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N
° 276

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2007

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189),

PAR M. Gilles CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 48

GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS
OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

Rapporteur spécial : M. Yves DENIAUD

Député

____

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT 9

I.– LA GESTION DU COMPTE 9

A.– LE RAPPORT ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2006 9

1.– Un exercice nouveau dont la méthode est perfectible 9

2.– Un bilan contrasté des recettes et des dépenses 11

a) Des opérations exceptionnelles mais peu de désendettement 11

b) Une explication : le traitement réservé aux cessions du ministère de la Culture 12

c) La répartition des dépenses immobilières 13

3.– Des règles de fonctionnement contestables 15

4.– L’absence de véritables indicateurs de la performance immobilière de l’État 17

B.– LES CESSIONS D’IMMEUBLES RÉALISÉES 17

1.– Les cessions en 2005 17

2.– Les cessions en 2006 18

3.– État provisoire des cessions en 2007 20

C.– LE PARC IMMOBILIER DANS LE BILAN PATRIMONIAL DE L’ÉTAT 20

II.– LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2008 24

A.– LES DÉPENSES ET LES RECETTES 24

B.– LA STRATÉGIE DE PERFORMANCE 25

III.– DEUX MISSIONS DE CONTRÔLE ET D’ÉVALUATION 28

A.– LA CESSION PUIS LE RACHAT PAR L’ÉTAT DE L’ANCIEN IMMEUBLE DE L’IMPRIMERIE NATIONALE 28

1.– La cession par l’Imprimerie nationale de son site rue de la Convention 29

2.– Le rachat par l’État 30

3.– L’implantation des services centraux du ministère des Affaires étrangères 32

4.– Le choix de l’immeuble n’est pas sans critiques 33

5.– Le régime fiscal de la plus-value réalisé par le groupe Carlyle 35

6.– Conclusions 37

B– QUE FAIRE DE L’IMMEUBLE DU 20 AVENUE DE SÉGUR ? 38

1.– Une situation administrative complexe 38

2.– Le projet hérité du précédent gouvernement 39

3.– Les services centraux de l’ancien ministère de l’Écologie 42

4.– La Maison de la Francophonie 43

5.– Comment sortir de cette impasse ? 44

IV.– QUELQUES QUESTIONS SUR LA NOUVELLE POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT 46

A.– LA NÉCESSAIRE ÉVOLUTION DES RÈGLES DU COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE 46

B.– LES LOYERS BUDGÉTAIRES 49

C.– LE SERVICE FRANCE DOMAINE ET LA STRATÉGIE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT 50

D.– PLUSIEURS PROJETS EN COURS SONT DISCUTABLES 52

DEUXIÈME PARTIE : LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIER PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS OU À DES ORGANISMES PRIVÉS 57

I.– LE RAPPORT ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2006 58

II.– LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2008 58

EXAMEN EN COMMISSION 61

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 63

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, une seule réponse sur vingt-cinq était parvenue à votre Rapporteur spécial, ce qui est difficilement compatible avec l’exercice de sa mission. Il manquait encore sept réponses dans la semaine qui a précédé l’examen du présent rapport par la commission des Finances. Pourtant, certaines réponses présentaient des chiffres arrêtés au 17 août, indice d’une rédaction précoce. Il conviendra donc à l’avenir d’améliorer les circuits de transmission des réponses au questionnaire.

Synthèse

 Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État retrace les cessions et dépenses immobilières de l’État. Les cessions sont prévues à hauteur de 600 millions d’euros en 2008. L’objectif pour 2007 était de 500 millions d’euros. Il sera largement dépassé avec la cession cette année du Centre de conférences internationales de l’avenue Kléber pour 404 millions d’euros. Le produit des cessions a approché 800 millions d’euros en 2006.

 La valeur du parc immobilier de l’État au 31 décembre 2006 est estimée à 44,3 milliards d’euros contre 37,9 milliards un an plus tôt, soit une hausse de 14 % due aux réévaluations et hausses de prix. L’estimation du nombre des immeubles des opérateurs de l’État varie entre 19 000 et 72 000, et leur valeur est totalement inconnue !

 Le rapport annuel de performances pour 2006 et le projet annuel de performances pour 2008 contiennent peu d’informations. Nous ne disposons pas du bilan en recettes et en dépenses des quinze budgets opérationnels de programmes ministériels. Les ministères maintiennent une grande partie de leurs dépenses immobilières hors du CAS, dans les crédits de leurs missions. Le CAS, au mépris de sa raison d’être, n’est donc encore qu’un instrument de mesure très imparfait de la performance immobilière.

 Deux missions sur pièces et sur place fort instructives, effectuées par votre Rapporteur spécial, illustrent des dysfonctionnements dans la gestion immobilière de l’État.

Il s’agit d’abord de l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale de la rue de la Convention. Cédé pour 85 millions d’euros hors taxes au groupe Carlyle, il a été racheté, quatre ans plus tard, 325 millions d’euros hors taxes par le ministère des Affaires étrangères. La plus-value réalisée peut être estimée à 130 millions d’euros. La cession de l’immeuble par l’Imprimerie nationale a été précipitée et dépourvue de professionnalisme. Le rachat par l’État s’est fait dans la fourchette haute des prix du marché. La nécessité d’implanter les services administratifs du ministère des Affaires étrangères dans le centre de Paris est discutable. L’immeuble ne comporte pas de centre de conférences internationales pouvant héberger par exemple un Conseil de l’UE à 27 et il n’est pas « haute qualité environnementale ». La plus-value fiscale réalisée par le groupe Carlyle, compte tenu de la nationalité de la filiale qui a effectué l’opération, ne sera pas taxable ; du fait que la convention fiscale entre la France et le Luxembourg est en cours de révision entre 40 et 70 millions échappent ainsi à la taxation sur les plus-values.

La deuxième opération concerne l’immeuble du 20 avenue de Ségur, qui est occupé par les services de l’ancien ministère de l’Écologie. L’immeuble, qui date de 1937, est très dégradé et 11 000 mètres carrés ne sont plus occupés ni entretenus depuis des années. Le précédent gouvernement avait le projet d’y implanter la Maison de la francophonie. Le coût des travaux était estimé à 85 millions d’euros, sans compter 40 millions pour le relogement des services de l’Écologie. Quel est maintenant l’intérêt de cette opération alors que l’ancien ministère de l’Écologie vient de fusionner avec l’ancien ministère de l’Équipement, qui est principalement installé à La Défense ?

On aurait pu envisager de loger la Maison de la francophonie rue Monsieur, dans les anciens locaux du ministère de la Coopération. Cependant les règles de fonctionnement du compte d’affectation spéciale ne permettent pas de mettre en corrélation les besoins des ministères et les locaux qui ne sont plus occupés par d’autres.

 Le service France Domaine n’a pas donné son avis sur le bien fondé des deux opérations de l’Imprimerie nationale et de l’avenue de Ségur. Il est donc urgent que l’État dispose d’un gestionnaire immobilier qui ait compétence pour toutes les cessions, acquisitions, rénovations ou constructions. France Domaine a fait des progrès incontestables pour la connaissance de l’immobilier de l’État et son évaluation, mais il faut passer à la vitesse supérieure. Les 85 % de « droit de retour » prévus dans les règles du CAS sont incontestablement trop élevés.

INTRODUCTION

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État en est à sa troisième année d’existence. Il résulte d’une des recommandations du rapport (n° 2457) de la Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des Finances présenté en juillet 2005, par M. Georges Tron. Votre Rapporteur spécial, qui présidait la MEC, en avait suivi les travaux avec un intérêt tout particulier.

Ce compte devait être l’instrument budgétaire de la nouvelle politique immobilière de l’État. Il s’agissait d’en faire un élément de transparence, présentant le produit des cessions immobilières et, surtout, leur emploi par les différents ministères. La MEC avait souhaité que ne se reproduise plus le mauvais exemple du ministère de la Culture : une fois le site de la rue des Bons Enfants rénové à grands frais, les autres implantations de ce ministère qui devaient être vendues pour financer cette opération avaient été conservées.

Ce compte devait également inciter les ministères à céder leur patrimoine immobilier vacant, sous-utilisé ou inadapté, en prévoyant un mécanisme incitatif leur permettant de disposer d’une partie importante du produit des cessions pour financer des projets immobiliers.

Le maintien des règles de fonctionnement de ce compte, inchangées depuis sa création, a cependant conduit à des dysfonctionnements. Les ministères qui disposent de par leur histoire d’un parc immobilier étendu ont saisi l’occasion pour céder ce qui n’était plus occupé ou inadapté, et ont ainsi pu financer leurs projets. À l’opposé, les ministères de création plus récente qui ne disposaient pas de tel parc n’ont pu, faute de moyens, adapter le leur pour le rendre plus fonctionnel ou moins coûteux.

La nouvelle politique immobilière de l’État, telle que voulue par la MEC, supposait la création d’un « pilote » de la gestion immobilière de l’État, rôle qui avait été dévolu au nouveau service France Domaine, issu de l’ancien bureau des domaines de l’administration fiscale. Force est malheureusement de constater que la mutation attendue de ce service n’a pas eu lieu. Les ministères continuent à se comporter en quasi-propriétaires. Deux exemples illustrent cette situation : la cession puis le rachat par l’État de l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale ainsi que le projet de rénovation du 20 avenue de Ségur, Paris 7ème (ancien ministère de l’Écologie et projet de Maison de la Francophonie).

À la suite des élections législatives du printemps dernier, votre Rapporteur spécial a été désigné par le Président de l’Assemblée nationale comme l’un des deux représentants de cette assemblée pour siéger au sein du Conseil de l’immobilier de l’État, l’autre représentant étant M. Jean-Louis Idiart. Ce conseil, placé sous la présidence de M. Georges Tron depuis sa création, est chargé de conseiller le ministre sur les orientations à prendre dans la politique immobilière de l’État, et surveiller sa mise en œuvre.

PREMIÈRE PARTIE :
LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

I.– LA GESTION DU COMPTE

A.– LE RAPPORT ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2006

En application de la LOLF, et pour la première fois en 2007, le rapport annuel de performances (RAP) sur le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État a été présenté en annexe au projet de loi de règlement pour 2006. Ce rapport présente le produit des cessions, les dépenses immobilières et la contribution au désendettement de l’État, ainsi que les résultats en matière de stratégie de performance. Il est donc le dernier élément constitutif de la présentation du budget de l’année 2006 en mode LOLF, qui avait commencé avec l’examen du projet annuel de performances (PAP) à l’automne 2005.

1.– Un exercice nouveau dont la méthode est perfectible

Rappelons que le CAS a été créé dans le projet de loi de finances pour 2006 comme outil de transparence pour les cessions immobilières de l’État et l’affectation des dépenses immobilières ainsi financées. Il a été créé avec un seul programme, du même nom. Le Conseil constitutionnel ayant ensuite constaté l’anticonstitutionnalité des missions mono-programme, le CAS, qui est assimilé à une mission, a été présenté avec deux programmes (l’un pour les recettes et l’autre pour les dépenses) à partir de la loi de finances pour 2007.

Le rapport de performances commence par une description de la démarche qui a conduit à la réforme de la politique immobilière de l’État, à la suite du rapport de la MEC de juillet 2005 :

– dynamisation des cessions ;

– création du service des domaines, sous la responsabilité du ministre du Budget et de la réforme de l’État ;

– définition de règles d’affectation du produit des cessions immobilières : taux de retour pour les ministères de 85 % – sauf dispositions spéciales moins avantageuses pour les immeubles vacants et les terrains (50 %) ou plus avantageuses pour les ministères de la Défense (100 %), des Affaires étrangères, des Finances (100 % pour leurs immeubles à l’étranger) et de l’Équipement (95 %) –, le solde allant au désendettement de l’État. Cette explication des règles de retour est répétée trois fois dans le rapport de performances, alors que, comme il est indiqué plus bas, ce rapport aurait pu contenir des développements plus importants par ailleurs.

Le bilan stratégique du rapport annuel de performances, présenté par le responsable de programme, M. Daniel Dubost, chef du service France Domaine, dresse un bilan en mai 2007 des réformes entreprises dans la gestion de l’immobilier de l’État depuis le rapport de la MEC : chantier législatif et réglementaire (d’ailleurs encore inachevé pour la partie réglementaire du code général de la propriété des personnes publiques), présentation en juin 2006 de schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) pour les services centraux des ministères, mise en place d’un dispositif de loyers budgétaires, étendu en 2007 à tous les services centraux installés en Île de France. Enfin, le bilan stratégique rappelle les principales dispositions de la circulaire du Premier ministre du 28 février 2007, qui confirme les travaux entrepris depuis 2006 et fixe les axes à poursuivre dans les mois à venir : SPSI à actualiser tous les ans, loyers budgétaires et conventions d’utilisation, lancement d’expérimentations pour l’entretien et la maintenance, rôle du service France Domaine et du ministre du Budget dans les décisions d’acquisition et de prise à bail…

Au-delà de la description de la réforme entreprise, qui représente un immense chantier, le rapport de performances ne semble pas assigner de véritable orientation stratégique à la politique immobilière de l’État, laissant craindre que certains ministères continuent de se comporter en quasi-propriétaires. En outre, la mutation du service France Domaine nécessite un véritable changement de culture, qui doit être conduit comme un projet à part entière, avec l’acquisition de méthodes en provenance de la profession immobilière. Mais le bilan stratégique ne mentionne pas cette dimension de la réforme, qui constitue pourtant la pierre angulaire de la réussite de la démarche entreprise.

Préconisation n° 1 : conférer au « bilan stratégique » du RAP le caractère d’un véritable bilan, établi par le responsable du programme, des grandes orientations de la politique conduite.

La présentation du programme détaille les règles de fonctionnement du compte, en particulier les règles de retour au-delà de l’effort de désendettement de l’État : les cessions inférieures à 2 millions d’euros donnent lieu à attribution automatique au ministère, pour des dépenses immobilières ; les cessions supérieures à 2 millions d’euros sont soumises à validation des projets de réinstallation par le service France Domaine et la direction du budget, sous l’autorité du ministre chargé du Budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Le RAP comporte de nombreuses redites, et pas seulement sur le rappel des règles de fonctionnement du CAS, et est entaché de plusieurs erreurs matérielles.

2.– Un bilan contrasté des recettes et des dépenses

a) Des opérations exceptionnelles mais peu de désendettement

Le compte enregistre 798,9 millions d’euros de recettes de cessions en 2006. Les dépenses se sont élevées à 293,7 millions d’euros en crédits de paiement et 396,7 millions d’euros en autorisations d’engagement. Le compte a donc présenté un solde positif de 505,2 millions d’euros. Les dépenses se décomposent en crédits de paiement en 225,3 millions d’euros de dépenses immobilières et de 68,4 millions d’euros de contribution au désendettement de l’État. En autorisations d’engagement, les dépenses immobilières s’élèvent à 328,2 millions d’euros et la contribution au désendettement à 68,5 millions d’euros. Il aurait été utile de connaître la répartition des cessions par ministère et le détail des cessions supérieures à 2 millions d’euros.

Le rapport de performances indique que le compte a été ouvert le 1er janvier 2006 avec un report de 415,2 millions d’euros (en autorisations d’engagement et crédits de paiement) en provenance de la gestion 2005 ; il s’agit du produit des cessions réalisées avant cette date, défalquées de la contribution au désendettement (100 millions d’euros) et non encore dépensées. De plus, une ouverture de crédits a bénéficié au compte pour un montant de 319,9 millions d’euros ; il s’agit de la différence entre le produit des cessions réalisées en 2006 (798,9 millions d’euros) et la prévision inscrite dans la loi de finances initiale pour 2006 (479 millions d’euros). Au total, si l’on additionne les recettes des cessions de 2006 et des années précédentes, les crédits disponibles sur le compte se sont élevés à 1,1 milliard d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement. La consommation des crédits s’étant élevée à 293,7 millions d’euros en crédits de paiement, le compte présente donc un solde positif de 920,4 millions d’euros au 31 décembre 2006, solde qui est reporté sur l’exercice 2007.(1) Le solde positif correspondant en autorisations d’engagement est de 817,4 millions d’euros. Ces montants sont déposés sur les BOP des différents ministères, en attente d’utilisation pour des dépenses immobilières.

L’évolution du montant des cessions rappelle la montée en puissance réalisée à partir de 2005. Le résultat des cessions en 2004 est indiqué pour 178 millions d’euros dans le rapport de performances(2). Ce rapport indique à tort une prévision de 600 millions d’euros dans la loi de finances pour 2005, alors qu’elle s’élevait en fait à 850 millions d’euros, à la suite d’un amendement adopté à l’initiative de votre commission des Finances. Le chiffre de 600 millions était seulement l’objectif rectifié annoncé par le ministre du Budget en cours de gestion. L’année 2005 s’est terminée sur une réalisation de 634 millions d’euros, au demeurant très honorable pour l’action de France Domaine. La réalisation a atteint 799 millions d’euros en 2006, après une prévision initiale de
479 millions d’euros 
(3). On peut compléter l’information contenue dans le RAP 2006 en rappelant que la prévision votée dans la loi de finances pour 2007 était de 500 millions d’euros ; on sait déjà que cette prévision sera atteinte ou dépassée, après la cession de l’immeuble de l’ancien Centre de conférences internationales de l’avenue Kléber à Paris (ministère des Affaires étrangères), cédé pour un montant de 404 millions d’euros.

b) Une explication : le traitement réservé aux cessions du ministère de la Culture

Pour 2006, le rapport de performances explique le dépassement de la prévision pour 195 millions d’euros par des opérations exceptionnelles (notamment les hôtels Kunski et Vigny/Croisille du ministère de la Culture, mis en vente à la suite de l’amendement précité de la Commission des finances de l’Assemblée nationale pour 79 millions d’euros) et pour 168 millions d’euros par des opérations conclues en 2005 mais encaissées seulement en 2006. Cette explication est reproduite par deux fois dans le rapport de performances.

Le rapport de performances indique que seulement 68,4 millions d’euros ont été consacrés au désendettement, soit 8,5 % du montant total des cessions (798,9 millions d’euros). Ce pourcentage est très en deçà de 15 %, qui est la valeur moyenne de la participation au désendettement telle qu’elle découle des règles de retour. Rappelons que la loi de finances initiale prévoyait une contribution au désendettement de 139 millions d’euros ; soit le double du montant finalement constaté. Le rapport de performances indique que cet écart provient, pour l’essentiel, de la décision prise par le Gouvernement de traiter les cessions réalisées au bénéfice du ministère de la Culture dans les conditions de droit commun et non, comme cela avait été initialement envisagé, en les affectant en totalité au désendettement de l’État. En conséquence, la prévision de contribution de la politique immobilière au désendettement avait été ramenée par la loi de finances rectificative à 64,70 millions d’euros. Cette décision relative à l’affectation du produit de la cession des immeubles du ministère de la Culture est fort critiquable, dans la mesure où la rénovation du site de la rue des Bons Enfants, qui a coûté plus de 70 millions d’euros, avait été gagée par la promesse de cession des autres sites des services centraux du ministère de la Culture.

L’écart entre le montant de ces cessions et les dépenses (293,7 millions d’euros) s’explique également par un décalage dans le temps, le produit de la cession s’effectuant immédiatement en une seule fois et les dépenses immobilières pouvant s’étaler sur plusieurs années. En effet, s’agissant d’un compte d’affectation spéciale, les crédits non consommés sont automatiquement reportés. Les dépenses autorisées par le CAS sont uniquement des dépenses immobilières. Le compte est organisé en autant de BOP que de ministères, qui disposent ainsi des crédits qui résultent des cessions qu’ils ont réalisées.

Le rapport de performances indique que les opérations programmées conduisent en moyenne à une réduction des surfaces utilisées et des coûts d’exploitation de 16 %, sans que le mode de calcul de ce pourcentage soit explicité. Le service France Domaine explique le ratio très faible de 8,5 % par le décalage comptable d’enregistrement des recettes, qui est immédiat, et des dépenses. Or de nombreuses cessions ont été conclues en décembre 2006.

Préconisation n° 2 : respecter le pourcentage des recettes affecté au désendettement tel que voté par le Parlement.

Préconisation n° 3 : le rapport de performances devrait présenter une description détaillée par BOP ministériel des recettes et des dépenses immobilières.

c) La répartition des dépenses immobilières

Le rapport annuel de performances précise que les dépenses immobilières se décomposent :

– en crédits de paiement, entre 24,7 millions d’euros pour le fonctionnement et 200,6 millions d’euros pour l’investissement ;

– en autorisations d’engagement, entre 49,6 millions d’euros pour le fonctionnement et 278,6 millions d’euros pour l’investissement.

Les dépenses de fonctionnement couvrent les loyers intermédiaires (60 %), la rémunération d’intermédiaires et d’honoraires (16 %), l’entretien immobilier (12 %) et les taxes foncières (5,8 %).

Le rapport de performances indique que le service France Domaine a examiné une dizaine de dossiers de remploi concernant les produits de cessions de plus de 2 millions d’euros. Ce service vérifie notamment que les conditions de réinstallation des services sont conformes à l’objectif de modernisation du parc immobilier de l’État, qui passe par la réduction des dépenses immobilières et l’installation des administrations dans des conditions permettant de mieux répondre à leurs besoins fonctionnels, d’améliorer la qualité du service rendu aux usagers et de participer aux gains de productivité de l’État. Ces dossiers ont concerné six ministères (Justice, Finances, Services du Premier ministre, Agriculture, Affaires étrangères et Éducation nationale), pour un total d’opérations envisagées de 243,55 millions d’euros. 64 % de ce montant a fait l’objet d’une dotation des BOP des ministères concernés en 2006 ; le reste fera l’objet d’une dotation au fur et à mesure des besoins ou de l’effectivité des encaissements des ventes. Les principaux postes de dépenses d’investissement sont les constructions d’immeubles (un peu plus de 80 %) et l’acquisition d’immeubles (près de 17 %).

Ce rapport de performances aurait joué son rôle en faveur de la transparence de la politique immobilière de l’État s’il avait présenté un bilan détaillé de chacune de ces opérations de cession supérieures à 2 millions d’euros, avec d’un côté le montant du produit de la cession et de l’autre le détail des dépenses immobilières que cette cession aura permis, et la contribution correspondante au désendettement de l’État. On aurait ainsi pu connaître le produit net des cessions immobilières, après comptabilisation des dépenses de réimplantation des services.

Préconisation n° 4 : présenter un bilan détaillé pour chacune des opérations supérieures à 2 millions d’euros.

L’évolution des surfaces occupées, à la suite de ces réimplantations, aurait également été un indicateur utile à suivre, opération par opération et pour chacun des BOP ministériels.

Préconisation n° 5 : présenter une évolution de surfaces occupées à la suite des opérations de réimplantation des administrations ayant cédé des immeubles domaniaux occupés.

Les dépenses immobilières pouvant s’étaler sur plusieurs années après la réalisation des cessions, il faudra, lors du prochain projet annuel de performances ou rapport annuel de performances, assurer un suivi de ces opérations dans une perspective pluriannuelle.

Préconisation n° 6 : présenter sous forme de tableau et par BOP ministériel un suivi pluriannuel des recettes de cessions et des dépenses immobilières financées sur le CAS.

Une des raisons ayant entraîné la création du CAS étant de contrôler que les dépenses de réimplantation ne dépassent pas un certain pourcentage des recettes provenant de la cession (règle de retour de 85 % sauf exceptions), il faudrait également s’assurer que les ministères ont mis en place une comptabilité analytique en matière immobilière permettant de vérifier que toutes les dépenses liées à la réimplantation soient bien imputées sur le CAS, et non dispersées sur des lignes budgétaires des missions et programmes du ministère.

Préconisation n° 7 : demander à chaque ministère de tenir une comptabilité analytique de ses dépenses immobilières (entretien courant, gros travaux, personnel, fonctionnement, loyers…)

A contrario, il faudrait éviter que les dépenses immobilières figurant dans le CAS ne soient l’occasion, pour certains ministères, de les soustraire aux budgets inclus dans les missions et programmes, afin d’en diminuer optiquement les enveloppes. Ainsi on sait que l’ENA finance une partie des travaux de transfert de son siège à Strasbourg, non pas sur son budget, mais à partir des ressources contenues dans le BOP des services du Premier ministre du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État et réalisées lors de la cession de l’immeuble de la rue de l’Université à Paris (46,4 millions d’euros). Une inscription de ces opérations dans le présent rapport de performances et dans le PAP Fonction publique aurait constitué un élément de transparence utile à la lecture des documents budgétaires.

Préconisation n° 8 : réintroduire les dépenses immobilières financées par le CAS dans la comptabilité d’analyse des coûts (CAC) de chaque programme.

Le rapport de performances aurait également pu contenir une comptabilisation de l’ensemble des dépenses immobilières correspondant aux cessions inférieures à 2 millions d’euros, avec des regroupements pertinents (par ministère, par département…).

Préconisation n° 9 : présenter l’ensemble des dépenses immobilières financées par des cessions inférieures à 2 millions d’euros, avec des regroupements pertinents (par ministère, par département…)

En outre, il aurait aussi été utile que ce rapport indique des éléments de comparaison avec les opérations entrant dans le champ du compte d’affectation spéciale au cours de l’année 2005, année précédant la création du CAS mais qui fonctionnait selon les mêmes règles : montant des cessions, dépenses immobilières, contribution au désendettement, bilan pour les opérations supérieures à 2 millions d’euros dans les mêmes conditions que pour les opérations effectuées après le 1er janvier 2006.

Préconisation n° 10 : présenter, dans les mêmes conditions que celles effectuées en 2006, les dépenses immobilières effectuées en 2005 et financées sur des cessions de biens domaniaux.

3.– Des règles de fonctionnement contestables

La réflexion sur le fonctionnement de ce CAS amène à s’interroger sur la pertinence des règles de retour pour les ministères. Ces règles avaient été créées à l’origine, en 2005, pour inciter les ministères à céder leur patrimoine immobilier inutilisé ou sous-occupé. L’application de ces règles en 2005 et 2006 a aggravé les inégalités entre les ministères : les ministères anciens et disposant d’un patrimoine immobilier important (par exemple les Affaires étrangères) ont pu en céder une part importante et se reloger dans de bonnes conditions ; les ministères plus récents et sans patrimoine historique (ministères sociaux par exemple) continuent à louer des immeubles pour loger leurs services, à vocation pourtant pérenne et assumant une mission permanente de l’État. De véritables rentes de situation se sont ainsi constituées.

On peut également s’interroger sur le comportement actuel d’acquisition ou de construction qui est celui des différents ministères, pour reloger les services ministériels à structure constante. Le Président de la république a indiqué qu’il appelait de ses vœux une rationalisation des structures ministérielles, pour supprimer les doublons, favoriser les regroupements et générer des économies. Il a également indiqué son intention de ne remplacer qu’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, ce qui représente une réduction de 30 000 ou 40 000 fonctionnaires par an pendant la durée de la législature. Le relogement dans des immeubles domaniaux constituera un frein indéniable à la mobilité fonctionnelle. L’État, représenté par le service France Domaine, pourrait réfléchir, comme les grandes entreprises, à une gestion patrimoniale de ses biens immobiliers, en vendant quand le marché est haut et en achetant quand il est bas. La location ou le crédit-bail peuvent dans ces conditions être des solutions d’attente.

Préconisation n° 11 : définir et mettre en œuvre une gestion patrimoniale des biens immobiliers de l’État en arbitrant entre location et propriété, et en optimisant dans le temps les opérations d’achat et de vente.

La réflexion sur l’avenir du CAS passe également par l’inclusion des loyers budgétaires, actuellement appliqués pour les immeubles des services centraux de tous les ministères. En regard, il est possible d’envisager la création d’un programme relatif aux dépenses d’entretien, de maintenance et de gros travaux sur les immeubles domaniaux. Il s’agit de se donner les outils pour sécuriser les recettes, programmer les opérations de façon pluriannuelle et rationaliser l’organisation des travaux, avec une certaine mutualisation interministérielle, afin d’en optimiser le coût.

Préconisation n° 12 : créer au sein du CAS un programme relatif aux dépenses d’entretien, de maintenance et de gros travaux sur les immeubles domaniaux de l’État et financé sur les loyers budgétaires.

4.– L’absence de véritables indicateurs de la performance immobilière de l’État

Le compte ne présente qu’un seul objectif (Identifier et remédier aux cas de sous-optimisation du patrimoine immobilier de l’État). L’indicateur unique est le nombre d’immeubles dont la cession sera proposée par le service France Domaine. La réalisation a été de 310 en 2006 alors que la prévision était de 100 et la cible de 200. Il y a évidemment lieu de se féliciter de ces résultats flatteurs, mais on peut s’interroger sur la valeur mobilisatrice d’un indicateur dont la cible est fixée à un niveau si bas. En outre, il s’agit davantage d’un indicateur d’activité que d’un indicateur de performance.

Préconisation n° 13 : éviter les indicateurs d’activité et définir des valeurs cibles mobilisatrices.

Préconisation n° 14 : compléter le rapport par un objectif de performance immobilière des ministères mesurant avec des indicateurs appropriés des ratios de coût et de surface, avec des valeurs-cibles constituées par les meilleures pratiques en la matière.

B.– LES CESSIONS D’IMMEUBLES RÉALISÉES

Les cessions d’immeubles domaniaux inoccupés, sous-utilisés ou inadaptés ont indéniablement été dynamisées, depuis le rapport de la MEC de juillet 2005. Les chiffres de 2005, 2006 et 2007 sont là pour en témoigner. Votre Rapporteur spécial note qu’il s’agit de montants bruts, avant prise en compte des dépenses immobilières financées sur le produit de ces cessions par les différents ministères. La contribution au désendettement de l’État est de l’ordre de 15 % seulement du produit des cessions.

1.– Les cessions en 2005

Au 1er janvier 2006, le CAS présentait un solde positif de 415,2 millions d’euros, soit un montant de 515,2 millions d’euros de recettes 2005 auquel a été soustraite une contribution forfaitaire de 100 millions d’euros de ces produits de cessions au désendettement de l’État.

Les principales cessions réalisées en 2005 ont été les suivantes :

– 3 rue Octave Gréard, Paris (ministère de la Défense) ;

– rue du Bac, Paris (ministère des Finances) ;

– rue de la Tour des Dames, Paris (ministère des Finances) ;

– 13 rue de l’Université, Paris 7ème (ENA).

2.– Les cessions en 2006

Fin 2005, dans le cadre de la dynamisation de la politique immobilière de l’État, les services locaux du domaine, ont été sollicités afin de recenser les immeubles inadaptés ou mal employés par les différents ministères occupants. 310 immeubles ont ainsi été identifiés dans l’ensemble des administrations pour une valeur (indications figurant au TGPE) d’environ 236 millions d’euros. Au cours de l’année, 155 cessions ont été effectuées soit un taux de réalisation de 48 % pour un montant encaissé d’environ 130 millions d’euros.

Ces cessions ont été effectuées grâce à une mobilisation des structures locales de France Domaine. Elles ont permis d’appréhender les difficultés qui se présentaient :

– en province (hors les grandes villes), la procédure des appels d’offres ne recueille pas toujours l’adhésion. Le manque de repère financier (pas de mise à prix, aucune indication de l’évaluation) semble parfois rebuter les candidats potentiels. Les appels d’offres ne permettent pas toujours de mobiliser la clientèle ;

– les discussions entre administrations n’ont pas toujours permis de réaliser les opérations dans les délais souhaitables ;

– enfin, plusieurs facteurs ont pu retarder l’avancement des dossiers : la contestation du prix, l’acquisition par les collectivités territoriales (dans le cadre du droit de priorité ou d’acquisition amiable) qui, une fois leur décision prise, tardent à concrétiser l’opération ainsi que les questions de pollution/dépollution des terrains.

Cette croissance du volume de cessions a aussi été le résultat de la mobilisation des administrations sous l’égide de la Mission de valorisation du patrimoine immobilier de l’État (MIVPIE), qui a précédé le Conseil de l’immobilier de l’État (CIE).

Au total, 1 600 cessions amiables (par appel d’offres, par adjudication ou de gré à gré) ont été réalisées sur l’année. Les ventes en deçà de 2 millions d’euros représentent 97 % du nombre des cessions mais 19 % seulement du produit (159 millions d’euros). Ces pourcentages montrent la concentration des enjeux financiers sur un petit nombre d’opérations, notamment situées à Paris. Trente ventes, soit 1,8 %, se sont situées entre 2 et 9,99 millions d’euros ; treize ventes, soit 0,8 %, se sont situées entre 10 et 29,99 millions d’euros ; cinq ventes seulement, soit 0,3 %, ont été réalisées à un prix de cession supérieur à 30 millions d’euros.


La part de Paris et de l’Île-de-France est prépondérante (78 % du produit de cession) compte tenu du marché de l’immobilier dans cette région. Les cessions sur Paris (505 millions d’euros) ont porté sur quelque 88 000 m
2 de bâti. Sur les 48 cessions supérieures à 2 millions d’euros, 20 l’ont été au profit de collectivités territoriales, de leurs établissements publics ou des bailleurs sociaux.

La répartition des recettes par ministère montre la part prépondérante du ministère de l’Économie (23 %) et, dans une moindre mesure, des ministères de l’Éducation nationale (17 %), de la Santé (13 %) et de l’Équipement (12 %). Si cette répartition témoigne de l’implication de ces ministères dans l’optimisation du parc immobilier dont ils sont affectataires, elle est aussi très dépendante de la nature de ce parc et des opportunités de marché.

Cette répartition des cessions entre administrations n’est pas du tout représentative de la répartition du patrimoine entre ministères. Les administrations affectataires d’un parc important sont parfois sous-représentées dans la part des cessions (par exemple le ministère de la Défense). Le ministère de l’Économie, quant à lui, est largement sur-représenté.

Les cessions les plus importantes réalisées en 2006 ont porté sur les immeubles suivants :

– 173 bd Saint Germain, Paris (ministère de l’Éducation nationale) ;

– 9 place de la Madeleine, Paris 8ème (ministère des Finances) ;

– 18 rue de Berri, Paris 8ème (ministère des Finances) ;

– 1/1bis av Charles Floquet, Paris 7ème (DATAR) ;

– 25/27 rue d’Astorg, Paris 8ème (ministère de la Santé) ;

– 53 rue Saint Dominique, Paris 7ème (ministère de la Culture) ;

– 10/12 rue du Parc Royal, Paris 3ème (ministère de la Culture) ;

– 52/54 rue de Chateaudun, Paris 9ème (ministère des Finances) ;

– 3/5 bd Pasteur, Paris 3ème (ministère de l’Éducation nationale) ;

3.– État provisoire des cessions en 2007

Au 17 août 2007, les cessions supérieures à 2 millions d’euros totalisaient un montant de 439,2 millions d’euros et celles inférieures à 2 millions d’euros un montant de 67,1 millions d’euros. L’objectif fixé par la loi de finances pour 2007, soit 500 millions d’euros, sera donc dépassé.

Les cessions les plus importantes en 2007 ont porté sur :

– le 19 avenue Kléber, Paris 16ème (Centre de conférences internationales) ;

– la rue de Grenelle, Paris (IGN).

C.– LE PARC IMMOBILIER DANS LE BILAN PATRIMONIAL DE L’ÉTAT

Le projet de loi de règlement pour 2006 présente pour la première fois le bilan de l’État. Pour la première fois également, ce bilan a fait l’objet d’une certification par la Cour des comptes.

Le service France Domaine indique que le parc contrôlé par l’État représente ainsi 28 074 unités administratives (UA)(4) sur les quelque 110 000 unités recensées au Tableau général des propriétés de l’État (TGPE). Les autres biens sont certifiés non contrôlés pour 72 000 UA (bien remis en dotation aux opérateurs ou pris à bail) ou hors périmètre de valorisation pour environ 6 300 UA (infrastructures routières et une partie des établissements pénitentiaires).

La valeur du parc s’établit à 44,3 milliards d’euros et se répartit par ministère comme suit :

VALEUR DU PARC

(en millions d’euros)

Ministères

Valeur du parc UA (1)

Part du patrimoine (%)

Défense

19 128

43,19

Économie, finances et industrie

5 801

13,1

Affaires étrangères

4 579

10,11

Intérieur, sécurité intérieure et libertés locales

3 482

7,86

Équipement, transports, logement, tourisme et mer

3 104

7,01

Justice

2 542

5,74

Jeunesse, éducation nationale et recherche

1 490

3,36

Culture et communication

1 200

2,71

Premier ministre

1 060

2,39

Santé, famille et personnes handicapées

612

1,38

Agriculture, alimentation, pêche et affaires rurales

513

1,16

Domaine (biens non affectés)

297

0,67

Outre Mer

273

0,62

Affaires sociales, travail et solidarité

208

0,47

Sports

62

0,14

Écologie et développement durable

42

0,1

Présidence de la République

2

0,0038

Total

44 300

100

(1) Pour 28 074 unités administratives (UA)

Source : service France Domaine

La valeur du parc est estimée à 44,3 milliards d’euros contre 37,9 milliards d’euros en 2005, soit une hausse de 14 %. Cependant, à périmètre évalué en 2006, entre 2005 et 2006, la valeur du parc est en légère baisse estimée à 0,54 %, du fait de la politique de cession des immeubles (798 millions d’euros) qui a compensé l’augmentation du nombre d’immeubles évalués en 2006 et la hausse globale de l’immobilier. L’effet de périmètre est pour l’essentiel causé par l’inclusion en 2006 de nouveaux immeubles non évalués en 2005 (800).

Pour la métropole, la valeur du parc est passée de 34 milliards d’euros en 2005 à 38 milliards d’euros en 2006. Il est composé de 24 816 immeubles (25 990 en 2005), soit une diminution de 4,73 % des immeubles contrôlés. Le parc des départements d’outre-mer est évalué à 95 %. Il représente 1 614 immeubles valorisés à 1,2 milliard d’euros, concentrés pour moitié à La Réunion. Au cours de l’année 2006, l’effort a également porté sur les biens situés dans les collectivités d’outre-mer. Ainsi, les biens évalués dans ces territoires sont en forte augmentation. Le taux d’évaluation est passé de 6 % à 72 % en 2006. La valeur du parc hors métropole et DOM est actuellement de 4,9 milliards d’euros, contre 3,8 milliards d’euros en 2005.

Enfin, les services locaux de France Domaine ont réévalué en 2006, sur place ou du bureau, 23 % du parc de l’État, soit plus de 6 500 immeubles. En outre, la valeur de près de 19 000 immeubles (70 % du parc) a été actualisée par des coefficients locaux d’évolution des prix, traduisant une augmentation moyenne de 8 % pour le bâti et de 9 % pour le non-bâti. Les autres immeubles soit 7 % sont évalués à l’euro symbolique.

S’agissant de la répartition par ministère, les points suivants méritent d’être soulignés :

– le ministère de la Défense représente 43 % de la valeur du parc, soit 19 milliards d’euros, et ses biens sont évalués à 96 % ;

– le ministère de l’Économie et des finances est le deuxième attributaire en valeur, de 13 % du parc, pour 5,8 milliards d’euros et son patrimoine est évalué à 98 % ;

– le ministère des Affaires étrangères détient 10 % du parc, soit 4,4 milliards d’euros, évalué à hauteur de 99 % ;

– le ministère de la Justice détient un patrimoine de 2,5 milliards d’euros, soit 5 % du parc(5) ;

– le ministère de l’Équipement est, en nombre d’immeubles, le premier attributaire des services de l’État (34 % des UA) mais représente 3 milliards d’euros, soit 7 % de la valeur du parc.

Dans le cadre des travaux annuels sur l’établissement du bilan de l’État et dans le prolongement des travaux de la Cour des comptes, à l’occasion de la certification du bilan de l’État pour l’année 2006, un certain nombre d’orientations a été fixé pour améliorer la qualité des évaluations en matière de comptabilité patrimoniale :

– évaluation sur place des immeubles valorisés sur la base d’études de marché : ces immeubles évalués sur pièces du bureau, en 2004, ont fait l’objet, en 2005 et 2006, de simples actualisations de leur valeur vénale par application de coefficients et n’ont donc jamais été visités par les services locaux du Domaine. Afin de dissiper l’incertitude qui pèse sur la valorisation de ces actifs immobiliers, ils doivent recevoir un traitement prioritaire, aussi bien de la part des comptables (phase de certification du contrôle et d’affectation des données comptables), que de celle des gestionnaires (phase d’enrichissement des données), pour qu’ils puissent figurer dans la phase d’évaluation dans le TGPE dès mi-septembre. Ces immeubles doivent donc être évalués sur place en 2007. Ces évaluations seront, cependant, programmées en fonction des enjeux ;

– évaluation des immeubles jamais évalués : ces immeubles feront l’objet d’une attention particulière en 2007 : de la part des gestionnaires, car leur statut de contrôle n’a jamais été précisé ; de la part des comptables, s’agissant de biens n’ayant pas dépassé en 2006 la phase comptable ; de la part des évaluateurs afin que les évaluations soient effectuées en 2007 ;

– évaluation sur place des immeubles affectés par des changements substantiels. Les biens affectés par des changements substantiels (superficie ou utilisation modifiée, travaux immobilisables réceptionnés) doivent faire l’objet d’une évaluation prioritaire sur place ;

– rectification de valeurs vénales : les travaux d’élaboration des « loyers budgétaires » dans le cadre du PLF 2008 permettent de fiabiliser encore les données de l’inventaire et de valider avec les administrations, dans le cadre du dialogue mis en place au niveau local et central, les informations sur lesquelles sont établies les évaluations. C’est ainsi que les erreurs manifestes détectées portant sur la structure, la superficie, l’utilisation, l’attribution des locaux seront rectifiées sans délai dans le TGPE. Les impacts sur la valeur vénale des immeubles seront intégrés dans le processus de valorisation. Dans la même logique, les opérations menées dans le cadre de la dynamisation de la politique de l’État sont utilisées pour la mise à jour du TGPE.

Par ailleurs, l’accent a été mis sur la nécessité de poursuivre la fiabilisation des données d’inventaire, en particulier les éléments relatifs à la surface et à l’entretien. Ces orientations prolongent les actions entreprises en 2006 et qui ont permis de valoriser plus de 800 immeubles supplémentaires.

La circulaire du Premier ministre du 28 février 2007 relative à la modernisation de la gestion du patrimoine immobilier de l’État a posé les bases d’une stratégie de gestion du patrimoine immobilier des organismes contrôlés par l’État et exerçant une mission de service public. Comme pour la gestion du parc immobilier contrôlé par l’État, cette stratégie passe en premier lieu par le recensement et l’évaluation du patrimoine mis à la disposition des établissements publics. Ce chantier parviendra à échéance en 2009. Le recensement, réalisé en trois vagues, a porté en 2006 sur les 70 établissements identifiés comme disposant des actifs les plus importants, et a été généralisé en deux temps en 2007 à l’ensemble des opérateurs.

Le chantier, qui est de la même importance que celui relatif aux biens immobiliers directement contrôlés par l’État pour son activité, est scindé en trois phases :

– la phase de recensement, en cours pour l’ensemble des opérateurs ;

– la phase de fiabilisation de l’inventaire physique et notarial, via un outil spécialement développé à cette fin. Cette phase est en cours pour la première vague et va être lancée pour la deuxième vague ;

– la phase de valorisation, effectuée par les services locaux de France Domaine, selon une méthodologie similaire à celle mise en œuvre pour l’État.

À ce stade, il apparaît que les difficultés rencontrées par certains opérateurs(6) ont ralenti l’avancement du chantier.

Le TGPE recense 19 381 unités administratives(7) « présumées contrôlées par des établissements publics nationaux ». 70 % de ces UA correspondent aux biens de l’ONF (9 113 UA, dont une majorité de forêts), de l’IGN (3 616 UA dont plus de 3 000 bornes géodésiques de valeur insignifiante) et du Conservatoire du littoral près de 10 % (2 306 UA, des terrains pour l’essentiel).

Entre ce chiffre de 19 381 unités administratives et les 72 000 UA annoncées plus haut comme non contrôlées par l’Etat, sans parler du chiffre de 30 000 à 35 000 immeubles, à l’issue des travaux de la MEC, votre Rapporteur spécial avoue avoir peine à s’y retrouver… Il souligne l’importance de ces travaux de recensement et d’évaluation, pour que la gestion de l’État couvre l’ensemble du périmètre de ses biens immobiliers. Une accélération des calendriers de réalisation de ces travaux est nécessaire.

II.– LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2008

Le Gouvernement propose une simple reconduction des règles du CAS, telles qu’appliquées en 2006 et 2007.

A.– LES DÉPENSES ET LES RECETTES

Le PAP 2008 prévoit un montant de 600 millions d’euros de recettes de cessions immobilières. Votre Rapporteur spécial estime qu’il s’agit d’un objectif raisonnable au vu des cessions réalisées jusqu’à présent et des opportunités encore disponibles dans le parc immobilier de l’État. L’objectif est supérieur à la prévision du PAP 2007, qui retenait le montant de 500 millions d’euros. Mais dans la mesure où en 2007 une seule cession a représenté un montant déjà supérieur à 400 millions d’euros, le niveau d’ambition reste stable.

Votre Rapporteur spécial rappelle que, même si le projet de loi de finances doit fixer un montant prévisible de cessions pour l’année suivante, les cessions immobilières ne sont pas un objectif en soi, elles doivent être la résultante d’une politique immobilière.

Le PAP 2008 décompose les 600 millions d’euros de recettes en 90 millions d’euros affectés au désendettement de l’État et 510 millions d’euros pour financer des dépenses immobilières, en application des règles du CAS. Le pourcentage affecté au désendettement est de 15 %, ce qui, en application de ces règles, correspond au taux normal dans la grande majorité des cessions.

B.– LA STRATÉGIE DE PERFORMANCE

La présentation de la stratégie des deux programmes Contribution au désendettement de l’État et Dépenses immobilières, telle qu’elle a été effectuée par leur responsable commun, le chef du service France Domaine, est très courte, trop générale, essentiellement descriptive et n’apparaît pas porteuse d’une ambition mobilisatrice pour servir la définition et de la mise en œuvre de la nouvelle politique immobilière de l’État. Plusieurs éléments de cette présentation sont la simple copie de développements déjà présents dans le PAP 2007 ou le RAP 2006. Si l’objectif stratégique est pertinent, il manque cependant d’un niveau suffisant de mise en œuvre, comme on le verra plus tard dans le présent rapport.

La présentation stratégique du PAP Dépenses immobilières rappelle les règles du CAS, à savoir que le remploi du produit des cessions inférieures à 2 millions d’euros est laissé à la discrétion des ministères pour leurs dépenses immobilières ; pour les cessions supérieures à 2 millions d’euros, le remploi est soumis à l’agrément du ministre du Budget, après instruction du service France Domaine et de la direction du Budget. Le ministre du Budget, M. Éric Woerth, a indiqué qu’il soumettrait toutes les décisions sur ces opérations à un avis préalable du Conseil de l’immobilier de l’État.

Le service France Domaine rappelle qu’il « vérifie notamment que les conditions de réinstallation des services sont conformes à l’objectif de modernisation du parc immobilier de l’État, qui passe par la réduction des surfaces occupées et des dépenses immobilières et l’installation des administrations dans des conditions permettant de mieux répondre à leurs besoins fonctionnels, d’améliorer la qualité du service rendu aux usagers et de participer aux gains de productivité de l’État.

À cette fin, la charte de gestion pour 2007 a précisé les éléments comparatifs destinés à établir la conformité des opérations à la politique immobilière de l’État. Un certain nombre de cibles à atteindre sont identifiées, telles que le ratio de 12 m² de surface utile nette par agent ou l’exigence d’une diminution d’au moins 10 % du coût d’exploitation par agent entre la situation antérieure et la situation nouvelle à l’issue du relogement. »

Le CAS présente trois objectifs qui sont associés au programme Dépenses immobilières. Votre Rapporteur spécial note que le premier et le troisième objectif concernent plutôt le premier programme Contribution au désendettement, dans la mesure où il concerne directement les cessions.

L’objectif 1 Identifier et remédier aux cas de sous-optimisation du patrimoine immobilier de l’État est mesuré par l’indicateur Nombre d’immeubles dont la cession sera proposée grâce à une prise d’initiative formelle de France Domaine et l’indicateur 1.2 Pourcentage du nombre d’immeubles vendus par rapport au nombre d’immeubles recensés en fin d’année précédente.

Le premier indicateur, qui indique le nombre d’immeubles figurant sur les listes de cessions possibles, est fixé à 250 en 2008 alors qu’il était de 100 en 2007 dans le PAP 2007 (prévision actualisée de 300 dans le PAP 2008), pour une réalisation de 310 en 2006. Le deuxième indicateur, plus intéressant, mesure de pourcentage d’immeubles vendus par rapport à ces listes. La prévision 2008 est fixée à 60 % pour une réalisation de 50 % en 2006. Il s’agit d’indicateurs essentiellement descriptifs dont les valeurs prévues et cibles semblent définies en fonction des possibilités offertes par le parc immobilier de l’État.

L’objectif 2 S’assurer du caractère économiquement rentable des opérations de relogement de services est mesuré par l’indicateur Pourcentage des opérations immobilières de relogement de services agréées par France Domaine ayant induit une réduction prévisionnelle d’au moins 10 % du coût immobilier par agent.

Les prévisions 2007 et 2008 sont fixées à 90 %. Cet indicateur, intéressant en soi, va dans le sens d’une meilleure performance de la gestion immobilière de l’État. Mais on ne sait malheureusement pas comment est calculé le coût immobilier par agent, ministère par ministère. Le rapport de la MEC avait constaté que les ministères ne disposent pas des outils comptables et informatiques leur permettant de connaître leurs coûts immobiliers. Force est de reconnaître que, deux ans après, la situation n’a pas changé. Les dépenses immobilières sont réparties dans de nombreuses rubriques du plan comptable de l’État. PALIER 2006, le système informatique financier et comptable de l’État ne permet pas de faire ces regroupements analytiques, et très peu de ministères ont mis en place un logiciel dédié(8). CHORUS, le futur système informatique financier et comptable de l’État, qui devrait remplacer PALIER 2006 à partir de 2009/2010, n’en disposera pas non plus dans ses fonctions de base. Il faudra sans doute attendre l’achat et le déploiement des fonctions avancées de CHORUS, qui à l’heure actuelle ne sont que prévues…

L’objectif 3 Améliorer la qualité des évaluations domaniales est mesuré par l’indicateur Écart moyen entre valeur vénale et prix réalisé à la vente, au titre des ventes d’un montant supérieur à 2 millions d’euros.

Cet indicateur mesure la qualité des évaluations domaniales effectuées par le service France Domaine. La prévision du PAP 2007 consistait à limiter l’écart à 30 %. Compte tenu de la prévision actualisée à 12 % pour 2007, l’écart proposé pour 2008, s’établit à 10 %. Comme pour l’objectif précédent, cet objectif est pertinent. La précision des évaluations du service France Domaine est en effet d’une grande importance, tant pour les mises en vente que pour la tenue du Tableau générale des propriétés de l’État (TGPE). Votre Rapporteur spécial note cependant qu’au niveau local les évaluations des immeubles domaniaux sont encore trop souvent approximatives et forfaitaires. Il a été témoin du fait que dans certains cas un appel téléphonique au notaire local vaut évaluation domaniale. L’estimation du patrimoine immobilier de l’État a d’ailleurs fait l’objet d’une forte réévaluation entre le 1er janvier 2006 et le 1er janvier 2007. Le service France Domaine s’était engagé en 2005 à mettre en œuvre sur cinq ans un plan pour revisiter un par un tous les immeubles domaniaux de l’État, afin d’affiner les estimations le plus souvent forfaitaires inscrites dans le TGPE. Votre Rapporteur spécial espère que les évaluations domaniales effectuées préalablement aux cessions font l’objet d’une attention particulière par les services évaluateurs de France Domaine. Il reconnaît cependant que la tâche est difficile, s’agissant d’un prix de marché, principalement à Paris où ce prix connaît depuis quelques années une forte croissance.

Votre Rapporteur spécial suggère que la présentation du projet annuel de performances du CAS soit l’occasion de présenter des indicateurs de performance immobilière des différents ministères, par exemple ceux définis dans l’étude élaborée en 2006 pour le service France Domaine par INEUM Consulting et IPD France :

– coût par agent ;

– coût au m2 ;

– surface par agent ;

– rendement (surface utile nette / surface utile brute) ;

– taux de vacance (surface utile brute inoccupée / surface utile brute totale) ;

– qualité environnementale.

L’étude d’INEUM Consulting et IPD France a permis d’identifier les indicateurs de performance immobilière utilisés par les propriétaires et occupants privés (bases de comparaison constituées par IPD France, leader international pour l’information financière de l’industrie immobilière), les niveaux généralement observés pour chacun de ces indicateurs en prenant en compte les éventuelles spécificités des parcs immobiliers, et surtout, les indicateurs-cibles qui pourraient être autant d’objectifs à atteindre pour l’État. Cette étude a été remise à tous les directeurs immobiliers des administrations centrales à la fin 2006. Elle constitue une base de références cibles pour l’immobilier de l’État.

Cette étude doit également servir de base à l’examen des dossiers de remploi dans le cadre du fonctionnement du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État. C’est ainsi par exemple que la cible de 12 m²/agent, connue de tous les ministères et mentionnée explicitement dans la charte de gestion du CAS, est progressivement mise en œuvre et sert de référence dans le remploi des produits de cessions de plus de 2 millions d’euros.

S’agissant de l’entretien immobilier, la direction du Budget a demandé aux ministères d’identifier, en vue du présent projet de loi de finances, les crédits d’entretien dans la partie des projets annuels de performances (PAP) consacrée à la justification au premier euro. Seront également identifiés dans ces documents des indicateurs et des ratios de surface du parc, des indicateurs et des ratios sur l’occupation de ce parc (nombre de m²/agent par exemple) et des indicateurs et des ratios sur l’entretien lourd (coût de l’entretien lourd au m², par exemple).

III.– DEUX MISSIONS DE CONTRÔLE ET D’ÉVALUATION

A.– LA CESSION PUIS LE RACHAT PAR L’ÉTAT DE L’ANCIEN IMMEUBLE DE L’IMPRIMERIE NATIONALE

La cession par l’Imprimerie nationale en 2003, puis le rachat par l’État pour le ministère des Affaires étrangères, en juin de cette année, de l’immeuble du 27 rue de la Convention, Paris 15ème a constitué une séquence dont chaque opération a pu trouver, au moment où elle a été prise, des explications et des justifications, mais qui, dans sa globalité, est révélatrice de graves dysfonctionnements dans la gestion immobilière de l’État. Les montants ont été révélés et abondement commentés dans la presse, avec une cession à 85 millions d’euros HT et un rachat à 325 millions d’euros HT. Le groupe Carlyle, qui a acheté puis cédé, a réalisé une plus-value estimée à 130 millions d’euros.

Votre Rapporteur spécial a effectué les 19 et 20 septembre 2007 une mission sur pièces et sur place sur le site du 27 rue de la Convention, qui fait actuellement l’objet de lourds travaux de réhabilitation.

Il a pu à cette occasion rencontrer les deux principaux acteurs du rachat par l’État de cet immeuble, M. Stéphane Romatet, ancien chef du service des affaires immobilières au ministère des affaires étrangères (MAE), actuellement conseiller au cabinet du ministre des Affaires étrangères et européennes, et M. Daniel Dubost, chef du service France Domaine (9). Il faut relever que le questionnaire remis par votre Rapporteur spécial à la suite de sa mission n’a reçu de réponses que le 7 novembre 2007, veille de l’examen en commission du présent rapport. Votre Rapporteur spécial s’est également fait communiquer le rapport de l’Inspection générale des finances établi à la demande du ministre du Budget en octobre dernier.

1.– La cession par l’Imprimerie nationale de son site rue de la Convention

Il faut commencer par un rappel de la chronologie des faits. L’Imprimerie nationale était dans une situation industrielle et financière très difficile en 2003, quand elle a été fortement incitée – tant par ses banques créancières que par sa tutelle, la direction du Trésor avec la toute nouvelle Agence des participations de l’État (APE) et la direction du Budget – à vendre son site historique du 27 rue de la Convention. L’Imprimerie nationale, société anonyme détenue à 100 % par l’État, connaissait des comptes de résultats très dégradés, avait accumulé un passif financier auprès des banques et sollicitait une subvention de l’État. Le plan industriel de restructuration, voire de sauvetage, passait également par l’abandon du site de la rue de la Convention.

La cession de l’immeuble de la rue de la Convention traduit d’abord à certains égards précipitation et manque de professionnalisme. Même en tenant compte de la situation difficile de l’époque, on ne s’explique pas pourquoi l’Imprimerie nationale a vendu cet immeuble en 2003 de façon si précipitée. Les informations portées à la connaissance de votre Rapporteur spécial montrent que certaines administrations publiques ont un temps marqué un intérêt pour l’occupation du site, mais n’ont pas donné suite. En particulier le MAE n’avait pas alors de stratégie finalisée, et n’a pas vu l’intérêt potentiel du site pour le regroupement de ses services. Il faut certes reconnaître qu’en 2003 la réforme de l’immobilier de l’État, effectuée à la suite du rapport de la MEC de juillet 2005, n’avait pas encore été initiée. Un appel d’offre avait permis de faire émerger une première proposition d’acquisition par une société privée (SARI/ING) pour 95 millions d’euros, ce qui semblait correspondre au prix de marché. L’acquéreur potentiel s’étant finalement rétracté, au dernier moment, pour des raisons propres, l’Imprimerie nationale s’est empressée d’examiner des nouvelles candidatures, sans même relancer d’appel d’offre ; elle a conclu une promesse de vente, le 19 juin 2003, au groupe Carlyle, pour un montant de 85 millions d’euros HT. Cette précipitation est d’autant plus étonnante que l’imprimerie nationale aurait pu rester quelques mois, voire quelques années encore, propriétaire du site, qu’elle occupera jusqu’en juin 2005, deux ans après la promesse de vente, en gageant ses dettes et sa demande de subvention publique sur la valeur potentielle de l’immeuble.

Rappelons que le groupe américain Carlyle est un gestionnaire de fonds spéculatifs, historiquement orienté dans le financement d’acquisition par emprunt, également désignée par le LBO (pour l’anglais leveraged buy-out), ou encore rachat par effet de levier. Cette pratique consiste à racheter une société en faisant appel à des organismes spécialisés finançant cette reprise par de l’endettement. C’est donc une obligation de résultat à court terme que les financiers font peser sur l’entreprise rachetée, délaissant parfois l’investissement structurel industriel pour une rentabilité à court terme. Plus récemment, le groupe Carlyle a effectué un grand nombre d’opérations immobilières, notamment en Europe, dans la même perspective de retour sur investissement élevé et de court terme.

Cette vente marque l’insuffisance du professionnalisme des vendeurs de la direction de l’Imprimerie nationale, face à des opérateurs privés rompus à toutes les procédures complexes de ce type d’opérations. Outre la moins-value de 10 millions d’euros précitée, la promesse de vente inclut une clause de complément de prix qui était très inégalitaire, 65 % pour l’acquéreur et 35 % pour le vendeur. En outre, la promesse signée en juin 2003 n’a donné lieu à aucun versement d’acompte. La vente, et donc le paiement principal (68 millions d’euros), n’est intervenue qu’au début de l’année 2006, un complément de prix ayant même été repoussé au mois de juillet 2007 (17 millions d’euros). Un délai de 31 mois entre la promesse et la vente est tout à fait inhabituel dans la profession. On a pu estimer le portage financier auquel a échappé le groupe Carlyle pendant ce délai à plus de 5 millions d’euros, à quoi il faut ajouter les coûts des travaux de dépollution et de désamiantage supportés par l’Imprimerie nationale à près de 2 millions d’euros. Enfin l’Imprimerie nationale a vendu sans avoir tiré parti des conséquences de la modification en cours du PLU parisien, en matière de simplification des procédures de modification de l’affectation des surfaces entre activités industrielles et tertiaires. Entre son achat et sa vente, le groupe Carlyle a transformé plus de 10 000 m2 de surfaces industrielles en surfaces de bureau, augmentation ainsi d’autant sa valeur.

2.– Le rachat par l’État

Entre mars 2003 et juillet 2007, le marché de l’immobilier de bureau parisien a connu une très forte hausse, les prix ayant quasiment doublé sur cette période. Si l’immeuble de la rue de la Convention avait été cédé par l’Imprimerie nationale au MAE en juillet 2007, sa valeur aurait sans doute été d’environ 175 millions d’euros hors travaux et hors modification de la répartition des surfaces entre activités industrielles et tertiaires.

Le ministère des Affaires étrangères ne s’est intéressé à cet immeuble que très tardivement. Le ministre Michel Barnier a pendant deux ans à partir de 2004 soutenu le projet d’un regroupement de tous les services centraux du ministère sur un « site unique », en fait en gardant deux autres implantations, l’hôtel du ministre au Quai d’Orsay (et en cédant les bureaux attenants) et l’immeuble de La Courneuve, où sont implantées les archives diplomatiques. Onze sites avaient été prospectés pour recevoir ce site unique, dont trois ont fait l’objet d’une sélection : Issy les Moulineaux, ZAC Rive gauche (Paris 13ème) et l’hôpital Saint Vincent de Paul à Paris. Cette dernière hypothèse avait été soutenue publiquement par le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, mais a échoué principalement du fait de l’opposition de la mairie de Paris.

En novembre 2006 le MAE commence à s’intéresser au site de la rue de la Convention, et à partir de cette date, les choses vont aller très vite, comme si les protagonistes voulaient rendre les choses irréversibles avant les élections présidentielles et législatives du printemps dernier. Le 16 avril 2007 est signée avec le groupe Carlyle une promesse de vente et le 18 juin, deux mois après, l’acte authentique. Le prix final est de 325 millions d’euros HT, plus 1 million d’euros de participation de l’acheteur aux frais de transaction. Les 325 millions d’euros se décomposent en 315 millions d’euros de prix de vente plus 10 millions d’euros de travaux supplémentaires demandés au groupe Carlyle par le MAE. Ces travaux supplémentaires couvrent des aménagements mobiliers (cloisonnement, adaptation concernant les réseaux de fluides courants forts et faibles, chauffage, ventilation, climatisation, désenfumage), des aménagements tous corps d’état (accueil du public au rez-de-chaussée et premier étage) et des aménagements des deux bâtiments annexes situés côté rue de la Convention.

Le chef du service France Domaine, rencontré lors de la visite sur site de votre Rapporteur spécial, a indiqué que ses services avaient évalué l’immeuble à 300 millions d’euros, et que la transaction s’est effectuée à 8,5 % au dessus, c’est-à-dire dans une marge de négociation de moins de 10 %. Le groupe Carlyle aurait indiqué dans la négociation qu’il exigeait ce réajustement de prix pour compenser le complément de prix de 18 millions d’euros, qu’il avait dû verser à l’Imprimerie nationale… L’État s’est mis en situation de faiblesse face au groupe Carlyle, qui savait que l’immeuble du Centre de conférences internationales de la rue Kléber venait d’être très bien vendu, pour 404 millions d’euros. Il a été porté à la connaissance de votre Rapporteur spécial que la meilleure offre émanant d’un investisseur reçue par le groupe Carlyle pour l’immeuble rue de la Convention ne dépassait pas 285 millions d’euros HT. Il faut en outre remarquer que l’État dispose d’un avantage comparatif vis-à-vis des autres acquéreurs privés potentiels, car il paie « hors taxe », alors que ces derniers doivent supporter la TVA. En effet, si l’État paie bien la TVA sur ses acquisitions immobilières, comme mobilières d’ailleurs, il se la reverse à lui-même.

Le ministère des Affaires étrangères précise que le coût de travaux, d’installation et de déménagement/emménagement dans l’immeuble de la rue de la Convention est estimé à 30 millions d’euros. Ce coût recouvre l'installation du courant faibles et du câblage informatique, le cloisonnement intérieur, la création d'un centre de conférences ministériel, la décoration des espaces communs, le mobilier et les postes informatiques, le déménagement, ainsi que les études afférentes ; contrat maîtrise d’œuvre : 3 millions d’euros ; travaux y compris mobilier : 24 millions d’euros ; déménagement et transfert : 1,2 million d’euros ; équipements informatiques : 0,8 millions d’euros ; divers et imprévus : 1 million d’euros.

L’inspection des finances a tenté de calculer la plus-value réalisée par le groupe Carlyle dans cette opération. Plusieurs éléments sont incertains, en particulier le coût des travaux effectués ou décidés avant l’achat par l’État, information sur laquelle le groupe Carlyle a indiqué qu’il ne souhaitait pas communiquer ; une fourchette entre 80 et 120 millions d’euros peut être retenue, selon une étude réalisée par un cabinet d’étude travaillant pour le MAE. En déduisant du prix de vente (325 millions d’euros) le prix d’achat (85 millions d’euros), les travaux (90 millions d’euros) et le complément de prix (18 millions d’euros), on aboutit à environ 130 millions d’euros de plus-value réalisée par le groupe Carlyle. Ainsi, sur une courte période de 18 mois, une plus-value de l’ordre de 65 % au moins du prix de revient a été réalisée. Les causes de cette plus-value sont connues : doublement des prix de l’immobilier sur la période, modification du PLU parisien (incluse dans l’évolution des prix, car intégrée par les opérateurs de marché), prix de cession favorable (d’environ 10 millions d’euros) et prix d’achat élevé (d’environ 25 millions d’euros).

3.– L’implantation des services centraux du ministère des Affaires étrangères

Le MAE dispose de 3 100 agents parisiens : 1 000 agents au quai d’Orsay, 700 agents rue La Pérouse – avenue Kléber, 20 agents rue Talleyrand et 20 agents rue Lowendal, 250 agents rue Monsieur, 650 agents boulevard Saint Germain, 340 agents boulevard des Invalides et 120 agents rue Camille Desmoulins à Issy-les-Moulineaux. Le projet du ministère des Affaires étrangères est donc maintenant, avec l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale de se regrouper sur deux sites, ou plutôt trois : le Quai d’Orsay, constitué de l’Hôtel du ministre et du bâtiment administratif qui lui est mitoyen ; l’immeuble du 27 rue de la Convention (environ 1 450 agents prévus) ; et les archives diplomatiques à La Courneuve. Pour être tout à fait complet il convient d’ajouter les services nationaux déconcentrés (État civil, comptabilité, visas, trésorerie…), qui sont implantés à Nantes (environ 1 000 agents). En contrepartie, il a promis de quitter toutes ses autres implantations actuelles à Paris : rue de Talleyrand, rue de Lowendal, rue de l’Université, boulevard des Invalides et location d’Issy-les-Moulineaux.

Votre Rapporteur spécial note que le MAE a bien envisagé sérieusement des implantations en proche banlieue parisienne (La Défense, Suresnes, Issy-les-Moulineaux…), alors qu’en réponse à ses questions, ce ministère allègue maintenant que l’implantation rue de la Convention serait une nécessité pour des raisons de proximité immédiate avec le quai d’Orsay. Or la nouvelle politique immobilière de l’État doit être l’occasion de définir des critères d’implantation, comme le font tous les grands groupes privés pour des raisons fonctionnelles et financières : au centre de Paris le ministre et son état-major, dans les arrondissements périphériques ou en proche banlieue les services administratifs ou de gestion. Une implantation en proche banlieue sur une surface identique à celle de l’immeuble du 27 rue de la Convention, aurait probablement coûté moins de 200 millions d’euros. Un des documents préparatoires remis à votre Rapporteur spécial lors de sa visite sur pièces et sur place confirme d’ailleurs que « sur la base d’une estimation très grossière des besoins, il sera nécessaire de disposer d’un budget d’acquisition de 200 millions d’euros (40 000 m2 à 4 000 euros/m2 pour l’achat et à 1 000 euros/m2 de travaux d’aménagement) hors frais de déménagement et de location intermédiaire ».

Dans ces conditions, on peut se demander à quoi servent les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI), qui ont été élaborés par les ministères en juin 2006, à la demande du ministre du Budget, M. Jean-François Copé. Si le regroupement des services centraux du MAE est bien une orientation envisagée, le nombre de sites et leur implantation ne figurent pas dans le SPSI du ministère ; ce sont pourtant des paramètres essentiels tant au niveau fonctionnel que financier. En outre nous avons vu que le MAE a commencé à manifester son intérêt pour l’ancien site de l’Imprimerie nationale avant novembre 2006. Or, lorsque le représentant du ministère des Affaires étrangères, M. Stéphane Romatet, a été auditionné par le Conseil de l’immobilier de l’État le 12 décembre 2006, pour exposer devant lui son SPSI, il n’a pas indiqué que l’acquisition de l’immeuble de la rue de la Convention était déjà très avancée.

4.– Le choix de l’immeuble n’est pas sans critiques

Votre Rapporteur spécial a constaté, lors de sa visite du site, que l’ancien bâtiment de l’Imprimerie nationale ne pourrait servir de centre de conférences internationales. On sait que l’immeuble de l’avenue Kléber, qui servait alors de centre de conférences internationales a été cédé par l’État en avril 2007 ; le produit de la cession, 404 millions d’euros, a d’ailleurs servi à financer l’achat de l’immeuble du 27 rue de la Convention. Or il a été indiqué à votre Rapporteur spécial que ces grandes réunions internationales ne pourraient se dérouler dans l’immeuble de la rue de la Convention. D’abord pour des raisons techniques, cet immeuble étant un quadrilatère avec en son centre un grand espace de 1 000 m2 recouvert d’une verrière et sur deux niveaux (sous-sol). Le ministère a besoin d’une grande partie de ces espaces pour les salles de réunion habituelles et pour le restaurant administratif du personnel. Ensuite pour des raisons de sécurité, cet immeuble de quatre étages étant entouré d’immeubles haussmanniens de sept à huit étages. La verrière constituerait une « cible » facile pour des tireurs isolés situés sur les toits avoisinants.

En réponse à une question de M. Richard Young, Sénateur, le MAE répondait, au Journal officiel du 2 août 2007, que « ce site [ancien site de l’imprimerie nationale rue de la Convention] en cours de travaux sera livré en avril 2008, date à laquelle débuteront certains travaux d’aménagement destinés à adapter l’immeuble aux besoins du Ministère. Parmi ces travaux figure l’aménagement d’un centre de conférences doté d’une salle pour les réunions plénières de 450 places, et d’un ensemble de salles de réunion modulables totalisant environ 1 000 m². Cet ensemble sera livré à l’été 2009. » Le fait que l’immeuble de la rue de la Convention ne pourra servir à héberger les plus grandes conférences internationales (notamment les Conseils européens réunissant les chefs d’État et de Gouvernement dans une Union européenne à 27) est d’ailleurs un argument de moins pour justifier l’implantation des services centraux du MAE dans un quartier central de Paris, les diplomates étrangers n’y iront sans doute jamais : ils iront soit au quai d’Orsay, pour les réunions protocolaires, soit dans un centre de conférences encore à trouver.

Quelle n’a pas alors été la surprise de votre Rapporteur spécial d’entendre que le MAE recherchait une nouvelle implantation parisienne pour y héberger un centre de conférences internationales, soit à acquérir, soit à construire. Une des options serait même de faire construire un bâtiment jumeau de l’aérogare d’Air France sur la pelouse de l’esplanade des Invalides, juste en face du Quai d’Orsay… Rien ne semble donc trop beau pour le ministère des Affaires étrangères. On croyait que ce site du centre historique de Paris, à deux pas de l’Assemblée nationale, avait trouvé ses contours définitifs. De là à envisager encore une densification de l’espace…

Votre Rapporteur spécial a pu constater la faible qualité environnementale du projet de la rue de la Convention, avec l’espace à claire-voie situé sous la verrière centrale. Il lui a été expliqué lors de sa visite sur site que cet espace serait entièrement climatisé. Il a demandé, en vain, qu’on lui fournisse une étude, qui n’a sans doute jamais été réalisée, sur les performances environnementales de l’immeuble rénové. Il relevait des attributions du service France Domaine, en sa fonction de propriétaire pour le compte de l’État, de la réaliser. Dans ces conditions, on peut s’interroger sur les coûts de climatisation et de chauffage des espaces situés sous cette verrière. Or on sait que le « Grenelle de l’environnement » pourrait déboucher sur des objectifs de réduction d’émission de CO2 pour tous les bâtiments, public ou privés. On projette d’instaurer une norme de 80 Kwh au m2 à horizon de 2020. Le dernier baromètre de la société IPD, a été présenté le 9 octobre dernier(10). Il intègre pour la première fois une dimension de qualité environnementale, d’importance majeure tant en matière de protection de l’environnement que de suivi des coûts en consommation d’énergie ou en « taxe carbone » si elle était un jour créée.

Avec une surface hors œuvre nette (SHON) de 31 000 m2, une surface utile nette (SUN) de 28 000 m2, dont 22 000 m2 de bureaux, et 1 450 agents prévus, on aboutit dans l’immeuble de la rue de la Convention à une SUB par agent d’environ 19,3 m2 et une SUN par agent d’environ 15,7 m2. La cible définie dans l’étude élaborée en 2006 pour le service France Domaine par INEUM Consulting et IPD France étant une SUN par agent de 12 m2, on voit que la performance immobilière de l’immeuble est plutôt médiocre.

Enfin il faut rappeler que le bâtiment administratif attenant à l’hôtel du ministre au quai d’Orsay nécessite de gros travaux d’aménagement. Aucune évolution précise n’en a été donnée par les services du MAE, mais on sait d’ores et déjà qu’ils coûteront plus de 60 millions d’euros.

5.– Le régime fiscal de la plus-value réalisé par le groupe Carlyle

Si la société luxembourgeoise ne dispose pas d’un établissement stable en France, le prélèvement prévu à l’article 244 bis A du code général des impôts est en principe applicable. Cet article prévoit un prélèvement d’un tiers (33,3 %) sur les plus-values résultant notamment de la cession d’immeubles ou de droits immobiliers. Lorsque le prélèvement est dû par une personne morale assujettie à l’impôt sur les sociétés, son assiette est la plus-value déterminée par la seule différence entre d’une part le prix de cession du bien et d’autre part son prix d’acquisition, diminué pour les immeubles bâtis d’une somme égale à 2 % de son montant par année entière de détention. Le prix d’acquisition est majoré des dépenses de construction, reconstruction ou agrandissement mais pas les travaux d’amélioration, de rénovation d’entretien ou de réparation. De même les frais de commercialisation, de siège, de structure, de portage financier et d’assurance ne sont pas déductibles.

Interrogé par votre Rapporteur spécial, le service France Domaine a indiqué que la situation de l’opération de la rue de la Convention au regard de ces éléments de la législation fiscale relève du secret fiscal. Pourtant, les pouvoirs dévolus par l’article 57 de la LOLF aux rapporteurs spéciaux des commissions des finances des assemblées ne permettent de faire exception à la communication de documents que pour des raisons de secret « concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical ».

Si l’on tente un calcul :

prix de vente HT (325 millions d’euros) – [prix d’achat TTC (101,6 millions d’euros) + accessoires (complément de prix de 18 millions d’euros)] =  205,4 millions d’euros

L’impôt auquel va sans doute échapper le groupe Carlyle serait donc d’un tiers de 205,4 millions d’euros, soit 68,5 millions d’euros.

La convention fiscale liant la France et le Luxembourg a été signée le 1er avril 1958 et a fait l’objet d’un avenant le 8 septembre 1970. La jurisprudence conjointe du Conseil d’État, puis de la Cour administrative de Luxembourg, le 23 avril 2002, ont eu pour conséquence que les plus values des sociétés immobilières n’ayant pas d’établissement stable en France ne sont imposables ni en France, ni au Luxembourg. Les gouvernements français et luxembourgeois, conscients du vide juridique et du risque d’évasion fiscale, ont commencé à négocier et ont cherché à profiter de l’occasion pour refondre totalement la convention pour la mettre en conformité avec les standards des conventions fiscales définies par l’OCDE. Entre-temps les opérateurs privés se sont engouffrés dans la brèche et on a vu fleurir une multitude de sociétés à finalité fiscale implantées au Luxembourg et agissant sur le territoire français.

Devant l’impossibilité avérée de parvenir à un accord global avec le Luxembourg, le gouvernement français a alors proposé au Luxembourg un avenant ciblé, limité aux questions immobilières. Cette nouvelle approche a donné lieu à un accord signé le 24 novembre 2006 à Luxembourg. Le projet de loi n° 280 – 2006-2007) autorisant l’approbation du deuxième avenant à la convention a été adopté par le Sénat le 25 septembre dernier. Il a été déposé (n° 188) le 26 septembre dernier à l’Assemblée nationale et est maintenant en cours d’examen en vue d’une adoption définitive avant la fin de l’année. L’avenant doit être adopté avant la fin de cette année, sinon le vide juridique dont bénéficient les sociétés immobilières n’ayant pas d’établissement stable en France durera encore une année pleine. Les informations obtenues par votre Rapporteur spécial du service des commissions (Greffe) de la Chambre des Députés du Luxembourg indiquent le projet de loi concernant la convention a été voté en séance publique le 9 octobre 2007 ; il sera publié prochainement au Mémorial, la date de publication exacte n’est pas connue, mais ce serait avant la fin de l'année.

Comment ne pas suspecter que les principales cessions effectuées depuis 2005 (rue du Bac, rue Octave Gréard, avenue Charles Floquet … à Paris) n’aient pas également été acquises par des structures financières de droit luxembourgeois, afin de bénéficier de l’exonération fiscale ? Le service France Domaine n’a-t-il pas fait une analyse des offres reçues pour chaque appel d’offres, qui aurait pu révéler que dans plusieurs cas une offre était nettement plus élevée que les autres, et qu’elle émanait d’une société ayant son siège au Luxembourg ? Plus généralement, il est probable que toutes les sociétés immobilières intervenant sur le marché français depuis cinq ans ont constitué une filiale au Luxembourg pour bénéficier de la faille de la convention bilatérale, et on ne connaît pas le manque à gagner pour l’État…

6.– Conclusions

L’orientation visant à regrouper les services centraux du ministère des Affaires étrangères et européennes (MAEE) n’est pas contestable, c’est évidemment une bonne chose pour des raisons de synergie (proximité, salles de réunion partagées) et de coûts (communications, transferts). Mais les remarques suivantes peuvent être formulées.

On peut s’interroger sur le rôle du service France Domaine dans les opérations de cessions et acquisitions, les ministères se comportant toujours en quasi-propriétaires. Votre Rapporteur spécial a eu nettement l’impression que le MAE a piloté l’opération de rachat, le service France Domaine n’ayant été saisi que pour donner un accord de principe et pour aider à la négociation financière avec le groupe Carlyle. Votre Rapporteur spécial a demandé en vain une étude du service France Domaine sur ce projet, étude qui n’a sans doute jamais existé. Les règles du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État, qui permettent de rétrocéder 85 % du produit des ventes, ont pour inconvénient de favoriser le maintien d’une parcellisation de la gestion immobilière et de l’appréhension des problèmes correspondants. Elle est un frein au positionnement de France Domaine comme acteur principal pour le compte de l’État en matière de politique immobilière et à la mutualisation des ressources et des dépenses immobilières entre ministères. Il faut éviter que cette séquence ne se renouvelle, notamment avec la cession en cours de l’immeuble de la rue Monsieur.

Il faut renforcer la tutelle de l’État (service France Domaine ou autre entité de portage) sur les biens immobiliers des personnes publiques autres que lui-même (sociétés détenues exclusivement ou majoritairement par l’État ou les collectivités territoriales, établissements publics administratifs ou industriels et commerciaux…). Les conditions dans lesquelles ces entités publiques peuvent être amenées à céder ou à acquérir des biens immobiliers devraient être mieux surveillées. Actuellement le service France Domaine ne peut qu’être appelé à jouer un rôle d’assistance à l’évaluation des biens, laquelle n’a d’ailleurs au mieux que valeur d’avis.

On pourrait réfléchir à l’organisation d’une structure de portage de certains immeubles publics dont les services de l’État n’ont plus besoin pour leurs activités, mais qui mériteraient néanmoins d’être conservés en attente de réaffectation, et peut-être de réhabilitation. Il faut se donner le temps de la réflexion, soit pour envisager une éventuelle réutilisation par un autre service de l’État, soit s’engager dans une gestion patrimoniale de l’État à long terme, pour des biens rares et chers, en particulier au centre de Paris. Pourrait jouer ce rôle de portage la Caisse des Dépôts, qui présente l’avantage d’avoir une expérience plus longue en matière immobilière, et aussi un statut et un poids spécifiques aptes à la protéger des multiples sollicitations auxquelles elle aurait inévitablement à faire face. La Caisse des dépôts, directement ou plus vraisemblablement au travers de ses différentes filiales, dispose des compétences pour acheter, louer, construire, rénover. Elle dispose de très bons spécialistes et négociateurs immobiliers, qu’elle peut rémunérer par contrat au prix du marché.

La maîtrise d’ouvrage publique doit être mieux organisée. Le MAEE et le service France Domaine expliquent, avec justesse, que l’État n’aurait pas pu, en un délai si réduit, entre 2003 et 2007, procéder à une dépollution lourde, s’agissant d’un site industriel ou étaient notamment présents du plomb et de l’amiante, et une réhabilitation complète comportant le creusement de cinq niveaux de parking souterrains.

Le ministère des Affaires étrangères et européennes explique que pour que l'État effectue les travaux d’aménagement réalisés par le promoteur, il aurait d’abord fallu mobiliser sur deux à trois ans un financement de l’ordre de 100 millions d’euros qui n’auraient sans doute jamais pu être obtenus sur le budget de l’État. Ensuite, il aurait fallu lancer un concours de maîtrise d’œuvre, puis réaliser des études, puis lancer les appels d’offres auprès des entreprises pour les travaux, ce qui aurait demandé au moins trois ans avec les procédures des marchés publics, plus deux à trois ans de travaux, soit un délai total de cinq à six ans avant l’achèvement de l’opération. Durant ce laps de temps, le ministère aurait dû supporter les coûts afférents à ses neuf autres implantations actuelles (loyers budgétaires et frais de fonctionnement).

Compte tenu principalement des lourdeurs et des délais de la réglementation des marchés publics, le ministère des Affaires étrangères et européennes estime qu'une opération de cette ampleur n'aurait pas pu être conduite par l'État en maîtrise d'ouvrage directe dans les délais requis, quand bien même la disponibilité des ressources aurait été garantie par les produits de cession.

Votre Rapporteur spécial estime, ici comme dans d’autres cas qu’il a pu connaître au niveau local, que les procédures du code des marchés publics rendent quasiment impossible de mener à bien ces opérations dans de tels délais. En particulier, la passation d’un marché d’entreprise générale, tous corps de métiers, comme le groupe Carlyle l’a fait avec Bouygues, est sanctionnée par les tribunaux administratifs quand elle est le fait d’une personne publique.

B– QUE FAIRE DE L’IMMEUBLE DU 20 AVENUE DE SÉGUR ?

1.– Une situation administrative complexe

L’immeuble du 20 avenue de Ségur est un immeuble à usage de bureaux, dépendant du domaine privé de l’État qui a toujours été affecté au ministère de l’Économie et des finances pour des raisons historiques. Avant son installation à Bercy, ce ministère a été l’un de ses occupants récents (ancien ministère des Postes et télécommunications) et une vingtaine d’agents y sont encore installés pour quelques semaines encore (services du Haut fonctionnaire de Défense). Depuis janvier 1994, environ les deux tiers de l’immeuble sont occupés par le ministère de l’Écologie et du développement durable (MEDAD). En outre le précédent Président de la République avait promis d’affecter environ un tiers du bâtiment à la Maison de la Francophonie. Il en résulte une situation passablement complexe et floue sur de nombreux aspects.

Cet immeuble de 48 609 m2 de surface hors œuvre nette (SHON) représente une surface utile brute (SUB) de 43 860 m2 et une surface utile nette de 33 223 m2. Sur ces 43 000 m2 SUB, environ 32 000 m2 sont occupés par le MEDAD, les 11 000 m2 restant étant inoccupés depuis plusieurs années. Cet immeuble ne fait plus l’objet que d’un entretien a minima depuis sa libération par l’ancien ministère des Postes et télécommunications. Votre Rapporteur spécial y a effectué une mission sur pièces et sur place le 26 septembre dernier, et a rencontré les principaux responsables intéressés par le sujet (voir liste en annexe). La visite effectuée a montré que cet immeuble est maintenant dans un état très dégradé. Il n’est que trop fréquent d’observer un bâtiment domanial privé depuis longtemps d’un entretien préventif, ce qui entraîne la nécessité de travaux importants et coûteux de réhabilitation.

Le montant du loyer budgétaire 2007 payé par le MEDAD est de 5,1 millions d’euros. Le loyer dû par le MEDAD établi pour 2008, en fonction des loyers de marché, a été revalorisé et fixé à 13,5 millions d’euros répartis entre le MEDAD et le ministère de l’Économie et des finances, selon une clé de répartition qu’il est prévu arrêter définitivement au début de l’année 2008.

Au tableau général des propriétés de l’État (TGPE), l’immeuble est inscrit pour une valeur totale de 270 millions d’euros (valeur 2006). Cet immeuble n’a pas fait l’objet d’une valorisation comme cela est réalisé lors de l’engagement des opérations de cession. Il est probable que sa valeur réelle soit nettement plus élevée, eu égard à la forte augmentation de ces dernières années.

2.– Le projet hérité du précédent gouvernement

Le projet dont a hérité le Gouvernement actuel inclut les services centraux du ministère de l’Écologie et du développement durables (MEDAD) et la Maison de la Francophonie (services de l’Organisation internationale de la francophonie - OIF – plus d’autres organismes actifs dans le champ de la francophonie). Il s’agit pour l’OIF de s’installer face à l’UNESCO, dans la tradition des travaux de prestige qui a souvent caractérisé le Quai d’Orsay. Ce choix, qui résulte d’une promesse de l’ancien Président de la République, a été concrétisé par une convention signée par la France et l’OIT à Bucarest le 28 septembre 2006. La procédure de ratification de cette convention devant le Sénat, engagée l’été dernier (11), a été suspendue sine die à la suite de l’opposition naissante de plusieurs sénateurs, notamment au sein de la commission des Finances (12).

Le projet de loi prévoyait des travaux de réhabilitation et de modification importants et le ministère de l’Économie et des finances avait été désigné comme maître d’ouvrage en raison à la fois de sa qualité d’affectataire de l’immeuble et de l’ampleur des travaux à réaliser. Le ministère avait délégué cette responsabilité à l’Établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels (EMOC), avec qui il avait passé une convention de mandat. L’EMOC, ayant évalué le coût des travaux de rénovation à 35 millions d’euros en 2005, a confié la maîtrise d’œuvre de l’opération à un cabinet d’architecte sélectionné après mise en concurrence. En 2006, l’avant-projet sommaire évaluait à 60 millions d’euros le montant de l’opération, soit une réévaluation des travaux de 25 millions d’euros qui a rendu nécessaire un avenant à la convention de mandat entre le ministère et l’EMOC. Ce supplément de travaux est expliqué notamment par le désamiantage de l’immeuble et son affectation à ses deux occupants, l’OIF ayant exigé une entrée séparée et une circulation cloisonnée, pour des raisons de sécurité (percement des entrées, création d’un escalier et d’un ascenseur). Concernant le choix du maître d’ouvrage, votre Rapporteur spécial rappelle une enquête de la Cour des comptes commandée par la commission des Finances du Sénat qui montre que toutes les opérations prises en charge par l’EMOC et terminées à ce jour témoignent d’un dépassement à la fois de l’enveloppe financière et des délais impartis : seules trois opérations achevées sur quinze enregistrent un retard inférieur à 20 mois (13).

En février 2007, le ministère de l’Écologie a en outre demandé des travaux de mise du bâtiment aux normes thermiques « haute qualité environnementale » – HQE, essentiellement le changement de toutes les huisseries et vitrages pour des raisons d’isolation thermique, évalués à 25 millions d’euros et portant le montant total de l’opération à 85 millions d’euros. Il aurait en effet été pour le moins paradoxal que le ministère de l’Écologie, qui vient de mener avec succès le « Grenelle de l’environnement » s’installe dans un bâtiment aux qualités environnementales médiocres. Votre Rapporteur spécial s’est fait préciser qu’à cette dépense de 85 millions d’euros de travaux s’ajoutent des frais de déménagement et d’installation pour un montant supplémentaire de 10,5 millions d’euros (cloisonnement, câblage, informatique et téléphonie, déménagement, honoraires de la transaction de location).

Le dépassement du montant initial des travaux étant susceptible de faire courir un risque juridique élevé par rapport à la réglementation et la jurisprudence relatives aux marchés publics, le marché de maîtrise d’œuvre a été résilié et une nouvelle procédure d’appel d’offres a été lancée sur la base du programme évalué à 85 millions d’euros, afin d’être en conformité avec les normes thermiques. La livraison de la Maison de la Francophonie devait avoir lieu, au plus tard avant la fin du printemps 2011. Le coût en CP des travaux devait être couvert par une régulation budgétaire, 60 millions d’euros ayant été ouverts en loi de finances initiale pour 2007 sur le programme Conduite et pilotage des politiques économiques et financières de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Pour mener à bien ces travaux de restructuration et de réinstallation, le cabinet du Premier ministre avait décidé le principe du déménagement temporaire des services du ministère de l’Écologie, les travaux étant réalisés en site non occupé, afin d’accélérer ceux-ci et de permettre à la Maison de la Francophonie d’entrer au plus vite dans les lieux. Lors de sa visite, votre Rapporteur spécial a pu confirmer que l’ampleur des travaux aurait, sans nul doute, rendu impossible toute occupation partielle du bâtiment.

France Domaine avait été mandaté pour trouver avec l’ancien ministère de l’Écologie une formule cohérente de relocalisation temporaire financée avec une autorisation d’engagement de 40 millions d’euros ouverte en LFI 2007. Cette AE correspondait à la prise en charge du déménagement, de l’installation dans des locaux pris à bail et du fonctionnement pendant une durée de trois ans (soit 13 millions d’euros par an), durée supposée des travaux effectués au titre de la Maison de la Francophonie, durée au terme de laquelle le ministère de l’Écologie était supposé revenir au moins partiellement sur le site de l’avenue de Ségur.

Interrogé par votre Rapporteur spécial, le service France Domaine a confirmé n’avoir rendu aucun avis sur cette opération de rénovation ; la raison invoquée est que cette question « n’avait pas lieu de lui être soumise compte tenu de ses compétences tant juridiques que factuelles. » Votre Rapporteur spécial estime au contraire qu’il était pleinement du rôle du service France Domaine d’être en première ligne sur ce projet. En effet, plusieurs ministères sont impliqués, le coût de l’opération représente plusieurs dizaines de millions d’euros, des choix structurants de localisation sont à faire pour plusieurs administrations. C’est sans aucun doute en raison du rôle effacé de France Domaine que s’est instaurée la situation inextricable actuelle.

L’accord international conclu entre l’OIF et le Gouvernement français prévoit à la disposition de cette organisation une superficie de bureaux de 11 357 m² et l’usage partagé du centre des congrès et de conférences pour une superficie totale de 2 368 m². Il était prévu de loger 327 personnes, soit un ratio de 34 m²/personne, trois fois supérieur à la norme appliquée à l’État pour ses propres services. Ce ratio élevé de surface de bureau par agent s’explique par la configuration de l’immeuble, conçu en 1936 et dont la plupart des pièces font 15 ou 18 m2 et ne sont pas décloisonnables. Votre Rapporteur spécial s’est fait expliquer, lors de sa visite sur le site, que ce bâtiment, construit avant guerre, avait été prévu pour servir éventuellement d’hôpital de campagne, chaque bureau étant équipé d’une salle de bain avec sanitaire, comme une chambre d’hôpital.

Le ministère de l’Écologie aurait disposé, du fait de l’installation de la Maison de la Francophonie, d’une surface utile de bureaux (hors circulations et sanitaires) de 19 671 m². Selon ce ministère, la configuration de l’immeuble n’aurait pas permis d’installer la totalité de l’effectif actuel des services centraux de 984 agents, sauf à pouvoir disposer d’environ 2 500 m² de surfaces de bureaux supplémentaires et libérer ainsi les quatre autres sites occupés dans le 7ème arrondissement.

3.– Les services centraux de l’ancien ministère de l’Écologie

Votre Rapporteur spécial s’interroge sur la justification de la localisation des services administratifs et de gestion du ministère de l’Écologie – autres que d’état-major – dans un quartier central de Paris (7ème arrondissement), sachant que ce ministère dispose de l’hôtel de Roquelaure sur le boulevard Saint-Germain, pour loger le ministre et son cabinet. Il y aurait lieu d’étudier d’autres options de localisation en proche périphérie. En outre, quel sens y aurait-il à prévoir une localisation de prestige pour les seuls services du ministère de l’Écologie, alors que ce ministère est en cours de regroupement avec le ministère de l’Équipement ?

En concertation avec le ministère de l’Écologie de l’époque, des options de relocalisation avaient déjà été envisagées puisque trois dossiers de relogement ont été étudiés, entre fin 2005 et début 2007. Les opérations Cap de Seine à Ivry (94) et Le Millénaire II (Paris 19ème) permettaient de reloger le ministère dans des immeubles neufs pour un prix raisonnable (300 euros/m² HT), dans des conditions fonctionnelles et financières satisfaisantes, compatibles avec le budget alloué de 40 millions d’euros. On pouvait même envisager une implantation définitive du ministère sur l’un de ces sites, notamment le dernier. Ces immeubles n’ont malheureusement pas été retenus par la ministre chargée de l’Écologie du précédent gouvernement, Mme Nelly Olin, et ils ne sont plus disponibles aujourd’hui.

La Tour Cristal à Paris 15ème avait alors été présentée par le ministère de l’Écologie comme le seul lieu possible. Le coût de ce projet était supérieur au montant de l’enveloppe financière et n’a pas été soutenu par le service France Domaine. De surcroît, les organisations syndicales du ministère ont fait connaître leur refus d’installation dans un immeuble où la présence d’amiante était avérée. Cet immeuble, toujours vacant, n’est pas disponible car son bailleur (AXA) a prévu d’y réaliser des travaux, voire de le céder.

Depuis l’intégration dans le ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables (MEDAD), aucune décision n’a encore formellement été prise quant au relogement des services centraux de l’ancien ministère de l’Écologie. S’agissant de la secrétaire d’État chargée de l’Écologie, elle a rejoint ces jours derniers l’hôtel de Roquelaure.

Votre Rapporteur spécial estime que la seule solution à terme passe à l’évidence par un regroupement de l’ensemble des services centraux du ministre de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables. En effet les services de l’ancien ministère de l’Équipement sont implantés dans le quartier de La Défense, notamment dans l’Arche du même nom. Face aux difficultés rencontrées dans ce dernier bâtiment, qui n’est pas réellement adapté pour accueillir des services administratifs, l’ancien ministère de l’Équipement recherchait une solution de regroupement de l’ensemble de ses services dans une tour du quartier de La Défense.

Votre Rapporteur spécial saisit l’occasion pour évoquer les projets actuellement étudiés par le nouveau MEDAD de construction d’une nouvelle tour dans le quartier de La Défense. Interrogés par votre Rapporteur spécial lors de sa visite sur site, les représentants du ministère ont confirmé l’étude de ces projets et ont indiqué qu’ils étaient réalisables au mieux à échéance de 2014. Une des options consisterait à bénéficier d’un terrain laissé vacant par une transformation du boulevard circulaire pour y construire une nouvelle tour. Il est pour le moins étonnant qu’un ministère, fût-il celui chargé de l’Équipement, décide de se muer en constructeur immobilier et conçoive un tel projet. Le service France Domaine n’a pas été saisi de ces projets, dont aucune estimation de coût n’est disponible. Les tours ne manquent pas à La Défense et l’Établissement public d’aménagement de La Défense (EPAD) demeure la structure publique la plus à même de concevoir et d’entreprendre ce type de projet. Enfin si l’un de ces projets se réalisait, il faudrait certainement en revoir le périmètre, pour y installer les services centraux de l’ancien ministère de l’Écologie.

4.– La Maison de la Francophonie

L’article 2 de la convention signée avec l’OIF stipule que « dans l’immeuble sis 20 avenue de Ségur, 75007 Paris, appartenant à son domaine, l’État donnera à bail 11 357 m2 (…) et l’usage partagé (…) du centre de congrès et de conférences (…) pour une superficie de 2 368 m2, et accessible par une entrée indépendante ». L’article 3 précise que « la mise à disposition de l’immeuble est consentie pour une durée de trente années entières et consécutives à compter de la date en jouissance du preneur. Cette durée pourra être prorogée par tacite reconduction. » L’article 5 ajoute que « l’État met à disposition de l’OIT, à titre gratuit, les locaux mentionnés à l’article 2 ».

L’article 4 stipule que l’OIF « participera au financement des travaux nécessaires à son installation et à celle de ses opérateurs à hauteur du produit de la vente des biens immobiliers qu’elle possède dans l’État de siège ». Ces biens situés quai André Citroën à Paris et quai Louis XVIII à Bordeaux sont évalués par le service France Domaine entre 11 et 12 millions d’euros.

Votre Rapporteur spécial ne remet nullement en cause l’orientation visant à regrouper sur un site unique tous les services et organismes travaillant dans le cadre de la Francophonie. Il s’étonne cependant de l’imprécision qui règne dans la définition des besoins de la Maison de la Francophonie. Une étude remise par un cabinet privé en avril 2005 évaluait à 595 agents les besoins d’hébergement, avant la réforme qui a fusionné l’OIF et l’Agence intergouvernementale de la Francophonie. Les informations qui ont directement été transmises à votre Rapporteur spécial, le 3 octobre 2007 à l’issue de sa visite sur site, montrent un total de seulement 375 agents à héberger : Secrétariat général de la Francophonie (25 agents), OIF (265), Agence universitaire de la Francophonie (58), Association internationale de la Francophonie (13), Assemblée parlementaire de la Francophonie (14).

L’occupation de ces locaux devrait faire l’objet de la part du ministère des Affaires étrangères et européennes (MAEE) du paiement de loyers budgétaires correspondant à des loyers de marché au titre de l’hébergement de la Maison de la Francophonie. Sur la base du loyer calculé pour 2008 pour cet immeuble, le loyer annuel s’établirait à 8,4 millions d’euros. Sur trente ans, valeur 2006 sans actualisation, le coût global serait de 252 millions d’euros. La valeur de marché est probablement plus élevée.

S’agissant d’une organisation internationale groupant 55 États et Gouvernements membres et 13 observateurs, les besoins en salles de réunion sont importants et pratiquement quotidiens, tant pour le fonctionnement interne que pour les réunions internationales : groupes de travail, commissions et conseils institutionnels (30 à 50 participants), groupes ad hoc, réunions de réseaux, actions de formation, etc. S’ajoute le besoin de 400 m2 pour le centre de documentation, jusqu’à présent établi à Bordeaux. Il était prévu dans le projet initial de partager l’espace de congrès de 2 368 m2 installé au centre du bâtiment. Cet espace pouvait organiser les sessions du Conseil permanent de la Francophonie (3 à 4 par an, 68 délégations de 3 personnes en moyenne) et les conférences ministérielles (1 ou 2 par an, 68 délégations de 5 personnes en moyenne).

Les privilèges fiscaux dont bénéficient l’OIF sont ceux reconnus aux organisations internationales établies à Paris et bénéficiant d’un accord de siège : exonération de tous impôts directs à l’exclusion des taxes perçues en rémunération de services rendus (article VIII de l’accord du 30 août 1972, modifié le 6 août 2002).

5.– Comment sortir de cette impasse ?

Comme il a été dit précédemment, le service France Domaine devrait étudier le regroupement des services centraux de l’ancien ministère de l’Écologie avec ceux de l’ancien ministère de l’Équipement, dans le cadre de l’actuel MEDAD, vraisemblablement dans le quartier de La Défense. Les études engagées en ce sens devront prendre en compte les résultats de la révision générale des politiques publiques, avec les orientations données par le Président de la République en matière de suppression des redondances ou doublons et de réduction des effectifs (non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux sur l’ensemble de la législature).

Votre Rapporteur spécial estime que le service France Domaine devrait – et aurait dû – étudier la possibilité de l’installation de la Maison de la Francophonie au 20 rue Monsieur, Paris 7ème, immeuble actuellement affecté au ministère des Affaires étrangères (coopération) et qui est actuellement proposé à la vente. L’hôtel particulier et l’immeuble de bureaux de la rue Monsieur ont fait l’objet d’une procédure de cession par appels d’offres, qui a été clôturée le 27 septembre dernier. Cet ensemble immobilier est estimé à environ 140 millions d’euros et on parle d’une ambassade ou d’un acquéreur privé étranger pour une éventuelle acquisition. En tout état de cause, l’étude des besoins de la Maison de la Francophonie est à revoir, sur des bases plus solides, et l’on devrait sans doute pouvoir se contenter de moins de 11 000 m2.

La SHON de l’hôtel particulier (hôtel de Montesquieu) est de 1 538 m2 et celle de l’immeuble de bureau qui lui est associé de 7 963 m2, pour un total de 9 801 m2. La SUB total de l’ensemble est de 8 376 m2 et la SUN de 6 288 m2. Le service de la Francophonie du MAEE estime néanmoins que cet ensemble n’est pas adapté aux besoins de regroupement des services de l’OIF, moins en raison des effectifs que des fonctionnalités nécessaires pour accueillir une organisation internationale. Sauf à engager une restructuration coûteuse, il estime que le site ne pourrait pas accueillir les réunions plénières avec l’ensemble des délégations des pays membres.

Des propositions du Gouvernement français de relocalisation de la Maison de la Francophonie pourraient être débattues avec l’OIF lors de la 23ème session de la Conférence ministérielle de la Francophonie, à Vientiane (Laos) les 20 et 21 novembre prochains.

Quant au site du 20 avenue de Ségur, il devrait faire l’objet d’une étude approfondie du service France Domaine, soit pour le céder, soit pour envisager une solution de portage temporaire de la propriété, soit encore pour établir dans quelles conditions il pourrait convenir à un ministère assurant des missions pérennes de l’État et actuellement locataire (par exemple le ministère de la Santé à Montparnasse, ou l’ancien ministère de l’Emploi à la Tour Mirabeau dans le 15ème arrondissement de Paris).

En conclusion, votre Rapporteur spécial est d’avis que les services de l’ancien ministère de l’Écologie soient regroupés avec ceux de l’ancien ministère de l’Équipement, probablement à La Défense. La Maison de la Francophonie ne devrait certainement pas intégrer le 20 avenue de Ségur. Une localisation dans un immeuble domanial existant qui est ou sera à court terme disponible doit être privilégiée. Sinon, un appel au marché, achat ou location, pourrait être envisagé. Quand à l’immeuble du 20 avenue de Ségur, le service France Domaine devrait soit proposer son occupation par un autre ministère, soit organiser son portage pendant quelques dizaines d’années – afin de préserver son potentiel de valorisation et d’éventuel besoins ultérieurs – soit le céder. Une mission conjointe des corps d’inspection des Finances, des Affaires étrangères et de l’Équipement a récemment été chargée de remettre un rapport sur l’immeuble du 20 avenue de Ségur et sur la Maison de la Francophonie.

IV.– QUELQUES QUESTIONS SUR LA NOUVELLE POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT

Le présent rapport spécial, portant sur le projet de loi de finances pour 2008, n’est pas le cadre dans lequel il est possible de passer en revue l’ensemble des questions relatives à la politique immobilière de l’État. Il faudra sans doute que la Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des Finances travaille à nouveau sur ce sujet, après le rapport (n° 2457) de juillet 2005 et le rapport de suivi (n° 2926) de mars 2006 consacrés à ce sujet.

Il est cependant utile d’aborder dès à présent la question de l’évolution des règles du compte d’affectation spéciale, les loyers budgétaires, la réforme en cours du service France Domaine en liaison avec la mise en œuvre de la nouvelle politique immobilière de l’État. Quelques gros dossiers immobiliers en cours seront également abordés.

A.– LA NÉCESSAIRE ÉVOLUTION DES RÈGLES DU COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE

La contribution au désendettement est alimentée par le produit des cessions immobilières selon un taux qui varie en fonction de son montant (selon qu’il est inférieur, ou supérieur ou égal à 2 millions d’euros), du ministère affectataire du bien et de la nature de l’immeuble.

Le cas général est ainsi défini :

– pour les cessions inférieures à 2 millions d’euros, le ministère précédemment affectataire bénéficie d’un retour automatique de 85 % du produit de cession sur le programme 722. Les 15 % restants améliorent le solde du compte et, en conséquence, sont destinés au désendettement de l’État ;

– pour les cessions d’un montant supérieur (ou égal) à 2 millions d’euros, 15 % du produit de la cession sont affectés au profit du budget général au titre du désendettement de l’État lorsque l’immeuble est occupé. Cette contribution est portée à 50 % lorsqu’il s’agit d’un terrain ou d’un immeuble inutilisé. Le ministère précédemment affectataire pourra utiliser les crédits disponibles (85 % ou 50 %), après constitution d’un dossier de remploi, établissant la performance immobilière des opérations de relogement (cas de cession d’un bien occupé) ou des travaux d’entretien lourd ou de rénovation envisagés d’immeubles dont il est affectataire.

Des cas particuliers ont toutefois été prévus. Les cessions des ministères ayant conclu un contrat comprenant un volet immobilier peuvent donner lieu à un intéressement fixé dans ce cadre :

– le ministère des Affaires étrangères et le ministère de l’Économie bénéficient d’un retour de 100 % du produit des ventes d’immeubles à l’étranger qui leur étaient précédemment affectés ;

– le ministère chargé de l’Équipement a obtenu la rétrocession, à compter du 1er janvier 2007 et sur la durée du contrat triennal conclu avec le ministère du Budget, de 95 % de ses ventes immobilières dans la limite de 100 millions d’euros de cessions ;

– les cessions d’immeubles militaires donnent lieu à un « intéressement » de 100 % au bénéfice du ministère de la Défense.

Votre Rapporteur spécial s’interroge sur la légitimité de ces cas particuliers. Les cas de la Défense et des Affaires étrangères s’expliquent par la poursuite de pratiques antérieures, qui n’ont plus de raison d’être dans le cadre de la nouvelle politique immobilière. Le cas des implantations étrangères du ministère de l’Économie s’explique par la similitude de traitement revendiquée avec les Affaires étrangères. La contractualisation effectuée entre le ministère de l’Équipement et celui du Budget a abouti à la règle de retour de 95 %, pour des raisons purement financières et au détriment de l’équité entre les ministères et la cohérence de la politique immobilière de l’État. Il est loisible de se demander quels sont les poids comparés de la direction du budget et du service France Domaine dans ces véritables négociations financières avec les ministères. Dès lors que sont conservées des exceptions mal justifiées à l’égalité de traitement, quelle garantie avons-nous qu’un cinquième ministère ne se verra pas également accorder un tel traitement dérogatoire ?

Seules les cessions ayant fait l’objet d’un « dossier de remploi » validé par le ministre du budget peuvent donner lieu à un bilan financier faisant apparaître le produit de la cession et le détail des dépenses immobilières liées à l’opération.

Le service France Domaine explique qu’ont été traités dix dossiers de remploi de produit de cessions supérieures à 2 millions d’euros en 2006. Il a calculé qu’en moyenne les surfaces ont augmenté de 16 % et les coûts d’exploitation de 16 % également. Ces moyennes cachent des différences très importantes entre les opérations. Selon les informations reçues, la création d’un hôtel des finances à Nanterre a entraîné une réduction des surfaces de 58 % et des coûts d’exploitation de 43 % par rapport aux implantations cédées place de la Madeleine et rue Tronchet à Paris. Votre Rapporteur spécial ne s’explique pas pourquoi cette opération a été acceptée. À l’opposé, l’implantation des services informatiques du ministère des Finances à Noisy-le-Grand a entraîné une augmentation des surfaces de 15 % et des coûts d’exploitation de 35 % par rapport aux implantations cédées place de la Madeleine à Paris et sur d’autres sites non précisés. La réimplantation des offices agricoles à Montreuil sous Bois (alors qu’elles étaient rue Saint Charles et rue de Naples à Paris) a entraîné une augmentation des surfaces de 20 % et une diminution des coûts d’exploitation de 20 % également.

Deux séries d’opérations n’ont malheureusement pas été analysées au regard de la performance immobilière :

– la cession de l’ancien immeuble de l’ENA rue de l’Université à Paris (« droit de retour » de 39,4 millions d’euros), qui a en partie financé le transfert à Strasbourg ;

– la cession par le ministère des Affaires étrangères de deux immeubles à Hambourg et d’une villa à Monaco pour financer l’acquisition d’immeubles à Tel Aviv et New-York et divers travaux immobiliers.

Certains dossiers de remploi, portant sur plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de millions d’euros, semblent très faiblement instruits par le service France Domaine.

La cession de l’immeuble du Centre de conférences internationales situé avenue Kléber à Paris a financé le rachat de l’ancien immeuble de l’imprimerie nationale avenue de la Convention ; le service France Domaine y voit une réduction des surfaces occupées de 88 000 m2 à 50 000 m2 et une économie d’échelle des coûts d’exploitation « non chiffrée mais certaine », avec le regroupement sur deux sites au lieu de neuf auparavant. Or la réduction des surfaces est purement optique puisque les deux immeubles n’ont pas du tout le même usage. On ne sait pas comment est calculée la réduction des coûts d’exploitation, alors que la verrière centrale occasionnera sans nul doute des coûts de chauffage et de climatisation très importants.

Pour le transfert de l’ENA à Strasbourg, le dossier de remploi indique seulement le produit de la cession (46,3 millions d’euros) et une dépense immobilière de 12 millions d’euros à Strasbourg. Or les dépenses de réimplantation à Strasbourg ont commencé avant 2005 et ne sont pas récapitulées, et on ne sait toujours pas pendant combien de temps l’ENA va engager des dépenses immobilières à Strasbourg et pour quel montant. Chaque année, les projets de loi de finances comportent des dépenses immobilières à cet effet. Le moins que l’on aurait pu attendre du service France Domaine est qu’il produise, en collaboration avec l’ENA, un bilan consolidé et prévisionnel des dépenses immobilières occasionnées par l’implantation à Strasbourg. À défaut, l’ENA donne l’impression d’exercer un droit de tirage qui a sans doute déjà dépassé la norme de 85 % du produit des cessions. Le dossier de remploi du service France se contente d’indiquer une réduction des surfaces de 15 % et une réduction des coûts d’exploitation de 60 %, sans aucunement expliquer les modalités de leur calcul.

Le compte d’affectation spéciale devait être un instrument de transparence budgétaire, sur les dépenses de réimplantation consécutives à des cessions. Mais les dépenses « autofinancées » par le produit des cessions sont imputées sur le CAS. Elles ne sont pas rattachées aux missions et programmes auxquels elles correspondent. Or le CAS ne fait apparaître, ni dans le RAP 2006, ni dans les PAP 2007 et 2008, le détail par ministère des recettes et, surtout, des dépenses immobilières.

Enfin aux yeux de votre Rapporteur spécial, une évolution des règles du CAS est nécessaire. Le présent projet de loi de finances les maintient inchangées. Il convient au plus tôt d’engager une remise à plat des règles de retour, afin d’assurer une mutualisation des opérations de cession et d’acquisition, et une certaine péréquation entre les ministères. Cela passe maintenant par une nette réduction, voire une suppression du « droit de retour ». L’affirmation du rôle du service France Domaine en tant que propriétaire doit maintenant être suffisante pour que les décisions de cessions des immeubles domaniaux ne supposent plus une incitation des ministères. Les cessions immobilières ne doivent plus constituer un objectif en soi, mais être la conséquence d’une politique immobilière cohérente et gérée par le service France Domaine.

B.– LES LOYERS BUDGÉTAIRES

Le Conseil de l’Immobilier de l’État a recommandé de faire évoluer le dispositif expérimental des loyers budgétaires vers une véritable logique de loyers de marché. Il a proposé d’en étudier l’impact en vue d’une première application en 2008.

Cette recommandation a été intégrée dans la circulaire du Premier ministre du 28 février 2007 sur la politique immobilière et le secrétariat général du conseil a lancé une étude de simulation d’une politique de loyers de marché sur les immeubles de bureaux du parc domanial occupés par les administrations centrales (174 immeubles). Cette étude a été réalisée par le groupement de consultants INEUM/CBRE.

Les travaux en vue de la mise en place des loyers en 2008 ont été conduits en liaison avec les ministères et les services locaux. Les loyers ont été calculés en prenant en compte le marché immobilier local. Les taux des loyers retenus correspondent aux taux du marché locatif, sans aucun abattement ni adjonction.

La diversité des territoires sur lesquels s’appliquent ces loyers a conduit à établir un taux de loyer non plus national, comme au cours des deux exercices précédents, mais local, en fonction des conditions du marché. Les services ont été invités à répartir les immeubles entre plusieurs zones infradépartementales. Il a été possible de distinguer jusqu’à trois ou quatre zones selon le niveau d’urbanisation : sur-urbaine, urbaine, péri-urbaine ou rurale. Dans le cas d’un département ayant une homogénéité de son parc locatif, le nombre de zones pouvait cependant être réduit. À chacune de ces zones a été attaché un taux du marché locatif. Le loyer a été obtenu par application de ce taux à la valeur vénale.

L’extension des loyers appliqués aux immeubles de bureaux domaniaux couvrira 26 départements en 2008 incluant notamment les 10 plus grandes agglomérations françaises. Près de 2 000 bâtiments de bureaux seront ainsi concernés, incluant le périmètre géographique retenu pour les expérimentations des loyers en 2006 et 2007 (administrations centrales et quelques départements expérimentaux), qui concernaient 257 immeubles pour un montant de quelque 302 millions d’euros de loyers. Le projet annuel de performances de la mission Direction de l’action du gouvernement indique, page 66, que « l’hôtel Matignon, résidence du Premier ministre, ne fait pas l’objet d’un loyer budgétaire », mais ne donne pas les raisons de cette exemption.

Le montant total des loyers budgétaires perçus en 2008 s’élèvera à près de 700 millions d’euros contre plus de 300 millions d’euros en 2007. Pour 2008, les crédits correspondant à ces nouveaux loyers ont été ajoutés aux crédits de fonctionnement des ministères. Il s’agit pour la première année d’une mesure de périmètre. Ensuite, les économies leur resteront acquises et les dépenses supplémentaires seront, le cas échéant, à leur charge. Ce mécanisme permettra de faire effectivement payer aux responsables des services les coûts de l’occupation des biens domaniaux.

C.– LE SERVICE FRANCE DOMAINE ET LA STRATÉGIE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT

La circulaire du 28 février confie des pouvoirs étendus à France Domaine. On citera les principaux aspects de cette circulaire.

– la préparation de l’avis conforme du ministère chargé du Budget pour les acquisitions et prises à bail de l’État (vérification que les implantations choisies satisferont aux critères d’amélioration de la performance immobilière de l’État). La circulaire ne détermine malheureusement pas plus précisément la procédure d’instruction, ni la nature de l’intervention du service France Domaine ;

– le rôle du service France Domaine : « sous l’autorité du ministre chargé du budget et de la réforme de l’État, France Domaine (…) décline la stratégie patrimoniale de l’État et assume la fonction de propriétaire. Compte tenu des expérimentations engagées, il fournira aux administrations un cadre de pilotage et de financement et des instruments de gestion en matière d’entretien » ;

– l’actualisation annuelle des SPSI, en particulier avec un renforcement de la partie prospective. La circulaire prévoit l’extension des SPSI aux services déconcentrés de l’État. En 2007, il est prévu de réaliser des diagnostics immobiliers sur 28 départements couvrant notamment les 10 plus grandes agglomérations françaises, ce qui s’ajoute aux travaux réalisés en 2006 sur le parc des administrations centrales. Votre Rapporteur spécial note que l’actualisation des SPSI devra s’effectuer dans le cadre de la réunion générale des politiques publiques, avec la prise en compte dynamique de la réduction du nombre de fonctionnaires programmée sur l’ensemble de la législature ;

– l’élaboration de la partie réglementaire du nouveau code général des propriétés des personnes publiques, avec la fin du régime de l’affectation et son basculement vers celui de conventions d’utilisation. Il s’agit de mettre en œuvre la décision du précédent Président de la République du 6 janvier 2006 « de confier le patrimoine immobilier de l’État à France Domaine » ;

– la mise en place de ces conventions d’utilisation « négociées à partir du 1er janvier 2007 » que signeront les services occupant les immeubles domaniaux. Ces conventions, qui constituent de véritables baux, ont vocation à matérialiser les nouvelles relations entre l’État-propriétaire et les occupants des immeubles domaniaux. Elles doivent être préparées et signées après une étude complète du parc de bureaux et après un dialogue avec l’occupant sur l’immeuble éligible à cette convention. Seule une bonne connaissance du bien et de ses caractéristiques (vérification de l’usage, surface, etc…) permet d’établir de telles conventions ;

– l’extension progressive des loyers budgétaires et le rapprochement de leur niveau de « ceux pratiqués par le marché immobilier local » ;

– l’extension du recensement et de l’évaluation des immeubles domaniaux occupés par les opérateurs de l’État, dans une démarche progressive entre 2006 et 2009. Le Conseil de l’immobilier de l’État avait alors demandé une accélération du calendrier, au vu de l’importance de l’enjeu constitué par le parc immobilier des établissements publics ;

– la prise en compte de l’entretien des immeubles domaniaux avec « une meilleure identification au niveau interministériel et ministériel, des coûts des travaux d’entretien du propriétaire et une organisation de leur pilotage ».

Votre Rapporteur spécial regrette une mise en place trop lente de ces nouveaux mécanismes. Chaque ministère se comporte toujours en quasi-propriétaire. Il s’agit d’un défaut de gouvernance où le service France Domaine ne joue toujours pas son rôle de pilote. Le présent rapport spécial a mis en évidence la position en retrait du service France Domaine dans l’instruction des projets immobiliers des ministères. Ce sont encore les ministères qui instruisent eux-mêmes leurs projets. L’intéressement au produit des cessions revient à leur laisser la maîtrise des opérations. France Domaine ne dispose toujours pas d’un relevé exhaustif des dépenses d’acquisition et des dépenses consécutives aux prises à bail des ministères. L’essentiel des dépenses, notamment de prise à bail, est en effet toujours supporté par les différents ministères sur le budget général.

La rénovation du service France Domaine, appelée de ses vœux par la MEC dans son rapport de juillet 2005, n’est pas encore intervenue. Ce service n’a toujours pas procédé au recrutement de professionnels de l’immobilier, notamment en provenance du secteur privé. Le ministre Jean-François Copé avait pourtant indiqué qu’il fallait que ce service recrute une trentaine de professionnels, pour réaliser une fusion de cultures comme, par exemple, celle réalisée au sein de l’Agence France Trésor. Comme indiqué précédemment au III, le manque de professionnalisme dans la gestion immobilière de l’État s’est particulièrement révélé dans la cession puis le rachat de l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale, et dans la gestion de l’immeuble du 20 avenue de Ségur (Écologie et Maison de la Francophonie). En particulier le transfert du service France Domaine de la DGI à la DGCP, marqué par l’importance démesurée de problèmes de gestion de personnel, n’a pu que freiner les évolutions qui s’imposaient. On se demande d’ailleurs à quoi ont servi ces efforts puisque les deux directions générales sont appelées à fusionner à brève échéance, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.

Au vu de cette situation, votre Rapporteur spécial souhaite que l’on revienne à qui avait été demandé dans le rapport de la MEC de juillet 2005, à savoir une agence autonome en charge de la gestion de l’immobilier de l’État. On peut également rappeler l’analyse du rapport de M. Olivier Debains en 2004, qui allait dans la même direction. Il ne s’agit de suivre au plus près le modèle des « Foncières » immobilières, qui ont été créées par les grands groupes industriels pour gérer leur immobilier ; cotées en bourse, sous le regard permanent des actionnaires, elles sont soumises à des obligations de résultats. Dans ce cadre, le Conseil de l’immobilier de l’État pourrait valablement jouer le rôle de « conseil de surveillance », comme cela se passe dans la gouvernance des grandes entreprises.

La preuve est faite que seul ce statut permet l’apparition d’un opérateur professionnel. Il s’agirait de détacher les quelque 600 ou 700 fonctionnaires qui participent actuellement aux tâches de conception au sein du service France Domaine des autres agents qui exercent des fonctions d’évaluation ou participent à la rédaction d’actes notariés. Cette agence autonome pourrait s’appuyer sur des compétences techniques, comme par exemple celles de la Caisse des dépôts et consignations. Cette dernière, directement ou plus vraisemblablement au travers de l’un de ses filiales immobilières, pourrait apporter son expertise et participer à des opérations de portage, de promotion, de construction ou de rénovation… Votre Rapporteur spécial s’interroge également sur le positionnement du service France Domaine, actuellement rattaché au seul ministère des Finances. Un caractère interministériel pourrait lui être utile, afin de s’affranchir du fait que le ministère des Finances peut avoir la tentation d’agir en « juge et partie ».

D.– PLUSIEURS PROJETS EN COURS SONT DISCUTABLES

Votre Rapporteur spécial note que plusieurs projets immobiliers sont à l’étude dans différents ministères : regroupement des services du ministère de l’Équipement et du développement durable dans une tour de La Défense, regroupement des services du ministère de l’Intérieur sur un site encore à rechercher, nouvelle implantation du Tribunal de grande instance de Paris… Sans examiner tous ces projets immobiliers dans le cadre du présent rapport, votre Rapporteur spécial souhaite en évoquer deux : le transfert de l’ENA à Strasbourg et la recherche d’un site pour le nouveau ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement.

• L’École nationale d’administration (ENA)

Parallèlement à la réforme de sa scolarité, l’ENA s’est engagée dans une vaste réforme de son fonctionnement comprenant notamment la diminution de l’effectif de ses promotions, l’intégration du Centre des études européennes de Strasbourg (CEES) et son installation à Strasbourg.

S’agissant de l’immobilier, les projets de loi de finances successifs n’en finissent pas de prévoir des dépenses immobilières supplémentaires à la suite du déménagement à Strasbourg. Le bâtiment principal de l’École au 13 rue de l’Université avait fait l’objet d’une cession, finalisée en décembre 2005, au bénéfice de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP), pour un montant de 46,4 millions d’euros. Il faut rappeler que la FNSP a financé cette acquisition par un emprunt, qui a été consolidé dans la dette publique au sens du Traité de Maastricht. Une partie (85 %) du produit de cette cession a été affectée sur le budget opérationnel de programme (BOP) Services du Premier ministre du Compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État, pour permettre à l’ENA de clore une série d’opérations liées au regroupement de ses activités à Strasbourg. Le transfert de cet immeuble de l’ENA à la FNSP, tous deux opérateurs de l’État, a donc eu pour conséquence paradoxale d’augmenter la dette publique, alors que la nouvelle politique immobilière de l’État a notamment pour objectif de la réduire.

L’ENA a bénéficié de crédits supplémentaires pour faire face aux frais de déménagement, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2004. Ensuite le BOP des Services du Premier ministre du CAS Gestion du Patrimoine immobilier de l’État a pris le relais. Un premier versement de 880 000 euros est intervenu en 2006 au titre des « loyers » dus à la FNSP pour l’occupation partagée du site du 13 rue de l’Université. Un deuxième versement de 12,1 millions d’euros est intervenu en juillet 2007 afin de financer une extension de l’École à Strasbourg. Le projet consiste en la construction d’une aile supplémentaire au bâtiment de la Commanderie Saint-Jean sur un terrain mis à la disposition par la ville de Strasbourg pour un euro symbolique. Cette extension permettra de mettre un terme au relogement provisoire dans des locaux loués par la ville de Strasbourg. En dernier lieu, un versement de 2,4 millions d’euros devrait intervenir avant le terme de l’exercice 2007 au titre du financement de la maison des élèves à Strasbourg (1,5 million d’euros), du solde des travaux réalisés sur le site de l’Observatoire (600 000 euros) et du déménagement de la rue de l’Université vers la rue de l’Observatoire (322 000 euros). Ces dépenses immobilières de l’ENA ne sont détaillées dans aucun document annexé au présent projet de loi de finances, ni dans le PAP Fonction publique, ni dans le PAP du compte d’affectation spécial Gestion du patrimoine immobilier de l’État. Et la représentation nationale ne sait toujours pas si l’ENA continuera à puiser sur ce compte, ou si le reliquat non encore dépensé servira enfin à participer au désendettement de l’État.

Alors que la situation des finances publiques du pays invite chaque acteur public à la responsabilité et à la diminution des coûts, il faut rappeler à l’ENA qu’elle devrait se montrer exemplaire dans la gestion des intérêts financiers de l’État, tant au regard de ses étudiants que de tous nos concitoyens.

• Le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement

M. Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, a été auditionné par votre commission des Lois le 16 octobre dernier à propos du présent projet de loi de finances. En réponse à une question de M. Éric Ciotti, le ministre a déclaré que  « la future localisation du ministère est en cours d’analyse avec le ministère du budget. Plusieurs hypothèses d’implantation sont envisagées à Paris et en proche banlieue. Actuellement, le ministère est installé rue de Grenelle et un bâtiment voisin fait l’objet de travaux particulièrement importants. Si le coût est raisonnable, il pourrait être envisagé d’y regrouper une partie des services, à condition que Bercy, qui est toujours enclin à envoyer les autres en banlieue mais qui montre peu l’exemple, l’accepte ». Il semble que les projets du ministre s’orientent vers une location de locaux avenue de Varenne, Paris 7ème.

Le même jour, Mme Béatrice Pavy, Rapporteur spécial de votre commission des Finances indiquait, lors de l’examen des crédits de la mission Immigration, asile et intégration : « le ministre souhaite regrouper l’ensemble de ses services, à l’exception de la sous-direction des naturalisations de la direction de la population et des migrations et d’une partie du service des étrangers en France, qui resteront implantées à Nantes et à Rézé. Cette localisation unique semble effectivement indispensable pour développer une culture commune et mieux faire travailler ces services ensemble. Il conviendra cependant d’être vigilant en ce qui concerne le choix de cette implantation. Une localisation dans le centre de Paris présenterait, certes, l’avantage de la proximité avec le ministre et son cabinet, situés dans le 7ème arrondissement, mais elle renchérirait considérablement le coût de l’opération, qui sera financé par la vente du siège de l’ANAEM, situé dans le 15ème arrondissement. » Elle précisait également que : « le coût de l’immobilier est élevé puisque la vente du bâtiment de l’ANAEM ne pourrait permettre le financement de la location de bureaux près du ministère que pendant 3 ans, d’où l’intérêt d’installer des services dans des zones moins résidentielles. La nouvelle structure gouvernementale devrait favoriser la rationalisation sans créer de dépenses supplémentaires. »

Votre Rapporteur spécial partage totalement l’avis de Mme Béatrice Pavy sur ce sujet. Il faut que la nouvelle politique immobilière de l’État propose des solutions qui ne soient pas calquées sur les structures administratives, par définition changeantes. La révision générale des politiques publiques, lancée par le Président de la République et le Premier ministre en juin dernier, comporte une composante immobilière qui doit permettre de tirer les conséquences de la rationalisation administrative pour générer des économies en matière immobilière. Sur le fond, on ne comprend pas, ici comme ailleurs, pourquoi des services administratifs et de gestion doivent être implantés dans le 7eme arrondissement de Paris. Seuls le ministre et son état-major rapproché peuvent justifier d’une telle localisation, prestigieuse mais coûteuse.

Votre Rapporteur spécial note enfin que le ministère des Finances s’applique à lui-même les orientations de la nouvelle politique immobilière de l’État ; il a même été pionnier dans son regroupement (à Bercy), puis la cession de ses principaux autres sites parisiens (rue du Bac, rue de l’Université, avenue de Ségur…) et l’implantation de certains de ses services en proche banlieue (Montreuil, Noisy Le Grand…). En revanche, le ministère de l’Intérieur peine toujours à mettre en œuvre une stratégie immobilière, qui pourrait l’amener à délaisser l’immeuble de la rue Nélaton (Paris 15ème) et même une grande partie de l’ensemble immobilier autour de la place Beauvau.

DEUXIÈME PARTIE :
LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIER
PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS
OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

Ce compte de concours financiers a pour finalité de permettre à des particuliers ou à des organismes privés de financer, dans des conditions satisfaisantes, des besoins concourant à un objectif d’intérêt général :

– en favorisant les conditions de prise de fonction et d’exercice des missions des agents de l’État, donc la permanence de l’action de l’État ;

– en accordant des prêts à des entreprises afin de favoriser le développement économique et social.

Le compte comporte cinq actions :

1° les « Avances aux fonctionnaires de l’État pour l’acquisition de moyens de transport » : ce régime d’avances a été institué par l’article 79 de la loi n° 47-1465 du 8 août 1947, dont les conditions d’application ont été redéfinies par le décret n° 82-747 du 24 août 1982 ;

2° les « Avances aux agents de l’État pour l’amélioration de l’habitat » ;

3° les « Avances aux associations participant à des tâches d’intérêt général »;

4° les « Avances aux agents de l’État à l’étranger pour la prise en location d’un logement » ;

5° les « Prêts pour le développement économique et social », qui retracent le versement et le remboursement de prêts consentis pour la réalisation du plan de modernisation et d’équipement ainsi que des programmes de productivité, de conversion et de décentralisation. Ce compte recueille ainsi l’héritage de l’ancien compte de prêts du FDES.

Ses dépenses sont comptabilisées en titre 7 (dépenses d’opérations financières).

I.– LE RAPPORT ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2006

Les dépenses se sont élevées à 2,6 millions d’euros.

Les recettes (remboursements de prêts) se sont élevées à 19,6 millions d’euros, pour une prévision de 19,2 millions d’euros.

Le solde du compte a donc été positif de 16,9 millions d’euros.

EXÉCUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT

(en milliers d’euros)

Actions

Loi de finances initiale
pour 2006

Rapport annuel de performances pour 2006

Avances aux fonctionnaires de l’État pour l’acquisition de moyens de transport

150

26,1

Avances aux agents de l’État pour l’amélioration de l’habitat

300

109,6

Avances aux associations participant à des tâches d’intérêt général

0

0

Avances aux agents de l’État à l’étranger pour la prise en location d’un logement

500

501,1

Prêts pour le développement économique et social

10 000

2 000

Total

10 950

2 636,8

Source : rapport annuel de performances pour 2006

Les prêts pour le développement économique et social constituent un outil d’aide aux entreprises qui connaissent des difficultés et sont engagées dans des restructurations industrielles et financières. En 2006, un prêt a été mis en place pour un montant de 2 millions d’euros qui a permis un apport de 30 millions d’euros de fonds propres dans une société du secteur de l’agro-alimentaire employant plus de 3 000 personnes.

Par ailleurs, les taux de remboursements des prêts accordés par le CIRI sont d’un très bon niveau : 100 % pour les quatre prêts accordés en 2003, dont trois ont fait l’objet d’un remboursement anticipé et un est toujours en cours, la société concernée s’acquittant de ses échéances. Ce bon chiffre confirme que l’intervention des prêts pour le développement économique et social permet aux entreprises ainsi aidées de retrouver une situation économique saine.

II.– LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES POUR 2008

La seule innovation par rapport aux lois de finances pour 2006 et 2007 est la division du compte en deux sections, l’une concernant les prêts aux fonctionnaires, gérés par le ministère du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, l’autre concernant les prêts pour le développement économique et social, gérés par le ministère de l’Économie, des finances et de l’emploi.

PRÉVISIONS DES CRÉDITS DE PAIEMENT

(en milliers d’euros)

Actions

Loi de finances initiale
pour 2007

Loi de finances initiale
pour 2008

Avances aux fonctionnaires de l’État pour l’acquisition de moyens de transport

110

50

Avances aux agents de l’État pour l’amélioration de l’habitat

260

150

Avances aux associations participant à des tâches d’intérêt général

0

0

Avances aux agents de l’État à l’étranger pour la prise en location d’un logement

560

600

Total section Prêts et avances à des particuliers ou à des associations

930

800

Prêts pour le développement économique et social

10 000

10 000

Total section Prêts pour le développement économique et social

10 000

10 000

Total général

10 930

10 800

Source : projet annuel de performances pour 2008

Les recettes sont prévues à hauteur de 3,9 millions d’euros, et le solde négatif escompté à – 6,9 millions d’euros.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique sur les crédits des missions Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Régimes sociaux et de retraite, et des comptes spéciaux Pensions, Gestion du patrimoine immobilier de l’État et Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés (voir compte rendu analytique officiel de la réunion du 8 novembre 2007 (14)), lors de la commission élargie, la commission des Finances a examiné les crédits de ces missions.

Après avis favorable de M. Yves Deniaud, Rapporteur spécial, la Commission a successivement adopté les crédits du compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État et du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR
VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Contrôles sur pièces et sur place :

– 19 et 20 septembre 2007 : immeuble du 27, rue de la Convention, Paris 15ème (ancien site de l’Imprimerie nationale)

M. Stéphane Romatet, Conseiller au cabinet du ministre des Affaires étrangères et européennes

M. Jean-Marie Bruno, Chef du service des affaires immobilières, ministère des affaires étrangères et européennes

M. Daniel Dubost, Chef du service France Domaine

– 26 septembre 2007 : immeuble du 20 avenue de Ségur, Paris 7ème

M. Cédric de Lestrange, Conseiller au cabinet du ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

M. Bertrand Gautier, Chef de service à la Direction des Personnels et de l’adaptation à l’environnement professionnel (DPAEP), ministère du Budget

Mme Lise Billard, Chef de service au Secrétariat général des ministères économique et financier

M. Olivier Geoffroy, Chef de cabinet, ministère de l’Écologie et du développement durable

M. Guillaume Le Reveillé, sous-Directeur des systèmes d’information et de la logistique du ministère de l’Écologie

Mme Andrée Montagnon, Administratrice civile, sous-direction des systèmes d’information et de la logistique du ministère de l’Écologie

M. Michel Vandepoorter, Chef du service des affaires francophones, ministère des Affaires étrangères et européennes

2. Auditions :

– 6 novembre 2007

M. Daniel Dubost, Chef du service France Domaine

M. Dominique Lamiot, Directeur général de la comptabilité publique (DGCP)

– 7 novembre 2007

M. Philippe Dumas, Inspecteur général des finances

M. Philippe Peyronnet, Ingénieur général des ponts et chaussées

M. Yves Charpentier, Inspecteur des affaires étrangères

Mme Martine Daurence, Inspectrice des affaires étrangères.

© Assemblée nationale

1 () Le tableau de la page 166 du rapport de performances, qui récapitule ces montants, indique à tort que le montant des crédits de paiement reportées de 2006 sur 2007 est de 51,5 millions d’euros.

2 () Le graphique figurant dans le RAP indique à tort seulement 173 millions d’euros.

3 () Le montant figurant dans le projet de loi de finances, qui était de 400 millions d’euros, a été porté à 479 millions d’euros à la suite d’un amendement de votre commission des Finances.

4 () 28 074 immeubles ont été évalués, soit 800 immeubles de plus qu’en 2005.

5 () Étant précisé que les établissements pénitentiaires ne sont pas compris dans ce périmètre (évaluation effectuée au coût de remplacement déprécié).

6 () Exemples : l’absence de bornage ou de divisions parcellaires qui impliquent des travaux cadastraux préalables, la recherche sur origines de propriétés anciennes, la notion d’unité administrative qui est à l’origine de nombreuses incohérences, en particulier pour les établissements d’enseignement supérieur qui ont tendance à fractionner les UA du fait de la complexité de leur bâti.

7 () L’unité administrative (UA) représente un immeuble, une fraction d’immeuble ou un ensemble immobilier (bâti et/ou non bâti) situé dans une même commune occupé par un même service attributaire et relevant d’un statut juridique identique (même type de propriétaire).

La gestion de l’UA est liée au besoin initial de gérer la notion de « propriétaire occupant » d’un immeuble, d’une fraction d’immeuble, ou d’un ensemble immobilier.

8 () Par exemple le ministère de la Défense dispose depuis plusieurs années du logiciel de gestion immobilière SAGRI. Mais son évolution récente en SAGRI II a été un échec et le ministère étudie actuellement les solutions de remplacement.

9 () La commission des Finances du Sénat a auditionné le 17 octobre 2007 MM. Jean-Luc Vialla, ancien président-directeur général de l'Imprimerie nationale, M. Stéphane Romatet, ancien chef du service des affaires immobilières au ministère des affaires étrangères (MAE), M. Jean-Marie Bruno, chef du service des affaires immobilières au MAE, Xavier Hürstel, sous-directeur à la direction du budget, Jean-Yves Leclerc, sous directeur à l'Agence des participations de l'État, Philippe Dumas, inspecteur général des finances, M. Daniel Dubost, chef du service France Domaine, Dominique Lamiot, directeur général de la comptabilité publique, Eric Sasson, président du fonds Carlyle Real Estate pour l’Europe et Christopher Finn, Managing Director du groupe Carlyle, sur les conditions de cession de l'immeuble de l'Imprimerie nationale, rue de la Convention. La commission a ensuite autorisé la publication de ces travaux sous la forme d'un rapport d'information cosigné par MM. Adrien Gouteyron, Paul Girod et Bernard Angels, en leur qualité de rapporteurs spéciaux, ainsi que par Mme Marie-France Beaufils. Le compte-rendu de cette audition est consultable sur le site Internet du Sénat ( http://www.senat.fr/bulletin/20071015/fin.html).

10 () http://www.ipdfrance.com/downloads/pres091007.pdf

11 () Projet de loi (n° 281 – 2006-2007), déposé à la Présidence du Sénat le 22 mars 2007, autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale de la Francophonie relative à la mise à disposition de locaux pour installer la Maison de la Francophonie à Paris.

12 () – Voir la contribution de M. Adrien Gouteyron, Rapporteur spécial de la commission des Finances du Sénat, dans le rapport (n° 393 – 2006-2007) de M. Philippe Marini sur le projet de loi de règlement pour 2006 (pages 16) ;

– Voir également le compte-rendu de la réunion de la commission des Affaires étrangères du Sénat du 25 juillet 2007.

13 () Rapport (n° 382 – 2006-2007) de M. Yann Gaillard.

14 () Voir sur le site Internet de l’Assemblée nationale :

http://www.assemblee-nationale.fr/13/budget/plf2008/commissions_elargies/cra/.