contrats d’accueil et d’intégration (CAI) ont été signés, 94 190 formations civiques ont été programmées et 23 972 formations linguistiques gratuites prescrites (soit 25,1 % des signataires du contrat, les autres maîtrisant déjà suffisamment le français à l’oral). 20 793 personnes ont souhaité suivre la journée d’information « vivre en France ».

BILAN AU 31 DÉCEMBRE 2006 DE LA MONTÉE EN CHARGE DU CONTRAT D’ACCUEIL ET D’INTÉGRATION ET DES PRESTATIONS LIÉES

 

2003(a)

2004(b)

2005 (c)

2006(d)

Nombre de personnes auditées

9 220

41 616

71 747

99 597

Nombre de signataires du contrat

8 027

37 613

66 450

95 693

Taux de signature du contrat en % des personnes auditées

87,1 %

90,4 %

92,6 %

96,1 %

Nombre de personnes inscrites en formation civique

8 010

37 264

65 292

94 190

Nombre de formations linguistiques prescrites

2 726

11 318

16 653

23 972

Taux de prestations linguistiques prescrites en % des signataires du contrat

34,0 %

30,0 %

25,1 %

25,1%

Nombre d’inscriptions aux journées d’information « Vivre en France »

1 426

8 119

12 464

20 793

Taux de bénéficiaires de la journée d’information « Vivre en France » en % des signataires du contrat

17,8 %

21,6 %

18,8 %

21,7 %

Nombre de bénéficiaires du suivi social

498

2 971

5 361

10 126

Taux de signataires du contrat à qui a été prescrit un suivi social en %

6,2 %

7,9 %

8,1 %

10,6 %

(a) pendant 6 mois de juillet à décembre 2003, dans 12 départements avec une montée en charge progressive

(b) pendant 12 mois, dans 26 départements avec une montée en charge progressive

(c) 1er janvier au 31 décembre 2005 (61 départements couverts avec une montée en charge progressive)

(d) 1er janvier au 31 décembre 2006 (95 départements ayant proposé le CAI avec une montée en charge progressive)

La loi du 24 juillet 2006, complétée par le décret d’application n° 2006-1791 du 23 décembre 2006, a rendu la signature du CAI obligatoire pour tous les primo arrivants, y compris les mineurs âgés de 16 à 18 ans (sauf s’ils ont effectué leur scolarité dans un établissement d’enseignement secondaire français à l’étranger pendant au moins trois ans), à compter du 1er janvier 2007. Cette modification ne devrait pas entraîner une augmentation très significative du nombre de signataires, 90 % d’entre eux signant déjà un CAI en 2006. Sur les six premiers mois de l’année 2007, 52 952 personnes ont signé un CAI. La même loi a également renforcé la portée du CAI, en prévoyant que lors du premier renouvellement de la carte de séjour, il peut être tenu compte du non-respect, manifesté par une volonté caractérisée, par l’étranger des stipulations du contrat. La souscription et le respect du CAI seront en outre pris en compte lors de la délivrance d’une première carte de résident, qui est subordonnée à l’intégration républicaine de l’étranger dans la société française.

Les nouveaux entrants en formation linguistique témoignant, au terme de leur formation, d’un niveau satisfaisant de maîtrise de la langue française à l’oral et à l’écrit se voient délivrer le diplôme initial de langue française (DILF). Le premier passage du DILF a eu lieu en mai 2007, pour les formations suivies de janvier à avril 2007 : 92 % des 51 candidats qui se sont présentés l’ont obtenu. Le faible nombre de personnes concernées ne rend cependant pas ces chiffres suffisamment significatifs, et le Gouvernement s’est fixé pour objectif un taux d’obtention du DILF par les signataires du CAI ayant suivi une formation linguistique de 70 % en 2008.

Le dispositif devrait être pleinement opérationnel dans les départements d’outre-mer en 2008 à compter du 1er janvier 2008.

2.– Le budget de l’ANAEM

La subvention de l’État prévue en 2008 pour l’ANAEM s’élève à 44,6 millions d’euros. L’agence bénéficie également de ressources propres. Elle est en effet affectataire de trois taxes : la taxe perçue à l’occasion de la délivrance du premier titre de séjour, la taxe perçue lors du renouvellement des autorisations de travail et des titres de séjour valant autorisation de travail, ainsi que la taxe perçue lors de la demande de validation d’une attestation d’accueil. Son budget total s’élève en 2007 à 134,5 millions d’euros. Ses effectifs ont été portés à 926 ETPT en 2007, contre 888 en 2006, en raison de la prise en charge du CAI et de l’augmentation du nombre de places en CRA, dans lesquels l’ANAEM exerce une activité de médiation sociale.

Outre la mise en œuvre du CAI, l’ANAEM participe notamment à l’accueil des demandeurs d’asile (cf. supra), au contrôle médical des étrangers admis à séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois et au retour et à la réinsertion des étrangers dans leur pays d’origine. Un contrat d’objectifs et de moyens portant sur la période 2007-2009 a été signé début 2007.

L’ANAEM bénéfice également de crédits du Fonds européen d’intégration, qui a été créé par la décision 2007/435/CE du Conseil de l’Union européenne du 25 juin 2007 afin de soutenir les efforts des États membres dans ce domaine. En 2008 la France devrait recevoir 5,5 millions d’euros à ce titre, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, qui financeront les prestations d’accueil lors de la séance d’information « Vivre en France » dispensée dans le cadre du CAI.

3.– Le financement des nouvelles mesures prévues par la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’asile et à l’intégration

L’intégration sera par ailleurs renforcée par deux mesures figurant dans la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’asile et à l’intégration, actuellement soumise au Conseil constitutionnel : la création du CAI familial et l’évaluation dans le pays d’origine de la maîtrise du français et des valeurs de la République par les candidats au regroupement familial et les conjoints étrangers de français. Ces mesures devraient générer un coût supplémentaire évalué à environ 3,3 millions d’euros (2,8 millions d’euros pour le test et 500 000 euros pour le CAI familial), qu’il est proposé de financer par une revalorisation de la taxe perçue au profit de l’ANAEM lors des validations des attestations d’accueil, qui serait portée de 30 à 45 euros. Les ressources supplémentaires sont évaluées à environ 3,4 millions d’euros. Tel est l’objet de l’article 45 rattaché (voir commentaire infra).

La généralisation (sauf exceptions à préciser par décret) du bilan de compétences prévu par la même loi, pour un coût estimé à environ 4,5 millions d’euros (7), devrait pour sa part être financée par les autres ressources propres de l’ANAEM et par le Fonds européen pour l’intégration. Cette généralisation a pour objet d’orienter les bénéficiaires vers les métiers connaissant des difficultés de recrutement.

Le coût du recours aux tests ADN en matière de regroupement familial a par ailleurs été estimé par M. Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, à environ 150 000 euros, avec un coût moyen de 150 euros par test. Cette charge sera couverte en partie par les crédits des frais de justice de la mission Justice et en partie par ceux du ministère de l’Immigration.

B.– L’ACTION DE L’AGENCE NATIONALE POUR LA COHÉSION SOCIALE ET L’ÉGALITÉ DES CHANCES EN FAVEUR DE L’INTÉGRATION

L’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances – dite ACSÉ – a été créée par la loi du 31 mars 2006 relative à l’égalité des chances et a été officiellement mise en place le 19 octobre 2006 lors de son premier conseil d’administration. Elle vise à renforcer l’efficacité de l’action de l’État en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville, de l’intégration des personnes immigrées et issues de l’immigration et de la lutte contre les discriminations. Elle a également la responsabilité du service civil volontaire, participe à la lutte contre l’illettrisme et gère le fonds interministériel de prévention de la délinquance.

Dans le domaine de l’intégration et de la lutte contre les discriminations, l’Agence a repris les missions exercées jusqu’à sa mise en place par le fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations (8) (FASILD), dans le domaine de la formation linguistique et de la transformation des foyers travailleurs migrants en résidences sociales. Elle s’est également engagée dans la promotion de la charte de la diversité et a participé avec le Centre national de la cinématographie à la mise en place de la commission « Images de la diversité ». À ces divers titres, l’Agence finance de nombreuses associations et organismes : 4 803 organismes ont ainsi été subventionnés en 2006, pour un montant global de 101 millions d’euros.

En 2007, environ 18 000 étrangers devraient bénéficier d’une formation linguistique, d’un volume horaire situé entre 200 et 400 heures, financée par l’ACSÉ, pour un montant évalué à 25 millions d’euros.

La subvention prévue dans le programme Intégration et accès à la nationalité française pour 2008 en faveur de l’ACSÉ s’élève à 8 millions d’euros au titre de ses dépenses de fonctionnement, et à 98,9 millions d’euros au titre de ses dépenses d’intervention.

Votre Rapporteur spécial recommande qu’une réflexion soit engagée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques sur l’articulation entre l’action de l’ANAEM et celle de l’ACSÉ.

Ces deux opérateurs mènent une action similaire de formation linguistique, le partage des compétences reposant sur la durée de séjour des étrangers : s’il est là depuis moins d’un an, il relève du CAI donc de l’ANAEM, au-delà l’ACSÉ s’en charge. Une rationalisation – sans doute sous la forme d’un transfert à l’ANAEM – est envisageable et pourrait procurer des économies d’échelle importantes. À défaut, la coordination des appels d’offre lancés par les deux opérateurs auprès de prestataires privés devrait à tout le moins être renforcée.

C.– VALORISER L’ACCÈS À LA NATIONALITÉ

L’accès à la nationalité marque l’étape ultime de l’intégration. Il a logiquement été confié au ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement par le décret d’attribution du 31 mai 2007, précité, qui précise qu’il a « la charge des naturalisations et de l’enregistrement des déclarations de nationalité à raison du mariage » et qu’il est associé à l’exercice par le garde des Sceaux de ses attributions en matière de déclaration de nationalité et de délivrance des certificats de nationalité française.

En 2006, 117 000 personnes sont devenues françaises, dont 87 878 par décret et 29 276 par déclaration au titre du mariage avec un conjoint français. Les derniers chiffres disponibles pour le premier semestre 2007 laissent présager une baisse du nombre total d’acquisition de la nationalité sur l’année 2007 : au 30 juin 2007, 30 177 personnes ont acquis la nationalité française par décret, et 19 247 par déclaration au titre du mariage.

Cette diminution est sans doute liée à l’impact de la loi du 24 juillet 2006, qui a notamment supprimé la dispense de stage applicable aux « ressortissants ou anciens ressortissants des territoires et des États sur lesquels la France a exercé soit la souveraineté, soit un protectorat, un mandat ou une tutelle » (qui dispensait ceux-ci du respect de condition liée à la résidence habituelle en France durant les cinq années précédant la demande). De nombreux ressortissants originaires d’Afrique, qui bénéficiaient auparavant de la dispense de stage, se voient désormais opposer des décisions d’irrecevabilité. Le doublement de la durée de communauté de vie depuis le mariage, porté à quatre ans, devrait également produire des effets importants à terme.

La sous-direction des naturalisations de la direction de la population et des migrations, transférée au nouveau ministère, a pour mission d’instruire les demandes de naturalisation et les demandes d’enregistrement des déclarations de nationalité à raison du mariage. Elle gère également le contentieux lié aux décisions défavorables, contribue à l’établissement de la preuve de la nationalité et participe à la préparation des textes législatifs et réglementaires dans le champ de la nationalité. Elle pilote également les projets d’informatisation qui contribuent ou vont contribuer à moderniser les procédures : projet PRENAT pour les naturalisations par décret, à destination des préfectures, et son extension TRINAT, à destination des tribunaux, pour les déclarations de nationalité à raison du mariage. Les crédits demandés pour son fonctionnement en 2008 s’élèvent à 1,47 million d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

Un premier bilan de la généralisation de la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française opéré par la loi du 24 juillet 2006 peut être dressé. Depuis le 1er janvier 2007, 51 préfectures sur les 66 ayant répondu ont organisé des cérémonies, en application de l’article 21-28 du code civil. Dans la majorité des cas, le nombre de personnes invitées à ces cérémonies se situe entre 20 et 60.

L’indicateur de performance relatif à la naturalisation est le nombre de dossiers de demandes de naturalisation ayant fait l’objet d’une décision par agent instructeur. Il pourrait être utilement complété par un indicateur relatif à la durée d’instruction des demandes de naturalisation.

Votre Rapporteur spécial recommande d’introduire un indicateur de performance relatif à la durée d’instruction des demandes de naturalisation.

Le programme Intégration et accès à la nationalité finance, par ailleurs, les centres provisoires d’hébergement des réfugiés (CPH), au nombre de 28 et disposant de 1 083 places. Ces centres ont pour mission de préparer l’insertion dans la société française des réfugiés qui viennent d’obtenir le statut et présentent de graves difficultés d’insertion nécessitant une prise en charge complète durant une période transitoire. Pour 2008, 12,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sont demandés à ce titre, avec un coût journalier moyen à la place de 31 euros.

4,33 millions d’euros sont également demandés pour 2008 au titre de la rémunération des étrangers stagiaires de la formation professionnelle. Les étrangers demandeurs d’emploi qui suivent les stages de formation linguistique organisés et financés par l’ACSÉ et l’ANAEM sont en effet rémunérés.

L’aide à la réinsertion des anciens migrants dans leur pays d’origine, créée par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 relative au droit au logement opposable, devrait mobiliser 3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement en 2008. Elle est ouverte aux étrangers vivant seuls et âgés d’au moins 65 ans (60 ans en cas d’inaptitude au travail), qui justifient d’une résidence régulière et ininterrompue dans un foyer de travailleurs migrants ou dans un logement à usage locatif, dont les revenus sont inférieurs à un seuil qui sera fixé par décret en Conseil d’État et qui effectuent des séjours de longue durée dans leur pays d’origine. Les montants demandés ont été calculés à partir d’une hypothèse de plafond fixé à 650 euros par mois, d’un montant unitaire mensuel de l’ordre de 190 euros et d’un nombre d’allocataires moyen estimé à environ 1 300.

Une subvention de 3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement est également prévue pour la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (CNHI). Cet établissement public administratif, placé sous tutelle des ministères chargés de la culture, de l’intégration de l’éducation nationale et de la recherche, est financé par ces ministères et par l’ACSÉ. Le programme « chef de file » relève de la mission Culture puisqu’il s’agit d’un établissement de type culturel. La participation de la CNHI à l’intégration justifie cependant qu’une partie de son financement (3 millions d’euros sur un budget de fonctionnement estimé à 7 millions d’euros) soit assurée par la mission Immigration, intégration et asile.

Le suivi des recommandations de la Cour des comptes sur l’accueil et l’intégration des populations issues de l’immigration

La Cour des comptes a publié, en novembre 2004, un rapport particulier sur l’accueil des immigrants et l’intégration des populations issues de l’immigration. Elle y a notamment souligné le caractère souvent partiel, parfois contradictoire, des initiatives prises en matière d’immigration, sans que ces choix définissent une politique globale et cohérente. La Cour a également déploré que l’intégration des immigrants déjà installés sur notre territoire ne soit pas favorisée par la mise en place de prestations spécifiques. Elle a procédé depuis à des réexamens réguliers des suites données à ses recommandations, dans ses rapports publics annuels 2006 et 2007.

La Cour a ainsi relevé les progrès accomplis grâce à la généralisation du contrat d’accueil et d’intégration, tout en regrettant que le CAI s’arrête en pratique à l’accueil, le parcours d’intégration qui doit le suivre restant des plus théoriques, selon elle. Plus récemment, en juin 2007, la Cour a déploré l’excessive concentration géographique des immigrés dans des zones dont les difficultés connaissent un développement quasi exponentiel et a recommandé l’étude de la faisabilité de dispositifs spécifiques à proposer à certaines catégories de ces populations immigrantes, distincts des mesures de droit commun offertes aux publics en difficulté. La Cour procède par ailleurs actuellement à l’examen de la manière dont l’ACSÉ remplit ses missions liées à l’intégration, ce dont votre Rapporteur spécial se félicite.

VI.– DONNER UN NOUVEL ÉLAN À LA POLITIQUE DE CODÉVELOPPEMENT

L’importance accordée au codéveloppement par la France se traduit, dans le cadre du présent projet de loi de finances, par la création d’un programme spécifique Codéveloppement au sein de la mission Aide publique au développement, dont notre collègue Henri Emmanuelli est Rapporteur spécial (rapport AN n° 276, annexe n° 4).

Ce programme est géré par M. Patrick Stéfanini, secrétaire général du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement. Il est doté de 60 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 29 millions d’euros en crédits de paiement. Il servira notamment à assurer la promotion des accords de gestion concertée des flux migratoires (v. supra) ainsi qu’à contribuer au développement des projets individuels ou collectifs portés par les migrants dans leur pays d’origine.

Des actions visant à faciliter les transferts de fonds des migrants et à en diminuer les coûts, à aider à la création de micro-entreprises seront menées avec le groupe Banque mondiale et avec la Banque africaine de développement.

L’aide au retour volontaire, qui constitue un apport financer au migrant, d’un montant de 2 000 euros pour un adulte isolé, de 3 500 euros pour un couple, 1 000 euros par enfant mineur jusqu’au 3e inclus et 500 euros à partir du 4e enfant, gérée par l’ANAEM, figure sur ce programme. Il en va de même de l’aide au projet individuel, qui a pour objectif de soutenir le migrant, de retour dans son pays d’origine après un séjour en France, afin qu’il commence une activité économique durable, génératrice de revenus. En 2008, 5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sont demandés à ce titre, afin de financer 700 dossiers au total.

Il aurait été envisageable d’inclure ce programme Codéveloppement dans la mission Immigration, asile et intégration, compte tenu de l’importance accordée au codéveloppement dans le cadre d’une politique d’immigration choisie et concertée.

LES PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Le choix de la future localisation de l’administration centrale du ministère devra être opéré avec soin, afin d’en maîtriser les coûts.

2. Un indicateur de performance relatif au pourcentage de l’immigration économique par rapport au flux total devrait être introduit dans le projet annuel de performances afin de tenir compte de l’objectif fixé par le Président de la République : parvenir à 50 % d’immigration professionnelle à l’horizon 2012.

3. Les crédits relatifs à l’application « réseau mondial visa » devraient être transférés, lors du prochain exercice budgétaire, de la mission Action extérieure de l’État à la mission Immigration, asile et intégration.

4. L’ensemble des crédits relatifs à la construction et au fonctionnement des centres de rétention administrative, éparpillés entre les missions Sécurité et Immigration, asile et intégration, devraient être regroupés au sein de la présente mission, afin de permettre une vision complète de leur coût.

5. Une instance unique de gestion des centres de rétention administrative devrait être mise en place au sein du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, afin d’en rationaliser le pilotage, actuellement éclaté entre la direction générale de la police nationale et la direction générale de la gendarmerie nationale.

6. Les travaux relatifs à la salle d’audience aménagée sur le site aéroportuaire de Roissy devraient être achevés au plus vite afin de permettre le fonctionnement de cette salle.

7. Un indicateur de performance relatif au taux d’exécution global des mesures d’éloignement prononcées devrait être introduit dans le projet annuel de performances.

8. L’État devrait être systématiquement représenté lors des audiences devant le juge des libertés et de la détention, dans le cadre des procédures d’éloignement. À plus long terme, le contentieux des procédures d’éloignement devrait être unifié au profit d’un seul ordre juridictionnel (ce qui nécessiterait une révision constitutionnelle).

9. Une évaluation fiable du coût complet d’un éloignement, incluant notamment le coût des heures fonctionnaires, devrait figurer dans le prochain projet annuel de performances.

10. Les efforts visant à réduire les délais de traitement des recours par la Commission de recours des réfugiés ainsi que les délais de sortie des personnes déboutées et des réfugiés des centres d’accueil des demandeurs d’asile devront être poursuivis.

11. L’articulation entre l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) et l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (ACSÉ), en matière de formation linguistique, devrait être clarifié. Une rationalisation – sans doute sous la forme d’un transfert à l’ANAEM – est envisageable et pourrait générer des économies d’échelle importantes.

12. Un indicateur de performance relatif à la durée d’instruction des demandes de naturalisation devrait être introduit dans le projet annuel de performances.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 16 octobre 2007 à 9 heures 30, votre commission des Finances a examiné les crédits de la mission Immigration, asile et intégration, l’article 45 rattaché de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2008 (n° 189).

Après l’exposé de votre Rapporteur spécial, M. Michel Bouvard, Président, a salué le regroupement des crédits au sein de la mission Immigration, asile et intégration qui correspond aux souhaits de la Commission. Il convient maintenant d’intégrer les dépenses d’investissement relatives aux centres de rétention administrative dans le même périmètre comme, par exemple, l’immobilier de la gendarmerie a fini par être inclus au sein du programme Gendarmerie. La question de la prise en compte par le Gouvernement des préconisations de la MEC concernant la prise en charge des demandeurs d’asile est posée. On constate dans le cadre du PLF pour 2008 une revalorisation conséquente des crédits dédiés à l’aide médicale d’État (AME). Est-ce suffisant et l’AME doit-elle être incluse dans la mission ? En matière d’immobilier, il convient que les rapporteurs spéciaux coordonnent leurs travaux avec ceux de M. Yves Deniaud qui a entrepris d’étudier de façon globale la problématique de l’immobilier de l’État.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx a souhaité des précisions sur la situation de la salle d’audience de Roissy qui demeure inoccupée du fait des magistrats et des avocats. Il convient de la faire fonctionner afin de désengorger le tribunal de Bobigny, s’agissant du droit des étrangers.

M. Michel Bouvard, Président, a souhaité que cette question soit traitée en coordination avec le Rapporteur spécial des crédits de la justice.

Votre Rapporteur spécial a considéré que la création du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement faciliterait la mise en œuvre des conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle. Elle a rappelé que l’aide médicale d’État n’était pas comprise dans le périmètre de la mission. Le coût de l’immobilier est élevé puisque la vente du bâtiment de l’ANAEM ne pourrait permettre le financement de la location de bureaux près du ministère que pendant 3 ans, d’où l’intérêt d’installer des services dans des zones moins résidentielles. La nouvelle structure gouvernementale devrait favoriser la rationalisation sans créer de dépenses supplémentaires.

Sur la proposition de votre Rapporteur spécial, la Commission a adopté les crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

Article 45 

Revalorisation de la taxe perçue au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) lors de la demande de validation de l’attestation d’accueil

Texte du projet de loi :

Dans l’article L. 211-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le montant : « 30 € » est remplacé par le montant : « 45 € ».

Exposé des motifs du projet de loi :

Le présent article vise à réévaluer de 15 € la taxe perçue au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) lors d’une demande de validation d’une attestation d’accueil.

Cette taxe a été instituée par l’article 5-3 de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité qui prévoit : « chaque demande de validation d’une attestation d’accueil donne lieu à la perception au profit de l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations, d’une taxe d’un montant de 30 euros acquittée par l’hébergeant. Cette taxe est recouvrée comme en matière de droit de timbre ».

Il est proposé de réévaluer la valeur de cette taxe à 45 € afin de financer le développement des nouvelles missions confiées à l’ANAEM, comme les contrats d’accueil et d’intégration pour la famille ou l’évaluation du niveau de connaissance de la langue française, dans le cadre de la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile.

Cette mesure apporte des ressources supplémentaires à l’ANAEM estimées à 3,6 millions €.

Observations :

Le présent article vise à porter de 30 à 45 euros la valeur de la taxe perçue au profit de l’Agence nationale de l’accueil et des migrations (ANAEM) lors d’une demande de validation d’une attestation d’accueil. Cette revalorisation a pour objet de financer les nouvelles missions confiées à l’ANAEM par la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, telles que les contrats d’accueil et d’intégration (CAI) pour la famille et l’évaluation du niveau de connaissance de la langue française.

I. Le droit existant

L’ANAEM est financée, d’une part, par une subvention de l’État, d’autre part, par des ressources provenant de taxes et redevances perçues pour l’exercice de ses missions. L’ANAEM est ainsi affectataire de trois taxes, recouvrées par droit de timbre :

– la taxe perçue à l’occasion de la délivrance du premier titre de séjour ;

– la taxe perçue lors du renouvellement des autorisations de travail et des titres de séjour valant autorisation de travail ;

– la taxe perçue lors de la demande de validation d’une attestation d’accueil.

Cette troisième taxe a été instituée par l’article 5-3 de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité (devenu l’article L.211-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), qui avait fixé son montant à 15 euros, par référence au montant de la taxe perçue lors de la délivrance du certificat d’hébergement en vigueur jusqu’à sa suppression par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile (dite loi RESEDA).

Le montant de cette taxe a été porté à 30 euros par l’article 133 de la loi de finances initiale pour 2007, qui a également revalorisé les deux autres taxes dont l’ANAEM est affectataire, afin de financer la mise en œuvre du contrat d’accueil et d’intégration rendu obligatoire par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, ainsi que celle du diplôme initial de langue française pour les étrangers primo arrivants.

II. Le dispositif proposé

La revalorisation de 15 euros de la taxe perçue au profit de l’ANAEM lors d’une demande de validation d’une attestation d’accueil devrait apporter à l’Agence des ressources supplémentaires estimées à 3,6 millions d’euros, sur la base de 250 000 attestations par an.

Ces ressources supplémentaires sont nécessaires pour financer deux dispositions de la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’asile et à l’intégration, actuellement en cours d’examen de conformité à la Constitution : le contrat d’accueil et d’intégration pour la famille et l’évaluation du niveau de connaissance de la langue française.

a) Le financement du contrat d’accueil et d’intégration pour la famille

Le contrat d’accueil et d’intégration (CAI) pour la famille devra être signé par tous les parents d’enfants ayant bénéficié du regroupement familial. Ceux-ci devront suivre une formation gratuite sur les droits et les devoirs des parents en France, proposée par l’ANAEM. Le contenu de cette formation n’a pas encore été précisément défini. Il fait actuellement l’objet d’une réflexion menée par un groupe de travail composé notamment de représentants de la Délégation interministérielle à la famille, de l’ANAEM et de l’Union nationale des associations familiales (UNAF), qui envisage de l’orienter autour de modules concernant l’égalité entre les femmes et les hommes, l’exercice de l’autorité parentale, les droits des enfants et l’école gratuite, laïque et obligatoire.

Environ 5 000 personnes par an seraient concernées par la création du CAI familial, d’après les estimations fondées sur le nombre de demandes de regroupement familial concernant conjoint et enfant(s) en 2006. Le coût prévisionnel de mise en œuvre de ce module de formation est évalué à près de 500 000 euros sur la base de 500 séances de 10 personnes et d’une journée complète de formation, pour un coût moyen de 1 000 euros.

b) Le financement de l’évaluation du niveau de connaissance de la langue française

La loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile prévoit de mettre en place une évaluation, dans le pays d’origine, du niveau de connaissance de la langue française et des valeurs de la République des personnes pour lesquelles le regroupement familial est demandé ainsi que des conjoints de Français. Si ce test révèle que les étrangers concernés ne disposent pas d’une connaissance rudimentaire de notre langue et des valeurs de la République, il leur sera prescrit, selon la nouvelle loi, une formation gratuite de 80 à 180 heures organisée sur deux mois. L’organisation et le financement de ces prestations seront confiés par l’État à l’ANAEM qui pourra, lorsqu’elle ne dispose pas de représentation sur place, en déléguer la mise en œuvre à des prestataires privés conventionnés à cet effet.

Les heures de formation linguistique ainsi prescrites ne représentent pas un surcoût par rapport au dispositif existant, puisqu’elles viendront s’imputer sur le droit à la formation linguistique, d’une durée maximale de 400 heures, déjà prévu au bénéfice de tout étranger signataire d’un contrat d’accueil et d’intégration dont le niveau de connaissances en français n’est pas jugé suffisant. Elles constituent simplement un transfert de la France vers l’étranger de dépenses déjà assumées par l’Agence.

Seule l’évaluation du niveau de connaissance du français et des valeurs de la République suscitera de nouvelles dépenses, dont le montant est estimé à près de 2,8 millions d’euros par an, sur la base d’un flux potentiel de 56 000 personnes par an et de 70 % des tests directement assurés par les personnels de l’ANAEM à l’étranger.

Le Gouvernement envisage par ailleurs de financer d’autres dispositifs prévus par la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, tels que le bilan de compétence des étrangers admis au séjour et orientés vers des métiers en tension ou à fort potentiel de développement, par la poursuite de la revalorisation par la voie réglementaire des autres redevances et droits de timbre perçus par l’ANAEM (pour lesquels le législateur a fixé un plancher et un plafond, entre lesquels le montant est fixé par décret) et par la recette des visas de court et long séjour.

Suivant l’avis de votre Rapporteur spécial, la Commission a adopté cet article sans modification.

ANNEXE :
LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES
PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement

Cabinet du ministre

M. Guillaume LARRIVÉ, directeur adjoint du cabinet, M. Patrick STÉFANINI, conseiller auprès du ministre, secrétaire général du comité interministériel de contrôle de l’immigration et secrétaire général du ministère, M. Yves BENTOLILA, conseiller budgétaire, Mme Elsa HERVY, conseiller parlementaire

Services du ministère

M. Jean-Pierre GUARDIOLA, sous-directeur des étrangers et de la circulation transfrontières

M. Patrick BUTOR, directeur de la population et des migrations, Mme Laurence BASSANO, sous-directrice accueil et intégration

Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales

M. Daniel DUBOIS, sous-directeur Ressources, direction centrale de la police aux frontières, direction générale de la police nationale

Ministère des affaires étrangères

M. Alain CATTA, directeur des Français à l’étranger et des étrangers en France

M. Guy SERIEYS, ambassadeur chargé du codéveloppement

Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA)

M. Jean-François CORDET, directeur général de l’OFPRA

Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM)

M. Jean GODFROID, directeur général, Mme Marie-Claude BLANC, directrice générale adjointe

Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances

M. Dominique DUBOIS, directeur général, Mme Blanche GUILLEMOT, directrice générale adjointe.

© Assemblée nationale

1 () Sur ces 120 emplois créés, 20 proviennent d’un prélèvement sur le plafond d’ETPT du ministère de l’Économie, des finances et de l’emploi et du ministère du Budget, des comptes publics et de la fonction publique. La création nette est donc en réalité de 100 ETPT.

2 () En 2005, sur les 156 310 immigrants économiques (soit 59,61 % du total des 262 236 migrants), il n’y avait en réalité que 61 614 demandeurs principaux (soit 23,5 % du total des flux), auxquels s’ajoutent 94 696 personnes à charge relevant, en France, du regroupement familial.

3 () Le logiciel ELOI vise à améliorer le suivi des procédures d’éloignement par les préfectures ainsi que la gestion des centres de rétention administratives par les services de police et gendarmerie. L’arrêté ministériel du 30 juillet 2006 l’ayant initialement créé a été annulé par le Conseil d’État dans un arrêt du 12 mars 2007, au motif que la création d’ELOI nécessitait un décret en Conseil d’État après avis de la CNIL. Le projet de décret, approuvé par la CNIL le 14 juin 2007, est en cours d’examen devant le Conseil d’État.

4 () L’ATA est également versée aux anciens détenus lorsque la durée de leur détention n’a pas été inférieure à deux mois et aux salariés expatriés non couverts parle régime d’assurance chômage ; ces crédits relèvent du programme Accès et retour à l’emploi de la mission Travail et emploi

5 () Rapport d’information n° 2448 de Mme Marie-Hélène des Esgaulx au nom de la Mission d’évaluation et de contrôle, « Pour une prise en charge plus rigoureuse des demandeurs d’asile », 6 juillet 2005.

6 () Rapport d’information n° 3012 de Mme Marie-Hélène des Esgaulx au nom de la Mission d’évaluation et de contrôle, « Pour une prise en charge plus rigoureuse des demandeurs d’asile : suivi de l’action du Gouvernement », 5 avril 2006.

7 () Cette estimation se fonde sur l’hypothèse d’une généralisation aux signataires du CAI dont l’âge est compris entre 18 et 35 ans ayant le niveau DILF, soit environ 22 500 personnes par an.

8 () À l’exception de celles liées au contrat d’accueil et d’intégration, qui ont été transférées à l’ANAEM.