Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF

N° 1202

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2008.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2009 (n° 1127)

TOME VIII

SÉCURITÉ

GENDARMERIE NATIONALE

PAR M. Alain MOYNE-BRESSAND,

Député.

——

Voir le numéro : 1198 (annexe n° 41)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  À L’HEURE DE PROFONDES MUTATIONS, LES RÉSULTATS DE LA GENDARMERIE NE CESSENT DE PROGRESSER 7

A. L’AMÉLIORATION CONSTANTE DES RÉSULTATS ILLUSTRE L’EFFICACITÉ DE LA GENDARMERIE 7

1. La lutte contre la délinquance 7

2. Une priorité constante : la lutte contre l’insécurité routière 8

B. LES CONTRAINTES LIÉES AUX MISSIONS DE TRANSFÈREMENTS ET D’EXTRACTIONS RESTENT FORTES MALGRÉ UNE VOLONTÉ POLITIQUE CERTAINE D’AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DE CETTE TÂCHE 9

1. Maintes fois dénoncées, les difficultés liées à cette charge ne sont toujours pas résolues 9

2. Des solutions existent et doivent être mises en œuvre 10

C. LE TRANSFERT DE RESPONSABILITÉ MARQUERA L’ANNÉE 2009 11

1. Les objectifs et les modalités du passage du ministère de la défense à celui de l’intérieur 11

2. L’adaptation organisationnelle et les mutualisations 12

a) Les évolutions envisagées et les restructurations 12

b) Les mutualisations et collaborations 12

II. —  UN BUDGET QUI PERMET DE FAIRE FACE AUX ENGAGEMENTS PRÉCÉDENTS MAIS INSUFFISANT POUR PRÉPARER L’AVENIR 15

A. LES EFFECTIFS RÉGRESSENT MAIS DES EFFORTS FINANCIERS SONT CONSENTIS EN FAVEUR DES PERSONNELS 16

1. La gendarmerie poursuit l’effort de réduction des effectifs 16

2. Un effort significatif est consenti en faveur des personnels 19

B. LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT PROGRESSENT 20

1. Les dépenses de fonctionnement hors loyers 20

2. Les dépenses de loyers 21

C. LES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT S’EFFONDRENT DANGEREUSEMENT 22

1. L’immobilier 22

2. Les autres investissements significatifs 23

3. Des programmes majeurs sont sacrifiés 24

TRAVAUX DE LA COMMISSION 27

I. —  AUDITION DE MME MICHÈLE ALLIOT-MARIE, MINISTRE DE L’INTÉRIEUR, DE L’OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 27

II. —  AUDITION DU GÉNÉRAL ROLAND GILLES, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE 43

III. —  EXAMEN DES CRÉDITS 55

INTRODUCTION

Le projet de budget pour la gendarmerie participe à l’effort de maîtrise générale des dépenses publiques. Il s’inscrit dans le cadre de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI), dont il constitue la première annuité. Ce texte n’a toutefois pas encore été déposé au Parlement. 295 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 53 millions d’euros de crédits de paiement étant prévus au titre de cette loi, il aurait été souhaitable que la représentation nationale ait pu préalablement se prononcer sur ce projet.

Un effort financier est consenti en faveur des personnels et les montants prévus en crédits de paiement permettront d’honorer les engagements antérieurs. La gendarmerie devra toutefois reporter certains programmes d’équipement pourtant essentiels.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2008, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 39 réponses étaient parvenues, soit un taux de 97,5 %. La dernière réponse a été transmise le 23 octobre 2008.

I. —  À L’HEURE DE PROFONDES MUTATIONS, LES RÉSULTATS DE LA GENDARMERIE NE CESSENT DE PROGRESSER

A. L’AMÉLIORATION CONSTANTE DES RÉSULTATS ILLUSTRE L’EFFICACITÉ DE LA GENDARMERIE

L’amélioration constante des résultats depuis 2003 témoigne de l’engagement des personnels de la gendarmerie dans la mission de sécurité publique. L’activité missionnelle représente 78,9 % de l’activité totale, les 21,1 % restants correspondant aux fonctions de soutien.

Depuis 2002, l’activité de la gendarmerie n’a cessé d’augmenter. Pour faire face à cette montée en puissance, elle a procédé à une croissance progressive de ses effectifs. Parallèlement, de 2002 à 2007, le nombre d’heures par jour par gendarme et les horaires moyens journaliers ont progressé pour s’établir respectivement à 8 heures 38 minutes et 10 heures 23 minutes.

1. La lutte contre la délinquance

L’activité judiciaire a progressé de 28 % entre 2002 et 2007. Sur la même période, le travail de nuit a connu une augmentation de 22,2 % ; sa part dans l’activité des unités atteint 13,3 % en 2007. Cette évolution répond au souci de mieux cibler les actions dans le temps et dans l’espace.

Le nombre de crimes et délits constatés a baissé chaque année de façon ininterrompue de 2003 à 2007. Depuis 2002, la délinquance a chuté de 15,1 %. En 2007, cette baisse est de 2,2 %. Toutefois, la tendance observée sur le premier semestre 2008 indique une hausse de la délinquance de 3,6 % résultant principalement d’une augmentation significative des escroqueries et des infractions économiques et financières (+ 25,7 %).

Le nombre de faits de délinquance de proximité a régressé de 6,1 % et les vols baissent de 3,2 %. L’évolution des atteintes volontaires à l’intégrité physique reste préoccupante (+ 8,6 %) mais le nombre de faits élucidés dans cette catégorie progresse très significativement (+ 10,8 %) pour atteindre 75,32 % (contre 73,78 % au premier semestre 2007). Les unités de gendarmerie ont fourni un effort significatif en matière de lutte contre les infractions à la législation sur les stupéfiants. Le nombre de faits enregistrés progresse de 33,7 % et résulte essentiellement de l’augmentation de l’usage de stupéfiants. L’effort entrepris en matière de lutte contre l’immigration irrégulière contribue également à la hausse de l’action des services. Les infractions relatives à la police des étrangers ont augmenté de 48,2 % au premier semestre 2008. Avec une baisse de 4,67 % en 2007, la délinquance de voie publique diminue pour la cinquième année consécutive. La tendance se poursuit au premier semestre 2008 avec un nouveau recul de 6,1 %.

L’évolution favorable du taux d’élucidation des crimes et délits – en hausse de 2,4 points pour atteindre 40,1 % au premier semestre 2008 – traduit la qualité du travail d’investigation et d’initiative des unités. Malgré un tassement du taux d’élucidation en 2007, l’engagement des enquêteurs s’est traduit par une augmentation de 6,2 % du nombre de personnes gardées à vue. Par ailleurs, la montée en puissance du fichier national automatisé des empreintes génétiques a participé à l’amélioration de l’élucidation du nombre de crimes et délits contre les personnes (+ 4 145 faits). En 2008, la mise en œuvre du plan d’action relatif à la police technique et scientifique doit permettre d’améliorer le taux d’élucidation des vols.

2. Une priorité constante : la lutte contre l’insécurité routière

L’effort entrepris par la gendarmerie en matière de sécurité routière s’est traduit par une forte augmentation de l’activité dans ce domaine (+ 34,9 %) entre 2002 et 2007. L’attention a porté plus particulièrement sur la constatation des infractions graves génératrices d’accidents ou comportant des facteurs aggravants. En 4 années, le nombre d’infractions à la vitesse constatées a été multiplié par plus de 3 ; cet accroissement est le résultat de la mise en œuvre de nouvelles technologies. La lutte contre l’alcoolémie s’est aussi intensifiée avec une augmentation de 2,5 % des infractions constatées. La consommation de stupéfiants est aussi en très sensible hausse : + 46 % en 2007. Sont également ciblés les défauts de port des équipements de sécurité et les utilisations de téléphone portable tenu à la main. Enfin, l’accroissement des défauts de permis de conduire ou de leur rétention témoigne de l’investissement de la gendarmerie dans la lutte contre les infractions graves (+ 3,5 % en 2007).

De nouveaux modes d’action lui permettent de renforcer son efficacité. L’exercice de la police sur la route, y compris en tenue civile, à bord de véhicules banalisés de tous types se généralise (1), de même que l’emploi de l’hélicoptère qui permet de compléter les dispositifs à terre. L’extension à l’ensemble du département de la compétence judiciaire des personnels affectés dans les unités d’autoroute, confère au commandant d’escadron départemental de sécurité routière une plus grande souplesse d’emploi de ses moyens. Enfin, la modification de l’article R. 130-10 du code de la route permettant aux élèves-gendarmes, gendarmes-adjoints et réservistes de la gendarmerie de réguler la circulation sous le commandement des militaires de la gendarmerie, augmente sensiblement les possibilités d’action sur le terrain.

Avec 110 vies épargnées sur le réseau relevant de la responsabilité de la gendarmerie, soit une régression de 3,1 % du nombre de tués, 2007 se conclut par un bilan favorable en matière de sécurité routière. Sur les cinq premiers mois de 2008, 31 vies ont été épargnées. Le nombre de blessés diminue de 4,7 %.

Malgré des contrôles plus fréquents et la mise en œuvre de nouvelles technologies, la consommation d’alcool et les excès de vitesse restent les causes les plus fréquentes des accidents mortels. La constatation de consommation de stupéfiants est de plus en plus fréquente, en particulier chez les jeunes conducteurs. Le nombre des dépistages de stupéfiants opérés par les unités de gendarmerie s’est accru de manière exponentielle depuis 2003. La mise en place, depuis l’été 2008, de kits de dépistage salivaire des stupéfiants devrait faciliter les contrôles par les forces de l’ordre. Toutefois, la contrainte d’un recours à une prise de sang en cas de résultat positif est maintenue, ce qui réduit fortement la capacité d’augmentation des contrôles dans ce domaine.

Les résultats obtenus par les brigades rapides d’intervention (BRI) méritent d’être particulièrement soulignés. Au cours de l’année 2007, l’ensemble des BRI a constaté 56 352 infractions contre 44 821 en 2006, soit une augmentation de 25,73 %. Elles ont également procédé à plus de 5 634 rétentions de permis contre 3 859 en 2006, soit une progression de 46 %, et réalisé 8 700 immobilisations contre 6 315 en 2006, soit une amélioration de 37,77 %. L’existence de ces unités, particulièrement médiatisée, et leur présence ostensible sur le réseau s’avèrent très dissuasives.

B. LES CONTRAINTES LIÉES AUX MISSIONS DE TRANSFÈREMENTS ET D’EXTRACTIONS RESTENT FORTES MALGRÉ UNE VOLONTÉ POLITIQUE CERTAINE D’AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DE CETTE TÂCHE

1. Maintes fois dénoncées, les difficultés liées à cette charge ne sont toujours pas résolues

Depuis plusieurs années, les difficultés liées aux missions de transfèrements et d’extractions sont soulevées et des propositions sont formulées pour en améliorer l’efficacité. Le rapporteur a particulièrement insisté, dans son précédent avis budgétaire, sur la charge qu’elles représentent pour la gendarmerie et la nécessité de les rationaliser au plus vite. La gendarmerie ne disposant pas d’entités dédiées à ces tâches, celles-ci constituent une des missions, parmi d’autres, de nombreuses unités et leur imputation directe sur les missions de sécurité publique se fait au détriment de la présence sur le terrain. Force est de constater encore cette année que la meilleure volonté politique se heurte à une inertie administrative et corporatiste.

En 2007, la gendarmerie a enregistré une légère baisse de 0,6 % de cette activité. Pour autant, cette situation pourrait ne pas perdurer. L’augmentation du nombre d’individus placés en garde à vue (+ 6,2 %) ainsi que de celui des écroués (+ 2,4 %) s’est poursuivie, entraînant une croissance des mouvements. L’ouverture de nouveaux établissements pénitentiaires en zone gendarmerie se traduira également par des charges supplémentaires de transfèrements. Le transfert progressif de la charge des extractions médicales des unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) vers l’administration pénitentiaire devrait par contre se traduire par une stabilisation du volume de charge. Créé par un arrêté du 24 août 2000, le dispositif des UHSI (2) atteindra sa maturité avec la création de deux unités, l’une à Paris fin 2008 et l’autre à Rennes début 2009. Les transfèrements et extractions concernant ces UHSI ont été initialement confiés à la police et la gendarmerie alors que, s’agissant de transfèrements administratifs, cette charge aurait dû incomber à l’administration pénitentiaire. En 2006, un arbitrage interministériel a décidé que l’administration pénitentiaire reprendrait selon un calendrier triennal l’ensemble des missions UHSI, tout en maintenant cette tâche à la charge de la police nationale ou de la gendarmerie nationale lorsqu’il s’agit de détenus particulièrement signalés. Pour l’année 2007, les charges liées aux UHSI de Marseille et Toulouse lui ont déjà été transférées. Pour l’année 2008, sont concernés les sites de Paris et de Lille et pour l’année 2009, ceux de Nancy, Lyon, Bordeaux et Rennes. Or, malgré l’arbitrage précédemment évoqué, la gendarmerie connaît une nouvelle situation de blocage avec l’administration pénitentiaire. En effet, dans le cadre de la mise en place de l’UHSI de Paris, celle-ci a proposé une rédaction du protocole local à laquelle ne souscrivent ni la gendarmerie, ni la police nationale, ni la préfecture de police de Paris, dans la mesure où l’administration pénitentiaire souhaite s’exonérer des missions d’escorte.

2. Des solutions existent et doivent être mises en œuvre

Comme l’indiquait le rapporteur dans son précédent avis, la mise en œuvre de moyens de visioconférence permettrait de limiter les mouvements de détenus. Une expérimentation a débuté le 16 janvier 2006 dans le ressort de la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy, entre les juridictions équipées et les établissements pénitentiaires de Metz et de Nancy. À la suite d’un rapport en juin 2006 de la mission interministérielle d’audit sur l’utilisation de la visioconférence dans les services judiciaires, le ministère de la justice a décidé de relancer les travaux communs avec la police nationale et la gendarmerie nationale, pour une utilisation plus intensive de cette visioconférence. Depuis octobre 2007, une autre expérimentation, plus significative que la précédente, est menée sur des « bassins » favorables et intègre, outre le recours à la visioconférence entre juridictions et établissements pénitentiaires, l’utilisation de cette technique également entre les services de police ou unités de gendarmerie et les juridictions. À l’issue de cette expérimentation d’une durée d’un an, un bilan permettra d’établir l’opportunité ou non de la poursuivre. Le rapporteur constate que le fait que celle-ci soit réalisée dans des juridictions qualifiées de « favorables » témoigne des résistances rencontrées ; il s’interroge sur le temps qui sera nécessaire pour que les habitudes et les mentalités évoluent et souhaite vivement que des mesures de responsabilisation soient rapidement arrêtées.

De la même manière, une meilleure application de certaines dispositions du code de procédure pénale par les magistrats permettrait de faire diminuer le volume total des transfèrements. La mise en œuvre des possibilités ouvertes par les articles 664, 712 et D.298 du code de procédure pénale a déjà été préconisée l’an passé par le rapporteur.

Enfin, la notification d’un certain nombre d’actes ne semble pas devoir justifier la présence systématique d’un magistrat. Dès lors, il est possible de s’interroger sur l’habilitation des directeurs de maisons d’arrêts à accomplir ces actes, par substitution aux magistrats. Cette solution présenterait le triple avantage d’une diminution des transfèrements, d’une amélioration de la sécurité par le maintien de détenus dans leur établissement et enfin d’un gain de temps pour les magistrats. Les actes suivants pourraient être concernés par cette mesure : l’entretien préalable avec l’accusé, afin de vérifier que l’affaire est bien en état, la notification d’expertises, la mise en état d’un curriculum vitae et la notification de mandats émis par d’autres juges dans des dossiers multiples. Afin de garantir le contrôle des magistrats, les directeurs procéderaient à ces notifications sur commission rogatoire.

C. LE TRANSFERT DE RESPONSABILITÉ MARQUERA L’ANNÉE 2009

Sous réserve de l’adoption de la loi portant dispositions relatives à la gendarmerie, celle-ci sera organiquement et budgétairement rattachée au ministère de l’intérieur à compter du 1er janvier 2009.

1. Les objectifs et les modalités du passage du ministère de la défense à celui de l’intérieur

Le transfert de la gendarmerie sous tutelle du ministre de l’intérieur a pour objet de rassembler les forces de sécurité intérieure sous une même responsabilité. Ce rapprochement favorisera les coopérations et mutualisations entre les deux forces. Le maintien du statut militaire, auquel les gendarmes, comme leurs concitoyens et les élus, sont particulièrement attachés, ainsi que l’ancrage de la gendarmerie au sein des forces armées, sont affirmés. La gendarmerie conservera ses spécificités et sujétions particulières.

Préalablement, le rapport « police – gendarmerie : vers la parité globale au sein d’un même ministère », confié aux deux directeurs généraux de la gendarmerie et de la police, a été remis aux ministres de la défense et de l’intérieur le 14 mars 2008. Ses conclusions ont été examinées par deux personnalités qualifiées qui ont partagé l’appréciation des auteurs. Le rapport définit les conditions de la parité globale entre les deux corps. Afin de garantir cet équilibre, la ministre de l’intérieur a décidé la mise en œuvre de passerelles entre les deux forces, permettant aux personnels qui le désireraient de changer de corps, sous réserve de suivre une formation de mise à niveau.

Les coopérations et mutualisations entre les deux forces favoriseront une meilleure collaboration au service de la sécurité. Elles permettront également des économies d’échelle sur les marchés d’équipement. Toutefois, la capacité à travailler en commun ne devra pas conduire à la fusion des unités ou des services. En effet, en matière de police judiciaire par exemple, il est primordial de laisser au magistrat le choix du service enquêteur et, pour la police scientifique, de permettre la réalisation de contre-expertises. Cela n’exclut pas l’émergence de pôles de compétences particulières au sein de l’une ou l’autre force. En outre, compte tenu de la différence de statut entre les deux forces, la garantie de pouvoir disposer en permanence de moyens de sécurité opérationnels repose sur le maintien de compétences de même nature au sein de chacune d’elles.

La défense continuera d’assurer certains soutiens, comme la solde, le service social ou le maintien en condition de certains équipements. À cet effet, une délégation de gestion à laquelle sont annexées 35 conventions a été signée le 28 juillet 2008.

2. L’adaptation organisationnelle et les mutualisations

a) Les évolutions envisagées et les restructurations

Selon les informations dont dispose le rapporteur, le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur n’entraînera pas de modifications profondes dans l’organisation de la direction de la gendarmerie, qui a d’ailleurs fait l’objet d’aménagements en mai 2008. Le directeur général de la gendarmerie se rapprochera de son ministre de tutelle en s’installant place Beauvau ; le regroupement des services de la direction générale à Issy-les-Moulineaux reste d’actualité.

La ministre de l’intérieur a déjà annoncé la fermeture des écoles de gendarmerie de Montargis, Le Mans, Libourne et Châtellerault. Dans l’attente d’autres annonces (suppression de brigades, reformatage de la composante mobile de la gendarmerie), les rumeurs circulent. Le rapporteur souhaite que chaque décision réponde à des nécessités opérationnelles permettant d’améliorer encore le service rendu.

b) Les mutualisations et collaborations

En matière de formation, un conseil de coordination de la formation police/gendarmerie a été créé le 25 mars 2008. Il a vocation à examiner les mutualisations envisageables en matière de prérecrutement et promotion des métiers, de formation continue des policiers et des gendarmes et de formation des personnels civils. Lors de l’instruction initiale des personnels de chacune des deux forces, l’accent sera mis sur la connaissance des structures et du mode de fonctionnement de l’autre institution.

Des mutualisations sont envisagées pour la formation des unités plus particulièrement chargées des opérations de maintien de l’ordre : les escadrons de gendarmerie mobile et les CRS. La gendarmerie dispose d’un site d’instruction, reconnu pôle d’excellence, le centre national d’entraînement des forces de gendarmerie (CNEFG) de Saint-Astier. La police n’a pas de structure équivalente et pourrait bénéficier des structures et enseignements dispensés au CNEFG. Dans le même esprit, le centre d’instruction nautique de la gendarmerie assurera la formation des plongeurs, tant de la gendarmerie que de la police. Les structures d’enseignement à la cynotechnie des deux forces seront regroupées sur le site du centre national d’instruction cynophile de la gendarmerie situé à Gramat. D’autres mutualisations sont en cours d’étude.

Divers fichiers informatiques de renseignements sont déjà mutualisés ou communs à la gendarmerie et à la police. Parmi ceux-ci, figurent le fichier national automatisé des empreintes génétiques, le fichier automatisé des empreintes digitales, le fichier des personnes recherchées et celui des véhicules volés. Des logiciels développés par la gendarmerie sont mis à la disposition de la police : MARINA, destiné à faciliter les perquisitions effectuées sur les ordinateurs des personnes mises en cause dans des affaires de pédopornographie, et SIMANALYST, logiciel d’exploitation des cartes SIM des téléphones portables. Des travaux sont actuellement en cours pour parvenir à une mutualisation complète de certains fichiers judiciaires. Ainsi, ARIANE (application de rapprochement d’identification et d’analyse pour les enquêteurs) actuellement en cours de développement, sera commun aux deux forces. Il succédera aux actuels fichiers JUDEX, de la gendarmerie, et STIC, de la police, pour lesquels des accès réciproques ont été mis en œuvre en attendant le déploiement d’ARIANE.

Actuellement, l’interopérabilité totale entre les escadrons de gendarmerie mobile et les forces de police n’est possible par les réseaux Corail NG (gendarmerie) et Acropol (police) qu’en région parisienne. L’interopérabilité sera améliorée entre les réseaux Rubis (gendarmerie) et Acropol.

Outre leur participation au sein de diverses structures à caractère interministériel, la police et la gendarmerie collaborent déjà étroitement au sein de plusieurs entités opérationnelles. Il en est ainsi au sein des groupes d’intervention régionaux (GIR) dont ils se répartissent le commandement. D’autres services de l’État – douane, administration fiscale – y participent aussi. Ils travaillent également ensemble au sein des plates-formes communes de coopération policière internationale et d’identification des avoirs criminels, ou encore au sein de l’office central de lutte contre la délinquance itinérante, rattaché à la gendarmerie. Trois offices centraux relevant de la sous-direction de la police judiciaire de la DGGN travaillent en étroite collaboration avec les services compétents de la police. Il s’agit des offices centraux de lutte contre la délinquance itinérante, contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique et, enfin, contre le travail illégal.

La mise en commun de moyens logistiques passe par l’achat de matériels identiques à travers différents marchés communs à la gendarmerie et la police. En matière d’armement, des équipements comme les pistolets automatiques de dotation, par exemple, ont été acquis de cette façon. Il en est de même pour l’achat de motocyclettes (marché signé en 2008) ou de prestations informatiques. Certains besoins ont été satisfaits par cession de moyens entre les deux forces. De nombreuses acquisitions communes sont actuellement en cours de définition dans les domaines de l’armement et de la protection ainsi que dans celui de l’analyse à des fins judiciaires (tests de dépistage salivaire de stupéfiants, analyse de prélèvements biologiques en vue de l’inscription au fichier national d’empreintes génétiques).

Les mutualisations concernent aussi certaines fonctions de soutien, telles que la réparation automobile ou encore la mise à disposition de la police des hélicoptères de la gendarmerie, cette disponibilité faisant l’objet d’une convention fixant un nombre d’heures de vol.

II. —  UN BUDGET QUI PERMET DE FAIRE FACE AUX ENGAGEMENTS PRÉCÉDENTS MAIS INSUFFISANT POUR PRÉPARER L’AVENIR

Le projet de budget de la gendarmerie pour 2009 anticipe l’adoption de diverses mesures qui seront soumises au Parlement après son examen. Bien que la future LOPPSI ne soit pas encore déposée sur le bureau de l’une des deux assemblées, 295 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 53 millions d’euros de crédits de paiement sont provisionnés dans le budget 2009 pour la mise en œuvre des dispositions de cette loi. L’Assemblée nationale se prononcera sur le projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie, actuellement examiné par le Sénat, après la discussion budgétaire. Ce texte permettra le rattachement organique et budgétaire de la gendarmerie au ministère de l’intérieur à compter du 1er janvier 2009. Tenant compte de ce prochain transfert de responsabilité, la mission « Sécurité » devient ministérielle et le projet de budget est présenté par le ministre de l’intérieur.

Les dotations inscrites dans le projet de loi de finances, pour le programme gendarmerie, s’élèvent à 7,617 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 7,614 milliards d’euros en crédits de paiement. Les crédits votés en 2008 s’élèvent respectivement à 7,697 et 7,453 milliards d’euros. Avec une diminution de 1,08 %, les autorisations d’engagement régressent pour la deuxième année consécutive : elles étaient déjà en recul de 2,53 % pour 2008. À l’inverse, après avoir perdu 0,59 % en 2008, les crédits de paiements progressent de 2,16 % afin d’assurer notamment le paiement des livraisons prévues en 2009. La réduction des autorisations d’engagement est préoccupante et fragilise l’avenir. Malgré ses efforts pour accroître sans cesse son efficacité, la gendarmerie devra réduire ses missions faute de disposer des moyens suffisants pour maintenir son haut niveau d’engagement actuel.

Ventilation des crédits par action

(en millions d’euros)

Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ordre et sécurité publics

2 957

2 957

Sécurité routière

783

783

Police judiciaire et concours à la justice

1 482

1 482

Commandement, ressources humaines et logistiques

2 276

2 273

Exercice des missions militaires

119

119

Total

7 617

7 614

Source : ministère du budget.

A. LES EFFECTIFS RÉGRESSENT MAIS DES EFFORTS FINANCIERS SONT CONSENTIS EN FAVEUR DES PERSONNELS

1. La gendarmerie poursuit l’effort de réduction des effectifs

La gendarmerie a connu une croissance de ses effectifs pendant cinq années consécutives, en application des dispositions de la précédente loi d’orientation pour la sécurité intérieure (LOPSI), pour lui permettre de répondre aux besoins en matière de sécurité. Nonobstant, elle participe maintenant à l’effort global de réduction des personnels.

L’évolution des effectifs évaluée en ETPT (3) fait apparaître une réduction de 1 625 emplois, soit une réduction de 1,61 % du personnel. Le solde de transferts entre programmes est de 379 emplois : 375 ETPT correspondants au maintien de certaines tâches particulièrement liées à la défense sont transférés du programme gendarmerie vers la mission défense. 22 ETPT sont transférés au profit d’autres missions. Enfin, la gendarmerie gagne 18 ETPT résultant d’un transfert de mission de contrôle des bagages à l’international vers la douane et la gendarmerie sur les aéroports de Roissy, d’Orly et de Lyon. Le solde de suppression d’emplois, 1 246 ETPT correspond au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, dont 475 d’extension en année pleine de la mesure prise en 2008. Le recentrage des gendarmes sur leur cœur de métier se traduira par la transformation de postes d’officiers et sous-officiers de gendarmerie en postes d’officiers du corps technique et administratif, de sous-officiers du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie et de civils.

Le plafond ministériel d’emploi pour 2009 est de 99 509 ETPT. Les tableaux suivants présentent la répartition des emplois entre les actions, d’une part, et par catégorie d’emploi, d’autre part.

Répartition globale des emplois

Actions

2008

2009

Variation

Ordre et sécurité publics

47 051

46 399

- 652

Sécurité routière

12 364

12 274

- 90

Police judiciaire et concours à la justice

23 272

23 239

- 33

Commandement, ressources humaines et logistiques

16 451

15 975

- 476

Exercice des missions militaires

1 996

1 622

- 374

Total programme 152

101 134

99 509

- 1 625

Source : ministère du budget.

Répartition globale des emplois par catégorie

Catégorie d’emplois

2008

2009

Variation

Civils

1 928

2 212

+ 284

Militaires

99 206

97 297

- 1 909

Officiers

6 714

6 828

+ 114

Sous-officiers

78 101

76 368

- 1 733

Volontaires

14 391

14 101

- 290

Total programme 152

101 134

99 509

- 1 625

Source : ministère du budget.

Tenant compte de l’érosion des effectifs, les recrutements de sous-officiers seront moindres en 2009. S’agissant des volontaires, le taux de sélectivité de leur recrutement a connu une dégradation inquiétante en 2007 avec 1 recruté pour 2,3 candidats. 40 % à 50 % des élèves-gendarmes étant issus des rangs des volontaires, les besoins en recrutement de ces personnels sont étroitement liés au volume de recrutement de sous-officiers et à son cadencement. Il est donc probable que le nombre de volontaires qu’il sera nécessaire de recruter en 2009 soit moindre et permette d’améliorer la qualité des candidats retenus.

Pour tenir compte des conclusions du rapport conjoint « police - gendarmerie : vers la parité globale au sein d’un même ministère », le plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) a été revu. Le volume du corps des officiers a été redimensionné à 6 887 militaires (au lieu de 9 200) et le repyramidage du corps des sous-officiers a été renforcé au sommet (3 300 majors au lieu de 1 900 et 6 950 adjudants-chefs au lieu de 5 500). Cette évolution a pour objet de permettre, au travers de « carrières types » comparables, un même déroulement de carrière pour les sous-officiers et les officiers de gendarmerie que celle des fonctionnaires des corps actifs de la police nationale. La réalisation du PAGRE rénové permettra d’atteindre l’équilibre en 2012, date de la mise en œuvre complète du protocole « corps et carrières » de la police nationale. L’exécution du PAGRE rénové se traduit, pour 2009, par la création de 282 postes d’officiers et le repyramidage de 2 500 postes de sous-officiers. L’évolution du PAGRE et sa nouvelle situation sont retracées dans le tableau suivant.

Évolution du PAGRE et bilan

 

Objectif 2012 initial

Objectif 2012 rénové

Réalisation 2005-2008

Annuité 2009

Nombre de postes d’officiers créés

5 000

2 687 (1)

3 042

282

Taux de réalisation PAGRE rénové

   

113 %

non significatif

Nombre de postes de sous-officiers repyramidés

6 051

8 901

3 341 (1)

2 500

Taux de réalisation PAGRE rénové

   

38 %

66 %

(1) information non consolidée par la DGGN et estimée par le rapporteur au vu des éléments dont il dispose.

Source : DGGN.

La dynamique de recrutement des réservistes connaîtra en 2009 un nouveau coup d’arrêt et l’objectif de 40 000 réservistes d’ici 2012 semble de plus en plus difficile à atteindre. En 2008, la cible de recrutement, initialement fixée à 3 000 personnes et jugée improbable par le rapporteur, a été ramenée à 2 000 engagements. L’objectif de 27 000 réservistes fin 2008 ne sera vraisemblablement pas atteint : au 30 juin, 25 512 contrats étaient souscrits ; l’accroissement constaté pour le premier semestre 2008 est donc limité à 512 (4) réservistes, soit un peu plus du quart de l’objectif pour l’année. Les moyens budgétaires accordés à la réserve sont insuffisants pour remplir les objectifs de recrutement et préserver un niveau d’activité des réservistes acceptable. Les crédits alloués pour 2009 sont de 41 millions d’euros. Comparés aux 49,2 millions d’euros accordés en 2008, ils enregistrent une chute de 17 %. La durée moyenne d’activité a légèrement régressé en 2007. Cette dégradation devrait se poursuivre en 2008 et s’aggraver en 2009 quand bien même le recrutement serait drastiquement limité. Alors que la réserve apporte un renfort indispensable aux unités de gendarmerie, un taux d’activité en baisse et un recrutement minimal entacheront son attractivité. Le tableau suivant retrace l’évolution des effectifs de la réserve et de la durée moyenne d’activité depuis 2004.

Évolution des effectifs de la réserve et de la durée moyenne d’activité

 

2004

2005

2006

2007

Effectifs

Durée d’activité

(en jours)

Effectifs

Durée d’activité

(en jours)

Effectifs

Durée d’activité

(en jours)

Effectifs

Durée d’activité

(en jours)

Officiers

1 467

14,83

1 467

17,75

1 549

21,52

1 625

21,44

Sous-officiers

6 243

24,01

7 427

26,41

8 497

28,89

9 406

27,62

Militaires du rang

8 720

16,26

10 401

18,58

12 457

19,06

14 147

18,12

Total effectif

16 430

 

19 295

 

22 503

 

25 178

 

Durée moyenne d’activité

 

19,08

 

21,53

 

22,94

 

21,88

Source : ministère de la défense.

2. Un effort significatif est consenti en faveur des personnels

Les crédits demandés pour 2009 au titre des dépenses de personnel s’élèvent à 6 302 millions d’euros. Avec 208 millions d’euros d’augmentation enregistrés par rapport à 2007, ils progressent de 3 %. Le PLF 2009 est construit avec l’hypothèse d’une hausse du point d’indice de la fonction publique de 0,5 % au 1er juillet 2009, puis de 0,3 % au 1er octobre 2009.

Trois mesures catégorielles principales sont prévues pour la gendarmerie. L’entrée en vigueur des nouvelles grilles indiciaires au 1er janvier 2009 se traduit par un abondement des crédits de 11,4 millions d’euros. Leur mise en œuvre complète s’étalera sur trois ans. Au titre de l’annuité du PAGRE rénové, 20 millions d’euros sont prévus. Enfin, la prime de résultats exceptionnels est reconduite. En 2007 et 2008, 12 millions d’euros ont été consacrés à cette prime dont le montant est porté à 15 millions d’euros pour 2009.

Au titre de la participation de la gendarmerie aux opérations extérieures (OPEX), une provision de 11 millions d’euros destinée à couvrir une partie des dépenses de rémunérations et charges sociales est reconduite. Cette provision sera vraisemblablement insuffisante si le niveau d’engagement ne faiblit pas : en 2007, le surcoût des OPEX a atteint 17,98 millions d’euros pour le titre 2. Enfin, le montant prévu pour l’indemnité journalière d’absence temporaire (IJAT) est réévalué pour tenir compte de l’activité des escadrons et porté à 46 millions d’euros.

B. LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT PROGRESSENT

Les crédits de fonctionnement pour le programme gendarmerie s’élèvent à 995,33 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 998,79 millions d’euros en crédits de paiement, soit respectivement une augmentation de 3,23 % et de 4,66 % par rapport à la loi de finance initiale de 2008. Les crédits alloués tiennent compte du transfert à la mission « Défense » de l’indemnité compensatrice de la SNCF et du budget de fonctionnement de la gendarmerie de l’armement et de la gendarmerie de sûreté de l’armement nucléaire, pour un montant de 54 millions d’euros. Un resoclage de 30 millions d’euros est alloué au titre de la future LOPPSI. La provision de 4 millions d’euros au titre des OPEX est reconduite en 2009.

1. Les dépenses de fonctionnement hors loyers

Le budget réservé à la mobilité s’élève à 106 millions d’euros en autorisations d’engagement et 104 millions d’euros en crédits de paiement. 59 millions d’euros sont destinés aux dépenses en carburant. Les coûts d’entretien du matériel sont estimés à 28,5 millions d’euros. Enfin, 15,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 13,5 millions d’euros de crédits de paiement sont réservés au maintien en condition opérationnelle des hélicoptères.

Les dépenses d’équipement individuel représenteront 80 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 77 millions d’euros de crédits de paiement. Les dépenses d’achat et location de matériels (kits de dépistage des stupéfiants, embouts d’éthylomètres, animaux - chiens, chevaux -, réparation de l’armement et de l’optique, prestations pour l’IRCGN) consomment un tiers de ces crédits. Les dépenses d’habillement s’élèvent à 25 millions d’euros pour le renouvellement et l’entretien des tenues. S’y ajoutent 19 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 20 millions d’euros de crédits de paiement pour les dotations initiales des élèves, l’habillement des réservistes et les compléments de paquetage des spécialistes. Les mesures en matière d’habillement au titre de la future LOPPSI comptent pour respectivement 16,5 millions d’euros et 7,5 millions d’euros. En effet, le projet devrait prévoir la modernisation et la mise aux normes de sécurité de 8 500 tenues de motocyclistes, le renouvellement de 60 000 tenues de maintien de l’ordre et l’acquisition de 15 000 protections pare-coups.

Les crédits destinés au financement des prestations liées à l’homme s’élèvent à 204 millions d’euros. Avec 65 millions d’euros, les frais de transport et de déplacement constituent également un poste de dépenses important. L’alimentation est provisionnée à hauteur de 60 millions d’euros. Les restructurations envisagées en 2009, comme la fermeture de quatre écoles annoncée par le ministre de l’intérieur, entraîneront une augmentation des mutations à compter de cette même année. Les dépenses liées au changement de résidence connaîtront donc en 2009 une hausse sensible. Leur montant est estimé à 46 millions d’euros.

Les crédits alloués pour les dépenses de fonctionnement et de maintien en condition opérationnelle des systèmes d’information et de communication sont de 57 millions d’euros d’autorisations d’engagement, dont 1,6 million d’euros au titre de la future LOPPSI, et 65 millions d’euros de crédits de paiement.

2. Les dépenses de loyers

La livraison de nouvelles unités-logements (UL) en 2009 se traduit par une augmentation des crédits réservés aux dépenses de loyers. Leur croissance ralentit significativement. Ils sont évalués à 420 millions d’euros. Le tableau suivant retrace l’évolution des montants et précise le nombre d’unités-logements mises en chantier et livrées par les collectivités territoriales et les investisseurs privés depuis 2002.

UL mises en chantier et livrées
et évolution des dépenses de loyers

 

Unités-logements

Loyers

 

Mises en chantier

Livrées

Dépenses
(en millions d’euros)

Évolution

2002

470

498

289,4

+ 4,4 %

2003

592

492

310,5

+ 7,3 %

2004

517

796

327,2

+ 5,4 %

2005

1 757

666

351,9

+ 7,5 %

2006

2 450

817

371,4

+ 5,5 %

2007

3 345

1 505

392,0

+ 5,5 %

2008 (Prévisions)

3 012

2 779

413,0

+ 5,4 %

2009

(Prévisions)

2 469

2 371

420,0

+ 1,7 %

Source : ministères de la défense et du budget.

Les crédits d’entretien ménager des casernements sont reconduits pour 2009 à hauteur de 9,5 millions d’euros. Ceux d’entretien courant s’élèvent à 55,7 millions d’euros, soit une augmentation de 35 % par rapport aux crédits ouverts en 2008. Les dépenses d’électricité, de fuel domestique et de gaz sont évaluées à 70 millions d’euros.

C. LES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT S’EFFONDRENT DANGEREUSEMENT

Les crédits d’investissement demandés pour 2009 s’élèvent à 304,9 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 297,3 millions d’euros en crédits de paiement. Au regard des dotations inscrites en loi de finance initiale pour 2008, ils régressent respectivement de 50,24 % et 23,07 %. En 2008, ils avaient déjà enregistré une baisse de 30,74 % et 17,34 %. Le rapporteur s’inquiète de cette chute brutale du niveau des investissements qui impose de différer certains programmes importants.

1. L’immobilier

Les crédits d’investissement réservés aux dépenses immobilières s’élèvent à 163,2 millions d’euros d’autorisations d’engagement – dont 141,2 millions d’euros au titre de la future LOPPSI – et 138,7 millions d’euros de crédits de paiement. Les crédits relevant du périmètre LOPPSI sont réservés à des opérations nouvelles de construction, dont celle d’une caserne à Mulhouse pour 32 millions d’euros sous procédure de financement innovant.

Au 1er juillet 2008, le parc immobilier de la gendarmerie est composé de 4 133 casernes comprenant 63 021 logements et 17 256 logements hors caserne. 726 casernes domaniales regroupent 33 138 logements et 29 883 logements sont répartis dans 3 407 casernes locatives.

Le tableau suivant précise le nombre d’unités-logement mises en chantier et livrées depuis 2002.

Nombre d’UL mises en chantier et livrées depuis 2002

 

Mises en chantier

Livraisons

Année

État

Collectivités territoriales et particuliers

Total

État

Collectivités territoriales et particuliers

Total

2002

468

470

938

502

498

1 000

2003

725

592

1 317

754

492

1 246

2004

757

517

1 274

536

796

1 332

2005

110

1 757

1 867

438

666

1 104

2006

156

2 450

2 606

152

817

969

2007

771

2 203

2 974

103

1 144

1 247

2008 (prévisions)

654 (1)

1 963

2 617

287

1 826

2 113

2009 (prévisions)

452 (2)

2 469

2 921

317

2 371

2 688

(1) Les opérations d’Issy-les-Moulineaux (siège de la DGGN) et de Lyon-Sathonay sont incluses à hauteur de 430 UL.

(2) L’AOT de Mulhouse est incluse à hauteur de 70 UL.

Source : ministère de la défense.

Le tableau ci-après retrace l’évolution de l’état du casernement entre le 1er janvier 2007 et le 1er janvier 2008.

Évolution de l’état du casernement entre le 1er janvier 2007 et le 1er janvier 2008

 

Parc considéré

Très bon

Bon

Mauvais

Vétuste

2007

2008

2007

2008

2007

2008

2007

2008

2007

2008

Casernes domaniales

734

726

83

75

351

357

190

196

110

98

 

 

11,30 %

10,33 %

47,82 %

49,17 %

25,88 %

27,00 %

15,00 %

13,50 %

Casernes locatives

3 368

3 386

450

501

1 933

1 903

752

754

233

228

 

 

13,00 %

14,80 %

57,00 %

56,20 %

23,00 %

22,27 %

7,00 %

6,73 %

Casernes mixtes (1)

18

18

0

0

15

12

3

6

0

0

 

 

0,00 %

0,00 %

83,00 %

66,66 %

17,00 %

33,34 %

0,00 %

0,00 %

(1) Casernes constituées d’une partie locative et d’une partie domaniale.

Source : ministère de la défense.

L’état général du casernement n’a pas évolué de manière significative, malgré la politique volontariste de remise à niveau du parc au moyen des dispositifs offerts par la précédente LOPSI. La contrainte budgétaire est trop forte pour permettre un progrès réel. Les dotations prévues pour l’entretien des casernements en 2009, 22 millions d’euros pour le titre 5, représentent 1/5 des moyens nécessaires aux termes des conclusions d’un diagnostic technique des emprises domaniales.

2. Les autres investissements significatifs

Les moyens dédiés à la réalisation de programmes informatiques et aux équipements de télécommunication représentent 16 % des autorisations d’engagement, mais près du quart des crédits de paiement. Ils permettront de financer les programmes suivants :

— un dispositif de vidéosurveillance sera déployé à l’occasion d’événements de grande ampleur. 7,25 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont dédiés à ce système ;

— l’infrastructure des moyens de communication (réseau RUBIS) sera modernisée, les relais radios rénovés et les réseaux étendus ;

— la réalisation de plusieurs programmes informatiques sera achevée (déploiement des terminaux informatiques embarqués). D’autres seront mis en œuvre : le système PERICLES, visant à améliorer le taux d’élucidation des infractions, et celui de lecture automatique des plaques d’immatriculation (LAPI).

L’équipement en moyens de mobilité fait l’objet d’adaptations conséquentes. S’agissant des capacités aériennes, le transfert d’une partie des missions de souveraineté outre-mer des armées vers la gendarmerie impose de les ajuster à ces nouvelles tâches. À cet effet, la gendarmerie commandera, en 2009, quatre hélicoptères de manœuvre d’occasion de type Super Puma. Plus de la moitié des crédits de paiement (36,36 millions d’euros) sont destinés au financement de la livraison de sept appareils EC 135, hélicoptères commandés dans le cadre de la première tranche d’acquisition d’aéronefs d’intervention et de surveillance. Les principales dépenses en matière de véhicules concernent l’acquisition (livraison) de motocyclettes et de véhicules polyvalents. Aucune commande ne sera effectuée en 2009. Le rapporteur s’interroge sur la prise en compte des mises à la réforme inévitables. La gendarmerie équipera également ses véhicules tout terrain de barrières latérales déployantes - dispositif de retenue autonome du public -, système développé par deux militaires de l’arme (l’adjudant-chef Jean Rennou et l’adjudant Patrick Urlacher). Cet équipement est destiné à renforcer la sécurité des EGM engagés dans des opérations de maintien de l’ordre et à faciliter la tenue d’espaces larges. Elle s’équipera également d’engins du génie d’aménagement (EGAME) permettant le dégagement d’obstacles et la libération d’axes ainsi que la réalisation de travaux de terrassement. La cible est de quatre engins acquis en quatre ans ; les crédits prévus en 2009 permettent de commander le premier. Destinés tant à la métropole qu’à l’Outre-mer, le rapporteur relève leur faible nombre et s’inquiète des moyens et des délais de projection de ces engins en cas de trouble majeur à l’ordre public dans une partie du territoire où aucun EGAME ne serait pré-positionné. La totalité des autorisations d’engagement, 78,2 millions d’euros, sont inscrits au titre de la LOPPSI. Les crédits de paiement s’élèvent à 63,3 millions d’euros ; seule une infime partie (0,6 million d’euros) relève de la LOPPSI.

L’équipement des personnels bénéficiera de 15 millions d’euros d’autorisations d’engagement (dont 5,4 millions d’euros au titre de la LOPPSI) et 23,3 millions d’euros de crédits de paiement (dont 1,8 million d’euros au titre de la LOPPSI). Ces moyens seront dédiés à la protection et la sécurité des personnels avec le renouvellement de 1 500 casques de maintien de l’ordre. 2 000 visières pare-balles et 5 000 gilets pare-balles seront aussi renouvelés. Enfin, 600 boucliers de maintien de l’ordre seront remplacés. Le rapporteur relève que, destinés aux personnels des EGM, soit environ 16 000 militaires, ces matériels ne représentent qu’une part limitée des équipements pourtant éprouvés sur le terrain. Compte tenu de l’évolution des menaces et du durcissement des opérations, et s’agissant de la sécurité des personnels, il s’assurera de l’adéquation de cet effort avec la réalité des besoins.

3. Des programmes majeurs sont sacrifiés

Les moyens budgétaires dont disposera la gendarmerie lui imposent de différer d’au moins deux années le programme de renouvellement des blindés et la poursuite de l’acquisition des hélicoptères de surveillance et d’intervention. Le parc de blindés étant particulièrement vétuste et la gendarmerie ayant besoin de disposer d’appareils biturbines pour le survol de zones habitées ou inhospitalières, ces deux programmes sont importants. Leur report est d’autant plus préoccupant que la conjoncture économique incertaine n’invite pas à l’optimisme.

Les actuels 153 véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG) sont vétustes et leur taux de disponibilité est particulièrement préoccupant depuis plusieurs années (il était de l’ordre de 50 % en 2005 pour ceux stationnés à Satory). Le directeur général de la gendarmerie a annoncé que 85 blindés, soit plus de la moitié du parc, resteraient opérationnels. Compte tenu du nombre d’engins pré-positionnés hors du territoire métropolitain, ce format est juste suffisant. Or, dans le cadre de violences urbaines ou d’opérations particulièrement dangereuses, l’utilisation de ces véhicules pourrait connaître d’autres applications.

La composante « surveillance-intervention » de la flotte d’hélicoptères de la gendarmerie est constituée d’Écureuil. Elle doit être renouvelée par des EC 135. L’échéancier de livraison prévoit l’entrée en flotte de trois appareils de ce type en 2008, sept en 2009, puis des deux derniers en 2010. La tranche conditionnelle de 25 appareils ne sera pas notifiée, comme il était prévu, en 2009. Cette décision impose le maintien en service sur une plus longue période d’une partie des Écureuil pour lesquels des opérations de maintenance lourde ont dû être programmées. Appareils monoturbines, ils bénéficient de dérogations particulières pour le survol des zones urbanisées. Ces dérogations devront impérativement être prolongées d’autant pour maintenir le potentiel opérationnel de ces machines. Le rapporteur s’inquiète de leur possible suspension en cas de durcissement des règles de navigabilité.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. —  AUDITION DE MME MICHÈLE ALLIOT-MARIE, MINISTRE DE L’INTÉRIEUR, DE L’OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, sur le projet de loi de finances pour 2009 (n° 1127) au cours de sa réunion du mardi 14 octobre 2008.

M. le président Guy Teissier. C’est avec le plus grand plaisir que nous recevons Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

Madame le ministre, vous étiez venue le 10 juin dernier pour évoquer devant nous l’avenir de la gendarmerie. L’audition d’aujourd’hui est consacrée à l’examen des crédits budgétaires, sachant que nous avons déjà entendu la semaine dernière le nouveau directeur général de la gendarmerie nationale, le général Roland Gilles – j’ai d’ailleurs trouvé cette séance particulièrement intéressante. Beaucoup d’entre nous l’ont interrogé sur ce qui nous tient le plus à cœur : le statut militaire des gendarmes. Cette arme est à bien des égards à la croisée des chemins. Nous examinerons d’ailleurs après le Sénat le projet de loi qui lui est dédié.

Au-delà des aspects budgétaires, je souhaiterais que vous évoquiez les conséquences de son placement, à compter du 1er janvier prochain, sous l’autorité du ministère de l’intérieur.

Enfin, beaucoup d’entre nous s’interrogent sur l’éventuelle révision des implantations territoriales et du format des brigades. Vous avez déjà annoncé la fermeture de quatre écoles de gendarmerie. Vous nous en direz sans doute davantage.

Le rapporteur pour avis, M. Alain Moyne-Bressand, vous interrogera plus avant sur tous ces sujets.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. C’est toujours avec grand plaisir que je réponds à vos invitations, non seulement pour me remémorer le passé mais surtout pour évoquer le présent. Puisque vous venez d’auditionner le général Gilles, j’évoquerai succinctement les problématiques budgétaires, après quoi je répondrai à vos questions.

La gendarmerie nationale assure la protection des Français en métropole comme outre-mer, sur 95 % du territoire national. Tous les Français sont attachés à cette institution qui satisfait leur besoin de sécurisation et de proximité humaine. Les crédits que vous lui accordez chaque année ont pour objectif de lui donner les moyens de mener ses missions.

Avant d’entrer dans le détail des chiffres, vous me permettrez de saluer une opération menée par les gendarmes qui a eu lieu ce matin même à Vitry-le-François. En juin dernier, cette commune avait connu des affrontements au cours desquels des violences avaient été perpétrées à l’encontre de gendarmes, de sapeurs-pompiers et de civils. Ce matin, vingt-huit personnes ont été interpellées et une demi-douzaine d’autres sont recherchées. Cette action est exemplaire de la façon dont j’entends mener les opérations de sécurité dans les zones difficiles. Que les délinquants ne s’y trompent pas, je suis déterminée à faire régner la loi, à faire respecter l’ordre. De tels agissements ne demeureront jamais impunis, même si la réponse doit être différée. Nous l’apportons quand nous l’avons décidé, c’est-à-dire une fois que les procédures sont sécurisées et que les enquêtes ont abouti. Les auteurs d’agissements délictueux seront toujours recherchés, interpellés et traduits devant la justice. Tels sont la mission et l’honneur des forces de l’ordre.

Le budget 2009 s’inscrit dans un environnement marqué par trois nouveautés.

Premièrement, le périmètre ministériel est élargi, avec le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur.

Deuxièmement, comme nous le demandions depuis des années, la planification budgétaire devient pluriannuelle, plus précisément triennale. Cela offre une visibilité extrêmement importante lorsqu’il s’agit d’organiser un corps aussi lourd que celui de la gendarmerie, qui implique un suivi sur plusieurs années. Cette planification sera articulée avec la future loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, la LOPPSI, valable quant à elle pour cinq ans. L’année 2009 sera la première année de cette budgétisation triennale et d’application de la LOPPSI.

Troisièmement, le contexte financier est exigeant, eu égard à l’obligation de redresser les finances publiques et de réduire le poids de la dette. Depuis plusieurs années, le produit de l’impôt sur le revenu sert à payer les intérêts de la dette, ce qui prive notre pays de moyens d’action et l’empêche de satisfaire à ses obligations internationales.

Dans ce cadre, le budget 2009 nous donnera les moyens d’affirmer nos ambitions au service de la protection des Français.

Ma première ambition est de rendre la gendarmerie encore plus moderne, de la centrer sur son cœur de métier, afin qu’elle assure encore mieux la protection des Français.

Moderniser la gendarmerie implique de moderniser les moyens mis à son service afin qu’elle puisse faire face aux évolutions de ses missions durant les cinq prochaines années. N’oublions jamais que la délinquance et les contraintes évoluent en même temps. La gendarmerie disposera donc l’an prochain, au titre du premier exercice de la LOPPSI, de 295 millions d’euros d’autorisations d’engagement.

Notre premier souci doit être d’assurer la protection des gendarmes eux-mêmes, ce qui conditionne leur efficacité. Plus de 5 millions d’euros seront par conséquent consacrés à l’acquisition d’équipements de protection, notamment de casques de protection, de visières pare-balles – lors des incidents de Villiers-le-Bel, un CRS a perdu un œil – et de gilets pare-balles. Mieux protégées, donc plus en confiance, les forces de gendarmerie assureront encore mieux leur mission.

Pour permettre aux gendarmes d’agir concrètement, nous devons utiliser tous les progrès technologiques qui peuvent être mis au service de la recherche et de l’élucidation. Une enveloppe de 47 millions d’euros sera donc consacrée au financement des progrès technologiques. L’accent sera mis sur les points suivants : le développement de la police technique et scientifique afin de moderniser les moyens employés sur la scène de crime  ; le développement de la vidéoprotection – élément à la fois de dissuasion et d’élucidation – ; la poursuite de l’équipement des véhicules en terminaux informatiques embarqués ; la lecture automatique des plaques d’immatriculation ; le déploiement de nouveaux systèmes de retransmission d’images par hélicoptère ; la modernisation de centres opérationnels départementaux. Tout cela permettra de mettre la gendarmerie à la pointe de la technologie.

J’attache aussi la plus grande importance aux conditions d’exercice du métier et au cadre de vie, car c’est une condition d’efficacité. L’immobilier obtiendra 141 millions d’euros pour permettre la construction de 452 logements et de locaux techniques associés. La gendarmerie nationale continuera à utiliser les montages innovants mis en œuvre depuis 2002 pour accélérer les projets de construction ou de rénovation d’équipements immobiliers. Sans un tel système nous enregistrerions un retard considérable ; si nous devions attendre chaque année que l’État dégage les moyens nécessaires pour payer en toute propriété les bâtiments, il est évident que nous n’aurions pas ce que nous avons. L’intervention des collectivités locales en cette matière nous permet donc de satisfaire nos besoins en logements. J’envisage du reste d’étendre ce système à la police. Par ailleurs, depuis trop longtemps, à cause de tensions sur les crédits de fonctionnement, la gendarmerie ne disposait pas de toutes les ressources nécessaires au paiement des loyers. J’ai pris des mesures qui devront nous permettre de faire face dans de meilleures conditions aux échéances des bailleurs.

Pour ce qui concerne l’outre-mer, je tirerai les conséquences de la réorganisation des forces armées prévues par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Les forces armées étant appelées à se recentrer et à quitter certains départements et territoires d’outre-mer, il incombera au ministère de l’intérieur d’assumer une partie des missions qu’elles remplissent actuellement. Pour que les gendarmes puissent exercer efficacement leurs missions outre-mer, je renforcerai la flotte d’hélicoptères de liaison de la gendarmerie et je la doterai d’hélicoptères de manœuvre. Pour des raisons financières, ces équipements seront autant que possible mutualisés avec la sécurité civile, qui dépend également du ministère de l’intérieur. La difficulté consiste à assurer le « tuilage », c’est-à-dire la correspondance entre le moment où les forces armées quitteront les territoires en question et celui où les moyens de la gendarmerie monteront en puissance. L’échéance qui m’a été fixée est 2012, mais j’entends parfois parler d’une anticipation, notamment en ce qui concerne les personnels de soutien de l’armée de terre et certains moyens aéroportés. Nous devrons être vigilants pour éviter des creux capacitaires.

Ma deuxième ambition est de recentrer l’action des gendarmes sur leur cœur de métier. Je parle de cette thématique depuis plusieurs années car les gendarmes doivent exercer les missions qui ont motivé leur engagement et pour lesquelles ils ont été formés. Actuellement trop de missions sont effectuées par les gendarmes alors qu’elles ne font pas réellement partie des motivations qui ont été les leurs quand ils se sont engagés : c’est le cas des gardes statiques.

Même si des progrès ont été obtenus en la matière, trop de gardes statiques sont encore effectuées au profit du ministère de la justice. Les transfèrements de détenus sont aussi en cause. J’ai saisi la garde de sceaux et des groupes de travail ont été constitués pour passer un cap supplémentaire dans la réduction de ces charges.

De même, les missions de garde et d’escorte liée aux cinq centres de rétention administrative (CRA) gérés par la gendarmerie seront progressivement transférées à la police aux frontières (PAF), avec pour objectif un transfert total en 2010. Cette solution ne me satisfait cependant pas, car la présence de gendarmes ou policiers n’est pas nécessaire pour assurer au quotidien la garde des CRA, très consommateurs en personnels ; une autre formule pourrait être trouvée – on peut envisager de limiter à un encadrement par les forces de l’ordre, sachant que la possibilité d’intervention doit demeurer. Je vous propose que nous y réfléchissions ensemble.

Le partage entre les zones de police et les zones de gendarmerie doit être clarifié. La présence de la gendarmerie en zone de police nationale, où elle n’exerce aucune mission de sécurité publique, doit être réduite au strict nécessaire.

Pour tenir compte des évolutions démographiques – notamment de l’extension des plus grandes villes, dont les périphéries se transforment en cités dortoirs – et du déplacement des bassins de délinquance, les ajustements à la marge de l’organisation et des zones de compétence de la police et de la gendarmerie seront poursuivis.

Ces ajustements donneront lieu à une concertation étroite entre les préfets et les élus concernés.

Enfin, je veux décharger les gendarmes de missions administratives qui ne correspondent pas au métier pour lequel ils ont été formés mais auxquels ils sont affectés, faute de recrutement d’autres personnels. Je veux y substituer des agents administratifs qui, eux, se seront engagés pour accomplir ces tâches. On n’entre pas dans la gendarmerie pour être agent immobilier ou secrétaire administratif. J’envisage également que des emplois administratifs soient réservés aux épouses des gendarmes – en zone rurale, elles éprouvent souvent de grandes difficultés à trouver un emploi. Cela permettra aussi d’améliorer le pouvoir d’achat des familles.

L’objectif est donc, d’ici à 2013, d’obtenir un renforcement significatif des personnels civils au sein de la gendarmerie. De 2 000 aujourd’hui, leur nombre passera à 5 000 au moins entre 2009 et 2013. Dès l’année prochaine, 600 emplois seront ainsi transformés.

Nous disposerons des moyens financiers, humains et sociaux nécessaires pour atteindre ces objectifs.

S’agissant des moyens humains, nous devons mettre en application la règle s’imposant à l’ensemble de la fonction publique : le non-remplacement d’un agent partant à la retraite sur deux. Compte tenu des spécificités de la mission du ministère, j’ai cependant obtenu que cette norme forfaitaire ne soit pas appliquée aveuglément aux forces de sécurité : en 2009, elle sera ramenée à 36 % des départs. En nous recentrant sur notre cœur de métier, nous pourrons sans difficultés majeures procéder aux adaptations nécessaires pour absorber ce non-remplacement. J’ai demandé au directeur général de la gendarmerie nationale de me faire des propositions à cet effet.

Par ailleurs, j’ai souhaité revoir dès 2009 le système de formation de la gendarmerie nationale, pas uniquement dans un souci d’économies mais aussi pour des motifs de fond. Nous disposions jusqu’à présent de huit écoles de gendarmerie, dispersées sur le territoire, hébergées dans des locaux présentant parfois des lacunes importantes, notamment sur le plan technique. J’ai décidé de moderniser les conditions de formation des gendarmes en recentrant le dispositif autour de quatre pôles, intégrant toutes les technologies et offrant tous les moyens d’exercice et d’entraînement requis.

En conséquence, quatre écoles fermeront : Montargis, Le Mans, Libourne et Châtellerault. Pour les personnels et les élus locaux concernés, ce n’est pas agréable, j’en ai parfaitement conscience, mais je suivrai la même méthode que pour la restructuration de GIAT, au terme de laquelle les personnels ont été reclassés et les communes ont bénéficié de compensations pour retrouver leur dynamisme. Les personnels seront pris en charge selon leur statut : les ouvriers d’État bénéficieront des mesures « défense » traditionnelles ; les autres personnels civils relèveront des mesures « défense » ou des mesures « intérieur » ; les personnels militaires pourront demander à bénéficier d’un pécule ou ils obtiendront une nouvelle affectation qui donnera lieu à des indemnités.

J’ai reçu tous les élus des communes touchées par les fermetures. J’ai obtenu de Mme Christine Lagarde qu’elle mette à ma disposition M. Jean-Pierre Aubert – qui s’était distingué dans le dossier GIAT – afin d’identifier et de mettre sur pied les projets de remplacements possibles. La plupart des implantations concernées présentent l’avantage d’être situées en cœur de ville, ce qui favorise les projets, qu’il s’agisse de logements sociaux ou d’activités industrielles ou artisanales.

La présence des forces de gendarmerie sur le réseau routier et autoroutier doit être réorganisée. Je constate en effet que les gendarmes sont surtout présents sur les autoroutes, c’est-à-dire là où se produit le moins d’accidents. Leur action doit être accentuée sur le réseau routier secondaire, où se produit le plus grand nombre d’accidents. Les efforts accomplis depuis 2002 ont tout de même permis de diviser par deux le nombre de morts sur la route. J’ai demandé au directeur général de la gendarmerie nationale de me transmettre ses propositions pour améliorer la présence des gendarmes, ce qui doit permettre d’obtenir de meilleurs résultats avec des effectifs réajustés.

Au moment où la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) s’engage dans d’importantes réorganisations, il est nécessaire de mobiliser tous les personnels. En tant que ministre de la défense, j’avais pris des engagements ; je continuerai de les tenir en tant que ministre de l’intérieur.

En trois ans, le plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) rénové permettra de créer 1 000 postes de major et 900 postes d’adjudant supplémentaires.

La nouvelle grille indiciaire de la défense sera progressivement mise en application. Elle bénéficiera naturellement aux militaires de la gendarmerie.

Les rémunérations profiteront du retour des économies réalisées par les départs à la retraite non remplacés. J’ai même obtenu que ce retour ne soit pas de 50 %, conformément à la règle, mais bien plus. Il me paraît normal de soutenir les personnels placés sous mon autorité, auxquels je demande beaucoup et qui font beaucoup d’efforts.

Les moyens dont bénéficiera la gendarmerie en 2009 lui permettront d’exercer ses missions au service des Français. Rattachée au ministère de l’intérieur, elle demeure une institution militaire. Le projet de loi relatif à la gendarmerie qui vous sera soumis après son examen au Sénat garantira l’équilibre des missions avec la police. Je souhaite que les moyens des forces soient mutualisés au service de la sécurité mais que chacun exerce sa mission en se sentant parfaitement à l’aise dans son institution.

Continuons à travailler dans le même esprit : les décisions ne sont pas prises isolément par la ministre ou par les directions générales ; nous participons tous à la définition de la réponse de sécurité attendue par nos concitoyens, en liaison avec les élus locaux. Je serai donc toujours à l’écoute de vos avis et de vos suggestions.

M. le président Guy Teissier. Le général Gilles nous a parlé d’équilibrage budgétaire entre les deux forces de sécurité que sont la police et la gendarmerie. Il nous a dit que l’équilibre devrait être atteint vers 2011 ou 2012. D’ici là, pensez-vous disposer chaque année d’un budget vous permettant de parvenir à cet équilibre ? Comment le Gouvernement compte-t-il s’y prendre ? Cet objectif sera-t-il inscrit dans la LOPPSI ?

Les épouses de gendarmes qui prendront les emplois administratifs dont vous avez parlé seront-elles fonctionnaires du ministère de l’intérieur ? Vous nous annoncez que les effectifs des personnels civils passeront de 2 000 à 5 000. Nous mettrons cette information en valeur devant les syndicats, que nous recevons demain. Ne craignez-vous pas d’être confrontés à des difficultés lorsque vous devrez gérer les personnels civils déjà en fonction, qui relèvent de la défense nationale, et ceux à venir, qui relèveront du ministère de l’intérieur, dont le statut est plus favorable ?

Mme le ministre. J’ignore à quoi correspond l’idée d’« équilibre » à laquelle vous faites allusion. Cela n’a guère de sens car les effectifs, l’organisation et les équipements de la gendarmerie diffèrent de ceux de la police.

M. le président Guy Teissier. Mais la gendarmerie exprime des revendications catégorielles – bonifications, primes, etc. – visant à son alignement sur la police nationale.

Mme le ministre. Vous parlez là de la parité. Le PAGRE tend effectivement à un alignement des carrières de la gendarmerie sur celles de la police, dont le plan « corps et carrière » a pris un peu d’avance. Parvenir à une similitude est impossible car la nature des forces et les contraintes auxquelles elles doivent répondre sont différentes. Avec l’accord du directeur général de la gendarmerie nationale et du directeur général de la police nationale, j’ai installé une commission chargée de considérer tous les éléments constitutifs de la parité : rémunérations, primes, conditions de travail et d’avancement, etc. Un rapport a été rédigé puis soumis à deux personnalités indépendantes ainsi qu’aux syndicats de la police et au Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie. Il s’est avéré que les gendarmes, en début de carrière, étaient avantagés par rapport aux policiers, la situation se rééquilibrant ou s’inversant par la suite dans un certain nombre de cas. Lorsque c’est possible, nous nous efforçons de remettre les situations à niveau, dans un souci d’équité et pour que chacun se sente bien. Mais nous maintenons des différences : les gendarmes, par exemple, sont logés en contrepartie de leur obligation de disponibilité, contrairement aux policiers, qui en sont dispensés.

J’ai demandé aux deux directeurs généraux de prévoir la possibilité de passer de l’une à l’autre force, sous réserve de suivre une mise à niveau. Personne ne pourra plus se plaindre d’être défavorisé car chacun aura la possibilité de rejoindre l’autre corps.

M. le président Guy Teissier. Je parlais surtout de l’aspect financier.

Mme le ministre. Le budget de la gendarmerie n’égalera pas à celui de la police, ne serait-ce que parce que ses effectifs sont inférieurs.

M. le président Guy Teissier. Il ne s’agit pas de revendiquer des budgets égaux ; chacun connaît effectivement la disparité des effectifs. Mais disposerez-vous des moyens pour atteindre la parité réclamée par les deux corps ?

Mme le ministre. Je viens de vous répondre. Ce matin, nous avons proposé une enveloppe en faveur de la police pour compenser en particulier les disparités entre la police et la gendarmerie, en raison des décisions prises fin 2007 au profit des militaires. Le rapport dont je vous ai parlé, qui, si je ne me trompe, vous a été communiqué, permet d’établir les références de la parité.

Mon objectif n’est pas d’offrir des postes de fonctionnaire pour les conjoints mais de leur proposer des contrats, ce qui offre beaucoup plus de souplesse. Sinon, en cas de mutation du conjoint gendarme, nous nous trouverions confrontés à toutes les difficultés que nous connaissons aujourd’hui. Je ne compte pas transformer tous les emplois civils en emplois sous contrat mais un certain volant de contrats permet de dégager des gendarmes de tâches purement administratives tout en offrant un travail et une rémunération à des conjoints ou à des conjointes. Je vous signale d’ailleurs que, dans les zones difficiles et en région parisienne, je fais la même chose depuis cette année pour les conjoints de policier, avec l’accord des syndicats.

Quant aux personnels civils de la défense, ils auront le choix soit de rester sous la tutelle du ministère de la défense, soit de rejoindre celui de l’intérieur. Le schéma a déjà été exposé et ne semble pas présenter de difficulté particulière.

M. Alain Moyne-Bressand. Nous voulons rappeler notre attachement et celui du peuple de France à sa gendarmerie. Nous étions côte à côte, madame le ministre, après le drame du petit Valentin, lorsque sa maman a fait l’éloge de la gendarmerie. Mais il faut évoluer, et c’est ce que nous faisons.

Il me semble que nous connaissons mal la police nationale et son organisation. Puisque la gendarmerie sera rattachée organiquement au ministère de l’intérieur à compter du 1er janvier 2009, il serait nécessaire que nous obtenions des données précises sur la police. Pourriez-vous organiser une présentation afin que nous puissions mieux nous imprégner de ses réalités ?

Au cours de ma mission relative aux transfèrements et extractions, je me suis rendu compte des efforts accomplis – 7 000 policiers et gendarmes sont mobilisés au quotidien pour ces tâches – et de la possibilité d’accomplir des économies. Des rumeurs ont circulé à propos de la suppression de brigades ou d’escadrons de gendarmerie mobile. Qu’en est-il vraiment ? Existe-t-il un calendrier de mise en œuvre ?

Le Parlement n’a pas encore été saisi du projet de LOPPSI. Quand sera-t-il déposé sur le bureau de l’Assemblée ?

En matière d’équipement, aucun crédit n’est prévu pour le renouvellement des blindés, programme pourtant d’actualité depuis plusieurs années, ni pour l’affermissement de la tranche conditionnelle d’hélicoptères.

Tout le monde s’accorde à dire que les blindés de la gendarmerie sont à bout de souffle. Or ces matériels sont utiles en OPEX – en opérations extérieures – et outre-mer.

Le format des moyens aériens de la gendarmerie a été établi pour répondre aux besoins tout en tenant compte des contraintes techniques et réglementaires. Le grand intérêt des hélicoptères n’est plus à démontrer, qu’ils soient engagés pour l’accomplissement des missions dévolues à la gendarmerie ou au profit de la police, un protocole permettant de mettre à la disposition de cette dernière jusqu’à 800 heures de vol en 2008. Comment répondre aux besoins en différant l’équipement en appareils biturbines ? Les dérogations dont bénéficient actuellement les appareils monoturbines seront-elles reconduites ? De quelles garanties disposez-vous en la matière ?

Mme le ministre. Je vous remercie pour votre attachement à la gendarmerie et à son statut militaire.

Le rapprochement entre la gendarmerie et la police est effectif depuis 2002. Je suis prête à vous parler de l’organisation de la police – c’est à vous, monsieur le président, avec votre homologue de la Commission des lois, d’organiser une telle réunion. Au-delà d’une meilleure fluidité, ce rapprochement nous permettra de mutualiser de moyens.

Le RAID – Recherche, assistance, intervention, dissuasion – a participé pour la première fois à des exercices communs – au Stade de France et à Satory – avec le GIGN, le groupe d’intervention de la gendarmerie nationale. Ces deux unités d’élite extrêmement efficaces sont maintenant capables de faire face soit à une multiplicité d’événements, soit à un événement majeur.

Des économies seront automatiquement obtenues. Pourquoi conserver, par exemple, deux centres de formation cynophile, un pour la gendarmerie et un pour la police ? Pourquoi conserver deux centres d’apprentissage de la plongée ? Le choix d’équipements identiques, quand cela est possible, permettra également d’en mutualiser le soutien et améliorera en outre notre capacité de négociation avec les industriels, ce qui nous permettra d’obtenir des baisses de prix significatives.

Je veux alléger les gendarmes et les policiers de tâches étrangères à leur cœur de métier comme les gardes et les escortes. Songez que la surveillance des CRA permettra d’économiser 853 personnes. La suppression de cette mission au sein de la gendarmerie entraînerait donc corrélativement la suppression de plusieurs escadrons de gendarmerie mobile. Nous devons toutefois retarder l’opération pour cinq CRA car la PAF n’est pas en mesure d’assurer le remplacement immédiatement  ; celui-ci interviendra en douceur, en 2009 ou 2010. De même, les ajustements entre surveillance autoroutière et surveillance routière entraîneront la relocalisation d’effectifs au plus près des missions. Quelques adaptations territoriales seront aussi vraisemblablement nécessaires.

Les engins blindés de la gendarmerie sont relativement vieux. Le marché, qui avoisine 100 millions d’euros, ne peut être confirmé car nous n’en avons pas la possibilité budgétaire. De toute façon, le renouvellement n’était prévu que pour 2012. Il sera reporté de deux ans, à 2014. Un peu plus d’une centaine d’engins sont encore en état de rouler. D’autre part, nous étudions des solutions complémentaires nous permettant d’assurer la totalité de la commande opérationnelle en cas de besoin.

Les hélicoptères en service sont tout de même beaucoup plus récents que les blindés. Le renouvellement de la flotte a été décidé il y a plusieurs années et des commandes sont en cours. Les EC135 et des EC145 sont particulièrement bien adaptés aux opérations de police et de sauvetage. Les achats seront éventuellement étalés dans le temps mais nous avons toujours la volonté de renouveler le parc. Nous maintiendrons en service des appareils monoturbines deux ou trois années au-delà de l’échéance prévue. J’ajoute qu’il est prévu de dégager 77 millions d’euros en 2009 afin de doter l’outre-mer de quatre hélicoptères de manœuvre.

La LOPPSI 2 est prête depuis un an, pour ce qui concerne tant son volet budgétaire que son volet juridique. Cela dit, compte tenu des priorités économiques, sociales et environnementales, aucun créneau n’a été trouvé pour soumettre ce texte au Parlement. Je demande depuis longtemps qu’il soit examiné le plus vite possible.

M. le président Guy Teissier. Le remplacement des gendarmes par des fonctionnaires de la PAF pour garder les CRA générerait-il des économies ?

Mme le ministre. Pour les gendarmes, c’est certain ! Mais une autre économie pourrait être obtenue si une part importante de la surveillance des CRA était externalisée, la PAF se contentant d’assurer l’encadrement. Cela dépendra de vous puis du verdict du Conseil constitutionnel. Je précise qu’il s’agit la plupart du temps de présence statique pure et simple.

M. le président Guy Teissier. Le transfert à la PAF ne me choque pas. Cela correspond mieux à son cœur de métier qu’à celui de la gendarmerie.

M. Philippe Folliot. Madame le ministre, le fait que vous nous présentiez aujourd’hui le budget de la gendarmerie s’inscrit dans le droit fil du Livre blanc et de son concept de continuum entre sécurité intérieure et sécurité extérieure.

La précédente LOPSI affichait un objectif de parité entre police et gendarmerie. En tout état de cause, l’annualisation a bien été réalisée côté police mais, malheureusement, pas côté gendarmerie. Les perspectives offertes par la prochaine LOPPSI seront-elles meilleures ? le schéma d’avancement sera-t-il comparable dans la police et dans la gendarmerie ?

La présence de la gendarmerie en zone de police doit effectivement être réduite à la stricte nécessité, et vice-versa. S’agissant des secours en haute montagne, ne serait-il pas plus économique et plus efficace de revoir la répartition, soit en plaçant tous les massifs sous le couvert de la gendarmerie, soit en en transférant une partie sous l’autorité des compagnies républicaines de sécurité (CRS) ?

M. Jean-Claude Viollet. Je ne m’étendrai pas sur le projet de loi portant diverses dispositions relatives à la gendarmerie car nous aurons l’occasion, je crois, d’en débattre plus longuement. Simplement, la question de la doctrine d’emploi ne saurait, de mon point de vue, être déconnectée de celle du statut.

À ma connaissance, pour quelques mois encore, l’exécutif détient la maîtrise totale de l’ordre du jour parlementaire. La loi de programmation militaire, la LPM, a été adoptée le 10 octobre par le conseil de défense et devrait être adoptée en conseil des ministres le 29 octobre puis transmise au Parlement avant l’examen du budget de la défense pour 2009, le 7 novembre. Il serait cohérent que nous puissions examiner la LOPPSI parallèlement à la LPM. Quand sera-t-elle déposée sur le bureau de l’Assemblée ?

Le schéma directeur en matière d’emploi et de moyens des formations aériennes de la gendarmerie, le FAG 2015, dessine un processus long de remontée en capacité des forces de gendarmerie. Je rappelle que les Alouettes III et les Écureuil, qui constituent le gros du parc, ont respectivement quarante et trente ans. En 2008, sept livraisons devaient intervenir : quatre EC145 et trois EC135. Le compte y est-il ? Par ailleurs, vous nous dites que la commande de la tranche conditionnelle de vingt-cinq appareils ne passe pas. Je suis plutôt favorable à la mutualisation mais le trou capacitaire de l’armée de terre est tellement gigantesque que ses moyens ne pourront guère être utilisés. Nous risquons une rupture capacitaire.

J’ai toujours été partisan des réformes et j’ai soutenu la création des communautés de brigades. Mais les réformes ne peuvent être subies ni même consenties ; elles doivent être partagées, ce qui requiert un maximum de transparence et de concertation.

Mme le ministre. Lors de la préparation de la LOPSI, j’avais demandé l’annualisation mais elle m’avait été refusée. La LOPPSI sera annualisée, ce qui facilitera le contrôle.

En zone de montagne, notre objectif est de mieux coordonner l’action de la police, celle de la gendarmerie mais aussi celle de la sécurité civile. Nous avons déjà obtenu une meilleure coordination entre les pompiers et les SAMU, les services d’aide médicale d’urgence. Il faut tenir compte des spécificités de chaque site et de son histoire, le tout étant de faire cesser les redondances et les gaspillages mais aussi, de l’autre côté, de ne pas laisser de trous.

La doctrine d’emploi de la gendarmerie demeure inchangée : les gendarmes restent des militaires. Le seul changement concerne la réquisition, pour une raison simple : la gendarmerie passant sous l’autorité directe du ministère de l’intérieur, le recours à la réquisition n’est plus nécessaire. Mais les conditions d’ouverture du feu par les gendarmes ne changent pas.

Vous souhaiteriez disposer de la LOPPSI en même temps que de la LPM. Les arbitrages ont été rendus tardivement et nous attendons encore l’avis de la commission nationale de l’informatique et des libertés. Le conseil des ministres devrait être saisi du texte au plus tard à la mi-décembre. Dans la mesure où il n’est pas certain que vous puissiez faire passer la LPM avant la fin de l’année, peut-être les deux textes pourront-ils effectivement être examinés ensemble.

L’appui mutuel des hélicoptères de la gendarmerie et de la sécurité civile ne pose aucun problème. En cas d’incident majeur, les armées interviendront, mais je plaide pour que nous ne soyons pas démunis. Le report des acquisitions nous fait économiser une somme non négligeable : 15 % du budget annuel de maintien en conditions opérationnelles. Nous nous efforçons de prendre les décisions les plus raisonnables pour maintenir la qualité opérationnelle.

M. Philippe Vitel. La mise en place de systèmes de visioconférence dans toutes les prisons limiterait considérablement le nombre de convoyages de détenus. Un plan est-il défini ? Des financements sont-ils prévus ?

Depuis le 11 septembre 2001, nous sommes pratiquement en alerte Vigipirate permanente. Comment le surcoût qui en découle est-il ventilé ? Est-il inscrit sur une ligne budgétaire particulière et régularisé en fin d’exercice ?

Je pense que la commission de la défense devrait plus que jamais être transformée en commission de la défense et de la sécurité nationale.

M. le président Guy Teissier. Il s’agit d’un souhait ancien, dont Mme Alliot-Marie a déjà entendu parler lorsqu’elle était ministre de la défense.

M. Jacques Lamblin. Je souligne l’intérêt de deux mesures très pragmatique : le redéploiement de la gendarmerie le long des routes secondaires, qui répondra à un problème réel et délivrera un message clair aux usagers de la route ; la création de postes pour les conjoints et conjointes de gendarme, réclamée de façon récurrente.

L’essentiel de ma circonscription est situé en zone de gendarmerie, à l’exception de deux îlots de zone de police. Malgré l’excellence des relations entre les deux services, de petits problèmes surviennent à la frontière entre les zones. Surtout, cette juxtaposition entraîne l’organisation de gardes de nuit et de permanences en doublon. La mutualisation du commandement devrait permettre d’améliorer le rendement de l’ensemble. La réorganisation entre zones de police et zones de gendarmerie effectuée il y a quelques années est-elle définitivement figée ou bien existe-t-il encore des possibilités d’amélioration ?

M. Patrick Beaudouin. Le Livre blanc a conclu à la nécessité d’élargir le contenu de la Journée d’appel de préparation à la défense (JAPD). Avez-vous mené une réflexion en ce qui concerne la sécurité ? Vos services comptent-ils y participer ? Compte tenu de la réforme de la carte militaire, la gendarmerie et la police pourront-elles accueillir des JAPD ?

M. Patrice Calméjane. Même si ma circonscription est située en zone de police, je peux apprécier le travail de la gendarmerie car l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale y est localisé. J’espère que ce service ne subira pas de réduction d’effectifs ni de réorganisation – n’ayant pas entendu de bruit à ce sujet, je ne me fais pas de souci.

À l’initiative du préfet de la Seine-Saint-Denis, un service spécialisé dans la lutte contre l’habitat indigne a été constitué et confié à cinq gendarmes. Depuis sa mise en place, le nombre de procédures a été multiplié par cinq. Je suis favorable à cette spécialisation des services, dans l’intérêt de nos concitoyens. Est-il envisagé de reproduire ce type d’unité dans des départements où la situation est difficile ?

On commence à entendre parler du paiement de certains services dits « non nécessaires » apportés par les sapeurs-pompiers de Paris. Est-ce envisagé ? Il est vrai que les interventions des pompiers en région parisienne sont arrivées au point de saturation. Or ils dépendent de l’armée mais aussi, d’un point de vue budgétaire, du ministère de l’intérieur et même des collectivités locales.

Mme Françoise Olivier-Coupeau. L’article 2 du projet de loi tend à supprimer la réquisition. N’est-il pas paradoxal de réaffirmer le caractère militaire de la gendarmerie tout en prenant le risque de la banaliser ? La réquisition est tout de même une des caractéristiques du statut militaire. Les préfets, actuellement donneurs d’ordres, pourraient demain se comporter comme des chefs hiérarchiques. La chaîne de commandement de la gendarmerie, organisée selon un schéma militaire, ne risque-t-elle pas d’être remise en cause ? S’agissant du maintien de l’ordre, le fait de mettre dans la même main le pouvoir de décider et la capacité d’exécuter ne va-t-il pas à l’encontre d’un principe républicain fondateur ?

Mme le ministre. À propos des transfèrements et de la visioconférence, le travail conjoint mené avec la justice dès le printemps n’a pas abouti. Un nouveau rapport, rédigé depuis lors, conclut notamment à l’intérêt de la visioconférence. Le principe doit être de facturer les transfèrements, ce qui incitera à faire avancer la question.

Nous sommes repassés à Vigipirate rouge depuis les attentats de Londres et de Madrid, et il n’est pas question, actuellement, de revenir sur cette décision. Les ministères de la défense et de l’intérieur paient chacun de leur côté les surcoûts induits par cette situation, mais ceux-ci ne sont pas identifiés car les tâches font partie du travail de protection de la gendarmerie, de la police et des forces armées.

La présence des gendarmes sur le réseau routier secondaire est tout à fait nécessaire. Des premières propositions m’ont été remises par la DGGN. Les propositions que m’a faites la DGGN en la matière ne m’ont pas paru suffisamment nettes et je lui ai demandé de les préciser. Nous allons commencer dès l’année prochaine car le besoin existe : je veux faire baisser davantage le nombre de tués et de blessés sur les routes secondaires.

Je me réjouis de l’approbation que recueille ma proposition de deuxième revenu en faveur des conjoints de gendarmes. Le dispositif ne concernera pas une population énorme mais adressera un signal fort.

La réorganisation des zones de police et des zones de gendarmerie n’est pas figée car, je le répète, la démographie et la délinquance évoluent en permanence. La réorganisation sera limitée mais des besoins de réajustement se feront toujours sentir. Nous devons être animés par le souci d’être le plus efficace possible au meilleur coût possible.

La logique du Livre blanc, consistant à traiter ensemble la défense et la sécurité nationale, est une innovation qui correspond à la réalité : il n’existe plus de frontière entre la menace intérieure et la menace extérieure, qu’il s’agisse du terrorisme, des trafics ou de la criminalité sur Internet. J’ignore si la commission de la défense et celle des lois seront un jour réunies mais, même si des spécificités demeurent, nous sommes obligés d’aborder les problèmes au moins dans une optique de continuité.

Je suis tout à fait favorable à ce que la gendarmerie accueille des JAPD. Il est crucial que les services chargés de la sécurité s’occupent aussi des jeunes, à travers la JAPD, les centres défense deuxième chance et les réservistes citoyens jeunes. Je m’inspirerai d’ailleurs de ces dispositifs pour le ministère de l’intérieur. Les jeunes ont besoin de comprendre que ce sont la règle et l’autorité qui permettent de vivre ensemble. Les gendarmes et les policiers doivent faire leur métier, ne pas se substituer aux éducateurs, mais être ouverts pour expliquer leur action.

Des crédits prévoient de développer la police scientifique et technique, afin qu’elle puisse être employée dans tous les cas où cela s’avère nécessaire.

Il n’est pas question de rendre payants certains services des sapeurs-pompiers mais rien n’empêche de poursuivre, sur la base de recours juridictionnels classiques, des personnes qui ont fait dépenser de l’argent aux pouvoirs publics sans justification, voire qui ont mis la vie d’autrui en danger. En revanche, j’ai expliqué à la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France que beaucoup avait été fait ces dernières années en faveur de bâtiments et du matériel des services départementaux d’incendie et de secours pour rattraper le retard, mais qu’il faudrait dorénavant se montrer raisonnable en matière de financements.

Je ne crois pas que la réquisition entraîne un risque de banalisation. Il s’agissait en réalité d’un legs de la Révolution tenant à une organisation différente, aucunement d’un blanc-seing pour le commandement de la force. Sa suppression ne porte en rien atteinte au statut militaire ni à l’exercice du commandement. Les préfets ne dirigent pas les CRS ; c’est un métier qu’ils ne sauraient faire. Il faut savoir distinguer l’analyse de la situation, la décision d’emploi de la force et le commandement sur le terrain.

M. le président Guy Teissier. Je vous remercie, madame le ministre.

——fpfp——

II. —  AUDITION DU GÉNÉRAL ROLAND GILLES, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Roland Gilles, directeur général de la gendarmerie nationale, sur le projet de loi de finances pour 2009 (n° 1127), le mercredi 8 octobre 2008.

M. le président Guy Teissier. J’ai le grand plaisir d’accueillir maintenant le général Roland Gilles, nouveau directeur général de la gendarmerie nationale, que nous connaissons depuis longtemps.

Cette audition sera consacrée aux crédits dont disposera la gendarmerie en 2009, sachant que celle-ci sera placée sous l’autorité du ministère de l’intérieur à compter du 1er janvier prochain, sans toutefois perdre sa spécificité militaire, à laquelle nous sommes tous ici très attachés.

Vous détaillerez les évolutions des crédits de paiement et des autorisations d’engagement.

Au-delà des aspects strictement budgétaires, j’aimerais que vous nous disiez quelques mots de l’éventuelle révision des implantations sur le territoire national.

Par ailleurs, le futur projet de loi relatif à la gendarmerie sera examiné fin octobre au Sénat puis fin novembre à l’Assemblée. Peut-être pourrez-vous aussi l’évoquer.

Notre rapporteur pour avis, M. Alain Moyne-Bressand, vous interrogera sans doute plus avant sur tous ces sujets.

M. le général Roland Gilles. Je suis ravi de m’exprimer devant vous, dans le cadre de mes nouvelles fonctions, à propos du projet de budget de la gendarmerie pour 2009 mais également, en cette période sensible de transition, du passage de la tutelle organique du ministère de la défense au ministère de l’intérieur et du futur projet de loi sur la gendarmerie – c’est capital car le précédent texte législatif date de 1798.

En 2009, la gendarmerie nationale connaîtra des mutations notables. Les défis à relever ne manqueront pas, à commencer par celui du maintien du statut militaire et de la culture militaire. Au 1er janvier 2009, si le projet de loi déposé est adopté, la gendarmerie sera placée sous l’autorité du ministère de l’intérieur. Le Président de la République l’a annoncé solennellement à la Grande Arche de la Défense, le 29 novembre 2007, devant 1 800 gendarmes et policiers. Ce projet de loi vise un subtil équilibre entre, d’une part, le respect de l’identité de l’arme et son attachement à la communauté militaire et, d’autre part, son intégration au ministère de l’intérieur, qui renforcera les liens fonctionnels avec la police nationale.

Dans cet équilibre, le ministère de la défense conservera des attributions à l’endroit de la gendarmerie ainsi que des ressources budgétaires, ayant notamment trait aux gendarmeries spécialisées – gendarmerie maritime, gendarmerie de l’air, gendarmerie de l’armement et gendarmerie de la sécurité des armements nucléaires. De la même manière, le ministère de la défense continuera de soutenir la gendarmerie dans différents domaines traditionnels. Le 25 juillet dernier, les deux ministres ont signé un accord-cadre sur ces soutiens, comportant trente-cinq protocoles particuliers.

Nous devrons être particulièrement attentifs à la recherche d’un équilibre dans cette nouvelle posture institutionnelle. Le placement de la gendarmerie sous l’autorité du ministre de l’intérieur est une mesure nécessaire qui permettra, d’une part, de renforcer la cohérence de la mission sécurité et, d’autre part, de franchir un nouveau cap dans la coordination opérationnelle avec la police amorcée depuis 2002 et dans la mutualisation des outils. L’intégration d’une force armée dans un ministère civil nécessite toutefois des mesures d’ajustement. La spécificité de la gendarmerie ne doit pas faire obstacle à une intégration harmonieuse dans son nouvel environnement mais, dans le même temps, elle doit être suffisamment prise en compte pour que son caractère militaire, sa culture propre et ce qui fait son efficacité opérationnelle soient préservés.

L’année 2009 sera également charnière sur le plan budgétaire. Le projet de loi de finances pour 2009 illustre tout d’abord la participation de la gendarmerie à l’effort gouvernemental de maîtrise des dépenses publiques. Il nous appartiendra de faire en sorte que cet effort s’effectue en pérennisant la qualité du service public de sécurité rendu à tous nos concitoyens. En 2009, nous mettrons en œuvre des réformes permettant à la gendarmerie de remplir son contrat opérationnel. Nous devons être présents au rendez-vous qui nous est fixé.

Le bilan 2007 de la gendarmerie est intéressant et mérite d’être souligné.

La tendance observée depuis 2002 en matière de lutte contre la délinquance s’est confirmée pour la gendarmerie : dans nos zones de compétence, la baisse de la délinquance générale s’est accentuée, avec un recul de 2,2 % des faits délictueux enregistrés. La baisse, depuis 2002, atteint 15,1 %. Nous nous rapprochons tangentiellement du seuil symbolique du million de faits délictuels, soit le niveau atteint en 2000.

La régularité dans le temps de cette évolution est à mettre en parallèle avec le maintien de nos indicateurs d’activité. Ainsi, notre taux global d’élucidation des affaires est de 41,1 %, niveau pratiquement équivalent à celui de l’année passée. Cet été, la gendarmerie s’est illustrée dans la résolution d’affaires d’homicides emblématiques qui ont ému l’opinion publique, en particulier celle du petit Valentin. Le taux d’élucidation a même progressé pour la délinquance de proximité ; dans ce domaine, il atteint désormais 15,7 % alors que ces faits – notamment les cambriolages – demeurent les plus difficiles à résoudre et les plus durement ressentis par nos concitoyens.

Le travail d’initiative des gendarmes – aller chercher les délinquants sans attendre un dépôt de plainte – a continué de progresser : plus 0,4 %. Cette évolution résulte notamment de l’implication accrue des gendarmes dans la lutte contre les infractions à la législation sur les étrangers avec 2335 faits supplémentaires constatés, soit une hausse de 30,7% par rapport à 2006.

Le nombre de gardes à vue a progressé de 6,2 %. Corrélativement, le nombre de personnes mises en cause par des enquêtes de la gendarmerie et incarcérées a crû de 2,4 %.

Ces évolutions illustrent l’engagement du gendarme sur le terrain. Elles traduisent une performance accrue de l’institution dans son travail de lutte contre la délinquance, obtenue grâce à de nouveaux outils législatifs et une meilleure disponibilité des moyens technologiques modernes.

La gendarmerie a aussi obtenu de très bons résultats en matière de lutte contre l’insécurité routière. Le nombre des tués sur les routes situées en zone de gendarmerie a diminué de 8,5 %. Celui des blessés et des accidents corporels sont également en repli, respectivement de 4,7 % et 4,9 %. Au total, 113 vies ont été épargnées en 2007 et 2 436 depuis 2002 ; autant de drames familiaux en moins. Les résultats du mois dernier sont encore positifs, avec une baisse de 25 % du nombre des tués. Les actions préventives et répressives engagées depuis plusieurs années ont modifié les comportements ; les résultats obtenus illustrent leur efficacité.

Au-delà des bons résultats enregistrés, il convient de souligner que l’évolution de notre institution s’est poursuivie.

Nous cherchons à construire un outil pour traiter les vulnérabilités majeures que notre pays pourrait connaître. À cet effet, nous avons intégré au sein du nouveau groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), deux unités qui cohabitaient auparavant avec le GIGN originel au sein du groupement de sécurité et d’intervention de la gendarmerie : l’escadron parachutiste d’intervention de la gendarmerie nationale, l’EPIGN, et le groupe de sécurité de la Présidence de la République, le GSPR. Avec cet ensemble aggloméré, nous disposons aujourd’hui d’une force de près de 400 gendarmes passant tous par le moule de la formation à l’intervention. Nous pouvions naguère faire monter à l’assaut 60 à 70 gendarmes ; aujourd’hui, en cas de prise d’otages de masse, plus de 250 personnels, formés à l’identique et possédant la même capacité d’intervention, seraient disponibles.

L’année écoulée a également été riche en termes de réflexions : nous avons participé aux travaux du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale ; nous avons été audités dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP.

Le projet de loi de finances pour 2009 s’inscrit dans le cadre de la politique générale de maîtrise des dépenses publiques ; nous participerons à cet effort gouvernemental et collectif.

En 2009, le plafond d’emplois de la gendarmerie est de 99 509 équivalents temps plein (ETP), soit une baisse de 1 625 ETP sous l’effet de deux phénomènes. D’abord, nous participons à l’effort collectif de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, soit 1 246 ETP en moins – 771 suppressions nettes et 475 au titre de l’extension en année pleine des mesures décidées en 2008. En outre, des transferts d’effectifs sont prévus, majoritairement au profit de programmes du ministère de la défense : au total, 379 ETP sont concernés, dont les 298 ETP de la gendarmerie de l’armement transférés du programme 152 au programme 146, dont le directeur de programme est le délégué général pour l’armement et 48 ETP de la gendarmerie de la sécurité des armements nucléaires. En 2009, nous poursuivrons le mouvement interne, amorcé cette année, de recentrage, par transformation d’emplois, des gendarmes sur leur cœur de métier. Historiquement, la gendarmerie était monolithique, avec un statut unique, y compris pour les fonctions non opérationnelles – soutien, administration et logistique. En 1997, par souci d’économie, nous avons créé un corps de soutien, alimenté par substitution d’emplois, de manière à réserver le statut de gendarme aux fonctions opérationnelles. Depuis, les fonctions de back-office ont vocation à être tenues par des militaires du corps de soutien ou par des personnels civils, ce qui est bien plus rationnel et économique. En effet, le militaire sous statut de gendarme coûte plus cher : il est logé par nécessité absolue de service et perçoit une indemnité de sujétion spéciale de police. Ainsi, 600 postes d’officiers et de sous-officiers de gendarmerie affectés en état-major central ou régional seront transformés en 300 postes d’officiers du corps technique et administratif et de sous-officiers du corps de soutien, auxquels s’ajoutent 300 postes de personnels civils. À compter du 1er janvier 2009, nos personnels civils seront recrutés par le ministère de l’intérieur mais nous conserverons nos personnels civils déjà intégrés. Ce plan global de transformation de postes s’échelonnera sur dix ans. À échéance, la gendarmerie comptera 6 000 militaires du corps de soutien et 6 000 civils, pour respectivement 4 500 et 2 000 aujourd’hui.

Les rémunérations et charges sociales, hors pensions, progresseront en raison de l’hypothèse retenue d’augmentation de 0,8 % du point d’indice de la fonction publique et de la mise en œuvre de mesures catégorielles. Dans le contexte actuel d’économies, ces mesures sont essentielles pour garantir la sérénité du gendarme. Lorsque le Président de la République a annoncé que la gendarmerie rejoindrait le ministère de l’intérieur, en corollaire, il a manifesté la volonté que le gendarme conserve son statut militaire et que la condition du gendarme soit équilibrée par rapport à celle du policier. Le rapport sur la parité globale police-gendarmerie, remis au Gouvernement après validation par les deux directeurs généraux, exprime à cet égard plusieurs préconisations dont deux sont prises en compte dans ce projet de budget.

Premièrement, un effort indiciaire sera réalisé au profit des gendarmes, officiers comme sous-officiers, en prenant comme référence l’application du plan corps et carrières de la police nationale, qui arrivera à échéance en 2012. L’objectif est de parvenir à un équilibre global d’ici 2012. Après « bleuissement » par Matignon fin novembre 2007, le Gouvernement a même étendu le principe de nouvelles grilles à l’ensemble de la communauté militaire. Il n’y a donc pas de disjonction entre les armées et la gendarmerie. Le ministère de la défense prévoit de réaliser ces grilles dans les trois ans à venir. La première annuité pour la gendarmerie figure dans ce projet de budget, à hauteur de 11,4 millions d’euros.

Deuxièmement, des mesures catégorielles doivent quelque peu accélérer le rythme de carrière du gendarme, notamment en repyramidant le corps des sous-officiers. Ce rééquilibrage par rapport à la police nationale passe par une révision de la cible physique du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées, le PAGRE, engagé en 2005. Un effort financier de 20 millions d’euros est proposé pour financer l’annuité 2009. La mise en œuvre du PAGRE doit s’achever en 2012, ce qui est cohérent avec la poursuite des objectifs assignés par le chef de l’État dans le cadre de la parité globale entre la gendarmerie et la police.

Comme je l’ai dit à Mme la ministre, outre la nécessité de disposer des moyens de remplir notre mission au profit de nos concitoyens, une des priorités consiste à garantir la sérénité des gendarmes en rééquilibrant leur condition par rapport à celle des policiers.

Les crédits de fonctionnement s’élèveront à 988 millions d’euros avant transfert de 54 millions d’euros principalement au titre de la compensatoire SNCF. La loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, la future LOPPSI, nous fait bénéficier d’un « resoclage » de 30 millions d’euros en fonctionnement.

Au total, la hausse de nos crédits de fonctionnement s’élève à 77 millions d’euros. L’effort est notable compte tenu de la progression des dépenses de l’État mais contraint au regard de l’évolution des missions nouvelles qui nous sont confiées – en métropole, outre-mer et à l’étranger – ou à l’évolution de coûts sur lesquels nous n’avons aucune prise, notamment celui des carburants. L’exemple de l’opération Harpie, conduite cette année en Guyane, est symptomatique : elle a coûté 3 millions d’euros dont 1,5 million d’euros de surcoût ; si nous la reconduisons – et c’est probable –, cela nous coûtera à nouveau 3 millions d’euros sur six mois. De surcroît, je ne suis pas sûr que la levée de la réserve dont nous avons bénéficié en exécution depuis 2006 soit acquise en 2009. Optiquement, la hausse des crédits est de 77 millions d’euros, mais nous serons soumis à des contraintes.

Les crédits de fonctionnement alloués hors fonctionnement courant s’élèveront à 61 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 65 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui nous permettra d’acquérir du matériel nécessaire à la sécurité de nos gendarmes : nouvelles tenues de maintien de l’ordre, équipements de protection individuels et munitions pour les armes à létalité réduite.

Les crédits d’investissement, hors AOT – autorisations d’occupation temporaire –, s’élèveront à 288 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 311 millions d’euros en crédits de paiement. Ils nous permettront de renouveler une partie des matériels atteints par les critères de réforme, notamment les véhicules, et de poursuivre l’acquisition de matériels améliorant la protection de nos personnels : visières pare-balles pour casque de maintien de l’ordre et gilets pare-balles.

De plus, 7,3 millions d’euros seront affectés à la vidéoprotection et 3,1 millions d’euros à l’acquisition de lecteurs automatiques de plaques d’immatriculation, les LAPI.

En outre, nous améliorerons la qualité de la relation avec nos concitoyens en déployant des téléservices au profit des usagers pour un montant de 2 millions d’euros et en dématérialisant les contraventions des quatre premières classes pour un montant de 1,5 million d’euros. Dans le même esprit, les brigades de gendarmerie de dix départements expérimentent une boîte aux lettres Internet qui offre aux citoyens la possibilité de contacter la gendarmerie et d’obtenir des réponses à leurs questions ; les premiers retours de ce nouveau mode de communication sont bons. Quant au pré-dépôt de plainte en ligne, qui fera gagner du temps aux plaignants comme aux forces de l’ordre, il sera expérimenté dans deux départements.

Les principaux programmes d’infrastructure permettront de poursuivre les opérations de maintenance et de construction, avec la mise en chantier de 382 équivalents unités logements, EUL, et une opération sous financement AOT concernant une caserne située à Mulhouse et comprenant 70 EUL.

Le projet de loi de finances pour 2009 pour le programme 152 sera le premier rattaché au ministère de l’intérieur ; cette évolution constitue un changement majeur pour notre institution. L’année qui s’annonce sera aussi celle de la mise en place de nombreuses réformes. Nous nous emploierons à faire en sorte que les bons résultats engrangés en 2007 et 2008 se confirment.

M. le président Guy Teissier. Ne craignez-vous pas que des tiraillements apparaissent entre les gendarmes affectés à des missions strictement militaires et ceux affectés à des missions de nature plus policière ?

M. Alain Moyne-Bressand. Nous nous félicitons que le Président de la République ait à nouveau nommé un général à la direction générale de la gendarmerie nationale, ce qui, avant le général Parayre, n’avait plus été le cas depuis très longtemps.

Je vous félicite au passage pour l’efficacité de notre gendarmerie dans l’affaire du petit Valentin, qui s’est produite dans ma région.

Un journal a dernièrement annoncé des fermetures de casernes. S’agit-il d’une fuite organisée ou d’une nouvelle farfelue ? De telles informations par voie de presse produisent toujours de l’émoi dans nos campagnes, surtout lorsque les parlementaires ne sont pas au courant.

Le rattachement fonctionnel et organique de la gendarmerie au ministère de l’intérieur provoque le transfert de la responsabilité de l’essentiel des crédits. Des unités spécialisées de la gendarmerie, comme la gendarmerie de l’armement, demeurent toutefois dans le périmètre défense. Quelle est la traduction budgétaire de cette situation et quels sont les montants concernés ?

Certains soutiens – soutien sanitaire, entretien des hélicoptères – seront assurés par la défense ou en partenariat avec elle. Donneront-ils lieu à des transferts budgétaires ? Comment seront-ils réorganisés ou redéfinis ?

Le projet de budget intègre également diverses mesures concernant les personnels ou les équipements liées à la future LOPPSI. Le Parlement n’est pas encore saisi de ce texte. Or, le projet de budget en tient compte. Quand sera-t-il examiné ?

En matière d’équipements, aucun crédit n’est prévu pour le renouvellement des blindés ni pour l’affermissement de la tranche prévisionnelle d’hélicoptères. Tout le monde s’accorde à dire que les blindés de la gendarmerie, utiles en opérations extérieures et outre-mer, sont à bout de souffle. D’ailleurs, un blindé basé à la Réunion ayant été projeté à Mayotte en mars dernier, ne serait-il pas opportun de fixer un certain nombre de ces équipements sur ce territoire ? Le format des moyens en hélicoptères de la gendarmerie, dont l’intérêt n’est plus à démontrer, a été établi pour répondre aux besoins tout en tenant compte des contraintes techniques et réglementaires. De plus, un protocole permet de mettre un certain nombre d’heures de vol à la disposition de la police. Comment répondre aux besoins si l’équipement en appareils biturbines est différé ?

M. Michel Voisin. Je suis inquiet quant au maintien du statut militaire des gendarmes. En matière d’ordre public, la gendarmerie est employée sur réquisition. Placer les gendarmes sous la compétence du préfet entraînera une rupture de la chaîne de subordination. Par ailleurs, la comparaison entre policiers et gendarmes mènera inéluctablement, à terme, à l’instauration d’un système de représentation des gendarmes. Je doute sérieusement de la pérennité du statut militaire des gendarmes.

Un décret de l’été 2004 prévoit que les élus locaux, notamment les maires, soient informés de ce qui se passe dans leur commune. On dit souvent que ce texte n’est pas respecté mais je mettrai un bémol : pour les sapeurs-pompiers, c’est pareil.

M. Christian Ménard. Quand la décision concernant les écoles de gendarmerie sera-t-elle rendue publique ? Quelles seront les conséquences financières de cette restructuration, sachant que l’activité des quelques écoles restantes doublera ?

Pourquoi le GIGN n’est-il pas intervenu dans l’affaire du Carré d’As, alors qu’il l’avait fait dans celle du Ponant ?

M. le général Roland Gilles. Je vous remercie, monsieur Moyne-Bressand, pour votre hommage à la gendarmerie à propos de l’affaire du petit Valentin. Même si nous sommes encore en échec en ce qui concerne le petit Antoine, à Issoire, nous avons récemment résolu cinq lourdes affaires d’homicide, chacune en moins d’une semaine, au terme d’un travail d’investigation énorme et au moyen de techniques comme la recherche et l’analyse d’ADN.

L’identité du gendarme est au cœur de nos préoccupations. Je dois effectuer ce transfert vers le ministère de l’intérieur en faisant en sorte que, au-delà du 1er janvier 2009, la gendarmerie continue de remplir sa mission avec efficacité et le gendarme ne ressente pas d’état d’âme. La solde n’est du reste pas le seul élément contribuant à la sérénité et à l’épanouissement du gendarme.

Les gendarmes se sentent confortés par les propos du Président de la République selon lesquels la dualité à la française des forces de sécurité doit perdurer, chacune des deux forces étant appelée à conserver son identité. Le gendarme n’éprouve pas de grande crainte, sous réserve que deux conditions soient réunies : il doit disposer de moyens de fonctionnement suffisants pour répondre aux sollicitations du public ; son engagement doit être reconnu à travers un rééquilibrage de sa condition par rapport à celle du policier.

La continuité de la gendarmerie sera conditionnée par la future loi. Plus de 200 ans après la loi ancienne, il vous reviendra de définir ce que sera la gendarmerie de demain. Dans le projet de loi, les principaux piliers du temple sont réunis dans un corps d’articles ramassé. Le premier article tend à confirmer que la gendarmerie est une force armée, ce qui implique réactivité et capacité à monter en puissance, y compris dans les enquêtes judiciaires. Notre doctrine d’engagement pour le traitement en temps de paix des grands rassemblements de foule est un héritage de la communauté militaire. Un autre article tend à statuer sur les responsabilités des ministres à l’endroit de la gendarmerie. À ce titre, la mission judiciaire, qui représente 40 % de l’activité de la gendarmerie, n’est pas neutre.

Nous devons prendre en compte les évolutions de la société et de la mentalité des gendarmes. La gendarmerie ne survivrait pas à la création de syndicats car la communauté militaire est une et indivisible. Il n’en demeure pas moins que la concertation interne doit évoluer et, avec le général Parayre, nous nous y sommes employés. Chaque gendarme, lorsqu’il allume son ordinateur, se voit proposer des espaces de dialogue avec la direction générale sur l’intranet, et des colonels et des généraux valident des réponses au quotidien ; c’est une innovation à l’échelle de toute la fonction publique. Je suis également en discussion avec les deux ministres en vue de faire évoluer les instances de concertation. Le ministre de l’intérieur, chargé du budget, devra exercer sa responsabilité devant les gendarmes. La présidence du CFMG, le Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie, doit être réexaminée. Si nous avons l’intelligence de faire jouer la concertation, nous avons en main tous les ingrédients pour que la gendarmerie ait de l’avenir.

S’agissant des restructurations, je vous assure que je n’ai organisé aucune fuite dans la presse. Peut-être évoquez-vous une note interne de Matignon au sujet des écoles de la gendarmerie. Mme Alliot-Marie, en plein accord avec Matignon, annoncera dans quelques jours les décisions concernant le format de nos écoles. Celui-ci est trop important depuis que, à la suite de la chute du Mur de Berlin, dans les années 90-95, nous avons récupéré des garnisons, des écoles, abandonnées par nos camarades des forces armées. La RGPP nous impose de fermer trois ou quatre établissements, sans pour autant mettre en échec nos besoins de formation.

Compte tenu de la politique des effectifs envisagée pour les trois prochaines années – transformations d’emplois, davantage de personnels civils, davantage de personnels du corps de soutien, moins de gendarmes –, nos flux de recrutement vont baisser, passant de 3 000 à 1 750 sous-officiers, avant de remonter à 3 000 à partir de 2013. Mme Alliot-Marie annoncera en fin de semaine ou la semaine prochaine la liste des écoles ayant vocation à être fermées. D’ailleurs, ces fermetures permettront, par redéploiement des personnels, d’absorber en partie la réduction imposée des effectifs pour 2009.

Une caractéristique essentielle de la gendarmerie, son maillage territorial, ne sera pas touchée. Aucun de ses principes d’organisation et de fonctionnement n’est remis en cause. Des ajustements ont toujours été opérés et il n’est pas question d’aller au-delà aujourd’hui. Pour récupérer des effectifs, je propose à Mme Alliot-Marie d’obtenir des gains partout où c’est possible, notamment en identifiant des gardes statiques inutiles, qui immobilisent plusieurs centaines de gendarmes. Après le général Parayre, je suis parti à l’assaut des bénéficiaires de ces gardes, avec de bons résultats. Au ministère de la défense, M. Morin s’est défait d’une bonne partie des gendarmes qui assuraient la garde de l’hôtel de Brienne, en externalisant la prestation et en recourant à la vidéosurveillance. Le Conseil constitutionnel a accepté de rémunérer ses sept ETP sur ses fonds propres. Il en est de même pour l’hôtel de Castries. La garde de l’îlot Saint-Germain a été réduite des trois quarts. En ce qui concerne le Palais du Luxembourg et le Palais Bourbon, nous sommes en discussions !

M. le président Guy Teissier. Je propose que vous répondiez à M. Moyne-Bressand par écrit, de manière à ce que mes autres collègues puissent vous interroger.

M. Christophe Guilloteau. Si vous ne pouvez pas répondre à ma question aujourd’hui, j’aimerais que vous le fassiez par écrit. Des investissements significatifs sont prévus à Issy-les-Moulineaux mais aussi dans le Rhône. Le cabinet du ministre m’a confirmé hier que l’appel d’offres a retenu un petit groupement d’entreprises mais il est regrettable qu’une société australienne qui subit la crise boursière soit choisie comme support financier d’un projet de 450 millions d’euros. Vous n’êtes peut-être pas le mieux placé pour répondre mais ne pensez-vous pas que vos amis du génie, dans cette affaire, vous ont fait un mauvais procès ?

M. le général Roland Gilles. Je prends note de votre question. Le comité de pilotage s’est réuni il y a quinze jours ou trois semaines. Une réponse écrite vous sera transmise.

M. Patrick Beaudouin. Je vous poserai trois questions à propos du lien armée-Nation.

En 2008, le nombre de réservistes du ministère de la défense baissera. Votre projet de budget prévoit que le nombre de réservistes de la gendarmerie passera de 25 000 à 26 000 en 2009, avec une dotation chutant de 49 à 41 millions. Comment comptez-vous faire ?

En juillet, dans une interview au Figaro, vous évoquiez l’augmentation des populations à sécuriser par la gendarmerie – passant de 23 millions en 1975 à 35 millions en 2015 – et l’utilisation de l’Internet ainsi que l’expérimentation d’un portail virtuel afin de rechercher le maximum de productivité avec des effectifs stables. Pouvez-vous nous en dire un mot ?

Quelles conséquences tirez-vous de l’extension du contenu de la JAPD, la journée d’appel de préparation à la défense, à la sécurité intérieure ? Un certain nombre de sites vont fermer. Le directeur du service national envisage de se tourner vers l’éducation nationale mais aussi éventuellement vers la gendarmerie. Qu’en pensez-vous ?

M. le général Roland Gilles. À propos de la JAPD, je vous propose de vous adresser une réponse écrite à très brève échéance.

S’agissant des réservistes, la politique et les objectifs sont inchangés. Dans les départements, les réservistes apportent un plus important. Le montant de 41 millions représente une reconduction nominale des crédits alloués en 2008 pour faire travailler nos réservistes, dont le nombre passera de 25 000 à 26 000. Nous voulons maintenir l’attrait pour la réserve, ne pas décourager ceux qui frappent à notre porte, quitte à réduire un peu le nombre annuel de jours d’activité par réserviste.

La gendarmerie virtuelle constitue une aptitude nouvelle offerte aux usagers internautes, en lien avec toutes les brigades de gendarmerie, indépendamment du pré-dépôt de plainte en ligne.

Compte tenu des autorisations d’engagement et des crédits de paiement dont nous disposerons dans les deux ou trois prochaines années, nous devons différer la réalisation des deux programmes concernant les hélicoptères et les engins blindés.

Nous ne pouvons confirmer la tranche conditionnelle de vingt-cinq EC-135 mais il n’y aura pas de préjudice opérationnel car nous ferons durer plus longtemps l’entretien de nos Écureuils, dont la possibilité de renouvellement sera repoussée à 2011 voire au-delà.

Concernant les engins blindés, utilisés à l’interface de missions policières et militaires dans le haut du spectre de la crise, je n’ai pas la possibilité budgétaire de confirmer un marché qui était envisagé à brève échéance ; je dois le reporter d’au moins trois années et conserver en état de fonctionnement, au sein de pôles de disponibilité de ces matériels, une cinquantaine de véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG), actuellement déployés en Nouvelle-Calédonie, en Corse, à Satory et au Kosovo. Pour la Géorgie, avec l’aide de l’armée de terre, nous avons bénéficié pour nos quarante-cinq gendarmes d’une dizaine de petits véhicules protégés.

Ces deux programmes sont donc différés mais notre capacité opérationnelle est maintenue.

M. Jean-Claude Viollet. Je ne reviendrai pas sur les questionnements relatifs à la chaîne de commandement et au maintien de la pleine opérationnalité de la gendarmerie, tant dans sa mission défense que dans sa mission sécurité. Ce n’est pas seulement une question de statut. Il nous faudra être vigilants.

Vous avez évoqué des réflexions en cours concernant le format des écoles et le nombre d’escadrons de gendarmerie mobile, voire le nombre de brigades territoriales. Il faut jouer cartes sur table. La réforme est sans doute nécessaire mais, pour passer, elle doit être non pas subie ou consentie mais partagée. Cela vaut pour l’institution elle-même mais aussi pour les territoires.

S’agissant des hélicoptères, il se dit que le ministère de l’intérieur réfléchit à la mutualisation des moyens, voilure tournante, qu’ils soient bleu, blanc ou rouge. La commission de la défense doit être vigilante en ce qui concerne le maintien du contrat opérationnel correspondant aux missions gendarmerie. Veillons à ce que le parc ne soit pas cannibalisé pour d’autres usages.

M. le général Roland Gilles. Le ministère de l’intérieur dispose d’une flotte bleue et d’une flotte rouge. Il a été acté que leurs vocations sont différenciées : la flotte rouge joue un rôle de secours en première intention ; la flotte bleue, la nôtre, a une mission de sécurité. En 2007, la gendarmerie a effectué 17 000 heures de vol pour répondre aux besoins en matière de sécurité. La police nationale ne possédant pas un seul aéronef, nous lui avons ouvert un premier droit de tirage de 300 heures en 2007 puis de 800 heures en 2008. Les crédits d’entretien nous permettraient d’aller jusqu’à 20 000 heures de vol environ. Avec la sécurité civile, nous suivons un principe de non-fongibilité des deux flottes afin de ne pas mélanger les identités, de ne pas risquer un brouillage entre missions et de ne pas devoir démonter en permanence les équipements complémentaires de secours ou de police, ce qui détériorerait le matériel et réduirait notre réactivité. Il n’en demeure pas moins qu’un rouge, en deuxième intention, peut prêter assistance à un bleu.

M. Philippe Folliot. J’espère que l’intégration de la gendarmerie au sein du ministère de l’intérieur permettra de résoudre le problème des secours en montagne en zone gendarmerie, dans lesquels interviennent aussi la sécurité civile et les CRS.

En ce qui concerne le spectre des moyens d’intervention, que deviennent les pelotons d’intervention interrégionaux de gendarmerie (PI2G), et les groupes des pelotons mobiles (GPM) ? Plus généralement, quel sera le dimensionnement de la gendarmerie mobile ? Le nombre d’escadrons supprimés sera-t-il plutôt de huit ou de quinze ?

M. le général Roland Gilles. Même si chacun s’efforce d’occuper le terrain et de valoriser sa présence, l’architecture des secours en montagne n’est pas remise en cause, j’en discutais encore avant-hier avec le directeur de la sécurité civile. Conformément à la tradition, la gendarmerie assure aux côtés des autres services de l’État le secours dans les deux massifs montagneux, Alpes – avec exclusivité sur le Mont Blanc – et Pyrénées. Nous avons simplement abandonné la présence d’un hélicoptère en renfort saisonnier hivernal et estival sur quatre sites, la sécurité civile prenant le relais.

Les PI2G d’Orange et de Toulouse offrent une posture de sécurité très forte à proximité des centrales nucléaires ; ces unités sont prépositionnées de manière à pallier, le cas échéant, le délai d’arrivée du GIGN.

Nous devons faire face à une réduction des effectifs des escadrons mobiles et des brigades territoriales. Il s’agira notamment de donner suite à la décision du comité interministériel de la RGPP de transférer, d’ici deux ou trois ans, la charge des centres de rétention administrative de la gendarmerie vers la police aux frontières, ce qui libérera 853 ETP, soit sept escadrons.

Au-delà, je répète que le principe du maillage territorial et sa densité n’ont pas à être revus.

M. le président Guy Teissier. Je vous serais reconnaissant de répondre par écrit aux deux collègues qui vous ont posé des questions nécessitant un peu de recul. Je vous remercie.

——fpfp——

III. —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Alain Moyne-Bressand, les crédits de la Mission « Sécurité » : « Gendarmerie nationale » pour 2009, au cours de sa réunion du 28 octobre 2008.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Michel Voisin. La réforme de la gendarmerie m’interpelle particulièrement dans la mesure où elle va remettre en cause l’actuelle chaîne de commandement, les unités de gendarmerie étant désormais placées sous l’autorité des préfets. Par ailleurs, il m’apparaît indispensable d’indiquer quelle sera l’autorité de tutelle des gendarmes qui exercent des fonctions prévôtales.

M. Alain Moyne-Bressand. Lors de la discussion prochaine de la loi sur la gendarmerie, il nous appartiendra de soulever l’ensemble de ces interrogations pour bien mettre en valeur la spécificité de notre gendarmerie. J’indique par ailleurs que, dans le cadre de l’examen de ce texte, j’ai demandé au président Teissier de bien vouloir organiser une réunion de commission avec le directeur général de police nationale afin de pouvoir utilement comparer les situations de la police et de la gendarmerie.

M. Christophe Guilloteau. J’ai récemment rencontré plusieurs officiers de gendarmerie qui s’interrogent sur l’avenir de leur métier militaire qui leur semble difficilement compatible avec le rattachement organique à une autorité civile. J’observe par ailleurs que 60 % de leur activité est exercée au profit du ministère de la Justice qui est, in fine, leur véritable autorité de tutelle.

En zone rurale, nous sommes très attachés à la présence des gendarmes. La fermeture de brigades territoriales aurait un effet désastreux et ne pourrait pas être compensée par des regroupements.

Je tiens enfin à indiquer que je n’ai reçu aucune réponse à la demande que j’ai adressée lors d’une précédente réunion au directeur général de la gendarmerie nationale sur les conditions de réalisation de l’opération immobilière de Sathonay. Je rappelle qu’une entreprise australienne a remporté un appel d’offres de plusieurs centaines de millions d’euros sans qu’elle soit en mesure d’apporter des garanties quant à sa viabilité financière et à sa compétence technique.

M. Alain Moyne-Bressand. La réforme voulue par le Président de la République ne vise en aucun cas à porter atteinte au statut militaire des gendarmes. Pour autant, il nous appartient, lors du débat, de veiller à ce que notre gendarmerie ne perde pas son originalité et ne devienne une sorte de police montée.

M. Jean-Pierre Soisson. Les gendarmes sont légitimement inquiets et comptent sur la commission de la défense pour éviter le pire lors de leur passage sous l’autorité du ministre de l’intérieur. Notre responsabilité sera grande pour préserver une certaine conception française de la gendarmerie.

M. le président Guy Teissier. Lors de la précédente législature, j’ai contribué à ce que les officiers de la gendarmerie continuent à être recrutés, au moins pour partie, à la sortie de l’école spéciale militaire de Saint-Cyr. Ce mode de recrutement me semble en effet indispensable pour garantir la militarité de la gendarmerie.

M. Alain Moyne-Bressand. L’exemple italien pourrait utilement nourrir notre réflexion, ce pays disposant de deux forces de police sous une autorité unique, sans pour autant que les carabinieri aient perdu leur statut militaire.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission de la défense a alors donné un avis favorable au programme « Gendarmerie nationale ».

*

La commission de la défense a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sécurité ».

© Assemblée nationale

1 () Le port de la tenue civile est limité à l’observation et à la constatation de l’infraction. L’interception et l’audition sont assurées par des militaires agissant conjointement en tenue.

2 () Les six premières unités ont été créées à Nancy, le 16 février 2004, Lille, le 25 octobre 2004, Lyon, le 9 février 2005, Bordeaux, le 9 mai 2006, Marseille, le 4 décembre 2006 et Toulouse, le 14 décembre 2006.

3 () ETPT : équivalent temps plein travaillé.

4 () L’objectif fixé pour la fin de l’année 2007 était de 25 000 réservistes. Au 31 décembre 2007, 25 178 engagements à servir dans la réserve étaient souscrits.