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N° 1198

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2008

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2009 (n° 1127),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

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ANNEXE N° 24

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET
DES RESSOURCES HUMAINES

STRATÉGIE DES FINANCES PUBLIQUES
ET MODERNISATION DE L’ÉTAT ;

CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES
ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

Rapporteur spécial : M. Pierre-Alain Muet

Député

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SYNTHÈSE 5

INTRODUCTION 7

I.– LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES 9

A.– LES RÉSULTATS DE L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE 9

1.– La gestion de la fongibilité 9

2.– Les crédits mis en réserve 10

3.– L’exécution au 30 septembre 2008 11

B.– LA STRATÉGIE DE LA MISSION PÂTIT DE SON CARACTÈRE DISPARATE 13

II.– LE PROGRAMME STRATÉGIE DES FINANCES PUBLIQUES ET MODERNISATION DE L’ÉTAT 14

A.– LE PROJET DE BUDGET POUR 2009 14

1.– Les crédits et les emplois sont relativement stables 14

2.– Une stratégie de performance peu ambitieuse 16

B.– LA MODERNISATION DE L’ÉTAT 19

1.– Retour sur les audits de modernisation 19

2.– La révision générale des politiques publiques (RGPP) 19

a) Le bilan de la RPGG un an après son lancement 20

b) La RGPP a fait l’impasse sur une véritable évaluation des politiques publiques 21

c) Comment peut-on réformer sans concertation avec les citoyens ni appropriation par les agents publics ? 25

d) Retour sur le modèle canadien 29

e) Le blocage de la RGPP sur la réforme des grandes politiques d’intervention 32

3.– Les autres chantiers de modernisation de l’État 33

a) La mesure et la réduction des charges administratives 33

b) L’accueil dans les services publics 34

c) L’administration électronique 34

d) La nouvelle Agence des achats de l’État 35

C.– LES SYSTÈMES D’INFORMATION FINANCIÈRE ET DE PAYE DE L’ÉTAT 35

1.– Chorus 35

a) Les fonctionnalités permettront-elles une application pleine et entière de la LOLF ? 36

b) La gouvernance mise en place évitera-t-elle les échecs précédents ? 37

c) Le coût du projet sera-t-il maîtrisé ? 38

d) Le calendrier sera-t-il tenu ? 40

2.– L’Opérateur national de paye 42

III.– LE PROGRAMME CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE 43

A.– LES CRÉDITS ET LES EMPLOIS SONT, LÀ AUSSI, RELATIVEMENT STABLES 43

B.– UNE STRATÉGIE DE PERFORMANCE QUI DEVRAIT ÊTRE EXEMPLAIRE POUR LES FONCTIONS DE SOUTIEN 46

EXAMEN EN COMMISSION 49

ANNEXE 51

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 82 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial.

Le présent rapport spécial (document AN n° 1198, annexe n° 24) couvre deux des programmes de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines. Les autres programmes de la mission sont traités dans les rapports spéciaux de MM. Thierry Carcenac (annexe n° 23), Georges Tron (annexe n° 25) et Yves Deniaud (annexe n° 26).

SYNTHÈSE

La révision générale des politiques publiques (RGPP) présente plusieurs éléments de rupture par rapport aux audits de modernisation. Toutes les politiques publiques sont couvertes. La RGPP est pilotée par les directeurs de cabinet du Président de la République et du Premier ministre. La méthodologie également diffère, avec l’utilisation des cabinets d’audit privés. Les analyses des équipes de la RGPP sont restées confidentielles alors que tous les rapports d’audit de modernisation sont sur Internet.

Un an après son lancement, force est de constater que la RGPP s’est faite dans des conditions de secret qui ont entraîné la méfiance des agents publics et de nos concitoyens.

La première condition pour réussir une réforme c’est la transparence, et donc la publication des travaux. Les auditions conduites par votre Rapporteur spécial le confirment. « Le fait qu’aucun document n’ait circulé a au contraire entretenu les fantasmes. Tout ce qui va mal dans l’administration est maintenant attribué à la RGPP », nous dit un chef d’équipe de la RGPP. Un autre rappelle que « les documents annexés aux diaporamas électroniques (PowerPoint) constituent une mine d’information et d’analyse qui mériteraient d’être publiés » ou encore que « le fait de savoir que le document sera publié rend plus attentif au contenu des mesures et évite de présenter des mesures radicales qui n’ont pas de faisabilité. ».

Chacune des vingt équipes d’audit de la RGPP a mobilisé quasiment à temps plein plusieurs hauts fonctionnaires (corps d’inspection, préfets…) pendant dix mois en moyenne, ce qui est nettement plus long que les missions habituelles. Ce travail aurait mérité d’être partagé par les administrations, par les agents publics, par les citoyens.

Le Gouvernement indique que les décisions prises dans le cadre de la RGPP permettront de réaliser un total cumulé d’environ 7 milliards d’euros d’économies en trois ans (à horizon 2011). On est encore loin des enjeux budgétaires que la Cour des comptes rappelait dans son dernier rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, en indiquant que l’application du programme de stabilité et de croissance « nécessite une économie de 10 milliards d’euros par an pendant quatre ans, qui devrait être portée à 12 milliards d'euros par an de 2010 à 2012 pour tenir compte du retard pris dans la réduction du déficit ».

Une réforme aussi ambitieuse que celle entreprise avec la RGPP aurait nécessité une véritable évaluation : pluralité des points de vue, indépendance, méthodologie partagée et transparence. Force est de reconnaître que l’évaluation des politiques publiques est le parent pauvre de l’action publique. La RGPP donne l’impression d’un exercice purement budgétaire conduit à marche forcée par la direction du Budget et la DGME, chargés a priori de réduire les dépenses et de diminuer le nombre de fonctionnaire.

Les cabinets d’audit ont certes permis un regard extérieur et une méthodologie nouvelle pour l’administration mais leur apport a été quasiment nul sur le fond. Du fait du coût d’entrée extraordinairement élevé pour comprendre le langage des administrations publiques, l’association des consultants privés aux équipes de la RGPP leur a surtout permis d’accéder à une formation qu’ils pourront ensuite valoriser...

La nécessité d’une impulsion politique au plus haut niveau de l’État n’aurait pas dû faire obstacle à un vrai dialogue démocratique sur les réformes. Une suspicion généralisée règne à l’égard des fonctionnaires, partant du constat a priori qu’ils sont des freins au changement et qu’il faut les y forcer. Le fonctionnaire, l’usager des services publics et le bénéficiaire des politiques publiques sont les grands absents de cet exercice. Les deux seuls parlementaires à avoir été associés sont les rapporteurs généraux des commissions des Finances. Les conclusions des travaux des équipes de la RGPP n’ont jamais été publiées. Or on ne réussit une réforme que si les acteurs – agents publics et citoyens - se l’approprient.

Au Canada, exemple souvent pris en modèle par le Gouvernement, la « revue » des programmes menée au pas de charge a eu aussi des conséquences négatives, comme par exemple la perte de compétences clés dans le secteur public et des départs alarmants des plus jeunes vers le secteur privé. Le Gouvernement fédéral canadien à par ailleurs externalisé une grande partie des déficits vers les provinces. Il est revenu sur ces méthodes avec ce qu’il a appelé « la relève ».

Tous les pays qui ont réussi la modernisation de l’État l’ont fait dans la transparence et la concertation. En Australie, les thèmes de la réforme ont fait l’objet d’un livre blanc et, sur chaque dossier, un haut fonctionnaire a animé des tournées en région, des débats et des colloques. La réforme a pris au moins trois ans. Cela a été la même chose dans les pays nordiques.

La RGPP s’est jusqu’à présent essentiellement limitée aux structures et aux processus administratifs de l’État. La Cour des comptes dit dans son dernier rapport que les véritables enjeux budgétaires se situent dans les crédits d’intervention, et non de fonctionnement de l’État. En outre l’apport des cabinets d’audit trouve ici ses limites du fait du coût d’investissement très élevé. Après le recul intervenu sur la suppression de la carte de famille nombreuse, la démarche de la RGPP ne semble pas à même de conduire la réforme des grandes politiques d’intervention, notamment dans le domaine social.

INTRODUCTION

Le présent rapport spécial concerne les deux programmes Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État et Conduite et pilotage des politiques économiques et financières de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Les administrations concernées par le programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État sont, au sein du ministère du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, la direction du Budget, la direction générale de la Modernisation de l’État (DGME), l’Agence pour l’informatisation financière de l’État (AIFE) et l’Opérateur national de paie (ONP). L’autre grande administration d’état-major, la direction générale de l’Administration et de la fonction publique (DGAFP), fait l’objet d’un programme à part au sein de la mission(1). La responsabilité du programme est assurée aujourd’hui par M. François-Daniel Migeon, directeur général de la Modernisation de l’État.

Le programme Conduite et pilotage des politiques économiques et financières couvre une multitude de services communs au ministère de l’Économie, des finances et de l’emploi et à celui du Budget, des comptes publics et de la fonction publique : cabinets, secrétariat général, Agence centrale des achats, Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE), médiateur, Haut fonctionnaire de défense et de sécurité, corps d’inspection et de contrôle (Inspection générale des finances et Contrôle général économique et financier), direction des Personnels et de l’adaptation de l’environnement professionnel (DPAEP), direction des Affaires juridiques (DAJ) et service de Communication (SIRCOM). Sont également rattachés à ce programme en 2008 le service commun des laboratoires (travaillant pour la Douane et la direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes - DGCCRF), TRACFIN et l’Agence pour la valorisation du patrimoine immatériel de l’État (APIE), créée en avril 2007. Le responsable de programme est M. Jean-François Verdier, directeur de la DPAEP.

Votre Rapporteur spécial s’attachera plus particulièrement à l’action du ministère en matière de modernisation de l’État, et à la construction du nouveau système d’informations financières et comptables de l’État, chorus, qui constituent deux enjeux majeurs du premier programme. Il évoquera également l’action du secrétariat général des ministères de l’Économie et du Budget en matière de rationalisation des fonctions soutien.

I.– LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOURCES HUMAINES

A.– LES RÉSULTATS DE L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE

Cette année pour la première fois, en juin et juillet derniers, le projet de loi de règlement a donné lieu à un examen approfondi en commission des Finances et en séance publique.

Ainsi sont établies les conditions dans lesquelles peut être assuré le « chaînage vertueux » avec les remarques et les recommandations de votre Rapporteur spécial figurant aux pages 209 et 393 du tome II du rapport (n° 1004) déposé par M. Gilles Carrez le 26 juin 2008 sur la loi de règlement 2007.

1.– La gestion de la fongibilité

• Programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État

La fongibilité asymétrique n’a pas été mise en œuvre en 2007 et aucune demande n’a été faite en ce sens dans le cadre de la gestion 2008. Seule une opération de fongibilité technique a été effectuée au sein du BOP de la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE) pour permettre le remboursement de la rémunération d’agents mis à la disposition de cette direction par des structures ayant une personnalité morale distincte de celle de l’État (Banque de France et Crédit foncier de France).

• Programme Conduite et pilotage des politiques économique et financière

En gestion 2007, une opération de fongibilité asymétrique a été réalisée fin août 2007 pour un montant de 9,3 millions d'euros. Prévue dès la prévision budgétaire initiale et les documents prévisionnels budgétaires, elle est qualifiée de fongibilité asymétrique « technique ». Elle a permis d’imputer des opérations budgétaires payables en titre 3 mais budgétées en titre 2 (remboursement de rémunérations d’agents mis à disposition du programme par des organismes extérieurs à l’administration). Aucune autre opération de fongibilité asymétrique n’est intervenue, autre que technique en 2007.

La même opération de fongibilité asymétrique technique s’est faite à l’été 2008. La budgétisation du présent projet de loi de finances devrait permettre de ne recourir que marginalement à ce mouvement.

En revanche, des opérations de fongibilité ont été réalisées :

– d’une part entre les crédits inscrits sur les différents titres, notamment en application des règles d’imputation des dépenses en comptabilité générale (dépenses relevant d’immobilisations et autres dépenses) ;

– d’autre part, sous l’égide du responsable de programme et dans le cadre d’un dialogue de gestion avec les responsables de BOP, dans le cadre d’une confrontation en fin de gestion des besoins et des disponibles.

2.– Les crédits mis en réserve

• Programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

Pour 2007, les crédits gelés étaient constitués des crédits mis en réserve (art. 51 de la LOLF), soit pour le titre 2 0,18 million d'euros en AE et en CP et pour le hors titre 2 10,6 millions d'euros en AE et 12,8 millions d'euros en CP auxquels s’ajoutent les reports gelés à hauteur de 2,9 millions d'euros en AE et 29,8 millions d'euros. Les crédits gelés hors titre 2 ont été intégralement annulés par deux décrets d’avance des 6 avril et 25 octobre 2007 et par la loi de finances rectificative pour 2007.

Pour 2008, les crédits mis en réserve soit 0,3 million d’euros en AE=CP sur le titre 2 et 20,7 millions d'euros en AE et 12,8 millions d'euros en CP sur le hors titre 2 ont été annulés, sur le hors titre 2, à hauteur de 2,5 millions d'euros en AE=CP par le décret n° 2008-629 du 27 juin 2008 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance. Les reports de crédits de paiement ont été ouverts, sur le programme, à hauteur de 27,4 millions d'euros de CP et ont été intégralement gelés.

La destination des crédits gelés sera arrêtée dans le cadre de la préparation de la fin de la gestion 2008.

• Programme Conduite et pilotage des politiques économique et financière

En 2007, le montant de la réserve obligatoire s’élevait à 0,15 % du montant de la dotation initiale votée soit 0,6 million d'euros pour le titre 2 (AE = CP) et à 5 % hors titre 2, soit 23 millions d'euros en AE et 19,6 millions d'euros en CP.

Après prise en compte de l’amendement « ancien combattants, Fonds national pour l’aménagement du territoire (FNADT), réserve parlementaire » (2,6 millions d'euros en AE et 2,6 millions d'euros en CP), le montant des crédits mis en réserve hors titre a été ramené à 20,4 millions d'euros en AE et 17 millions d'euros en CP.

Par ailleurs, le montant de cette réserve a été augmenté en AE d’un montant de reports ouverts par l’arrêté du 31 mars 2007 pour 7,7 millions d'euros en AE, gelés à titre conservatoire afin de provisionner l’abondement d’autres programmes du ministère au titre de différentes mesures.

Ces crédits mis en réserve ont ensuite fait l’objet de différents mouvements :

– le 11 avril 2007, un premier décret d’avance a annulé pour 1,3 million d'euros en AE et 0,3 million d'euros en CP (hébergement d’urgence, grippe aviaire, FNADT) ;

– le 26 octobre 2007, un deuxième décret d’avance a annulé 19,1 millions d'euros en AE et 16,5 millions d'euros en CP ;

– en octobre 2007, un dégel de 9,9 millions d'euros en AE a été accordé, pour permettre d’engager plusieurs marchés dont la notification devait intervenir sur la gestion 2008 ;

– le 21 novembre 2007, le projet de loi de finances rectificative pour 2007 annule 7,7 millions d'euros euros en AE et 0,2 millions d'euros en CP hors titre 2 et 8,5 millions d'euros en titre 2 (AE = CP).

3.– L’exécution au 30 septembre 2008

• Programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

Par rapport au projet de loi de finances pour 2008, les crédits ouverts ont été abattus par amendement hors titre 2 de 2,5 millions d'euros en AE et en CP. Pour le titre 2, les crédits ouverts en loi de finances initiale 2008 correspondent à ceux inscrits dans le projet de loi de finances.

La ressource mise à la disposition des BOP du programme s’est élevée sur le titre 2 à 99,5 % des crédits ouverts (mise en réserve de 0,5%, cf. PLF 2008, page 25) et sur le hors titre 2 à 94% des crédits ouverts.

Le programme a connu un seul autre mouvement de crédits réglementaire, le décret n° 2008-1066 du 15 octobre 2008 portant transfert de crédits et qui porte sur le financement des projets de SIRH des armées réalisés en liaison la DGME. Ce décret a abondé les crédits du programme à hauteur de 5,6 millions d'euros en AE et 8,4 millions d'euros en CP.

Sur le titre 2, la consommation des crédits est encore marquée en 2008 par la spécificité des services conduisant les actions du programme (directions d’état-major) qui recherchent des profils précis et convoités, que ce soit pour la direction du budget ou la DGME, mais surtout pour l’AIFE et l’ONP. L’ONP, bien que créé en mai 2007, ne dispose de son budget propre et de son plafond d’emplois autorisés que depuis le 1er janvier de cette année. Une réelle progression de l’effectif de l’AIFE doit cependant être notée, qui devrait lui permettre d’atteindre en fin d’année son plafond annuel.

Sur le hors titre 2, en tenant compte des nouvelles orientations arrêtées en fin d’année sur les projets de l’ONP, la consommation des crédits est en phase avec la ressource et le déroulement des projets.

Début octobre, la consommation était respectivement de 136 millions d'euros en AE et 149 millions d'euros en CP pour une ressource respectivement de 493 millions d'euros de 269 millions d'euros en CP.

S’agissant des AE, il convient de rappeler d’une part que la ressource comprend 95,3 millions d'euros d’AE affectées en 2007 et non engagées et reportées sur 2008. Elle comprend également la dotation prévisionnelle pour le marché de déploiement chorus qui n’est pas encore notifié (170 millions d'euros). Par ailleurs, la programmation des projets de l’ONP devrait conduire à ne pas consommer sur 2008 une cinquantaine de millions d’euros d’AE.

• Programme Conduite et pilotage des politiques économique et financière

Les crédits décrits dans le projet annuel de performances pour 2008 (393,2 millions d’euros en AE et CP pour le titre 2 et 624,3 millions d’euros en AE et 489,1 millions d’euros en CP hors titre 2 ont fait l’objet d’un amendement le 17 novembre 2007 portant sur :

- un transfert de 6 millions d’euros en titre 2 au profit de la dotation Présidence de la République de la mission Pouvoirs publics, correspondant à la rémunération des personnels mis à disposition de la Présidence par l’administration centrale des ministères économique et financier ; le remboursement de ces personnels par la Présidence doit intervenir en gestion ;

- une annulation de 5,8 millions d’euros en dépenses de fonctionnement correspondant à la quote-part du programme à l’ouverture de crédits sur la mission Travail et emploi ;

- une affectation de 35 000 euros au titre de la réserve parlementaire pour des dépenses d’intervention.

En cours de gestion, les crédits ont été affectés par divers mouvements :

- des reports sont venus abonder la dotation initiale à hauteur de 82,7 millions d’euros en AE et 18 millions euros en CP (dont 11,8 millions d’euros concernent des crédits autorisés en report dans la limite des 3 % de la loi de finances initiale) ;

- une opération de gel des reports est intervenue pour geler ces crédits de reports à hauteur de 1,1 millions d’euros en AE et 16,7 millions d’euros en CP. Seules les dotations relatives aux AE de bascule et les fonds de concours (en AE et CP) ont été laissés à la disposition du programme ;

- un décret d’avances du 27 juin 2008 a entraîné l’annulation sur le programme de 5,6 millions d’euros en AE et 4,9 millions d’euros euros en CP pour permettre l’ouverture de crédits au profit de mesures gouvernementales en faveur des marins pêcheurs et de l'hébergement d'urgence ;

- deux décrets de transfert sont intervenus au profit du programme pour permettre aux directions et services des ministères économique et financier de financer les prestations au profit des services désormais rattachés au ministère de l’Écologie (MEEDDAT), pour lesquels les moyens de fonctionnement avaient été mouvementés lors de la construction du projet de loi de finances pour 2008 sur les programmes de ce ministère (le premier du 3 mars 2008 à hauteur de 4,1 millions d’euros pour l’ex direction générale de l’Énergie et des matières premières (DGEMP) et une partie de l’ex direction de d’Action régionale, de la qualité et de la sécurité industrielle (DARQSI), le second en date du 24 août 2008 a procédé au transfert de 4,7 millions d’euros pour la prise en charge du fonctionnement de l’Autorité de Sûreté Nucléaire) ;

- une opération de fongibilité asymétrique a par ailleurs été réalisée pour 8,5 millions d’euros le 1er juillet 2008 : cette opération qualifiée de fongibilité asymétrique « technique » était prévue dès le projet de loi de finances pour 2009 afin de permettre la couverture d’opérations qui, bien que budgétées en titre 2, donnent lieu à des paiements hors titre, pour le remboursement de la rémunération d’agents mis à disposition de l’administration par des organismes non étatiques, dont l’imputation s’effectue en titre 3 ;

- enfin, des fonds de concours sont venus abonder le programme à hauteur de 5,5 millions d’euros.

A la mi-octobre 2008, les consommations s’établissent à 76 % en AE et CP pour le titre 2 et à 81 % des AE et 75 % des CP hors titre 2.

B.– LA STRATÉGIE DE LA MISSION PÂTIT DE SON CARACTÈRE DISPARATE

Pour la première fois également, le Gouvernement présente une stratégie générale de la mission, sous la signature du ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, M. Éric Woerth. Répondant à une demande constante des Assemblées, cette présentation est maintenant la règle pour toutes les missions de l’État.

Le projet annuel de performances indique que l’objectif de la mission est d’offrir un meilleur service au moindre coût et de rénover la fonction publique. Les enjeux de la mission sont l’optimisation de la gestion fiscale et financière de l’État (guichet fiscal unique, conseil aux collectivités locales), la lutte contre la fraude fiscale et sociale, la promotion de la culture de la performance au sein des administrations de l’État, la mutualisation des fonctions soutien (système d’information financière de l’État, achats, paye, action sociale au profit des fonctionnaires) et la modernisation de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Le simple énoncé de ces objectifs, qui sont par ailleurs pertinents, montre cependant le caractère disparate des programmes constituant cette mission, dont le principal point commun est de ressortir à la compétence du ministère du Budget.

La programmation budgétaire 2009-2011 prévoit une légère augmentation des crédits (+ 2 %) sur la période, soit un rythme sensiblement inférieur à celui de l’inflation attendue. Le projet annuel de performances explique que l’essentiel de cette hausse est due à des facteurs techniques (augmentation du taux des cotisations versées par l’État au compte d’affectation spéciale Pensions) et à l’augmentation du périmètre de la mission (création d’un programme Entretien des bâtiments de l’État et crédits de personnel de la DGAFP).

Les réformes engagées dans le cadre de la mission concernent notamment la création de la direction générale des Finances publiques (DGFiP) - qui regroupe les administrations des impôts et de la comptabilité publique -, la dynamisation de la politique immobilière de l’État, la simplification et la modernisation des douanes, la mise en place de l’Agence des achats de l’État (AAE) – qui devrait générer 350 millions d’euros d’économies – et la modernisation de la gestion des ressources humaines (GRH) dans la fonction publique.

*

* *

II.– LE PROGRAMME STRATÉGIE DES FINANCES PUBLIQUES ET MODERNISATION DE L’ÉTAT

A.– LE PROJET DE BUDGET POUR 2009

1.– Les crédits et les emplois sont relativement stables

Le programme contient cette année deux actions supplémentaires. L’une est intitulée Politique de la fonction publique et modernisation de la gestion des ressources humaines et regroupe les crédits de personnel (titre 2) de la DGAFP. L’autre s’appelle Régulation des jeux en ligne et contient les crédits de la future Autorité de régulation des jeux en ligne.

Les AE (2) du programme baissent fortement entre 2008 et 2009 (respectivement 421,1 millions d’euros et 231,6 millions d’euros), notamment en raison de la passation en 2008 des principaux marchés relatifs aux systèmes d’information financière de l’État (chorus). Les CP (3) restent quasiment au même niveau (289,2 millions d’euros en 2008 et 297,6 millions d’euros en 2009), si l’on tient compte du changement de périmètre occasionné par la création de l’Autorité de régulation des jeux en ligne (9,3 millions d’euros).

La programmation budgétaire triennale est déclinée au niveau des crédits du programme.

PROGRAMMATION BUDGÉTAIRE TRIENNALE (2009-2011)

(en millions d’euros)

Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État

Autorisations d’engagement

232

193

235

Crédits de paiement

297

324

256

Source : projet annuel de performances pour 2009

Le plafond d’autorisation d’emplois est demandé à hauteur de 1 063 ETPT en 2009, en augmentation de 233 par rapport au projet de loi de finances pour 2008 (+ 82 si l’on retranche les effectifs de la DGAFP, soit 151 ETPT demandés en 2009, pour une masse salariale de 9,4 millions d’euros).

• L’Autorité de régulation des jeux en ligne

Le projet annuel de performances indique que les crédits de la future Autorité de régulation des jeux en ligne seront inclus dans une action 8 nouvelle du programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État. Il prévoit 9,3 millions d’euros en CP et 14,1 millions d’euros en AE. Le plafond d’autorisation d’emploi s’élève à 30 ETPT.

En concordance avec la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes, et après avoir adressé plusieurs demandes, la Commission européenne a adressé à la France en juin 2007 un avis motivé lui enjoignant d’ouvrir le marché des jeux, afin de respecter les règles de la concurrence dans ce secteur de services. Le commerce des jeux constitue une activité économique considérable, avec un chiffre d’affaire annuel de plusieurs dizaines de milliards d’euros en France. Ces dernières années ont vu la multiplication de jeux sur Internet, de façon illicite, et très souvent hébergés sur des serveurs situés en dehors du territoire national.

À la suite du rapport de M. Bruno Durieux, inspecteur général des finances, ancien ministre, sur « l’ouverture du marché des jeux d’argent et de hasard » (4), remis en mars 2008 au ministre du Budget, M. Éric Woerth, ce dernier envisage pour 2009 ou début 2010 l’ouverture à la concurrence des jeux et paris. Le rapport préconisait une ouverture à la concurrence maîtrisée et soucieuse des objectifs d’intérêt général propres à la France. M. Éric Woerth a annoncé qu’il allait proposer « de procéder à une ouverture maîtrisée et régulée du marché », afin de canaliser des pratiques illégales.

Le ministère du Budget fait valoir que les jeux d’argent constituent un enjeu majeur pour les finances publiques. Les recettes qu’ils représentent pour le budget de l’État sont prévues à hauteur de 3,6 milliards d’euros dans le présent projet de loi de finances. Le ministère a donc décidé de rattacher cette autorité au programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État. La direction du Budget, qui conduit l’une des actions du programme, est chargée de préparer le projet de loi d’ouverture du marché des jeux en ligne. Dans le cadre de cette préparation, elle a été amenée à souscrire une assistance à maîtrise d’ouvrage, qui doit logiquement être reprise par la nouvelle autorité. En outre, cette direction assure la tutelle de la Française des jeux et du PMU, laquelle a vocation à perdurer. Par ailleurs, il s’agit principalement d’ouvrir le marché français à des entreprises étrangères.

Les jeux en ligne ne sont pas des services comme les autres, eu égard au risque d’addiction pour les joueurs, aux risques de fraudes (captation de numéros de cartes bancaires, extorsion de fonds) et à l’attirance exercée par ce secteur sur les activités illicites ou criminelles en quête de blanchiment d’argent. Le ministère du Budget est également sensible aux arguments relatifs au maintien du chiffre d’affaire de la Française des jeux et du PMU – qui finance la filière hippique -, aux recettes fiscales sur les jeux et à la lutte contre la fraude à la TVA. Ce sont d’ailleurs les services du ministère de l’Intérieur (direction générale des Renseignements généraux) qui assument jusqu’à présent la charge de la réglementation sur les courses et les jeux. La ministre de l’Intérieur a annoncé en septembre dernier, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), que cette charge serait bientôt transférée à la direction générale de la Police judiciaire, au sein du même ministère.

2.– Une stratégie de performance peu ambitieuse

La direction du Budget est chargée d’aider le Gouvernement dans la procédure de préparation du budget, dans la recherche de pistes d’amélioration (marges de manœuvre, propositions de réformes structurelles, exemples étrangers…) ; le projet annuel de performances indique qu’elle s’appuie sur le réseau du contrôle financier, « dont les missions ont été recentrées vers le contrôle des risques et l’analyse du caractère soutenable de la dépense ».

Le projet annuel de performances indique également que les acteurs du programme concourent à assurer le pilotage de la modernisation de l’État et participent à l’élaboration du budget. Il précise que les objectifs du programme sont principalement centrés sur la qualité du service rendu et qu’« ont été écartés les objectifs et indicateurs dépendant trop de facteurs extérieurs à l’action des services ». Cette considération présente le tort d’écarter a priori tout indicateur mesurant le respect de la norme de dépenses de l’État ou le degré d’avancement des réformes, dans le cadre des audits de modernisation ou de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Le projet annuel de performances ne contient pas non plus d’indicateur mesurant le degré d’avancement ou le respect du coût du principal système d’information financière de l’État (chorus) en cours de construction, et qui est pourtant un élément essentiel de la bonne mise en œuvre de la LOLF. Le projet annuel de performances Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local, examiné par notre collègue Thierry Carcenac, ne contient pas non plus d’indicateur mesurant la qualité des prévisions d’évolution des recettes (éventuellement conditionnées aux prévisions macroéconomiques). Votre Rapporteur spécial s’étonne, comme l’an dernier, que les acteurs de ces programmes s’exonèrent en quelque sorte d’indicateurs de performance sur la qualité de la gestion des finances publiques, laquelle constitue pourtant leur cœur de métier.

S’agissant de la modernisation de l’État, l’objectif Fournir aux administrations un appui efficace dans la mise en oeuvre de la modernisation est mesuré par l’indicateur Pourcentage des personnels d’encadrement de l’État estimant que la DGME apporte un appui efficace à la modernisation de l’État à travers ses actions de l’État. L’objectif Rendre visible au citoyen la modernisation de l’État est mesuré par l’indicateur État d’avancement du programme de mesure et de réduction des charges administratives (MRCA). Comme votre Rapporteur spécial l’avait indiqué l’année dernière, il aurait été plus ambitieux, pour le ministère du Budget, de prévoir un indicateur mesurant la mise en œuvre effective des réformes. Le ministre du Budget a d’ailleurs annoncé lors de la présentation du présent projet de loi de finances, qu’il « présentera en Conseil des ministres un bilan détaillé de la mise en œuvre des décisions, fin octobre 2008 puis chaque trimestre ». Ainsi pourrait être présenté, dans le projet annuel de performance, un indicateur mesurant le suivi des recommandations des audits de modernisation et des « 337 décisions de réformes » prises dans le cadre de la RGPP.

L’objectif Améliorer la qualité du volet performance du budget de l’État est mesuré par trois sous-indicateurs : Taux d’indicateurs ayant une cible à trois ans ou plus, Taux de documentation des indicateurs et Taux de satisfaction du Parlement. Trois précédents sous-indicateurs mesurant le respect de l’équilibre entre les trois catégories d’indicateurs (efficacité, efficience et qualité du service) ont été supprimés cette année, même si la direction du Budget assure continuer à veiller au renforcement des indicateurs d’efficience et de qualité. 67 % des indicateurs se sont vus fixer une cible à trois ans et 95 % des indicateurs sont renseignés (« documentés »). La prévision et la cible de l’indicateur sur la satisfaction du Parlement sur les documents budgétaires sont fixées à 60 % ; il aurait été utile que le projet annuel de performances transmis au Parlement détaille les modalités de construction de cet indicateur. Les informations transmises à votre Rapporteur spécial expliquent qu’une première enquête est intervenue à l’automne 2007. Pour 2008, et afin d’obtenir le résultat qui figurera dans le rapport annuel de performances 2008 pour cet indicateur, une nouvelle procédure va être prochainement lancée. Elle devrait concerner les rapporteurs (5)et débuter par l’envoi d’un courrier à leur attention. L’enquête devrait s’étaler sur le mois de novembre et se matérialiser par l’envoi de messages électroniques (un premier et une relance) sur lesquels figurera le lien vers un serveur sécurisé où le questionnaire sera directement accessible. Le questionnaire est en cours de préparation et devrait comporter de l’ordre d’une dizaine de question qui devrait pouvoir être renseignées en cinq minutes.

Votre Rapporteur spécial suggère comme l’an dernier que soient élaborés des indicateurs permettant de suivre, dans le projet annuel de performances, le respect de la norme de dépenses de l’État. En particulier un sous-indicateur pourrait mesurer le respect de l’évolution prévue des dépenses fiscales. Le Gouvernement s’est engagé, lors de la présentation du présent projet de loi de finance et du projet de loi de programmation des finances publiques (2009-2012), sur les objectifs précis en matière d’évolution des dépenses publiques (« zéro volume » sur un périmètre incluant les prélèvements sur recettes au profit des collectivités locales et de l’Union européenne, ainsi que les affectations de recettes aux opérateurs de l’État, mais hors remboursements et dégrèvements). Un ou des sous-indicateurs pourraient suivre l’évolution des différents agrégats mesurant les dépenses de l’État (périmètre suivi par le Gouvernement, périmètres élargis suivis par le rapporteur général de la commission des Finances ou par la Cour des comptes…). Le Gouvernement a également fixé, pour la première fois, des objectifs en matière de dépenses fiscales. La loi de programmation pluriannuelle, dans ses articles 10 et 11, prévoit un « objectif annuel de coût retenu pour les dépenses fiscales » et un mécanisme de compensation pour les créations ou extensions. L’article 1er du présent projet de loi de finances, dans son exposé des motifs, décline cet objectif en prévoyant un montant total anticipé de 69,1 milliards d’euros. Il serait utile de suivre la réalisation de ces objectifs dans le projet annuel de performance. De même pourraient être étudiés dans leur programme de rattachement des indicateurs de la qualité des prévisions d’évolution des recettes.

L’objectif Améliorer la qualité de service aux administrations dans le domaine des systèmes d’information financière de l’État est mesuré par l’indicateur Indice de satisfaction des bénéficiaires des prestations de l’AIFE. La valeur réalisée en 2007 (72 %) est supérieure à la prévision 2008 et à la cible 2009 (70 %). Comme l’an dernier, votre Rapporteur spécial estime qu’il aurait été plus ambitieux pour l’AIFE de présenter un indicateur mesurant l’état d’avancement du projet chorus, ainsi que le respect du budget initial.

Ainsi, à titre de comparaison, l’indicateur affecté à l’Opérateur national de paye dans le projet annuel de performances mesure le Taux d’avancement de la réalisation du pilote du système d’information (SI) paye. L’objectif assigné est de 23,4 % en 2008 et de 100 % en 2011.

B.– LA MODERNISATION DE L’ÉTAT

1.– Retour sur les audits de modernisation

Votre Rapporteur spécial a déjà regretté que le Gouvernement n’ait jamais dressé le bilan des audits de modernisation et a ajourné l’exercice de suivi de ces audits, en arguant du fait qu’ils avaient été déversés dans le nouvel exercice de révision générale des politiques publiques (RGPP). Ainsi, par exemple, en 2007 et début 2008, l’Inspection générale des finances a été particulièrement mobilisée par le processus de RGPP. Pas moins de douze inspecteurs généraux ont été désignés chef d’équipes sur un total de vingt-et-un responsables missionnés par le chef du Gouvernement. Ils ont été assistés par trente-cinq inspecteurs des finances. Entre juillet et décembre 2007, la RGPP a absorbé 34 % du temps des inspecteurs du service.

Le rapport de la Cour des comptes de juin 2008 sur La situation et les perspectives des finances publiques regrettait que le travail réalisé dans les audits de modernisation n’ait pas connu de débouché direct lors de la préparation du projet de lois de finances. La moitié seulement des audits présentaient des recommandations avec une traduction chiffrée en termes d’économies budgétaires. Pour l’autre moitié, l’absence de suivi des audits de modernisation a empêché une traduction budgétaire.

2.– La révision générale des politiques publiques (RGPP)

La révision générale des politiques publiques (RGPP) présente plusieurs éléments de rupture par rapport aux auditions de modernisation. Les équipes de la RGPP ont travaillé à partir des rapports existants, à savoir les audits de modernisation, les rapports parlementaires, des corps d’inspection des différents ministères ou encore de la Cour des comptes. A la différence des audits de modernisation, toutes les politiques publiques sont couvertes. Alors que les audits de modernisation étaient pilotés par le précédent ministre du Budget et de la réforme de l’État, la RGPP est pilotée par les directeurs de cabinet du Président de la République et du Premier ministre, sous la supervision d’un « conseil de modernisation des politiques publiques » présidé par le Président de la République et composé des membres du Gouvernement. La méthodologie également diffère, avec l’utilisation des méthodes des cabinets d’audit privés.

Un an après son lancement, force est de constater que la RGPP s’est faite dans des conditions strictes de secret qui ont entraîné la méfiance des agents publics et de nos concitoyens. Au lieu d’une évaluation approfondie de nos administrations et de nos politiques publiques, fondée sur une méthodologie et un constat partagés, on a eu l’impression d’une opération conduite à marche forcée par la direction du Budget et la DGME, chargés a priori de réduire les dépenses et de diminuer le nombre de fonctionnaire.

La nécessité d’une impulsion politique forte n’aurait pas dû faire obstacle à un vrai dialogue démocratique sur les réformes. Au lieu de cela, l’exercice se limite à la multiplication de coupes sombres sans concertation et s’apparente plus à une « réduction » générale des politiques publiques. Loin de susciter l’approbation, dans les couloirs des ministères ou dans l’opinion publique, la RGPP donne plutôt l’impression d’une « commission de la hache » chargée de « rapporter des scalps ». Une suspicion généralisée règne à l’égard des fonctionnaires, partant du constat a priori qu’ils sont des freins au changement et qu’il faut les y forcer. Or on ne réussit une réforme que si les acteurs – agents publics et citoyens - se l’approprient. La RGPP semble exprimer un rejet de toutes les structures administratives, quelles qu’elles soient, alors qu’il aurait fallu apprendre des structures existantes et réformer en s’appuyant sur les bonnes pratiques.

La RGPP s’est jusqu’à présent essentiellement limitée aux structures et aux processus administratifs de l’État. Après le blocage intervenu sur la suppression de la carte de famille nombreuse, il est clair que l’on ne réformera pas les grandes politiques d’intervention, notamment dans le domaine social, avec les méthodes utilisées jusqu’alors dans la RGPP.

a) Le bilan de la RPGG un an après son lancement

La Cour des comptes dans son rapport de juin 2008 sur la situation et les perspectives des finances publiques notait que la RGPP couvrait environ 40 % des dépenses des administrations publiques (APU), sur environ les deux tiers du budget général de l’État (173 milliards d'euros), la moitié des dépenses des administrations sanitaires et sociales (ASSO). Elle couvre aussi une partie des organismes divers d’administration centrale (ODAC).

Sur ce périmètre, complété des ressources non budgétaires des opérateurs de l’État, le Gouvernement indique que les décisions prises suite à la RGPP permettront de réaliser un total cumulé d’environ 7 milliards d’euros d’économies en trois ans (à horizon 2011), soit 4 à 5 % du total des dépenses examinées (par référence aux crédits 2008). Or le déficit de l’État s’élève à 41,7 milliards d'euros dans la loi de finances pour 2008. Il est prévu à hauteur de 52 milliards d'euros dans le présent projet de loi de finances, mais devrait se dégrader fortement avec la récession. Les économies escomptées par la RGPP ne sont donc pas à la hauteur des enjeux budgétaires. La Cour des comptes indique que l’application du programme de stabilité et de croissance présenté par la France à la Commission européenne « nécessite une économie de 10 milliards d’euros par an pendant quatre ans, qui devrait être portée à 12 milliards d'euros par an de 2010 à 2012 pour tenir compte du retard pris dans la réduction du déficit ». Votre Rapporteur spécial note que les économies annoncées par le Gouvernement qui pourraient être générées par la RGPP ne sont qu’une goutte d’eau par rapport à l’ajustement nécessaire pour le rétablissement de nos comptes publics.

La Cour conclut en disant que « les mesures adoptées doivent donc être complétées, notamment dans le cadre de l’« agenda social » en cours », qui semble être resté dans les cartons du Gouvernement(6).

Le Gouvernement s’était engagé à présenter « fin octobre » un bilan de la mise en oeuvre des 337 décisions prises dans le cadre de la RGPP. Il est dommage que ce bilan n’ait pas été disponible à temps pour alimenter la discussion du présent projet de loi de finances.

b) La RGPP a fait l’impasse sur une véritable évaluation des politiques publiques

• L’évaluation des politiques publiques

Alors que le Gouvernement comporte en son sein un secrétaire d’État chargé de la prospective et de l’évaluation des politiques publiques, M. Éric Besson, il semble que cette évaluation se limite à la mise en oeuvre de la LOLF et de la RGPP. Le Conseil national de l’évaluation a été supprimé pour laisser place à une Mission d’évaluation des politiques publiques publiques « qui regroupe des professionnels de l’évaluation provenant d’horizons et cultures différentes (corps de contrôle de l’administration, sous-préfet, économistes, ingénieurs) et qui peut s’appuyer sur des moyens externes. » Pour l’exercice de ses attributions, le secrétaire d’État « dispose des différentes instances compétentes en matière d’expertise et d’évaluation placées auprès du Premier ministre ».

Significativement, votre Rapporteur spécial n’a pas obtenu de réponse à son questionnaire budgétaire sur la liste des organismes intervenant en France dans le domaine de l’évaluation des politiques publiques, ou sur l’articulation de l’évaluation des politiques publiques avec la mise en œuvre de la LOLF et avec la RGPP. Une véritable évaluation des politiques publiques signifie une pluralité des points de vue, une indépendance, une méthodologie partagée et une transparence. Force est de reconnaître que l’évaluation des politiques publiques reste le parent pauvre de l’action publique. Cette tâche autrefois remplie par le Commissariat général au Plan ne semble pas avoir été reprise par le Centre d’analyse stratégique.

• Un exercice préempté par la règle budgétaire du non remplacement d’un départ à la retraite sur deux

Dans les documents fondateurs de la démarche RGPP, la référence à l’évaluation des politiques publiques n’apparaît que par la mention de son retard dans la gestion publique française, non comme une composante méthodologique évidente de la RGPP. On a vu que la démarche RGPP s’est largement appuyée sur les études, audits et évaluations déjà disponibles, elle a capitalisé sur les évaluations préexistantes. Dans ces conditions, votre Rapporteur spécial s’explique mal que l’analyse faite séparément dans les différents groupes de travail de la RGPP aboutisse comme par miracle exactement au non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Faut-il y voir une action conjointe de la direction du Budget et de la DGME, qui participaient à tous les groupes de travail, et qui étaient dûment mandatés pour orienter les conclusions de leurs travaux en ce sens ? C’est d’ailleurs la direction du Budget qui tente de défendre depuis de nombreuses années la règle de non remplacement d’un départ à la retraite sur deux.

L’évaluation des politiques publiques s’intéresse davantage aux effets des politiques publiques, alors que la RGPP se limite souvent aux conditions de leur production. L’évaluation, qui interroge la pertinence des politiques publiques, doit par structure avoir une facette participative, associer dans les équipes d’évaluateurs les fonctionnaires responsables de la mise en œuvre concrète et les bénéficiaires visés par la politique publique.

Entre « revue des programmes » (dont fait partie la RGPP) et évaluation, il existe incontestablement des oppositions. La revue paraît pressée, hyper active, et émet très rapidement des propositions utilisables immédiatement, tandis que l’évaluation prend du temps, analyse les impacts systémiques de moyen et de long terme, pratique le doute systématique, associe les différentes parties prenantes et produit du savoir profond et des conclusions qui n’ont pas obligatoirement d’utilisations immédiates.

Délibérément, le calendrier de la RGPP est extrêmement contraint, quelques semaines. Il s’en déduit la méthode de travail : une synthèse des travaux précédents (inspections, stratégies ministérielles de réforme, audits de modernisation) et pas – ou peu – d’investigations nouvelles notamment quant aux usagers, bénéficiaires, ou non bénéficiaires. Il n’y a pas d’apport de connaissances nouvelles, avec notamment une absence totale de participation des acteurs, ou de prise en compte de leurs points de vue. La pluralité des points de vue, qui permet de passer des constats à des jugements de valeur, se limite aux inspections des divers ministères qui composent les équipes de la RGPP.

Les équipes RGPP, soumises au secret, ne font pas participer à leurs réflexions les acteurs, notamment des agents qui mettent en œuvre les actions et qui devront animer le changement une fois les décisions prises. Véritable « boîte noire », cette méthode de management non participative est justifiée par l’argument suivant : ne pas alourdir le processus pour éviter qu’il ne s’enlise dans la mauvaise volonté des acteurs. Comment pourra-t-on réussir un changement né dans une telle méfiance ?

Peut-on ainsi séparer l’organisation de l’administration des politiques qu’elle doit mettre en œuvre ? La fonction de « production » (les processus administratifs) peut-elle s’analyser sans références aux objectifs poursuivis (les politiques publiques) ? Une philosophie de la décision s’est imposée aux équipes : penser économie budgétaire avant de penser pertinence de la politique. La méthodologie mise en place, avec notamment le questionnement des politiques publiques, peine à dépasser l’exercice purement budgétaire auquel semblent s’être livrées les équipes de la RGPP. Un chef d’équipe de la RGPP auditionné par votre Rapporteur spécial a témoigné qu’« il était extrêmement difficile de dialoguer avec l’administration quand on part du principe du non remplacement d’un départ à la retraite sur deux, même avec la promesse de rétrocéder aux fonctionnaires la moitié des économies réalisées par les réductions de personnel  ». Comment dès lors faire la pédagogie de la réforme, comment convaincre ?

Associer les acteurs à l’évaluation des politiques est une méthode efficace ; l’évaluation donne alors du sens à l’action, et génère la confiance réciproque des cadres et de leurs équipes. C’est un bon exemple de management par la confiance, sans pour cela mélanger le niveau apprentissage collectif (management) du niveau décisionnel (politique). Les économies budgétaires seront la conséquence de cette confiance : au quotidien, le management intermédiaire est souvent le mieux placé pour trouver les réserves de productivité, dès lors que le sens de l’action est donné.

• La prééminence des cabinets d’audit privés

Les équipes de la RGPP associent à des hauts fonctionnaires des experts provenant de cabinets d’audit privés. Des marchés d’assistance ont été passés en ce sens par la DGME. Votre Rapporteur spécial note la différence majeure de méthode avec les audits de modernisation, où les consultants privés avaient été associés mais uniquement en appui aux équipes en provenance des inspections des ministères. Dans la RGPP le recours à des cabinets d’audit change véritablement d’échelle. La DGME n’a pas tenu de statistiques précises, mais l’ordre de grandeur est d’un consultant pour trois ou quatre hauts fonctionnaires. En outre, les directions opérationnelles des ministères n’ont pas – ou peu – été associées au processus d’évaluation et de définition des transformations.

Les consultants ont été beaucoup utilisés pour apporter une méthodologie commune aux équipes de la RGPP : restitutions (« reporting »), tableau de bord, remontée d’information, bilan d’avancement... Chaque équipe de la RGPP a travaillé sur une grille d’analyse commune à toutes les politiques publiques, qui a été déclinée sur tous les sujets : que faisons-nous ? Quels sont les besoins et les attentes collectives ? Faut-il continuer à faire de la sorte ? Qui doit le faire ? Qui doit payer ? Comment faire mieux et moins cher ? Quel doit être le scénario de transformation ? Les résultats des travaux des équipes de la RGPP ont été normalisés au moyen de présentations formatées en « diaporama électronique » (« PowerPoint presentation »). On est loin de la culture administrative française du rapport…

Certes ces consultants en provenance du secteur privé peuvent apporter un éclairage extérieur utile sur le fonctionnement de l’administration, mais le recours massif qui y est fait dans la RGPP ne parait guère justifié et son efficacité mériterait certainement d’être évaluée.

M. François-Daniel Migeon, directeur général de la Modernisation de l’État, déclarait à votre Rapporteur spécial lors de son audition que les marchés de consultants travaillant pour la RGPP avaient représenté un coût de 13 millions d’euros jusqu’à présent. Une journée de travail d’un consultant coûte entre 800 et 2 500 euros, voire 3 000 pour les plus expérimentés. En comparaison, le potentiel considérable des corps d’inspection, dans tous les ministères, est sous utilisé pour ces tâches d’évaluation. Un des chefs d’équipe de la RGPP auditionné par votre Rapporteur spécial a indiqué « qu’il avait passé beaucoup de temps à définir la mission des consultants » qui travaillaient avec lui. Est-on sûr que, sur les éléments où les consultants peuvent se rendre utiles, le transfert de connaissance entre les consultants et les fonctionnaires s’effectue dans de bonnes conditions ? Que restera-t-il de leur contribution à ce titre dans un an, dans deux ans ? Si les fonctions soutien (achats, immobilier, ressources humaines et informatique) présentent des similitudes dans les secteurs public et privé, le fonctionnement de l’administration est très spécifique et les grandes politiques d’intervention n’ont pas d’équivalent dans la sphère privée.

Un chef d’équipe de la RGPP auditionné par votre Rapporteur spécial mentionnait les « limites des cabinets d’audits du fait de leur coût d’entrée extraordinairement élevé, en raison du langage propre à chaque administration. Si leur apport est précieux sur la forme, de par les modes de raisonnement et d’expression auxquels l’administration n’était pas habituée, il est quasiment nul sur le fond. On a donc payé cher la formation accélérée qu’ils pourront faire valoir après. » Un autre chef d’équipe avoue que « la tâche du consultant a exclusivement consisté à présenter les résultats des travaux sous la forme de diaporama électronique (PowerPoint). ». Les consultants privés ont eu un rôle important dans la première phase de la RGPP, pour acclimater la démarche nouvelle, pour s’astreindre à la grille d’analyse commune et pour formater les résultats des travaux dans les diaporamas électroniques. Mais ce ne sont pas eux qui ont permis d’apporter les réponses aux questions posées. L’expérience des corps d’inspection est ici irremplaçable.

La DGME se positionne d’ailleurs elle-même comme un consultant auprès des administrations et elle en a adopté les méthodes et le langage : elle cherche à capitaliser sur l’expertise du secteur privé - qui est censé être meilleure que celle du secteur publique –, les usagers sont considérés comme des « clients » qu’il faut « satisfaire », les politiques publiques doivent démontrer leur « valeur ajoutée », les services administratifs sont qualifié d’« appareil productif »…

c) Comment peut-on réformer sans concertation avec les citoyens ni appropriation par les agents publics ?

• Sens de la réforme et concertation

Lors de la réunion du 4 février 2008 avec l’ensemble des organisations syndicales de fonctionnaires, le Premier ministre a annoncé une concertation approfondie avec les organisations syndicales sur la réorganisation de l’État territorial, tant au niveau national, sous la coordination des ministres chargés du budget et de la fonction publique, qu’au niveau local. L’importance de cette concertation a été réaffirmée dans la circulaire du 7 juillet 2008 relative à l’organisation de l’administration départementale de l’État, précisant qu’elle était « un gage à la fois de la qualité des analyses, de la pertinence des propositions, de la compréhension des enjeux et de l’acceptation des choix par les citoyens, les élus et les agents ».

La manière avec laquelle a été menée la RGPP jusqu’à présent n’a pas montré une grande application de cette concertation, qui est restée en grande partie une déclaration de principe. Ainsi, le journal Le Figaro publiait le 21 octobre dernier un sondage réalisé par la société de services informatiques Logica (7) et montrant que seulement 25 % des fonctionnaires avaient entendu parler de la RGPP. Ce sondage indique également que seulement 28 % des Français en ont entendu parler. Il est inquiétant que les fonctionnaires soient si peu informés sur la RGPP, alors qu’à 93 % ils répondent connaître l’objectif de non remplacement d’un départ à la retraite sur deux. M. Didier Menusier, directeur général adjoint de Logica, estimait que « l’État n’a pas assez communiqué sur les enjeux de la RGPP auprès du management intermédiaire. Les ministères n’ont pas été assez aidés dans le cadrage de la réforme. (…) Pour qu’une réforme soit acceptée, il faut communiquer sur les avantages qu’elle offrira au citoyen. L’État ne le fait pas assez. »

Le fonctionnaire, l’usager des services publics et le bénéficiaire des politiques publiques ne sont pas inclus dans le cadre de la RGPP : ils sont au nombre des grands absents de cet exercice.

La démarche de la RGPP a paru pour le moins confidentielle, menée avec des équipes très restreintes et aboutissant à des décisions prises par les cabinets ministériels, sous la surveillance active des cabinets du Président de la République et du Premier ministre. Outre que cette démarche ne respecte par l’indépendance et la pluralité d’une véritable évaluation, comme nous l’avons vu, elle s’est abstenue de l’explication et du dialogue nécessaire avec les agents publics et avec les citoyens. Les conclusions des équipes de la RGPP n’ont pas été arrêtées avec le processus contradictoire qui avait eu lieu pour les audits de modernisation. Un chef d’équipe de la RGPP auditionné par votre Rapporteur spécial indiquait qu’il avait travaillé « sans déplacement et ni concertation ». Il est dans ces conditions difficile d’admettre l’explication avancée par la DGME selon laquelle la concertation sur les réformes s’est faite dans le cadre du dialogue qui a précédé le livre blanc sur l’avenir de la fonction publique présenté par M. Jean-Ludovic Silicani en avril dernier. Ces deux exercices se sont effectués en parallèle et n’avaient pas les mêmes objectifs. Certes les équipes d’audit ont travaillé avec les responsables des administrations dans lesquelles elles intervenaient, mais essentiellement avec leurs cabinets ministériels respectifs, auxquels ont été associés les directeurs d’administration. Aucune des équipes de la RGPP n’a inclus de représentants des agents publics, des usagers, des bénéficiaires, des associations, des organisations syndicales, des secteurs professionnels… Un des chefs d’équipe de la RGPP auditionné par votre Rapporteur spécial a indiqué qu’il avait considéré « que pendant la phase de préparation des décisions la concertation avait été le fait des ministères eux-mêmes ». Il précise que « cette concertation a surtout sa place dans la phase de mise en oeuvre des décisions déjà prises ».

Les deux seuls parlementaires présents dans les comités de suivi de la RGPP ont été les rapporteurs généraux des commissions des finances. Les rapporteurs spéciaux en particulier n’ont pas été associés, alors qu’ils auraient certainement pu enrichir la réflexion. Il est difficile de réussir une réforme des politiques publiques aussi ambitieuse que celle entreprise avec la RGPP sans impliquer les parlementaires et, à travers eux, l’opinion publique.

• La culture du secret : un gaspillage de la réflexion publique !

On l’a dit, les conclusions des équipes d’audit n’ont pas donné lieu à établissement d’un rapport, mais seulement à des présentations sous forme de diaporama électronique (PowerPoint). Ces documents sont à usage exclusif des cabinets ministériels et des responsables des administrations et n’ont pas été publiés. Seule la liste des décisions des trois comités de modernisation des politiques publiques (décembre 2007 et avril et juin 2008) a été publiée sur Internet(8). Par comparaison, les audits de modernisation avaient tous été publiés, à de très rares exceptions près (défense, sécurité). La publication des audits de modernisation leur a donné la profondeur et la durée qui fait qu’ils sont encore amplement consultés. Votre Rapporteur spécial s’interroge fortement sur la justification du caractère confidentiel du travail des équipes de la RGPP. Avec peu d’effort en plus, une version remodelée et rédigée aurait pu être publiée, afin de valoriser le travail important qui a été effectué. C’est ce qui avait été décidé naguère pour les rapports du Conseil d’analyse économique, mis en place par le Premier ministre Lionel Jospin.

Chacune des vingt équipes d’audit de la RGPP a mobilisé quasiment à temps plein plusieurs hauts fonctionnaires (corps d’inspection, préfets…) sur une période moyenne de dix mois, ce qui est nettement plus long que les missions dont ils sont habituellement en charge, et en particulier plus long que dans les audits de modernisation. Une transparence des travaux de la RGPP aurait certainement aidé à l’acceptation des réformes et à leur mise en œuvre.

Un chef d’équipe de la RGPP a indiqué à votre Rapporteur spécial que « les personnes concernées par les politiques publiques réformées n’ont pas été associées au travail d’audit. Le fait de savoir que le document sera publié rend plus attentif au contenu des mesures et évite de présenter des mesures radicales qui n’ont pas de faisabilité. En comparaison, les audits de modernisation se sont révélés plus efficaces en raison de leur publication ».

Le travail important effectué dans la RGPP aurait ainsi pu être partagé par les administrations, par les agents publics et par les citoyens. Ce travail ne sera malheureusement pas porté à la connaissance des gouvernements qui se succèderont, ce qui constitue un véritable gaspillage de la réflexion publique. Comme l’a dit un chef d’équipe de la RGPP à votre Rapporteur spécial, « le fait qu’aucun document n’ait circulé a au contraire entretenu les fantasmes. Tout ce qui va mal dans l’administration est maintenant attribué à la RGPP ». Un autre chef d’équipe estimait que « les documents annexés aux diaporamas électroniques (PowerPoint) constituent une mine d’information et d’analyse qui mériteraient d’être publiés. Les sujets sur lesquels existaient des rapports d’audit de modernisation publics ont permis d’avancer plus vite que les autres ». Il s’agit malheureusement d’un travers très français où l’administration privilégie la détention de l’information au détriment de son partage, rendant impossible toute appropriation.

La RGPP a accéléré le rythme des réformes dans les services de l’État, ce qui pose de manière encore plus aiguë la capacité des organisations et de leurs agents à « digérer » ce qui est parfois vécu comme un changement si rapide que les repères ont du mal à se reconstituer. La réussite d’une réforme (une réorganisation de services, une fusion, un transfert de compétences, une modification profonde de processus) ne se résume pas à la production d’un nouvel organigramme, mais à la capacité de la nouvelle organisation, au nouveau processus à mieux répondre aux besoins des usagers en améliorant la cadre professionnel des agents et en consommant si possible moins de ressources. Il faut reconnaître tout ce qu’une telle réussite doit à la capacité d’adaptation et aux efforts de tous dans un climat souvent anxiogène. C’est pourquoi la question de l’appropriation des réformes par les agents est un enjeu crucial. La transparence du processus de réforme est donc une condition importante de sa réussite.

La première cause d’échec d’une réforme serait de penser que le changement est une valeur en soi. Mais ce n’est pas parce qu’il est justifié d’un point de vue stratégique ou organisationnel qu’il est porteur de sens pour ceux qui seront chargés de le mettre en œuvre. Pour décider un changement important, restructuration, fusion, changement du périmètre des compétences, il s’agit de s’interroger d’abord sur le sens de la réforme : pourra-t-elle être perçue comme légitime, apportera-t-elle un progrès (pour les usagers, pour les agents) ? Le bien fondé de la réforme, et sa perception comme telle par les agents, par les usagers et par les observateurs sera la condition première de sa réussite.

La deuxième cause d’échec est dans la mise en œuvre, et c’est une phase autrement plus risquée. La réussite de la réforme dépend de la manière dont elle sera appropriée, à tous les niveaux de la hiérarchie. L’appropriation est directement liée au sentiment d’appartenance que suscite la nouvelle organisation. Le sentiment d’appartenance ne s’établit que lorsqu’on maîtrise les outils, lorsqu’on agit dans la confiance, lorsqu’on partage de mêmes valeurs et une même culture professionnelle. Il s’agit là de revisiter le cas échéant les fondamentaux culturels, les valeurs qui cimentent les organisations, de resituer les enjeux. D’autre part, s’il n’est pas toujours possible d’associer les cadres et agents à la conception de la réforme, il est capital de leur donner de la visibilité le plus tôt possible, et de les associer à la mise en œuvre le plus largement possible. C’est une phase qui peut durer un certain temps, le temps de l’appropriation. C’est la phase de dialogue interne, de déminage des rumeurs, de transparence de l’information donnée.

Donner du sens, c’est concrètement mettre en place un dialogue interne intense, expérimenter ou préfigurer et en tirer les conclusions et créer les conditions de la confiance. Plus encore qu’en régime de croisière, la confiance est nécessaire en période de changement.

Les réorganisations ne produisent pas nécessairement d’efficience, d’économies et de meilleur travail si les agents concernés s’opposent entre eux, n’embrassent pas le changement et ne sont pas associés au processus de décision et de mise en œuvre. Le risque n’est-il pas grand d’opposer le ministère du Budget aux autres ministères ? Sait-on combien de directeurs d’administrations font mine d’appliquer la réforme mais traînent des pieds en suivant le vieil adage administratif « qui coopère perd » ? La caractéristique de la RGPP est d’annoncer des décisions presque ficelées, éventuellement avec une certaine marge de manœuvre mais faible, puis de négocier. Le désavantage de ce système est qu’il ne permet pas d’expliquer les raisons de la réforme, ce qui suppose une longue pédagogie, et qu’il n’est pas non plus garant de la rigueur budgétaire car si les mécontentements se font trop fort, le gouvernement « lâche ». Comment dès lors s’étonner que la RGPP soit perçue comme une démarche « du haut vers le bas »  top-down » en anglais) sans une écoute des agents qui l’enrichirait, sans un vrai débat, une sorte de « putsch » mû par une méfiance anti-fonctionnaires ?

Les personnels des services centraux et déconcentrés de l’État, porteurs des politiques publiques « sur le terrain », s’inscrivent dans la nouvelle évolution, qu’ils ont majoritairement appelée de leurs vœux ; ils veulent en être acteurs. Cadres et agents éprouvent cependant une forme d’inquiétude face à un changement que les plus hautes instances de l’État veulent profond, car ce changement ne sera pas le jeu de « mécano » administratif auquel ils sont accoutumés. La communication, la transparence, l’association des acteurs sont donc des enjeux fondamentaux de la réforme.

• La conduite du changement

Les moyens de la conduite de changement dans la RGPP sont lacunaires. Le projet annuel de performances indique que la DGME aide les ministères à mobiliser et former les cadres en charge des transformations, à accompagner les impacts de ces transformations sur les ressources humaines et à stimuler l’optimisation des fonctions support. Les choix politiques ne doivent pas faire oublier l’importance de la conduite de changement dans les ministères. Si elle est mal prise en compte, elle constitue un facteur de risque important pour la bonne fin des projets.

M. François-Daniel Migeon, auditionné par votre Rapporteur spécial, a indiqué que la DGME avait chargé les secrétaires généraux des ministères de mettre en œuvre les décisions prises dans le cadre de la RGPP. Des « comités de pilotage » composés du secrétaire général du ministère, des directeurs d’administration, des chefs d’équipe et de représentants de la DGME et de la direction du Budget sont chargé de surveiller cette mise en œuvre, plus que de la réaliser concrètement.

d) Retour sur le modèle canadien

Des exemples pris parmi nos partenaires étrangers, y compris l’exemple canadien - qui semble être la référence du Gouvernement -, montrent que d’autres voies, valorisant la concertation et l’appropriation des réformes, sont possibles.

● Canada

Au Canada, les résultats ont certes été dans un premier temps au rendez-vous. En 1993, le gouvernement fédéral s’est engagé à réduire le déficit de 5,9 % à 3 % du PIB en trois ans. Cet objectif de réduction du déficit public devait être réalisé par la réduction des dépenses, grâce à une « revue des dépenses » de tous les ministères. Les membres du gouvernement étaient impliqués dans la démarche, qui avait été pilotée par un comité constitué des plus hautes instances politiques et administratives.

Le gouvernement canadien a réduit les dépenses d’environ 17 milliards de dollars canadiens en imposant des économies s’échelonnant de 5 % à 40 % dans le budget des ministères selon les priorités définies. Dans le contexte de la revue des programmes, « moderniser » signifiait : affecter les ressources aux programmes prioritaires ; réduire considérablement les subventions aux entreprises privées ; tirer des revenus de certaines activités, dans la mesure où cela est souhaitable et possible, et augmenter la facturation de certains services gouvernementaux ; adopter une approche centrée sur les citoyens et l’efficacité du service.

Le gouvernement fédéral a ainsi obtenu son premier excédent budgétaire en 1997. En 1998 la dette avait reculé pour s’établir à 65 % du PIB. Les dépenses consacrées aux programmes avaient été réduites de 16 milliards de dollars canadiens ; le nombre de fonctionnaires a été réduit de 16 % (60 000 emplois). Votre Rapporteur spécial note cependant que dans le même temps le Gouvernement fédéral canadien a externalisé une grande partie des déficits vers les provinces. Il s’agit d’une réelle similitude avec la situation des collectivités locales françaises, sur laquelle le Gouvernement se garde bien de communiquer…

Toutefois, si, du point de vue de la stricte performance budgétaire, ces mesures ont été efficaces, elles ont aussi eu des conséquences négatives, notamment en matière de pertes de compétences clés dans le secteur public et de départs alarmants des plus jeunes vers le secteur privé. Ces conséquences non anticipées se sont ajoutées aux difficultés passées ou prévisibles : peu de renouvellement et de gestion des cadres, forte attractivité du secteur privé pour les jeunes, défi démographique non anticipé... Les effets néfastes en ont été décuplés : difficultés de fonctionnement de l’administration fédérale, image ternie de la fonction publique, démotivation des fonctionnaires. Dès 1996, le bilan a été tiré et une initiative d’envergure, « la relève », a été lancée afin de corriger cette situation(9).

Dès le 3 février 1997, Mme Jocelyne Bourgon, alors Greffier du Conseil privé et secrétaire du cabinet, a lancé un appel à « la relève » à travers la publication du 4ème rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada. Dans ce rapport, elle soulignait qu’une « révolution tranquille », peu observée par la majorité des acteurs publics, était en marche, et elle en analysait les causes. D’une part, les agents publics étaient confrontés aux nouveaux défis de la mondialisation : garantir la compétitivité du pays, organiser l’action publique dans un cadre contraint, rendre un service de qualité aux citoyens. Mais d’autre part, ils avaient aussi à faire face aux compressions d’effectifs, au blocage de leurs salaires, aux pertes de compétences et aux départs des « plus talentueux » aspirés par le secteur privé. Un véritable malaise était apparu.

Extraits du 4ème rapport annuel au Premier
ministre sur la fonction publique au Canada

1. La fonction publique du Canada a géré la décroissance pendant de nombreuses années ;

2. Les critiques ont blessé la fierté des fonctionnaires ;

3. La fonction publique est en train de perdre ses membres chevronnés de fait, du défi démographique à relever, mais aussi parce qu’une nouvelle tendance se dessine : « certains des meilleurs employés de la génération suivante partent avant le temps et bien avant d’avoir atteint les échelons supérieurs... »

4. Il est impossible de parler de moral et de motivation… sans parler de rémunération et d’indemnités ;

5. Le secteur privé cherche de plus en plus à recruter les cadres supérieurs et les professionnels de la fonction publique ;

6. La situation ne découle pas uniquement des éléments qui échappent à la fonction publique… Elle découle également du manque de mesures correctrices en temps opportun :

– au cours des dix dernières années la plupart des ministères ont réduit leur recrutement extérieur ;

– la mobilité, surtout interministérielle, est à son niveau le plus bas ;

– la décroissance a réduit les chances de gravir les échelons ;

– et, à tous les niveaux, l’attention nécessaire à la gestion des ressources humaines pour préparer l’organisation et son personnel à affronter l’avenir fait défaut.

Pour affronter cette réalité complexe, l’initiative « la relève » a été lancée : « véritable défi pour bâtir une administration moderne et dynamique, engagement des fonctionnaires à tout mettre en oeuvre sur le plan individuel et collectif pour moderniser l’organisation de la fonction publique, obligation de léguer aux successeurs une organisation dotée de personnes compétentes, capables de relever les défis de leur temps ». Il s’agissait, en partant d’une situation de crise, de repenser l’organisation et d’engager un profond processus de modernisation dans la gestion des ressources humaines. Après une analyse démographique sur les groupes « à risque » (sujets à départs et pertes de compétences), de nombreuses mesures concrètes et concertées ont été prises, qui pour la plupart sont toujours d’actualité, pour rétablir un certain équilibre entre l’individuel et le collectif, entre secteurs privé et public, et entre générations, dans le respect de la diversité.

● Australie

En Australie, les trois grands axes de la réforme ont été la « revue » des services publics (qui est l’équivalent de la RGPP en France), la différenciation claire entre le maître d’ouvrage et le maître d’ouvre pour mieux maîtriser les phénomènes de « lobbyisation » des administrations, et enfin les moyens de faire coopérer les administrations et leurs partenaires pour de meilleurs résultats. Ces trois thèmes ont été lancés simultanément. Ils ont fait l’objet d’un livre banc de discussion en expliquant les raisons, les conséquences, les méthodes équivalentes à l’étranger et les différents moyens de les mettre en œuvre. Sur chaque dossier un haut fonctionnaire (niveau sous directeur ou plus) a été dégagé pour une partie de son temps afin d’animer des tournées régionales de débat, monter des colloques, et procéder par toute forme qui lui convient le mieux à la dissémination des idées et à l’écoute de ceux qui vivront leur mise en œuvre. En général le processus prend environ de trois ans ; les premières mesures ont été décidées au bout d’un an et les années suivantes servent de temps d’évaluation afin d’affiner – voire de rectifier – le dispositif.

● Pays nordiques

Les pays nordiques sont très habitués à ce que l’on pourrait appeler l’accoutumance au changement. Les grandes réformes sont toujours précédées d’un rapport d’expertise, mais qui ne développe pas une seule solution ; plusieurs comités travaillent, vont sur le terrain, écoutent les réactions aux possibles propositions, reviennent si nécessaire. Il ne s’agit pas seulement de questionnaires mis sur Internet avec des blogs, mais de débats de position de problèmes et de solution qui s’affinent au cours du temps. La Suède, en particulier, a une longue tradition d’évaluation, depuis le XVIème siècle, avec une forte dimension d’indépendance.

e) Le blocage de la RGPP sur la réforme des grandes politiques d’intervention

Nous nous souvenons tous de la tentative de suppression de la carte de famille nombreuse par la décision prise en avril dernier dans le cadre de la RGPP. Devant la très grande émotion suscitée dans l’opinion publique, et relayée par les medias, le Président de la République a fait marche arrière et a abandonné cette réforme. Dans la foulée, il a décidé de renvoyer « à l’automne » les volets de la RGPP qui ne touchent pas directement à l’organisation ou aux processus administratifs de l’État, c’est-à-dire les grandes politiques d’intervention, notamment dans le domaine social (santé, assistance, famille, logement…). M. François Daniel Migeon, Directeur de la DGME, a confirmé à votre Rapporteur spécial lors de son audition qu’aucun CMPP n’était en préparation. C’est donc un constat de blocage sur la méthode de la RGPP, au-delà de la réforme des structures et des procédures administratives.

La DGME indique que les politiques d’intervention ont été analysées par les équipes d’audit et que ce travail sera utilisé dans le cadre de ce que le Gouvernement appelle l’« agenda social » en cours de préparation. En ce qui concerne les politiques d’intervention en faveur des ménages (maladie, famille, solidarités, logement, emploi et formation professionnelle), le comité de suivi a livré au conseil de modernisation des politiques publiques une série de diagnostics et d’outils, dont une grande partie a permis de nombreuses décisions, déjà prises. Le travail conduit par le comité de suivi de la RGPP sera utilisé par le Président de la République et le Gouvernement dans le cadre de cet « agenda social » qui vise à renouveler notre modèle de protection sociale, en remettant au cœur la valeur travail, l’équilibre entre les droits et les devoirs et l’efficacité de chaque euro dépensé.

Votre Rapporteur spécial souhaiterait savoir avec quelles modalités de concertation, dans quelles enceintes et avec quel calendrier le Gouvernement entend poursuivre le processus de réformes sur les grandes politiques d’intervention. Y aura-t-il une « révision générale des politiques sociales » ? La méthode suivie fait-elle une place suffisante à la recherche d’adhésion, à la négociation après identification des marges de manœuvre possibles, des concessions envisageables, au montage d’expérimentations, à l’évaluation à plusieurs étapes ? La RGPP peut-elle fonctionner sans qu’il y ait une seconde phase, entièrement consacrée à la recherche de compromis acceptables, à la pédagogie du changement, au management, à l’expérimentation de la mise en œuvre des réformes envisagées ? Cette deuxième phase requerrait au moins autant d’intelligence et d’énergie que la première.

3.– Les autres chantiers de modernisation de l’État

a) La mesure et la réduction des charges administratives

Dans le cadre de la politique européenne de la mesure et la réduction des charges administratives qui pèsent sur les entreprises (MRCA), un recensement de l’ensemble des obligations et formalités administratives auxquelles sont soumises les entreprises a été réalisé. Un total de 8 836 obligations ont été identifiées (10 000 en Allemagne, 20 000 au Royaume-Uni).

Sur le modèle des coûts standards, 620 obligations administratives ont été mesurées (Standard Cost Model – SCM) représentant un montant total de près de 6 milliards d’euros par an pour les entreprises concernées et les administrations chargées de l’instruction des dossiers.

Les obligations administratives les plus lourdes et les plus irritantes, sélectionnées par l’administration et les professionnels, font l’objet d’une étude approfondie. Les pistes de simplification potentielles sont analysées et chiffrées tant du point de vue du coût de mise en œuvre que des gains pouvant être escomptés. Les mesures de simplification retenues peuvent relever de la loi ou d’une simple organisation des services, la dématérialisation constituant plus de la moitié des gains attendus de la réforme. En fin d’année 2008, plus de 300 obligations auront été étudiées en atelier de simplification, les pistes retenues faisant alors l’objet d’un plan d’actions. Actuellement, 134 plans sont en cours de mise en œuvre.

En France, le gouvernement s’est engagé à ce qu’à l’horizon 2011, les 2 000 obligations les plus lourdes aurons été analysées. Avec 1 000 plans d’action environ, devraient avoir diminué 25 % les charges qui pèsent sur les entreprises du fait des procédures administratives.

b) L’accueil dans les services publics

Afin de remettre l’usager au centre de la relation administrative, le Gouvernement entend mettre l’accent sur le développement de l’accueil intégré, en rendant plus nombreuses et plus efficaces, les synergies déjà existantes entre le téléphone, le guichet et l’Internet.

Plusieurs mesures de simplification et d’amélioration du service à mettre en œuvre ont été décidées dans le cadre de la RGPP :

– l’extension des garanties données au public sur la qualité de l’accueil se traduira par l’application systématique des 19 engagements de service et de suivi de l’accueil à toutes les administrations d’État. Il s’agit de déployer d’ici fin 2010 dans tous les services de l’État le nouveau « référentiel Marianne ». Construit dans la continuité de la « charte Marianne », le référentiel décrit 19 engagements ;

– l’évaluation annuelle par un tiers de l’application par chaque service de l’État du référentiel Marianne évaluation prendra la forme d’une « enquête mystère » d’envergure (tous les départements et tous les services de l’État seront concernés) ;

– l’amélioration de l’accueil physique des administrations se traduira par l’adaptation des horaires d’ouverture des guichets en fonction des attentes des usagers, du contexte local et la mise en place de plages horaires de rendez-vous pour tous les services accueillant du public afin de réduire les temps d’attente aux guichets.

Les recommandations de l’audit sur « les dispositifs d’accueil à distance dans les administrations » trouvent leur traduction dans la décision d’améliorer l’efficacité de l’accueil téléphonique des administrations.

Cette mesure transversale de la RGPP comprend trois axes principaux : l’élargissement des horaires d’ouverture du centre d’appel généraliste « 39-39 » ; l’extension des services offerts par le 39-39 ; la limitation du coût d’appel vers les administrations à celui d’un appel local.

c) L’administration électronique

Le site www.mon.service-public.fr se présente comme un espace particulier du portail de l’administration française www.service-public.fr accessible via un compte personnel. Il complète les services existants de www.service-public.fr en offrant aux citoyens un guichet personnel simplifiant l’accès aux démarches en ligne. Le projet repose sur des partenariats avec d’autres organismes de la sphère publique qui proposent des démarches en ligne sur leurs propres sites Internet et les raccordent au site www.mon.service-public.fr.

L’exécution du projet s’est déroulée en deux phases : la définition du besoin et la mise en place des partenariats (2004-2006) ; la réalisation de la plateforme (septembre 2006 – décembre 2008).

d) La nouvelle Agence des achats de l’État

Dans le cadre de la RGPP, il a été décidé de remplacer en 2008 la Mission interministérielle France achats (MIFA) par une nouvelle structure, l’Agence des achats de l’État (AAE) dotée de pouvoirs plus étendus. Elle est appelée à devenir un acteur essentiel au service de l’efficacité de la politique d’achat. En charge de la définition d’une stratégie pour l’État, de l’identification des opérateurs et de l’animation de la filière achat, elle devra générer d’importants gains quantitatifs et qualitatifs. Elle aura également pour objectif de mieux prendre en compte les critères de développement durable et d’accès des PME dans les achats publics.

Les textes sont en cours d’élaboration. L’Agence des achats de l’État sera la première structure créée dans le cadre des nouvelles dispositions relatives aux « agences de service public ».

C.– LES SYSTÈMES D’INFORMATION FINANCIÈRE ET DE PAYE DE L’ÉTAT

1.– Chorus

L’Agence pour l’informatisation financière de l’État (AIFE) est chargée de la construction et de la maintenance des systèmes d’information financière de l’État.

Le projet chorus est le principal projet en cours. Appelé à remplacer les outils existant (ACCORD LOLF, INDIA, ODE…), en fin de vie, ce projet vise à mettre à la disposition des administrations centrales et déconcentrées de l’État un outil commun et intégré de gestion financière, budgétaire et comptable, support technique de la mise en œuvre de l’ensemble des dispositions de la LOLF.

Le ministère du Budget s’est porté candidat pour expérimenter chorus, et cette expérimentation fait l’objet d’un programme « technique » au sein de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Votre Rapporteur spécial a eu connaissance juste avant la présentation de son rapport, de l’étude commandée par la commission des Finances à la Cour des comptes, en application de l’article 58-2° de la LOLF, et portant sur « le système d’information financière de l’État en matière comptable, financière et de gestion ». Ce rapport servira de base aux prochains travaux de la Mission d’information sur la mise en oeuvre de la LOLF (« MILOLF ») de votre commission des Finances. Il soulève quelques questions dont la réponse conditionne la bonne mise en œuvre de la LOLF dans les ministères.

a) Les fonctionnalités permettront-elles une application pleine et entière de la LOLF ?

Le périmètre de chorus a été structuré autour de trois types de fonctionnalités :

– fonctionnalités cœur couvrant les attentes prioritaires de la LOLF, et utilisées par tous les ministères ;

– fonctionnalités avancées, permettant une amélioration de la productivité ou du pilotage de la gestion, dans les conditions suivantes : mise en œuvre progressive, existence d’une demande par un nombre significatif de ministères, vérification fonctionnelle et technique de la couverture du besoin en standard par le progiciel de gestion intégré (PGI) et évaluation préalable du retour sur investissement ;

– fonctionnalités hors système cible hors champs budgétaire et comptable, sous la responsabilité des ministères avec mutualisation éventuelle des investissements, du moins jusqu’à la fin du déploiement de chorus.

L’AIFE indique que les fonctionnalités avancées suivantes sont d’ores et déjà planifiées pour être disponibles dès le début de l’année 2010. Elles seront donc généralisées avant la fin du déploiement de chorus : programmation annuelle et pluriannuelle (travaux en cours), stocks (travaux en cours), régies (travaux lancés), gestion de projet (travaux lancés), portail fournisseur, demandes d’achat, carte achat et achats sur catalogue (travaux lancés), administration des ventes, rapprochement bancaire et aide juridictionnelle.

Des réflexions sont lancées par l’AIFE pour examiner les besoins connexes aux fonctions budgétaires et comptables qui seront gérées dans chorus. Il peut en être ainsi de la comptabilité analytique et de la gestion extracomptable du patrimoine immobilier de l’État, pour répondre aux besoins d’une gestion rénovée. Les arbitrages concernant ces extensions du périmètre de chorus sont à rendre. Ils devront intégrer les enjeux en matière de modernisation de l’État et de rationalisation du système d’information financière de l’État (SIFE), mais aussi le risque qu’une planification trop hâtive ferait peser sur la stabilité de la solution et le calendrier de son déploiement.

Les ministères s’interrogent encore sur la capacité du nouveau système à satisfaire les attentes des gestionnaires en matière budgétaire et fiscale. Des impératifs techniques et de rentabilité ont entraîné, pour des fonctionnalités cœur, des délestages sur d’autres applications, ainsi Farandole (programmation budgétaire et production des documents budgétaires) et le système d’information SI Paye (calcul de la paie des agents), qui restent en dehors de chorus.

Des doutes subsistent sur les fonctionnalités de chorus en matière de comptabilité analytique, en vue d’un pilotage par la performance. Le risque est que les ministères soient dans l’obligation de maintenir leurs applications métiers. Le choix d’utiliser le module de comptabilité analytique du progiciel de gestion intégrée de l’éditeur SAP, pour la comptabilité d’analyse et de coût (CAC), impose une uniformisation des outils et des concepts analytiques pour l’ensemble de l’Etat. Les définitions ne seront donc pas compatibles avec les besoins de tous les ministères, qui devront mettre en œuvre, à leur niveau, des outils de comptabilité analytique spécifiques. Les outils permettant le pilotage par la performance et la comptabilité analytique sont cependant les conditions préalables à l’établissement du contrôle de gestion et à la modernisation de la gestion publique.

b) La gouvernance mise en place évitera-t-elle les échecs précédents ?

Le projet chorus est piloté par l’AIFE, qui en est l’instance technique, sous la supervision du Comité d’orientation stratégique (COS), à composition plus large, mais où les directions qui jouent un rôle prépondérant relèvent essentiellement du ministère du Budget (direction générale des finances publiques, direction du Budget notamment et AIFE). Cette gouvernance technique ne permet pas de trancher les questions qui opposent les ministères entre eux.

La complexité de l’appareil d’État rend la prise de décision particulièrement difficile. La recherche du consensus interministériel est longue et son échec nécessite de recourir à des arbitrages au niveau politique des cabinets ministériels. La gouvernance des systèmes d’information de l’Etat n’a jamais totalement éclairci les compétences respectives du COS, de la DGME, du ministre du Budget, du Premier ministre, voire du secrétaire général de l’Elysée dans le cadre des arbitrages de la RGPP.

La Cour des comptes a noté à plusieurs reprises que cette gouvernance présente un risque d’incohérence car l’AIFE ne comporte pas dans son champ de compétence des systèmes comme COPERNIC (recettes de l’État), Farandole ou le SI Paye. Dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire (2007) la Cour estime que l’ « AIFE et l’opérateur national de paye sont rattachés au programme, mais les directions des ministères chargés de l’économie et du budget ont développé d’autres outils pour accompagner la LOLF ou pallier les déficiences de ceux qui existent. La conduite des systèmes d’information en est désordonnée et leur coût global ne peut être appréhendé. » Certes les deux conseils d’orientation stratégique de chorus et du SI Paye ont la même présidence, mais une coordination globale au plus haut niveau est plus le moins nécessaire.

Un autre enjeu est l’arrêt des applicatifs ministériels au démarrage de chorus. Un recensement en cours des applications ministérielles de gestion montre en septembre 2008 un nombre proche de 350. On sait cependant que tous ces applicatifs ne pourront disparaître. Le choix a cependant été fait dans le projet chorus de simplement « urbaniser » (10) les applicatifs qui subsisteront autour de chorus. Un plan stratégique, sous la forme d’un schéma directeur, aurait sans doute permis de mieux coordonner les systèmes d’information, de limiter le nombre des applicatifs ministériels et donc de réduire les coûts.

Le progiciel de gestion intégré SAP offre de bonnes fonctionnalités pour le déversement des données budgétaires et comptables mais, de par son caractère intégré, n’est pas a priori conçu pour communiquer avec d’autres systèmes d’information en dehors de la sphère financière.

Enfin il n’est pas prévu en l’état sur les opérateurs de l’État (établissements publics principalement) soient intégrés dans chorus. Si ce dernier sait gérer la comptabilité d’une maison mère et de ses filiales, il ne sait pas gérer plusieurs plans comptables. Or on sait que les services ministériels utilisent le « plan comptable de l’État » (PCE), alors que de nombreux opérateurs fonctionnent sous le plan comptable général.

c) Le coût du projet sera-t-il maîtrisé ?

Rappelons que la Cour des comptes avait mesuré en novembre 2005 les dépenses consacrées à ACCORD : elles s’élèvent à 253 millions d’euros pour le ministère du Budget et 40 millions d’euros supplémentaires pour les autres ministères. Le projet annuel de performances indique que l’adaptation de l’application ACCORD à la LOLF a engendré des coûts d’élevant à 25 millions d’euros (marché adaptation) et 116,8 millions d’euros (marché déploiement).

Le tableau suivant synthétise les données budgétaires du projet chorus :

COÛT DU PROJET CHORUS JUSQU’EN 2011

(en millions d’euros hors titre 2)

Consommations du projet

Réalisé
2006 et 2007

2008

2009

2010

2011

2012 à 2015

Total (*)

Autorisations d’engagement

240,2

202,3

15,5

23,2

70,3

– 

551,6

Crédits de paiement

48,8

99

114

142,7

61,3

85,7

551,6

(*) Le coût prévisionnel du projet Chorus jusqu’en 2011 est estimé à 551,6 millions d’euros. Il comprend 435,4 millions d’euros au titre de l’investissement initial et 116,2 millions d’euros au titre des coûts récurrents.

Source : projet annuel de performances pour 2009

Il faut distinguer le coût initial (2006-2011) et le coût total (sur dix ans de vie du projet).

Le coût prévisionnel initial indiqué dans le projet annuel de performances est donc estimé à 551,6 millions d’euros entre 2006 et 2011. Cette estimation tient compte des 85,7 millions d’euros pour les coûts récurrents(11) qui correspondent au solde des AE à couvrir en CP après 2011 sur les AE engagées de 2006 à 2011. L’étude de l’Inspection générale des finances de novembre 2006 (12) avait évalué le coût d’investissement initial de chorus entre 419 et 566 millions d’euros, selon le nombre d’utilisateurs, auquel il fallait ajouter environ 100 millions d’euros par an pour les coûts récurrents. Or le coût prévisionnel présenté dans le projet annuel de performances ne comprend pas les dépenses de fonctionnement de l’AIFE (78,3 millions d’euros entre 2006 et 2011)(13). Il n’inclut pas non plus les coûts qui seront à la charge des différents ministères pour adapter leurs applications de gestion, et qui sont estimés à environ 80 millions d’euros par la Cour des comptes.

Le projet annuel de performances indique que le scénario retenu fixe le coût prévisionnel total du projet chorus à 1 110,4 millions d’euros Ce montant correspond à un coût global de projet sur les dix premières années (donc jusqu’en 2015) en intégrant les dépenses de maintenance et de fonctionnement à partir de 2011 (évaluées à environ 137 millions d’euros par an).

Selon l’AIFE, la valeur actuelle nette (VAN) (14) serait de 852,6 millions d’euros, avec un gain annuel récurrent estimé à 460,9 millions d’euros(15). Le délai de retour sur investissement serait de 6,6 ans. Le délai de retour sur investissement est le nombre d’années nécessaire à l’atteinte d’un équilibre entre les coûts et les gains du projet (une durée de 6,6 années signifie donc l’année 2013). La période sur laquelle la rentabilité a été évaluée est 2006 – 2015, soit dix années correspondant à la durée habituelle d’évaluation des projets dans le cadre d’études de retour sur investissement. La valeur actuelle nette était estimée entre 800 et 1 100 millions d’euros dans le scénario le plus favorable (déploiement de l’ensemble de la réingénierie) du rapport de l’Inspection générale des finances.

Les coûts constatés et prévus actuellement représentent donc une certaine dérive par rapport aux estimations prévisionnelles. L’AIFE précise que le scénario retenu assure la maîtrise des coûts par une réduction du nombre d’utilisateurs et de sites et la mise en place d’une démarche interministérielle de réorganisation. Votre Rapporteur spécial tient à souligner les efforts qui seront demandés aux fonctionnaires chargés de travailler sur cette nouvelle application, avec la réorganisation des services, la réduction importante du nombre d’utilisateurs qui en résultera et la recherche de gains de productivité. Il est à craindre que cette pression n’augmente et que le nombre de licences ne soit encore réduit dans les mois à venir par la recherche du respect des objectifs financiers.

Le rapport précité de l’Inspection générale des finances avait indiqué les conditions d’un retour sur investissement, au premier rang desquelles la réorganisation des services et des processus budgétaires dans les services centraux et déconcentrés. L’enjeu est la mutualisation des services budgétaires pour permettre de limiter le nombre de licences, qui conditionne les coûts. La plus grande partie des économies attendues résultat des gains de productivité qui permettent de gagner des emplois. Les arbitrages rendus avant et pendant la RGPP ont tranché en faveur d’une gestion au niveau régional (et non départemental), mais n’ont pas indiqué avec quelles modalités. Un arbitrage du 18 juillet 2008 a décidé, du fait de leur taille, les ministères de la Justice, de la Défense et de l’Éducation nationale conserveraient des services comptables spécifiques. La décision pour les autres ministères, en particulier de l’Écologie et de l’Intérieur, devrait être prise avant la fin de l’année, avec soit une organisation verticale, soit une mutualisation interministérielle. Or le déploiement ne peut intervenir que 18 mois après la décision d’arbitrage. Les enjeux en termes de coût et de délai de déploiement sont donc intrinsèquement liés.

d) Le calendrier sera-t-il tenu ?

L’AIFE indique que le déploiement de chorus s’effectue en plusieurs étapes, avec un périmètre d’utilisateurs et de services croissant. Les éléments de calendrier qu’elle avance ne sont donnés « qu’à titre indicatif et sont susceptibles d’évoluer en fonction notamment de la mise en œuvre des orientations issues de la révision générale des politiques publiques (RGPP) ». En particulier, les hypothèses de mutualisation des services de gestion budgétaire et comptable devraient aboutir à des réorganisations en administration déconcentrée.

Les travaux menés depuis avril 2007 entre l’AIFE, l’éditeur SAP, les intégrateurs et les ministères et les directions chargées de la réglementation budgétaire et comptable, ont permis de déployer au 30 juin 2008 auprès de 100 utilisateurs (licences lourdes) une première version de chorus sur un périmètre fonctionnel portant sur les subventions pour charges de service public et les dépenses de transfert gérées en administration centrale. Au delà de cette vague de déploiement et conformément au cadencement semestriel retenu, de nouvelles versions seront déployées en janvier 2009, mars 2009, juillet 2009 et en 2010.

L’AIFE indique que pour le déploiement de la vague de janvier 2009 (V2 chorus), les travaux ont démarré et concernent près de 400 utilisateurs (licences lourdes). A l’automne 2008, seront lancés les travaux portant sur la gestion des immobilisations avec une reprise des données de gestion immobilière prévue en mars 2009 pour au moins 1 000 utilisateurs (licences lourdes).

Dans le même temps, sera lancé le déploiement de la vague de juillet 2009 (V3 chorus) avec une hypothèse de 500 à 3 000 utilisateurs (licences lourdes). En 2010, le déploiement devrait concerner 10 000 à 15 000 utilisateurs (licences lourdes).

La sécurisation du déploiement et l’optimisation de son coût nécessitent de prendre en compte notamment la généralisation des nouvelles organisations administratives indispensables à la mise en œuvre de la RGPP et au retour sur investissement du projet chorus. La réponse au questionnaire budgétaire adressé par votre Rapporteur spécial au ministère du Budget indique que « les comptes 2011 seront les premiers à pouvoir être certifiés avec chorus. Le déploiement procédera en conséquence en trois vagues, janvier 2010, juin 2010 et janvier 2011. »

S’agissant de la construction de la solution chorus et de son déploiement sur des sites pilotes dans le cadre du marché « construction, pilotes, maintenance », les travaux réalisés ont permis de mettre en production la version 1 de chorus en juin 2008 quand bien même le marché n’a été notifié qu’en avril 2007. Le retard initial d’un peu plus de trois mois n’a pas pu être rattrapé, selon l’AIFE.

Concernant le marché « déploiement », l’appel d’offre lancé en août 2007 a été déclaré sans suite par le responsable du pouvoir adjudicateur le 19 novembre 2007, afin de sécuriser la trajectoire de chorus. Cette décision a été prise pour tenir compte des réflexions en cours, dans le cadre de la RGPP, sur l’organisation de l’administration, notamment territoriale. Il était nécessaire que ce cadre soit stabilisé pour déterminer les conditions du déploiement de chorus. Une nouvelle procédure a été lancée en juillet 2008 sur de nouveaux fondements (accord cadre et marchés subséquents), permettant une définition des besoins au fur et à mesure du déploiement et adaptée aux évolutions des services des ministères concernés. Les marchés existants permettent d’assurer les travaux de déploiement en cours. L’AIFE estime que la décision de 2007 n’aura pas d’impact sur le calendrier du déploiement.

Le projet annuel de performances indique que « le calendrier général prévoit le démarrage du système d’information sur sites pilotes en 2008 et 2009 pour un déploiement dans l’ensemble des services de l’État à compter de l’année 2010 ». Le choix a été fait d’un déploiement progressif par programme, pour éviter les risques inhérents au « big bang ». Au terme du projet, 35 000 utilisateurs (23 000 licences lourdes et 12 000 licences légères) pourront utiliser le progiciel. Votre Rapporteur spécial note que le calendrier initial, qui été encore mentionné l’an dernier, indiquait un déploiement complet avant la fin de l’année 2009. Les décisions de réorganisations administratives engendrées par la RGPP, entre juillet 2007 et juin 2008, ont certes retardé la passation du marché de déploiement, et cette cause est évidemment indépendante de la volonté de l’AIFE. On a vu que des arbitrages restaient à prendre, avant la fin de l’année, sur l’organisation des services comptables de plusieurs ministères. De la décision qui sera rendue avant la fin de l’année sur l’organisation administrative des ministères de l’Écologie et de l’Équipement dépendra leur basculement éventuel sous chorus au cours de l’année 2010 ou au début de l’année 2011. Votre Rapporteur spécial a le sentiment que l’AIFE, avec des formulations ambiguës, cache aux ministères et à la représentation nationale un glissement de calendrier qui pourrait être d’un an. Ce décalage par rapport au calendrier initial n’a pas encore été officiellement annoncé.

Une incertitude existe également sur le temps d’adaptation au nouveau système chorus, qui est couramment de deux années pour des projets similaires. La difficulté de ce grand projet informatique est également indéniable, et la prudence ne sera jamais blâmée s’il s’agit d’éviter les erreurs commises lors de l’adaptation de l’application ACCORD au contexte de la LOLF. La défaillance de ces systèmes anciens a entraîné la situation dégradée que l’on connaît depuis l’entrée en vigueur de la LOLF. Enfin, il reste encore à adapter le règlement de comptabilité publique au contexte nouveau de chorus.

Les ministères attendent avec impatience le déploiement du système pour tirer pleinement parti des potentialités de la LOLF en termes de gestion. Votre commission des Finances attache une importance particulière à la réussite de cette opération. Elle procèdera à un examen approfondi de ces questions au cours des semaines à venir, dans le cadre de sa mission d’information précitée sur la mise en oeuvre de la LOLF.

2.– L’Opérateur national de paye

L’Opérateur national de paye (ONP) a été créé en 2007 pour moderniser la fonction paye au sein de l’État. La décision a été prise de développer une nouvelle application informatique pour la paye des agents de l’État, afin de la rendre plus efficiente, de répondre aux besoins accrus de pilotage des effectifs et de la masse salariale induits par la LOLF, et de mettre en place un système d’information décisionnel interministériel qui favorise le pilotage stratégique et opérationnel de la gestion des ressources humaines et de la paye de l’État. La bonne articulation entre la gestion ministérielle des ressources humaines et le système d’information de paye interministériel passe par une harmonisation des systèmes d’information des ressources humaines (SIRH) ministériels.

Le déploiement d’une chaîne de paye modernisée commencera en 2012 avec la mise en place de la nouvelle solution de paye sur des sites pilotes. Sa généralisation, par paliers, s’inscrira dans un scénario de déploiement conservatoire s’étalant jusqu’en 2016. D’ici 2012, les ministères et l’ONP doivent conduire l’harmonisation des systèmes d’information nécessaire à la gestion des ressources humaines pour qu’ils échangent de manière fluide avec le système de paye et avec le système de pilotage et d’analyse interministériels.

Le ministère indique que, conformément aux décisions prises dans le cadre de la RGPP, le programme ONP est porteur de gains de productivité liés à la refonte des processus de paye dans les ministères (environ 3 000 ETP). Ces réorganisations devront être opérationnelles après le déploiement du premier pilote. Avec le remplacement de l’organisation actuelle de la paye telle qu’assurée par le Trésor public et ses 30 services liaisons rémunérations, un gain d’environ 800 ETP supplémentaires est attendu. Ces économies seront obtenues au fil du déploiement du système d’information (SI Paye) et avec un ONP pleinement opérationnel.

*

* *

III.– LE PROGRAMME CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

Le programme Conduite et pilotage des politiques économique et financière regroupe les fonctions soutien des ministères de l’Économie et du Budget (secrétariat général, logistique, achats, personnel, action sociale, informatique, immobilier, parc automobile…).

A.– LES CRÉDITS ET LES EMPLOIS SONT, LÀ AUSSI, RELATIVEMENT STABLES

Les crédits demandés dans le projet annuel de performances s’élèvent à 876,3 millions d’euros en CP (871,7 millions d’euros en 2008) et 990,4 millions d’euros en AE (1 006,9 millions d’euros en 2008).

La programmation budgétaire triennale, dont la relative stabilité a été notée au niveau de la mission, est déclinée au niveau des crédits du programme.

PROGRAMMATION BUDGÉTAIRE TRIENNALE (2009-2011)

(en millions d’euros)

Conduite et pilotage des politiques économique et financière

AE

990

872

868

CP

876

875

868

Source : projet annuel de performances 2009

La principale réforme relative au programme consiste en la mise en place de l’Agence des achats de l’État (AAE), qui étend à tous les ministères les principes de professionnalisation et de mutualisation mis en œuvre depuis 2005 pour les ministères économique et financier.

Le plafond d’autorisation d’emplois diminue de 37 ETPT entre 2008 (5 407) et 2009 (5 370). Les suppressions d’emplois (- 74 ETPT) ont été compensées par les effectifs supplémentaires de l’Agence centrale des achats (+ 27 ETPT) et de la Délégation nationale de lutte contre la fraude (+ 9 ETPT).

Le projet annuel de performances contient, dans la partie relative à la justification au premier euro, un tableau de bord présentant les principaux indicateurs immobiliers des deux ministères, qui a été établi en conformité avec les recommandations émises par la direction du Budget.

INDICATEURS IMMOBILIERS DES MINISTÈRES ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

Indicateurs et ratios

Administration centrale (1)

Services déconcentrés

Total programme

Nature

Repère

Libellé

Unité

     

Indicateurs et
ratios de surface

1

SHON du parc (2)

m2

476 087

   

2

SUB du parc (3)

m2

437 055

   

3

SUN du parc (4)

m2

230 619

   

4

Ratio SUB/SHON (5)

nb

0,92

   

5

Ratio SUN/SHON

nb

0,48

   

Indications et
ratios d’occupation

6

Effectif (6)

nb

14 133

   

7

Ratio SUB/
Effectif (7)

m2/effectif

30,92

   

8

Ratio SUN/Effectif

m2/effectif

16,32

   

9

Coût de l’entretien courant

euro

17 431 675

   

10

Ratio entretien courant/SUB

euro/m2

39,88

   

Indicateurs et ratios d’entretien lourd

8

Coût de l’entretien lourd (8)
(parc domanial uniquement)

euro

AE : 10 334 325

CP : 10 334 325

AE

CP

AE

CP

9

SUB du parc domanial (ou en quasi-propriété)

318 273

   

10

Ratio entretien lourd/SUB
(parc domanial)

euro/m²

AE : 32,47

CP : 32,47

AE

CP

AE

CP

(1) Les surfaces mentionnées ici sont celles gérées par l’administration centrale des ministères économique et financier. Elles correspondent aux surfaces retenues dans le cadre du SPSI 2008-2013. Elles intègrent les surfaces occupées par la DGEFP et la direction du tourisme, mais non les locaux occupés par la DGAFP. Les effectifs dits d’administration centrale sont constitués d’agents pouvant être affectés à Paris, en région parisienne (sites : de Montreuil, de Noisy–le Grand, etc.) ou en province (service des pensions, antennes DPAEP, etc.).

(2) La SHON (Surface Hors Œuvres Nette) intègre l’ensemble des surfaces de plateaux (parkings et sous-sols compris) des immeubles de bureaux détenus par l’administration centrale des ministères économique et financier.

(3) La SUB (Surface Utile Brute) est égale à la somme de toutes les surfaces d’espaces de travail (bureaux et salles de réunions privatives).

(4) La SUN (Surface Utile Nette) est égale à la somme de toutes les surfaces de travail (bureaux et salles de réunions privatives).

(5) Ce ratio de 0,92 résulte, notamment, de l’importance des surfaces de parkings sous–terrains intégrés dans la SHON.

(6) Dans un souci d’objectivité, il a été porté dans cette case le montant des effectifs physiques réellement abrités par l’ensemble du parc concerné (et non pas les seul ETPT à statut d’administration centrale). Dans ce total, figurent des agents de statuts très différents : agents de statut d’administration centrale, agents des services déconcentrés travaillant en centrale, agents d’autorités administratives indépendantes, agents de services à compétence nationale, personnels de sociétés de services.

(7) Ce ratio concerne le rapport SUB (cf. repère 2) / effectifs physiques (cf. repère 6). Ce ratio de 30,92 est à mettre en perspective avec le ratio Surface utile nette de bureaux/effectifs physiques, qui ressort à 16,3 m² (cf. SPSI).

(8) Les crédits d’entretien lourd du parc domanial sont inscrits en PLF 2009 sur le programme Entretien des bâtiments de l’État.

Source : projet annuel de performances pour 2009

Votre Rapporteur spécial salue l’effort effectué par le secrétariat général pour produire ces informations, qui permettent de mesurer la performance immobilière des deux ministères. Il note que, pour les services centraux, le ratio de 16,3 m2 (SUN) par agent est encore nettement supérieur à la cible de 12 m2 (SUN) par agent préconisée depuis 2006 par le service France Domaine. Les coûts montrent un ratio de 39,90 euros par m2 (SUB) pour l’entretien courant et de 32,50 euros par m2 (SUB) pour l’entretien lourd. Il est dommage que ces données ne soient pas comparables avec les indicateurs utilisés habituellement par la profession. Par exemple le dernier baromètre de la société IPD-France estime à 428 euros par m2 en surface utile brute locative (SUBL) le coût de l’immobilier d’exploitation en France.

Les crédits de l’action n° 2 (Promotion des politiques économique, financière et de l’emploi) comprennent les dépenses du service de communication (SIRCOM). Ces dépenses sont réduites de 33,3 millions d’euros en 2008 à 27,1 millions d’euros en 2009. Elles couvrent les grandes campagnes de communication (promotion des grandes politiques du Gouvernement) et des actions permanentes (éditions, sondages, colloques, service de presse…). Votre Rapporteur spécial se serait félicité de ces économies, qui auraient été parfaitement justifiées par la situation tendue des finances publiques, s’il n’avait lu par ailleurs que les crédits interministériels de communication, géré par le service d’information du Gouvernement (SIG), augmentent dans des proportions très importantes.

Le projet annuel de performances pour 2009 de la mission Direction de l’action du Gouvernement indique que les crédits du SIG passent de 5,6 millions d’euros en 2008 à 22,5 millions d’euros en 2009 (AE et CP). En outre un abondement de crédits à hauteur de 4,5 millions d’euros est intervenu en gestion 2008 pour permettre l’engagement d’une action de communication relative au pouvoir d’achat. Le projet annuel de performances précise que « cette augmentation sensible des crédits inscrits en 2009 par rapport à l’exercice budgétaire 2008 provient du redéploiement de crédits de communication en provenance des différents départements ministériels ».

Ainsi, le projet annuel de performances du programme Conduite et pilotage des politiques économique et financière indique, en page 200, qu’un « mouvement de crédits de 3,84 millions d’euros a été opéré en base budgétaire 2009 à partir du budget du SIRCOM au profit du service d’information du Gouvernement (SIG) pour la communication gouvernementale. Ce transfert (16) touche exclusivement le budget des campagnes de communication dont la dotation pour 2009 est ainsi ramenée à 5,54 millions d’euros en AE et à 5,26 millions d’euros en CP. »

Votre Rapporteur spécial note en outre que chacune des directions des ministères économiques et financiers a son propre budget de communication. Ainsi la DGFiP a engagé une grande campagne sur la télé-déclaration. La communication de la direction générale des Entreprises (DGE) a porté sur les aides aux entreprises, et notamment les PME, celle de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) sur les obligations des voyageurs et celle de la DGCCRF sur les vacances. Le prochain rapport annuel de performances pourrait utilement récapituler l’ensemble des dépenses de communication des deux ministères.

Les crédits de l’action n° 5 (Prestations d’appui et de support) regroupe les dépenses administratives des deux ministères : informatique, achats, téléphone, immobilier, formation, etc. Ils sont demandés à hauteur de 264,2 millions d’euros (CP) en 2009, contre 164 millions d’euros inscrits en 2008. Les loyers budgétaires représentent 86 millions d’euros et les baux 54,1 millions d’euros. Le budget d’investissement immobilier des services centraux des deux ministères est transféré sur le programme Entretien des immeubles de l’État pour un montant de 10,3 millions d’euros en AE et CP.

B.– UNE STRATÉGIE DE PERFORMANCE QUI DEVRAIT ÊTRE EXEMPLAIRE POUR LES FONCTIONS DE SOUTIEN

Votre Rapporteur spécial estime que la stratégie du programme est présentée dans la continuité directe de celle qui avait été exposée en 2008. Il rappelle cependant les remarques qu’il avait émises dans le volume II du rapport (n° 1004) précité sur le projet de loi de règlement pour 2007 :

« Le bilan stratégique, tel que décrit par le responsable de programme, ne donne cependant pas l’impression d’une forte ambition dans la définition d’une stratégie propre à ces fonctions soutien. Les ministères économique et financier auraient pourtant un rôle exemplaire à jouer en la matière.

Ces fonctions soutien, qui existent dans tous les ministères, sont très importantes par l’importance de leurs crédits. Elles représentent des enjeux forts en termes de modernisation de l’administration : rôle du secrétaire général de l’administration, corps d’inspection, réforme de la gestion des ressources humaines, action sociale, adaptation de la gestion financière et comptable au cadre instauré par la LOLF, mise en oeuvre de la nouvelle gestion immobilière de l’État, rationalisation des achats, parc automobile, logistique, politique informatique, affaires juridiques, communication… La définition de programmes soutien pour chacun des grands ministères permet une mutualisation des actions sur des problématiques qui sont transversales aux services opérationnels. Les objectifs d’une stratégie ambitieuse pourraient inclure l’optimisation de l’utilisation des compétences, la maîtrise des coûts et l’amélioration de la qualité des prestations rendues. »

La présentation de la stratégie explique certes comment le secrétariat général améliore la performance en matière de qualité de prestation des services d’inspection, de contrôle et d’expertise juridique, et d’amélioration de la communication externe. Elle mentionne également la recherche de la performance en matière de gestion des ressources humaines et de maîtrise des coûts des fonctions soutien.

Mais, cette année encore, la présentation de la stratégie de performance reste trop générale et ne montre pas de façon suffisamment précise comment le secrétariat général des ministères économique et financier engage une démarche de maîtrise des coûts des fonctions soutien. En particulier, il serait utile de savoir de quelle manière les services travaillant pour le secrétariat général promeuvent, auprès des différents réseaux et des grandes directions des deux ministères, souvent marqués par des traditions fortes et des particularismes affirmés, une approche commune (ressources humaines, immobilier, affaires financières, communication…). Comment s’articulent en ces matières les services dépendant du secrétariat général avec les services compétents des grandes directions des deux ministères ? Une explication serait bienvenue pour montrer comment les méthodes de contrôle de gestion mises en œuvre dans les deux ministères s’appliquent à ces fonctions support (tableaux de bord, procédures de restitution (17)…). S’agissant de l’immobilier, le projet annuel de performances ne mentionne pas la mise en œuvre du schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) présenté au printemps dernier par le secrétariat général des deux ministères au Conseil de l’immobilier de l’État. Le secrétariat général se comporte-t-il en responsable unique de la gestion immobilière des deux ministères ?

Une stratégie ambitieuse pourrait tracer une démarche en vue d’une plus grande mutualisation de ces fonctions soutien, avec une rationalisation des structures et des procédures. Il s’agirait d’étendre ce qui a été fait avec l’Agence centrale des achats. Des objectifs chiffrés pourraient être déterminés, par exemple une réduction des consommations et des dépenses de carburant auto (en tenant compte de l’augmentation du prix du pétrole), une réduction des consommation de papier, ou encore des cibles en matière immobilière (réduction des loyers, des consommations de fluides, des surfaces occupées par agent…).

L’objectif Améliorer l’information des publics et faciliter les relations de l’usager avec l’administration est mesuré par le Taux de notoriété moyen des projets ou actions ministériels auprès du grand public (la loi « TEPA », la fusion ANPE et UNEDIC, les mesures liées à l’impôt, le débat national sur la fonction publique, la fusion entre la direction générale des Impôts – DGI et la direction générale de la Comptabilité publique – DGCP…). Le projet annuel de performances juge « exceptionnel » le niveau de 53,8 % atteint par cet indicateur en 2007 ; il fixe à ce niveau les prévisions 2008 et 2009 et la cible 2011. Cet objectif est également mesuré par le Taux de connaissance déclaré par les agents des évolutions ministérielles. Le taux chute de 62,5 % (2006) à 57 % (2007), l’année même de l’annonce – très médiatisée – de la fusion de la DGI et de la DGCP… Votre Rapporteur spécial ne peut s’empêcher d’y voir un déficit de connaissance inquiétant, de la part des agents publics, sur la démarche de modernisation de l’État telle que suivie par le Gouvernement. Que serait dès lors la valeur d’un indicateur mesurant le taux d’adhésion des agents ?

L’objectif Améliorer la qualité des prestations de conseil et d’audit est mesuré par les indicateurs Taux de satisfaction des commanditaires des missions d’inspection de l’IGF, Taux de satisfaction des commanditaires et directions partenaires du CGEFI et Taux de satisfaction des structures clientes sur les consultations juridiques. On peut s’interroger sur l’utilité et le degré d’ambition de ces indicateurs sachant que les prévisions et les cibles sont fixées au niveau des réalisations.

L’objectif Mettre en œuvre une gestion personnalisée des ressources humaines est mesuré par les indicateurs Nombre d’entretiens d’évaluation-notation rapporté à l’effectif total et Part des agents de catégorie C ayant suivi au moins une formation.

L’objectif Améliorer les conditions d’emploi, de travail et de vie des agents et de leurs familles par la mise en oeuvre de prestations d’action sociale adaptées est mesuré par l’indicateur Part des agents bénéficiant de prestations d’action sociale. Votre Rapporteur spécial se félicite que sa recommandation de l’an dernier a été suivie, à savoir que cet indicateur couvre, au-delà de la restauration collective, d’autres prestation d’action sociale telles l’aide au logement et les séjours vacances pour enfants et adolescents.

L’objectif Maîtriser le coût des fonctions support est mesuré par les indicateurs Gains réalisés par la globalisation et la standardisation des achats, Effectifs affectés à la gestion des ressources humaines rapportés aux effectifs gérés (dit « ratio Lacambre ») et Ratio d’efficience bureautique. La mutualisation des achats a entraîné des économies importantes en 2006 (87 millions d’euros), 2007 (243,3 millions), avec des prévisions encore intéressantes pour l’indicateur en 2008 (80 millions) et 2009 (40). Votre Rapporteur spécial aurait souhaité d’autres sous-indicateurs pour mesurer la nouvelle gestion des ressources humaines. L’indicateur sur l’efficience bureautique est encore en construction.

L’Agence centrale des achats (ACA)

Sur la période 2005-2007, la mission de l’agence, qui travaille en liaison étroite avec les directions des deux ministères au sein d’un comité de pilotage des achats, était de satisfaire les besoins de celles-ci en réalisant les achats au meilleur prix. L’objectif initial était de dégager des gains sur trois ans fixé à 150 millions d’euros sur la base de l’audit réalisé par Cap Gémini en 2003-2004. Compte tenu des actions déjà menées, cet objectif a été largement dépassé, le total des gains réalisés sur 3 ans étant de 243 millions d’euros, grâce notamment aux très bons résultats obtenus sur le segment « Informatique, bureautique et logiciels ».

Trois leviers d’action sont principalement utilisés : la globalisation des achats, la maîtrise des consommations et la simplification des processus.

La passation de marchés globalisés, qui, pour être efficace, suppose non seulement une mutualisation des achats, mais également une homogénéisation des besoins, est actuellement le premier moyen pour obtenir une diminution des coûts unitaires. Des résultats significatifs ont été obtenus en 2007 et au cours du premier semestre 2008 par la conclusion de marchés de ce type dans plusieurs domaines.

——fpfp——

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, et de M. André Santini, secrétaire d’État chargé de la Fonction publique, sur les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines lors de la commission élargie (voir compte rendu de la réunion du 7 novembre 2008 (18)), la commission des Finances adopte les crédits de cette mission, conformément à l’avis favorable de MM. Georges Tron, Yves Deniaud, en dépit de l’avis défavorable de MM. Thierry Carcenac et Pierre-Alain Muet, Rapporteurs spéciaux.

ANNEXE

Liste des auditions réalisées par votre Rapporteur spécial

21 octobre 2008 sur la révision générale des politiques publiques (RGPP)

– M. François Daniel Migeon, directeur général de la Modernisation de l’État (DGME), ministère du Budget, responsable du programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État

– M. Pierre-Olivier Legris, DGME

– M. Thierry Courtine, DGME

23 octobre 2008 sur la modernisation de l’État et l’évaluation des politiques publiques

– M. Christian Babusiaux, président de la première chambre de la Cour des comptes

– M. Jean-Raphael Alventosa, conseiller maitre, première chambre de la Cour des comptes (rapporteur général de la formation inter-chambres Budgets et comptes publics)

– M. Patrick Lefas, conseiller maître, président de section, première chambre de la Cour des comptes (certification des comptes de l’État)

– M. François Monier, conseiller maître, président de section, première chambre de la Cour des comptes (corédacteur du rapport sur la situation et les finances publiques)

– M. Olivier Chatelain et Jean-Michel Champomier, conseillers référendaires, première chambre de la Cour des comptes (rédacteurs pour la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines)

4 novembre 2008 sur la RGPP et la modernisation de l’Etat

– Mme Nathalie Delapalme, inspectrice générale des finances, chef d’équipe de la RGPP (Aide publique au développement et Action extérieure de l’Etat)

– M. François Auvigne, inspecteur général des finances, chef d’équipe de la RGPP (Culture et communication et les services du Premier ministre)

– M. Frank Mordacq, ancien directeur général de la Modernisation de l’État, ministère du Budget

5 novembre 2008 sur la RGPP

– Mme Anne Bolliet, inspectrice générale des finances, chef d’équipe de la RGPP (Outre-mer)

6 novembre 2008 sur la RGPP

– Mme Danièle Lajoumard, inspectrice générale des finances, sur les systèmes d’information financière de l’État (chorus)

© Assemblée nationale

1 () Ses crédits de personnel (titre 2) sont néanmoins rattachés au programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l'Etat.

2 () Autorisations d’engagement.

3 () Crédits de paiement.

4 () http://www.premierministre.gouv.fr/IMG/pdf/04.23_Rapport_de_Bruno_Durieux.pdf

5 () Environ 220, entre les rapporteurs spéciaux des commissions des Finances de l’Assemblée nationale et du Sénat et les rapporteurs pour avis des autres commissions permanentes.

6 () Voir infra, la partie sur la réforme des grandes politiques d’intervention.

7 () http://www.logica.com/france/400005040

8 () http://www.rgpp.modernisation.gouv.fr/

9 () « 15 ans de révision des programmes au Canada » Marie-Thérèse Deleplace – Actualité de la veille en gestion publique – Institut de gestion publique et de développement économique (IGPDE) – septembre 2007.

10 () « Urbaniser » consiste à inscrire les besoins informatique des administrations dans un plan d'ensemble du système d'information financière de l'État (SIFE). La démarche d'urbanisation conduit à cartographier les applications financières existantes et à formaliser les principes directeurs d'évolution de ces applications. Il convient de rappeler que le SIFE constitue un ensemble hétérogène d'environ 200 applications informatiques. Ces applications, qui gèrent le budget, les dépenses, les recettes et la comptabilité de l'État, font intervenir une multitude d'acteurs dans tous les ministères et couvrent des périmètres différents : local/central, ministériel/interministériel, gestion/comptabilité.

11 () Les dépenses récurrentes sont essentiellement les dépenses de maintenance plus les dépenses de formation.

12 () Audit de modernisation sur les procédures budgétaires et comptables et les perspectives de retour sur investissement du projet chorus – novembre 2006 – http://www.audits.performance-publique.gouv.fr/bib_res/221.pdf

13 () Estimation à partir des rapports annuels de performances pour 2006 et 2007, la loi de finances pour 2008 et les prévisions effectuées par la Cour des comptes pour les années ultérieures.

14 () La valeur actuelle nette est le résultat d’un calcul totalisant l’ensemble des coût du projet diminués des économies générées par l’investissement initial.

15 () La notion de gain annuel correspond à l'évaluation des gains bruts récurrents obtenus l'année de l'obtention de la VAN (c'est à dire 2013).

16 () Votre Rapporteur spécial remarque qu’il ne s’agit pas d’un transfert au sens de l’article 12 de la LOLF.

17 () « Reporting » en anglais.

18 () http://www.assemblee-nationale.fr/13/budget/plf2009/commissions_elargies/cr/