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N° 1968

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2009.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2010 (n° 1946)

TOME VII

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

RECHERCHE

Par M. Olivier JARDÉ,

Député.

___

Voir le numéro : 1967 (annexe n° 34).

INTRODUCTION 5

I.- LES PROGRAMMES RECHERCHE DE LA MISSION RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR (MIRES) : DES MOYENS EN HAUSSE POUR UNE PRIORITÉ POLITIQUE 7

A. DES CRÉDITS EN PROGRESSION POUR DES EMPLOIS CONSOLIDÉS 7

1. Une mission à l’architecture simplifiée 8

2. Le maintien des emplois pour une attractivité des carrières renforcée 11

B. LA CROISSANCE CONTINUE DE L’INCITATION FISCALE : LE CRÉDIT D’IMPÔT RECHERCHE 14

1. Le crédit d’impôt recherche, amortisseur de crise 14

2. L’outil fiscal, complément institutionnalisé des investissements publics dans la recherche 17

C. LES FINANCEMENTS RÉGIONAUX ET EUROPÉENS : CONFORTER L’IMPLANTATION DES ACTIVITÉS DE RECHERCHE SUR DES TERRITOIRES PERTINENTS 19

1. Le volet recherche des contrats de projets État-régions (CPER) 2007-2013 19

2. La mise en œuvre du 7ème Programme-cadre pour la recherche et le développement technologique (PCRD) européen 19

II.- LA RÉORGANISATION DU CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE (CNRS) 23

A. PLAN STRATÉGIQUE ET CONTRAT D’OBJECTIFS : LES GRANDS AXES DE LA RÉFORME 23

1. Le plan stratégique et le contrat d’objectifs : les découvertes se font aux interfaces 23

2. Les moyens financiers de la réforme 26

B. LES PERSONNELS DE LA RECHERCHE 28

1. Des effectifs stables mais des statuts à réévaluer 28

2. Deux laboratoires pour un même enthousiasme 31

C. UN JEUNE SEPTUAGÉNAIRE 33

1. Une politique de valorisation renouvelée 33

2. Un anniversaire 35

TRAVAUX DE LA COMMISSION 39

I.- AUDITION DE LA MINISTRE 39

II.- EXAMEN DES CRÉDITS 81

ANNEXES 83

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 83

ANNEXE 2 : PROGRAMME DE LA VISITE DES LABORATOIRES 85

INTRODUCTION

Les programmes « recherche » de la mission interministérielle recherche et enseignement supérieur (MIRES) voient leurs moyens progresser significativement dans le projet de loi de finances pour 2010. Priorité politique, les crédits qui sont affectés à la recherche s’insèrent dans un cadre budgétaire à l’architecture simplifiée. La MIRES comprendra désormais 10 programmes dont 9 partiellement ou totalement voués à la recherche.

Conformément aux engagements pris par le gouvernement, les emplois dans la recherche sont maintenus en 2010. Les carrières des chercheurs font parallèlement l’objet de mesures destinées à les rendre plus attractives.

L’incitation fiscale dans le domaine de la recherche et, singulièrement, le crédit d’impôt recherche, continuent de progresser. Les dépenses fiscales constituent en effet un amortisseur important des conséquences de la crise économique et financière. Il convient d’en examiner l’impact et l’évolution.

Complément important de toute présentation des moyens de la recherche en France aujourd’hui, l’analyse des financements, tant régionaux qu’européens, fait apparaître une évolution contrastée et rend nécessaire une meilleure prise en compte nationale de leur place dans le développement, sur tout le territoire, des dispositifs de recherche.

Alors que le CNRS, créé par un décret du 19 octobre 1939 dans les circonstances d’urgence que l’on peut imaginer, fête ses 70 ans, il a semblé intéressant au rapporteur de s’interroger sur la réorganisation importante dont il a fait l’objet depuis moins de 2 ans, la partie thématique de ce rapport lui est donc consacrée.

À travers un plan stratégique « horizon 2020 » et un contrat d’objectifs et de moyens 2009-2013, le CNRS se restructure en 10 instituts de recherche dotés, dans le projet de loi de finances, de moyens spécifiques pour en accompagner la création. Les personnels du Centre sont au cœur de la réforme, la stabilité de leurs effectifs ne doit pas empêcher d’engager une réflexion sur leurs statuts, dont la pluralité est peu satisfaisante, alors que se développe une certaine précarité liée aux contrats de recherche, de durée limitée.

Notre septuagénaire est, pour le moins, d’une verdeur remarquable et continue de susciter, à juste titre, passions et convoitises, « la substance de l’univers est docile et disponible » notait déjà Marc-Aurèle, le CNRS dispose, pour l’étudier, de moyens humains et matériels précieux, l’adoption des crédits de la mission interministérielle devrait lui assurer quelques perspectives heureuses.

I.- LES PROGRAMMES RECHERCHE DE LA MISSION RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR (MIRES) : DES MOYENS EN HAUSSE POUR UNE PRIORITÉ POLITIQUE

A. DES CRÉDITS EN PROGRESSION POUR DES EMPLOIS CONSOLIDÉS

Présentation des crédits « recherche » de la MIRES, par programme

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé du programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2009

Demandées pour 2010

Ouverts en LFI pour 2009

Demandés pour 2010

150 / Formations supérieures et recherche universitaire (actions recherche)

3 666,856

3 731,631

3 666,856

3 731,631

172 / Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

5 082,182

5 227,724

5 050,182

5 198,724

187 / Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

1 218,754

1 241,780

1 218,754

1 241,780

193 / Recherche spatiale

1 280,248

1 302,243

1 280,248

1 302,243

190 / Recherche dans le domaine de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables(1)

1 365,233

1 419,943

1 287,733

1 303,693

192 / Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle (actions recherche)

665,428

700,640

579,828

641,040

191 / Recherche duale (civile et militaire)

200,000

200,000

200,000

200,000

186 / Recherche culturelle et culture scientifique

159,806

163,560

157,256

161,010

142 / Enseignement supérieur et recherche agricoles (actions recherche)

43,573

43,603

43,573

43,603

Total des crédits recherche

13 682,080

14 031,124

13 484,430

13 823,724

(1) : nb. Dans le PLF 2010, le programme 190 (ex Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat) est fusionné, sous un nouvel intitulé, avec les ex-programmes 188 (Recherche dans le domaine de l’énergie) et 189 (Recherche dans le domaine des risques et pollutions), correspondant aux domaines « recherche » du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer.

Source : projet annuel de performances recherche et enseignement supérieur pour 2010.

Ce tableau présente, pour 2009 et 2010, l’ensemble des crédits affectés à la recherche de la Mission interministérielle recherche et enseignement supérieur (MIRES), y compris ceux relevant de la recherche universitaire (actions « recherche » du programme 150). La volonté de remettre l’université au centre du dispositif de recherche français depuis la loi de programme n° 2006-450 du 18 avril 2006 pour la recherche, s’insérant dans le nouveau cadre introduit par la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, commence à se matérialiser. L’analyse globale des crédits consacrés à la recherche par les établissements d’enseignement supérieur est donc particulièrement opportune.

La croissance des crédits de paiement et des autorisations d’engagement pour le périmètre « recherche » de la mission entre la loi de finances initiale pour 2009 et le projet de loi de finances pour 2010 est de 2,5 %. Pour la seule recherche universitaire, les mêmes crédits ne progressent que de 1,8 %. Sans tirer de conclusion prématurée à partir de ces données globalisées, il est toutefois clair que la place et les moyens des organismes de recherche dans le dispositif de la recherche publique ne sont pas remis en cause par le projet de loi de finances, ce qui devrait lever tout inquiétude sur ce point.

1. Une mission à l’architecture simplifiée

La MIRES fait à nouveau l’objet d’une refonte de sa présentation. Elle regroupait, jusqu’à la fin de l’année 2009, douze programmes qui seront ramenés à dix au 1er janvier 2010, en voici brièvement les objectifs et les acteurs, en remarquant (cf. tableau) que les deux tiers des moyens du programme 150 et l’intégralité du programme 231 relèvent du périmètre « enseignement supérieur » de la mission, de même qu’une partie des programmes 192 et 142 :

– relèvent du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche les cinq programmes suivants :

(direction générale pour l’enseignement supérieur et la formation professionnelle)

150 « Formations supérieures et recherche universitaire », ses opérateurs étant les établissements d’enseignement supérieur ;

231 « Vie étudiante », son opérateur principal étant le réseau des œuvres universitaires et scolaires (Centre national et centres régionaux des œuvres universitaires - CNOUS et CROUS) ;

(direction générale pour la recherche et de l’innovation)

172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », ses principaux opérateurs étant le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l’énergie atomique (CEA - civil), l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA), l’Institut national d’études démographiques (INED), l’Institut Paul Émile Victor (IPEV), les fondations médicales (comme les Instituts Pasteur et Curie), les organisations scientifiques internationales (Centre européen pour la recherche nucléaire - CERN) et l’Agence nationale pour la recherche (ANR). Relève également de ce programme la gestion d’un certain nombre d’interventions de pilotage, comprenant conseils ou observatoires, ou d’animations plus ciblées comme le dispositif des Conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE), l’accueil des post-doctorants, les actions de diffusion de la culture scientifique et technique ;

187 « Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources », ses principaux opérateurs étant l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), l’Institut français pour l’exploitation de la mer (IFREMER), le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), et le Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts (CEMAGREF) ;

193 « Recherche spatiale », son principal opérateur est le Centre national d’études spatiales (CNES) qui a charge de financer la contribution française à l’Agence spatiale européenne (ESA) ;

– relève du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer (direction de la recherche et de l’innovation) le programme :

190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durable », sur ce programme porte l’essentiel de la réforme architecturale proposée dans le projet de loi de finances pour la mission, il regroupe, en effet, en une seule entité, les trois précédents programmes : 188 « Recherche dans le domaine de l’énergie », 189 « Recherche dans le domaine des risques et pollutions » et 190 (ancien libellé) « Recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat ». Il traduit, dans le domaine de la recherche, la constitution, en 2007, d’un ministère entièrement consacré au développement durable et à son intégration dans les politiques publiques sectorielles, s’appuyant notamment sur un ensemble de mesures législatives (loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, n° 2009-967 du 3 août 2009 et projet de loi portant engagement national pour l’environnement, adopté par le Sénat le 8 octobre 2009). Ses principaux opérateurs sont pour la recherche dans le domaine de l’énergie : le CEA (civil) et l’Institut français du pétrole (IFP), pour la recherche dans le domaine des risques : l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), pour la recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l’aménagement : le Laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC), l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS), le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), pour la recherche partenariale dans le développement et l’aménagement durable : l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), et des programmes incitatifs dans les secteurs parapétroliers (Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières - RTPG), des transports (Programme de recherche et d’innovation dans les transports - PREDIT), de la construction (Programme national de recherche et d’expérimentation sur l’énergie dans les bâtiments - PREBAT, Réseau génie civil et urbain - RGCU) ou de l’urbanisme (Plan urbanisme construction architecture - PUCA), le programme finance également la recherche et développement dans le domaine de l’aéronautique civile ;

– relève du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi (direction générale de la compétitivité de l’industrie et des services) le programme :

192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle », son opérateur principal étant OSEO, outre les écoles d’ingénieurs placées sous la tutelle du ministère (écoles des mines, des télécommunications, d’économie et statistiques, d’électricité et l’école nationale supérieure de création industrielle), et les réseaux qu’il anime ;

– relève du ministère de la défense (délégation générale pour l’armement) le programme :

191 « Recherche duale (civile et militaire) », ses principaux opérateurs étant le CNES et le CEA pour leurs recherches dans ce domaine ;

– relève du ministère de la culture et de la communication (délégation au développement et aux affaires internationales) le programme :

186 « Recherche culturelle et culture scientifique », ses principaux opérateurs étant la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte ;

– relève du ministère de l’agriculture, de l’alimentation et de la pêche (direction générale de l’enseignement et de la recherche) le programme :

142 « Enseignement supérieur et recherches agricoles », ses opérateurs étant l’INRA, le CEMAGREF, les établissements d’enseignement supérieur et les centres techniques agricoles.

La souplesse d’adaptation de la mission interministérielle aux modifications des politiques de la recherche, sous la conduite du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, la distingue clairement du Budget civil de recherche et développement technologique (BCRD), créé en 1982, qui se présentait comme un agrégat retraçant, dans les différentes sections du budget de l’État, les dépenses civiles de recherche de 12 ministères et auquel elle a succédé.

Elle répond mieux au souci de présenter au Parlement, de la façon la plus complète possible, les moyens budgétaires que l’État consacre à la production, à la transmission et au transfert des connaissances dans les domaines, d’une part, de la recherche scientifique et du développement technologique et, d’autre part, de l’enseignement supérieur, tout en garantissant les grandes priorités gouvernementales déclinées dans ces domaines.

2. Le maintien des emplois pour une attractivité des carrières renforcée

Comme dans l’enseignement supérieur, aucun emploi n’est supprimé en 2010 dans le périmètre « recherche » de la mission.

Les seuls ajustements procèdent de l’extension, en année pleine, des décisions prises en loi de finances initiale pour 2009.

Il s’agit principalement des créations d’emplois (35 emplois à l’INRIA, avec une date d’effet au 1er octobre 2009) ainsi que des suppressions d’emplois (218 emplois d’ingénieurs et de techniciens à compter du 1er juillet 2009).

Elles se traduisent pour les opérateurs relevant des programmes 172 et 187 par une baisse de - 82,75 équivalents temps plein travaillé (ETPT) (+ 26,25 à l’INRIA, - 66,50 au CNRS, - 23,00 à l’INRA, - 12,00 à l’INSERM, - 4,00 à l’IRD et - 3,50 au CEMAGREF).

Le plafond des emplois rémunérés directement par les opérateurs, hors plafond d’emplois du ministère donc, des trois principaux programmes « recherche » (exprimés en équivalents temps-plein - ETP) en application de l’article 64 de la loi de finances pour 2009, sont les suivants dans le projet de loi de finances pour 2010, en distinguant les emplois sous plafond et les emplois hors plafond (c’est-à-dire rémunérés par les subventions pour charges de service public (SCSP) ou sur fonds propres) :

– 58 222 ETP (48 678 sous plafond et 9 544 hors plafond) pour le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » contre 58 178 (48 676 et 9 502) en 2009 et 57 907 (48 147 et 9 760) en 2008 ;

– 18 507 ETP (17 212 et 1 295) pour le programme 187 « Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources », contre 18 509 (17 214 et 1 295) en 2009 et 17 962 (16 502 et 1 460) en 2008 ;

– 2 702 ETP (2 417 et 285) pour le programme 193 « Recherche spatiale », effectif identique à 2009, mais en progression par rapport à 2008 où ils étaient de 2 556 (2 377 et 179).

Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit une suppression de 50 supports d’emplois sur le dispositif post-doctoral ministériel relevant de l’action 1 (pilotage et animation) du programme 172. Cette mesure budgétaire prolonge celle inscrite en 2009 de suppression de 267 contrats post-doctoraux, dont le nombre théorique est ramené à 503 pour 2010. En contrepartie, poursuivant les engagements pris dans les deux contrats quadriennaux entre l’INRIA et l’État depuis 2003 de doubler les effectifs de l’institut en dix ans, 30 ETP y sont créés à compter du 1er octobre 1010 (soit 7,5 ETPT), enfin 30 ETP (soit 30 ETPT) sont également créés à l’ANR à compter du 1er janvier.

La présentation de l’ensemble des emplois en 2009, par opérateur, des deux programmes 172 et 187 dépendant du ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur, dans les deux tableaux ci-dessous, permet de mieux apprécier leur taille respective et, s’agissant des établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST), de distinguer la place occupée par les différents types de statuts de leur personnel.

Établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) et ANR, subventionnés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche – programmes 172 et 187
Emplois inscrits en équivalent temps-plein travaillé (ETPT) aux budgets primitifs votés pour 2009

Corps ou catégories d’emplois

CNRS

INRA

INSERM

IRD

INED

INRIA

CEMAGREF

ANR

Total

DR (Directeurs de recherche)

4 661,8

708,0

874,4

269,7

23,0

235,2

41,6

 

6 813,7

CR (Chargés de recherche)

6 959,4

1 102,0

1 339,8

469,3

33,2

324,5

70,9

 

10 299,1

Chercheurs

11 621,2

1 810,0

2 214,2

739,0

56,2

559,7

112,5

0,0

17 112,8

IR (Ingénieurs de recherche)

2 699,0

741,0

369,1

105,2

10,0

156,1

94,6

 

4 175,0

IE (Ingénieurs d’études)

3 510,8

925,0

704,7

174,9

23,3

150,4

152,6

 

5 641,7

AI (Assistants ingénieurs)

2 474,3

802,0

438,3

117,0

15,3

108,0

121,7

 

4 076,6

Ingénieurs

8 684,1

2 468,0

1 512,1

397,1

48,6

414,5

368,9

0,0

13 893,3

TR (Techniciens de la recherche)

4 289,0

2 595,0

1 056,2

277,5

39,3

224,1

131,0

 

8 612,1

AJT (Adjoints techniques de la recherche)

841,8

1 420,0

327,1

62,7

11,8

30,5

98,0

 

2 791,9

AGT (Agents techniques de la recherche)

0,0

0,0

 

0

Techniciens

5 130,8

4 015,0

1 383,3

340,2

51,1

254,6

229,0

0,0

11 404,0

Postes fonctionnels ou autres

114,6

3,0

3,0

0,0

4,0

5,0

215,0

 

344,6

Personnels titulaires

25 550,7

8 296,0

5 112,6

1 476,3

159,9

1 233,8

925,4

0,0

42 754,7

CDI

4 630,8

 

1,8

         

4 632,6

Titulaires détachés sur contrats

   

26,0

16,8

       

42,8

ASC et chercheurs contractuels

 

45,0

           

45,0

CDD (ex-emplois budgétaires)

 

325,7

117,6

         

443,3

CDD ministériels "de haut niveau"

 

104,0

101,0

29,2

1,0

 

15,0

 

250,2

Post-doctorants ministériels

322,7

54,0

34,0

6,0

1,0

66,0

34,1

 

517,8

CDD sur contrats de recherche

 

510,0

1 418,5

     

21,2

 

1 949,7

Doctorants

1 685,4

325,0

     

403,8

105,7

 

2 519,9

Boursiers

 

113,0

           

113,0

Autres non titulaires

166,1

360,1

1 147,9

602,9

62,1

649,7

119,3

61,0

3 169,1

Personnels non titulaires

6 805,0

1 836,8

2 846,8

654,9

64,1

1 119,5

295,3

61,0

13 683,4

Total général des emplois (ETPT)

32 355,7

10 132,8

7 959,4

2 131,2

224,0

2 353,3

1 220,7

61,0

56 438,1

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) et groupements d’intérêt public (GIP), subventionnés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche - programmes 172, 187 et 193
Emplois inscrits en équivalent temps plein (ETP) aux états prévisionnels de recettes et de dépenses votés pour 2009

Catégories d’emplois

IFREMER

BRGM

CIRAD

ANRS

IPEV

CNES

CEA (civil)

Total

CDI

1 232

879

1 758

8

15


2 400


11 220


17 583

Autres personnesl permanents (non EPIC)

71

       

Personnels permanents

1 303

879

1 758

8

15

 

2 400

 

11 220

 

17 583

CDD

102

29

117

 

26


NC


NC


478

Post-doctorants

30

   

Contrats de thèse et doctorants

65

   

VCAT

18

 

51

Autres

32

 

8

Personnels non permanents

247

29

117

0

85

 

0

 

0

 

478

Total général des ETP

1 550

908

1 875

8

100

 

2 400

 

11 220

 

18 061

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

(NC : non communiqué).

Enfin, le projet de loi de finances pour 2010 consacre 49 millions d’euros, hors chaires d’excellence, au renforcement de l’attractivité des carrières de la recherche, en particulier, en plus de mesures générales de revalorisation, par la mise en place d’une nouvelle prime d’excellence scientifique, d’un montant variant entre 3 500 et15 000 euros par an. Il convient cependant de remarquer que le système des primes d’excellence et de leurs conditions d’attribution ne fait pas l’unanimité auprès des chercheurs.

Pour conclure, rappelons qu’en France, la population de l’emploi scientifique global représentait en 2006 un peu plus de 360 000 ETP. L’augmentation de cette population entre 2000 et 2006 est de près de 13 %.

Les seuls chercheurs constituent l’essentiel de l’emploi scientifique, avec en 2006 plus de 210 000 ETP répartis entre environ 97 000 ETP dans le secteur public et un peu plus de 113 000 ETP dans le secteur privé (216 000 en 2007), plaçant la France en deuxième position en Europe, derrière l’Allemagne (284 000 en 2007) et en cinquième position dans le monde (après les États-unis et la Chine, 1 425 000 chacun et le Japon, 710 000). Contrairement à ce qui est trop souvent perçu, la population des chercheurs a cru de 25 % depuis 2000 : l’augmentation annuelle moyenne du nombre de chercheurs est de plus de 3,5 %.

Mais cette croissance a davantage été le fait du secteur privé que du secteur public. Ainsi, entre 2000 et 2006, le nombre de chercheurs du secteur public a cru de près de 11 %, soit un rythme annuel moyen de 1,5 %. Dans la même période, le secteur privé a connu une croissance de 40 %, soit un rythme annuel supérieur à 5 %. Compte tenu de ces évolutions, le secteur privé compte, depuis 2002, davantage de chercheurs que le secteur public. En 2006, les chercheurs des entreprises représentaient 54 % du total. On peut y voir l’impact d’une politique de stimulation de l’effort privé de recherche, dont l’un des principaux outils est l’incitation fiscale aux dépenses de recherche des entreprises.

B. LA CROISSANCE CONTINUE DE L’INCITATION FISCALE : LE CRÉDIT D’IMPÔT RECHERCHE

1. Le crédit d’impôt recherche, amortisseur de crise

Rappelons que la principale mesure fiscale rattachée aux programmes « recherche », le crédit d’impôt recherche (CIR), vient en déduction de l’impôt sur le revenu (bénéfices industriels et commerciaux) ou de l’impôt sur les sociétés dû par l’entreprise, au titre de l’année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul ont été exposées. Introduit en 1983, il a connu depuis un certain nombre de modifications afin d’en améliorer l’efficacité. Il était initialement fondé sur le seul accroissement des dépenses de recherche et développement (R & D) engagées par les entreprises, puisque l’objectif poursuivi était alors précisément de développer les activités privées de recherche, en particulier des PME issues de la valorisation des résultats de la recherche publique, et de rééquilibrer ainsi le rapport entre la recherche publique et la recherche privée, en donnant à cette dernière les bases fiscales de sa croissance. Or, il est apparu utile, en 2003, d’en stabiliser les effets, en prenant en compte dans le calcul du montant du crédit d’impôt non seulement l’accroissement mais aussi le volume des dépenses de R & D.

En effet, jusqu’en 2003, le crédit d’impôt était égal à 50 % de l’accroissement de l’effort de recherche et limité à 6,10 millions d’euros par entreprise et par an, la loi de finances pour 2004 a intégré la prise en compte d’une part en volume de 5 % ramenant la part en accroissement à 45 % avec un plafond à 8 millions d’euros, puis la loi de finances pour 2006 a porté la part en volume à 10 % et ramené la part en accroissement à 40 % avec un plafond à 10 millions d’euros, porté à 16 millions en 2007, par la loi de finances rectificative pour 2006 du 30 décembre 2006.

Des mesures complémentaires ont également été prises en 2006, visant à encourager le recrutement de jeunes docteurs (les dépenses les concernant étant retenues pour le double de leur montant pendant un an), le dépôt de brevets (doublement des frais de défense des brevets) ou la création d’entreprises nouvelles (durée du bénéfice de la restitution immédiate du crédit d’impôt portée de 3 à 5 ans).

Le crédit d’impôt recherche est donc le premier vecteur de la volonté régulièrement réaffirmée de rééquilibrer, en France, la répartition entre les dépenses publiques et privées de recherche en renforçant la part de ces dernières, tout en confortant les premières, afin d’atteindre l’objectif européen de leur consacrer 3 % du PIB. Ce taux n’était que de 2,02 % en France en 2008, pourcentage en légère baisse depuis le début des années 2000 (où il était proche de 2,20 %). Pour la même année 2008, on estimait que la répartition de l’effort français de recherche était de 63 % pour les entreprises et de 37 % pour les administrations, ces pourcentages sont stables, eux aussi, depuis 10 ans.

La réforme engagée par la loi de finances pour 2008 a simplifié radicalement le dispositif et augmenté fortement la créance fiscale. Le CIR est devenu plus lisible, répondant ainsi aux critiques de la Cour des comptes dans son rapport public de 2007, et plus attractif. Modification radicale donc, puisque le nouveau dispositif s’applique uniquement au volume des dépenses de R & D des entreprises, le rendant relativement plus favorable aux grandes entreprises tout en restant attractif pour les PME. Le taux du crédit d’impôt a été porté à 30 % du volume jusqu’à 100 millions d’euros de dépenses de R&D et à 5 % au-delà, déplafonné.

Il convient cependant de remarquer que la stimulation de l’accroissement de l’effort de recherche risquait de ne plus apparaître comme un des objectifs poursuivis, au profit de sa continuité. Aussi, une majoration du taux, à 50 %, a été prévue pour les entreprises qui bénéficient pour la première fois du crédit d’impôt ou pour celles qui n’en ont pas bénéficié depuis cinq ans, la seconde année d’entrée dans le dispositif, le taux majoré étant de 40 %. Si cette disposition renforce l’impact de la mesure pour les entreprises entrant dans le dispositif avec un fort volume de recherche, indépendamment de son évolution, elle maintient le caractère incitatif du CIR pour les entreprises innovantes créées pour valoriser les résultats de la recherche.

Autre volet important du dispositif, la coopération avec la recherche publique a elle aussi bénéficié de la réforme : depuis 2004, les activités de R & D confiées à des organismes de recherche publics ou à des universités sont retenues pour le double de leur montant dans l’assiette du CIR, à la condition qu’il n’existe pas de lien de dépendance entre l’entreprise et le contractant. Le plafond pour la prise en compte de ces dépenses est passé de 10 millions à 12 millions d’euros à compter de la déclaration de l’année 2008. Ainsi, à compter de cette déclaration, les dépenses de R & D confiées à des organismes de recherche ou des universités peuvent être financées à 60 % par le CIR (dans la limite, bien sûr, des 12 millions de R & D externalisée et pour la première tranche, soit jusqu’à 100 millions de dépenses). De plus, la liste des institutions de recherche éligibles a été élargie.

Depuis 2008, la durée pendant laquelle les dépenses de personnel relatives à des titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent sont prises en compte pour le double de leur montant a été portée à vingt-quatre mois. Les dépenses de fonctionnement, fixées forfaitairement par rapport aux dépenses de personnel, ayant été portées à 200 % pour les personnes titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent, le salaire d’un jeune docteur est ainsi multiplié par quatre dans l’assiette du CIR pendant les 24 premiers mois suivant le premier recrutement.

Enfin, en application d’une recommandation de la Cour des comptes figurant également dans son rapport de 2007, les avances remboursables accordées par l’État sont, à partir de 2008, exclues de l’assiette du crédit d’impôt du bénéficiaire au titre de l’année de leur attribution. Elles y sont réintégrées lorsque l’entreprise les rembourse.

Coïncidence heureuse, la mise en place du CIR réformé a été concomitante de l’irruption de la crise financière, puis économique. Il s’en est montré un amortisseur efficace et semble pouvoir être un point d’appui pour une sortie de crise.

En effet, les premiers résultats fournis par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ont montré que le niveau de dépenses de recherche des entreprises, fondé sur le dépôt de 85 % des déclarations fiscales, s’est maintenu en 2008 autour de 15 milliards d’euros, ralentissant la baisse de R & D dans les secteurs les plus touchés (automobile, - 400 millions d’euros et aéronautique, - 300 millions d’euros) et renforçant la recherche dans les autres secteurs.

On assiste, en 2009, à un doublement du nombre de nouveaux déclarants par rapport à 2008, alors que le nombre d’entreprises déclarantes avait déjà augmenté de près d’un quart en 2008. La prise en compte du seul volume de recherche a donc déterminé une entrée massive des entreprises à forte tradition de recherche, mais dont le potentiel ne s’accroissait pas. Si le rôle du CIR réformé dans le maintien des activités de recherche en période de crise est salutaire et incontestable, une incertitude demeure, cependant, sur l’encouragement au développement de nouveaux potentiels de recherche, en particulier par la création de PME, qui était l’objectif initial de cette dépense fiscale.

Enfin, il convient de souligner que le rôle d’amortisseur de la crise, joué par le CIR, s’est également matérialisé très concrètement par la restitution anticipée et accélérée aux entreprises de leur créance fiscale (différence entre le crédit d’impôt et l’impôt dû). En effet, dans le cadre du plan de relance, la loi de finances rectificative pour 2008 avait, dans son article 95, rendu possible ce remboursement anticipé des créances de crédit d’impôt recherche pour toutes les entreprises, leur permettant de stabiliser leurs trésoreries fragilisées par la crise.

L’article 4 du projet de loi de finances pour 2010 propose de proroger ce remboursement immédiat et de poursuivre ainsi une aide qui renforce les trésoreries des entreprises, tout en favorisant le réinvestissement dans la recherche des créances restituées, pour maintenir la continuité de l’effort de recherche. Le coût de la mesure est estimé à plus de 2 milliards d’euros, portant la dépense fiscale en 2010 à 4 milliards d’euros.

2. L’outil fiscal, complément institutionnalisé des investissements publics dans la recherche

Rappelons que l’objectif initial de la réforme du CIR était d’abord d’obtenir un accroissement à long terme du niveau de recherche en France de l’ordre de 0,5 % au bout de dix ans environ, soit 0,05 % par an à partir de 2009.

Une simulation de l’effet brut de la réforme 2008 du CIR sur la créance fiscale 2005 avait été effectuée au moment de la préparation du projet de loi de finances pour 2009. Après actualisation de cette créance et exclusion des avances remboursables de l’assiette du CIR, la créance 2008 était estimée à 3,500 milliards d’euros, avant toute prise en compte des effets incitatifs de la réforme.

Ces derniers, confirmés on l’a vu 2009, sont de deux ordres : un effet d’addition fondé sur l’hypothèse que les entreprises réinvestissent en dépenses de R&D le surcroît de créance fiscale qu’elles imputent sur l’impôt ou qui leur est restitué et surtout un effet progressif d’entrée dans le dispositif de nouvelles entreprises issues du vivier de celles qui ont une activité, continue ou discontinue, de R&D mais n’étaient pas bénéficiaires du CIR avant 2008, éventuellement accompagné d’un effet déclaratif en raison du déplafonnement du dispositif.

Le tableau ci-dessous présente l’évolution globale des créances et des dépenses fiscales (hors les remboursements anticipés évoqués précédemment) dues au CIR :

(en millions d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

Créance fiscale

4 000

4 200

4 450

4 750

Dépense fiscale

1 390

2 230

2 760

3 230

Flux de dépense fiscale

 

840

530

470

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche

Les montants exposés dans le tableau ci-dessus montrent l’importance prise par le CIR. Si les entreprises semblent convaincues de son bien-fondé et le considèrent désormais comme un atout de compétitivité important et à pérenniser, certains chercheurs, en particulier dans les milieux de la recherche publique, estiment que les résultats, en terme de recherche, du crédit d’impôt ne sont pas à la hauteur des efforts fiscaux consentis. Ils contestent également son intégration dans la présentation du budget de la recherche. Ils font remarquer, enfin, que son calcul sur le seul volume des recherches et non plus leur accroissement permet d’en bénéficier même si les dépenses de recherche diminuent, ce qui est pour le moins paradoxal, compte tenu de son objectif premier.

Nous avons vu que le contexte économique difficile dans lequel s’élabore le projet de loi de finances avait rendu le CIR particulièrement pertinent comme amortisseur de crise, y compris pour limiter la chute des investissements dans la recherche. L’intégration du CIR dans les budgets de la recherche est, quant à elle, conforme à la logique de la LOLF de présentation exhaustive de l’effort public dans les rapports annuels de performance, et l’on peut supposer que, si les dépenses de recherche des entreprises, en pourcentage du PIB, stagnent, en l’absence de CIR elles auraient vraisemblablement baissé.

Mais une dernière critique porte, en général, sur la nature même des dépenses retenues et donc des recherches aidées. Indépendamment du mode de présentation thématique des bénéficiaires du CIR, qui concentre sur la holding financière mère les activités de recherche des filiales industrielles filles, et donc sur-valorise artificiellement les activités de services, il serait effectivement souhaitable que des mécanismes incitatifs plus précis permettent, si nécessaire, un meilleur fléchage des aides de l’État. La recherche publique s’est dotée de structures lui permettant de développer des recherches ciblées et réactives, les aides publiques à la recherche des entreprises pourraient sans doute s’insérer dans un dispositif plus cohérent avec les objectifs nationaux.

Le doublement des dépenses de personnel pour l’emploi des titulaires d’un doctorat est un premier élément de cette politique mieux ciblée. Mais il serait possible d’aller plus loin et de faire, par exemple, de l’embauche de docteurs une condition déterminante pour l’éligibilité au crédit d’impôt recherche.

Il est, en effet, nécessaire de donner aux études doctorales en France la place qui est la leur dans la plupart des pays développés, et en particulier chez nos principaux partenaires, comme l’Allemagne, et d’offrir aussi les débouchés du secteur privé aux jeunes chercheurs au statut précaire et aux perspectives d’emploi incertaines. Le doctorat, dans notre pays, et à l’inverse des diplômes d’ingénieur, est presque devenu un obstacle au recrutement dans le secteur privé. Il condamne donc ses titulaires à ne se tourner que vers la seule recherche publique, malgré les dispositifs mis en place depuis plusieurs années, comme les conventions CIFRE, par exemple. Le réseau des grandes écoles et des ingénieurs qu’elles forment ne peut plus rester le seul élément structurant du tissu industriel et productif national. Les universités et les docteurs qui en sont issus doivent en être l’autre pilier.

Enfin, il convient de compléter cette présentation des dépenses fiscales rattachées à titre principal aux programmes « recherche » de la mission, par deux autres mesures d’un montant non négligeable rattachées au programme 192 :

– la réduction d’impôt au titre de la souscription de parts de fonds communs de placement dans l’innovation, créée en 1996 avec l’objectif d’orienter l’épargne vers le capital risque, son chiffrage pour 2010 est estimé à 100 millions d’euros contre 110 en 2009 et 160 en 2008 ;

– la taxation à taux réduit des plus-values à long terme provenant des produits de cessions et de concessions de brevets, créée en 1991 avec l’objectif d’augmenter les cessions de licences et de brevets et d’en améliorer les possibilités de valorisation, son chiffrage pour 2010 n’est pas encore connu, il était de 660 millions d’euros en 2009 et 630 en 2008.

C. LES FINANCEMENTS RÉGIONAUX ET EUROPÉENS : CONFORTER L’IMPLANTATION DES ACTIVITÉS DE RECHERCHE SUR DES TERRITOIRES PERTINENTS

1. Le volet recherche des contrats de projets État-régions (CPER) 2007-2013

Le financement des projets recherche des CPER s’inscrit dans la construction de la vision territoriale de l’État en matière d’enseignement supérieur et de recherche. Élaborés en 2006/2007, les contrats en cours représentent 2,9 milliards d’euros pour le ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur. Sur ce montant de la participation de l’État, 778 millions (27 %) sont consacrés à la recherche et l’innovation, 639 (304 pour le précédent CPER) concernant les programmes « recherche » proprement dits et 139 l’équipement scientifique des laboratoires universitaires.

Le principe de ces contrats consiste à structurer fortement la recherche et la diffusion technologique en direction des PME en région pour en favoriser la compétitivité. C’est ainsi que la part du financement État (projets, équipements de recherche et transfert) affectée à des projets liés à des pôles de compétitivité est particulièrement élevée.

Les financements 2009 ont bénéficié du plan de relance, ce qui a permis d’inverser la courbe des annuités, qui était inférieure à leur montant théorique. Le taux de réalisation en 2009 atteint ainsi 34 % pour les programmes « recherche ». Il convient de remarquer que les taux de réalisation des seuls organismes de recherche est plus rapide (37 % pour le programme 172 et 44 % pour les programmes 187 et 193), en particulier pour leurs dépenses de construction.

La part prépondérante des constructions dans les enveloppes régionales des projets enseignement supérieur : 2,123 milliards d’euros, (67 % pour la province, 29 % pour l’Île de France et 4 % pour l’outre-mer) prend tout son sens alors que l’université est remise au centre du dispositif de recherche et a vocation à héberger un nombre croissant d’unités mixtes de recherche et à participer à nombre de structures fédératives de la recherche regroupant les différents acteurs, publics et privés de la recherche et de l’innovation.

Il convient donc de souligner que plus de la moitié des autorisations d’engagement auront été ouvertes entre 2007 et 2010, plan de relance et lois de finances compris.

2. La mise en œuvre du 7ème Programme-cadre pour la recherche et le développement technologique (PCRD) européen

Le 7ème PCRD a été formellement adopté en décembre 2006, son budget total est de plus de 50 milliards d’euros sur une période de sept ans, et de 2,7 milliards d’euros pour le 7ème Programme-cadre d’Euratom sur une période de cinq ans. Ils constituent des instruments essentiels pour répondre aux besoins de l’Europe en matière d’emploi, de compétitivité, de développement durable, pour satisfaire les besoins des autres politiques communautaires en matière de recherche et pour conserver un rôle prépondérant dans l’économie mondiale de la connaissance.

Le budget du 7ème PCRD est de 63 % plus élevé que celui du précédent, soulignant le degré de priorité accordé par l’Union à la recherche.

Depuis le lancement du programme, 110 appels à propositions ont été menés à terme (53 nouveaux appels viennent en outre d’être lancés en juillet 2009). Ces 110 appels ont généré 37 698 propositions et ont conduit au financement de 3 551 projets. Ces projets rassemblent 21 497 participants et donnent lieu à une contribution financière de l’Union de 6,7 milliards d’euros.

Le programme-cadre est organisé en quatre parties, dont la principale, le programme « coopération » constitue le cœur : il a bénéficié de 73 % de la contribution communautaire distribuée à ce jour, soit 4,8 milliards d’euros. Ses dix thèmes reflètent les domaines clés de la connaissance et de la technologie dans lesquels l’excellence de la recherche est particulièrement importante. Il doit améliorer la capacité de l’Europe à relever les défis de demain dans les domaines économique et social, environnemental et industriel et de la santé publique.

La mise en œuvre du programme spécifique « idées » s’est traduite par la création du Conseil européen de la recherche (CER) le 2 février 2007 par une décision de la Commission (2007/134/CE). Le CER est une innovation importante. Il soutient les activités scientifiques, menées à l’échelle internationale, par des chercheurs ou des équipes à titre individuel et sera le premier organisme européen de financement de la recherche exploratoire dans tous les domaines de la connaissance, des sciences sociales et humaines aux sciences de la vie en passant par les sciences physiques et technologiques. Les deux premières années de fonctionnement officiel du CER ont été marquées par la mise en place de ses structures organisationnelles et de gestion et par le lancement des deux premiers appels à propositions, le premier concernait des subventions de démarrage destinées à soutenir les chercheurs dans les premières étapes de leur carrière et le second visait les chercheurs confirmés.

Dans ce cadre, l’étude de l’évolution des taux de participation français aux projets des 6ème et 7ème programmes-cadres montre un repli regrettable de l’implication des équipes françaises dans les dispositifs européens. En effet, sur l’ensemble du 7ème PCRD, au terme de deux ans d’exécution, le montant de contributions revenant à des participants français s’élève à 12,3 % dans les propositions retenues, alors qu’il était de 13 % en moyenne pour le 6ème PCRD (2003-2006).

L’élargissement de l’Union européenne a eu, certes, pour effet normal d’entraîner une diminution générale des parts des contributions revenant à chacun des trois plus grands pays européens, même si la France, subit une baisse plus importante que l’Allemagne et le Royaume-Uni. La cible de l’indicateur de performance associé au projet annuel de performance pour 2010, qui correspond à la mi-parcours du programme-cadre, fixe à 14,5 % la part de financement du PCRD attribuée à l’ensemble des équipes françaises. On mesure donc l’infléchissement qu’il convient de donner aux actions dans ce domaine.

Après le débat initié par le livre vert de la Commission européenne sur la relance de l’espace européen de la recherche (EER), et la mise en place du « processus de Ljubljana » visant à doter l’Europe d’une approche et d’un dispositif de gouvernance communs de l’EER, la présidence française du second trimestre 2008 a permis l’adoption d’une vision de l’espace européen de la recherche à l’horizon 2020.

En pratique, le conseil compétitivité de décembre 2008 a adopté des conclusions sur la programmation conjointe, par lesquelles les États membres s’engagent à élaborer ensemble des agendas de recherche en réponse aux grands défis de société européens (vieillissement de la population, énergie, changement climatique, alimentation…), dont la mise en œuvre reposera principalement sur des programmes nationaux. Ces réflexions devraient déboucher, d’ici la fin de l’année 2009, sur le lancement de deux ou trois programmes. Sous l’impulsion de la France, une initiative pilote consacrée à la lutte contre les maladies neuro-dégénératives, en particulier la maladie d’Alzheimer, est d’ores et déjà en phase de préparation et vient de faire l’objet d’une proposition de la Commission en juillet 2009. Si la programmation conjointe ne constitue pas, en tant que tel, un instrument de financement de la recherche, et à ce titre, ne relève pas du PCRD, il est probable et souhaitable qu’à l’avenir, l’Union contribue, aux côtés des États membres, au financement de la mise en œuvre de ces programmes.

Enfin, l’amélioration du statut des chercheurs européens et des conditions de leur mobilité, ainsi que la promotion de l’Union européenne en tant que véritable puissance spatiale ont constitué les deux autres volets principaux de la présidence française de l’Union dans le domaine de la recherche.

Le tableau suivant récapitule les données relatives à la participation française aux quatre grands programmes spécifiques du PCRDT et à Euratom, arrêtées au mois de février 2009, on y retrouve les forces et les faiblesses françaises. Les secteurs aéronautique, spatial, nucléaire, et dans une moindre mesure les transports terrestres et l’inter-modalité, sont les domaines d’excellence français en termes de participation et, davantage encore, de coordinations des projets. Il convient de relever également les bons résultats français dans les premiers appels à proposition du Conseil européen de la recherche, où avec environ 12 % des participants et des financements, la France se situe au second rang en Europe derrière le Royaume-Uni, ce qui confirme l’attractivité des institutions et la qualité des chercheurs français en recherche fondamentale.

Participation française au 7ème PCRD
(février 2009)

France

Nombre de participations dans les contrats

Contributions obtenues par les participants
(en milliers d’euros)

signés

pays

rang

signés

pays

rang

SP1 – Coopération

1 473

10,0 %

3

588 248,3

12,1 %

2

Santé

230

9,8 %

3

96 577,0

10,4 %

3

Alimentation, agriculture et pêche, et biotechnologies

82

8,1 %

3

24 046,4

10,3 %

3

Technologies de l’information et de la communication

579

10,7 %

2

213 016,5

10,8 %

3

Nanosciences, nanotechnologies, matériaux et nouvelles technologies de production

119

8,3 %

4

40 085,6

8,8 %

4

Énergie

87

9,4 %

3

24 679,5

8,9 %

3

Environnement (changements climatiques inclus)

88

8,3 %

4

21 144,2

9,6 %

3

Transports (aéronautique comprise)

154

13,3 %

2

54 913,8

15,3 %

2

Sciences socio-économiques et humaines

49

7,9 %

3

8 206,8

8,4 %

4

Espace

55

17,7 %

1

68 077,1

48,7 %

1

Sécurité

24

6,5 %

5

6 851,2

7,2 %

4

Activités générales (annexe IV)

6

20,7 %

1

30 650,3

46,2 %

1

SP2 – Idées

61

12,2 %

2

79 123,2

11,8 %

2

SP3 – Personnel

261

10,6 %

2

53 896,3

11,9 %

3

SP4 – Capacités

274

8,0 %

5

75 964,8

12,6 %

2

Infrastructures de recherche

134

10,2 %

3

57 556,9

17,1 %

2

Recherche au profit des PME

77

6,2 %

5

11 943,0

7,6 %

5

Régions de la connaissance et soutien aux groupements régionaux axés sur la recherche

20

8,7 %

5

1 343,0

9,5 %

3

Potentiel de recherche des régions de convergence

4

3,5 %

10

1 233,5

3,0 %

9

Science dans la société

25

8,4 %

3

1 882,3

8,0 %

4

Soutien au développement cohérent des politiques de recherche

           

Coopération internationale

14

6,6 %

2

2 006,0

7,3 %

2

SP5 – Euratom

64

16,3 %

1

18 257,1

23,6 %

1

Énergie de fusion

5

7,8 %

3

928,0

18,6 %

3

Fission nucléaire et protections des radiations

59

17,9 %

1

17 329,0

23,9 %

1

Total 7ème programme cadre de recherche développement technologique

2 133

9,9 %

3

815 489,6

12,3 %

3

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

II.- LA RÉORGANISATION DU CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE (CNRS)

A. PLAN STRATÉGIQUE ET CONTRAT D’OBJECTIFS : LES GRANDS AXES DE LA RÉFORME

Le CNRS est au cœur du dispositif français de recherche, il était donc naturel qu’il soit au cœur de la réorganisation globale qu’en défend le gouvernement. L’organisation de la recherche en France tend désormais à se rapprocher d’un modèle commun à tous les grands pays industrialisés. Il repose sur trois acteurs, les universités autonomes conduisant une recherche en partenariat avec des organismes de recherche qui ont la responsabilité nouvelle, en fonction de leurs champs thématiques de compétences, de coordonner, au niveau national, les recherches menées dans leurs laboratoires propres ou mixtes et les agences de financement de la recherche. Rappelons, à cet égard, que l’Agence nationale de la recherche (ANR), créée en 2005-2007, constitue en France la principale agence de financement sur projets.

À ces trois piliers du système français viennent s’ajouter des instruments structurants de coordination locale des acteurs de la recherche, de l’innovation et des partenariats publics-privés comme les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES), les réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA), les instituts Carnot ou les pôles de compétitivité et un outil d’évaluation : l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES).

Le CNRS a ainsi connu depuis un an et successivement, l’adoption d’un plan stratégique « horizon 2020 » en juillet 2008, la signature le 19 octobre 2009 d’un contrat d’objectifs et de moyens avec l’État 2009-2013 et le 1er novembre, pour permettre la mise en place de ces mesures de réorganisation, paraissait le décret n° 2009-1348 du 29 octobre 2009 modifiant le décret n° 82-993 du 24 novembre 1982 portant organisation et fonctionnement du Centre national de la recherche scientifique. Il s’agit incontestablement d’une accélération de la mise en place de projets et de réformes qui devrait en rénover assez largement le fonctionnement.

1. Le plan stratégique et le contrat d’objectifs : les découvertes se font aux interfaces

Le premier acte dans l’évolution du CNRS a donc été, le 1er juillet 2008, l’approbation par son conseil d’administration du plan stratégique « Horizon 2020 ». Les grands principes de la réforme du CNRS y étaient déjà définis : la réorganisation de l’établissement en instituts, l’accent porté sur l’interdisciplinarité par l’intermédiaire de pôles transversaux et l’évolution des relations entre le CNRS et ses partenaires universitaires pour accompagner le développement de leur autonomie.

L’adaptation du CNRS aux nouveaux défis de la recherche publique en France devait ainsi assurer une interdisciplinarité, garante de grandes découvertes, appuyée sur des disciplines fortes, tout en permettant l’expression des compétences et des talents et en optimisant l’usage des ressources, en particulier des fonds publics. Les priorités scientifiques qui lui sont fixées sont d’importance : faire avancer le front de la connaissance, grâce à une recherche libre et programmée, relever les grands défis planétaires en réponse aux enjeux de société et faire émerger les nouvelles technologies de pointe.

Enfin, le plan prévoyait le renforcement de la direction du CNRS pour être garante de l’excellence scientifique, du dialogue entre les disciplines et de la prospective, conditions nécessaires aux ruptures scientifiques et technologiques. Il lui incombe également de décider des moyens attribués aux instituts et d’en superviser l’action.

La mise en œuvre de ce plan stratégique a déterminé la rédaction immédiate d’un contrat d’objectifs et de moyens, définissant les actions concrètes, scientifiques et organisationnelles, devant être développées au cours des cinq ans à venir, pour permettre la réussite du plan. Après de nombreuses péripéties, dont un conseil d’administration spectaculairement délocalisé à Genève, le contrat d’objectifs a été approuvé par le conseil scientifique de l’organisme, puis par son conseil d’administration lors de sa séance du 25 juin 2009. Il reprend les points essentiels du plan stratégique, auquel il fixe des échéances et des moyens.

La nouvelle organisation du CNRS telle qu’elle est formalisée au sein du contrat d’objectifs répond à trois grands principes.

Le premier vise à conforter le CNRS dans sa fonction de pilotage scientifique des unités mixtes de recherche (UMR) en partenariat avec les universités. Le CNRS accompagnera la montée en puissance des acteurs de site que sont les universités en proposant un partenariat stratégique renforcé mais plus sélectif et en intervenant de manière croissante en tant qu’agence de moyens. Le CNRS assurera ainsi les deux missions complémentaires d’agence de moyens et d’opérateur par une clarification de leur périmètre d’action et par une simplification de la tutelle des unités de recherche. La fonction d’agence de moyens permettra d’apporter un concours humain et financier, tout en préservant cette mixité du pilotage scientifique, entre organisme national et université, qui fait la force du système français de recherche. Dans le même temps, le rôle d’opérateur se recentrera sur des laboratoires structurants au niveau national et sur des laboratoires qui nécessitent une gestion partagée. Ce rôle d’opérateur prend en particulier tout son sens lorsqu’il s’agit de rationaliser et d’optimiser les grands équipements et grandes infrastructures de recherche qui sont, depuis l’origine du Centre, les piliers de ses grands laboratoires.

Le second principe vise à responsabiliser les acteurs de la recherche par la création d’instituts en charge de la prospective et de la programmation. La mise en place des dix instituts du CNRS a pour finalité d’accroître la lisibilité de l’organisation, de garantir l’efficacité de sa fonction de programmation de la recherche et de prendre éventuellement en charge, à la demande de l’État, des missions de coordination nationale. La liste des dix instituts, aujourd’hui arrêtée est la suivante : Chimie, Écologie et environnement, Physique, Physique nucléaire et physique des particules, Sciences biologiques, Sciences humaines et sociales, Sciences mathématiques et leurs interactions, Sciences de l’ingénierie et des systèmes, Sciences informatiques et leurs interactions et Sciences de l’univers. Outre leur organisation et leur structuration renforcées, ils ne reprennent donc pas exactement la répartition thématique des anciens départements. Il convient également de rappeler que l’INSERM a procédé l’année dernière à une restructuration en instituts avec le même objectif.

Le contrat prévoit également que les instituts du CNRS animent, dans leur champ disciplinaire, un réseau d’unités de recherche pour lesquels le CNRS est opérateur s’il continue à les gérer, agence de moyens dans le cas contraire. Au moyen de contrats d’objectifs et de moyens déclinés à leur niveau, la direction générale attribuera les budgets des instituts qui comprendront deux enveloppes non fongibles permettant de séparer les fonctions d’opérateur et d’agence de moyens. Ces contrats passés avec la direction générale du CNRS devraient permettre de définir une stratégie pluriannuelle et des objectifs quantifiés qui engageront les instituts, une stratégie pluridisciplinaire pour l’attribution de moyens croisés d’unités, et éventuellement des missions de coordination ou de représentation nationale.

Le troisième principe de la réforme tend à orienter la direction du CNRS sur la vision stratégique, l’anticipation les grands arbitrages et l’animation des instituts. La gouvernance du CNRS se recentrera sur la promotion de l’excellence scientifique, le dialogue interdisciplinaire et la prospective. Dans cet objectif, des pôles scientifiques transverses seront mis en place pour assurer une vision horizontale et éviter ainsi la compartimentation et la fragmentation de la recherche. Les trois pôles exercent la mission d’intégration scientifique à partir de trois thèmes généraux, correspondant à la perception des besoins en matière de recherche par l’honnête homme contemporain : « le développement durable au service de l’homme », « origine et maîtrise de la matière, nanosciences et nanotechnologies » et « la société en réseau ».

L’image que donnait le CNRS était, pour le moins, confuse. Dans le domaine de la recherche biomédicale, par exemple, on ne pouvait que regretter l’extrême fragmentation du secteur, parallèlement à un empilement de structures accumulées au fil des ans. Cette absence de lisibilité semblait être à l’opposé de l’organisation du réseau des National Institutes of Health américains. L’ancien département « Sciences de la vie » du CNRS était ainsi doté de moyens humains et budgétaires équivalents à ceux de l’INSERM, mais le partage des rôles : recherche fondamentale pluridisciplinaire pour l’un et recherche clinique pour l’autre ne semblait correspondre ni à la réalité du terrain, ni à une évolution souhaitable. S’ajoutaient à ces deux principaux opérateurs le CEA et l’INRA, mais aussi l’INRIA, l’IRD, l’Institut Pasteur et les universités.

L’organisation du CNRS en instituts, piliers de recherche bien identifiés, parallèlement à la mise en place des pôles interdisciplinaires, en interne et, en externe, d’ « alliances » avec d’autres établissements de recherche, structures transversales permettant de véritables synergies, sans remettre en cause la continuité des savoirs et des recherches des différents organismes qui les composent, semble une réponse équilibrée à la dispersion des talents et des efforts qu’on constatait souvent.

Il est, à cet égard, important et significatif que la première alliance créée, au mois d’avril, soit justement l’Alliance nationale pour les sciences de la vie qui regroupe les organismes cités plus haut, dans l’objectif de renforcer la position de la recherche française dans ce secteur par une programmation concertée. Plutôt qu’un simple montage administratif, la réforme peut donc être un processus vivant et donner au Centre le tissu de son renouveau pourvu que chacun s’en empare.

En septembre, le CEA, le CNRS et l’Institut français du pétrole (IFP) ont fondé une Alliance dans le domaine de l’énergie (ANCRE). Elle vise, quant à elle, à mieux coordonner et à renforcer l’efficacité des recherches sur l’énergie menées par les divers organismes publics nationaux. Elle participera à la mise en œuvre de la stratégie française de recherche et développement dans ce secteur, et à l’Alliance européenne sur la recherche en énergie (European Energy Research Alliance, ou EERA).

Deux autres alliances sont en voie de constitution, l’une dans le domaine des sciences et technologies de l’information et de la communication et qui devrait associer le CNRS, le CEA, l’INRIA et l’Institut télécom, l’autre dans le domaine de l’environnement, de l’eau et de l’alimentation, autour de l’INRA et du CNRS.

Il est possible d’attribuer l’évolution positive que traduit cette réorganisation aux multiples discussions, réunions, concertations mais aussi contestations qui ont accompagné la réforme. Le Centre devrait disposer, aujourd’hui, d’une vision plus claire et peut-être aussi plus sereine, non seulement de son rôle - qui est réaffirmé dans un programme dans la tradition des planifications de l’après-guerre, ici « quinquenno-décennale » - mais également de son fonctionnement.

2. Les moyens financiers de la réforme

Le tableau ci-dessous retrace l’évolution des financements des budgets primitifs votés du CNRS de 2005 à 2009. Malgré les limites en terme de précision qu’imposent les diverses mesures de régulation budgétaire, il offre une assez bonne représentation de leur évolution.

CNRS : budgets primitifs votés de 2005 à 2009 / financements

Budgets primitifs votés

Ancien cadre

Nouveau cadre budgétaire et comptable (LOLF)

2005

2006

2007

2008

2009

Subventions du MESR : titres III (dépenses ordinaires) et VI (crédits de paiement)

2 047 743 637 €

       

Subvention récurrente pour charges de service public (P. 172)

 

2 216 373 051 €

2 308 760 243 €

2 328 958 207 €

2 444 958 439 €

Subvention pour charges de service public : post-doctorants ministériels (P. 172)

 

11 517 739 €

12 599 709 €

13 856 189 €

7 922 808 €

Contrats de recherche

167 118 521 €

273 386 645 €

290 000 000 €

351 070 000 €

353 800 000 €

Redevances pour brevets et licences

45 000 000 €

50 000 000 €

58 000 000 €

58 040 000 €

45 000 000 €

Prestations de services et ventes de produits

14 078 024 €

16 722 167 €

22 680 433 €

19 504 750 €

19 793 000 €

Autres ressources

114 660 827 €

142 736 117 €

141 939 882 €

159 680 000 €

188 588 501 €

Prélèvement sur le fonds de roulement

-

27 482 122 €

-

-

-

Financements (prévisions de recettes)

2 388 601 009 €

2 738 217 841 €

2 833 980 267 €

2 931 109 146 €

3 060 062 748 €

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Les mesures inscrites dans le projet de loi de finances pour 2010, fixent la subvention récurrente pour charges de service public (SCSP) inscrite sur l’enveloppe de crédits du programme 172 à 2 504,101 millions d’euros (+65,202 millions d’euros soit +2,7%) en AE et en CP, à structure constante. À structure courante, la SCSP pour 2010 est ramenée à 2.503,742 millions d’euros (+64,842 millions d’euros) par le transfert de 4 emplois, au 1er janvier 2010.

Elle tient compte du nouveau relèvement du taux de cotisation aux pensions civiles et de l’allocation temporaire d’invalidité (+15,393 millions d’euros) au 1er janvier 2010 et du relèvement de la valeur du point d’indice de la fonction publique prévu au 1er juillet 2010 dans le cadre de l’accord salarial 2009-2011 (+ 13,460 millions d’euros).

La répartition totale des mesures 2009 du « plan carrières » (prime d’excellence scientifique et amélioration des promotions), fait l’objet d’une mesure de consolidation (+ 4,327 millions d’euros).

La répartition du « plan carrières » 2010 (9,000 millions d’euros inscrits au projet de loi de finances au total) prévoit un nombre théorique de 1.523 primes d’excellence scientifique et un nouvel abondement de crédits destinés à améliorer la pyramide des emplois et fluidifier les carrières.

Le nouveau dispositif des « chaires mixtes » entre les organismes de recherche et les universités prévoit le financement de 80 chaires pour le CNRS (+3,163 millions d’euros).

Les crédits prévus au titre des très grandes infrastructures de recherche sont portés à 139,808 millions d’euros (+ 9,987 millions d’euros) et tiennent compte de la participation du CNRS (qui complète celle du CEA) aux grandes infrastructures de recherche européennes.

La participation du CNRS à la société civile « Grand équipement national en calcul intensif » est inscrite à hauteur de 20 % des moyens prévus, à 29 millions d’euros au total, soit 5,8 millions d’euros en 2010.

Il convient de souligner que la structuration du CNRS en instituts thématiques s’accompagne d’une mesure particulière de + 16 millions d’euros afin de les doter d’une capacité d’intervention adaptée à leurs missions d’agences de moyens, notamment pour les programmes incitatifs ou à vocation nationale.

À la subvention s’ajoutent les ressources propres de l’organisme. En l’absence de prévisions pour 2010 disponibles elles étaient estimées, en 2009, à 607 millions d’euros, dans la répartition suivante : 58 % de contrats de recherche (30 % ANR, 30 % secteur public, 20 % Union européenne, 20 % secteur privé), 21 % de subventions de fonctionnement (CPER et dispositifs doctorants), 11 % de produit de la valorisation de la recherche (redevances de brevets etc.) et 10 % de recettes diverses, dont la vente de biens immobiliers.

Les contrats ANR représentent donc une part non négligeable des ressources propres du CNRS, ce qui n’est pas sans conséquence, nous allons le voir, sur l’évolution de la situation statutaire de ses personnels.

Le tableau ci-dessous montre que sur la période 2005-2008 l’établissement a bénéficié de près d’un quart des dotations des appels à projet de l’Agence.

 

2005

2006

2007

2008

CNRS

24 %

21,6 %

23,8 %

24,1%

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

En comparaison, le deuxième organisme bénéficiant des dotations de l’Agence, l’INSERM, bénéficie de 5 % de leur montant.

B. LES PERSONNELS DE LA RECHERCHE

1. Des effectifs stables mais des statuts à réévaluer

Le tableau ci-dessous présente l’évolution des emplois (en emplois budgétaires avant l’application de la LOLF, puis en équivalent temps plein travaillé, ETPT) au CNRS entre 2002 et 2009. Rappelons que les ETPT « sous plafond » (masse salariale limitative) sont financés en tout ou partie par la subvention pour charges de service public (SCSP) et « hors plafond » (masse salariale indicative) en contrepartie des ressources propres de l’établissement.

CNRS : tableau annuel des emplois annexés aux budgets primitifs
(budgets primitifs votés, de 2002 à 2009)

Emplois

Emplois budgétaires

Emplois exprimés en ETPT

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Chercheurs titulaires (DR, CR)

11 789

11 652

11 533

11 652

11 692

11 709,5

11 714,6

11 621,2

Ingénieurs titulaires (IR, IE, AI)

8 632

8 705

8 619

8 773

9 020

8 649,8

8 746,0

8 684,0

Techniciens titulaires (TR, AJT, AGT)

5 829

5 837

5 726

5 834

5 902

5 355,9

5 128,4

5 130,8

Techniciens de physique nucléaire (TPN)

240

203

173

138

-

-

102,6

83,3

Marins professionnels

17

17

17

17

-

-

-

-

Emplois fonctionnels et de direction

43

43

43

43

43

113,2

31,5

31,3

Emplois de non titulaires, sous plafond

-

-

-

-

-

2 951,4

2 983,3

3 051,0

Emplois de non titulaires, hors plafond

-

-

-

-

-

2 975,6

3 635,2

3 754,0

Emplois budgétaires plafonnés

26 550

26 457

26 111

26 457

26 657

-

-

-

Emplois (ETPT) sous plafond opérateur

-

-

-

-

-

28 779,8

28 706,4

28 601,6

Emplois (ETPT) hors plafond opérateur

-

-

-

-

-

2 975,6

3 635,2

3 754,0

Total des emplois (tableaux des emplois annexés aux budgets votés)

26 550

26 457

26 111

26 457

26 657

31 755,4

32 341,6

32 355,6

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Rappelons, pour s’en réjouir, que le gouvernement s’est engagé à maintenir les emplois du CNRS en 2010 et 2011. Les effectifs pour 2010 sont donc stables, sauf extension de mesures votées en 2009 se traduisant par un léger rééquilibrage entre emplois de soutien (ITA) et de recherche et le transfert de 4 emplois déjà évoqués.

Un point reste cependant en débat. Il est lié au statut des personnels du CNRS. Depuis 1984, ceux-ci sont fonctionnaires comme tous les employés des établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST), par exemple l’INRA ou l’INSERM mais contrairement à ceux des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) comme le CEA ou le CNES.

L’ANR dont les moyens atteignent, après quatre ans d’activités, 870 millions d’euros, joue, on l’a vu, un rôle croissant dans le financement des activités des laboratoires du CNRS. Son rôle d’agence de financement de projets de recherche leur permet de disposer de moyens importants pour les mener à bien, sur des périodes relativement courtes, autour de trois ans. Les laboratoires peuvent ainsi étoffer rapidement leurs équipes, mais l’afflux de chercheurs et d’ingénieurs et techniciens sous contrat précaire, à durée déterminée (CDD), perturbe évidemment à terme le fonctionnement de l’ensemble.

Une étude menée en 2007 sur l’ensemble des organismes de recherche bénéficiaires montrait déjà, alors que l’ANR peut financer l’intégralité des rémunérations des personnels en CDD des EPST et des universités, et 50 % de ceux des EPIC, que 5 957 contrats par an ont été financés sur les crédits de l’agence, soit 1,37 CDD de trois ans par projet (contre 1 en 2006). Ce volume était d’un peu moins de 4 250 contrats par an en 2005 et de 5 107 contrats par an en 2006. Les contractuels recrutés sont, pour les deux tiers, des chercheurs post-doctorants. La situation s’est depuis amplifiée parallèlement à la croissance des financements de l’agence.

À cette première explication, structurelle, de la croissance des contrats de courte durée s’ajoutent les crédits ministériels dédiés à différents types de contrats, tels les CDD de haut niveau ou les contrats post-doctoraux, mais aussi la politique d’extinction des libéralités (c’est-à-dire des financements directs, en général par des fondations, hors contrat et hors couverture sociale, de chercheurs) menée depuis 2004 par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et qui permet de recenser de nombreux contrats auparavant invisibles, notamment dans le secteur de la santé, mais aussi la politique d’accueil de chercheurs étrangers pour des périodes limitées et enfin, même si l’effet en est difficilement mesurable, l’intégration systématique dans les centralisations d’information des organismes, de l’ensemble des non-titulaires recrutés par les laboratoires, contrepartie d’une volonté de présentation des emplois plus fidèle à la réalité du terrain.

Les organismes de recherche ont également recours à d’autres formes d’emplois temporaires pour répondre à des besoins de courte durée comme des remplacements par des renforts occasionnels ou saisonniers. Les contrats peuvent dans ce cas atteindre une durée maximale de 10 mois ou, pour des besoins ponctuels n’excédant pas 120 heures de travail dans le mois, une durée maximale de 6 mois.

Globalement, les chiffres publiés dans le bilan social pour 2007 du CNRS sont, en personnes physiques payées (PPP), de 7 124 contractuels pour 25 911 permanents. Or, la part des contractuels dans les effectifs du centre continue de croître, plus 8 % cette année de source syndicale avec, selon les mêmes sources, une proportion plus importante dans les sciences de l’homme et de la société (SHS), ce qui ne contribue pas peu à maintenir, dans ce secteur de la recherche, une inquiétude assez légitime. Le risque existe de retrouver une situation équivalente à celle de la fin des années 1970, qui a entraîné les titularisations des « hors statut » humainement et socialement parfaitement justifiées, mais sans discernement et difficiles à gérer.

Une solution proposée serait de pouvoir recruter des personnels sous contrat à durée indéterminée (CDI) ce qui, pour certains, permettrait une intégration plus simple dans le cadre du CNRS, puisqu’elle n’impliquerait plus l’organisation de concours pour pourvoir des postes statutaires, mais surtout autoriserait une plus grande souplesse dans le montant des rémunérations, contrairement à la grille de la fonction publique, les rendant ainsi plus attractives et compétitives sur le plan mondial. Cette solution devrait, pour ses défenseurs, faciliter l’éventuel retour non seulement des chercheurs français de renommée internationale installés à l’étranger, en particulier aux États-unis, mais aussi des post-doctorants dont les formations comprennent le plus souvent une expérience étrangère et qui auraient une tendance croissante à s’installer dans les pays d’accueil.

Outre qu’elle suppose également des financements importants, l’introduction des CDI multiplierait les statuts sur un même site, dans une même équipe et dans un même laboratoire, situation dénoncée non seulement par la plupart des syndicats mais aussi par les chercheurs eux-mêmes. Il serait sans doute préférable de s’en tenir au cadre statutaire actuel et d’éviter ainsi des querelles assez inopportunes.

Cette étape de maintien des effectifs était nécessaire, mais il serait souhaitable, sur cette base stabilisée, de présenter des perspectives quantifiées et lisibles de recrutements dans la durée pour les étudiants, actuels et futurs. Ce serait, au-delà du problème des actuels CDD, une réponse à la diminution de l’attractivité de la recherche et des sciences chez les lycéens et les étudiants, les titularisations, même un peu tardives, ne semblant pas choquantes en soi : elles sont courantes en effet pour les cadres du secteur hospitalier comme à l’université.

2. Deux laboratoires pour un même enthousiasme

La visite de deux laboratoires du CNRS, l’un, le Laboratoire de physique des solides (LPS), unité mixte de recherche situé sur le campus d’Orsay de l’université de Paris-Sud XI, l’autre, l’Institut de chimie des substances naturelles (ICSN), unité propre de recherche, située dans la propriété du CNRS de Gif-sur-Yvette, a permis d’apprécier, sur le terrain, la richesse de l’intervention du Centre dans le domaine de la connaissance, et de rencontrer des équipes de chercheurs, passionnées et bienveillantes aux profanes.

Le LPS est un des plus importants laboratoires nationaux de recherche en matière condensée. Il regroupe 18 équipes sur ses trois axes de recherche : les nouveaux états électroniques de la matière, les phénomènes physiques aux dimensions réduites et la matière molle et l’interface physique-biologie. Il est à l’initiative du réseau thématique de recherche avancée « triangle de la physique – Palaiseau-Orsay-Saclay », acteur des plans campus. 200 à 250 personnes y travaillent au quotidien, dont 100 chercheurs, 50 ITA et 35 doctorants, le rapport entre chercheurs et soutien suit la tendance générale observée au CNRS, et donc diminue, ce qui n’est pas sans inquiéter. Son budget, hors rémunérations, est passé en moyenne de 2,4 à 2,78 millions d’euros par an de 2001-2004 à 2006-2008. Dans la dernière période, la part des dotations de base a été ramenée à un tiers, l’ANR apportant 20 % et devenant ainsi le deuxième financeur du laboratoire, triplant la part des anciens fonds incitatifs qui jouaient un rôle proche du sien avant 2005 mais, on le voit, à une échelle très réduite. Le LPS est confronté à une diminution du soutien de base et connaît les incertitudes des laboratoires hébergés sur le financement assuré par l’université (ici Paris-Sud) dans le cadre de l’autonomie budgétaire. C’est ainsi que les travaux de reconditionnement des espaces communs et de mise aux normes de sécurité sont payés sur les crédits « recherche », ou que le préciput versé par l’ANR à l’université, comme le prévoit la règle en la matière, ne revient en général pas aux laboratoires bénéficiant des contrats de l’Agence. Alors que les contrats ne financent ni l’infrastructure ni l’équipement collectif ou technique, le financement par projet ne doit pas fragiliser l’unité, il convient donc de maintenir un budget pérenne à cette fin, pour maintenir la cohérence scientifique du laboratoire et les éléments constitutifs de son rayonnement.

L’ICSN est le plus grand établissement public de recherche en chimie en France. Unité propre de recherche, il est, contrairement au LPS, installé dans ses murs. Ses recherches se rattachent à quatre grands domaines : la synthèse totale et la méthodologie, les substances naturelles et la chimie médicinale, les cibles thérapeutiques – chimie et biologie et la chimie et la biologie structurale. Elles visent à les exploiter au bénéfice de l’homme. L’institut a fait le choix de thématiques ciblant les maladies contemporaines et en exploite les résultats expérimentaux en partenariat avec l’industrie pharmaceutique. C’est ainsi que les chercheurs de l’institut sont à l’origine de la découverte, de la mise au point et de la commercialisation de médicaments anti-cancéreux très utilisés. Ces résultats thérapeutiques impressionnants se sont en outre accompagnés de redevances importantes, confirmant, si c’était nécessaire, la rentabilité des investissements dans la recherche fondamentale. Ces redevances, dont le montant s’élève à environ 50 millions d’euros par an, ont d’ailleurs permis la création, par le CNRS et l’Académie des sciences, de la Fondation pour le développement de la chimie des substances naturelles et ses applications qui devrait alimenter la recherche dans ce domaine. Le budget de l’institut en 2008 était de 10,5 millions d’euros dont 7 au titre des redevances. Il comprend en 2009 une équipe de 250 personnes environ dont 44 chercheurs et 60 ITA permanents, 60 doctorants et 32 postdoctorants. La fin imminente de ses principales redevances, dépendant de brevets dont l’échéance est en 2011, va rendre nécessaire la recherche de nouveaux partenaires, mais aussi un soutien accru du CNRS.

Les entretiens qui ont été menés à Orsay comme à Gif-sur-Yvette avec les équipes de recherche ont nettement enrichi l’ensemble de ce rapport. Cependant, on l’a vu, sur plusieurs points d’organisation, l’approche des laboratoires apporte d’appréciables nuances qu’il convenait de résumer ici.

Pour conclure, il faut remarquer que les questions d’architecture administrative et de réorganisation du Centre autour d’instituts ne semblent pas avoir, à cette étape, un impact sur le fonctionnement des deux laboratoires, ni sur la perception, par les équipes, de leur insertion dans la structure générale de l’établissement : le LPS dépendait ainsi de l’ex-département MPPU (mathématiques, physique, planète et univers) et est maintenant rattaché à l’institut de physique, l’ICSN de l’ex-département de chimie et relève maintenant de l’institut de chimie.

Enfin, il est essentiel de continuer à inciter les laboratoires à mener une politique dynamique de partenariat et de valorisation. Elle participe de l’indispensable ouverture du monde de la recherche sur son environnement. Nous allons voir que le CNRS a renouvelé et renforcé son action dans ce domaine, mais il convient, pour cela, qu’un dispositif de lissage de l’irrégularité des ressources propres, liées à des résultats de la recherche fondamentale aléatoires par définition, soit clairement établi. L’absence de mesures structurantes dans ce domaine risque, sinon, de fragiliser les initiatives que l’on veut, tout au contraire, encourager.

C. UN JEUNE SEPTUAGÉNAIRE

1. Une politique de valorisation renouvelée

L’Office national de recherches scientifiques et industrielles et des inventions, sorte d’ancêtre du CNRS, a donné naissance, en 1923, sous la forme d’un concours d’appareils ménagers organisé à l’initiative de son directeur, au salon des arts ménagers. Du salon des arts ménagers à la valorisation, le CNRS s’est ainsi toujours montré soucieux de participer à l’effort national visant à accompagner le développement des entreprises, à freiner les délocalisations, à compenser les faiblesses de certains secteurs industriels, en déclin ou en difficulté, et à permettre l’émergence d’entreprises à partir des développements issus des technologies nouvelles.

Pour renforcer ses relations avec le monde industriel, le CNRS dispose d’un atout important : la transversalité et l’universalité de ses recherches. Il applique de ce fait quelques principes simples pour développer ses partenariats.

Pour les grandes entreprises multinationales, qui mettent les laboratoires français en concurrence avec leurs homologues étrangers, le CNRS se doit de promouvoir l’excellence de ses laboratoires. L’organisme a mis en place des accords cadres avec les grands groupes industriels, qui permettent le développement de collaborations durables. Ces accords prévoient en particulier des échanges de personnels entre le CNRS et les entreprises : en juin 2008, 96 chercheurs et ITA étaient ainsi détachés ou en disponibilité dans le secteur économique. Le Centre s’est également engagé dans le développement de son activité de consultance.

Pour les PME, le transfert des résultats de recherche des laboratoires est plus difficile, les échéances temporelles entre les partenaires sont différentes et l’expression des besoins industriels plus délicate à formuler. Le CNRS s’engage donc dans la création, avec ses partenaires, de pôles de valorisation régionaux, lieux où peut s’élaborer le dialogue avec les entreprises.

Mais si la mobilité est une étape clé du dialogue avec les entreprises, il convient de remarquer qu’elle devra, pour être attractive, être reconnue dans l’évaluation et la promotion des personnels concernés par l’activité dans le milieu industriel.

Accroître les échanges entre le CNRS et les entreprises suppose également une contribution directe à la recherche des entreprises, par la mise à disposition d’équipements de pointe et l’augmentation du nombre de contrats industriels, alors même que cette activité assure des retours financiers réels aux entreprises qui fournissent les laboratoires.

Il est également nécessaire de participer à la gouvernance des pôles de compétitivité. En juin 2008, un tiers des unités mixtes de recherche du CNRS étaient impliquées dans 56 pôles de compétitivité sur 71.

Le CNRS entend affirmer son rôle dans la gouvernance scientifique de ces pôles, afin d’être un acteur dans la définition des besoins de recherche et par là dans l’économie des régions.

La mise en œuvre d’une gestion stratégique de la propriété intellectuelle est l’autre volet essentiel de la valorisation. Il s’agit pour le CNRS de favoriser le transfert des connaissances créées dans les laboratoires vers les partenaires industriels les plus aptes à développer et à vendre les produits ou les services issus de ces connaissances. Le brevet constitue bien sûr la principale forme de protection institutionnelle des résultats de la recherche. En juin 2008, le CNRS disposait d’un portefeuille de 3000 brevets actifs, dont un tiers donnait lieu à des licences. En associant ses partenaires publics aux accords qu’il a négociés avec les industriels, le CNRS fait exploiter, dès la première année de publication, une forte proportion de brevets, 116 brevets exploités sur 284 publiés entre juillet 2007 et juillet 2008. Le CNRS se met ainsi en mesure d’assurer une gestion stratégique, économique et globalisée de son important portefeuille. Il projette également de confier à des partenaires industriels stables la propriété de certains types de brevets, en conservant des droits de redevance. La stabilité de l’entreprise étant une condition particulièrement pertinente en période de crise.

Dernier aspect, directement en aval de la recherche quant à lui, la création d’entreprises par les chercheurs eux-mêmes, devrait constituer un vecteur important de la valorisation. En moyenne, le CNRS génère une trentaine d’entreprises chaque année. Près de 1900 emplois ont ainsi été créés en moins de dix ans. Mais force est de constater que ces jeunes entreprises ont des difficultés à croître, voire à se maintenir. Le CNRS s’est engagé à améliorer cette situation et à tenter ainsi de dépasser une difficulté « culturelle » aussi ancienne que récurrente.

Le contrat d’objectifs présenté plus haut a précisé les projets de l’établissement en matière de valorisation. Il formule cinq objectifs contractualisés pour la période 2009-2013 :

– construire une politique partenariale avec les grands groupes et les PME à travers des accords-cadres ou spécifiques à moyen ou long terme ;

– contribuer à la professionnalisation des services de valorisation sur site, en général à l’échelle d’un pôle de recherche et d’enseignement supérieur, en y apportant la combinaison de ses compétences localisées en région et de sa dimension d’opérateur national ;

– offrir aux établissements qui le souhaitent les services nécessaires à la gestion de leur patrimoine immatériel ;

– se fédérer à l’échelle européenne en définissant des sous-portefeuilles de « grappes de brevets » ;

– développer un mécanisme de mutualisation (de type Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur, Coface) pour la défense et la protection juridique de la propriété intellectuelle, et partager cette expérience avec les établissements de recherche publique.

Enfin, pour en évaluer la progression, le CNRS a défini plusieurs indicateurs pour le volet valorisation de son contrat d’objectifs, en particulier :

– pour le soutien à l’innovation, le nombre de licences d’exploitation signées dans l’année dans ses unités propres ou associées (brevets, savoir-faire ou logiciels), avec un objectif d’accroissement significatif.

– pour la mise en œuvre du dispositif de valorisation, le montant des redevances avec également un objectif d’accroissement important.

2. Un anniversaire

Le CNRS vient de fêter ses 70 ans le 19 octobre. Les différents évènements, les déclarations qui ont accompagné cet anniversaire devraient avoir contribué à restaurer la confiance d’un établissement qui a connu, depuis plusieurs années, de nombreuses interrogations.

À cette occasion, la ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur a rappelé sa volonté de défendre un CNRS ouvert et stratège, pour le 21ème siècle.

Car il semble que l’incertitude, réelle ou fantasmée, qui pèse sur l’avenir même du Centre, depuis des années et à chaque changement de majorité politique, n’a pas contribué à tracer des perspectives rassérénantes pour ses personnels. La création de l’Agence nationale de la recherche (ANR) elle-même, aujourd’hui grand financeur des projets du Centre, a été en son temps ressentie comme une remise en cause de son rôle de pilote de la recherche en France. Le plan stratégique, par son approche décennale, le contrat d’objectifs 2009-2013, les financements du projet de loi de finances et l’engagement sur les effectifs en 2010 et 2011 peuvent également participer à ce nécessaire retour de confiance dans l’avenir de l’organisme. Cette confiance des chercheurs dans la pérennité du cadre de leur recherche fait partie de ces spécificités françaises qu’il est, en effet, très important de défendre.

De même, alors que la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) a considérablement renforcé l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur et il n’est pas inutile de rappeler le rôle très structurant confié aux organismes de recherche, et d’abord au CNRS, dans la recherche universitaire. De nombreux interlocuteurs rencontrés lors de l’élaboration de ce rapport ont souligné l’importance d’une réforme fondamentale mais relativement récente dans l’histoire du Centre : la création en 1966, à l’initiative du directeur général de l’époque, Pierre Jacquinot, des laboratoires associés, devenus depuis les unités mixtes de recherche (UMR), qui lient plus étroitement le CNRS à l’Université, « sans supprimer une concurrence bénéfique » entre les deux piliers de la recherche publique française, respectant ainsi les principes de compétition et de collaboration qui sont à la base de toute dynamique.

Les organismes de recherche et tout particulièrement le CNRS, disposent d’une vision globale, nationale et internationale, leur permettant d’aider à constituer les réseaux de recherche pertinents. Cette perspective d’ensemble les met en mesure d’éviter l’émiettement des travaux et de dépasser des projets trop soumis aux intérêts à très court terme des différents groupes de pression locaux, dont l’influence s’exerce nécessairement sur les structures universitaires qu’ils contribuent à financer.

La différence d’intérêts financiers entre l’université-hébergeur et l’organisme hébergé dans les UMR ne peut s’estomper qu’avec une importante remise à niveau des équipements universitaires et d’abord des bâtiments. L’effort soutenu dans ce domaine depuis 2007, renforcé par le plan de relance de 2009, est poursuivi dans le projet de loi de finances pour 2010, ce qui devrait simplifier des relations budgétaires complexes et qui se tendent nécessairement en période de crédits rares et de priorités divergentes.

Des rencontres multiples de cet automne, il ressort également clairement que la place du CNRS n’est pas contestée : il reste la colonne vertébrale du système français de recherche, non seulement d’un point de vue national, mais aussi pour les étrangers. Il convient, en effet, de se réjouir de la part croissante que les chercheurs étrangers, 27 % cette année, prennent dans le Centre, traduisant ainsi son attractivité. Tout le monde s’accorde à penser que, puisque les rémunérations seules n’avantagent pas la France, l’environnement global et, en particulier, l’existence d’un statut garantissant la liberté du chercheur et de la recherche, joue un rôle essentiel dans le choix de ces scientifiques, dont la créativité a d’abord besoin d’autonomie.

La collaboration internationale fait, en effet, partie intégrante du travail de recherche, car un grand nombre de ses domaines, tels que le climat, les épidémies ou l’archéologie, ne connaissent pas les frontières, mobilisant les communautés scientifiques de plusieurs pays dans des actions communes. De plus, même pour les domaines où les études se déroulent en laboratoire, il est nécessaire d’atteindre une masse critique de collaborations pour avoir accès aux compétences complémentaires nécessaires à l’originalité, à la qualité et aux succès des projets de recherche.

Le CNRS développe donc son action internationale avec la volonté de faire collaborer ses laboratoires avec les meilleures équipes des autres pays pour leur permettre d’avoir une place prépondérante sur la scène mondiale. La diversité géographique de l’action internationale fait que les activités associées avec les priorités scientifiques du CNRS ne sont pas réparties uniformément dans le monde, mais ciblées, pour chaque priorité, sur quelques pays, là où les domaines scientifiques correspondants présentent un intérêt particulier.

Enfin, l’action internationale repose sur des partenariats équilibrés et des collaborations structurées. Pour cela le CNRS propose toute une panoplie d’outils pour les chercheurs qui souhaitent, avec leurs collègues étrangers, soit initier une collaboration au travers d’échanges autour d’un projet de recherche, soit la consolider par un programme international de coopération scientifique ou la coordonner sous la forme d’un réseau, soit encore la structurer en laboratoire associé ou en unité mixte internationale, ces derniers étant les fleurons enviés des structures internationales du Centre.

Le réseau de bureaux régionaux implantés à l’étranger est actuellement le suivant : Hanoï, Johannesburg, Moscou, Pékin, Santiago du Chili, Tokyo, Washington.

Le CNRS doit continuer à couvrir tout le champ de la recherche, des SHS aux technologies de pointe, articuler le continuum recherche conceptuelle et applications : le rapport actuellement estimé de 20 pour 80 paraît équilibré et contredit l’image de purs théoriciens trop souvent accolée au Centre. Le CNRS et ses équipes poursuivent ainsi l’organisation originale mise en place en 1926 par Jean Perrin dans son Institut de biologie physico-chimique, s’appuyant sur des chercheurs à temps plein, dans un cadre pluridisciplinaire. Le débat lié à la crainte de voir le Centre, agence de moyens ayant perdu le pilotage de ses recherches, au seul service d’universités opérateurs de recherche, n’est plus d’actualité.

Plus que jamais, le CNRS est à même de répondre à la conviction de Jean-Pierre Changeux considérant « indispensable de reprendre et renouveler l’idéal de l’Encyclopédie en luttant contre les clivages disciplinaires tout en respectant leur spécificité ». Décidément, ce septuagénaire se porte plutôt bien.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DE LA MINISTRE

La commission des affaires culturelles et de l’éducation entend, en commission élargie à l’ensemble des députés, Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur les crédits pour 2010 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » au cours de la séance du lundi 9 novembre 2009 à 15 heures.

M. Didier Migaud, président de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, M. Christian Jacob, président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, Mme Laure de la Raudière, vice-présidente de la Commission des affaires économiques et moi-même sommes heureux de vous accueillir au sein de cette commission élargie consacrés aux crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie, m’a fait savoir ses regrets de ne pas être présent parmi nous : il est retenu par la discussion sur le projet de loi relatif à La Poste, qui se poursuit sans interruption depuis lundi dernier au Sénat ; cent trente amendements resteraient encore à examiner.

Vous connaissez, madame la ministre, la procédure de la commission élargie, destinée à faciliter les échanges d’idées entre la ou le ministre, les rapporteurs, les porte-parole des groupes et les députés.

L’intervention des nombreux rapporteurs ne traduira pas la qualité et l’importance de leur travail, qui va bien au-delà de la présentation des crédits d’une mission et s’exerce tout au long de l’année, à travers le suivi, le contrôle et l’évaluation des politiques, particulièrement importants lorsqu’il s’agit de la recherche.

Pour faciliter l’organisation de nos travaux, nous commencerons par l’examen des crédits consacrés à la recherche.

Pour ma part, je souhaiterais insister d’emblée sur deux aspects de la politique de la recherche et de l’enseignement supérieur : le crédit d’impôt-recherche et les pôles de compétitivité.

Le crédit d’impôt-recherche, particulièrement depuis la réforme de 2008, apparaît comme un instrument extrêmement puissant – voire le plus efficace d’Europe – de la politique de recherche. La Mission d’évaluation et de contrôle, au cours de ses auditions consacrées aux pôles de compétitivité, a pu apprécier le rôle central qu’il occupe, tant pour les entreprises que pour les organismes de recherche. Mais c’est aussi un instrument coûteux pour l’État, à un moment où la Commission des finances se montre très vigilante en matière de niches fiscales, dont le bien-fondé se doit d’être examiné avec exigence. Nous serons donc très attentifs aux informations que vous pourrez nous fournir sur l’exécution et l’évaluation du crédit d’impôt-recherche et sur ses perspectives.

Concernant les pôles de compétitivité, la Mission d’évaluation et de contrôle, qui associait des rapporteurs de la Commission des affaires économiques et de la Commission des finances issus de la majorité comme de l’opposition, a adopté un certain nombre de recommandations.

Nous avons décidé de saisir le Gouvernement le 23 septembre dernier, selon la procédure de l’article 60 de la LOLF. Fin novembre, nous devrions avoir reçu votre réponse sur les suites que vous entendez donner à nos recommandations. Celles-ci concernent, entre autres, une des faiblesses françaises : l’articulation entre la recherche-développement et le premier développement industriel, sujet sur lequel nous reviendrons lors d’un débat en séance publique.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Madame la ministre, nous sommes très heureux de vos accueillir aujourd’hui pour évoquer ces crédits. La Commission des affaires culturelles et de l’éducation se réjouit tout particulièrement, pour sa part, à l’idée de vous accueillir le 18 novembre pour procéder à votre audition, ce qu’elle n’avait pas encore eu l’occasion de faire.

Comme l’a rappelé M. Migaud, les rapporteurs des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » sont nombreux. Il y en a huit, dont deux rapporteurs pour avis de la Commission des affaires culturelles : Olivier Jardé, qui a travaillé sur la réforme du CNRS, et Françoise Guégot, qui a travaillé sur la place des instituts universitaires de technologie dans la mise en œuvre de la LRU.

Madame la ministre, je souhaiterais vous poser deux questions.

La première concerne l’évolution des effectifs d’enseignants-chercheurs à l’université. L’application de la LRU entraîne le transfert de postes du budget de l’État vers les universités autonomes. Pourriez-vous faire le point ?

La seconde concerne la réforme du CNRS, qui a suscité quelque inquiétude parmi les chercheurs. J’aimerais savoir dans quelles conditions cette réforme se met en place et ce que ces derniers vont pouvoir tirer de ce nouvel environnement.

Je vous prie enfin d’excuser certains de mes collègues, qui se trouvent à l’heure actuelle dans l’hémicycle pour examiner les crédits consacrés aux médias, et qui ne pourront donc pas assister à cette commission élargie.

M. Christian Jacob, président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Madame la ministre, je n’ai rien à ajouter aux propos de Mme Tabarot. L’important est que l’on puisse échanger avec notre rapporteur. Je lui fais confiance, sinon pour le vote final, du moins pour le travail réalisé.

Mme Laure de La Raudière, vice-présidente de la Commission des affaires économiques. Madame la ministre, nous sommes heureux de vous accueillir cet après-midi pour examiner les crédits de la recherche. La Commission des affaires économiques s’est saisie des crédits des grands organismes, de la recherche industrielle et de la recherche en matière d’énergie et de développement durable.

Deux rapporteurs interviendront en son nom : M. Pierre Lasbordes, pour le budget des grands organismes, crédits répartis sur plusieurs programmes de la MIRES (Mission interministérielle pour la recherche et l’enseignement supérieur) et M. Daniel Paul, pour la recherche industrielle.

Mme Geneviève Fioraso, pour sa part, a travaillé sur les crédits de l’industrie et de l’énergie, notamment sur le programme 190 « Recherche dans le domaine de l’énergie et du développement durable ». Elle s’est déjà exprimée en tant que rapporteure lors de l’examen de la mission « Écologie ». Elle vous interrogera après que les porte-parole des groupes se seront exprimés et donnera son avis sur les crédits de l’industrie et de l’énergie au moment du vote des budgets, lorsque la Commission des affaires économiques se réunira à cette fin, après la commission élargie.

Madame la ministre, j’ai trois questions à vous poser.

Premièrement, quel est le lien avec le projet de loi « Grand Paris », s’agissant plus particulièrement de l’aménagement du plateau de Saclay ?

Deuxièmement, pourriez-vous nous parler, dans la perspective d’une sortie de crise, de la politique d’innovation et de valorisation industrielle de la recherche ? Je pense naturellement à l’incitation aux dépôts de brevets et aux transferts industriels des recherches.

Troisièmement, vous avez engagé une dynamique de regroupement des différents établissements d’enseignement supérieur et de recherche et créé des pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). Quel bilan peut-on en tirer ? Envisagez-vous de prendre de nouvelles mesures pour les renforcer ?

M. Jean-Pierre Gorges, rapporteur spécial pour les politiques de la recherche. Madame la ministre, le Président de la République a fait de la recherche une des priorités de son quinquennat. La crise économique et financière a renforcé le caractère impérieux d’un effort national en sa faveur : c’est pour la France le seul chemin vers la croissance et le succès. Les discussions sur le contenu du futur grand emprunt ont désigné une fois de plus la recherche comme l’une des clés de l’avenir de notre pays. Il y a donc unanimité sur le sujet.

Ce budget concrétise cette prise de conscience et ces engagements, tant par l’augmentation des moyens financiers que par leur application à des réformes de structure mises en œuvre à l’université comme dans nos grands organismes de recherche. Cependant, pour avoir conduit avec mes collègues Claeys et Lasbordes les travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle sur les pôles de compétitivité, j’ai pu mesurer les difficultés persistantes que rencontre notre pays pour transformer les résultats de nos chercheurs en autant de réussites industrielles. De même, pour avoir rencontré les responsables de nos meilleurs organismes de recherche, j’ai pu mesurer leur volonté d’attirer les chercheurs de talent, mais aussi leurs besoins criants de moyens pour motiver et, surtout, retenir ceux-ci.

Nos efforts doivent aller dans ces deux directions : augmentation des moyens financiers et réformes des structures. Cependant, cela ne suffira pas si nous ne prenons pas davantage en compte l’aspect humain de la recherche et, en conséquence, les conditions de la réussite de nos chercheurs.

J’ai rencontré des responsables de recherche ou de laboratoire et j’ai constaté qu’ils ne réclamaient pas davantage d’argent pour eux-mêmes, mais des moyens supplémentaires pour chercher et trouver, et surtout des garanties juridiques et financières pour continuer d’attirer les meilleurs jeunes diplômés dans leurs équipes.

Il faut investir plus encore pour qu’une grande part d’entre eux s’engage dans la voie de la recherche. Il faut les payer davantage et les inciter à poursuivre leurs travaux le plus loin possible, jusqu’à l’aboutissement de ces travaux sur le marché. Je sais qu’il existe un clivage entre recherche fondamentale et débouchés industriels. Mais l’étude sur les pôles de compétitivité nous a montré qu’il fallait absolument réussir à construire un tel maillage. Or cette nécessité se heurte à la question statutaire, qui limite les rémunérations tout en freinant les recrutements, sans suffisamment sécuriser les chercheurs ni récompenser leurs résultats.

Nous ne ferons pas l’économie de ce choix. Il sera le vrai marqueur de notre nouvelle ambition nationale.

Madame la ministre, ma première question portera sur l’attractivité des carrières de la recherche et sur les mesures qui ont été prises pour l’améliorer. Le ministère a créé une nouvelle prime d’excellence pour les chercheurs et les enseignants chercheurs ; 130 chaires d’excellences seront financées. Ce sont de bonnes mesures, qui étaient très attendues par les chercheurs responsables d’organismes de recherche, soucieux de conserver ou d’attirer des scientifiques chevronnés ou de jeunes chercheurs prometteurs. Comment ces mesures sont-elles mises en œuvre aujourd’hui ?

Ces mesures sont néanmoins insuffisantes pour permettre aux organismes de recherche de recruter sur le plan international des chercheurs prometteurs ou de proposer des situations très attractives à de talentueux chercheurs français sollicités par les organismes ou les universités étrangères. Les directeurs des organismes de recherche voient souvent de jeunes chercheurs tout juste primés au sein de leur organisme accepter à l’étranger des postes dont les avantages élevés sont annoncés d’emblée dans l’offre de contrat. De leur côté, pour parvenir à offrir une position attirante, ils doivent réunir des primes en provenance de plusieurs organismes.

Il faut permettre aux organismes de recruter des chercheurs et ingénieurs en CDI pour développer un projet de recherche ou diriger une équipe.

Les directeurs d’organisme auditionnés ont souligné que nos laboratoires manquaient de chercheurs capables de diriger des équipes importantes. Il faut donc essayer d’attirer des chercheurs managers étrangers.

Notre recherche a besoin de cette souplesse de recrutement, car les possibilités actuelles, lorsqu’il s’agit de recrutement par contrat, hors position statutaire, sont limitées dans le temps – trois ans prolongeables deux ans.

Laissons aux organismes la latitude de fixer la rémunération à un niveau suffisant si l’on veut qu’elle soit attractive. Actuellement, les offres sont notoirement inférieures à celles proposées dans d’autres pays concurrents comme le Royaume-Uni, sans même se référer à ce qui se passe aux États-Unis. Les organismes de recherche se disent d’ailleurs prêts à faire face aux dépenses liées à ces contrats exceptionnels sur leurs ressources propres.

Je proposerai un amendement visant à accroître la liberté de recrutement des organismes de recherche.

La réforme des organismes de recherche est en œuvre depuis deux ans. Quels sont les résultats de la nouvelle organisation sur la programmation de la recherche ? Une coordination s’est-elle établie entre les organismes, en fonction des priorités définies par le Gouvernement ? Enfin, une coordination s’est-elle établie avec l’Agence nationale de la recherche (ANR) ?

L’Institut Pasteur n’avait pas vu ses crédits augmenter pendant quatre années. Le Parlement a voté en loi de finances pour 2009 un amendement visant à augmenter ses crédits de 2 millions d’euros, amorçant un rebasage de sa subvention. Or l’exécution des crédits montre précisément un gel de 2 millions d’euros concernant l’Institut.

L’année dernière, deux chercheurs issus de cet institut ont reçu le prix Nobel de médecine. Le ministère doit accroître son soutien à cet organisme prestigieux, qui participe au rayonnement de la France.

L’Institut Pasteur poursuit un important programme de rénovation de bâtiments, financé par le ministère et la région, avec la construction d’une unité entière, qui abritera le futur centre de biologie intégrative des maladies émergentes, lequel doit entrer en service en 2011.

Pour prendre en considération les besoins d’investissement et de fonctionnement de l’Institut, je proposerai un amendement contribuant à la progression de sa dotation, tout en souhaitant que l’effort consenti lui profite réellement et ne soit pas, une fois de plus, annulé par l’effet des gels de crédits.

Ma dernière question portera sur la mobilité entre la recherche et l’entreprise, qui est encore très faible malgré les améliorations apportées par la loi d’orientation : quelle est la position du ministère et comment pourrait-on mettre en place des passerelles efficaces ?

M. Alain Claeys, rapporteur spécial pour la recherche dans les domaines du développement durable. Madame la ministre, je voudrais remercier vos services qui, cette année, ont répondu dans les temps à l’ensemble des questions que je leur avait posées.

Si la progression du budget de l’État est limitée à 1,2 %, les moyens budgétaires consacrés à la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » progressent de 3,74 % en autorisations d’engagement et de 2,95 % en crédits de paiement, à structure courte. Toutefois, le budget de la recherche en faveur du développement durable ne représente qu’un dixième des crédits de la mission – en légère baisse par rapport à 2009 – et moins de 25 % des crédits alloués à la recherche. Les crédits demandés s’élèvent en effet, pour les deux programmes concernés (187 et 190) à 2,6 milliards d’euros en 2010.

Comme l’an passé et malgré un travail suivi, je m’interroge encore sur la réalité du milliard d’euros supplémentaire prévu en faveur de la recherche dans les domaines du développement durable par l’article 22 de la loi de programmation relative au Grenelle de l’environnement. Selon les derniers chiffres en ma possession, 47 % de cette somme, soit 470 millions d’euros, correspondent non pas à des crédits nouveaux, mais à des crédits redéployés. Pouvez-vous m’indiquer précisément l’origine de ces crédits redéployés et les thématiques de recherche qui ont été abandonnées au profit de la recherche dans les domaines du développement durable ?

Bien que je me félicite du succès du crédit d’impôt-recherche et que les PME en soient les principales bénéficiaires d’après les derniers chiffres que vous m’avez transmis pour la période 2004-2007, je souhaiterais savoir quand vos services seront en mesure d’apprécier les effets de la réforme du dispositif intervenue en 2008. Pourriez-vous notamment vous engager à nous transmettre les informations suivantes dès qu’elles seront en votre possession : quel est le gain de la réforme du crédit d’impôt-recherche par tranche d’entreprises ? Quelle est la répartition par secteur économique des entreprises qui déclarent des dépenses de recherche-développement ? Combien a été au total dépensé pour le crédit impôt-recherche depuis la réforme de 2008 ? Quelle est la part des dépenses de recherche-développement consacrées à des recherches dans le domaine du développement durable ? Quelles sont enfin les principales évolutions par rapport à la situation antérieure ?

S’agissant de la phase 2 des pôles de compétitivité, comme l’a rappelé le président Migaud, nous avons, avec mes collègues Jean-Pierre Gorges et Pierre Lasbordes, élaboré au nom de la MEC un rapport que nous avons remis le 23 septembre dernier. Celui-ci comportait quinze propositions pour améliorer l’efficacité de cette politique en faveur de l’innovation. Parmi ces propositions, certaines ont-elles déjà appelé votre attention et envisagez-vous d’y donner suite ? Dans le domaine du développement durable, le Gouvernement a lancé un appel à projets pour des pôles de compétitivité « éco-tech », projets qui ont en principe été rendus en octobre aux préfets de région. Comment les dossiers ont-ils été instruits, quels critères ont été pris en compte, quelles thématiques ont été retenues et quels montants ont été alloués ? La MEC a proposé de réserver la création de nouveaux pôles aux seuls projets non couverts par les pôles actuels et de créer un label « éco-tech » pour les pôles réalisant la moitié de leurs projets dans le domaine des éco-technologies. Que pensez-vous de cette proposition ?

Enfin, le Gouvernement a mis en place un comité stratégique des éco-industries le 10 juillet 2008. Celui-ci devait rendre ses conclusions fin 2008 pour qu’elles soient mises en œuvre en 2009. Il semblerait qu’à ce jour ce comité ne se soit réuni que trois fois. Quel est l’objet exact de ce comité stratégique ? Comment fonctionne-t-il et qu’en attendre ?

M. Olivier Jardé, rapporteur pour avis de la Commission des affaires culturelles pour les politiques de la recherche. Ce budget de la recherche est un bon budget. Mais qu’est-ce donc qu’un bon budget ? C’est pour moi un budget comportant des réformes de structure accompagnées, et c’est bien le cas de celui-ci puisqu’il augmente de plus de 5 %. Pour le centriste que je suis, les dépenses de recherche ne constituent pas des dépenses de fonctionnement, mais d’investissement à haute valeur ajoutée pour l’avenir, particulièrement importantes en période de crise.

L’ensemble des laboratoires scientifiques bénéficieront ainsi de 274 millions d’euros supplémentaires, dont 34 millions pour le CNRS, sur lequel j’ai centré mon rapport. Le CNRS est un très bel organisme, vieux de soixante-dix ans mais plein d’avenir, avec ses 35 000 chercheurs et le cap qui lui a été redonné. Les dix instituts verticaux rendent plus lisible cette magnifique structure même si, en matière de recherche, la transversalité et l’interface prévalent souvent sur la verticalité. Mais il en va là comme de l’IRM qui n’a jamais été mise au point pour la médecine, tout en constituant un formidable outil au service de notre santé. Il faut donc maintenir la structure verticale mise en place et se féliciter des 16 millions d’euros alloués pour accompagner cette restructuration, comme des 18 millions d’euros attribués pour la revalorisation des carrières.

Le crédit d’impôt-recherche est un dispositif de soutien nécessaire, nous en sommes tous d’accord. Il a permis que des laboratoires restent en France. Demeure toutefois le problème des docteurs, lequel, bien au-delà du crédit d’impôt-recherche, touche à l’organisation même du secteur scientifique en France. Quand réussira-t-on enfin à distinguer clairement ce qui relève respectivement des universités scientifiques et des écoles d’ingénieurs, entre lesquelles existe toujours une compétition ? On a incité en 2008 à l’embauche de docteurs, mais on n’y a eu que peu recours. Il faudra tirer cela au clair. Peut-on maintenir en France deux pôles avec, d’un côté, les écoles d’ingénieurs et de l’autre, les universités scientifiques. Pour ma part, je suis favorable à leur rapprochement et à une plus étroite coopération entre elles.

L’Agence nationale de la recherche (ANR) est une agence qui apporte ponctuellement des moyens à des projets précis, ce qui appelle le recrutement de personnels en CDD. Un amendement du Gouvernement vise à permettre l’embauche de personnels en CDI. Cela peut être pertinent dans certains cas. Mais je ne souhaiterais pas que l’on revienne à la situation d’avant 1984 avec des personnels hors statut et des statuts trop hétérogènes. Il ne faut donc y avoir recours qu’avec parcimonie.

S’agissant du préciput, complément de financement de 11 % versé par l’ANR à la tutelle qui héberge un laboratoire auteur de travaux qu’elle finance, on s’aperçoit qu’il sert plus souvent à changer les fenêtres ou le système de chauffage qu’à acheter du matériel ! Il faut s’interroger sur l’opportunité de continuer à verser cette somme à l’hébergeur, le plus souvent une université.

Il faut aussi prendre en compte le problème des laboratoires détenteurs de brevets importants comme l’Institut de chimie du CNRS à Gif-sur-Yvette, qui avait déposé celui du Taxotère, source pour lui d’importantes recettes pendant longtemps. Or, ce médicament va tomber dans le domaine public. La diminution du budget qui s’ensuivra pour l’Institut ne sera compensée ni par le mécénat ni par l’industrie, et l’établissement sera bel et bien confronté à des difficultés de ce fait. Il en va de même pour l’Institut Pasteur avec les tests de dépistage du sida et de l’hépatite B. Il serait tout de même paradoxal qu’un laboratoire ne cherchant pas à valoriser sa recherche ait moins d’incertitudes quant à ses budgets futurs !

Je voudrais insister pour terminer sur la nécessité d’un plus grand nombre d’émissions scientifiques audiovisuelles. Celles-ci jouent un rôle déterminant dans l’orientation de nos jeunes et l’appréciation des familles sur cette orientation. Force est, hélas, de constater qu’il n’y a plus aujourd’hui d’émissions scientifiques à la télévision. (Mme la ministre fait un signe de dénégation). Non, madame la ministre, il n’y en a pratiquement plus, à l’exception de quelques émissions pseudo-scientifiques. Or, avec trois épisodes hebdomadaires d’une série permettant d’appréhender le travail de la police scientifique et les réalités de la médecine légale, on ne compte plus les vocations de médecin légiste ! Puissent des émissions scientifiques de qualité susciter autant de vocations scientifiques dans notre pays !

M. Pierre Lasbordes, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques pour les grands organismes de recherche. Les années se suivent, et heureusement pour le secteur de la recherche, se ressemblent. En effet, les moyens dévolus dans le projet de loi de finances pour 2009 à la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES) avaient augmenté de 1,27 %, hors ANR. Dans le projet de loi de finances pour 2010, l’augmentation est de 1,8 milliard d’euros, dont 804 millions d’euros pour la recherche. Cet effort mérite d’être souligné, d’autant que l’accent est mis sur l’attractivité des carrières et la gestion des ressources humaines, à laquelle je suis très attaché.

Satisfait de cette évolution, je n’aborderai que quelques points.

Tout d’abord, les réserves de précaution. Pour l’INRIA, elles sont de 1,54 million d’euros ; pour l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRA), de 4,2 millions d’euros ; pour le CNES, de 30,6 millions et pour le CNRS, bien sûr beaucoup plus élevées. Si l’on peut comprendre la philosophie d’un tel système, comment expliquer que le taux de réserve diffère pour les EPIC et les EPST ? Dans le cas d’un EPIC, il est de 0,5 % de la masse salariale et de 5 % des autres dépenses ; dans le cas d’un EPST, de 0,25 % de la masse salariale et de 2,5 % des autres dépenses. Dans un souci de clarification, et pour éviter qu’un type d’établissement ne soit pénalisé, je suggère d’appliquer dans les deux cas les taux de 0,25 % et 2,5 %. Si une telle harmonisation n’était pas possible dès cette année, je souhaiterais qu’elle soit étudiée afin de pouvoir être mise en œuvre l’an prochain.

Nul ne conteste le caractère positif du crédit d’impôt-recherche. J’aimerais toutefois, madame la ministre, que vous nous rassuriez car la rumeur court que ce sont les grandes entreprises qui en bénéficieraient, en particulier les banques et les assurances, plutôt que les PME. Qu’en est-il exactement ?

Enfin, quelques remarques sur le CNES et le CEA. Vous savez l’attachement que je porte à la politique spatiale et au CNES, premier contributeur à l’Agence spatiale européenne. Le CNES a besoin de davantage de crédits à la fois pour honorer sa dette et participer activement aux futurs projets de l’Agence européenne. Sa subvention devrait passer de 685 à 770 millions d’euros. Par ailleurs, j’ai appris, presque par hasard, que la loi de finances rectificative pour 2008 avait annulé 37,4 millions d’euros au détriment du CNES, dont 33 millions au titre du seul ministère de la recherche. Je regrette surtout que le CNES ait été ainsi pénalisé, mais aussi que nous n’en ayons pas été préalablement prévenus. Le CEA, pour sa part, s’il a beaucoup souffert ces dernières années, est satisfait de son budget pour 2010.

M. Daniel Paul, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques pour la recherche industrielle. C’est en mars 2000, à Lisbonne, que le Conseil européen a décidé de faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde à l’horizon de dix ans », c’est-à-dire en 2010. Dès mars 2002, le Conseil européen de Barcelone précisait cet objectif, indiquant que 3 % du PIB seraient affectés aux dépenses de recherche-développement, deux tiers de cet effort devant provenir du secteur privé.

Hélas, même reporté à 2012, cet objectif ne sera sans doute pas atteint, du fait essentiellement de l’insuffisance de la recherche privée. De 2000 à 2007, avec une augmentation moyenne de 0,8 % par an, notre pays a connu un des plus faibles taux de croissance de dépense intérieure en matière de recherche-développement. Avec 2,04 % de son PIB consacré à la recherche-développement, la France est loin derrière le Japon, qui pointe à 3,44 %, les États-Unis à 2,68 % et l’Allemagne à 2,54 %. De même, avec 7,6 chercheurs pour mille actifs, notre pays est loin derrière les États-Unis, le Japon et les pays scandinaves, qui en comptent respectivement 10,7, 9,3 et plus de 12 pour mille.

Nul ne doute, dans ces conditions, qu’un effort soit nécessaire et que l’État doive donner une impulsion. Les mesures prises et accentuées, année après année, produisent-elles les effets escomptés ? Hélas, non seulement notre pays ne rattrape pas ses retards sur les pays comparables, mais l’effort des entreprises en matière de recherche-développement y demeure dramatiquement insuffisant, avec seulement 1,3 %, loin de l’objectif de 2 % fixé par le Sommet de Barcelone et qui a justifié les décisions budgétaires relatives à ce secteur, dont la Cour des comptes vient de confirmer que ce sont les grands groupes qui en bénéficient le plus. Vu les sommes en question comme les enjeux de développement, il est indispensable d’évaluer les effets concrets des mesures publiques en matière de recherche-développement. Je le réclame depuis des années.

Jusqu’à présent, on m’a fait valoir les contrôles fiscaux opérés, mais leur nombre – 270 en 2008 – est dérisoire par rapport à celui d’entreprises bénéficiaires. Or, la réforme du crédit d’impôt-recherche en a fait un guichet ouvert qui fonctionne sans aucun effort supplémentaire demandé aux entreprises en contrepartie. Le Gouvernement lui-même, dans un rapport au Parlement sur le sujet, soulignait la nécessité de « renforcer les capacités de suivi et de gestion de la mesure ». Avez-vous appliqué votre propre recommandation et, si oui, quelles sont vos conclusions ? Des éléments préoccupants laissent à penser que, loin d’être corrigées, a fortiori stoppées, les dérives actuelles risquent de perdurer, dans une véritable fuite en avant. Ainsi, pour certains groupes, ces aides constituent « des revenus » – c’est leur propre expression – qui remontent vers les holdings financières, sans entraîner nécessairement d’augmentation de l’effort de recherche-développement. Que comptez-vous faire pour y remédier ? Certains grands groupes intègrent dans leur stratégie une délocalisation de leurs moyens de recherche, y compris avec un pillage de brevets. Que prévoyez-vous pour contrer de telles opérations ? Votre collègue Christian Estrosi, dont j’espérais qu’il serait présent à vos côtés aujourd’hui, a tenu devant la Commission des affaires économiques des propos forts à ce sujet. J’aurais aimé qu’il les tînt de nouveau ici, mais peut-être le ferez-vous à sa place. Si certains ministres font valoir l’attractivité du crédit d’impôt-recherche pour des groupes qui pourraient installer en France leurs structures de recherche-développement, il faut veiller au maintien d’un lien entre la recherche-développement et l’ensemble de la chaîne industrielle. La production industrielle doit aussi se faire dans notre pays. Il faut éviter une recherche-développement « hors sol ». Quelles mesures avez-vous prévu en ce sens ?

L’heure est aussi à l’externalisation vers les laboratoires publics d’une part croissante de la recherche privée, en particulier dans l’industrie pharmaceutique. En clair, l’argent public financera les recherches sur l’efficacité des produits, toujours aléatoire, tandis que le secteur privé empochera seul les bénéfices, tout cela lui permettant de réduire ses efforts de recherche et donc d’augmenter ses profits. Confirmez-vous la création de « laboratoires communs public-privé » entre Sanofi-Aventis et l’INSERM, au moment même où Sanofi vient de consacrer 6 milliards d’euros à sa croissance externe et déclare vouloir réduire ses dépenses de 2 milliards ?

Confirmez-vous que la création des instituts hospitalo-universitaires se fera sur fond d’association de l’hôpital, de la recherche publique et de l’industrie, pour réaliser, en particulier, les essais cliniques que ne veulent plus financer les grands groupes pharmaceutiques qui les jugent trop aléatoires et y voient une menace pour leurs objectifs de rentabilité financière ?

Dans ces conditions, l’argent public ne viserait plus à favoriser la recherche-développement, à développer des coopérations fructueuses entre laboratoires publics et privés, mais à placer la recherche publique au service des entreprises, notamment de leurs stratégies financières.

S’agissant des pôles de compétitivité, je vous rappelle que je demande depuis longtemps qu’on améliore leurs liens avec le développement régional, que les partenaires sociaux participent à leur gestion et que ces pôles incluent un volet économique et social.

Étant donné l’absence d’évaluation satisfaisante des principaux dispositifs de soutien à la recherche en France, l’absence de contreparties en termes d’emploi ou d’effort exigées des entreprises bénéficiant de ces aides, le renoncement de l’État à d’utiles instruments de pilotage de grands projets industriels au profit d’un crédit d’impôt-recherche à guichet ouvert, l’échec du Gouvernement à rééquilibrer réellement l’effort de recherche entre privé et public, j’invite mes collègues à donner un avis défavorable à l’adoption des crédits du programme 192.

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis de la Commission du développement durable pour la recherche dans les domaines du développement durable. Contrairement à notre collègue Olivier Jardé, je ne trouve pas que ce budget soit un bon budget. Insuffisant par ses crédits, ce budget n’est pas non plus à la hauteur des enjeux.

Les crédits du programmes 187 « Gestion des milieux et des ressources », pourtant ô combien d’actualité s’agissant du devenir de notre agriculture et de la préservation de notre environnement, n’augmentent que de 1,89 %, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement. Ceux du programme 190 « Énergie, aménagement et développement durables » augmentent certes de 4,01 % en autorisations d’engagement mais de seulement 1,24 % en crédits de paiement. Dans ces conditions, je donnerai bien entendu un avis défavorable aux crédits de ces deux programmes.

Les indicateurs de performance retenus, notamment pour la gestion des milieux et des ressources, qui privilégient une approche de compétitivité en s’appuyant notamment sur le nombre de publications scientifiques internationales et de brevets, ne donnent pas une idée exacte de la production scientifique des organismes concernés. Il est en effet très important que ceux-ci développent des concepts et des outils en lien avec les acteurs économiques de la société civile dans les territoires, et qu’ils mènent une réflexion scientifique sur les écosystèmes locaux. Or, sur ces deux points, il n’est pas possible de déposer des brevets. Résumer la performance au nombre de publications et de brevets est donc extrêmement réducteur.

Je citerai maintenant plusieurs cas patents d’insuffisance de crédits.

Ainsi l’IFREMER, qui travaille sur le test de la souris pour les huîtres du bassin d’Arcachon, a pris des engagements, dont je doute fortement qu’il puisse les tenir au vu des crédits qui lui ont été accordés. Plus de moyens financiers et humains lui seraient indispensables.

Une autre recherche serait urgente – d’ailleurs peut-être déjà engagée, le ministère de l’agriculture ayant appelé l’attention sur la question – afin de concevoir des bateaux plus économes en carburant. Cela irait bien entendu dans le sens du Grenelle de l’environnement mais contribuerait également à améliorer le revenu de nos marins-pêcheurs, dont 50 % des recettes sont aujourd’hui absorbés par le coût du carburant.

De même, vu les fortes exigences de la société civile dans certains domaines de recherche, des efforts sont indispensables en matière d’information, de communication et de transparence, qui exigent eux aussi des moyens. Nos concitoyens sont extrêmement attentifs par exemple à tout ce qui touche aux biotechnologies : la meilleure information et la plus grande transparence sont nécessaires à ce sujet. L’INRA fait d’ailleurs beaucoup d’efforts, pas toujours payés de retour, comme on l’a vu avec ce qui s’est passé en Alsace.

L’IFREMER aussi gagnerait à mieux communiquer avec les ostréiculteurs et les pêcheurs. Les différends qui existent entre scientifiques et professionnels pourraient pour l’essentiel sinon se résoudre, du moins se réduire notablement, grâce à davantage de concertation. Une structure regroupant les différents acteurs devrait notamment être mise en place, où chacun pourrait être régulièrement informé des problèmes qui se posent. Le plus souvent, les différends naissent d’un manque de transparence et d’information auprès des professionnels.

Enfin, j’évoquerai l’incident récent de Cadarache. Là encore, la transparence a fait défaut. Pour satisfaire cette forte exigence sociale, il faut non seulement des moyens financiers, mais aussi une détermination sans faille à œuvrer en ce sens.

M. le président Didier Migaud. Je donne la parole à notre collègue Daniel Garrigue qui avait formulé trois observations retenues par la Commission des finances.

M. Daniel Garrigue. J’ignore si cette procédure, jusqu’ici utilisée par la Commission des finances, est encore d’actualité…

Ma première observation porte sur la nécessité d’une plus large diffusion de la culture scientifique. La Mission de la culture scientifique qui existait jusqu’à il y a peu au sein du ministère de la recherche a disparu, mais il est vrai qu’a été créé depuis lors un nouveau pôle constitué de la Cité des sciences et du Palais de la découverte, présidé par Mme Claudie Haigneré, l’un de vos prédécesseurs, madame la ministre. Ce pôle pourrait en effet piloter une politique de diffusion de la culture scientifique, qui devrait être mise en œuvre non seulement sur le plan national, mais aussi sur le plan territorial, en direction notamment des jeunes. Il conviendrait également que cette politique soit plus lisible sur le plan budgétaire en faisant par exemple l’objet d’une ligne-programme dans le cadre de la LOLF : à l’heure actuelle, les crédits sont éparpillés entre un grand nombre de ministères.

Ma deuxième observation a trait à la politique européenne de la recherche. Il faut, notamment dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, améliorer la gouvernance et la coordination des politiques nationales et de la politique européenne de la recherche, aujourd’hui très intriquées. Cette coordination est aujourd’hui particulièrement défaillante. Il faudrait aussi développer des programmes conjoints entre États-membres. S’il est un domaine où il pourrait y avoir un ministère franco-allemand, projet dont on parle, c’est bien celui de la recherche. La coopération scientifique internationale vise toujours à l’excellence. Si les États européens avancent en ordre dispersé, il existe un risque certain de déperdition, alors qu’ils ont tout à gagner à une coopération plus étroite. Il faudrait enfin mieux articuler les outils européens et nationaux : ainsi serait-il judicieux que le Conseil européen de la recherche et l’Agence nationale de la recherche harmonisent leurs conditions et leurs domaines d’intervention.

Ma troisième observation consiste à suggérer une révision générale des politiques publiques de financement de l’innovation. Aujourd'hui, les outils sont multiples : les pôles de compétitivité, OSÉO, le crédit d’impôt-recherche, notamment. D’autres actions pourraient être engagées, pour mieux mobiliser les sommes collectées par l’assurance-vie en faveur des jeunes entreprises et des PME innovantes, et mettre l’accent sur la dimension européenne avec la Banque européenne d’investissement. Peut-être la Commission des finances pourrait-elle se charger de remettre à plat l’ensemble des dispositifs et d’étudier comment agir plus efficacement au service des entreprises, surtout des petites, qui concourent à l’innovation.

M. Claude Birraux. Quelle satisfaction, pour le groupe UMP, de constater, une fois de plus, l’augmentation des crédits – 804 millions de crédits budgétaires et au titre du crédit d’impôt-recherche ! De voir l’accent mis sur les laboratoires pour mieux valoriser l’excellence, sur les personnels avec la création de 130 chaires mixtes université-organismes, dont les titulaires auront les moyens de se consacrer entièrement à leur projet puisqu’ils recevront entre 6 000 euros et 15 000 euros ! De même, les crédits destinés à renforcer l’attractivité des carrières augmenteront pour atteindre 49,3 millions d’euros. La réforme du crédit d’impôt recherche permet de stabiliser l’effort de recherche des entreprises, et c’est d’autant plus important que nous sommes en période de crise. Nous nous réjouissons enfin de l’augmentation des moyens des organismes de recherche, de 2,5 % en moyenne.

Comment aller plus vite et plus fort en faveur du logement étudiant ?

Même si la dotation de l’Institut Pasteur augmente fortement cette année, la dotation de base reste insuffisante. Comment lui assurer des ressources stables et suffisantes ?

Enfin, depuis 2006, les gouvernements successifs ont soutenu continûment la recherche tant par des crédits que par des organismes nouveaux. Le Pacte pour la recherche, la loi de programme pour la recherche, la loi relative aux libertés et aux responsabilités des universités, les pôles de compétitivité, les réseaux thématiques de recherche avancée, la stratégie nationale de recherche et d’innovation ont véritablement structuré la recherche et permis son décloisonnement, réclamé depuis si longtemps. Olivier Jardé a cité l’exemple du CNRS, qui s’est décloisonné en s’organisant en instituts et en collaborant avec d’autres institutions – en particulier dans le cadre de l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé, ou de l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie à laquelle participent également l’Institut français du pétrole et le CEA –, qui fédèrent autour d’elles des tas d’autres organismes de recherche. Cette politique crée une dynamique qui renforcera notre force de frappe et améliorera la visibilité.

Toutes les actions que vous avez conduites, madame la ministre, pour mettre en ordre les structures administratives me confortent dans l’idée que j’ai été entendu : le mandataire unique dans les unités mixtes de recherche, la nouvelle structure pour le dépôt des brevets, l’émergence de deux structures qui sont aujourd'hui complètement insérées dans le paysage de la recherche. Il s’agit, d’une part, de l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui porte 35 % de projets « blancs » et 50 % l’année prochaine. Selon sa directrice, que l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques a rencontrée il y a quelques semaines, grâce aux projets de l’ANR, les sciences sociales ont vu leurs moyens augmenter de 35 %. Contrairement à ce que toutes les Cassandre ont prophétisé, l’ANR soutient et la recherche fondamentale, et les sciences sociales. D’autre part, l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) a permis une unification de la méthodologie dans un esprit de dialogue constructif qui permet aux structures de progresser.

Voilà les acquis de notre majorité qui, sans relâche depuis 2006, a consacré toute son énergie à la recherche.

Le groupe UMP émet donc un avis favorable à l’adoption de ce budget.

M. Jean-Yves Le Déaut. Il y a au moins un point sur lequel je suis d’accord avec Claude Birraux et avec Mme la ministre : donner la priorité à la recherche. Il y a huit jours, Michel Rocard et Alain Juppé nous ont dit qu’il fallait consacrer le grand emprunt – qu’ils qualifiaient de « petit » puisqu’ils l’estimaient entre 20 et 40 milliards d’euros – uniquement à la recherche-développement parce que la France n’est pas au niveau de compétitivité des autres pays de l’OCDE. Il faut donc relativiser les efforts budgétaires.

Tout d’abord, j’ai du mal à comprendre votre budget, madame la ministre, car il mélange crédits budgétaires et crédits non budgétaires. Les 800 millions qui iront à la recherche, tels que les annonce Claude Birraux, recouvrent 530 millions au titre du crédit d’impôt-recherche et 274 millions de crédits budgétaires. Et, sur les crédits budgétaires, 206 millions iront aux organismes de recherche et 68 millions au secteur privé. Les 49 millions qui seront consacrés à la revalorisation des carrières des personnels sont en décalage par rapport aux 530 millions du crédit d’impôt, dont on ignore ce qu’il donne. L’évaluation qui a été demandée ne dit pas à qui il va. Tant qu’on ne le saura pas, nous ne ferons pas notre travail de parlementaires. Je souhaite, monsieur le président de la Commission des finances, pouvoir en discuter l’année prochaine.

Par ailleurs, en mélangeant les crédits d’impôt, les crédits budgétaires, des dotations de l’État et des emprunts, les autorisations d’engagement et les crédits de paiement, le tout provenant de plusieurs ministères, vous pouvez afficher un bon budget. Mais nous avons notre expérience de parlementaires. L’année dernière, vous annonciez une hausse de 4,6 % du budget de la recherche – nous de 1,1 % – et vous ne vouliez pas en démordre. Eh bien, regardez les consommations : nous sommes bien à 1,1 %, mais comme ces chiffres servent de base à vos projections, ils vous permettent de présenter une fois encore des crédits en augmentation. Il ne faut pas faire cela ! Nous devons pouvoir comparer ce qui est comparable !

Quand pensez-vous que nous consacrerons 3 % de notre PIB à l’effort de R&D ? Jacques Chirac prévoyait 2010. Je ne le pense pas.

À quand le bilan du crédit d’impôt-recherche ? C’est une demande très forte de notre groupe.

Comme Alain Claeys, je m’interroge sur la réalité du milliard d’euros supplémentaire affecté au développement durable. Aujourd'hui, le compte n’y est pas. La preuve en est que beaucoup des mesures préconisées par Alain Juppé et Michel Rocard s’y rapportent et qu’on n’a toujours pas le démonstrateur de biomasse de deuxième génération alors qu’il était annoncé il y a trois ans. Il n’y a toujours pas de pôle de l’eau aujourd'hui alors qu’il s’agit d’un enjeu considérable. J’espère que, dans les prochains pôles de compétitivité, il y en aura un.

M. Jean-Jacques Gaultier. Moi aussi.

M. Jean-Yves Le Déaut. Donner 30 millions à OSÉO est plutôt une bonne mesure, mais pourquoi cet établissement public ne travaille-t-il pas avec les régions qui aident les PME voulant investir dans la R&D ?

Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que l’articulation de la recherche entre les universités et les grands organismes est convenable ? Que dire de l’articulation avec la recherche européenne ?

Enfin, soutenir l’efficience, ce qui n’est pas contestable, ne conduit-il pas à recentraliser la recherche ? Les chiffres font état de 2 milliards au profit de la région parisienne contre 3 milliards seulement pour tous les autres pôles français. L’équilibre n’est pas satisfaisant.

Mme Marie-Hélène Amiable. Madame la ministre, vous annoncez des crédits en hausse et un effort supplémentaire de 1,8 milliard d’euros. Vous déclarez aussi que la recherche constitue la première priorité budgétaire pour la troisième année consécutive. Le projet annuel de performance de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour l’année 2010 est pourtant plus sobre. À structures constantes, les moyens de la mission s’élèvent à 25 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 24 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une progression respectivement de 3,67 % et de 2,88 %.

Le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie, la nouvelle structure de consultation que vous avez installée en octobre 2008, semble également moins enthousiaste dans l’avis qu’il vient de rendre sur le projet du budget : « Depuis 2002, où le ratio dépenses intérieures de recherche-développement/PIB était de 2,24 %, l’effort de recherche chute régulièrement. Avec un rapport de 2,04 % en 2007 et de 2,02 % en 2008, la France se situe au quatorzième rang mondial. Le taux de croissance de la dépense intérieure de recherche-développement française est ainsi le plus bas des pays de l’OCDE, le seul qui ait diminué depuis 1995 significativement en dessous de la moyenne de l’OCDE, qui s’établit à 2,29 %. Cette situation reste préoccupante. » Je continue : « Il convient de souligner l’accroissement d’année en année des annulations de crédit, entre le budget primitif du début d’année et le budget réalisé en fin d’année. »

En d’autres termes, les promesses ne sont pas tenues.

En outre, sur les 1,8 milliard d’euros annoncés, seulement 650 millions de plus sont prévus pour les établissements et les dispositifs de recherche et d’enseignement supérieur publics car 565 millions correspondent en réalité à des aides fiscales et 421 millions à des partenariats public-privé.

Les aides fiscales correspondent notamment au crédit d’impôt-recherche, c'est-à-dire à des réductions d’impôt égales à 30 % des dépenses de recherche dans la limite de 100 millions d’euros. Le crédit d’impôt-recherche engage des sommes considérables : 2 milliards d’euros en 2009. Surtout, l’industrie n’est pas la principale bénéficiaire du crédit d’impôt-recherche. Ce sont les services qui, avec 1 174 millions d’euros en 2007, absorbent près des deux tiers de la somme, en particulier les entreprises de services bancaires et d’assurance qui sont, avec 312 millions d’euros, les plus gros bénéficiaires. Ces éléments proviennent du rapport d’information du 2 juillet dernier sur l’application des mesures fiscales de Gilles Carrez. Il ajoute qu’à plus de 80 % ce sont les entreprises de plus de 250 salariés qui en profitent, et non les PME.

D’après ce rapport, l’investissement dans la recherche-développement engendrerait des externalités positives, la recherche contribuant à la création d’un stock de connaissances dont le bénéfice se diffuse à la société dans son ensemble. En 2007, ce sont près de 930 établissements bancaires qui ont obtenu 312 millions de crédit d’impôt-recherche au titre de la recherche sur les produits financiers. La société dans son ensemble a pu apprécier à quel point lesdites banques ont anticipé la crise !

L’année dernière, dans l’hémicycle, vous aviez accepté, madame la ministre, le principe d’une évaluation du crédit d’impôt-recherche. Vous avez pris un décret en août 2009 pour mieux sécuriser le mécanisme. Les entreprises pourront désormais obtenir en trois mois une prise de position formelle sur le caractère scientifique et technique de leurs projets, opposable à l’administration fiscale en cas de contrôle. De plus, l’absence de réponse vaut approbation.

Les parlementaires sont pourtant en droit d’obtenir la ventilation exacte des crédits sur lesquels ils doivent se prononcer. Nous constatons pour notre part que l’effort de recherche de la France est au plus bas – 2,02 % du PIB en 2008. Et si l’on exclut la recherche militaire, les financements budgétaires de la recherche civile ne représentent que 0,53 % du PIB, soit une baisse de 31 % en cinq ans. La recherche publique est en danger. Pour la deuxième année consécutive, la recherche privée recevra davantage que la recherche publique puisque 74 % des nouveaux crédits de la recherche lui sont destinés.

Les organisations syndicales déplorent la mise au pas des thématiques et des équipes, l’asservissement aux intérêts à court terme des grands groupes industriels, la mise en concurrence des individus et des laboratoires, la rationalisation des coûts et des implantations scientifiques, la casse des garanties du statut de fonctionnaire, voire du statut lui-même. D’après vos projets, le CNRS devrait ainsi être soumis à un contrat d’objectifs et de moyens qui entérine sa mise au pas.

Ces mêmes organisations réclament un plan de création de postes dans les organismes de recherche – 5 % des effectifs de titulaires des organismes parents – et dans les universités, et une augmentation immédiate des crédits de base des laboratoires de 25 %, afin de lutter contre l’emploi précaire et de leur permettre de se libérer d’une politique de projets à court terme tels que les financent l’Agence nationale de la recherche ou les programmes européens. Elles demandent aussi une revalorisation des carrières sur la base d’une reconnaissance des qualifications, sans prime individualisée.

Le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie rappelle depuis plusieurs années « qu’une planification pluriannuelle de l’emploi scientifique est indispensable pour donner une visibilité à moyen terme et encourager les jeunes à s’engager dans la voie scientifique ». Et celui-ci d’ajouter : « pour assurer l’attractivité des métiers de la recherche, il est urgent de poursuivre l’effort de revalorisation de l’ensemble des métiers et des carrières. »

Vos services, madame la ministre, prévoient une chute de 30 % des doctorants d’ici à dix ans. Comment lutter contre cette tendance ?

Dans l’attente de vos réponses, madame la ministre, les députés de la Gauche démocratique et républicaine réaffirment à la nécessité de doubler le budget de la recherche publique pendant la législature. En l’état, ils donnent un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission.

Mme Colette Le Moal. Pour les raisons très bien exposées par Olivier Jardé, rapporteur pour avis, le groupe Nouveau Centre est favorable à l’adoption des crédits de la recherche.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je commencerai par le crédit d’impôt-recherche en balayant toutes les questions qui ont été posées.

Ce dispositif est destiné, je vous le rappelle, à éviter les délocalisations des centres de recherche privés, attirés par une parité euro-dollar défavorable à notre pays ou par la qualité du personnel scientifique, en Asie notamment ; et, symétriquement, à ancrer sur le sol français les centres de recherche des groupes internationaux, notamment leurs centres européens. Ils ne s’implantaient plus en France depuis des années. Il s’agit également de stimuler la création d’entreprises innovantes.

Les premiers résultats quantitatifs de la réforme de 2008 montrent que le crédit d’impôt-recherche a été un amortisseur dès le démarrage de la crise, et qu’il servira de tremplin quand elle s’achèvera.

Tout d’abord, la réforme, qui correspond à un triplement du crédit d’impôt-recherche, est plébiscitée par les entreprises. Le nombre d’entreprises déclarantes a très fortement augmenté : plus 24 %. En 2009, le nombre de nouveaux déclarants a même doublé par rapport à 2008, ce qui signifie que le crédit d’impôt-recherche bénéficie à toutes les entreprises, et pas seulement aux plus grandes. La réforme a provoqué une accélération sans précédent de l’utilisation du crédit d’impôt-recherche. C’est un résultat tangible de la simplification du mécanisme. Nous avons supprimé la part liée à l’accroissement de l’effort, ce qui rend l’outil beaucoup plus facile à utiliser pour les petites entreprises qui ont du mal à faire de l’optimisation fiscale.

Deuxième enseignement, la réforme a incité les entreprises à investir en recherche-développement malgré la crise. En effet, l’effort privé de recherche-développement s’est maintenu en 2008 à 15 milliards. C’est vraiment un très bon résultat alors que le dernier trimestre de l’année 2008 a été calamiteux pour les entreprises et que les dépenses de recherche-développement sont très procycliques. Comme elles sont les premières à être amputées en cas de difficultés de trésorerie, elles amplifient l’évolution de la croissance.

Derrière la stabilité globale se cache une très grande diversité de situations. La moitié des entreprises ont augmenté leurs dépenses de recherche-développement grâce au levier que représente le crédit d’impôt–recherche. L’ensemble des entreprises a augmenté son effort de 2 %, à l’exception de deux secteurs qui ont été particulièrement touchés dès 2008 : l’automobile et l’aéronautique, dont les dépenses de recherche ont diminué de 20 %. Parmi les secteurs les plus dynamiques se trouvent les services de recherche-développement, qui ont accru leur effort de 11 %. Il s’agit d’une nébuleuse qui comprend notamment les services en informatique et la sous-traitance pour les grands groupes.

Selon un récent sondage commandé par le ministère, 90 % des entreprises considèrent qu’elles doivent innover, particulièrement dans le contexte économique actuel. Par ailleurs, 61 % d’entre elles trouvent que le crédit d’impôt-recherche les incite à investir dans les nouveaux projets de recherche, en cohérence avec les 58 % mentionnés dans l’étude précédente.

Elles sont 34 % à trouver que le crédit d’impôt-recherche les incite à collaborer davantage avec les laboratoires publics, grâce au doublement de l’avantage fiscal, qui est passé de 30 % à 60 % lorsqu’un investissement de recherche privée est fait dans un laboratoire public. J’en profite pour répondre à l’ensemble des orateurs qui se sont exprimés à ce sujet que c’est une très bonne chose.

Le jour anniversaire de la chute du mur de Berlin, je vous affirme qu’il subsiste d’autres murs, en particulier entre la recherche publique et la recherche privée. Faire de la recherche partenariale est un objectif d’intérêt général. Il s’agit non pas d’assujettir la recherche publique aux intérêts privés, mais de faire travailler ensemble la recherche appliquée et la recherche fondamentale en balayant une dichotomie artificielle et arbitraire.

Le crédit d’impôt-recherche doit avant tout accompagner les entreprises dans leur préparation de l’après-crise. Un bilan complet et une évaluation quantitative seront réalisés en 2010 sur la base des déclarations fiscales au titre de 2009.

De nouveaux projets de partenariat ont été annoncés, et c’est une excellente nouvelle pour notre pays. Je pense notamment à la poursuite du partenariat entre l’Institut national de recherche en informatique et en automatique et Microsoft, qui porte sur de la recherche ultra-fondamentale, contrairement à ce qu’on dit ici ou là. Microsoft investit dans les modèles mathématiques. Je me réjouis également du partenariat entre Sanofi et l’INSERM, de même que de l’engagement pris par une dizaine de laboratoires pharmaceutiques de doubler d’ici à 2012 leur budget de recherche partenariale avec l’Alliance des sciences de la vie et de la santé. L’accord a été signé au palais de l’Élysée. Ce sont des décisions de bon augure pour la recherche publique française.

La représentation nationale ne peut pas déplorer les difficultés qu’éprouve la recherche publique française à valoriser ses découvertes et, en même temps, critiquer les contrats passés avec la recherche privée.

Une dernière chose : le crédit d’impôt-recherche ne bénéficie pas particulièrement au secteur bancaire. Dans son rapport, Gilles Carrez dénonce la part croissante des banques et des assurances parmi les bénéficiaires du CIR. En réalité, cette évolution résulte d’un changement de traitement statistique par l’INSEE qui, en 2008, a revu ses nomenclatures d’activité et fait passer toutes les holdings des grands groupes industriels dans la catégorie « secteur bancaire, assurance, assistance et conseil ». Or les groupes industriels consolident leurs bénéfices au niveau de leur holding, qui bénéficie de ce fait du crédit d’impôt-recherche. Ainsi, si l’on retraite les chiffres de 2007, les holdings récupèrent 29,3 % du CIR et le secteur banques-assurances seulement 2,3 %. Autrement dit, le CIR profite à 60 % aux groupes industriels, à 29 % aux holdings, et à 2,3 % au secteur bancaire. Le reste se concentre sur des activités de services de R&D. J’insiste vraiment sur le fait que c’est le changement de nomenclature qui explique le phénomène mis en évidence dans le rapport. En aucun cas le CIR ne paie les bonus des traders ! Ainsi, Renault est une holding de groupe industriel classée par l’INSEE dans la nomenclature parmi les « banques et services financiers ». Le rapport sur le CIR a circulé puisque la Cour des comptes en fait état.

M. le président Didier Migaud. Le rapporteur général a lui-même apporté cette précision.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. J’en suis d’autant plus ravie que je viens de relire cette interprétation erronée dans Le Monde.

J’en viens aux pôles de compétitivité, pour commencer par saluer le rapport de la MEC qui fait une très belle place à la recherche et veut « renforcer le rôle d’interface des pôles entre la recherche et les entreprises ». Rapprocher la recherche des entreprises est une de mes priorités. Dans les partenariats dont je vous ai déjà parlé, il en est un exceptionnel : le projet CEA-Renault-Nissan-NEC sur les batteries électriques, dont nous espérons qu’il nous placera en position de pointe pour le développement des énergies renouvelables. Ce partenariat a pu se faire grâce à 50 millions de crédit d’impôt-recherche et 25 millions de ressources propres du CEA.

Nous faisons beaucoup de recherche partenariale. Nous menons aussi une politique de simplification, avec la création des alliances ou le mandat de gestion unique des brevets par exemple, et d’incitation avec les instituts Carnot et le doublement du crédit d’impôt-recherche. Cette politique commence à porter ses fruits. Mais nous devons faire plus, en particulier pour renforcer les liens entre les pôles de compétitivité et les pôles de recherche et d’enseignement supérieur.

Vous proposez de créer un fonds dédié à la maturation des projets de recherche innovants – une phase à laquelle nous ne consacrons pour l’instant pas assez d’efforts et qui permet pourtant de faire émerger des projets valorisables sous forme de licences transférées à l’industrie ou de création de start-up. Trois mécanismes existent déjà : les appels à projets Emergence de l’ANR – 5 millions par an – le soutien aux quatorze dispositifs mutualisés de valorisation – 4 millions – et les aides au transfert d’OSÉO – 3 millions. Je pense qu’il faut changer d’échelle : il s’agit d’une dépense d’avenir, avec un fort retour sur investissement de la collectivité. J’ai donc proposé à la commission chargée du grand emprunt de créer ce fonds, à un niveau soit national soit local, au sein même des PRES. J’espère de cette proposition sera retenue.

Vous proposez de formaliser les relations entre les pôles de compétitivité et les PRES et de former un correspondant « propriété industrielle » au sein de chaque pôle de compétitivité. Les travaux que nous menons sur sept sites pilotes nous poussent à rejoindre là encore votre analyse. Je souhaite créer des sociétés d’accélération de transfert de technologie sur les principaux campus universitaires, qui se substitueront aux dispositifs existants pour devenir un guichet unique et professionnel pour les chercheurs et les entreprises. Elles offriront leurs services aux pôles de compétitivité, qui sont déjà associés à l’expérience des sites pilotes et qui participeront à la gouvernance de ces sociétés.

Enfin, vous proposez de formaliser les relations entre les pôles de compétitivité et les PRES pour anticiper les besoins de formation et suivre l’insertion professionnelle des chercheurs au sein des entreprises du pôle. Sur ce point comme sur les autres, je vous rejoins. La formation fait partie des domaines où PRES et pôles de compétitivité doivent collaborer. J’ai demandé à l’inspection générale du ministère d’être particulièrement attentive à cette question dans le bilan des PRES qu’elle doit me remettre en janvier. Si des modifications législatives sont nécessaires, nous vous les proposerons.

Pour ce qui est des pôles de compétitivité « éco-tech », la MEC propose de réserver la création de nouveaux pôles aux projets non couverts par les pôles actuels et de créer un label « éco-tech » pour les pôles existants réalisant 50 % de leurs projets dans le domaine des éco-technologies. Dix-neuf projets de pôles « éco-tech » ont été reçus. Ils sont analysés sur les mêmes critères qu’en 2005. La sélection tiendra bien sûr compte de l’articulation avec les pôles existants. Quant au label « éco-tech », sachant que 30 % des projets du huitième appel du fonds unique interministériel concernaient les éco-technologies et le développement durable, cette proposition mérite d’être étudiée.

Mme Tabarot a évoqué l’évolution des effectifs d’enseignants-chercheurs dans les universités. Le budget de 2009 prévoyait la suppression de 225 postes statutaires. La globalisation des crédits et la bonne gestion due au passage à l’autonomie ont permis en fait de recruter 93 enseignants-chercheurs supplémentaires. Cela s’est fait sans création de postes : il y a dans les universités françaises plusieurs milliers de postes vacants dont les crédits, du fait de leur sous-dotation récurrente, étaient utilisés à d’autres fins. Grâce à l’augmentation dont elles ont bénéficié, elles ont pu les transformer en recrutements.

Quant à la réforme du CNRS, elle est bien engagée. Son décret constitutif a été révisé et un contrat d’objectifs avec l’État pour la période 2009-2013 signé, qui était demandé par l’ensemble de la communauté. Ce contrat n’est pas un outil de pilotage qui profite à l’État mais au contraire la base d’une relation plus saine : c’est l’assurance pour le CNRS d’être plus indépendant et de pouvoir mener une stratégie pluriannuelle, comme il le souhaitait.

Le décret relatif à l’organisation et au fonctionnement du CNRS, publié le 1er novembre, s’appuie sur trois grands axes. Le premier est une réorganisation en dix instituts bien visibles au plan national et international, fondés sur des disciplines fortes et bien structurées. Ils pourront se voir confier des missions nationales et participer à des structures de coordination inter-organismes. Seize millions y sont consacrés pour 2010, qui permettront à ces instituts de mener une stratégie scientifique propre et d’augmenter le financement des laboratoires les mieux évalués.

Le deuxième axe est un partenariat rénové avec les universités, grâce à un rôle accru du CNRS comme agence de moyens en faveur des unités mixtes de recherche hébergées par les universités, ce qui n’enlèvera rien à la tutelle scientifique qu’il exerce sur elles. Enfin, le décret prévoit une évaluation externe et indépendante de tous les organismes de recherche, selon les normes internationales, ce qui du reste simplifiera largement la vie des unités mixtes de recherche puisque cette unique évaluation tous les quatre ans remplacera quatre tutelles scientifiques.

Le contrat d’objectifs 2009-2013 avec l’État, qui a été approuvé par le conseil d’administration du CNRS le 25 juin, est une feuille de route qui engage les deux parties et qui fera l’objet, c’est nouveau, d’indicateurs de suivi. Il garantit le maintien de l’intégrité du CNRS et insiste sur le développement de l’interdisciplinarité. Il prévoit la création d’un dixième institut dans le domaine des sciences et technologies de l’information, qui aura une taille équivalant à celle de l’INRIA et qui permettra au CNRS de s’engager dans une alliance nationale avec tous les organismes concernés.

Le classement de Shanghai montre le retard de nos universités dans le domaine de l’informatique. L’INRIA, qui est une star dans certains domaines, et le CNRS doivent s’allier avec les universités pour y remédier. Nous avons raté le virage des technologies de l’information. Nous devons reprendre la main. Il faut coordonner les pôles d’excellence qui existent dans ce domaine et installer cette dynamique dans le secteur universitaire. Comme l’a bien montré l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé, la création d’alliances ne conduit ni au démantèlement des organismes qu’elles regroupent, ni à la remise en cause du statut de leur personnel, mais à une coordination de stratégies extrêmement valorisante, qui a permis par exemple d’obtenir des réponses de la communauté scientifique sur le virus H1N1 dans des délais records.

Enfin, cette réforme du CNRS s’accompagne de moyens nouveaux très importants – 34 millions hors point fonction publique et pensions.

Mme de La Raudière m’a interrogée sur le lien entre le campus du plateau de Saclay et le Grand Paris. Le projet de loi relatif au Grand Paris va permettre de créer l’établissement public d’aménagement du plateau de Saclay ainsi qu’une autorité de transports propre, étape évidemment indispensable. Une étude préalable à la réalisation de l’opération campus est en train d’être finalisée et un plan d’ensemble doit m’être présenté à la fin du mois. Il faut aller vite. J’attends que la région Île-de-France concrétise son engagement. Par ailleurs, je souhaite que le campus de Saclay soit un véritable lieu de vie et serai vigilante sur sa qualité architecturale, ainsi que sur la discussion qui s’engage sur la préservation des espaces naturels. C’est une condition d’une cohabitation harmonieuse entre la cité scientifique, les habitants et les agriculteurs.

Pour ce qui est de la valorisation des brevets, nous sommes très en retard. Les contrats passés avec les entreprises représentent 4,6 % de la recherche publique, contre 11,8 en Allemagne, et cela malgré le doublement du crédit d’impôt-recherche ou la création des instituts Carnot. La recherche allemande, qui est une référence, s’appuie donc largement sur la recherche partenariale. Quant aux transferts de technologies, les licences concédées à l’industrie représentent 1 % du budget des universités françaises, contre 3 % aux États-Unis, en dépit de la présence de services de valorisation dans toutes les universités françaises.

Ce retard s’explique par plusieurs freins. D’abord, notre système est un véritable mille-feuille. Il décourage les entreprises. Aujourd’hui, 71 % de brevets publics sont déposés en copropriété. C’est ingérable. Ensuite, l’indispensable phase de maturation dont j’ai déjà parlé ne représente que 0,1 % du budget de la recherche académique. C’est le chaînon manquant de notre dispositif. Enfin, les services des valorisation, qui sont trop fragmentés, manquent de professionnalisme : la moitié comptent moins de 3,5 équivalents temps plein.

Je mène depuis plusieurs mois un travail de fond pour simplifier les collaborations entre la recherche publique et les entreprises, avec, par exemple, le mandataire unique pour la gestion des brevets, la création des alliances thématiques au niveau national ou la mutualisation du dispositif de valorisation de l’université. Les grands groupes ont pris acte de ces progrès, comme le montrent les récents accords de partenariat qui ont été signés.

En 2010, je souhaite décliner ce mouvement de la recherche à la valorisation. L’université doit être au cœur du dispositif, en s’appuyant sur des organismes de recherche stratèges, organisés en alliances. Au niveau local, les douze sociétés d’accélération de transferts de technologies, qui vont devenir des guichets uniques et professionnels, travailleront avec les pôles de compétitivité. Nous avons sept sites pilotes. Au niveau national, les filiales de valorisation des organismes de recherche doivent se mettre au service des alliances et se concentrer sur quatre missions : constituer des portefeuilles de brevets par champs disciplinaires, qui valent souvent plus cher que les brevets pris séparément, développer des activités de veille technologique au plan national, offrir des services de négociation de licence aux structures locales et augmenter leur capacité de financement de l’amorçage de start-up. Le grand emprunt pourrait être l’occasion de créer un fonds pour la maturation des projets innovants.

J’en viens au bilan des pôles de recherche et d’enseignement supérieur. Les PRES ont inscrit les établissements d’enseignement supérieur dans une dynamique de rapprochement et ont notamment permis, avec l’opération campus, de redessiner le paysage universitaire français. La répartition des crédits – 2 milliards pour Paris et 3 pour les régions – s’explique par le fait que la région Île-de-France concentre 40 % du total de la recherche. En outre, les opérations U3M et U 2000 ayant porté essentiellement sur les pôles universitaires de proximité, régionaux, ce sont les grandes métropoles régionales et l’Île-de-France qui sont le plus touchées aujourd’hui par la vétusté.

Aujourd’hui, les PRES permettent aux différents acteurs – universités, grandes écoles, organismes de recherche – de mettre en cohérence leurs actions, de mutualiser leurs services et de proposer une offre de recherche et de formation beaucoup plus lisible. Un PRES, aujourd’hui, c’est la délivrance d’un diplôme commun pour une formation assurée par un ou plusieurs membres, c’est une signature unique pour les publications scientifiques, indispensable pour être visible à l’international et progresser dans les classements de Shanghai, et c’est la possibilité de fusionner des établissements : nous avons eu la satisfaction de réconcilier Aix et Marseille, et Nancy et Metz, et nous œuvrons à l’université du grand Nord-Pas-de-Calais et à l’université unique de Montpellier.

Depuis 2006, quinze PRES ont été constitués, dont quatre cette année, qui regroupent quarante-quatre universités, trente-huit établissements, deux instituts nationaux polytechniques et trois grands établissements. Une évaluation sera conduite par l’inspection générale du ministère d’ici à la fin de l’année. Je souhaite aller plus loin dans la structuration de l’enseignement supérieur autour des PRES : nous devons réfléchir à une extension de leurs compétences, à leur politique de recherche, à la mutualisation systématique des activités de valorisation, et à l’optimisation de la gestion du patrimoine et des activités en faveur de la vie étudiante. Il faudra également renforcer leurs liens avec les pôles de compétitivité. Enfin, la structuration des PRES parisiens reste à faire. C’est une des missions, et pas des moindres, que je me fixe d’ici à la fin de l’année.

Jean-Pierre Gorges m’interroge sur le plan « carrières » et la politique valorisant l’excellence dans la recherche. La première priorité du budget de 2010 est la valorisation des personnels. Le chantier des carrières durera trois ans, avec 271 millions cumulés. Il s’articule autour de trois principes : la reconnaissance de l’excellence scientifique et – tout autant – pédagogique, la valorisation de l’engagement professionnel, l’évaluation par les pairs, collégiale et indépendante.

Tous les personnels sont gagnants. Pour ceux qui s’investissent dans l’enseignement, les salaires de recrutement tiennent compte des activités antérieures – ainsi, les salaires des jeunes maîtres de conférences augmentent-ils de 12 à 25 % cette année, ce qui n’est pas si courant. Ils sont désormais recrutés entre 2 347 et 2 861 euros bruts par mois. Toutes les activités sont valorisées –formation continue, enseignement à distance, insertion des diplômés, coopération internationale, notamment – alors que seules les heures passées devant les élèves pouvaient auparavant être rémunérées. Cette avancée considérable était attendue par les syndicats. Enfin, les primes de responsabilité pédagogique iront de 3 500 à 15 000 euros par an au lieu de 500 à 1 500 en moyenne, ce qui les place au même niveau que les primes d’excellence scientifique, n’en déplaise à ceux qui prétendent que nous ne valorisons que les activités de recherche.

Nous encourageons ainsi l’investissement pédagogique des chercheurs. Il est certes nécessaire que certains se consacrent à la recherche à temps plein, mais ils doivent en règle générale enseigner davantage, notamment au plus fort de leur activité. Il faut que nos jeunes soient au contact de ces chercheurs. La prime pédagogique incitative va donc être doublée : 3 870 euros par an pour un service d’enseignement de 64 heures. J’ajoute que la prime d’excellence scientifique sera accordée sous condition d’un tiers-temps d’enseignement. Contrairement à ce que j’ai entendu dire, ce n’est donc pas aux plus mauvais chercheurs que nous demandons d’enseigner !

La nouvelle prime d’excellence scientifique représentera de 3 500 à 15 000 euros par an, pour les chercheurs et enseignants-chercheurs. Elle doit bénéficier à 20 % d’entre eux. Cette prime individuelle peut se coupler avec une prime collective donnée par un organisme à une équipe. Nous faisons confiance aux organismes pour établir de bons critères pour l’attribution de cette prime, à condition de rechercher l’excellence, pas le saupoudrage.

Nous poursuivons aussi la mise en place des chaires d’excellence, qui permettent à des scientifiques prometteurs recrutés conjointement par une université et un organisme de recherche d’effectuer moins d’enseignement pour se consacrer à leur projet de recherche en bénéficiant d’une prime annuelle de 6 000 à 15 000 euros par an. Cent trente de ces chaires sont budgétées, dont soixante-dix sont pourvues.

Enfin, l’Institut universitaire de France représente une décharge d’enseignement pour les meilleurs enseignants. Ses membres doubleront entre 2007 et 2011, avec cent cinquante nouvelles recrues en 2010. Nous leur attribuerons de droit la prime d’excellence scientifique : 6 000 euros par an pour les maîtres de conférences et 10 000 pour les professeurs. Le personnel administratif et technique bénéficiera aussi d’une hausse de ses primes de 20 % d’ici à 2012.

Je suis tout à fait favorable à ce que les établissements publics scientifiques et techniques puissent recruter sous contrat à durée indéterminée. La loi LRU ouvre déjà cette possibilité pour les universités, qui peuvent désormais recruter en CDD ou en CDI pour des postes administratifs et techniques comme d’enseignement et de recherche. C’était indispensable pour le passage à l’autonomie, qui nécessite des compétences que l’université ne possède pas. Nous avons déjà pu mesurer, par exemple à Lyon 1 avec le recrutement de Mondher Toumi, tout le bénéfice de cette disposition qui permet d’attirer les meilleurs talents du monde entier sans la contrainte d’un cadre administratif trop strict. Elle ne doit pas être réservée aux universités. Par souci de cohérence pour l’ensemble de notre système de recherche, il est souhaitable de l’étendre aux organismes de recherche qui le souhaitent, et j’ai déposé un amendement qui répond à votre préoccupation.

La réorganisation de la recherche doit permettre à nos organismes d’être plus stratèges et plus ouverts. C’est pour cela que le CNRS et l’INSERM seront réorganisés en instituts. Parce que ces instituts incarneront des disciplines fortes, ils pourront financer les meilleurs laboratoires et cultiver une véritable pluridisciplinarité. Mais ils devront aussi faire vivre le dialogue avec l’université et le monde économique.

Cette coordination est l’objet des alliances qui unissent désormais l’ensemble des acteurs dans le domaine des sciences de la vie, de l’énergie, et bientôt, je l’espère, des sciences et technologies de l’information ou de la mer. Le but de ces alliances est de coordonner notre effort de recherche pour répondre aux grands défis de notre temps, parce que notre système est trop fragmenté. Ces alliances illustrent la confiance qu’accorde l’État aux acteurs scientifiques : s’ils acceptent de se coordonner, l’État accepte que les programmations issues de ces alliances aient une influence sur celle de l’ANR. Cela répond à une demande de la communauté scientifique. La programmation de l’ANR est ainsi légitimée grâce au décloisonnement et à la coordination de l’ensemble des acteurs de recherche. C’est un système gagnant-gagnant.

Les crédits de l’Institut Pasteur seront intégralement dégelés en 2009, soit 1 385 000 euros. L’Institut a bénéficié de 2 millions de crédits exceptionnels dans le cadre du plan de relance. Le projet de loi de finances pour 2010 lui accorde une augmentation de 3,5 millions, soit 6,7 %. Toutefois, l’Institut, qui vit essentiellement des dons et des contrats passés avec de grands groupes privés, est particulièrement tributaire du contexte économique. Compte tenu donc de la situation actuelle et de tout l’intérêt que nous portons à cet établissement phare, cher à notre cœur, une dotation complémentaire pourrait se justifier. Je regarderai donc avec bienveillance l’amendement que vous souhaitez déposer.

Le Président de la République a décidé d’engager un milliard d’euros supplémentaires d’ici à 2012, monsieur Claeys, pour les recherches sur les énergies renouvelables. L’utilisation de ce milliard se décomposera ainsi : au minimum 257 millions pour un redéploiement des priorités au sein des opérateurs de recherche ; 212 millions pour un effort supplémentaire de l’ANR sur des questions environnementales ; 450 millions pour la création d’un fonds de soutien aux démonstrateurs de recherche dans le domaine des nouvelles technologies de l’énergie, fonds qui sera géré par l’ADEME ; 165 millions, enfin, de crédits supplémentaires pour des actions spécifiques pilotées par des opérateurs de recherche ou pour des appels à propositions de recherche.

D’après les projections des agences de financement des organismes de recherche, le cap du milliard d’euros devrait être largement dépassé en 2012. Le Grenelle ayant porté ses fruits et focalisé l’attention de tous les chercheurs, l’effort engagé devrait en effet dépasser 1,5 milliard d’euros, soit 150 % de l’objectif fixé pour le développement durable sur la période 2008-2012.

Les redéploiements au sein des organismes de recherche ont été effectués à l’initiative de ces établissements. Nous en établirons un bilan pour avoir une vision claire des choix ainsi faits. Ce résultat est le fruit d’une mobilisation exceptionnelle non seulement de l’État et des agences de financement, mais aussi des organismes de recherche et des chercheurs, qui ont compris la nécessité d’accompagner les mutations entamées par le Grenelle de l’environnement.

Au vu de l’ampleur des chantiers qui sont devant nous, l’effort engagé demandera à être soutenu et prolongé dans le cadre du grand emprunt. C’est, en tout cas, ce que j’ai demandé, en proposant un certain nombre de projets.

Vous avez demandé, monsieur Claeys, quel était le gain de la réforme du CIR par tranche d’entreprises. Il n’est pas encore possible de l’évaluer avec précision.

M. Alain Claeys, rapporteur spécial. Ce sera l’objet de notre étude !

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les entreprises de moins de 250 salariés ont reçu 22 % du CIR alors qu’elles ne représentent que 14 % des dépenses de R&D déclarées.

Je ne reviens pas sur l’analyse par secteurs.

Le comité stratégique des éco-industries – COSEI –, installé par les ministres de l’industrie et de l’écologie, a été chargé d’élaborer puis de suivre le plan Ecotech 2012, lancé en décembre 2008, pour faire de la France un pays leader dans les filières Ecotech. Son ambition est de générer 50 milliards d’activité supplémentaire, correspondant à 280 000 nouveaux emplois en 2020. L’évaluation à mi-parcours, en juillet 2009, a permis de constater que plus de la moitié des actions décidées étaient engagées.

En ce qui concerne la recherche, l’ANR a tenu ses engagements avec le nouveau programme Ecotech, qui représente quinze projets. Par ailleurs, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche participe à l’évaluation des futurs pôles de compétitivité Ecotech.

Nous avons fait, cette année, une petite révolution, monsieur Jardé, en faisant passer le doctorat du statut de diplôme à celui d’expérience professionnelle à part entière. C’est tout l’objet du contrat doctoral qui se substitue à l’allocation de recherche. Désormais, toutes les années de recherche effectuée dans le cadre d’une thèse et le grade obtenu à l’issue seront reconnus non seulement dans les secteurs académiques – les années de thèse compteront dans le calcul de l’ancienneté des jeunes chercheurs et des enseignants-chercheurs dans le cadre du chantier carrières, ce qui permettra les progressions de salaire que j’ai indiquées – mais également dans les secteurs administratifs : c’est la raison pour laquelle le ministère a demandé à tous les gestionnaires de corps administratifs de suivre l’exemple du corps des Ponts et chaussées et du corps des Mines, qui organisent désormais leur recrutement après la thèse en tenant compte des années de préparation de celle-ci.

Il reste la valorisation du doctorat dans les secteurs économiques : c’est l’objet du doublement du crédit d’impôt recherche – 60 % de défiscalisation pour les jeunes docteurs pendant cinq ans –, que je suis en train de populariser auprès des entreprises ; de la démarche « Pourquoi se priver des docteurs ? » engagée par l’association Bernard Gregory et le MEDEF ; de l’augmentation des contrats CIFRE de 16 % , et, enfin, du dispositif des doctorants-conseils qui permet aux doctorants d’effectuer des missions de conseil dans les entreprises et les administrations tout en faisant leur thèse en université ou dans un laboratoire de recherche.

Je suis consciente que la montée en puissance des financements de l’Agence nationale de la recherche conduit à une augmentation des contrats à durée déterminée, dont la durée est alignée sur celle des projets financés par l’ANR. Je rappelle, néanmoins, que ces contrats avaient été demandés lors des États Généraux de la recherche pour permettre de stabiliser l’emploi des post-doctorants. Cela étant, ils sont le plus souvent plus favorables que ceux du privé : ils sont en général d’une durée plus longue – pouvant atteindre quatre ou cinq ans – et le taux d’insertion des jeunes chercheurs à l’issue de ces CDD – soit dans un autre CDD, soit dans un emploi statutaire – est, d’après les premières évaluations réalisées par l’Agence, de 95 %, ce qui est une belle performance et prouve que ces contrats sont un bon marchepied pour entrer dans la carrière.

Nous souhaitons intégrer ces CDD. C’est pourquoi nous maintiendrons l’emploi dans les établissements d’enseignement supérieur et de recherche, qui, selon l’engagement pris par le Premier ministre, ne seront touchés par la règle de non-remplacement d’un départ sur deux à la retraite ni en 2010, ni en 2011.

Nous souhaitons, pour donner du temps à nos chercheurs, simplifier la gestion des unités mixtes de recherche grâce à la délégation globale de gestion : l’hébergeur – qui, la plupart du temps, est l’université – assurera la gestion administrative entière des laboratoires, ce qui mettra fin aux trois systèmes d’information régissant les 600 UMR, ces dernières étant soumises à trois tutelles ou plus. Nous devons utiliser les pratiques de gestion les plus favorables pour ces unités mixtes : services facturiers, cartes achats, cartes affaires, délégation de signature aux directeurs de laboratoire. La généralisation de ces bonnes pratiques est un travail à la fois de fourmi et de titan mais on en mesure l’intérêt quand on sait – et je vous demande de répandre cette information – que 25 % des commandes du CNRS sont de moins de 100 euros et que le coût – complet – de traitement d’une commande CNRS est de 80 euros. Nous devons en finir avec la suradministration des laboratoires et passer à un régime de confiance – encadré. Mais cela relève de l’organisation des laboratoires et des établissements publics eux-mêmes Je ne peux que leur préconiser des bonnes pratiques et j’ai donc publié une circulaire pour généraliser celles-ci.

Dès janvier 2010, vingt laboratoires, réunissant en tout 1 000 chercheurs, expérimenteront ce système. Afin de généraliser celui-ci et d’assurer une vraie transparence de la gestion des UMR, nous les accompagnerons par des formations, une modernisation de la gestion et une optimisation du système d’information et des budgets en coût complet.

En 2009, les EPST ont bénéficié, monsieur Lasbordes, d’une mise en réserve allégée : les crédits de fonctionnement des organismes de recherche ont été gelés à hauteur de 2,5 % et leur masse salariale à hauteur de 0,25 %, ce qui est un régime dérogatoire du droit commun. Les EPIC, eux, sont restés dans le droit commun.

Nous sommes actuellement en discussion avec Bercy pour que les EPST bénéficient d’une mise en réserve comparable en 2010 parce que c’est une année primordiale pour la réforme de la recherche. Si la représentation nationale veut nous appuyer pour que le même régime soit appliqué aux EPIC, nous ne sommes évidemment pas défavorables à l’idée.

Les annulations de crédits qui ont frappé le CNES au cours de l’année 2009 ont été compensées par les produits de cessions de Spot Image et par un bonus fiscal. La tenue du contrat s’apprécie sur quatre ans, la fin de celui devant intervenir en 2010, mais, comme nous sommes encore en discussion avec Bercy sur la fin de gestion 2009, je ne puis vous donner aucun élément à ce sujet aujourd’hui.

Les IHU – instituts hospitalo-universitaires –, monsieur Paul, ont deux objectifs : développer l’excellence de la recherche dans nos meilleurs CHU – je vous renvoie à ce sujet à la loi relative à l’hôpital – et favoriser la coopération public-privé, pour couvrir tout le spectre de la recherche, du laboratoire aux innovations thérapeutiques. Je suis au regret de vous dire que tous les rapports parus en France comme à l’étranger montrent que notre système pèche de ne pas avoir des lieux de ce qu’on appelle la recherche translationnelle, c’est-à-dire réunissant recherche publique et recherche privée.

Le Président de la République a proposé la création de cinq IHU en 2010 après appels à projets et décision par un jury international. Nous devons être très sélectifs pour faire émerger les meilleurs instituts. J’attends les recommandations de la mission que j’ai confiée au professeur Marescaux en phase 2 concernant le financement des IHU par le grand emprunt.

M. Christian Estrosi s’est saisi de la question du pillage des brevets par certaines grandes entreprises internationales qui rachètent des PME françaises innovantes pour récupérer leurs brevets, leur savoir-faire et leurs clients avant de fermer le site français en refusant les repreneurs potentiels. Cette question, qui dépasse la simple question du crédit d’impôt recherche, est à l’ordre du jour des États Généraux de l’industrie, qui ont été ouverts le 15 octobre dernier.

Je ferai part de votre intervention à M. Christian Estrosi, monsieur le député, mais sachez que je suis déjà intervenue auprès du Fonds stratégique d’investissement en faveur de PME particulièrement innovantes que mon ministère connaît pour avoir participé à leur création et qui étaient en péril d’être rachetées parce que les « capitaux-risqueurs » voulaient se désengager – ce qui est typiquement le cas au bout de cinq à six ans de développement d’un brevet. Nous travaillons actuellement sur ce sujet. Le FSI répond très favorablement quand nous lui demandons d’investir en capital dans des start-up innovantes. Le Président de la République a, d’ailleurs, indiqué que le FSI aurait une obligation d’investissement dans des petites et moyennes entreprises au cours de l’année qui vient. Il ne reste plus qu’à souhaiter que ces PME soient innovantes.

Nous avons signé, cette année, monsieur Chassaigne, un contrat avec l’IFREMER qui garantit les moyens de cet institut sur le long terme. D’un montant de 2,7 millions d’euros, correspondant à une augmentation des crédits de 1,8 %, ce contrat est en prise avec les attentes de la société et les orientations du Grenelle de l’environnement puisqu’il est prévu de travailler sur les énergies marines, les économies de carburant pour la flotte, la filière ostréicole et la coordination de la recherche sur les sciences de la mer, avec la création, à terme, d’une Alliance des sciences de la mer à laquelle nous voulons confier la gestion de la flotte. Je considère, en effet, que la flotte est une très grande infrastructure de recherche, actuellement très mal gérée, dont le fonctionnement mérite d’être optimisé.

Dans les trois cas que vous avez cités, monsieur Chassaigne – les recherches OGM de l’INRA à Colmar, les expertises sur les huîtres d’Arcachon par l’IFREMER et la question des déchets nucléaires à Cadarache – l’information et la transparence sont devenues cruciales.

À Colmar, on ne peut que regretter qu’une démarche exemplaire du point de vue de la concertation sur le court-noué, qui avait donné lieu à un consensus local exceptionnel et qui correspondait à l’amendement que vous aviez présenté dans le cadre de la loi Grenelle, se voie ruinée par l’action de fanatiques jusqu’au-boutistes qui n’avaient sans doute pas participé à la concertation. Cela ruine complètement l’équilibre qui avait été trouvé dans la loi Grenelle, par lequel nous nous déclarions favorable au renforcement de la précaution à condition que les chercheurs puissent travailler dans la sérénité. La recherche sur les OGM est une question de souveraineté nationale car, sans elle, nous ne pouvons pas connaître l’impact de ces organismes sur l’environnement et sur la santé.

Je regrette également l’agressivité dont ont été victimes les experts de l’IFREMER. Si leur expertise est contestée, il existe des procédures pour le faire valoir. La violence n’est pas de mise dans ce domaine.

Concernant l’incident survenu à Cadarache, le CEA doit, à l’évidence, agir en toute transparence. En tout cas, ce n’est pas une question de budget mais davantage d’approche. Comme vous l’aurez remarqué, j’ai souhaité, dans la stratégie nationale de recherche et d’innovation comme dans les conseils d’administration des organismes, permettre aux associations porteuses d’enjeux de se faire entendre.

La Cité des Sciences et le Grand Palais sont en train de fusionner, chaque établissement gardant cependant sa vocation propre. Cela va devenir le haut lieu de la diffusion de la culture scientifique, monsieur Garrigue. La Fête de la Science, avec les trois prix « le goût des sciences » que nous allons créer, va participer à cette diffusion. Je remettrai samedi les prix « le goût des sciences » au livre de vulgarisation, à l’action de communication et à l’initiative de vulgarisation les plus prometteurs. Il est important que nous travaillions à rapprocher les scientifiques de la société et à ouvrir les portes des laboratoires pour redonner confiance à nos concitoyens dans le progrès.

Une ministre franco-allemande de la recherche est un beau rêve. Cela étant, nous avons créé, sous la présidence française, un outil très précieux, à 100 000 lieues de la bureaucratisation du programme cadre : la programmation conjointe pour Alzheimer. Ce produit purement intergouvernemental, donc purement politique, fonctionne très bien puisqu’il regroupe maintenant 21 projets, sous la direction d’un Français : le professeur Amouyel. C’est une grande satisfaction. Nous devons étendre la programmation conjointe aux domaines de l’énergie, des batteries électriques et du cancer. Cet outil permet de programmer ensemble nos efforts de recherche, avec des appels à projets, de ne pas doublonner les travaux de nos laboratoires et de choisir les meilleurs. C’est essentiel.

Le taux d’admission au Conseil européen de la recherche pour les jeunes étant de 4 % – ce qui est un indice de la qualité des admis –, j’ai souhaité dispenser tous ceux qui étaient sur la liste complémentaire, c’est-à-dire les admissibles non admis, de redéposer un dossier à l’ANR et les faire bénéficier automatiquement des programmes jeunes chercheurs de l’ANR, afin de mettre fin à la « dossiérite » aiguë dont souffre la recherche française.

Je suis très favorable à la révision des politiques publiques en matière d’innovation, mais j’ajouterai à la liste impressionnante que vous avez citée, monsieur le rapporteur, les politiques régionales d’innovation qui doivent, elles aussi, passer par des guichets multiples.

Concernant le logement étudiant, monsieur Birraux, nous voulons aller plus vite et plus fort et, pour ce faire, nous faisons feu de tout bois. Comme vous l’avez remarqué, j’ai « sauté » sur les casernes d’Hervé Morin. Le patrimoine militaire étant, en général, en très bon état, la reconversion des logements est très rapide. Nous explorons également la piste des logements modulaires qui font florès dans les pays nordiques et aux Pays-Bas : cinq résidences modulaires sont en chantier. Les chantiers Bénéteau travaillent avec nous sur du logement modulaire en bois. L’architecte Jean-Michel Wilmotte m’a proposé de construire des résidences flottantes, en cabines de bateau, dans les endroits où il n’y pas de foncier. Il paraît qu’au Pays-Bas, cela marche très bien et que l’ambiance y est très bonne.

J’ai déjà répondu sur l’Institut Pasteur ainsi que sur les alliances. Je vous remercie de souhaiter que se taisent les Cassandres qui ne cessent de prédire l’échec des politiques de réforme du Gouvernement. C’est, là aussi, une belle utopie.

En plus de 29 projets très concrets issus de la stratégie nationale de recherche et d’innovation, j’ai soutenu, devant la commission présidée par M. Alain Juppé et M. Michel Rocard, cinq principes concernant le grand emprunt, monsieur Le Déaut.

J’ai soutenu que la recherche fondamentale était un choix politique que le grand emprunt devait soutenir dès lors que cette recherche est au meilleur niveau d’excellence. Le retour sur investissement prévu par la commission du grand emprunt doit s’apprécier, non pas au sens purement financier du terme – c’est-à-dire sur la capacité des laboratoires à générer des flux financiers leur permettant de rembourser le grand emprunt au bout de cinq ou dix ans –, mais au sens de Stiglitz, c’est-à-dire en tenant compte également des progrès pour la société. Je prends un exemple : une recherche fondamentale dans le domaine des sciences du vivant qui se traduit par un allongement de la durée de la vie a des répercussions financières positives qu’il faudrait être capable de chiffrer.

J’ai également soutenu que les projets financiers devaient s’inscrire, chaque fois que cela était possible, dans un cadre partenarial entre recherche publique et recherche privée, entre sciences humaines et sciences exactes, entre organismes de recherche et universités afin de décloisonner la recherche. Ces projets doivent intégrer la dimension de valorisation du transfert depuis la preuve de concept jusqu’au développement de marché.

J’ai aussi soutenu que le grand emprunt, s’il finance les investissements aux grandes infrastructures de recherche en plateformes de recherche partenariale, doit permettre de couvrir également les frais de fonctionnement. Ces derniers sont souvent oubliés et viennent ensuite grever, au grand désespoir de nos chercheurs, les budgets des organismes de recherche. Ces projets doivent s’intégrer dans le nouveau paysage de la recherche et de l’enseignement supérieur sans créer de nouvelles structures. Je crois avoir été entendue sur ce point.

Je vous ai répondu sur les campus.

Le démonstrateur de biomasse de deuxième génération a été annoncé, il y a trois semaines, par l’ADEME. Nommé Bio-T-Fuel, il sera opérationnel en 2013.

M. Jean-Yves Le Déaut. Ce dont vous parlez est un petit pilote de l’ADEME. Mais le gros démonstrateur de biomasse, de la taille de celui que les Allemands ont fait à Cochem, que l’office parlementaire réclame est, malheureusement, toujours dans les limbes.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le projet industriel de démonstrateur de biomasse de deuxième génération n’est pas mûr.

M. Jean-Yves Le Déaut. Il n’en finit pas de mûrir !

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Mieux vaut qu’il mette du temps à mûrir plutôt que d’être financé à fonds perdus. Les rapports sur la faisabilité de ce projet sont très mitigés. Mais nous continuons à travailler sur le sujet. Nous ne l’abandonnons pas.

M. Claude Birraux. Il faut « chauffer » le boulevard Saint-Germain pour qu’il mûrisse !

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je compte sur la représentation nationale pour porter le message au-delà du boulevard Saint-Germain.

Les annulations de crédits intervenues en 2008, madame Amiable, ont souvent été neutres pour les organismes, notamment pour ceux qui ont bénéficié d’un bonus fiscal et d’une plus-value de produits de cession. Les annulations réelles ont représenté, au total, 0,5 % des subventions des organismes.

Les arbitrages ayant été rendus ce matin, j’ai le bonheur de vous annoncer que, pour 2009, l’enseignement supérieur et la recherche sont très largement exonérés d’annulations.

Les chiffres du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie qui vous ont été donnés, madame Amiable, sont faux : le nombre de doctorants a augmenté de 6 000 entre 2001 et 2009, et le nombre de docteurs de 3 000 depuis 2001. Nous mettons en place un groupe de travail pluraliste avec les syndicats pour travailler sur l’emploi scientifique de façon à ce que des incompréhensions de ce type ne se reproduisent plus.

M. Bernard Gérard. Ma question porte sur les conditions de mise en œuvre du crédit d’impôt recherche. Les dispositions applicables en ce domaine limitent le bénéfice de cette mesure aux entreprises industrielles, commerciales et agricoles soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Certaines associations professionnelles, qui regroupent des dizaines d’industriels travaillant dans une même filière – je pense, par exemple, au textile technique – sont parfois appelées, au-delà de la veille technologique et de la mise en réseau pour des projets techniques ou commerciaux multipartenariaux, à financer elles-mêmes la recherche sur des produits innovants. Or, elles sont exclues du dispositif, ce qui, bien évidemment, les pénalise alors qu’elles pourraient être, selon certaines modalités à définir, des acteurs tout aussi performants et créatifs. Ne serait-il pas possible d’étudier la possibilité d’une extension du champ des bénéficiaires du crédit d’impôt recherche afin de favoriser l’émergence d’un maximum de projets possibles ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Votre demande n’est pas injustifiée, au contraire, mais il n’est pas aisé de la satisfaire car, comme un certain nombre d’entre vous l’ont souligné, il est difficile de tracer une frontière pour éviter les effets d’aubaine. Mais je suis d’accord pour étudier cette question avec mes services afin de voir ce qu’on peut faire.

Mme Marietta Karamanli. Pour utile que soit la rectification que vous avez apportée concernant le CIR dans le secteur bancaire, madame la ministre, elle ne clôt pas le débat. Pour éviter que ne se reproduise un « buzz » de ce genre sur le net et que ne s’expriment des interrogations sur l’affectation du CIR à des dépenses privées portant l’estampille « recherche » sans que leur utilité pour la collectivité soit avérée – certains témoignages de chercheurs du privé laissent dubitatif : projets réalisés et rentabilisés mais passés en CIR pour gonfler la marge bénéficiaire, achats de matériel sans affectation à une activité de recherche, embauches défiscalisées sous couvert de recherche –, pensez-vous pouvoir répondre favorablement à notre demande, que nous présentons chaque année, d’un rapport d’évaluation sur le CIR ?

En l’absence de contrôle effectif, celui-ci apparaît comme générant un effet d’aubaine, certes intéressant pour le monde de l’entreprise, mais pas forcément pour les priorités de la puissance publique en matière de recherche. Il est nécessaire de préciser et de hiérarchiser les secteurs prioritaires en ce domaine et de démontrer l’intérêt de la recherche donnant droit au CIR. Les chercheurs publics passent beaucoup de temps à constituer des dossiers pour justifier du bien-fondé de leurs demandes de subventions. Il ne serait pas anormal que les entreprises y consacrent également un peu de temps afin de prouver à la collectivité la pertinence de leurs demandes d’attribution du CIR.

Pensez-vous pouvoir répondre favorablement à notre demande de rapport d’évaluation ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. La réponse est « oui ». Il est difficile d’évaluer un dispositif avant que soit écoulée une année pleine, mais le rapport sera disponible l’an prochain.

M. Bernard Carayon. La recherche dans le domaine des technologies de l’information et de la communication occupe beaucoup moins de place en Europe qu’aux États-Unis ou au Japon. De même, les crédits publics qui lui sont destinés sont beaucoup plus faibles en France que dans d’autres pays européens et, a fortiori, qu’aux États-Unis ou au Japon.

Cela peut paraître d’autant plus paradoxal que notre pays compte des entreprises, grandes et petites, qui possèdent dans ce domaine une expertise de très haut niveau, certaines étant leaders mondiaux dans leur spécialité, par exemple en cryptographie. Les enjeux sont très importants, tant pour l’État en termes de sécurité de ses infrastructures critiques que pour les entreprises en termes de compétitivité, ou pour les particuliers en termes de protection de l’intimité de la vie privée.

Pourquoi la France accuse-t-elle un tel retard, s’agissant de mutualiser expertises et moyens budgétaires comme de développer, à partir de plates-formes communes, des programmes à la fois publics et privés, ou civils et militaires ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les réponses sont complexes. Tout d’abord, l’excellence de l’école mathématique française, qui est la deuxième au monde, a étouffé le secteur informatique, les mathématiques pures ayant longtemps attiré davantage les talents que les mathématiques appliquées, jugées moins nobles.

Une deuxième réponse est que l’informatique est le parent pauvre de nos universités, les meilleurs résultats de recherche dans ce domaine étant souvent obtenus dans les grandes écoles d’ingénieurs. Du reste, alors qu’une dizaine d’universités françaises figurent dans les 100 premières places du classement de Shanghai pour les mathématiques, aucune n’y est citée pour l’informatique.

Nous avons corrigé le tir avec la création de l’INRIA, auquel de nouveaux moyens ont été donnés. Les engagements du contrat pluriannuel conclu avec cet institut ont été tenus, ce qui représente cette année une progression de 5 %. L’an dernier, 130 emplois ont été créés, malgré un contexte de suppressions de postes. Selon le rapport d’évaluation qui lui est consacré, l’INRIA est « star » dans certains domaines de recherche, mais ne devrait pas recruter davantage : mieux vaudrait pour lui se focaliser sur ses domaines d’excellence et tisser des liens avec l’université – ce qui est précisément l’objectif de l’alliance que nous allons établir entre cet institut, le CNRS et les universités. Les réticences du CNRS face à la création d’un dixième institut dédié à l’informatique s’expliquaient sans doute par la crainte d’un éventuel démembrement – crainte infondée car, comme on l’a vu dans le domaine des sciences du vivant, les alliances n’affectent ni le statut du personnel, ni la structure des organismes concernés, mais sont seulement destinées à permettre l’indispensable coordination de la réflexion stratégique en matière de recherche et de formation. Les excellents chercheurs du CNRS et de l’INRIA, les universités – qui, elles, souffrent de lacunes – et les grandes écoles doivent s’unir pour définir une stratégie dans ce domaine des technologies de l’information.

Les formations font défaut dans certains de ces domaines et de nombreux jeunes Français vont apprendre aux États-Unis à développer des logiciels sur certains supports. L’alliance devra donc formuler des propositions en matière de programmation Internet et de formation. Je tiens toutefois à préciser que nous avons eu l’immense satisfaction de voir décerner en 2008 le prix Turing – l’équivalent du prix Nobel pour les technologies de l’information – à Joseph Sifakis, chercheur d’un pôle d’exception développé autour de l’INPG et de l’université Joseph-Fourier de Grenoble.

Les pôles de compétitivité doivent travailler en lien avec les universités dans ces domaines. La question est donc tout à fait pertinente. Nous devons nous battre pour réaliser cette alliance en informatique.

Mme Geneviève Fioraso. J’évoquerai le programme 190, consacré à la recherche dans le domaine du développement durable et de l’énergie. Tout en me félicitant que les technologies vertes fassent l'objet d'une attention particulière, je m'interroge tout d'abord sur l'absence, dans le budget, de mesures destinées à aider des filières industrielles qui perdent aujourd'hui des emplois, comme la chimie et la papeterie, dans leur mutation vers les éco-technologies et la chimie propre, alors que les expertises sont voisines et qu’un tel accompagnement serait facile. Pensez-vous prendre des initiatives en ce sens ? Les pôles de compétitivité ou les programmes partenariaux pourraient être utilement mis à profit à cet effet.

Par ailleurs, les programmes de recherche envisagés dans ces secteurs présentent une trop grande dispersion thématique – trente pour le Grenelle I et une vingtaine préconisés par Mme Jouanno. Avons-nous les moyens de cette abondance et ne vaudrait-il pas mieux nous concentrer sur quelques thématiques vraiment stratégiques, susceptibles de donner naissance à une filière industrielle avec des emplois à la clé et une compétitivité internationale qui s'appuierait sur des compétences distinctives identifiées ? Je pense notamment aux nanotechnologies, au solaire photovoltaïque de seconde génération, à la biomasse, aux véhicules propres, à l'aéronautique sobre et aux réseaux intelligents. En nous concentrant ainsi sur un peu moins d'une dizaine de technologies réellement solides, nous pourrions éviter le saupoudrage.

Je partage les interrogations d'Alain Claeys sur le milliard d’euros qui est devenu 1,5 milliard dans la bouche du Président de la République. On ne sait en outre si ce milliard fantôme sera ou non intégré dans le grand emprunt.

La faible valorisation de notre recherche a déjà été évoquée dans le rapport que Claude Birraux et moi-même avons rédigé pour l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. À cet égard, il semblerait utile de développer les fonds démonstrateurs de l’ADEME, qui sont une bonne étape vers l'industrialisation, mais pas une industrialisation proprement dite. De tels fonds seraient particulièrement bienvenus s’agissant par exemple de la biomasse ou du véhicule propre.

Je me réjouis que vous ayez évoqué le FSI, dont je ne pensais pas parler. En effet, le premier FSI était tout à fait opaque et ses critères d'attribution n'étaient pas connus. Censé favoriser les « gazelles » – ces PMI et PME innovantes de taille moyenne que nous ne savons pas bien développer en France, à la différence de l'Allemagne, où elles sont soutenues par les instituts Fraunhofer –, il ne consacrait à ces entreprises que 5 % des montants investis en 2009. La marge de progression est donc importante.

Je conclurai en évoquant l'inquiétude que suscitent les efforts annoncés au titre du Grand Paris, qui risquent de siphonner les ressources des autres territoires. Il serait préférable de répartir les moyens sur l’ensemble du pays, avec des têtes de réseaux qui entraîneraient l'ensemble des territoires. Le travail en réseau devrait en effet faire l'objet d'une plus grande attention.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. La région Rhône-Alpes ne peut pas se plaindre du traitement qu'elle a reçu dans le cadre du plan Campus, qui l’a dotée de deux campus. Ce plan était destiné à valoriser l'excellence : quand on est bon, on reçoit des crédits.

Saclay représente 15 % de l'ensemble de la recherche française – et non pas seulement francilienne – et cette proportion est encore destinée à augmenter avec les nouveaux arrivants. Ce pôle exceptionnel, d’importance mondiale, doit donc être considéré comme « hors sol » lorsqu’on évalue la répartition des ressources. Et notre souci n’était pas l'aménagement du territoire, mais bien la qualité de la recherche, ce qui explique d’ailleurs que Lyon et Grenoble aient été tous les deux sélectionnés.

Pour ce qui concerne l’ADEME, un budget de 450 millions d'euros n'est pas négligeable, surtout en partant de rien. Quant au montant de 1,5 milliard d'euros, j'ai consacré une conférence de presse à la présentation de ces crédits et je pourrai vous faire parvenir les chiffres afin que vous puissiez identifier leur destination.

Vos questions relatives à la chimie seraient très pertinentes dans le cadre des états généraux de l’industrie, qui doivent permettre de vérifier l’aide que notre stratégie industrielle apporte à la reconversion. La croissance verte étant une priorité, la chimie est un thème qui a toute sa place dans le débat.

À propos de la dispersion des programmes thématiques de recherche et du saupoudrage des moyens, je rappelle que j'ai réorienté les programmes de l’ANR en demandant qu’on y ménage 50 % de « blanc », afin de permettre à la créativité de s’exprimer. De fait, j’ignore pour ma part quelles seront les technologies du futur, notamment dans le secteur énergétique et il me semble préférable de laisser les projets d'excellence se développer. Je ne suis pas non plus favorable au saupoudrage et souhaite plutôt favoriser les bons projets, comme j'ai proposé de le faire dans le cadre du grand emprunt pour un petit nombre de projets énergétiques à gros budget.

M. Jean-Pierre Gorges, rapporteur spécial. L'année 2010 sera marquée par le démarrage de la phase de réalisation des trois satellites CSO MUSIS, très importants pour la future capacité d'observation spatiale. Les crédits seront-ils suffisants, compte tenu des besoins de ce programme, et la France pourra-t-elle tenir ses engagements ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. La négociation du contrat du CNES est en cours et ce contrat doit être signé d'ici à la fin de l'année. Le CNES a formulé des demandes afin de pouvoir financer divers projets au titre du grand emprunt. L'objectif est au moins de tenir nos engagements, voire de proposer deux nouveaux satellites, dont l'un permettrait l'observation des émissions de gaz carbonique et l’autre – Megasat – la couverture à très haut débit de l’ensemble du territoire, qui est une alternative économiquement pertinente au projet de certains ministres qui proposaient de couvrir la France de fibre optique à très haut débit.

M. Daniel Goldberg. Madame la ministre, j'ai trouvé un peu rapides certaines de vos réponses sur le crédit d’impôt recherche. Tout d’abord, la plupart des entreprises bénéficiaires comptent plus de 250 salariés, alors que ce dispositif était destiné à favoriser de petites structures créatrices d'attractivité. En attendant l'évaluation qui doit être rendue dans un an, les 530 millions d'euros supplémentaires inscrits au budget auront été dépensés.

Par ailleurs, la réforme permet aux entreprises de percevoir une aide même si les dépenses de recherche diminuent. Il ne s'agit donc plus d'un effort pour la recherche, mais d'une aide de l'État pour les dépenses en volume. Je souhaiterais connaître votre opinion à cet égard.

Pour ce qui concerne le plan Campus, les 164 millions d'euros budgétés doivent être mis en regard des crédits de 5 milliards d’euros prévus sur cinq ans, sachant que la vente des actions EDF a rapporté 3,2 milliards d’euros. Dans le cas du campus Condorcet, dont vous êtes venue annoncer la création à Aubervilliers, quelle sera la part du financement de l’État sur les 600 millions d’euros qu’il coûtera ?

Quant à Saclay, à la veille de l’examen par la Commission du développement durable du projet du Grand Paris, quel effet attend-on de ce type de dispositif ? Quel pilotage prévoyez-vous en lien avec votre ministère ? La création d’un établissement sui generis n’ajoutera-t-elle pas une couche au mille-feuilles ? La mono-activité dans ce secteur est-elle une bonne chose ?

Vous avez lancé sur ce secteur un plan Campus qui prévoit des opérations d’aménagement sur une zone. Une opération d’intérêt national a été décidée par l’État et mise en place en mars 2009 sur une autre zone et le projet présenté par M. Christian Blanc concerne une troisième zone, beaucoup plus étendue. La cohérence de l’action de l’État sur ce secteur, si important soit-il en termes de recherche et de développement, n’est pas très claire.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le crédit impôt recherche avait trois objectifs, dont le premier était de soutenir les entreprises innovantes – ce que permet la mobilisation anticipée du CIR, dont les entreprises bénéficient même lorsqu’elles ne font pas de bénéfices. Un autre objectif était de prévenir et d’empêcher les délocalisations des laboratoires de recherche des grands groupes. Ne vous y trompez pas : lorsque les grands groupes quittent un territoire, les sous-traitants et les entreprises innovantes le quittent aussi.

Il faut bâtir un écosystème de l'innovation allant du laboratoire au grand groupe, en passant par l'entreprise innovante. On ne peut pas davantage opposer la recherche dans les grands groupes et dans les start-up qu'on ne peut opposer la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Peut-être ne sait-on pas faire grossir les start-up pour en faire de grands groupes ou éviter qu'elles ne soient absorbées par ces derniers, mais s’il n’y a pas de grands groupes dans le rôle de donneurs d'ordres, il n'y aura pas non plus de start-up.

Éviter les délocalisations était un objectif crucial et le péril n’avait rien d’illusoire. Lorsque j'étais députée, ma circonscription comptait trois ou quatre laboratoires qui avaient déjà annoncé leur délocalisation en Chine et qui y ont renoncé grâce au CIR. Des entreprises comme Thales, Rhodia ou Alcatel et toute l’industrie aéronautique ont déclaré que, sans le crédit impôt recherche, elles auraient fermé leurs laboratoires de recherche en France. Évitons d'opposer les grandes entreprises aux petites. En revanche, évitons aussi les effets d'aubaine ou d'optimisation fiscale pour des dépenses qui ne sont pas strictement liées à la recherche. Croyez que nous serons particulièrement vigilants sur ce point.

Pour ce qui concerne ensuite le plan Campus et Aubervilliers, gardez-vous des mauvaises interprétations : les 164 millions d’euros inscrits au budget sont les intérêts des cinq milliards de ressources affectées à notre budget. Tant que les partenariats public-privé ne sont pas signés et que les bâtiments n’ont pas été construits, il n'est pas question de payer les loyers.

L'intérêt du partenariat public-privé réside en effet dans le décalage qu’il permet entre le moment où l'on paie et le moment où l'on finance. Il s’agit en somme d’une autorisation d’engagement plutôt que d'une dépense. C'est tout l'intérêt de ce mécanisme en période de crise, avec des entreprises du bâtiment qui ont envie de construire et sont prêtes à préfinancer.

Je le répète, ces cinq milliards existent bel et bien et le pôle d'Aubervilliers percevra bien une dotation en capital de 450 millions d’euros. Lorsque, après vingt-cinq ans, il aura fini de payer les constructions qu’auront permis de financer ces 450 millions d'euros, il pourra en financer d’autres. Il s'agit là d'un mécanisme fédérateur, qui cimente les communautés scientifiques. J'ajoute que je suis heureuse d'avoir vu l'institut d'urbanisme de l'université Harvard me présenter les plans de son magnifique projet pour Aubervilliers – avec piscine et jardin zen pour la méditation ! –, que vous pourrez voir à la Cité universitaire internationale.

Pour Saclay, nous avons créé une fondation de coopération scientifique qui regroupe tous les acteurs scientifiques et à qui j’ai donné l’argent, comme je l'avais d'ailleurs fait aussi à Aubervilliers, après un arbitrage gouvernemental permettant que les fonds du plan Campus soient attribués non à l’établissement d’aménagement qui sera créé pour l’aménagement du foncier, mais à cette fondation. Je tenais en effet à ce que ces crédits financent des bâtiments universitaires et que le campus, lieu de vie, soit l’embryon de l'opération d’aménagement du plateau de Saclay. Nous avons besoin d'un campus universitaire conçu sur le modèle de ceux de Berkeley, de Stanford ou des plus beaux campus américains. Ce projet ne doit pas se faire au détriment de la nature. Il doit, bien au contraire, créer un nouvel espace naturel sur le plateau de Saclay.

Mme Annick Girardin. Dans ce budget, si on fait abstraction de l’IFREMER, l’effort pour la recherche maritime n’est ni assez visible, ni assez lisible – et cette observation est à la fois une critique et un souhait pour l'avenir. À la différence en effet de la recherche agricole, clairement identifiée sous des programmes spécifiques consacrés par exemple à l’alimentation ou à la sécurité alimentaire, la recherche maritime n'est envisagée que sous l'angle de la gestion des milieux.

J'ai bien entendu certaines de vos réponses, comme votre volonté de cohérence et de performance en la matière ou votre souhait de créer autour de l'IFREMER une alliance pour les sciences de la mer, à laquelle vous entendez confier la gestion de la flotte. Cependant, comme l'a déclaré notamment le PDG de l'IFREMER, cette alliance doit pouvoir assurer une programmation conjointe et être présente sur toutes les zones maritimes de la France. Les meilleurs outils du monde ne remplaceront jamais une véritable volonté de l'État de donner à la France les moyens d'assumer pleinement sa vocation maritime.

Pouvons-nous être plus vigilants quant à la présence de la France dans les missions scientifiques internationales ? Je pense en particulier à une grande mission que viennent de lancer le Canada, le Royaume-Uni et l'Espagne sur Saint-Pierre-et-Miquelon dans le cadre de l'Organisation des pêches de l'Atlantique du Nord-Ouest – l’OPANO – et à laquelle la France, volontairement ou par méconnaissance, ne participe pas. Votre budget pour 2010 donnera-t-il de nouveaux moyens dans ce domaine, compte tenu notamment du Grenelle de la mer et des propos qu'a tenus vendredi le Président de la République sur l'outre-mer et la place que les ministères doivent faire à celui-ci dans la recherche et dans un développement économique tourné vers les nouvelles ressources alimentaires, la santé, les énergies renouvelables et les hydrocarbures ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Madame la députée, vous avez tout à fait raison. Le Grenelle de la mer pourrait être l'occasion de faire, même si l'exercice est difficile, un bilan utile de l'ensemble des recherches consacrées à la mer. Ce sera du reste l’un des objectifs de l'alliance de la mer. Beaucoup de moyens ont toutefois été consacrés récemment à la mer, notamment dans le cadre du plan de relance pour la flotte. Il serait assurément bon de disposer à cet égard d’un bilan consolidé.

M. Bernard Carayon. Madame la ministre, nous sommes encore loin du modèle des universités américaines que vous évoquiez tout à l'heure. Harvard, par exemple, dispose de 34 milliards de dollars de dotation en capital.

Ma question porte cependant sur les pôles de compétitivité, qui rassemblent des acteurs publics et des entreprises aussi bien françaises qu'étrangères, et où l’on travaille parfois sur des questions sensibles, en particulier sur des technologies relevant de la souveraineté nationale. Le périmètre de ces technologies de souveraineté est-il défini dans le cadre des accords régissant les pôles de compétitivité et, si c'est le cas, qui en est le garant ? L'étude de ce périmètre de sécurité doit-elle être confiée à des administrations centrales de l'État, à des agences telles que l’Agence pour le développement de l'information technologique – l’ADIT – ou à des partenaires privés ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cette question devrait plutôt être transmise au ministre de l'industrie.

Pour ce qui concerne la dotation en capital d’Harvard, si nous capitalisions l'ensemble des dotations apportées par l'État aux universités françaises, nous aurions des surprises.

M. le président Didier Migaud. Le débat est clos pour les crédits de la recherche.

II.- EXAMEN DES CRÉDITS

À l’issue de l’audition de Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine pour avis les crédits pour 2010 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » sur le rapport de M. Olivier Jardé (Recherche) et de Mme Françoise Guégot (Enseignement supérieur et vie étudiante).

(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)

Mme la présidente Michèle Tabarot. Nous devons maintenant nous prononcer, en donnant en avis, sur l’adoption des crédits pour 2010 de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

J’ai retenu que nos rapporteurs pour avis donnent un avis favorable.

Mme Françoise Guégot, rapporteure pour avis. Tout à fait !

Conformément aux conclusions des rapporteurs pour avis, la commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2010 de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

ANNEXES

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Centre national de la recherche scientifique (CNRS) – Mme Catherine Bréchignac, présidente, M. Arnold Migus, directeur général, et M. Gilles Boëtsch, président du conseil scientifique.

Ø Syndicat général de l’éducation nationale – Confédération française démocratique du travail (SGEN-CFDT) – Mme Collette Guillopé, secrétaire fédérale, M. Michel Piecuch, secrétaire fédéral, et M. Pierre Girard, secrétaire général du Sgen-Cfdt-recherche-Epst.

Ø Syndicat national des chercheurs scientifiques – Fédération syndicale unitaire (SNCS-FSU) – MM. Patrick Monfort.

Ø Syndicat national des travailleurs de la recherche scientifique – Confédération générale du travail (SNTRS-CGT) – M. Daniel Steinmetz, secrétaire général, et M. Michel Pierre, secrétaire-adjoint.

Ø Sauvons la recherche – Mme Isabelle This-Saint-Jean, présidente et M. Henri Audier.

Ø Les entreprises du médicament (LEEM) – M. Philippe Lamoureux, directeur général, M. Claude Bougé, directeur général-adjoint, Mme Aline Bessis, directrice chargée des affaires publiques, Mme Catherine Lassal, directrice des affaires scientifiques, pharmaceutiques et médicales, Mme Claire Sidenaler, directrice du service « études cliniques-environnement », et M. Pierre-Yves Arnoux, chargé de mission « recherche et développement, biotechnologies ».

Ø Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) – M. André Syrota, président-directeur général, et M. Victor Demaria-Pesce, chargé des relations avec les Parlements français et européen.

Ø Institut national de la recherche agronomique (INRA) – M. Michel Eddi, directeur général délégué.

Ø Institut Pasteur – Mme Alice Dautry, directrice et M. Charles Dauvergne, attaché de direction.

ANNEXE 2 : PROGRAMME DE LA VISITE DES LABORATOIRES

Visite organisée le 13 octobre 2009 par M. Arnold Migus, directeur général du CNRS et Mme Michèle Saumon, secrétaire générale de la délégation régionale Île de France Sud du CNRS.

LPS (Laboratoire de physique des solides) :

M. Marc Gabay (Sous-directeur du LPS – Responsable des Finances)

– 14h00 : Accueil ;

– 14h05-14h25 : Présentation du LPS par M. Marc Gabay (en présence de Mme Odile Stephan, M. Philippe Mendels et M. Dominique Imhoff ;

– 14h30-15h05 : Visite de deux expériences et d’un équipement technique mutualisé :

• Mme Odile Stephan (Axe II Phénomènes physiques aux dimensions réduites) ultrastem ;

• M. Philippe Mendels (Axe I Nouveaux états électroniques de la matière) bobine ;

RMN haut champ – liquéfacteur d’Helium ;

• M. Dominique Imhoff (sous directeur du LPS, responsable des services techniques) les moyens techniques ;

– 15h15-15h45 : Remarques, commentaires et discussion avec M. Marc Gabay, Mme Odile Stephan, M. Philippe Mendels, M. Dominique Imhoff, Mme Françoise Livolant, et Mmes Hélène Bouchiat et Liliane Léger ;

– 15h45 : Fin de la visite.

ICSN (Institut de chimie des substances naturelles) :

M. David Crich (Directeur du laboratoire), et Mme Élisabeth Cerneaz (Sous-directrice)

– 16h00 : Accueil par M. David Crich ;

– 16h15 : Criblage : Mme Joanna Bakala ;

– 16h30 : Détermination de structure et modélisation : MM. Bogdan Iorga et Pascal Retailleau ;

– 16h45 : Chimie Organique et Médicinale : M. Jieping Zhu ;

– 17h00 : Discussion avec des membres du conseil de laboratoire ;

– 17h20 : Discussion avec le Directeur et la Sous-directrice de l’ICSN ;

– 18h00 : Fin de la visite.

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