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N
° 1967

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2009.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 26

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOURCES HUMAINES

POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT

GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Yves DENIAUD

Député

____

SYNTHÈSE 7

INTRODUCTION 9

PREMIÈRE PARTIE : LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2010 11

I.– LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT 11

A.– DES PRODUITS DE CESSIONS QUI DIMINUENT EN RAISON DU RETOURNEMENT DU MARCHÉ IMMOBILIER 11

B.– LES DÉPENSES IMMOBILIÈRES DES MINISTÈRES DOIVENT ÊTRE DE LA RESPONSABILITÉ DE L’ÉTAT PROPRIÉTAIRE 12

C.– LA STRATÉGIE DE PERFORMANCE EST ENCORE PEU AMBITIEUSE 14

D.– L’ARTICLE 28 : UNE MODIFICATION PUREMENT TECHNIQUE DES RÈGLES DU COMPTE SPÉCIAL 17

E.– QUELQUES ASPECTS DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT 18

1.– Le bilan patrimonial de l’État au 31 décembre 2008 et la poursuite de l’évaluation 18

2.– L’extension des loyers budgétaires à l’ensemble des administrations de l’État 20

3.– L’enjeu du nouveau système d’information sur l’immobilier de l’État Chorus RE-FX 22

II.– LE PROGRAMME ENTRETIEN DES BÂTIMENTS DE L’ÉTAT DE LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES 23

A.– LES CRÉDITS DU PROGRAMME MONTENT PROGRESSIVEMENT EN PUISSANCE 23

B.– LA GESTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME EST COMPLEXE 24

C.– STRATÉGIE DE PERFORMANCE : LE DÉBUT DU CHEMIN 26

DEUXIÈME PARTIE : LES CONTRÔLES EFFECTUÉS PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 29

I.– LA LENTE INTÉGRATION DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT 29

A.– LE CENTRE NATIONAL DES œUVRES UNIVERSITAIRES ET SCOLAIRES (CNOUS) ET LE RÉSEAU DES CENTRES RÉGIONAUX DES œUVRES UNIVERSITAIRES ET SCOLAIRES (CROUS) 31

B.– L’INSTITUT NATIONAL DE L’ORIGINE ET DE LA QUALITÉ (INAO) 33

C.– VOIES NAVIGABLES DE FRANCE (VNF) 35

D.– L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS (ONF) 38

II.– L’AMORCE D’UNE GESTION IMMOBILIÈRE AU NIVEAU TERRITORIAL 40

A.– LA NÉCESSITÉ D’UN PILOTAGE DE L’IMMOBILIER DE L’ÉTAT AU NIVEAU DES TERRITOIRES 40

B.– LE CAS D’UNE RÉGION QUI AMORCE SA GESTION IMMOBILIÈRE : LA BASSE NORMANDIE 48

C.– LE CAS D’UNE RÉGION QUI EXPÉRIMENTE DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES LES INSTRUMENTS DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE : LA RÉGION RHÔNE-ALPES 50

III.– DEUX ÉTABLISSEMENT PUBLICS IMMOBILIERS SONT-ILS NÉCESSAIRES AU MINISTÈRE DE LA JUSTICE ? 56

A.– LA TUTELLE DES AGENCES IMMOBILIÈRES DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE GAGNERAIT À ÊTRE RENFORCÉE 57

B.– QUELLE A ÉTÉ L’UTILITÉ DE L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC DU PALAIS DE JUSTICE DE PARIS (EPPJP) PENDANT CINQ ANS ? 61

C.– LE RESPECT DES DÉLAIS ET LA MAÎTRISE DES COÛTS 62

D.– LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE L’AGENCE DE MAÎTRISE D’OUVRAGE DES TRAVAUX DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE (AMOTMJ) ET LES SERVICES DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE GAGNERAIT À ÊTRE PRÉCISÉE 63

E.– L’ACTIVITÉ DE L’AGENCE DE MAÎTRISE D’OUVRAGE DES TRAVAUX DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE (AMOTMJ) EST MULTIFORME 65

F.– LE COÛT DES TRAVAUX SUR LES BÂTIMENTS JUDICIAIRES 68

G.– LA RÉMUNÉRATION DU DIRECTEUR DE L’AMOTMJ/EPPJP A ÉTÉ CONTESTÉE PAR LA COUR DES COMPTES 72

IV.– L’INSTALLATION DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DANS L’ANCIEN IMMEUBLE DE L’IMPRIMERIE NATIONALE 72

V.– LE REGROUPEMENT À LA DÉFENSE DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DE L’ÉNERGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER 74

EXAMEN EN COMMISSION 79

ANNEXE N° 1 : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 93

ANNEXE N° 2 : RÉPONSE FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET EUROPÉENNES AU QUESTIONNAIRE ADRESSÉ PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR L’IMMEUBLE DE LA RUE DE LA CONVENTION À PARIS 95

ANNEXE N° 3 : DÉFINITION DES DIFFÉRENTES SURFACES NORMALISÉES 100

ANNEXE N° 4 : LE PROJET DE REGROUPEMENT DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE À BALARD 103

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 82 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial.

Le présent rapport spécial (n° 1967, annexe n° 26) porte sur le programme Entretien des bâtiments de l’État de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines. Les autres programmes de la mission sont traités dans les rapports spéciaux de MM. Thierry Carcenac (annexe n° 23), Pierre-Alain Muet (annexe n° 24) et Georges Tron (annexe n° 25).

SYNTHÈSE

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État retrace les produits des cessions et les dépenses immobilières ainsi financées.

En 2010 les cessions sont prévues à hauteur de 900 millions d’euros (1 400 millions d’euros en 2009), les dépenses immobilières pour un montant de 870 millions d’euros en crédits de paiement (1 340 millions d’euros en 2009) et la contribution au désendettement de l’État pour 30 millions d’euros (60 millions d’euros en 2009). Le ministère de la Défense prévoit de céder pour 800 millions d’euros la plupart de ses emprises parisiennes, dans la perspective du regroupement de ses services centraux à Balard (Paris 15ème) ; les conditions de ces cessions et de la construction en partenariat public-privé du nouveau site de Balard nécessiteront une attention particulière de la commission des Finances. En raison du retournement du marché, une partie des cessions prévues en 2009 sera reportée en 2010. Les cessions réalisées en 2008 s’étaient élevées à 397 millions d’euros. Si les loyers budgétaires sont maintenant généralisés pour l’ensemble du parc immobilier de l’État, le CAS ne présente toujours pas de tableau de bord de la performance immobilière des ministères.

Créé en 2009, le programme Entretien des bâtiments de l’État de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines constitue l’amorce d’une politique d’entretien prise en charge par le service France Domaine. Ses crédits sont prélevés sur les missions et programmes : 12 % du montant des loyers budgétaires acquittés en 2009, 16 % en 2010 et 20 % en 2011. Ils s’élèveront en 2010 à 169 millions d'euros (77 millions d'euros en 2009). À ces crédits s’ajoutent ceux adoptés dans le Plan de relance de l’économie (sous-action État exemplaire) : 120 millions d’euros en CP en 2010 (120 millions d’euros en CP et 220 millions d’euros en AE en 2009). Il y a lieu de souhaiter une gestion mutualisée de ces crédits au niveau territorial, sans « fléchage » depuis les administrations centrales.

Le Rapporteur spécial rend compte de plusieurs contrôles effectués sur des opérateurs et des services de l’État.

– Les opérateurs de l’État :

À la suite de la commission élargie de l’an dernier, le ministre Éric Woerth a envoyé un courrier à tous les opérateurs de l’État leur demandant de procéder au recensement de leur parc immobilier, sous peine de diminution de leurs subventions et de la part variable de la rémunération de leurs dirigeants. La quasi-totalité des opérateurs a alors effectué le recensement demandé. Il leur incombe maintenant d’établir un schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI), avec en perspective la perception de loyers budgétaires.

Le Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS) ne joue pas le rôle de tête de réseau qui devrait être le sien en matière immobilière. Il n’est informé qu’en copie du recensement des différents centres régionaux (CROUS). Le CROUS principal de France (Versailles) n’a pas répondu au questionnaire dans les délais demandés.

Le parc immobilier de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) présente un ratio moyen de 17,8 m2 par agent. La performance immobilière de ce parc est médiocre avec un ratio de seulement 57 % (ratio de surface utile nette par rapport à la surface totale). Le siège de l’INAO au 51, rue d’Anjou Paris 8e est très coûteux ; en outre 900 m2 y sont consacrés à de l’archivage.

S’agissant de Voies navigables de France (VNF), on constate un enchevêtrement des responsabilités avec le ministère de tutelle, tant en matière de gestion des ressources humaines avec le cas des personnels hébergés dans les maisons éclusières que pour le recensement des concessions portuaires. L’activité d’aménageur promoteur exercée par VNF est très éloignée de la mission qui lui a été confiée.

La gestion immobilière de l’Office national des forêts (ONF) se caractérise par une absence de recensement exhaustif et d’évaluation précise des maisons forestières. Elle gagnerait à être dynamisée, notamment par la définition d’objectifs précis de valorisation.

– Services déconcentrés de l’État

Si l’on constate une bonne volonté des acteurs de terrain dans la gestion des conséquences immobilières de la réforme de l’administration territoriale de l’État, RéATE, les administrations centrales marquent une résistance certaine à se dessaisir de la gestion de leur parc immobilier. La mutualisation des moyens immobiliers pour gérer les conséquences immobilières de la RéATE est encore insuffisante. Force est de constater l’absence de phasage adéquat entre la RéATE et l’établissement des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) déconcentrés. Le positionnement institutionnel des nouveaux responsables de la politique immobilière de l’État (RPIE) est incertain et la réforme du service France Domaine en département et en région reste encore à faire.

– Les deux agences immobilières du ministère de la Justice

L’Agence de maîtrise d’ouvrage des travaux du ministère de la Justice AMOTMJ/APIJ et l’Établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP) ont fait l’objet de trois référés de la Cour des comptes. Celle-ci s’interroge sur l’apport de l’AMOTMJ dans la programmation des travaux pénitentiaires et judiciaires et sur l’utilité de l’EPPJP pendant cinq années d’inactivité. Elle note un partage des rôles mal défini entre ces agences et les services du ministère. Le coût de la réforme de la carte judiciaire est évalué par le ministère à 385 millions d’euros. Ce coût s’ajoute aux 1 268 millions d’euros de travaux déjà programmés pour les autres travaux judiciaires. Le projet annoncé par le Président de la République de construire le nouveau palais de justice de Paris dans le quartier des Batignolles à Paris devrait présenter un coût de plusieurs centaines de millions d’euros.

– Le centre de conférences du ministère des Affaires étrangères

Le ministère des Affaires étrangères continue de porter le projet de construire un centre de conférences « internationales » à Paris, alors qu’il vient de construire un centre de conférences dans l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale, qu’il occupe depuis de début de cette année.

INTRODUCTION

La politique immobilière de l’État fait depuis 2005 l’objet d’une attention particulière de la part de la commission des Finances. Le rapport spécial présenté chaque année à l’automne permet d’assurer le suivi du travail effectué dans le cadre de trois Missions d’évaluation et de contrôle (MEC) déjà consacrées à ce sujet.

Par ailleurs, en vertu du « chaînage vertueux » voulu par la LOLF, le présent rapport fait suite aux observations présentées par le Rapporteur spécial dans les deux rapports présentés en juin dernier, l’un sur le projet de loi de règlement, l’autre sur le bilan de trois années de performance dans le budget de l’État :

– le rapport (n° 1775) sur le projet de loi de règlement pour 2008 présenté le 24 juin 2009 par M. Gilles Carrez, tome II (1) ;

– le rapport d’information (n° 1780) sur trois ans de performance dans le budget de l’État présenté le 24 juin 2009 par MM. Didier Migaud et Gilles Carrez (2).

S’il faut saluer l’action entreprise par le Gouvernement depuis 2005 pour réformer la politique immobilière de l’État, l’ampleur de la tâche restant à accomplir laisse cependant apparaître des marges de progression importantes. Le ministre du Budget, avec le service France Domaine, assume maintenant une grande partie des tâches dévolues à l’État propriétaire : cessions des biens devenus inutiles ; loyers budgétaires ; programmation stratégique par ministère et, tout récemment, par département et région ; amorce d’une politique d’entretien ; recensement du patrimoine des opérateurs…

Force est de constater qu’en raison des pesanteurs accumulées depuis des décennies, les ministères et leurs opérateurs marquent encore de fortes résistances à se voir déposséder de la maîtrise de leur parc immobilier. Le système d’information financière Chorus RE–FX, déployé en avril dernier en remplacement du Tableau général des propriétés de l’État, doit évoluer pour devenir un véritable outil de gestion immobilière. La réforme interne du service France Domaine est encore à parfaire, en particulier pour assurer sa professionnalisation et pour organiser son action dans les départements.

Sur le plan réglementaire, si le décret du 1er décembre 2008, relatif à l'utilisation des immeubles domaniaux par les services de l'État et ses établissements publics, a supprimé le régime de l’affectation aux ministères et à leurs opérateurs, les règles du CAS ne permettent toujours pas une mutualisation du produit des cessions, et donc une maîtrise de l’investissement par l’État propriétaire.

Le présent rapport spécial portera successivement sur :

– le compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État, créé par la loi de finances pour 2006 ;

– le programme Entretien des bâtiments de l’État de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, opérationnel depuis le début de cette année ;

– les contrôles, effectués tout au long de cette année par le Rapporteur spécial, sur l’immobilier des opérateurs de l’État, des agences du ministère de la Justice, des services centraux du ministère des Affaires étrangères, ainsi que sur l’aspect immobilier de la réforme de l’administration territoriale de l’État.

PREMIÈRE PARTIE :

LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2010

I.– LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

En 2010 le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État prévoit des cessions à hauteur de 900 millions d’euros (1 400 millions d’euros en 2009). À partir du produit de ces cessions, sont prévus en crédits de paiement (CP) 870 millions d’euros de dépenses immobilières (1 340 millions d’euros en 2009) et 30 millions d’euros affectés au désendettement de l’État (60 millions d’euros en 2009). En application des règles du CAS (3), le montant de 30 millions d’euros qui est affecté au désendettement résulte du quotient de 15 % appliqué aux 200 millions d’euros de cessions des ministères autres que celui de la Défense. Rappelons qu’en 2008 les cessions s’étaient élevées à 397 millions d’euros.

A.– DES PRODUITS DE CESSIONS QUI DIMINUENT EN RAISON DU RETOURNEMENT DU MARCHÉ IMMOBILIER

En 2010, les cessions sont prévues pour un montant de 500 millions de moins qu’en 2009. Les raisons en sont la baisse du marché immobilier intervenue depuis le milieu de l’année 2008 (après le bouclage du projet de loi de finances) et les opérations immobilières exceptionnelles qui étaient prévues en 2010 pour le ministère de la Défense : cession de la plupart des emprises parisiennes du ministère de la Défense, pour financer la construction d’un « pentagone à la française » à Balard, et conséquences immobilières de la réforme du plan de stationnement des forces.

La prévision, l’an dernier, de 1,4 milliard d’euros de cessions, qui se décomposait en 1 milliard d’euros pour les cessions du ministère de la Défense et 400 millions pour les autres ministères, ne sera d’ailleurs pas réalisée. Le projet annuel de performances indique qu’en 2010 quelque 200 millions d’euros représentent « les cessions réalisées dans le cadre de la poursuite de la rationalisation du parc immobilier de l’État. (…) À ces prévisions s’ajoutera un volume de cessions résultant de la mise en œuvre de la loi de programmation militaire, estimé en 2010 à 700 millions d’euros. Les conséquences immobilières du nouveau plan de stationnement des forces et du regroupement des états-majors à Balard (Paris XVe) avaient été estimées à 1 milliard d’euros en LFI 2009. Une partie des cessions prévues en 2009 sera reportée sur 2010 et plusieurs autres cessions, notamment en province, seront par ailleurs engagées en 2010 ».

Le montant prévu de 900 millions d’euros de cessions en 2010 intègre donc le report des cessions qui n’auront pas pu être réalisées en 2009 et dont l’ampleur n’est pas connue à la date de présentation du présent rapport.

PRODUIT DES CESSIONS

(en millions d’euros)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Montant

90

110

90

107

173

634

798

820

397

1 400

900

Note : exécution jusqu’en 2008, loi de finances initiale pour 2009 et projet de loi de finances pour 2010

Source : projets et rapports annuels de performances

Le Rapporteur spécial rappelle que le montant prévu dans le CAS ne constitue qu’une évaluation et non un objectif. Le ministère du Budget est légitime à moduler le rythme des cessions en fonction de l’état du marché, avec pour objectif de préserver les intérêts patrimoniaux de l’État.

B.– LES DÉPENSES IMMOBILIÈRES DES MINISTÈRES DOIVENT ÊTRE DE LA RESPONSABILITÉ DE L’ÉTAT PROPRIÉTAIRE

Deux circulaires du Premier ministre du 16 janvier 2009, l’une aux ministres, l’autre aux préfets, réorganisent en profondeur la gestion immobilière de l’État. Elles prévoient en particulier la mise en place de comités de politique immobilière (CPI) pour chacun des ministères. Il s’agit de répondre à la critique relative à l’absence de programmation immobilière de la part des services de l’État. La mise en place d’un véritable « État propriétaire » suppose en effet que celui-ci soit au fait des choix immobiliers effectués au profit des différentes administrations occupantes du parc de l’État, que ce soit à partir du produit des cessions (CAS), des crédits du programme Entretien des bâtiments de l’État ou des programmes du budget général.

Ces comités réunissent deux fois par an les services centraux du ministère concerné, ceux du service France Domaine, le contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) concerné et le secrétaire général du comité d’orientation de la politique immobilière de l’État (« COMO »). Le premier cycle de réunions s’est tenu au printemps 2009.

Le graphique présenté en page 42 du projet annuel de performances montre que le CAS dispose de 2,25 milliards d’euros de CP en 2009, y compris ceux ayant fait l’objet de reports de 2008 vers 2009. À ce montant s’ajouteront les 870 millions d’euros de CP qui seront ouverts en 2010 au fur et à mesure de la réalisation des cessions prévues.

Le Rapporteur spécial regrette que les dépenses supportées par le CAS ne fassent pas l’objet d’un retraitement en comptabilité d’analyse des coûts (CAC). Seul un tel retraitement aurait permis in fine de rattacher les dépenses immobilières aux ministères concernées, afin de parfaire les restitutions permettant une évaluation des politiques publiques à coût complet, en application de la LOLF.

● Le regroupement des services du ministère de la Défense à Balard

La loi de finances pour 2009 avait prévu la cession des emprises parisiennes du ministère de la Défense pour un montant d’environ 800 millions d’euros (sur le total d’un milliard d’euros de cessions prévues pour ce ministère). Elle a autorisé la constitution d’une société, filiale commune de la SOVAFIM et de la Caisse des dépôts, permettant le portage de la propriété sur plusieurs années, afin d’effectuer un travail de valorisation des biens immobiliers concernés. À la date de présentation du présent rapport, cette société de portage n’avait toujours pas été constituée.

Le Rapporteur spécial souligne les risques qu’une telle opération devra éviter. Il conviendra de surveiller les prix d’achat par la filiale commune et de revente dans quelques années. Le problème principal résulte du fait que l’estimation des emprises immobilières parisiennes du ministère a été évaluée avant le retournement du marché. Dans l’hypothèse où l’État maintiendrait les cessions pour le montant prévu, de lourdes incertitudes pèseraient sur le débouclage de l’opération : si les prix du marché ne remontent pas suffisamment, il serait légitime que la Caisse des dépôts en supporte la moins-value, dans le cadre des risques inhérents à son activité commerciale ; si le marché se redresse, il faudra que l’État s’assure de bénéficier d’une juste part de la plus-value réalisée sur un patrimoine public.

Le ministère de la Défense prépare le regroupement, à l’horizon 2014, de l’ensemble des états-majors et organismes centraux du ministère sur le site de Balard, situé dans le 15ème arrondissement de Paris. Ce site permettra d’accueillir 10 000 agents répartis sur 320 000 m2 de bureaux. Le projet sera réalisé sur la base d’un contrat de partenariat public-privé (PPP) ; l’investissement initial est évalué à 600 millions d’euros et le coût global annuel se traduira pour le budget du ministère par une charge d’une centaine de millions d’euros environ pendant 30 ans.

Le Rapporteur spécial regrette que le Gouvernement n’ait pas assuré le financement de ce projet par le produit des cessions des emprises parisiennes du ministère. La raison invoquée est l’engagement pris dans la loi de programmation budgétaire d’affecter ce produit dès l’année 2009 au bouclage budgétaire découlant de cette loi. Il y a lieu cependant de s’interroger sur les avantages comparés d’une réalisation sur crédits budgétaires et par PPP. La réponse au questionnaire budgétaire a indiqué que l’équilibre financier du projet a été examiné par la direction du Budget et par la Mission d’appui aux partenariats publics privés (MAPP). Cette dernière a rendu un avis favorable au lancement du projet le 13 février dernier, en estimant que « l’écart du coût global exprimé en valeur actuelle nette en faveur du schéma PPP était "conséquent", après prise en compte des risques (- 5,3 %). Il est à noter que la comparaison entre l’achat sur financement budgétaire et celui apporté par un PPP est malaisée dans la mesure où l’État, dans cette opération achète à l’opérateur des services et non pas seulement la construction des bâtiments. C’est ainsi que la maintenance immobilière et certains services aux bâtiments et à l’occupant feront partie du périmètre du contrat de partenariat. Par ailleurs, il convient de prendre en compte le gain pour l’État que représente la garantie d’une livraison des bâtiments dans des délais contraints, délais qui sont plus difficiles à tenir en situation de maîtrise d’ouvrage publique. »

La réponse au questionnaire budgétaire précise que « les principales prestations de service intégrées dans le contrat (externalisation) sont les suivantes : restauration, gardiennage extérieur, gestion de l’hébergement des militaires sur le site, assistance bureautique, etc. ». Si les contrats de gestion globale (facility management) peuvent constituer une bonne solution, il est pour le moins surprenant que le ministère de la Défense envisage de confier à une société privée le gardiennage extérieur du site

Le Rapporteur spécial souhaite que le service France Domaine, représentant l’État propriétaire, porte réellement le projet de construction du niveau site, en partenariat avec le ministère occupant, afin qu’il soit conforme aux orientations de la nouvelle politique immobilière de l’État (ratios d’occupation, performance énergétique…). Il voit enfin, dans les décisions prises par l’État, un aveu d’impuissance regrettable : pas plus que pour l’opération de relogement des services centraux du ministère des Affaires étrangères, l’État n’est capable de réaliser par lui-même des constructions d’importance. Il conviendrait certainement de revoir les conditions de la maîtrise d’ouvrage publique.

C.– LA STRATÉGIE DE PERFORMANCE EST ENCORE PEU AMBITIEUSE

Le projet annuel de performances publie l’évolution des surfaces de bureaux occupées par l’État entre 2006 et 2008. Si les surfaces ont augmenté de 50 586 m2 en 2006, elles ont diminué de 59 880 m2 en 2007 et de 77 539 m2 en 2008. Les surfaces ont donc diminué de 137 410 m2 ces deux dernières années, comme le montre le tableau suivant.

ÉVOLUTION DES SURFACES DE BUREAUX

(en m2)

Ministère

Année

Différence

Évolution 2006-2008

Affaires étrangères et européennes

2006

- 3 480

+ 10 276

 

2007

+ 13 756

 
 

2008

0

 

Agriculture et pêche

2006

- 473

- 11 151

 

2007

- 9 113

 
 

2008

- 1 565

 

Budget : Économie

2006

- 11 251

- 91 806

 

2007

- 21 906

 
 

2008

- 58 649

 

Culture et communication

2006

- 615

- 8 170

 

2007

- 1 058

 
 

2008

- 6 497

 

Défense

2006

+ 16 668

+ 21 565

 

2007

+ 3 350

 
 

2008

+ 1 547

 

Écologie ; Équipement

2006

+ 19 888

- 29 547

 

2007

- 50 056

 
 

2008

+ 621

 

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

2006

- 9 913

- 28 159

 

2007

- 2 419

 
 

2008

- 15 827

 

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

2006

26 775

+ 22 206

 

2007

- 4 292

 
 

2008

- 277

 

Justice

2006

+ 6 978

+ 20 381

 

2007

+ 8 893

 
 

2008

+ 4 510

 

Santé, jeunesse et sports

2006

+ 4 068

+ 8 687

 

2007

+ 7 041

 
 

2008

- 2 422

 

Services du Premier Ministre

2006

+ 180

- 1 234

 

2007

- 852

 
 

2008

- 562

 

Travail, relations sociales et solidarité

2006

- 631

-6 000

 

2007

- 5 271

 
 

2008

- 98

 

Organismes administratifs indépendants

2006

+ 2 392

+ 6 128

 

2007

+ 2 047

 
 

2008

+ 1 689

 

Totaux

2006

+ 50 586

- 86 824

 

2007

- 59 880

 
 

2008

- 77 530

 

Source : projet annuel de performances

Le Rapporteur spécial se félicite de cette initiative du ministère du Budget, qui fait suite à ses demandes passées, de réduire les surfaces occupées par l’État. Le projet annuel de performances pourrait d’ailleurs utilement transformer ce tableau en indicateur LOLF. Le Rapporteur spécial s’interroge néanmoins sur la notion de « surface de bureau » utilisée dans ce tableau ; en effet les surfaces normalisées sont la surface utile nette (SUN) et la surface hors œuvre nette (SHON). Il aurait été plus significatif d’établir le tableau sur la base de la SUN, sur laquelle repose le calcul du ratio de 12 m2 par agent.

La référence à une « surface de bureau » permet aux ministères de soustraire une part importante des surfaces utilisées (salles de réunion notamment). En outre le suivi des SHON permettrait de juger de la performance immobilière des immeubles ; le ratio SUN/SHON traduit en effet la part de chaque immeuble réellement utile par rapport à la surface totale (y compris circulations, hall d’entrée, locaux d’archives et techniques…).

La définition des différentes surfaces faisant l’objet d’une normalisation, largement utilisées par la profession, est résumée dans un document datant d’août 2008 du cabinet privé CB Richard Ellis. Des extraits de ce document sont présentés en annexe n° 3 du présent rapport.

L’objectif Optimiser le parc immobilier de l’État est mesuré par l’indicateur Pourcentage du nombre d’immeubles vendus par rapport au nombre d’immeubles recensés en fin d’année précédente sur le programme national des cessions de l’année. La prévision 2009 a été réactualisée et passe de 60 % à 40 %, en raison de la chute du marché immobilier. La cible 2011 est également abaissée au taux de 50 % pour les mêmes raisons. L’objectif Améliorer la qualité des évaluations domaniales est mesuré par l’écart moyen constaté après l’opération de cession. La prévision 2009 a été réactualisée de 1,09 % à 1,05 %, pour une prévision 2010 et une cible en 2011 de 1,09 %. Le Rapporteur spécial s’interroge sur l’utilité de guider l’action publique à l’aide d’objectifs et d’indicateurs si dépendants de la conjoncture immobilière.

L’indicateur sur le Rendement moyen d’occupation des locaux sur les opérations ayant fait l’objet d’une demande de remploi est mesuré par le ratio de surface SUN occupée par agent. Il s’agit des seules opérations immobilières financées sur le CAS et d’un montant supérieur à 5 millions d’euros. La cible en 2011 est, bien sûr, établie à 12 m2. La valeur réalisée en 2008 n’est pas renseignée. La prévision 2009 a été réactualisée à la baisse de 12 m2 à 13,1 m2, sans qu’aucune explication n’ait été donnée. On aurait pourtant attendu que toutes les opérations immobilières financées par le CAS respectent la nouvelle norme de 12 m2… Il aurait, en outre, été utile de présenter un indicateur mesurant l’évolution du ratio de SUN par agent sur l’ensemble du parc immobilier occupé par l’État, avec une décomposition entre les 16 grands ministères LOLF.

Au-delà, le Rapporteur spécial avait souhaité dans ses rapports précédents la présentation dans le projet annuel de performances du CAS d’un véritable tableau de bord de la performance immobilière des ministères. La réponse au questionnaire budgétaire indique qu’« il n’est pas envisagé à ce stade la constitution [d’un tel tableau de bord]. L’approche des coûts immobiliers notamment, si elle totalement pertinente, ne peut être dissociée de la mise en place des outils permettant de les mesurer. À l’heure actuelle, ces coûts demeurent très difficiles à identifier sans recourir à des enquêtes très consommatrices de ressources. Aucun référentiel dans les outils de la dépense existants ne permet de mesurer ce coût avec certitude et précision. Le déploiement de l’outil Chorus et de son module REFX doit permettre ce suivi, mais il est trop tôt pour mettre en place un indicateur. Il en est de même s’agissant du suivi des coûts par agent ou du suivi de la qualité environnementale des installations. »

D.– L’ARTICLE 28 : UNE MODIFICATION PUREMENT TECHNIQUE DES RÈGLES DU COMPTE SPÉCIAL

L’article 195 de la loi de finances pour 2009 a donné aux règles relatives du CAS une valeur législative. Les produits de cessions de biens immeubles de l'État sont affectés à son désendettement à hauteur d'un minimum de 15 %. La Cour des comptes surveille attentivement le respect de ce ratio dans ses notes d’exécution budgétaire. La contribution au désendettement de l'État ne s'applique pas aux produits de cessions des immeubles domaniaux mis à la disposition du ministère de la Défense jusqu'au 31 décembre 2014, ni aux produits de cessions des immeubles domaniaux situés à l'étranger ni, jusqu'au 31 décembre 2009, aux produits de cessions des immeubles domaniaux mis à disposition des services du ministère chargé de l'Écologie (MEEDDM). Hors ces exceptions, le « droit de retour » des ministères est fixé à 65 % sauf disposition dérogatoire ; 20 % du produit des cessions est mutualisé entre les ministères.

L’article 28 du présent projet de loi de finances propose la modification du périmètre des recettes et des dépenses du CAS. Leur non-adoption présenterait le double inconvénient, d’une part, d’empêcher le pilotage par le CAS de certaines opérations immobilières et, d’autre part, de fragiliser juridiquement les opérations qui auraient quand même été comptabilisées sur le CAS, en violation des règles le régissant, comme l’a relevé la Cour des comptes dans sa note d’exécution budgétaire de mai 2009 sur l’exercice 2008.

Les règles de fonctionnement du CAS avaient déjà été modifiées deux fois dans les lois de finances initiales pour 2007 et 2009. Dans cette dernière modification, adoptée à la suite d’un amendement du Sénat, il s’agissait de donner un caractère législatif au pourcentage affecté au désendettement de l’État (30 %) et de borner dans le temps les régimes dérogatoires au « retour » aux ministères des produits des cessions.

L’article 28 propose d’abord d’élargir le produit de ce compte aux droits à caractère immobilier attachés aux biens : redevances, loyers, produits de droits réels, etc. Cette proposition de modification va dans le bon sens. En l’état actuel du droit, seul le produit de la cession de l’immeuble peut être versé sur le CAS, le produit des droits attachés ne pouvant être versé qu’en tant que recette non fiscale du budget général.

Cet article propose ensuite, à juste titre, de rendre éligibles aux dépenses financées sur le CAS les opérations réalisées sur des immeubles dont l’État n’a pas la propriété mais figurant à l’actif de son bilan et sur des immeubles du domaine de l’État mais occupés par des opérateurs de l’État. La première hypothèse vise en particulier les nombreux services déconcentrés de l’État (préfectures…) souvent logés depuis des décennies dans des immeubles appartenant à des collectivités territoriales. Il en résulte souvent un défaut d’entretien préjudiciable aux administrés, aux fonctionnaires et – in fine – aux finances publiques, dans la mesure où un entretien préventif régulier est moins coûteux sur le long terme que des grosses réparations ponctuelles. Il serait ainsi possible de financer des travaux sur des biens dont l’État n’est pas propriétaire mais qu’il contrôle. La seconde hypothèse vise à permettre d’enregistrer sur le CAS des opérations immobilières portant sur des biens appartenant à l’État et à ses opérateurs, permettant ainsi un pilotage budgétaire global de l’ensemble de ces opérations. Il deviendrait ainsi possible de financer des travaux réalisés sur un bâtiment propriété de l’État et remis en dotation à un opérateur. L’extension du périmètre des dépenses immobilières éligibles est dans les deux cas utile.

Le Rapporteur spécial rappelle qu’il a plaidé à plusieurs reprises pour la disparition du mécanisme de « retour » aux ministères, afin de mutualiser l’ensemble des recettes des cessions. Le service France Domaine, incarnation de l’État propriétaire, pourrait ainsi jouer son rôle et véritablement piloter les opérations immobilières des ministères. Au lieu de cela, le maintien de la règle de « retour » aux ministères, même réduite à 65 %, maintient ces derniers dans une attitude de quasi-propriétaire en les laissant maîtres de leurs budgets d’investissement. Certes, le service France Domaine examine la conformité des opérations projetées par les ministères aux orientations de la nouvelle politique immobilière de l’État, en étudiant notamment la performance immobilière de ces opérations. Mais, de fait, ce contrôle est en grande partie virtuel, quand ce sont les ministères qui effectuent directement l’étude de projet et quand ils disposent du financement sur l’un des seize budgets opérationnels de programme (BOP) ministériels du CAS. Au-delà des améliorations techniques réelles apportées par l’article 28, il y a donc lieu de réfléchir à une modification plus profonde de ces règles, permettant que soit réellement remplie la fonction d’État propriétaire.

Il faut enfin noter que la nouvelle charte de gestion du CAS porte de 2 à 5 millions d’euros le seuil des opérations pour lesquelles le service France Domaine exige du ministère concerné un dossier de remploi. Les opérations effectuées sur des biens immobiliers à l’étranger sont soumises au seul examen de la commission interministérielle pour les opérations immobilières à l’étranger (CIME), au sein de laquelle le service France Domaine ne dispose pas d’un droit de veto. Les projets du ministère de la Défense s’inscrivent dans le cadre de la mise en œuvre de la loi de programmation militaire et ne sont pas suivis par le service France Domaine. La charte de gestion précise les conditions d’activité des comités de politique immobilière (CPI) constitués dans chaque ministère.

E.– QUELQUES ASPECTS DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT

1.– Le bilan patrimonial de l’État au 31 décembre 2008 et la poursuite de l’évaluation

Pour un total de 62,4 milliards d’euros au sein des immobilisations corporelles, le patrimoine immobilier de l’État comprend les terrains (3,1 milliards d’euros) et les constructions (59,3 milliards d’euros). Ces dernières se répartissent entre des biens spécifiques, qui recouvrent principalement les établissements pénitentiaires, et des bâtiments dits « non spécifiques » abritant des activités administratives (locaux banalisés de l’administration, logements de fonction…).

PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

 

31 décembre 2007

Retrai-tements

Acquisi-tions

Cessions

Écarts de réévalua-tion

31 décembre 2008

Terrains

2 485

406

44

62

222

3 095

Bâtiments non spécifiques à la valeur de marché

43 263

1 778

1 225

532

1 843

47 577

Bâtiments spécifiques

8 451

-852

266

7

599

8 457

Installations spécialisées

3 034

289

192

185

-82

3 248

Constructions

54 748

1 215

1 683

724

2 360

59 282

Total des valeurs brutes

57 233

1 621

1 727

786

2 582

62 377

Total des amortissements

8

-5

78

70

0

11

Total des dépréciations

2 734

-298

255

11

0

2 700

Total des valeurs nettes

54 491

1 924

1 394

705

2 582

59 666

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les bâtiments non spécifiques sont suivis au bilan de l’État en valeur de marché, celle-ci étant mise à jour chaque année, soit par une nouvelle évaluation, soit par actualisation de la valeur de marché de l’année précédente. Cette évaluation est réalisée par France Domaine. La hausse constatée entre 2007 et 2008 est la résultante de plusieurs facteurs :

– évolution des prix du marché sur l’ensemble de l’année 2008 (le retournement de tendance inhérent à la crise économique n’a été observable qu’à compter du dernier trimestre 2008, les coefficients d’évolution des prix de 2008 traduisent donc encore en 2008 une hausse) ;

– impact des biens évalués pour la première fois dans le cadre de la campagne 2008 (environ 1,8 milliard) ;

– acquisitions pour 216 millions d’euros ;

– travaux réalisés pour 702 millions.

Les sorties d’immobilisation non spécifiques liées aux cessions s’élèvent à 780 millions d’euros. Elles consistent essentiellement en des cessions à titre onéreux mais concernent également des biens sortis du périmètre de contrôle de l’État (transfert à des collectivités territoriales ou à des opérateurs).

La Cour des comptes a estimé « défaillante » la valorisation du parc immobilier de l’État, au titre de l’exercice 2008. Quelque 7 % des biens ne sont pas évalués à la clôture 2008 :

– 4 % des biens n’ont jamais fait l’objet d’une évaluation depuis leur entrée dans le patrimoine de l’État. Le service France Domaine a terminé l’évaluation de ces 1 306 biens le 30 septembre dernier. Parmi ces biens, 179 sont situés à l’étranger, 178 dans des collectivités d’outre-mer, 185 dans des départements d’outre-mer, 764 en métropole ;

– 3 % des biens n’ont pas été évalués sur place, comme l’impose la norme comptable n° 6 pour les biens ayant fait l’objet d’un changement de consistance, ce qui a faussé leur valeur de marché.

2.– L’extension des loyers budgétaires à l’ensemble des administrations de l’État

Le décret du 1er décembre 2008 a supprimé le régime de l’affectation des immeubles de l’État aux ministères et aux opérateurs, qui leur conférait des droits de quasi-propriété. Il est remplacé par des conventions d’utilisation qui seront mises en place progressivement par le service France Domaine. Le projet annuel de performances indique que l’objectif du service France Domaine est d’aboutir à la signature de plus d’un millier de conventions en 2010. Il s’agit d’avoir couvert la totalité du parc immobilier d’ici 2019.

Une dimension importante de ces conventions avait été mise en place, de façon expérimentale, avec le système des loyers budgétaires, qui sont maintenant étendus aux biens immobiliers des services centraux et déconcentrés de l’État, sur l’ensemble du territoire national. Cette généralisation a notamment pour objectif d’introduire un raisonnement économique amenant les occupants d’immeubles domaniaux à prendre en compte le coût économique de l’occupation de ces locaux. Elle favorise l’équivalence de traitement entre les immeubles privés pris à bail et les immeubles domaniaux. Les travaux le service France Domaine ont permis, en liaison avec les gestionnaires immobiliers des services occupants, de déterminer des montants de loyers budgétaires calculés au prix du marché, avec un mécanisme d’indexation.

Le tableau ci-dessous retrace, par ministère occupant, d’une part, les dotations de crédits inscrites au titre des loyers budgétaires 2008 et 2009, d’autre part, les enveloppes prévisionnelles de dotations de crédit enregistrées par la direction du Budget au titre des loyers budgétaires 2010 en vue de leur inscription au projet de loi de finances pour 2010.

LOYERS BUDGÉTAIRES

Ministères

Loi de finances pour 2008

Loi de finances pour 2009

Projet de loi de finances pour 2010
(hors indexation)

Alimentation, agriculture et pêche

16,8

16,8

30

Affaires étrangères et européennes

26

26

89,9

Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l’État

222,6

215,9

372

Culture et communication

20,3

21

27,9

Défense

157,4

146,2

187,3

Écologie, énergie, développement durable et mer

59

57,7

108,1

Économie, industrie et emploi

7,3

7,2

17,5

Éducation nationale

40,8

40,5

69,5

Enseignement supérieur et recherche

0

0

0

Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

0

3,4

5

Intérieur, Outre-mer et Collectivités territoriales

87,6

81,4

127,3

Justice et libertés

9,1

9

13,2

Santé et sports

1,8

2,1

5,7

Services du Premier ministre

19,7

18,4

24,1

Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville

29,9

29,6

49,7

Total

698,3

675,1

1 127,3


(En millions d’euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Dans les conventions d’utilisation, l’occupant s'engage à réduire par période triennale le ratio d'occupation constaté lors de la signature de ladite convention pour atteindre, pendant la durée ou en fin de la convention, l'objectif fixé de 12 m2 de surface utile nette (SUN) par poste de travail. Le ministère occupant, qui aura respecté ses engagements de performance immobilière soit par une libération partielle des locaux, permettant un regroupement de services administratifs, soit par une libération totale des locaux pour une installation dans un site moins coûteux, pourra bénéficier encore pendant deux ans de la dotation budgétaire allouée au titre du loyer budgétaire antérieur. En revanche, en cas de non-respect par le service occupant des engagements pris, le service France Domaine pourra, après envoi d'une mise en demeure, imposer un avenant à la convention, voire résilier purement et simplement ladite convention. Dans les cas extrêmes de non-respect de cet engagement alors que le ratio d'occupation de départ est déjà anormalement très élevé, le préfet du département de situation de l'immeuble concerné pourra procéder au relogement du service occupant dans un site plus petit et moins onéreux.

Le Rapporteur spécial appelle de ses vœux une généralisation rapide des loyers budgétaires pour les opérateurs de l’État. L’exemple récent des maisons forestières de l’Office national des forêts (ONF), qui fait l’objet d’un bail emphytéotique, doit montrer la voie, dans le respect de la particularité de chaque opérateur.

3.– L’enjeu du nouveau système d’information sur l’immobilier de l’État Chorus RE-FX

Dans le cadre des travaux sur Chorus, le comité d’orientation stratégique (COS) du projet a retenu, en juin 2007, l’utilisation de modules du progiciel de gestion intégré de SAP pour permettre le remplacement du tableau général des propriétés de l’État (TGPE) et la mise en place progressive de fonctionnalités avancées de gestion de l’immobilier de l’État. Le démarrage du module immobilier de CHORUS est intervenu le 6 avril 2009.

Les travaux préparatoires à la reprise des fonctionnalités TGPE/STGPE et à la constitution du référentiel immobilier dans Chorus avaient débuté en décembre 2007.

L’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) et la direction générale des Finances publiques DGFiP (service France Domaine) ont travaillé sur :

– la conception détaillée du nouvel outil, de février 2008 à juin 2008 ;

– la reprise des données immobilières de juin 2008 à mars 2009 ;

– la transversalité des modules (le module RE-FX gère l’inventaire physique du parc immobilier, le module FI-AA gère l’inventaire comptable de l’État).

Cette application concerne l’ensemble des gestionnaires de biens immobiliers de tous les ministères, situés sur l’ensemble du territoire en France et à l’étranger et les agents de la DGFiP (services locaux du Domaine et comptables en charge des opérations permettant l’établissement du bilan de l’État). À ce stade, le parc immobilier géré par le ministère de la Défense et celui géré par les opérateurs de l’État n’ont pas encore été basculés dans le nouveau module. La reprise de ces biens devrait intervenir début novembre prochain. Aujourd’hui près de 1 700 utilisateurs, dont 150 agents des services locaux du Domaine, bénéficient d’une connexion au module immobilier de Chorus.

À court terme plusieurs nouvelles fonctionnalités ont été ou vont être déployées : la gestion de l’inventaire physique du parc immobilier des opérateurs, la gestion des données afférentes à la mise en place des schémas pluriannuels de stratégie immobilière et la gestion des conventions d’utilisation et des « loyers budgétaires ».

Le Rapporteur spécial estime que ces fonctionnalités restent encore très proches de l’inventaire physique du parc. La commission des Finances (4) et le Conseil de l’immobilier de l’État (CIE) ont attiré l’attention du ministre du Budget et du directeur de l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) sur la nécessité qu’il y a à faire évoluer l’outil vers un véritable système de gestion immobilière, avec notamment la constitution de comptes de résultat par immeuble. Les fonctionnalités du module immobilier du progiciel de gestion intégré SAP le permettent ; il reste à les mettre en œuvre. Le Rapporteur spécial prend acte de l’assurance donnée par le ministre du Budget à la commission des Finances de l’évolutivité du système. L’enjeu est la connaissance du coût immobilier des ministères, avec la possibilité de construire sans ressaisie de données des indicateurs de performance.

II.– LE PROGRAMME ENTRETIEN DES BÂTIMENTS DE L’ÉTAT DE LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES

Créé par la loi de finances pour 2009, le programme Entretien des bâtiments de l’État a pour finalité de regrouper sur un programme unique les crédits d’entretien relevant du propriétaire, auparavant dispersés sur les budgets des administrations occupantes. Jusqu’en 2008, les administrations occupantes ont assuré l’entretien et les travaux immobiliers, y compris ceux relevant du propriétaire, à partir de leurs programmes du budget général et du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État. Le ministère du Budget a souhaité opérer un regroupement progressif de ces crédits, pour en améliorer la programmation et en rationaliser le contenu.

Le Rapporteur spécial se félicite que l’entretien lourd à la charge du propriétaire soit maintenant une fonction assumée par le service France Domaine ; il s’agit d’une demande qui avait été formulée depuis plusieurs années tant par la commission des Finances dans ses différents travaux que par le Conseil de l’immobilier de l’État (CIE).

Afin de disposer, en exécution, d’une décomposition plus fine des opérations, cinq sous-actions ont été créées pour identifier les composantes élémentaires en matière d’entretien : contrôles réglementaires ; audits, expertises et diagnostics ; maintenance préventive ; maintenance corrective ; travaux lourds et de mise en conformité et remise en état. Dans le cadre de la mise en place de ce programme en 2010, la priorité sera accordée aux contrôles réglementaires.

Ce programme contribuera à respecter les objectifs du Grenelle de l’environnement, pour son volet « État exemplaire », soit la réduction, à horizon de huit ans, de la consommation d’énergie des bâtiments de l’État de 40 % et des émissions de gaz à effet de serre de 50 %.

A.– LES CRÉDITS DU PROGRAMME MONTENT PROGRESSIVEMENT EN PUISSANCE

Le programme était doté de 77 millions d'euros en 2009 et sera doté de 169 millions d'euros en 2010 (en AE et CP). La programmation pluriannuelle établie l’an dernier avait prévu que les dépenses d’entretien sanctuarisées sur le programme seraient fixées à 12 % du montant des loyers budgétaires acquittés en 2009, 16 % en 2010 et 20 % en 2011. Les crédits inscrits sur ce programme sont déduits des dotations correspondantes des missions et programmes des différents ministères.

Il faut prendre en compte également les crédits adoptés dans la première loi de finances rectificative pour 2009 et créant une mission intitulée Plan de relance de l’économie. La sous-action n° 4 État exemplaire de l’action n° 4 Patrimoine a autorisé un montant de 120 millions d’euros en CP et 220 millions d’euros en AE. Le projet de loi de finances pour 2010 demande sur cette même sous-action un montant de 120 millions d’euros en CP, sans demander d’AE. S’agissant des audits énergétiques du parc de bâtiments de l’État, le projet annuel de performances du Plan de relance de l’économie indique que : « l’objectif assigné en matière de rénovation énergétique du parc existant de l’État et de ses établissements publics est de réduire les consommations d’énergie d’au moins 40 % et les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 50 % dans un délai de 8 ans. Sont concernés à terme les bâtiments de l’État (50 millions de m2) et de ses principaux établissements publics (70 millions de m²), soit au total 120 millions de m2. Pour cela, tous ces bâtiments devront faire l’objet d’un audit technique d’ici 2010 et les travaux devront être engagés d’ici 2012 en ayant traité à cette échéance les surfaces les moins économes.

« Conformément aux ambitions du Grenelle de l’environnement, il s’agit dans un premier temps de procéder à un diagnostic technique de l’ensemble du parc immobilier de l’État, axé prioritairement sur la situation thermique des bâtiments. La campagne d’études et de travaux sera notamment l’occasion pour les ministères de programmer les diagnostics relatifs aux travaux d’accessibilité aux handicapés prescrits par la loi pour l’égalité des droits et des chances de 2005. Il est en effet conforme à l’objectif de bon emploi des fonds publics de traiter simultanément ces deux questions par un même audit. »

B.– LA GESTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME EST COMPLEXE

Les crédits du programme sont mis à disposition de quatorze budgets opérationnels de programme (BOP) ministériels, en application d’une convention de délégation de gestion signée entre le responsable du programme et les responsables de BOP. Chaque responsable de BOP ou d’unités opérationnelles (UO) devra mettre à jour son plan pluriannuel d’entretien immobilier qui commandera les mises à disposition de crédits sur son BOP. Le projet annuel de performances indique que « le ministère du Budget et le ministère de l’Écologie (MEEDDM) pilotent la programmation et la conduite globales des opérations d’entretien au sein d’une cellule de suivi commune, en liaison avec les ministères occupants. Les représentants locaux de ces ministères sont également responsables de la conduite opérationnelle des travaux financés par le BOP Administration territoriale sous l’autorité du préfet de région. Le ministère de l’intérieur participe à cette cellule au titre de sa responsabilité dans l’administration territoriale de l’État. »

Le tableau du projet annuel de performances qui fournit la répartition des crédits en BOP ministériels est présenté ci-après.

RÉPARTITION DES CRÉDITS D’ENTRETIEN PAR MINISTÈRE

(en millions d’euros)

Ministère

Crédits 2010

Alimentation, agriculture et pêche

4,9

Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l’État

60,5

Culture, communication

4,6

Défense

30,5

Économie industrie emploi

2,8

Éducation nationale

11,3

Immigration, Intégration, Identité nationale et Développement solidaire

8,1

Intérieur, Outre-mer et Collectivités territoriales

20,7

Justice

2,2

MAEE

3,5

MEEDDM

17,5

Santé, jeunesse et sports

9,2

Service du Premier ministre

3,9

Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville

4,9

Total

169

Source : projet annuel de performances

Le Rapporteur spécial regrette ce mode opératoire. Les ministères n’ont pas vu d’un bon œil la dépossession d’une partie de leurs crédits d’entretien immobilier. Le risque est qu’ils continuent à se considérer comme destinataires des crédits inscrits sur leur BOP faute d’un pilotage suffisamment fort par le service France Domaine. Or, le Gouvernement indique dans la réponse au questionnaire budgétaire que la « gestion de ces crédits » est « très largement déléguée aux ministères » ; « Compte tenu de la nouveauté que représentait ce dispositif (programme Entretien des bâtiments de l’État et comités de politique immobilière - CPI), les administrations ont souhaité conserver la maîtrise et le pilotage des opérations. » La réponse rappelle que « les crédits hors plan de relance du programme Entretien des bâtiments de l’État font l'objet d'une programmation immobilière dans le cadre des CPI mis en place pour le dialogue de gestion entre le responsable de programme (Chef du service France Domaine de la DGFiP) et les responsables de BOP ». Avec une formulation très différente de la situation affichée ci-dessus dans le projet annuel de performances, cette réponse indique que le programme « a vocation à assurer la traçabilité, la sanctuarisation et la programmation des dépenses affectées à la maintenance bâtimentaire, aujourd’hui encore assez mal mesurées. Dans un second temps, ce programme permettra d’orienter les dépenses vers les travaux ou les dispositifs de maintenance les plus appropriés, dans un dispositif interministériel. »

Il aurait mieux valu constituer des BOP ou des UO par type de dépense, et non par ministère, ce qui aboutit à un « fléchage » des crédits depuis les administrations centrales(5). Le problème se pose principalement dans le cadre des immeubles des services déconcentrés de l’État, où la logique de territoire doit prévaloir sur les logiques ministérielles. Ainsi, la priorisation des diagnostics et des travaux doit être menée pour l’ensemble des bâtiments d’un département, ou même d’une région, nonobstant les crédits ministériels accordés.

La réponse au questionnaire budgétaire précise que les crédits figurant sur la sous-action État exemplaire du Plan de relance de l’économie ont été délégués au chef du service France Domaine et qu’un BOP spécifique a été créé pour les recevoir. Les trois quarts de la dotation ont été délégués auprès des préfets de région ; seulement 14 % des crédits ont été répartis en administration centrale, sachant que 10 % n’avaient pas encore été alloués. Cette logique territoriale a été formalisée dans une lettre aux préfets de région, en date du 4 mars 2009, signée du ministre chargé du Plan de relance, du ministre de l’Écologie, du ministre de l'Intérieur et du ministre du Budget. La gestion est de la compétence du préfet de région dans le cadre des réunions du secrétariat général des affaires régionales (SGAR). Une convention a été passée entre le service France Domaine et les ministères concernés afin de définir précisément les objectifs du dispositif, de mettre en place des instances de pilotage chargées de suivre l’exécution et de prévoir les modalités de mise à disposition progressive des crédits en fonction de l’avancée des chantiers. Le pilotage est assuré par un comité regroupant les représentants de ces ministères, avec des réunions mensuelles permettant de faire le point sur l’avancée des projets et la consommation des crédits et de résoudre les éventuelles difficultés rencontrées sur le terrain. Un suivi spécifique de la consommation des crédits a été mis en place au niveau des régions. En dépit de la complexité de ce montage institutionnel, le Rapporteur spécial se félicite de la gestion interministérielle de ces crédits au niveau des territoires qui en découle.

C.– STRATÉGIE DE PERFORMANCE : LE DÉBUT DU CHEMIN

Le programme est assorti des trois objectifs. Le premier objectif mesure le Pourcentage des dépenses affectées à des opérations préventives. La prévision 2009, qui avait été fixée à 20 %, a été réactualisée à 7 % dans le projet annuel de performances pour 2010. Or, le projet annuel de performances indique que le niveau optimal de cet indicateur se situe entre 50 % et 75 % ! La prévision 2010 est à nouveau fixée à 20 % avec une cible à 30 % en 2011. Le chemin qui reste à parcourir est donc encore long…

L’objectif Sécuriser le parc immobilier par la réalisation des contrôles réglementaires est mesuré par un indicateur de Pourcentage de réalisation des contrôles. La prévision 2009 est de 80 % avec une cible de 100 % en 2012. L’objectif Conduire la rénovation thermique des bâtiments de l’État est mesuré par l’indicateur sur le Pourcentage des bâtiments de bureau de l’État ayant fait l’objet d’un audit énergétique. La prévision pour 2009 s’établit à 40 %, avec une cible de 100 % en 2010. Pour importants qu’ils soient, ces deux indicateurs ne sont que la première partie d’un programme d’entretien, consacrée aux contrôles techniques et aux diagnostics. La mise en place d’une politique d’entretien dépendra des crédits qui seront affectés aux travaux, avec un certain autofinancement constitué par les économies générées. Les travaux menés dans le cadre du Grenelle de l’environnement avaient estimé, en première approche, à 24 milliards d’euros le montant total des travaux nécessaires sur les bâtiments de l’État pour respecter les objectifs définis.

DEUXIÈME PARTIE :
LES CONTRÔLES EFFECTUÉS PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Le Rapporteur spécial a effectué au cours de l’année 2009 plusieurs opérations de contrôle sur divers aspects de la gestion immobilière de l’État.

I.– LA LENTE INTÉGRATION DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT

On se rappelle que le ministre du Budget Éric Woerth avait indiqué, le 7 novembre 2008 devant la commission élargie, qu’il avait jusque-là échoué à obtenir le recensement des immeubles occupés par les opérateurs de l’État. Il a alors annoncé l’envoi d’un courrier (6) directement à tous les opérateurs en leur demandant de répondre avant le 31 mars 2009, sous peine de sanction (retenue sur rémunération et/ou réduction de la subvention publique).

Au 3 avril, 458 opérateurs (70 %) avaient rempli les obligations relatives à l’inventaire du parc. La situation est contrastée selon les ministères de tutelle. Les établissements cités par le ministre le 7 novembre ont tous fourni leur inventaire, à l’exception de quatre centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS). Le Rapporteur spécial a d’ailleurs auditionné les dirigeants des établissements cités : CNOUS-CROUS, Voies navigables de France (VNF), Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), à l’exception de l’Office national des forêts (ONF), qui a été auditionné par le Conseil de l’immobilier de l’État (CIE), dont le Rapporteur spécial est membre. Les universités, ont dans l’ensemble, effectué les travaux demandés, seuls 10 établissements n’ayant pas encore adressé leur fichier. Un effort significatif a été accompli par les organismes de recherche.

Les résultats au 3 avril dernier montrent cependant que :

– 12 opérateurs du ministère de l’Agriculture n’avaient pas répondu au questionnaire, notamment Agro-Paris-Tech et Agro-Campus de l’Ouest, de même que l’école vétérinaire de Maisons-Alfort ;

– 22 opérateurs du ministère de la Culture n’ont pas adressé leur inventaire, principalement les écoles d’art ou d’architecture ;

– 92 opérateurs du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche ne sont pas à jour : 12 universités sur 100, ce qui compte tenu de la situation actuelle de l’immobilier universitaire, représente un taux de carence qui reste honorable ; 11 écoles d’ingénieurs ; 4 CROUS ; 26 chancelleries, qui ne disposent pas de moyens immobiliers distincts de ceux des rectorats et pour lesquelles ce recensement est inadapté ; un certain nombre de petites structures constituées sous forme de groupements d’intérêt public (GIP) ;

– 21 opérateurs du ministère de la Santé, de la jeunesse et des sports, majoritairement les CREPS, qui font l’objet d’une mesure de rationalisation de leur réseau dans le cadre de la RGPP.

Les réponses au questionnaire budgétaire du Rapporteur spécial montrent qu’en août 2009 628 opérateurs sur 655, soit 95 %, avaient transmis au service France Domaine le fichier d’inventaire physique de leur parc immobilier. Seuls 27 opérateurs sont donc considérés comme défaillants. Aucun de ces établissements ne présente d’enjeu immobilier significatif. Le Rapporteur spécial estime que la pression exercée par le ministre du Budget a porté ses fruits et que ce bilan est satisfaisant. Il insiste néanmoins pour que l’on s’assure que les opérateurs qui n’ont pas encore répondu le fassent, ne serait-ce que pour des raisons de principe, afin que nul n’échappe aux disciplines demandées dans le cadre de la nouvelle politique immobilière de l’État.

Le ministre a indiqué qu’il assurerait un suivi adapté de six opérateurs disposant d’un patrimoine foncier à enjeu : ONF, VNF, Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, Centre des monuments nationaux, Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et Pôle emploi.

La première analyse synthétique du parc immobilier des opérateurs fait apparaître 39 000 biens pour une surface de 10,3 millions d’hectares. Du point de vue de la surface, la majeure partie du parc est portée par trois opérateurs : l’ONF (9,9 millions d’hectares), VNF (0,235 million d’hectares) et le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (0,123 million d’hectares). Particularité importante par rapport au parc des ministères, les bureaux ne représentent que 14 % du parc immobilier des opérateurs. Plus de la moitié (52 %) du parc est constituée de biens qui sont propriété de l’État, et près d’un quart (24 %) de biens en pleine propriété des opérateurs), les autres sont mis à leur disposition par les collectivités locales (8 %) ou pris en location (16 %).

Le ministre du Budget a chargé M. Bernard Gaudillère, contrôleur général économique et financier (CEGEFI), d’une mission de pilotage et de suivi de l’immobilier des opérateurs de l’État. Le comité de pilotage placé sous sa responsabilité devra fiabiliser techniquement et juridiquement le recensement, évaluer le parc avec l’aide d’un prestataire extérieur, lancer des schémas pluriannuels de stratégie immobilière, œuvrer pour lever la réserve de la Cour des comptes, et faire communiquer les systèmes d’information patrimoniaux des opérateurs et le système d’information de l’État (Chorus).

On se rappelle que la Cour des comptes a maintenu dans sa certification des comptes de l’État (exercice 2008) sa réserve substantielle sur les comptes des opérateurs de l’État, en particulier à cause du défaut de précision de l’évaluation de leur patrimoine.

Il est à noter que « Chorus RE–FX », le module de gestion immobilière du système d’information financière de l’État, en fonction depuis le mois d’avril 2009, intègre l’immobilier des opérateurs de l’État. Ce module ne comporte pour l’instant que des fonctionnalités d’inventaire et d’évaluation, avec la reprise des données figurant dans le serveur du Tableau général des propriétés de l’État (TGPE). Il n’est pas prévu que la comptabilité des opérateurs de l’État soit portée sur le système d’information Chorus ; les opérateurs continueront à utiliser des systèmes comptables propres qui sont très différents les uns des autres. Cette situation n’est pas sans poser des problèmes pour la gestion immobilière, et c’est pourquoi la mission de M. Bernard Gaudillère devra s’y pencher.

En partant du recensement maintenant effectué, le service France Domaine entreprend d’évaluer le parc immobilier des opérateurs. Un marché public a été lancé auprès de professionnels de l’immobilier afin de conduire ces travaux. L’évaluation du parc immobilier des opérateurs devra être effectuée avant le 31 décembre 2009. Une méthodologie harmonisée sera définie en accord avec le service France Domaine.

Chaque opérateur devra établir un schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) avant le 30 juin 2010. Ces schémas seront soumis aux conseils d’administration des opérateurs, dans lesquels siègent les représentants de l’État. Une fois adoptés, ces SPSI seront rendus opposables. Le Conseil de l’immobilier de l’État pourra auditionner les responsables d’opérateurs qu’il souhaite. Les SPSI des opérateurs de l’État portent tant sur leurs biens propres que sur les immeubles pris à bail ou occupés à titre quelconque, ainsi que sur les immeubles mis à leur disposition par des tiers (collectivités locales par exemple). Le périmètre des SPSI comprend l’ensemble de ces immeubles, quel que soit l’usage (immeubles de bureaux, logements de fonction, foncier, bâtiments techniques, bâtiments accueillant du public, etc.). À ce stade, aucune décision n’a été prise en ce qui concerne le processus de mise en place de loyers budgétaires pour les opérateurs de l’État.

A.– LE CENTRE NATIONAL DES œUVRES UNIVERSITAIRES ET SCOLAIRES (CNOUS) ET LE RÉSEAU DES CENTRES RÉGIONAUX DES œUVRES UNIVERSITAIRES ET SCOLAIRES (CROUS)

Le Rapporteur spécial a auditionné le 25 mars 2009 M. Jean-François Cervel, directeur du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS), et M. Alexandre Aumis, sous-directeur programmation, travaux et contractualisation.

Les 28 centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) gèrent un parc de 158 000 logements étudiant dans 600 résidences. Quelques 108 millions d’euros ont été investis en 2007 pour leur réhabilitation. Ces logements représentent un coût net (aide au logement déduite) compris entre 85 et 350 euros par mois de loyer.

Les CROUS ont la responsabilité de plus de 800 points de restauration étudiante, dont 365 « restos U » gérés, 240 « restos U » agréés et 240 cafétérias et brasseries. 24 millions d’euros d’investissements ont été effectués en 2007. Le prix du ticket repas est de 2,85 euros.

Aux dires de leurs responsables auditionnés par le Rapporteur spécial, le CNOUS et les CROUS disposent de plus de 4 millions de m2 bâtis : logements étudiants pour 3,2 millions de m2, restaurants pour « entre 400 000 et 600 000 m2 » et bureaux pour leurs sièges administratifs pour environ 40 000 m2. L’État est « en général » propriétaire des immeubles. Le CNOUS emploie actuellement 120 personnes dans deux bâtiments à Paris, quai d’Orsay et rue Jean Calvin. La direction du centre a pour projet de regrouper les services rue Jean Calvin et de céder l’immeuble du quai d’Orsay ; le produit de cette cession serait affecté à des constructions de logements en Île de France.

Le CNOUS et le réseau des CROUS gèrent en outre les bourses de l’enseignement supérieur, l’action culturelle et sociale étudiante, la restauration universitaire et l’accueil des étudiants étrangers. Ils disposent d’un budget global de plus d’un milliard d’euros (7) : 65 % de ressources propres, 35 % en provenance du ministère de l’Éducation nationale et 3 % du ministère des Affaires étrangères. Ils emploient 12 000 agents. La rénovation des restaurants représente un besoin financier évalué entre 150 et 200 millions d’euros entre 2007 et 2014.

Le logement étudiant a fait l’objet de deux rapports de notre collègue Jean-Paul Anciaux, parlementaire en mission auprès du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin en 2003, puis auprès de Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, et de Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville en 2008. La double problématique traitée porte sur la réhabilitation d’un parc en général ancien et sur la construction de nouvelles places, pour faire face à la demande. La région Île-de-France est bien sûr celle où l’insuffisance de l’offre est la plus importante, en raison de la rareté des terrains disponibles. Les CROUS mettent en œuvre depuis 2004 un plan de modernisation et d’extension du parc des résidences universitaires ; 70 000 réhabilitations et 50 000 constructions ont été programmées sur 10 ans (2005-2014). À ce jour 24 000 réhabilitations ont été effectuées et 12 000 places nouvelles ont été construites, ce qui constitue dans les deux cas un retard par rapport à une progression linéaire. Le plan de relance a permis l’injection de 27 millions d’euros supplémentaires. Il reste environ 1 milliard d’euros à financer avant 2014 pour les réhabilitations. Les constructions nouvelles sont financées à hauteur de 20 % par des subventions et de 80 % par des emprunts aidés. La réhabilitation et la modernisation des résidences sont réalisées aux standards internationaux (qualité, normes environnementales) et, à terme, l’ensemble des chambres disposera de connexions Internet. Le coût moyen d’une construction nouvelle est de 38 000 à 45 000 euros par place. Les nouvelles normes de développement durable entraînent une augmentation de 7 à 15 % des coûts, selon les cibles environnementales retenues. Il faut donc entre 1 et 1,3 milliard d’euros d’investissements avant 2014 pour financer les objectifs retenus. La loi relative aux libertés et aux responsabilités locales permet désormais aux collectivités territoriales, au premier rang desquelles les communautés urbaines ou d’agglomération de participer au financement.

Comme nous l’avons vu, le 3 avril dernier, quatre CROUS n’avaient pas répondu au questionnaire du ministre du Budget (Rouen, Limoges, Nancy-Metz et Versailles, le plus important de France), alors même que le directeur du CNOUS avait affirmé au Rapporteur spécial que le réseau des CROUS aurait rempli en temps voulu ses obligations déclaratives auprès du service France Domaine…

Le directeur du CNOUS a indiqué au Rapporteur spécial que les CROUS avaient envoyé directement leur réponse au service France Domaine, en adressant une simple copie au CNOUS. Il a précisé que le CNOUS n’était pas en position hiérarchique par rapport aux CROUS. Le dispositif institutionnel des œuvres universitaire est très archaïque, avec une présence très forte de l’État. Chaque directeur de CROUS est nommé directement par le ministre. Les crédits de fonctionnement et d’investissement transitent cependant par le CNOUS. Le service France Domaine n’a donc pas d’interlocuteur unique pour le réseau CNOUS-CROUS. Le CNOUS ne joue donc pas le rôle de tête de réseau qui devrait être le sien en matière immobilière. En outre il est étonnant que la région Île de France soit scindée en trois CROUS (Paris, Créteil et Versailles) alors qu’il faudrait une vision à l’échelle de l’agglomération. Ainsi dans Paris intra muros il y a seulement 3 500 chambres pour 300 000 étudiants…

B.– L’INSTITUT NATIONAL DE L’ORIGINE ET DE LA QUALITÉ (INAO)

Le Rapporteur spécial a rencontré Mme Marion Zalay, directrice de l'Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), accompagnée par M. Philippe Pons, secrétaire général, le 25 mars 2009.

Mme Marion Zalay a d’abord indiqué au Rapporteur spécial qu’elle avait répondu au courrier du ministre du Budget le 20 novembre 2008, donc quelques jours après la commission élargie de l’Assemblée nationale au cours de laquelle le ministre avait indiqué que l’INAO figurait parmi les opérateurs qui n’avaient pas effectué le recensement de leur patrimoine immobilier. Sur la base de ce recensement, le service France Domaine a pu entreprendre les évaluations correspondantes.

L’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), dans sa configuration actuelle, résulte de la fusion en 2007 de la Commission nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires (CNCL) et de l’ancien Institut national des appellations d'origine (INAO). La fusion s’est effectuée avec une réduction des effectifs de 11 ETPT pour un périmètre d’action élargi. L’INAO se positionne désormais comme autorité de contrôle de second rang, en surveillant les organismes certificateurs agréés (Label Rouge, Bio, appellations d’origine…). Il assure la mission régalienne de défense de nos appellations dans les négociations internationales (Champagne, Bordeaux, foie gras, Roquefort…). L’INAO participe à la valorisation du patrimoine immatériel de l’État avec nos multiples indications géographiques (cartographie, historique…).

Le budget de l’INAO est d’environ 20 millions d’euros en 2009, financé aux trois quarts par une subvention de l’État, le quart restant étant facturé aux professionnels dont les représentants participent aux délibérations de ses organes dirigeants.

S’agissant du parc immobilier de l’INAO, seuls 9 % sont détenus en propriété (Avignon, Caen, Colmar et Tours). Toutes les autres implantations sont des locations à usage de bureau. L’état-major et les services centraux sont installés à Paris (73 personnes) et à Montpellier (23 personnes). Les trois quarts des effectifs sont en province, répartis sur 26 sites (199 personnes). Au total l’INAO emploie 272 personnes (250 ETPT). Compte tenu de la pyramide des âges, l’application de la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux se traduit par la diminution de 2 ETPT par an du plafond d’autorisation d’emploi.

La directrice de l’INAO a indiqué au Rapporteur spécial que le ratio de 12 m2 de surface utile nette (SUN) n’était pas respecté dans les immeubles occupés (moyenne de 17,8 m2 par agent sur l’ensemble du parc). Elle justifie cette situation par la faiblesse des effectifs concernés. En outre, le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux dégrade mécaniquement les ratios d’occupation. La plus importante dégradation serait constatée sur le site de Montpellier, où l’INAO loue deux immeubles voisins. La prise de décision est subordonnée à l’arbitrage attendu sur les effectifs liés à l’élargissement de ses missions aux vins de pays dans le cadre de la réforme de l’organisation commune des marchés (OCM). Le ratio d’occupation s’élève à Montpellier à 31,9 m2, à Chambéry à 28,6 m2 et à Caen, à 12,3 m2 par agent. Le coût annuel par agent est évalué à 19 506 euros à Paris, 9 200 euros à Avignon, 8 264 euros à Bordeaux et 7 677 euros à Villefranche ; toues les autres implantations ont un coût annuel par agent inférieur à 5 000 euros, les moins chères (Caen et Tours) étant inférieures à 1 000 euros. En outre l’analyse des surfaces louées montre un ratio de SUN rapporté à la « surface intérieure » de 57 % seulement, ce qui dénote une performance immobilière très médiocre.

Le parc immobilier de l’INAO est géré sur un simple fichier tableur (Excel). Sa petite taille justifie l’absence d’un outil dédié. L’INAO indique que les coûts liés aux locaux font l’objet d’un suivi au niveau budgétaire (ordonnateur), aboutissant à un agrégat indiquant le coût total des locaux et la décomposition de ce coût (loyers, charges, taxes, assurances, fluides et nettoyage). Les opérations d’entretien sont toutes externalisées. L’INAO attend les recommandations du service France Domaine pour procéder au diagnostic technique des locaux dont elle est propriétaire. S’agissant de la mise aux normes environnementales des bâtiments détenus en biens propres, l’INAO estime que les possibilités d’action sont limitées par le fait que les locaux sont tous situés au sein de copropriétés.

L’INAO indique qu’une démarche d’optimisation est en cours sur son site de Bordeaux et qu’un projet de réduction des surfaces est en cours d’examen sur celui de Montpellier.

L’INAO a son siège parisien au 51, rue d’Anjou, Paris 8e arrondissement. Le bail relatif à cet immeuble représente un loyer annuel d’1,3 million d’euros. Or l’ensemble des loyers acquittés par l’INAO s’élève sur un an à 1,9 million d’euros. Ainsi, le siège parisien héberge seulement un quart des effectifs de l’INAO, mais représente plus des deux tiers de ses loyers… L’INAO indique que l’implantation de son siège dans Paris intra muros a fait l’objet d’une autorisation du Premier ministre. Elle est principalement liée au fait que l’INAO accueille très régulièrement dans ses locaux des délégations étrangères dans le cadre de sa mission de coopération internationale en faveur du développement des politiques de l’origine et de la qualité. Par ailleurs, une part importante de l’activité de l’INAO est liée au fonctionnement d’instances délibératives composées de membres venant des différentes régions de France, ce qui serait facilité par un lieu de réunion facile d’accès depuis les gares et aéroports. Le Rapporteur spécial estime que l’INAO pourrait, dans son schéma pluriannuel de stratégie immobilière, examiner avec le service France Domaine une implantation de son siège qui soit moins coûteuse (Strasbourg, Genève…) tout en restant proche des moyens de transport nationaux et internationaux (train et avion). Il note que 900 m2 de surface sur le site parisien sont consacrés à de l’archivage. Des solutions d’archivage électronique ou un transfert des archives papier dans un site moins coûteux pourraient être examinées. Des locaux délaissés par les services centraux ou déconcentrés des ministères à la suite de la réduction des effectifs pourraient être utilisés à cet effet. Le service France Domaine devrait pouvoir apporter une assistance à l’INAO pour examiner les conditions de renégociation des baux.

C.– VOIES NAVIGABLES DE FRANCE (VNF)

Le Rapporteur spécial a rencontré le 6 mai 2009 M. Thierry Duclaux, directeur général de Voies navigables de France (VNF), accompagné de M. Patrick Lambert, directeur général adjoint et de M. Philip Maugé directeur du développement.

Établissement public créé en 1991, VNF gère 7 500 km de fleuves, canaux et rivières navigables en France, et 40 000 hectares de domaine public le long de ces voies. VNF ne gère que 7 500 km des 8 500 km de voies navigables françaises, les 1 000 km restants étant gérés par les collectivités locales ou les ports. VNF entretient, exploite et modernise ce réseau, le plus vaste d’Europe, soit 2 300 ouvrages de navigation. La gestion de 1 595 écluses, 494 barrages, 65 barrages-réservoirs, 74 ponts-canaux, 35 tunnels-canaux et 3 756 km de digues font de VNF l’un des plus importants maîtres d’ouvrage français.

Organisé en sept directions territoriales, VNF est un établissement public industriel et commercial (EPIC) fortement décentralisé. Présidé par notre collègue député Alain Gest, son conseil d’administration réunit des personnalités représentant l’État, les partenaires institutionnels (collectivités locales notamment), les usagers de la voie d’eau et des associations de protection de la nature et de l’environnement.

VNF dispose d’un budget de 289 millions d’euros pour gérer et moderniser les voies navigables qui lui sont confiées. VNF finance l’intégralité de son budget de fonctionnement et un tiers de ses investissements par des ressources propres, issues principalement de la taxe hydraulique perçue pour les prélèvements et les rejets d’eau (121 millions d’euros), les péages de transport et de plaisance (12 millions d’euros) et les redevances domaniales pour les occupations du domaine et les concessions portuaires (23 millions d’euros). L’État, l’Union européenne et les collectivités locales contribuent à financer des projets liés à la voie d’eau. Pour augmenter ses ressources et investir davantage dans la modernisation des infrastructures, VNF indique qu’elle entreprend une politique active de valorisation de son domaine public fluvial, notamment par la reconversion urbaine d’anciens sites portuaires.

Le directeur général de VNF a indiqué au Rapporteur spécial que les maisons éclusières non occupées sont gérées directement par VNF et souvent louées dans le cadre de conventions d’occupation temporaire du domaine public. Les maisons éclusières occupées sont par contre gérées par l’État ; VNF a seulement des relations fonctionnelles avec les services gestionnaires, mis à disposition par le ministère, sans possibilité de gestion des ressources humaines ni contact direct avec les agents hébergés. Il en résulte un enchevêtrement de responsabilités dont a eu à connaître le juge à l’occasion d’un accident concernant une entreprise de plongée lors d’une intervention d’entretien sur le barrage de Meaux ; l’absence de plan d’intervention de sécurité a conduit le juge à condamner VNF en tant qu’employeur de fait. VNF a pourtant fait valoir qu’elle avait donné des instructions, mais sans disposer de l’autorité hiérarchique.

En outre le patrimoine qui a été confié à VNF est complexe et l’a été sans inventaire préalable, même si des progrès ont été enregistrés. Pour VNF, les opérations de recensement doivent prendre en considération les politiques publiques mises en œuvre. L’entretien et la gestion des ouvrages ont conduit à un inventaire de ses ouvrages techniques ; il en résulte un besoin d’investissement théorique estimé en première approche à 1,3 milliard d’euros. Le cheminement vers cet objectif fait l’objet d’un audit interne et sera au cœur du prochain contrat d’objectif et de moyens avec le ministère de l’Écologie (MEEDDM). Il est évident que l’on n’engagera pas des travaux importants sur un canal pour lequel les prévisions de trafic sont faibles ou nulles.

L’enjeu patrimonial est constitué par les 39 concessions portuaires gérées par VNF, qui sont un outil de développement des voies fluviales. VNF recherche des modalités de gestion plus dynamiques de ces concessions : définition d’objectifs, de cibles, d’outils de suivi et d’analyse des coûts... VNF a également pour objectif de valoriser les anciens terrains portuaires, qui présentent souvent un enjeu urbain en matière de mutation d’occupation. La situation est compliquée par le fait que certains terrains sont gérés par l’État alors que d’autres le sont par VNF ; le critère est, comme pour les maisons forestières, que l’État en a encore l’usage. Par ailleurs la gestion des ports autonomes de Paris et de Strasbourg est marquée par un enchevêtrement de compétences entre VNF et les régions concernées. Un premier recensement a été tenté en 2005 ; il continue encore à faire l’objet de tests de fiabilisation en liaison avec le service France Domaine, pour le rapprocher des 26 000 lignes d’inventaire inscrites au tableau général des propriétés de l’État (TGPE). Un appel d’offre vient d’être lancé en vue de conclure un marché avec un cabinet spécialisé pour définir une méthode commune… Le Rapporteur spécial s’étonne que VNF se trouve de fait chargé du recensement de biens qui appartiennent à l’État.

VNF développe ses activités de mise en valeur des biens sans affectation. Elle recense ainsi les terrains pour lesquels une autre utilisation est possible, et ceux qui sont délaissés et auraient vocation à être déclassés, puis cédés. Une collaboration est engagée avec le service France Domaine pour procéder aux évaluations. L’expérience de Lyon Confluence a montré qu’il vaut mieux éviter de passer par la loi pour pouvoir chercher la solution la plus adéquate. Dans certains cas, par exemple pour des anciens bâtiments de douanes, la location est plus créatrice de valeur que la simple cession. Les concessions sur le domaine public donnent le plus souvent lieu à la constitution d’une filiale commune avec la Caisse des dépôts (actionnaire principal) et le locataire le plus important. Elles offrent à VNF des ressources propres qui viennent en déduction des demandes de subventions publiques. Le Rapporteur spécial note néanmoins qu’aucun dispositif de retour à l’État n’ait été prévu, s’agissant de biens immobiliers remis par l’État en dotation à VNF sans contrepartie financière. En outre cette activité d’aménageur promoteur semble éloignée de la mission confiée à VNF.

Le Rapporteur spécial note en outre que le tourisme fluvial pourrait être développé dans notre pays. VNF estime ne pas disposer collectivement du savoir faire, alors que les compétences ont été largement dévolues aux collectivités territoriales.

À une question du Rapporteur spécial sur son schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI), le directeur général a indiqué que VNF entendait suivre une stratégie d’accompagnement de la politique de mutation du domaine qu’elle gère. VNF souhaite développer avec sa tutelle une politique de développement de ports intérieurs. Elle souhaite affiner le recensement des terrains qu’elle gère pour développer sa politique de valorisation. VNF souhaite faire évoluer la politique d’entretien de ses installations techniques vers plus de professionnalisme. La situation actuelle, où les agents assurent en même temps l’exploitation et l’entretien n’est pas optimale, et des économies en termes de personnel devraient résulter de cette évolution.

De façon générale, le Rapporteur spécial estime qu’une clarification des relations entre l’État et son opérateur VNF s’impose.

D.– L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS (ONF)

L’ONF figure également parmi les opérateurs de l’État cités par le ministre Éric Woerth le 7 novembre 2008 qui n’avaient pas répondu à la demande de recensement de leur parc immobilier. Le Rapporteur spécial n’a pas procédé à une mission de contrôle sur l’Office national des forêts (ONF), mais a eu à connaître de la situation particulière de cet organisme dans le cadre des travaux du Conseil de l’immobilier de l’État (CIE) dont il est membre.

Le CIE a auditionné les représentants de l’ONF en avril 2009. Cette audition a porté en particulier sur le projet de mise par l’État à la disposition de l’ONF des maisons forestières par bail emphytéotique, pour en favoriser la valorisation tout en préservant les intérêts publics qui s’attachent à la propriété de l’État.

On l’a vu, dans le recensement effectué en avril 2009, l’ONF s’occupe de 9,9 millions d’hectares (96 %) des 10,3 millions d’hectares gérés par les opérateurs de l’État. L’ONF détient un parc de 4 350 immeubles bâtis, notamment environ 2 000 maisons forestières. Pour une partie, ces biens ont été transférés en pleine propriété à l’office, mais les plus nombreux lui ont été simplement remis en dotation, l’État en conservant la propriété. Le parc concerné est incertain et jusqu’à peu, n’avait fait l’objet que d’un recensement approximatif.

À la fin de l’année 2005, l’ONF avait demandé que les biens qui lui avaient été remis en dotation lui soient cédés pour un prix symbolique, arguant du fait que cela lui aurait permis de résoudre des difficultés rencontrées dans sa gestion. Le ministère de l’Agriculture s’y était déclaré favorable, pour autant qu’un dédommagement minimum de 50 millions d’euros lui revienne, cette somme étant nécessaire pour compléter le plan de financement du projet d’installation de ses services centraux rue de Picpus à Paris. Une évaluation réalisée par le service France Domaine en 2006 avait conclu à une valeur vénale de 270 millions d’euros pour l’ensemble des biens concernés. Une mission conjointe de l’Inspection générale des finances, de l’Inspection générale du génie rural et des eaux et forêts et de l’Inspection générale de l’agriculture avait, en mai 2008, considéré comme plausible une fourchette comprise entre 145 et 200 millions d’euros, après prise en compte d’un abattement de 15 à 20 % pour cause de vente en bloc.

Les maisons forestières constituent 70 % du parc en question. D’une surface moyenne de 212 m2 SHON, le tiers d’entre elles n’est plus habité par les agents de l’office. 80 % des maisons ont été construites avant 1900 et leur état général est soit très moyen, soit médiocre. Un peu plus de la moitié des maisons forestières sont enclavées, avec des problèmes de desserte par les réseaux (eau, assainissement, électricité…). Une quinzaine seulement de maisons forestières sont classées ou inscrites à l’inventaire des monuments historiques.

Le ministre du Budget a décidé en mai dernier d’autoriser la conclusion d’un bail emphytéotique d’une durée de 50 ans pour remettre à l’ONF l’ensemble de son bâti domanial. Un rendement locatif de 3 % de la valeur du parc est demandé, avec indexation du loyer de 1 % à partir de la sixième année. L’ONF versera au CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État, avec retour au ministère de l’Agriculture, une part de ce loyer sous forme d’un capital net de 50 millions d’euros, échelonné sur les cinq premiers exercices, pour les montants successifs de 10, 10, 12, 9 et 9 millions d’euros. Le ministre du Budget a souhaité en outre instaurer un mécanisme d’intéressement de l’ONF à une bonne gestion et à des cessions de maisons domaniales lorsque certaines d’entre elles ne sont plus nécessaires à l’exercice de ses missions. L’ONF sera intéressé à hauteur de 50 % de l’écart entre la valeur estimée dans le bail et le prix effectif de cession.

Le CIE a donné un avis favorable au montage ainsi établi. Le Rapporteur spécial se félicite que le ministre du Budget ait ainsi décidé la mise en œuvre d’un mécanisme de loyer budgétaire à l’un des principaux opérateurs de l’État. Ce précédent pourra s’étendre aux autres opérateurs, au fur et à mesure de l’établissement de leurs schémas pluriannuels de stratégie immobilière, en respectant la spécificité de chacun d’entre eux. La clause d’intéressement aux cessions de l’ONF a judicieusement permis de récompenser le travail de valorisation effectué sur les maisons forestières. Le mécanisme un temps envisagé d’intéressement sur la valeur de la cession (et non sur le différentiel entre la valeur domaniale et la valeur réelle de cession) n’a heureusement pas été retenu.

Le Rapporteur spécial estime que la priorité consiste maintenant à parachever un recensement exhaustif de ce patrimoine puis à demander à France Domaine d’en réaliser une évaluation complète. L’ONF devrait élaborer, en concertation avec sa tutelle, un plan d’action précis pour la gestion, l’entretien et l’utilisation de ce patrimoine, avec la définition d’objectifs précis de valorisation.

II.– L’AMORCE D’UNE GESTION IMMOBILIÈRE AU NIVEAU TERRITORIAL

A.– LA NÉCESSITÉ D’UN PILOTAGE DE L’IMMOBILIER DE L’ÉTAT AU NIVEAU DES TERRITOIRES

Les travaux de la MEC ont fait apparaître l’an dernier la nécessité d’un pilotage global de l’immobilier de l’État au niveau des territoires, au-delà des frontières ministérielles. Lors de deux déplacements à Caen et à Lyon, le Rapporteur spécial a eu pour la première fois le sentiment que commençait à s’organiser la fonction d’État propriétaire en région et en département grâce à la nomination au début de l’année 2009 de « responsables de la politique immobilière de l’État » (RPIE) dans toutes les régions et départements. Pour la première fois devient visible la distinction entre les fonctions des domaines relatives à l’évaluation et aux tâches traditionnelles (la plus grande partie des agents) et celles portant sur la gestion immobilière (pour l’instant essentiellement les RPIE).

● Un phasage adéquat entre la réforme de l’administration territoriale de l’État (RéATE) et les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI)

Les services déconcentrés de l’État sont actuellement l’objet d’une grande réforme décidée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). La réforme de l’administration territoriale de l’État (RéATE) regroupe en effet les services de l’État autour de huit pôles en région et de deux ou trois directions en département. Son dispositif est schématisé dans les trois graphiques ci-après. Les services des ministères de la Justice, de la Défense, de l’Éducation nationale et des ministères de l’Économie et du Budget (trésoreries et services fiscaux), ainsi que celles des agences régionales de santé (ARS) restent en dehors de cette réforme. L’immobilier universitaire n’en fait pas non plus partie. Menée à un rythme soutenu, la RéATE doit entrer en application le 1er janvier 2010.

Les trois schémas présentés ci-après résument la nouvelle organisation territoriale.

La circulaire du Premier ministre du 16 janvier 2009 adressée aux préfets a désigné le préfet de région comme responsables de la stratégie immobilière de l’État en région ; il lui incombe de valider les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI), présenté en comité de l’administration régionale (CAR) par les préfets de département. Le préfet de région représente l’État dans son rôle de propriétaire vis-à-vis des administrations occupantes. Le service France Domaine doit mettre en œuvre des conventions d’utilisation avec les administrations occupantes, qui doivent remplacer le régime de l’affectation supprimé par le décret du 1er décembre 2008, ce qui implique pour lui de percevoir des loyers budgétaires correspondant à la valeur du marché des bureaux occupés, de s’assurer de l’entretien correct du parc et de veiller à la performance immobilière (notamment le respect de la norme de 12 m2 par agent). Quelque 26 départements ont déjà présenté un SPSI. La circulaire a généralisé ces schémas à l’ensemble du territoire et ils devront avoir été validés dans tous les départements avant la fin de l’année 2009. Les loyers budgétaires seront généralisés à l’ensemble des départements à partir du 1er janvier 2010 ; ils seront fixés en rapport avec le prix du marché et seront indexés sur l’indice du coût de la construction. Un dispositif d’ajustement des dotations dont disposent les administrations pour payer les loyers budgétaires sera mis en place : ces dotations seront établies en fonction des besoins en surface, compte tenu des évolutions d’effectifs, et non du loyer des locaux effectivement occupés. Un dispositif d’intéressement des administrations qui libèrent des surfaces ou choisissent une localisation moins coûteuse sera mis en place. Le Rapporteur spécial souhaite que le ministère du Budget fasse effectivement vivre ces dispositifs dans le cadre de la fongibilité des crédits des programmes et budgets opérationnels de programme (BOP).

Le Rapporteur spécial a noté lors de ses deux déplacements que les services de l’État étaient plus mobilisés sur la RéATE que sur les SPSI. Il est à craindre que la priorité mise par le Gouvernement sur la mise en œuvre très rapide de la RéATE n’aboutisse à prendre des décisions structurantes en matière immobilière qui s’imposeront aux SPSI en cours d’élaboration. L’élaboration des SPSI marque singulièrement le pas et il est à craindre que la date butoir du 31 décembre 2009 ne soit pas respectée dans tous les départements. Alors que la date du 30 juin 2009 a été expressément mentionnée dans la circulaire du Premier ministre du 31 décembre 2008, force est de constater que les SPSI des 25 départements pilotes n’ont pu être produits pour cette date. Désormais, ces SPSI sont attendus pour la fin de l’année 2009. En septembre dernier, seuls une quinzaine de schémas seulement sur l’ensemble des départements était en cours de finalisation.

Un autre écueil, tout aussi grave, serait que les SPSI se bornent à dresser la liste des opérations immobilières découlant de la RéATE, sans définir une stratégie globale. Or, le Rapporteur spécial souligne qu’il faut renverser l’ordre des choses et définir une programmation stratégique (SPSI) avant de rendre les décisions d’implantation et de regroupement liées à la RéATE. Cette programmation stratégique doit permettre l’amélioration de la performance immobilière des sites occupés par les services de l’État (lieux d’implantation, coûts immobiliers globaux, ratios d’occupation, qualité environnementale des bâtiments). Les SPSI doivent être gouvernés par les objectifs de réduction du volume et du coût des surfaces occupées, qu’elles soient locatives ou domaniales. La règle fixée pour la conduite des opérations immobilières de la RéATE est l’équilibre financier, les économies dégagées (cessions, réduction des surfaces locatives) devant contrebalancer les coûts (acquisitions, travaux, prises à bail). Il est à craindre que le respect de l’échéance du 1er janvier 2010 pour l’application de la RéATE n’entraîne un exercice limité au calcul d’un équilibre financier statique sur le budget 2010. Ainsi, une cession produisant une recette immédiate pourrait compenser de façon purement comptable une prise à bail entraînant des dépenses pérennes sur plusieurs années. Un réel équilibre financier ne peut donc s’envisager que dans une perspective pluriannuelle. La programmation stratégique doit prendre en compte la réduction programmée des effectifs de l’État avec l’application de la règle du non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.

Le service France Domaine centralise les travaux effectués dans le cadre des SPSI des services déconcentrés de l’État, au fur et à mesure de leur établissement. Les parties des SPSI relatives aux diagnostics montrent, selon des estimations provisoires, une grande hétérogénéité des caractéristiques et des ratios de performance en fonction des ministères. La performance d’occupation globale s’établit à 17,6 m2 SUN par agent, supérieure à la cible attendue ; les petits bâtiments offrent une meilleure performance ; le ratio varie du simple au double (de 15 m2 à 30 m2 selon les ministères). L’état général moyen des bâtiments est jugé mauvais s’agissant du respect des normes de sécurité ou des règles techniques. Hors la prise en compte du Grenelle de l’environnement, l’effort à conduire en la matière est considérable.

Malgré plusieurs demandes dans ses questionnaires budgétaires adressés l’année dernière et cette année au ministre du Budget, le Rapporteur spécial n’a jamais obtenu d’information sur les conséquences immobilières de la fusion des réseaux du Trésor et des services fiscaux au sein de la direction générale des Finances publiques (DGFiP). La réponse au questionnaire de cette année se borne à indiquer que « la fusion permettra une rationalisation des implantations générant des économies de loyers et favorisant la politique de cessions. La mutualisation des implantations immobilières générera également une diminution du coût d’occupation des locaux induite par la réduction des surfaces dévolues à l’activité des services de la DGFiP et des charges de fonctionnement s’y attachant ». Si les objectifs sont clairement définis et les enjeux établis, aucun chiffrage ou exemple ne vient à l’appui des allégations du ministère. Or, les informations portées à la connaissance du Rapporteur spécial montrent que la DGFiP continue à privilégier des implantations en centre ville, donc les plus coûteuses.

● La mutualisation des moyens immobiliers en région et en département reste encore à établir

Les dispositions régissant le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État permettent la mutualisation des produits des cessions dans le cadre d’un projet d’initiative locale (PIL), avec un retour de 85 % au profit des projets immobiliers. La mutualisation des crédits d’investissement ainsi financés devrait en découler. Il s’agit pour le Rapporteur spécial d’un dispositif essentiel pour permettre la définition d’une stratégie d’ensemble au niveau du territoire (départements et régions) ; la maîtrise de l’investissement immobilier est l’outil budgétaire indispensable d’une bonne gestion.

Les crédits du programme Entretien des bâtiments de l’État et ceux du plan de relance affectés au même objet ont permis également la création d’un outil budgétaire permettant une gestion mutualisée au niveau du territoire. Il était trop tôt, lors des déplacements du Rapporteur spécial, pour porter un jugement sur la façon dont ces crédits ont été délégués et dépensés. Le souhait que l’on peut formuler à ce stade est que ces crédits soient réellement pilotés au niveau territorial par les préfets, sans « fléchage » depuis les services centraux ministériels.

Le Rapporteur a noté au cours de ses deux déplacements une bonne volonté manifeste des acteurs de terrain (préfets, PG, RPIE) pour mettre en œuvre une action cohérente au niveau du territoire. Tous les fonctionnaires rencontrés ont montré qu’ils avaient compris l’intérêt de la réforme et l’importance de leur mission. Si l’on fait exception de réticentes de quelques organisations syndicales entendues ici ou là, les agents publics comprennent que la réforme permettra une rationalisation des implantations immobilières avec comme objectif de meilleures conditions de travail. Par contre, ces acteurs de terrain se heurtent aux freins mis par les administrations centrales des ministères. La résistance des directeurs d’administration centrale à la mutualisation de l’immobilier en département et en région a été plusieurs fois soulignée. Les raisons invoquées en sont le refus de se voir déposséder de leur autorité sur « leurs » bâtiments, marquant ainsi un « esprit de clocher » qui ne devrait pas être. Les administrations centrales veulent continuer à déléguer leurs crédits sur « leurs » bâtiments. Des cas concrets ont été rapportés au Rapporteur spécial en région Rhône-Alpes, avec les résistances de l’administration centrale du ministère du Travail, et à moindre degré dans la région Basse Normandie.

● L’organisation du service France Domaine en région et en département est encore imparfaite

Le positionnement des responsables de la politique immobilière de l’État (RPIE) a paru incertain aux yeux du Rapporteur spécial, entre le préfet, le secrétaire général aux affaires régionales (SGAR), le TPG et les chefs de services ministériels, en particulier le représentant du ministère de l’Écologie (MEEDDM), en charge de la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Les RPIE sont désignés directement par le directeur général des Finances publiques et ne dépendent que de lui. Mais ils ne sont pas soumis hiérarchiquement aux TPG, qui sont les chefs du service des domaines ; placés auprès du TPG, ils sont les « points de contact » des préfets de région et des SGAR. Dans un pays où l’administration a été mise en place par Colbert et Napoléon, on a vu plus simple…

En outre le RPIE est assisté d’un collaborateur (directeur divisionnaire, inspecteur principal, trésorier principal…) et d’une cellule dont les moyens sont redéployés par le TPG de région. Cette cellule peut également comprendre des personnels d’autres administrations, notamment du ministère de l’Écologie (MEEDDM). Les RPIE sont animés par le service France Domaine qui les réunit régulièrement. Le RPIE anime un réseau de RPIE départementaux placés auprès des directeurs départementaux des Finances publiques ou des TPG des départements. Il fait appel au service du domaine, aux services de la direction départementale des Finances publiques et aux autres services chargés de la politique immobilière dans les autres administrations déconcentrées. Il travaille en concertation avec les personnes placées auprès du préfet ou du SGAR. Le RPIE sollicite le service des domaines « autant que de besoin ». Ce service continue par ailleurs à assumer ses missions dévaluation et de conseil auprès des collectivités territoriales.

Les déplacements effectués par le Rapporteur spécial ont montré que les acteurs de terrain arrivaient à travailler convenablement de façon pragmatique. L’absence de cadre institutionnel suffisamment établi nécessite cependant de devoir compter sur la bonne volonté des intervenants. Le Rapporteur spécial souligne la fragilité d’une telle construction administrative où les services affectés à la gestion immobilière dans le département et dans la région ne sont pas individualisés. Dans un environnement où les résistances des ministères sont fortes et les réseaux constitués puissants (au premier rang desquels les réseaux du Trésor et des services fiscaux fusionnés au sein de la DGFiP), la visibilité et l’autorité des services chargés de l’immobilier sont un pré-requis à la réussite de leur action.

● La gestion des cités administratives doit entrer dans le droit commun

Le Rapporteur spécial a constaté qu’il existait un décalage important entre le régime applicable aux cités administratives et le nouveau dispositif des conventions d'occupation. Ces cités continuent à être gérées par la Commission interministérielle de la politique immobilière de l'État (CIPI) qui est placée sous l’autorité des services du Premier ministre. Le ministre chargé du domaine est ainsi placé en porte à faux avec services du Premier ministre. Il y a une contradiction manifeste entre ces deux modes de gestion, baux d’occupation d’une part et quasi copropriété d’autre part. En effet les cités administratives font l’objet d’une gestion lourde et complexe qui est à présent inadaptée : la fonction du propriétaire est diluée (le service France Domaine n’est qu’associé) ; les ministères restent maîtres des décisions d’investissement sur les parties dites « privatives » ; les préfets n’ont pas de réel pouvoir d’administration ; le mode de financement entrave la gestion, la conduite des opérations est peu efficace.

Il y a désormais urgence à remettre à plat le système de gestion des cités administratives en conformité avec la nouvelle politique immobilière de l’État. Le mode de gestion des cités administratives doit être mis en conformité avec le décret du 1er décembre 2008 supprimant le régime de l’affectation, en remettant en cause le modèle de la copropriété. Il convient de confier la maîtrise de l'investissement au propriétaire, incarné par le service France domaine, celui-ci passant convention avec les autres acteurs intéressés que sont la CIPI et la cellule technique en charge des travaux.

B.– LE CAS D’UNE RÉGION QUI AMORCE SA GESTION IMMOBILIÈRE : LA BASSE NORMANDIE

Le Rapporteur spécial a effectué une mission de contrôle auprès des services de la préfecture de la région Basse Normandie le 27 mai 2009. Le Rapporteur spécial a été reçu par M. Laurent de Galard, secrétaire général aux affaires régionales (SGAR), M. François Berges, trésorier payeur général (TPG), M. Guy Marnier, conservateur des hypothèques, responsable de la politique immobilière de l’État (RPIE) de la région et M. Yves Baron, RPIE du département du Calvados.

Les trois départements de Basse Normandie ne font pas partie des 25 départements expérimentaux qui doivent élaborer des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) en 2009. À la date de la mission du Rapporteur spécial, le parc immobilier utilisé ne faisait pas encore l’objet d’un recensement ni a fortiori d’une évaluation. Plusieurs ministères (Justice, Défense) contestent le critère de 50 % de surfaces de bureau pour que leurs bâtiments n’entrent pas dans le champ d’application du dispositif des loyers budgétaires. Les conventions d’utilisation, qui devront être conclues entre le service France Domaine et les administrations occupantes, seront négociées ultérieurement.

Les moyens consacrés à la politique immobilière de l’État dans la région comprennent un RPIE à 50 % de son temps (le reste en tant que conservateur des hypothèques), un adjoint de catégorie A à 50 % de son temps et un autre à 80 % de son temps (total de 1,8 ETPT). Le RPIE de la région Basse Normandie est relayé par trois RPIE départementaux, chacun pour 50 % de leur temps de travail, dans les départements de la région : Calvados, Manche et Orne (total 1,5 ETPT). Par ailleurs les services des Domaines en département « effectuent des prestations pour les RPIE sans qu’il soit possible aujourd’hui d’en chiffrer la proportion faute d’un outil de mesure adapté ». Le Rapporteur spécial note que l’identification d’agents publics spécifiquement chargés de l’immobilier de l’État en région et département est une bonne chose ; il s’agit cependant d’un début, avec des effectifs encore très réduits affectés à la gestion immobilière.

La structure de pilotage de l’immobilier au niveau de la région et des départements semble se limiter à un cadre informel de réunions entre les RPIE, les préfets, les TPG et les chefs de service régionaux et départementaux. Les RPIE participent aux réunions sur le plan de relance, aux comités de mise en place de la réforme de l’administration territoriale, aux travaux de la cellule technique du ministère de l’Écologie (MEEDDM) et de mise en œuvre des audits des bâtiments domaniaux (thermique, accessibilité…). Le RPIE de région indique que le dispositif de suivi des indicateurs de performance est en cours d’élaboration (fiches bâtimentaires en cours de collecte, et Chorus RE-FX qui intégrera ces fiches en cours de déploiement). Il indique que le suivi de l’immobilier des opérateurs de l’État installés dans la région est prévu en 2010, après les travaux consacrés aux services administratifs de l’État. Cependant le recensement de l’immobilier de ces opérateurs, tout au moins pour les plus gros d’entre eux, semble de prime abord plus difficile que pour les services de l’État.

Le RPIE régional a indiqué au Rapporteur spécial que son arrivée dans la région avait bien été reçue par les chefs d’administration locaux, coopératifs et conscients que les RIE sont là pour les aider dans leurs projets immobiliers. Un accord existe sur le respect de la norme de 12 m2 par agent. En revanche, les syndicats émettent des craintes relatives aux éventuels déménagements. Le RPIE a insisté sur la nécessité de promouvoir le caractère interministériel des professionnels publics de l’immobilier (ingénieurs des grands corps) et leur travail en commun. Il a néanmoins indiqué que les décisions de localisation des services, dans le cadre de la RéATE, seraient prises avant l’établissement des SPSI, ce qui n’est pas sans attiser les craintes du Rapporteur spécial. Le diagnostic des SPSI était prévu pour être achevée avant l’été 2009. Le recensement semble ne pas poser de problème particulier, avec une bonne adhésion des services occupants, et un bon système de contrôle. La partie prospective des SPSI était prévue pour la fin de l’année 2009. Or en application des décisions prises dans le cadre de la RGPP, l’application de la réforme de l’administration territoriale doit être opérationnelle au plus tard le 1er janvier 2010.

Il a été indiqué au Rapporteur spécial que le ratio de 12 m2 par agent ne pouvait se concevoir que comme une cible. Les bâtiments anciens dans lesquels sont installés de nombreux services comportent beaucoup de place perdue et il faut partir d’un ratio de 25 m2 par agent. Le principe d’autofinancement de la réorganisation administrative semble atteignable avec des services disposant de terrains ou bâtiments libérables (équipement, douane…). Cependant aucun chiffrage, même provisoire, d’un tableau financier pluriannuel n’a été présenté au Rapporteur spécial lors de son déplacement. Seul un tel tableau aurait démontré la réalité des économies réalisées.

Un bon exemple de gestion a cependant été constaté dans le département de l’Orne. La cité administrative de ce département n’avait pas été réorganisée depuis longtemps et les vagues successives de décentralisation avaient entraîné des différences de ratio d’occupation des bureaux pouvant aller du simple au double. La RéATE a été l’occasion de revoir l’occupation de la cité administrative et une réorganisation interne jointe à une densification a permis de loger tous les services départementaux dans cette cité, en libérant d’autres immeubles.

Il semble que les services des domaines utilisent peu les compétences en provenance du privé pour les tâches dont ils ont la charge, la raison invoquée en étant leur coût élevé et l’acceptabilité par les fonctionnaires de ces intervenants extérieurs à l’administration.

Si le RPIE de région a paru fortement mobilisé sur la gestion immobilière, le SGAR, également rencontré par le Rapporteur spécial, en l’absence du préfet, a paru plus en retrait. Le fait que les trois départements de la région ne figurent pas dans les 26 départements expérimentaux a « justifié » l’absence de réponse à de nombreuses questions posées par le Rapporteur spécial.

Le SGAR a exposé la situation immobilière du TGI de Caen, actuellement hébergé dans un bâtiment historique qui est en grande partie la propriété du conseil général. Une réhabilitation du bâtiment, pour un coût estimé à 60 millions d’euros, avait fait l’objet d’une acceptation de principe de la part du précédent directeur général de l’Administration et de l’équipement (DAGE). Le tour de table du financement associait les collectivités territoriales concernées. Le départ du directeur de la DAGE, à l’occasion de sa transformation en service des Supports et des moyens (S2M), a entraîné la remise en cause de l’accord. Il semble que le directeur de l’AMOTMJ, lui préfère maintenant la construction d’un bâtiment nouveau sur un site encore à définir et qui ne soit pas trop éloigné de la Cour d’appel de Caen. Le préfet et le chef de cour n’ont pas été consultés sur ce revirement. La présidente du conseil général, Mme Anne d’Ornano, a réagi auprès du ministre de la Justice en indiquant que si l’on persistait dans cette voie le conseil général se retrouverait avec « sur les bras » un bâtiment très délabré dont il ne saurait pas quoi faire, sans parler de l’éloignement même relatif de la cour d’appel et des cabinets d’avocat. Le Rapporteur spécial voit dans cette affaire l’illustration des dysfonctionnements évoqués plus haut au sein des différentes structures chargés de l’immobilier au ministère de la Justice.

C.– LE CAS D’UNE RÉGION QUI EXPÉRIMENTE DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES LES INSTRUMENTS DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE : LA RÉGION RHÔNE-ALPES

Le Rapporteur spécial a effectué une deuxième mission de contrôle auprès des services de la préfecture de la région Rhône-Alpes le 3 juin 2009. Il a été reçu par M. Jacques Gérault, préfet de région, ainsi que par M. René Bidal, secrétaire général aux affaires régionales (SGAR), M. Paul-Henri Watine, trésorier payeur général de région (TPG), M. Gérard Morier, responsable de la politique immobilière de l’État (RPIE) de région, Mme Pascale Prouvirault, chargée de mission au SGAR, Mme Marie-Helène Bovery, chef des services du Trésor du Rhône, Mme Catherine Doriath, responsable du service France Domaine du Rhône, M. F. Bernadet, du service France Domaine, M. Michel Thévenet, du service France Domaine, M. Guy Levi, de la direction départementale de l’équipement du Rhône, M. Philippe Le Denvic, de la direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE), et M. Michel Delarue, de la direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP).

La région Rhône-Alpes est en avance en matière de gestion immobilière, car elle expérimente depuis 2006 une mutualisation de l’entretien et plusieurs de ses départements font partie de ceux qui sont soumis aux loyers budgétaires et à l’obligation d’établir un SPSI.

La mise en œuvre des loyers budgétaires, entreprise à partir de 2008 dans l’agglomération lyonnaise, sera généralisée en 2010 dans tous les départements. Le montant des loyers perçus en 2009 s’élève à plus de 20 millions d’euros. En région Rhône-Alpes comme dans d’autres régions, la mise en œuvre des loyers budgétaires n’a pas été sans difficultés. Les services du Domaine indiquent que les surfaces inscrites sur les inventaires sont imprécises, non harmonisées et parfois même erronées. Plusieurs ministères (Justice, Défense) ont contesté la qualification de bureau attachée à leurs immeubles. Les services locaux du ministère de la Défense auraient même reçu l’instruction de ne pas collaborer en ne transmettant pas les informations nécessaires pour établir les loyers budgétaires…

Le SPSI de l’agglomération lyonnaise a été rendu au préfet du Rhône en avril 2008. Ce document a été enrichi pour la partie diagnostic à l’ensemble du département en mars 2009. Le TPG de région a indiqué au Rapporteur spécial que la difficulté d’avoir été préfigurateur a résulté du fait que les instruments juridiques et financiers n’existaient pas encore et que les ministères n’étaient pas coopératifs. La suppression du régime de l’affection et la création des outils budgétaires a permis de lever ces blocages. Le TPG de région estime que la logique en « tuyau d’orgue » en matière immobilière a vécu. Les ministères sont maintenant prêts à jouer le jeu dans le cadre d’une vraie mutualisation. Des résistances apparaissent encore ici ou là, comme par exemple dans le cadre de la mutualisation entre la police et la gendarmerie, qui sont maintenant sous l’autorité unique du ministère de l’Intérieur.

L’installation des sept RPIE de région et de départements s’est effectuée en février et mars 2009. Quatre d’entre eux sont également chargés de missions domaniales anciennes. Les instructions écrites internes précisent bien que les RPIE « ne font pas partie des services de France Domaine » mais « collaborent avec eux ». Il n’est pas prévu à ce stade d’accroître les effectifs de la cellule placée auprès du RPIE, mais d’instaurer avec les équipes de France Domaine une relation de type « client-fournisseur ». Pour la première fois s’opère une distinction entre les fonctions immobilières et traditionnelles au sein des services du Domaine. La fonction de gestion immobilière est organisée de façon informelle sous la forme de cellules de pilotage régionales et départementales réunissant les préfets, le SGAR, les RPIE et le représentant du ministère de l’Écologie. Un pôle de compétences (centre de ressources) est constitué sous la forme d’un comité technique régional, qui associe les services des administrations de l’État disposant d’une expertise en matière immobilière : service France Domaine, équipement, antenne immobilière des administrations financières, police, rectorat… Lui sont associés, le cas échéant, des représentants des antennes régionales du ministère de la Justice et de la direction régionale du service infrastructure de la Défense.

Les équipes de France Domaine dans la région et ses départements sont constituées de 41 ETPT pour la gestion domaniale, de 62 ETPT pour les évaluations et de 22 ETPT pour la gestion des patrimoines privés. Ce sont ces services qui ont pris en charge les nouvelles missions liées à la politique immobilière de l’État. Il n’a pas été fait appel jusqu’à présent à des contractuels ou experts immobiliers en provenance du secteur privé, même si les contacts avec ces professionnels sont de plus en plus fréquents.

Un recensement des compétences en matière de gros entretien a été réalisé en 2008. De cette étude, il ressort une grande dispersion et un émiettement des emplois concernés par la gestion du gros entretien (plus de 80 structures). Il n’existe pas à ce jour de recensement exhaustif portant sur l’ensemble des agents affectés aux missions de gestion immobilière dans la région. Il n’existe pas non plus de système d’information de gestion immobilière assurant notamment une bonne connaissance des coûts liés à l’immobilier ; cela devrait être l’objet de Chorus.

Les services locaux de France Domaine sont tenus de procéder, chaque année depuis 2004, à l’évaluation sur place d’au moins 10 % des immeubles domaniaux occupés par les services de l’État ou des immeubles mis gratuitement à la disposition de l’État par les collectivités territoriales. Dans le Rhône, par exemple, 305 immeubles sont concernés. Depuis 2005, l’objectif annuel de 10 % est largement dépassé pour l’ensemble des départements de la région.

Une estimation du montant des travaux de gros entretien a été réalisée en juin 2007 pour les bâtiments domaniaux et les bâtiments locatifs ou mis à disposition pour lesquels les services de l’État assument les charges incombant au propriétaire. Le montant a été estimé autour de 29 millions d’euros pour l’ensemble des immeubles en région Rhône-Alpes. Selon les départements, ce montant représente entre 1 % et 5 % de la valeur des immeubles bâtis. Au-delà de cette enquête ponctuelle, le montant annuel des dépenses immobilières n’est pas connu. Sa connaissance nécessiterait des travaux de recherche et d’agrégation comptable qui n’ont pas été engagés à ce jour. Par ailleurs pour nombre de ministères, les crédits d’investissement ne sont pas délégués aux services déconcentrés et donc ne sont pas connus des préfets. Des audits portant sur l’énergie et l’entretien sont en cours sur 27 immeubles significatifs de l’agglomération lyonnaise. Ils permettront de prendre la mesure des travaux à effectuer et des immeubles à céder.

Les BOP relatifs au CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État et au programme Entretien des bâtiments de l’État sont ministériels, à l’exception de celui de la commission interministérielle de la politique immobilière de l’État (CIPI), dédié aux cités administratives d’État. De ce fait, l’affectation des crédits afférents est toujours décidée, au niveau central, par les services immobiliers des ministères. La nature interministérielle des crédits consacrés à l’immobilier de l’État dans le plan de relance offre un outil budgétaire qui peut être piloté au niveau territorial, sous l’autorité du préfet. Il reste à s’assurer que les crédits ne sont pas « fléchés » à partir des administrations centrales. Les services déconcentrés des ministères étant désormais occupants d’un patrimoine immobilier dont le propriétaire est le ministre chargé du Domaine, ce sont ses représentants locaux, les préfets de région et de département, qui devraient prochainement décider de l’affectation des crédits. Ce changement devrait être opéré progressivement avec la mise en place des loyers budgétaires par les services de France Domaine. Le pôle de compétence immobilier régional pourra alors jouer un rôle important dans la programmation pluriannuelle des opérations d’entretien. Il a été indiqué au Rapporteur spécial que la délégation au niveau régional des enveloppes budgétaires relatives à l’entretien du propriétaire devrait permettre d’uniformiser l’état et la qualité d’usage du patrimoine immobilier de l’État dans la région. L’objectif est d’augmenter progressivement la part de l’entretien préventif par rapport à celle du curatif. Le Rapporteur spécial a écouté avec satisfaction l’intérêt porté par le préfet de région pour une mutualisation complète des budgets d’entretien au niveau territorial afin d’accélérer le mouvement d’intégration en cours. Il en va de la réussite des opérations.

Concernant les audits et le plan de relance, une autorisation d’engagement (AE) globale a été déléguée au niveau régional. Cette pratique devrait permettre d’expérimenter une gestion interministérielle des crédits immobiliers. Les projets retenus par le plan de relance sont régulièrement étudiés au sein d’une cellule interministérielle qui suit leur état d’avancement. L’expérimentation du Rhône sur la réalisation d’audits thermiques, gros entretien et des conditions d’accessibilité aux personnes handicapées devait permettre de disposer des audits techniques sur 26 sites de l’agglomération lyonnaise (240 000 m² de surface utile brute) en septembre 2009. Certains audits thermiques et de gros entretien étaient d’ores et déjà disponibles. Pour les bâtiments concernés, une liste d’actions à mener a été établie, avec les coûts de travaux correspondants. Le comité technique régional a entrepris la campagne de généralisation des audits au plan régional. Les huit préfets de département viennent d’établir une liste interministérielle de sites à auditer. Un premier travail sur les fichiers immobiliers des départements a permis d’estimer à 1,1 million de m² (SUB) la surface totale à auditer pour la région. Au regard des prix observés lors de la consultation lancée dans le cadre de l’expérimentation du Rhône, une enveloppe de 3,6 millions d’euros serait ainsi nécessaire.

Il est prévu une enveloppe de 50 millions d’euros sur le plan de relance pour la réalisation des audits. Au moment du déplacement du Rapporteur spécial, 30 millions d’euros ont été alloués aux préfets de région. Les impératifs de consommation de ces crédits imposent une réalisation rapide des audits. Aussi, afin de faciliter leur mise en œuvre dans les départements, le comité technique régional a proposé une forme de mutualisation et un accord cadre va être mis en place au niveau régional.

Comme indiqué précédemment, un programme de travaux d'envergure visant la mise à niveau du parc immobilier de l’État pourra être lancé sur la base des préconisations issues des audits techniques. Il sera également possible de savoir si les objectifs fixés par le Grenelle pourront être atteints pour la région Rhône Alpes.

Il a été indiqué au Rapporteur spécial lors de son déplacement à Lyon que s’il est relativement aisé de tendre directement vers la norme de 12 m2 par agent lors de la prise à bail de locaux neufs, par contre la réduction de surfaces est plus contrainte, donc plus progressive, dans les immeubles anciens moins fonctionnels. De même la recherche d’une implantation géographique moins coûteuse doit, selon les responsables locaux, « être confrontée à l’offre disponible ainsi qu’à une bonne accessibilité par les transports en commun ».

Il n’existe pas actuellement de dispositif de suivi de la performance immobilière en région Rhône-Alpes. Les responsables locaux attendent que le module immobilier de Chorus propose cette fonction.

La majorité des opérateurs de l’État implantés en région Rhône-Alpes est regroupée à Lyon, qui compte plus de 300 occupations recensées. Pour l’ensemble de la région, 383 occupations ont été évaluées et 52 sont en cours d’évaluation. Les SPSI départementaux ne prennent pas en compte les locaux occupés par les opérateurs. Chaque opérateur doit fournir en 2010 un SPSI spécifique dans lequel malheureusement les services locaux de France Domaine ne peuvent pas intervenir. Certains opérateurs jouent plus le jeu que d’autres. Toutefois dans le cadre des réorganisations liées à la RGPP, le SPSI du Rhône et notamment le projet d’initiative locale (PIL) comprendra des regroupements entre opérateurs et services déconcentrés : FranceAgrimer pour la direction régionale de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt (DRAAF), l’ACSé pour la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS), l’ARH pour l’Agence régionale de santé (ARS). Des rapprochements sont envisagés : ADEME et ANAH avec la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL).

Les responsables locaux ont indiqué au Rapporteur spécial que la réorganisation des services dans le cadre de la RGPP entre dans sa phase de réalisation. Un projet d’initiative locale (PIL) a été créé dans la région Rhône-Alpes afin de mettre en commun les ressources des cessions immobilières des ministères pour financer les réimplantations nécessitées par la RéATE. Un scénario global de regroupement a été validé par le préfet le 13 mars 2009. Ce scénario est globalement équilibré financièrement (les abandons de baux compensent les nouvelles prises à bail). Pour autant, ces opérations impliqueront des coûts de transition entre les organisations immobilières actuelle et future : dépenses de rafraîchissement et réaménagements des locaux (5 millions d’euros dans le Rhône) et dépenses liées aux périodes de recouvrement entre les baux anciens et nouveaux (« tuilage » de 1,5 million d’euros), sans parler des coûts de déménagement et d’acquisition éventuelle de nouveaux mobiliers, à prévoir sur les budgets de fonctionnement des administrations. La perspective de plusieurs cessions devrait dégager des marges de manœuvre permettant de réaliser des travaux d’aménagement. Le préfet et ses collaborateurs ont insisté sur le fait qu’en trésorerie sur trois ans les opérations en tiroir (déplacements de services) nécessiteront une avance de fonds dont ils ne disposent pas actuellement. Le préfet a indiqué au Rapporteur spécial que la région Rhône-Alpes était prête et qu’elle attendait l’accord du ministre du Budget pour lancer les opérations.

Le préfet de région a indiqué au Rapporteur spécial que, grâce au projet d’initiative locale (PIL), pourraient être économisés au moins 13 millions d’euros sur 10 ans en matière de cessions et 300 000 euros par an pour les locations. Les économies seront fortes dans le Rhône alors que les dépenses s’accroîtront dans d’autres départements comme l’Ardèche. La solidarité devra jouer entre les départements. Le préfet de région a indiqué que certaines cessions seraient porteuses d’une plus grande quantité de valeur si elles étaient différées de quelques années. Le Rapporteur spécial constate que les services déconcentrés travaillent avec l’objectif de l’autofinancement de l’accompagnement immobilier de la RéATE, en reléguant au second plan les objectifs de performance immobilière dans une perspective globale à l’échelle du territoire. Il souhaite que les SPSI ne se limitent pas à la mise en œuvre immobilière de la RéATE. Une des difficultés est que les prévisions d’évolution des effectifs des différents ministères ne sont pas connues de façon centrale au niveau du préfet et qu’une incertitude d’environ 10 % prévaut. Or ces données ont un impact direct sur l’établissement des SPSI.

Les opérations immobilières touchent également des ministères qui ne sont pas inclus dans le champ de la RéATE. La réforme de la carte judiciaire aura des conséquences limitées dans le département du Rhône, se traduisant par la suppression du tribunal de prud’hommes de Givors et son regroupement avec celui de Lyon. Dans l’Isère la suppression des deux TGI et leur regroupement sur un site à construire présentera un coût important qui n’est pas encore évalué. Il en est de même pour les tribunaux de Montbrison (Loire) et de Belley (Ain). Or de nombreux tribunaux supprimés étaient hébergés dans des immeubles appartenant aux collectivités territoriales et l’abandon des sites ne rapportera pas d’argent à l’État. Les trois prisons lyonnaises sont en cours de désaffectation, les détenus ayant été transférés dans les nouvelles prisons de Corbas en avril dernier. La procédure de cession des sites est engagée. L’espace mémorial édifié sur le site de la prison de Montluc (lieu de détention de Jean Moulin…) et financé par le ministère de la Défense entraîne une perte de valeur de moitié (4 millions sur une valeur estimée à 8 millions d’euros). Les deux autres prisons, qui ont également mobilisé les associations lyonnaises de défense du patrimoine, font l’objet d’un appel à idée lancé par le préfet de région. Le service France Domaine plaide pour une démolition pure et simple afin de tirer le meilleur parti de la cession et en restituer le produit au ministère de la Justice.

S’agissant du ministère de la Défense, les établissements du 7ème régiment du matériel (RMAT) de Saint-Priest et de Rillieux-la-Pape cesseront leur activité respectivement en 2014 et 2012. La reconversion des sites donnera lieu à une concertation avec les collectivités territoriales qui maîtrisent l’urbanisme, pour obtenir une modification du PLU. Par ailleurs, la caserne de gendarmerie Raby à Bron sera transférée sur le site de Sathonay-Camp après construction d’un nouvel établissement dans le cadre d’un partenariat public-privé. Enfin, la direction interrégionale chargée des anciens combattants est appelée à disparaître en 2011 : en cas d’intérêt confirmé par une autre administration, l’immeuble de bureaux pourra faire l’objet d’un changement d’affectation ou d’une cession.

S'agissant de la DGFiP, les incidences immobilières de la fusion des services dans le Rhône conduisent à rationaliser les occupations immobilières actuelles en réduisant le nombre d'implantations et en optimisant les surfaces occupées, notamment des locaux domaniaux. Cela conduira à passer des 51 implantations actuelles, dont 5 sont déjà sur des immeubles communs, à 46 sites à l'horizon 2011.

III.– DEUX ÉTABLISSEMENT PUBLICS IMMOBILIERS SONT-ILS NÉCESSAIRES AU MINISTÈRE DE LA JUSTICE ?

L’Agence de maîtrise d’ouvrage des travaux du ministère de la Justice (AMOTMJ) et l'établissement public du Palais de justice de Paris (EPPJP). Le Rapporteur spécial a auditionné le 11 mars 2009 M. Jean-Pierre Weiss, directeur général de l’Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la justice (AMOTMJ) et de l'Établissement public du Palais de justice de Paris (EPPJP), accompagné de Mme Claudine Renoux-Fages, directrice des affaires juridiques, administratives et financières de l’Agence, à la suite de trois référés de la Cour des comptes :

– référé n 51243 du 2 mai 2008 relatif au projet de construction d'un nouveau palais de justice à Paris (EPPJP) et réponse du ministère de la Justice du 27 octobre 2008 ;

– référé n° 51777 du 22 juillet 2008 sur l'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la Justice (AMOTMJ) et réponse du ministère de la Justice du 20 avril 2009 ;

– référé n° 51778 du 22 juillet 2008 sur la fixation de la rémunération du directeur général de l'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la Justice (AMOTMJ) (réponses du ministère du Budget du 17 septembre 2008 et du ministère de la Justice le 13 mars 2009).

Le Rapporteur spécial avait rencontré préalablement le 11 février 2009 les magistrats de la Cour des comptes qui ont participé à ces référés : M. Alain Pichon, président de la 4ème chambre de la Cour des comptes, assisté de M. Gérard Moreau, conseiller maître, chef de section, et de M. Christian Michaud, rapporteur.

A.– LA TUTELLE DES AGENCES IMMOBILIÈRES DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE GAGNERAIT À ÊTRE RENFORCÉE

L'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la Justice (AMOTMJ) est un établissement public administratif sous tutelle du ministère de la Justice. Créée par le décret du 31 août 2001, elle a été opérationnelle à compter du 1er janvier 2002.

Par une déclaration unilatérale de son directeur général, et sans base légale (8), elle a pris le nom d'usage d’Agence publique pour l'immobilier de la justice (APIJ) en 2008. Le projet de loi pénitentiaire (n° 1506), actuellement en discussion devant les Assemblées, prévoyait un article de changement de nom. La discussion parlementaire a entraîné un déclassement de cette disposition qui relèverait, si le projet de loi est ainsi adopté, du domaine réglementaire (en pratique, un décret).

Communiqué de presse du 19 février 2008 :
changement de nom de l'AMOTMJ

« L’Agence de Maîtrise d’Ouvrage des Travaux du Ministère de la Justice (AMOTMJ) change de nom et devient désormais l’Agence Publique pour l’Immobilier de la Justice (APIJ).

Cette modification symbolise d’importantes évolutions dans la politique immobilière du Ministère de la Justice.

Avec son Directeur Général, Jean-Pierre Weiss, l’APIJ se prépare à devenir rapidement l’opérateur immobilier unique du Ministère au service des directions de programmes judiciaires et pénitentiaires, en tendant vers ses nouveaux objectifs :

● prise en compte du développement durable pour les nouveaux projets,

● engagement dans une nouvelle étape de progrès pour la maîtrise des coûts et de la qualité des opérations,

● développement de toutes les fonctions immobilières nécessaires au Ministère, y compris la valorisation des propriétés de l’État qui lui sont affectées et la revente du patrimoine rendu disponible,

● engagement, en appui des directions du Ministère, dans la réalisation des opérations immobilières nécessaires à la mise en place de la nouvelle carte judiciaire. »

Source : AMOTMJ-APIJ

Les termes du communiqué de presse diffusé le 19 février 2008 faisant de l’APIJ « l’opérateur immobilier unique du ministère » ne sont-ils pas en contradiction avec un pilotage stratégique par le ministère lui-même ?

Les termes « développement de toutes les fonctions immobilières nécessaires au Ministère, y compris la valorisation des propriétés de l’État qui lui sont affectées et la revente du patrimoine rendu disponible » sont-ils compatibles avec la nouvelle distinction entre État propriétaire (dont les compétences sont exercées par le service France Domaine) et ministère occupant ? Tentée un temps de couvrir un domaine d’action au-delà du périmètre du ministère de la Justice, l’AMOTMJ y a heureusement résisté.

Le constat effectué par la Cour des comptes est que les deux établissements publics compétents pour l’immobilier au ministère de la Justice ont cherché à reproduire ce qu’avait fait précédemment le ministère de la Culture - d’ailleurs avec un succès mitigé - avec l’établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels (EMOC, précédemment dénommé EPMOTC). Créé par décret le 19 mai 1998, l’EMOC était issu de la fusion de l’établissement public du Grand Louvre (EPGL) et de la mission interministérielle des grands travaux (MIGT). Les rapports publics annuels de la Cour ont montré que l’EMOC s’était souvent caractérisée par des retards de réalisation de travaux et des dépassements de budget.

Le Rapporteur spécial note que la création de structures immobilières propres à des ministères marque une volonté de s’affranchir des disciplines communes de la nouvelle politiques immobilière de l’État, impulsées par le ministre du Budget et mises en œuvre par le service France Domaine. Le service France Domaine ne dispose d’ailleurs pas de siège au conseil d’administration des deux agences immobilières du ministère de la Justice. Une simple circulaire commune du 14 octobre 2008 des services du ministère de la Justice et du service France Domaine a été émise pour « mettre en place un dispositif destiné à examiner les propositions formulées pour la mise en œuvre de la carte judiciaire dans la double perspective d’en réduire le coût et d’en garantir la date de livraison. » Plusieurs installations de tribunaux ont ainsi été permises par l’utilisation d’immeubles domaniaux disponibles du fait de réorganisations de services locaux.

La Cour des comptes a relevé le caractère insuffisamment précis des conventions de mandat passées entre l’Agence et le ministère. Elle note l’information insuffisante du ministère sur l’avancement des travaux et l’absence de référentiel en matière de délai, de coût et de qualité des constructions. La Cour constate que l’Agence pratique de fait une fongibilité financière entre les dotations des différentes opérations, sans mandat explicite de la part de son ministère de tutelle. L’Agence joue de la pluralité des tutelles (judiciaire, pénitentiaire, protection de la jeunesse…) pour s’en affranchir. De son côté, le ministère s’exonère de sa responsabilité politique et consent à laisser à l’opérateur le choix des arbitrages quand les moyens financiers ne permettent pas de mener tous les chantiers programmés.

L’AMOTMJ a transmis au Rapporteur spécial un exemple de convention de mandat pénitentiaire conclue initialement en 2003 avec le ministère pour la réalisation de maisons centrales. Les opérations nouvelles couvertes par la convention ont été prévues par des avenants successifs qui ont fait l’objet d’une délibération du conseil d’administration. Le tableau de chaque convention est tenu à jour et mis à disposition des équipes de projet et services de l’Agence, ainsi que des autorités de tutelle (via un lien extranet). Ce système de convention était lourd à gérer et il a été abandonné. Le nouveau dispositif conventionnel fixant le cadre des relations entre le ministère et l’Agence pour la gestion des opérations qui lui sont confiées est le protocole de maîtrise d’ouvrage, en vigueur depuis avril 2007. Le protocole fixe le cadre général des relations entre l’Agence et le ministère (il reprend en grande partie ce qui était répété dans le corps de chaque convention). Les annexes du protocole sont constituées par les fiches spécifiques à une opération, qui évoluent au fil du temps, chaque évolution (par exemple, commande de l’opération en étude préalable, puis passage de l’opération en phase opérationnelle, c'est-à-dire commande de réalisation de l’opération) étant soumise à l’approbation du conseil d’administration. L’Agence a sur son site Intranet le même suivi des opérations couvertes par le protocole que celui mis en place pour les conventions de mandat.

Le conseil d’administration de l’Agence examine depuis trois ans des indicateurs de performance, dont il a approuvé le contenu. Le Rapporteur spécial a reçu deux exemples de séries d’indicateurs. Une évolution de ces indicateurs est à l’étude pour prendre en compte, notamment, la dimension qualité et la satisfaction des usagers. Par ailleurs, le ministère du Budget a demandé au ministère de la Justice, comme aux autres départements ministériels, de synthétiser les indicateurs immobiliers et de produire les données pour les plus grosses opérations. Un modèle d’indicateurs a été mis au point. Il sera publié dans le prochain projet annuel de performances. Les opérations prises en charge par l’Agence mesurent la performance du ministère de la Justice en matière immobilière. Le ministère détient la maquette définitive de ces nouveaux indicateurs immobiliers. Le Rapporteur spécial regrette cependant l’absence d’un contrat d’objectifs et de moyens (avec définition d’une stratégie, d’objectifs et d’indicateurs) liant l’AMOTMJ et le ministère de la Justice (dans ses trois dimensions judiciaires, pénitentiaire et de protection judiciaire de la jeunesse). L’Agence reconnaît que c’est un projet dont le chantier devra être engagé, mais qu’il est relativement compliqué en raison des incertitudes sur les ressources budgétaires en investissement.

Le directeur général de l’Agence a indiqué au Rapporteur spécial qu’il avait conclu en juin 2008 une convention de partenariat avec le service France Domaine pour établir un partage des tâches dans les opérations de cession. L’Agence se voit confier, un peu comme sur le modèle de la mission de réalisation des actifs immobiliers du ministère de la Défense (MRAI), l’étude de valorisation des bâtiments désaffectés (prisons…), avant remise sur le marché. Le ministère de la Justice est intéressé par le droit de retour de 65 %. Le Rapporteur spécial aurait souhaité que le protocole d’accord aille au-delà de la collaboration en matière de cessions, en prévoyant par exemple les modalités de la prise en compte des orientations de la nouvelle politique immobilière de l’État, avec notamment le respect du ratio de 12 m2 par agent. Il a appris à l’occasion de l’audition du directeur général de l’Agence qu’était utilisée la notion de « surface judiciaire », c’est-à-dire n’incluant pas les salles des pas perdus dans les palais de justice… Or les instructions du service France Domaine sont claires et ne connaissent que les surfaces utiles et hors œuvre, nettes ou brutes. Il en va de la comparabilité des bâtiments selon une méthodologie harmonisée.

Concernant l’état d’entretien des immeubles occupés par le ministère de la Justice, le directeur général de l’Agence a précisé au Rapporteur spécial que les partenariats public-privé avaient amélioré la situation dans les établissements pénitentiaires. Or on sait l’ampleur du travail de réhabilitation à effectuer dans certaines prisons anciennes… Les palais de justice pâtissent quant à eux d’une insuffisance d’entretien pendant des décennies.

B.– QUELLE A ÉTÉ L’UTILITÉ DE L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC DU PALAIS DE JUSTICE DE PARIS (EPPJP) PENDANT CINQ ANS ?

La création du deuxième établissement public (EPPJP), par un décret du 18 février 2004, répondait au souci politique du précédent Président de la République d’accélérer le chantier de construction d’un nouveau site pour le palais de justice de Paris. Force est de constater que ce volontarisme n’a pas permis, pendant cinq années, de régler le différend de l’État avec la Ville de Paris sur le choix du site. Ce n’est que le 29 avril 2009, cinq ans après, que le Président de la République, Nicolas Sarkozy, annonçait que « la Cité judiciaire s’installera aux Batignolles ». Le Rapporteur spécial s’interroge sur l’utilité pour le ministère d’avoir conservé deux établissements publics distincts dans le même domaine, alors que le projet de construction d’un nouveau Palais de justice de Paris n’avait pas encore été lancé. Le Rapporteur spécial note en particulier le coût du concours international d’idée lancé en 2006, sur le site de Tolbiac, dont l’utilité n’a pas été démontrée, surtout depuis le choix des Batignolles. L’Agence indique que les résultats de ce concours, comme des autres études menées par l’EPPJP, ont été utiles pour définir ce que doit être le palais de justice des temps modernes, avec application pour les palais de justice de province… Le directeur général de l’Agence précise que les conseils d’administration des deux établissements publics ne sont pas identiques, car reflétant des interlocuteurs différents. Ainsi la Ville de Paris est fort justement représentée au sein du conseil d’administration de l’EPPJP. Par contre les deux établissements publics ont une seule et même équipe opérationnelle, dirigée par lui-même.

La subvention reçue par l’EPPJP du budget de l’État s’est élevée à 1 million d’euros en 2004, 1,7 million en 2005, 2 millions en 2006, 2,1 millions en 2007, 1 million en 2008 et 0,7 million en 2009, du fait du gel entraîné par la mise en attente du projet. Du fait de la reprise du projet, l’EPPJP estime à 2,5 millions d’euros la subvention qui serait nécessaire à fonctionnement en 2010, dans l’hypothèse d’une gestion du projet en maîtrise d’ouvrage. C’est le montant qui avait été prévu à son budget primitif pour 2008. Outre les frais de personnels à recalculer sur 15 ETPT, il faut financer sur le budget de fonctionnement des dépenses d’accompagnement de l’investissement (communication externe, frais d’expertise et de conseil), dont l’imputation comptable était précédemment prévue sur les comptes de classe 2 concernant la réalisation de l’opération. L’agent comptable a demandé la ré-imputation de ces dépenses sur la classe 6 (dépenses de fonctionnement de l’opération) et les comptes de classe 2 liés au fonctionnement de l’établissement. Ces dépenses étaient précédemment financées sur la dotation d’investissement. Si le projet est géré en PPP, la subvention sera établie sur d’autres bases. À ce stade, rien n’est tranché aujourd’hui et le budget prévisionnel pour 2010 ne sera présenté et voté qu’en décembre.

Le Rapporteur spécial regrette que le ministère de la Justice ait conservé une structure dormante pendant cinq ans. La décision récente relative au site des Batignolles, l’ampleur du projet et la nécessité d’associer la Ville de Paris au projet peuvent maintenant, et seulement maintenant, justifier l’existence de l’EPPJP. La construction du nouveau palais de justice de Paris est un projet qui devrait coûter environ 800 millions d’euros en travaux. L’ampleur de ce projet nécessitera une attention particulière de la commission des Finances et du Conseil de l’immobilier de l’État.

C.– LE RESPECT DES DÉLAIS ET LA MAÎTRISE DES COÛTS

La Cour des comptes relève la pratique d’une politique d’annonces ancienne du ministère de la Justice en matière immobilière, avec des autorisations d’engagement (AE) systématiquement supérieures aux crédits de paiement (CP) depuis 1995. En outre, dans les années 80 et 90, le changement d’affectation d’un procureur général entraînait en général une révision des chantiers, avec un surcoût de plus de 25 % demandé par les entreprises. La création de l’AMOTMJ a répondu au souci d’améliorer la programmation des travaux immobiliers et d’accélérer leur réalisation dans les domaines pénitentiaire et judiciaire. Or le mode de relation entre l’Agence et le ministère n’a jamais permis d’établir un tableau de bord chiffré permettant de suivre le respect des délais et des budgets. La programmation est certes mieux formalisée et les modifications font désormais l’objet d’avenants.

L’Agence a présenté au Rapporteur spécial un exemple de tableau immobilier mensuel de suivi des opérations judiciaires et pénitentiaires, adressé, après mise à jour, aux directions du ministère et au cabinet. Par opération, sont rappelées les données de contexte et de synthèse, le planning et les budgets ; sont ensuite détaillés les coûts et les plannings, avec indication par phase d’avancement des principaux éléments à retenir. Mais les conséquences sur les coûts ne sont pas mieux prises en compte. Le directeur général de l’Agence a indiqué au Rapporteur spécial qu’en application d’une procédure mise en place à la fin de l’année 2008, les nouvelles commandes présentées par le ministère comportent systématiquement des coûts plafond à ne pas dépasser. Il estime que les délais des chantiers pénitentiaires sont très performants, avec des durées de 24 mois pour des établissements de 600 à 700 places. Les délais sont selon lui moins bien tenus pour les chantiers judiciaires en raison de l’insuffisance des ressources budgétaires.

La Cour des comptes a procédé à une analyse comparative entre l’AMOTMJ et l’administration du ministère de la Justice (DAGE/SDAIL) et a conclu à l’absence d’amélioration apportée par l’opérateur sur trois plans : la productivité de la structure (comparaison des ratios opération / agents) ; les durées moyennes de réalisation ; les coûts moyens des opérations (ratios coût / m² SHON et par agent). La Cour « a mesuré les résultats obtenus par l’Agence en les comparant avec ceux de l’administration dans la conduite d’opérations analogues. Telle quelle cette comparaison ne fait pas apparaître un avantage dans l’efficience de l’action de l’Agence, tant en termes de délai d’exécution des opérations que de maîtrise des coûts. A contrario elle conduit à estimer que l’Agence doit pour l’avenir améliorer ses performances dans ce domaine. » Elle précise « qu’il conviendrait que le ministère de la Justice définisse, en accord avec son opérateur, des référentiels en matière de délais, de coût et de qualité des constructions, au rang desquels pourraient être appréciés les reports et avenants, qui demeurent très fréquents et, semble-t-il, largement imputables au ministère. De ce point de vue, la création de l’établissement public et la formule des conventions de mandat, si elles ont apporté formalisation et transparence dans les relations avec le donneur d’ordre, n’ont pas permis sur la période contrôlée un progrès substantiel dans la tenue des délais ou des enveloppes des différentes opérations. »

La Cour reconnaît cependant que « l’apport de l’opérateur reste toutefois incontestable à deux égards. En premier lieu, l’AMOTMJ a fait preuve d’une réelle capacité à alimenter, voire à susciter, la réflexion concernant les « concepts nouveaux » ou renouvelés (maîtrise d’ouvrage, organisation par projet, qualité architecturale, PPP…), étant observé que nombre de ces travaux ou de ces initiatives n’ont pas trouvé de suite ; la création de l’agence a permis une meilleure identification des responsabilités entre les donneurs d’ordre et l’opérateur, quel que soit le chemin qui reste à parcourir pour simplifier l’organisation immobilière du ministère et accroître la transparence de l’opérateur à l’égard de l’État. »

L’Agence a indiqué au Rapporteur spécial qu’il fallait relativiser sensiblement ces critiques, en raison d’erreurs sur le décompte des opérations suivies, sur l’effectif, ainsi que de la non-prise en compte des spécificités du portefeuille Antilles. L’analyse ne relèverait pas que les opérations sont plus complexes et résultent souvent d’une étude antérieure infructueuse avant d’être confiées à l’AMOTMJ. En outre les « études préalables » incluent les temps de négociation de participations financières des collectivités. Cet exercice de comparaison des durées de réalisation se focaliserait excessivement sur certaines opérations judiciaires, mais ignorerait l’efficacité démontrée par l’Agence sur les opérations pénitentiaires qui représentent pourtant la majeure partie de son activité et qui ont constitué la priorité politique de la LOPJ. L’Agence estime enfin que l’exercice de comparaison des coûts d’opérations auquel s’est livrée la Cour est contestable du double point de vue de la méthode suivie et de l’exactitude des données.

D.– LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE L’AGENCE DE MAÎTRISE D’OUVRAGE DES TRAVAUX DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE (AMOTMJ) ET LES SERVICES DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE GAGNERAIT À ÊTRE PRÉCISÉE

La création des deux établissements publics immobiliers au sein du ministère de la Justice n’a pas été suivie par la disparition des structures chargées de l’immobilier tant dans les services centraux que déconcentrés de ce ministère. Il s’ensuit des doublons en matière de prérogatives et de pouvoirs. La Cour note que « l’AMOTMJ et la direction de l’administration générale et de l’équipement conduisent des opérations de montant comparable, leurs champs d’intervention n’étant pas clairement distingués ». On a l’impression que le ministère n’est pas allé au bout de la démarche de l’établissement public en conservant la compétence des services centraux, avec le défaut d’établir une concurrence entre les deux structures. Or l’AMOTMJ a un coût de fonctionnement non négligeable ; ses agents (ingénieurs des grands corps) sont en général mieux payés et ont tendance à s’estimer plus compétents que les agents du ministère. Le directeur général de l’Agence a précisé au Rapporteur spécial que sa compétence était quasi générale en matière d’immobilier pénitentiaire, avec l’exception des quartiers de courte peine, et pour les détenus en semi-liberté. S’agissant de l’immobilier judiciaire, un arbitrage du directeur de cabinet de la ministre de la Justice du 10 janvier 2008 a défini des seuils (3 millions d’euros) à partir desquels l’Agence est mandatée. En deçà, les antennes régionales de l’équipement (ARE) restent compétentes. Entre 3 et 7 millions d’euros l’Agence travaille en association avec les ARE et au-delà de façon autonome. Cette décision vaut uniquement pour les chantiers non encore ouverts. Cette organisation est encore complexe : on est loin de l’opérateur unique appelé de ses vœux par le ministère. Le directeur général de l’Agence précise que la décision de principe d’aller vers l’opérateur unique a été prise, mais qu’il reste encore à la concrétiser…

En outre l’Agence a tendance à externaliser les travaux qui lui sont confiés auprès de sous-traitants en provenance du secteur privé, ainsi des cabinets d’avocats pour mettre en place des opérations de partenariat public privé avec les grands constructeurs. Elle n’a jamais réussi à complètement internaliser les compétences techniques en matière immobilière. Par ailleurs, autant l’Agence pratique une conception extensive de ses compétences dans le lancement de grands travaux, autant elle délaisse les tâches de gestion une fois les travaux finis. Ainsi la gestion quotidienne des partenariats public-privé est en général confiée aux responsables opérationnels (directeurs de prison…), pour faire vivre des contrats de plusieurs milliers de pages rédigés par les juristes des grands constructeurs. C’est le pot de terre contre le pot de fer… La Cour note également que l’utilisation de partenariats public-privé entraîne un coût budgétaire immédiat et une dette budgétaire à préciser.

Le Rapporteur spécial estime qu’il est temps de clarifier la situation et d’établir une distinction nette entre les compétences de l’Agence et des services du ministère : à l’Agence une délégation de compétence sur l’ensemble des grands travaux ; à l’administration centrale le pilotage, le suivi et le contrôle du budget, avec des instruments de restitution d’information (reporting) adéquates.

Le Rapporteur spécial s’interroge sur la répartition des tâches entre l’AMOTJM / EPPJP et le service des supports et moyens (S2M) (9), ex-direction générale de l’Administration et de l’équipement (DAGE), du ministère de la Justice. Quelle est en particulier la répartition des tâches entre l’AMOTMJ et les grandes directions du ministère de la Justice (administration judiciaire, administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse), avec les antennes régionales de l’équipement (ARE) ? Il faut également mentionner les services administratifs régionaux (SAR), constitués au sein de chaque cour d’appel, et qui sont chargés de l’entretien bâtimentaire courant. Quelle est également la répartition des tâches entre l’EPPJP et le service immobilier du Palais de justice de Paris, qui dépend de l’administration centrale ? Qui gère l’entretien lourd (entretien dit du propriétaire en application des articles 605 et 606 du code civil) des immeubles du ministère de la Justice ? Qui est chargé des chantiers de mise aux normes (réglementaires, sécurité, Grenelle de l’environnement…) ? Qui gère les baux conclus par le ministère ? Quelles est la part de l’AMOTJM / EPPJP dans l’élaboration du schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) du ministère de la Justice ?

E.– L’ACTIVITÉ DE L’AGENCE DE MAÎTRISE D’OUVRAGE DES TRAVAUX DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE (AMOTMJ) EST MULTIFORME

Le ministère de la Justice confie à l’AMOTMJ la conception et la gestion des grands projets immobiliers relevant des différentes directions du ministère (services judiciaires, administration pénitentiaire, protection judiciaire de la jeunesse…). L'AMOTMJ réalise aussi des études techniques à la demande du ministère. Elle gère également des projets de valorisation, avant cession par France Domaine, de constructions et bâtiments dont le ministère a déclaré l'inutilité pour ses services.

Le ministère de la Justice avait au début de la décennie, choisi de pérenniser et de renforcer une direction de mission – la délégation générale au programme pluriannuel d’équipement (DGPPE) –, qui avait conduit, pour le compte du ministère, depuis 1987, plusieurs programmes de constructions neuves, d’abord dans le champ pénitentiaire, sous le nom de délégation à la réalisation d’établissements pénitentiaires, (« programme 13 000 » initié par M. Albin Chalandon), puis dans le champ judiciaire (dans le cadre notamment de la loi de programmation pour la justice, initiée par M. Pierre Méhaignerie).

L’établissement est rapidement monté en charge, après sa création, pour permettre notamment la mise en œuvre de la loi d’orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) du 9 septembre 2002, couvrant la période 2002-2007. Ses missions ont été élargies en 2004 au montage de contrats et projets en partenariat public privé (article 205 de la loi du 9 mars 2004 relative aux adaptations de la justice aux évolutions de la criminalité) et à la possibilité d’exercer la maîtrise d’ouvrage de plein exercice.

L’élargissement du champ des missions de l’Agence a trouvé sa concrétisation à travers la publication d’un nouveau décret, en date du 22 février 2006, abrogeant le décret du 31 août 2001 précité. Il a redéfini le cadre des relations contractuelles de l’établissement avec le ministère de la Justice, autorisé l’établissement à réaliser les projets immobiliers qui lui sont confiés sous toutes les formes de la commande publique (maîtrise d’œuvre, conception réalisation, contrat de partenariat conclu en application de l’article L. 2122-15 du code général des propriétés des personnes publiques ou en application de l’ordonnance du 17 juin 2004 relative aux contrats de partenariat public privé). Il a aussi élargi ses missions à l’expertise, à l’assistance et au conseil technique du ministère et à la valorisation patrimoniale.

Les équipes de l’Agence étaient chargées début 2008 de la réalisation, dans les champs judiciaire et pénitentiaire,  d’un peu plus de 40 opérations en études préalables et de 42 opérations en mandat de maîtrise d’ouvrage. Ces opérations sont réalisées après concours de maîtrise d’œuvre ou, dans le champ pénitentiaire, en conception réalisation. L’Agence a, en outre, préparé et signé, pour le compte du ministère, 3 contrats de partenariat public privé, en vue de la construction de 10 établissements pénitentiaires. Un contrat de partenariat pour la réalisation de 8 établissements relevant de la protection judiciaire de la jeunesse est en cours de préparation.

Pour la réalisation des opérations en études préalables et mandat et l’assistance du ministère pour la conclusion de contrats de partenariat, l’Agence avait reçu du ministère, fin 2007, 2 milliards d’euros d’autorisation d’engagement et 870 millions euros de crédits de paiement (montants cumulés depuis la création de l’Agence).

Dans le champ pénitentiaire, la baisse de l’année 2005 est liée à l’achèvement du « programme 4 000 » en attendant la montée en charge du programme de la loi de programmation pour la justice (LOPJ). Dans le champ judiciaire, l’année 2007 marque l’achèvement d’un ensemble de constructions. L’année 2008 est une année de transition, en attendant des commandes nouvelles liées à la mise en œuvre de la carte judiciaire.

S’agissant des programmes en partenariat public privé, l’Agence prépare et gère les contrats (trois signés et en cours) pour le compte du ministère jusqu’à la livraison des bâtiments. Les contrats en cours représentent un total de 1,5 milliard d’euros d’autorisations d’engagement pour la part investissement (hors fonctionnement des établissements).

Le budget de fonctionnement de l'Agence s’élève en 2008 à 10,3 millions d’euros TTC, dont 67 % de dépenses de personnel (85 emplois ETPT).

L’AMOTMJ est engagée dans plusieurs chantiers.

– Opérations judiciaires

Le ministère de la Justice a pris en charge la gestion immobilière des palais de justice après les lois de décentralisation de 1986. Après l’achèvement de la première loi de programmation pour la justice, au début des années 1990, qui avait permis au ministère de la Justice d’intéresser de grands architectes (Gaudin, Nouvel, Rogers, Vasconi…) à la conception de palais de justice, un nouveau plan de construction a été décidé dans le cadre de la nouvelle loi de programmation (LOPJ 2002-2007) et de nouvelles commandes ont été passées à l’Agence.

L’Agence a aussi reçu commande de réalisation de nombreuses études préalables pour la construction, la réhabilitation ou la restructuration de nouveaux palais de justice. Le programme initialement prévu a été remodelé pour tenir compte de la mise en œuvre de la réforme de la carte judiciaire.

L’Agence a aussi reçu mission pendant cette année de proposer au ministère de la justice les éléments de conception des futurs palais de justice et de proposer les bases de nouveaux programmes, prenant en compte de nouveaux modes d’organisation du travail, le développement de la télématique et le souci de définir des bâtiments économes en énergie.

– Opérations pénitentiaires

L’Agence est engagée, jusqu’à 2012, dans un calendrier très dense de livraison de nouveaux établissements pénitentiaires, en réponse aux commandes qui lui ont été passées dans le cadre de la LOPJ. 13 200 nouvelles places de détention seront ainsi mises à la disposition de l’administration pénitentiaire : 9 200 places pour majeurs en métropole, 1 600 places pour majeurs en outre-mer, 420 places pour mineurs, 2 000 places permettant de nouvelles modalités de prise en charge (quartiers de semi-liberté, quartiers pour courtes peines). Les programmes sont réalisés sous toutes les formes de la commande publique : maîtrise d’œuvre, conception-réalisation, programme de partenariat public privé en AOÛT/LOA (article L. 2122-15 du code général des propriétés publiques) et relevant de l’ordonnance du 17 juin 2004. L’Agence est en outre engagée dans la poursuite de la réhabilitation de la prison de Fleury-Mérogis et de celle des Baumettes.

L’Agence doit recevoir prochainement de nouvelles commandes, s’inscrivant dans le cadre des préconisations de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Elle met en œuvre pour ce faire, au préalable, des recherches foncières. Elle engage également, en accord avec le service France Domaine, des démarches de valorisation, avant cession, des établissements pénitentiaires qui sont fermés au fur et à mesure de la livraison des nouveaux établissements.

De même que dans le champ judiciaire, l’Agence a reçu commande du ministère de la Justice de proposer de nouveaux programmes pour les futurs établissements pénitentiaires. Ces programmes devront concilier au maximum les contraintes de maintien de la sécurité, de baisse des coûts de construction à la place et d’intégration des objectifs d’économies d’énergie et de réduction des coûts d’exploitation-maintenance.

– Opérations de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ).

L’Agence est engagée dans la construction de 8 établissements d'hébergement pour mineurs en partenariat public-privé de type AOÛT/LOA, dont 5 établissements de placement éducatif (EPE) et 3 centres éducatifs fermés (CEF).

Par convention en date de juillet 2007, la DPJJ a confié à l’Agence une mission d’étude pour la réalisation de 8 foyers d’hébergement pour mineurs en partenariat public privé. Le contrat comprendra les prestations suivantes : financement, conception, construction, mise à disposition sous forme de location, et maintenance des 8 établissements. Chaque établissement fera l’objet d’une tranche du contrat qui nécessitera la délivrance préalable de l’autorisation d’occupation temporaire du domaine de l’État (AOÛT) du site après acquisition par l’Etat. Les 8 établissements seront situés dans les départements suivants : Landes, Nord, Pas-de-Calais, Seine-et-Marne, Charente-Maritime, Eure, Vendée et Finistère.

Les établissements de placement éducatif (EPE) reçoivent des jeunes, délinquants ou en danger, pour une prise en charge éducative en hébergement sur décision du juge. Ces établissements seront implantés en milieu urbain et proposeront une solution adaptée à chaque situation. Sans être fermés, ils devront permettre à l’équipe éducative d’assurer la surveillance des jeunes qui lui sont confiés.

Les centres éducatifs fermés (CEF) sont de nouvelles structures qui viennent compléter les dispositifs existants de la DPJJ, en proposant une alternative à l’incarcération en milieu pénitentiaire par une prise en charge éducative. Ils sont destinés à l’accueil de délinquants multirécidivistes ou multiréitérants, placés par les magistrats suite à une mesure de contrôle judiciaire ou un sursis avec mise à l’épreuve.

F.– LE COÛT DES TRAVAUX SUR LES BÂTIMENTS JUDICIAIRES

La réforme de la carte judiciaire a des conséquences immobilières présentant un coût budgétaire très important.

On a vu que les travaux sur les immeubles judiciaires sont partagés entre l’AMOTMJ et les services du ministère de la Justice. Le partage des tâches veut que l’Agence prenne en charge les grosses opérations, les services déconcentrés du ministère (les antennes régionales de l’équipement - ARE) s’occupant des plus petites.

Les informations transmises au Rapporteur spécial par le ministère de la Justice et par l’AMOTMJ relative au montant des travaux restant à effectuer sur l’immobilier judiciaire montrent un total sur 10 ans de 385,7 millions d’euros pour les opérations de la carte judiciaire (126,9 millions d’euros portés directement par le ministère et 258,8 millions d’euros portés par l’Agence) et un total de 1 267,7 millions d’euros pour les opérations hors carte judiciaire (458,7 millions d’euros portés directement par le ministère et 809 millions d’euros portés par l’Agence). Au total, les travaux portés par le ministère et son agence s’élèvent à 1 653,4 millions d’euros. Il convient de préciser que la programmation au-delà de 2014 n’est pas encore totalement provisionnée et que le montant sera sans doute plus élevé. Le Rapporteur spécial se félicite néanmoins de l’effort de programmation et de transparence ainsi fourni.

Le Rapporteur spécial s’interroge cependant sur les critères qui ont prévalu à la distinction entre travaux relevant de la réforme de la carte judiciaire et hors carte judiciaire. La tentation pourrait être forte pour l’Agence et pour le ministère de classer dans la catégorie « hors carte judiciaire » des travaux qui pourtant sont la conséquence directe de la réforme, afin d’en minorer le montant global tel qu’il est présenté au Parlement.

On peut s’étonner des chiffrages successifs des coûts immobiliers de la réforme de la carte judiciaire. Le chiffre de 545 millions d’euros avait été mentionné par M. Rémi Heitz, alors directeur de l’Administration générale et de l’équipement (DAGE), le 9 avril 2008 devant la commission des Finances du Sénat. Les documents budgétaires présentés au moment de l’examen du projet de loi de finances pour 2009 évoquaient déjà le montant de 385 millions d’euros sur cinq ans pour financer les investissements immobiliers qui devront accompagner les regroupements de tribunaux, montant exactement équivalent à celui qui est proposé dans le présent projet de loi de finances.

Le ministère de la Justice n’a pas fourni de décomposition par tribunal en raison du très grand nombre de petites opérations conduites. La programmation issue d’une délibération du conseil d’administration de l’Agence en décembre 2008 est présentée dans les deux tableaux suivants.

OPÉRATIONS IMMOBILIÈRES PROGRAMMÉES PAR L’AMOTMJ
DANS LE CADRE DE LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE

(en millions d’euros)

Localisation

Acquisitions bâtimentaires et/ou foncières (estimations provisoires)

Coût d'objectif

1. Opérations nouvelles

Béziers

2

26,1

Coutances

0,6

3

Cusset

2

16,9

Dunkerque

2

9

Evreux

 

3,7

Haguenau

0,5

5,5

La Rochelle

 

25,1

Lisieux

 

19,8

Lons-le-Saunier

 

14,5

Quimper

 

5

Saint-Brieuc

 

9,8

Saint-Malo

1

14,6

2. Opérations confirmées, avec modifications

Bourg-en Bresse

2

32,9

PJ de Limoges

 

28,4

PJ de Nord-Isère

2

21,8

PJ de Périgueux

 

14,3

Total

12,1

250,4

Source : délibération du conseil d’administration de l’AMOTMJ du 9 décembre 2008

OPÉRATIONS IMMOBILIÈRES PROGRAMMÉES PAR L’AMOTMJ
HORS RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE

(en millions d’euros)

Localisation

Acquisitions bâtimentaires et/ou foncières (estimations provisoires)

Coût d'objectif

3. Opérations déjà confiées à l'Agence qui sont confirmées

PJ d'Angers

 

40

TGI de Bobigny

 

86,8

TGI de Caen

5

39,6

Chalon sur Saône

 

30

PJ de Foix

 

17,1

PJ de Laon

 

27,9

TGI de Lille

 

66,7

PJ de Marseille-Monthyon

 

24,6

PJ de Meaux

 

35

PJ de Mont-de-Marsan

 

18,3

PJ de Montmorency

 

9,8

PJ de Perpignan

4,9

30

PJ de Pointe-à-Pître

 

35

PJ de Poitiers

 

32,9

PJ de Strasbourg

 

48,3

4. Opérations nouvelles

PJ de Longjumeau

1

6,8

PJ d'Aix-en-Prov (Aix Carnot)

2

42,9

Total

23,9

591,7

Source : délibération du conseil d’administration de l’AMOTMJ du 9 décembre 2008

L’Agence indique que depuis décembre dernier ces chiffrages ont été légèrement modifiés, au vu de données réelles sur le marché foncier ou d’ajustement de périmètres de projets, mais les ordres de grandeur demeurent (624 millions d’euros hors carte judiciaire, à cause notamment du rajout de la cour d’appel dans le projet de Poitiers et le recalage du projet sur Perpignan) et 250,4 sur la carte judiciaire (évolution des données sur le foncier, suppression du projet à Evreux par le ministère, notamment).

À ce montant de dépenses prévisionnelles pluriannuelles, de l’ordre de 874 millions d’euros (données actualisées), il faut ajouter les opérations en travaux, dont le financement et l’achèvement étaient déjà programmés et garantis en décembre 2008 : tribunal de commerce et conseil de prud’hommes de Bobigny (24,5 millions), cour d’appel de Fort-de-France (30,3 millions), Aix-Pratesi (12 millions).

À ces deux tableaux de l’Agence il faut donc ajouter les opérations en achèvement pour un montant total de 151 millions d’euros.

FIN DES OPÉRATIONS DE CONSTRUCTION
RÉHABILITATION SUIVIES PAR L’AMOTMJ

(en millions d’euros)

Localisation

Coût d'objectif

Aix-Pratési

12

Bobigny TC-CPH

24,5

CA Fort de France

30,3

Toulouse

81,8

Divers

3,2

Total

151,8

Source : AMOTMJ

Fort-de-France est l’opération la moins avancée (l’appel d’offres travaux a été lancé en septembre 2009, pour un démarrage prévu en septembre 2010 et un achèvement en 2012), mais elle correspond à une commande ancienne passée à l’Agence et qui avait été « gelée » budgétairement en 2007. Toulouse et Aix-Pratesi sont des opérations quasiment achevées. Le TC-CPH de Bobigny est en travaux, qui sont bien avancés (la remise des clés est prévue au printemps 2010). Le « Divers » recouvre des contentieux sur les opérations reprises de la DGPPE (PJ Grenoble, notamment).

Le Rapporteur spécial mentionne la décision prise de fermer le tribunal de Rochefort pour le réimplanter à La Rochelle. Or le tribunal de Rochefort avait une activité importante en matière correctionnelle et fonctionnait dans des conditions satisfaisantes. En outre, il avait récemment fait l’objet de travaux d’aménagement lourds. Le tribunal de La Rochelle, quand à lui, est installé dans la vieille ville, et le transfert des activités de Rochefort nécessitera la construction d’une cité judiciaire à l’extérieur de la ville pour un coût pouvant atteindre les 25 millions d’euros. On aurait pu imaginer un seul TGI sur deux établissements distants de 24 km d’autoroute. Un cas similaire a été rapporté au Rapporteur spécial à Vienne dans l’Isère.

G.– LA RÉMUNÉRATION DU DIRECTEUR DE L’AMOTMJ/EPPJP A ÉTÉ CONTESTÉE PAR LA COUR DES COMPTES

La Cour des comptes avait critiqué la rémunération du directeur général de l’AMOTMJ aux deux motifs de sa base juridique et de son montant. Elle estimait qu’il incombait au seul conseil d’administration de l’Agence de fixer le niveau de cette rémunération. La Cour relevait que le ministre du Budget avait décidé de fixer cette rémunération en dépassement de 60 % des bornes indiciaires retenues et en dehors du cadre défini par le conseil d’administration de l’Agence. Le ministère du Budget a répondu qu’il estimait être l’autorité compétente pour fixer le niveau de rémunération. La ministre de la Justice s’est associée à la réponse du ministre du Budget. La Cour des comptes a alors constitué le comptable de l’Agence débiteur des sommes versées irrégulièrement pour rémunérer le directeur général au-delà des montants fixés par la délibération du conseil d’administration qui s’imposait à lui et cette décision est aujourd’hui définitive. Elle s’est satisfaite de la modification du cadre de gestion sur la rémunération du directeur général et des directeurs et a simplement maintenu le débet pour la période antérieure à cette modification. L’agent comptable a formulé une demande de remise gracieuse et elle lui a été accordée.

IV.– L’INSTALLATION DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DANS L’ANCIEN IMMEUBLE DE L’IMPRIMERIE NATIONALE

Le Rapporteur spécial a effectué le 3 février 2009 une mission de contrôle pour examiner les conditions de l’installation des services centraux du ministère des Affaires étrangères dans l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale au 27-29, rue de la Convention, Paris 15ème arrondissement.

Le ministère indique une surface hors œuvre nette (SHON) de 31 103 m2 et une surface utile nette (SUN) de 13 067 m2. Le ratio de performance d’occupation de l’immeuble (SUN/SHON) s’établit donc à 42,1 %. Cette valeur est très médiocre, à comparer au seuil de 55 % en deçà duquel l’étude INEUM-IPD de 2006 avait indiqué qu’il convient de s’interroger. À titre de comparaison, la moyenne de ce ratio constatée sur l’ensemble des immeubles de bureau « haut de gamme prestige » du panel IPD s’établit à 58 %.

Les services centraux ont commencé à s’installer dans ces nouveaux locaux à partir du mois de février 2009. Le ministère prévoit maintenant d’y installer environ 1 250 personnes. Les bureaux sont pour partie individuels (directeurs, inspecteurs…) et pour partie partagée (un à trois occupants). Ainsi le Rapporteur spécial a-t-il pu constater que le bureau du directeur général de la mondialisation mesurait 27 m2. Les organisations syndicales avaient émis des craintes concernant d’éventuels plateaux partagés (open space) et l’administration a transigé en proposant ces bureaux partagés.

Le ministère calcule qu’avec 1 250 personnes, le ratio de surface SUN par agent s’établit à 10,58 m2. L’affichage d’un tel ratio s’explique essentiellement par le fait que 58,1 % de la surface (SHON) de l’immeuble n’est pas constituée de surface utile (SUN)…

Le ministère des Affaires étrangères rappelle qu’il porte le projet de rénover les bureaux qu’il occupe au Quai d’Orsay à Paris. Les premiers chiffrages portent sur un montant de 60 à 80 millions d’euros. Le ministère indique qu’il ne peut autofinancer la totalité de ces travaux sur les recettes actuelles ou à venir en provenance de cessions.

Le service France Domaine ne semble pas avoir été en mesure d’exercer convenablement son rôle lors de l’opération de regroupement des services centraux du ministère des Affaires étrangères.

Le Rapporteur spécial a visité sur ce site l’emplacement du nouveau centre de conférences, toujours en travaux. Les représentants du ministère lui ont à nouveau indiqué qu’en raison des impératifs de sécurité, ce centre ne pourrait héberger « les plus grandes » conférences internationales (« quelques unes par an ») : verrière accessible depuis les immeubles environnants, accès étroit de la rue de la Convention pour les grosses délégations… En outre le nombre de personnes à héberger dans le bâtiment a nécessité l’installation de bureaux supplémentaires réduisant d’autant la capacité du centre de conférences. Le Rapporteur spécial a déjà regretté que le ministère des Affaires étrangères ait choisi le bâtiment de la rue de la Convention, alors même qu’il connaissait pertinemment ces contraintes de sécurité. Il insiste pour assurer au centre de conférence de la rue de la Convention une utilisation optimale qui permette de le mutualiser avec les autres ministères, voire de le louer à des utilisateurs privés.

Or les informations les plus contradictoires circulent sur les projets du ministère des Affaires étrangères relatives aux plus grandes conférences internationales (Afghanistan, OSCE, Kosovo, conseil européen…). M. Bernard Kouchner avait indiqué, dans un courrier adressé le 25 juin 2008 au président de la Mission d’évaluation et de contrôle (MEC), M. Georges Tron, qu’il « ne saurait être question pour le ministère des Affaires étrangères et européennes de se lancer dans un projet coûteux d’aménagement du site des Invalides qui dupliquerait inutilement les installations prévues rue de la Convention. Les critiques formulées dès à présent seraient alors justifiées. Je vous indique donc, pour mettre fin à toute interprétation erronée, qu’il n’a jamais été dans les intentions de mon ministère de porter une telle opération et qu’il n’a jamais été envisagé de solliciter de quelque manière que ce soit un financement au titre de ce projet ». On avait un temps pensé que le ministère pourrait organiser ces grandes conférences internationales sur des sites loués (centre de conférence de la porte Maillot à Paris, etc.).

Mais le même ministre a déclaré, le 17 juin 2009 devant la commission des Finances (élargie) de l’Assemblée nationale, son intention de construire à Paris un deuxième centre de conférences : « Depuis la fermeture du Centre Kléber, la France ne dispose plus de centre de conférences internationales. Nous sommes ridicules ! Où pourrait se dérouler la conférence sur le Moyen-Orient que le Président de la République appelle de ses vœux ? L’OCDE – une très belle réalisation de l’architecte Pei – ne permet pas d’accueillir une manifestation de cette ampleur. Un projet porté par l’État et vraisemblablement par la Ville de Paris, bénéficiant de partenariats privés, pourrait voir le jour dans le centre de la capitale ». Le sujet continuera donc à faire l’objet d’une attention particulière tant de la commission des Finances que du Conseil de l’immobilier de l’État (CIE).

À l’issue de sa mission de contrôle sur le site du 27, rue de la Convention, le Rapporteur spécial avait adressé le 5 février 2009 au ministre des Affaires étrangères une liste de questions complémentaires. Après plusieurs relances infructueuses auprès des services, il a fallu un courrier du 7 octobre dernier du président de la commission des Finances au ministre M. Bernard Kouchner pour que le Rapporteur spécial obtienne finalement, le 12 octobre, les réponses à ses questions. On ne peut que s’étonner de la résistance de ce ministère à fournir les informations que tout rapporteur spécial est en droit d’obtenir, pas seulement en application de l’article 57 de la LOLF, mais depuis l’existence même des rapporteurs spéciaux des commissions des Finances. Les réponses du ministère sont présentées en annexe n° 2 au présent rapport.

V.– LE REGROUPEMENT À LA DÉFENSE DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DE L’ÉNERGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER

Le 28 octobre 2009, le Rapporteur spécial a également procédé à une mission de contrôle pour examiner les conditions du regroupement des services centraux du ministère de l’Écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, sur le site de La Défense, dans les Hauts-de-Seine.

Depuis la fin du premier semestre 2009, le ministère considère que ce regroupement est totalement achevé(10).

Près de 4 900 agents sont dorénavant présents sur le site de La Défense, répartis sur cinq implantations distinctes :

• la paroi sud de l'Arche en totalité : 21 219 m² de surface utile nette (SUN) ;

• une partie de la paroi nord de l'Arche : 9 139 m² de SUN ;

• la tour Pascal A : 10 883 m² de SUN ;

• la tour Pascal B : 18 186 m² de SUN ;

• une fraction de la tour Voltaire : 7 534 m² de SUN.

La réorganisation des administrations centrales du ministère et leur relocalisation à La Défense, se sont traduites par une diminution substantielle des surfaces occupées : neuf implantations parisiennes ont été abandonnées et les surfaces immobilières correspondantes sont passées de 188 470 m² à 165 393 m² en surface hors œuvre nette (SHON), et de près de 83 000 m² à moins de 69 000 m² en surface utile nette. Le ratio SUN par agent s’établit à 13,99 m² contre 16,80 m² auparavant.

La mission de contrôle a permis au Rapporteur spécial de vérifier l’implantation générale des différents immeubles occupés par le ministère et d’en apprécier notamment leur localisation, les uns par rapport aux autres. Le Rapporteur spécial a pu constater le bien fondé de cette opération de regroupement, en terme de fonctionnalité et d’efficacité pour l’activité quotidienne des personnels du ministère.

Une visite approfondie de différents niveaux de la paroi sud de la Grande Arche, où sont installés plus de 1 500 agents du ministère, a par ailleurs été effectuée.

Cette visite a permis de constater le bon état général de cet immeuble, notamment en ce qui concerne les installations techniques qui apparaissent régulièrement entretenues. Dans les étages de bureaux, un système de cloison modulaire particulièrement performant, conçu dès l’origine, permet d’adapter au plus près des besoins, les surfaces dévolues aux services et aux occupants. Au final, cet immeuble apparaît bien adapté aux nécessités du ministère.

La mission de contrôle a ainsi permis au Rapporteur spécial d’apprécier les compétences acquises par les services chargés de la gestion immobilière du ministère. Ces compétences mériteraient certainement d’être mises à disposition de l’ensemble des administrations et opérateurs de l’État.

Au-delà de l’effet positif en terme fonctionnel, les services du ministère mettent en avant les conséquences financières bénéfiques de ce déménagement. Au cours de la visite, le responsable du service des politiques support et de systèmes d’information du MEEDDM, a annoncé que ce regroupement devrait permettre une économie de 2 millions d'euros par an en coût de fonctionnement. Les postes de dépenses concernés sont notamment l’accueil et la sûreté, les services de reprographie ou encore la sécurité incendie.

À ces moindres coûts de fonctionnement, viendrait s’ajouter une économie annuelle de près de 700 000 euros sur les loyers du ministère, soit une diminution de moins de 1,3 % du montant total des loyers.

Cette évaluation est issue des données fournies par le ministère :

BALANCE GÉNÉRALE DES LOYERS ET LOYERS BUDGÉTAIRES AVANT ET APRÈS OPÉRATION DE REGROUPEMENT DES SERVICES DU MINISTÈRE À LA DÉFENSE

(en euros)

Implantations immobilières

Situation des services avant regroupement

Situation des services après regroupement

Paroi sud de la Grande Arche *

10 025 700

10 025 700

Tour Pascal B

16 311 623

16 311 623

Tour Pascal A

10 617 992

10 617 992

Plot I *

669 620

669 620

Paroi nord de la Grande Arche

656 857

8 033 929

Tour Voltaire

 

6 130 495

Collines Sud

447 283

447 283

Rue de l’Arrivée

107 719

 

Avenue Marceau

210 681

 

Square Desaix

128 182

 

Boulevard Montparnasse *

947 593

 

Avenue de Ségur *

9 578 757

 

Avenue de Suffren

722 557

 

Rue du Général Camou

925 804

925 804

Avenue Vincent Auriol

192 835

 

Rue Louise Weiss *

1 219 398

 

Place des vins de France

910 000

 

Rue Léon Gaumont

183 600

 

Total général loyers et loyers budgétaires

53 856 201

53 162 446

Source : ministère de l’Écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer

* Loyers budgétaires

Fort de ces données et des surfaces occupées dans chacun des immeubles, le Rapporteur spécial s’interroge sur la sincérité de l’évaluation des loyers budgétaires et la portée réelle des économies constatées.

En effet, à partir des informations fournies par le ministère, il ressort que le loyer budgétaire dans la partie sud de la Grande Arche s’élève à 472 euros/m² SUN, alors que le coût de location constaté pour les bureaux situés dans la paroi nord du même immeuble est de 879 euros/m² SUN.

Par ailleurs, il ressort que les loyers des tours Pascal A et B sont respectivement de 976 euros/m² SUN et 897 euros/m² SUN. Quant à la tour Voltaire, il s’élève à 813 euros/m² SUN. Ces montants sont à comparer aux loyers payés dans les anciennes implantations parisiennes. À partir des données transmises par le ministère, ces derniers peuvent être évalués à 841 euros/m² en moyenne.

L’économie réalisée sur les loyers s’avère finalement toute relative. À ce titre, le Rapporteur spécial tient donc à minimiser énergiquement, l’argument souvent avancé, du caractère emblématique d’une première implantation de services centraux ministériels située hors Paris intra-muros. En ce qui concerne le site de La Défense, cet argument ne tient pas.

Le Rapporteur spécial ose enfin espérer que le regroupement des services à La Défense autour de la Grande Arche répond à une vraie démarche de mutualisation et de rationalité, et n’est pas uniquement lié au caractère monumental de cet édifice ni au prestige qui en découle.

Au regard de ces constatations, il conviendra de rester vigilant sur les éventuelles futures opérations de regroupement que le ministère serait amené à effectuer dans l’avenir. En particulier, le Rapporteur spécial veut voir dans le projet du ministère d’investir la totalité de la Grande Arche, l’abandon définitif du projet de construction d’un immeuble de grande hauteur sur un terrain appartenant à l'État, devant être libéré par les travaux d'aménagement du boulevard circulaire du quartier de La Défense.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 21 octobre 2009 à 9 heures, la commission des Finances examine les crédits des programmes Politique immobilière de l’État de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines sur le rapport de M. Yves Deniaud, rapporteur spécial.

M. Yves Deniaud. Mon rapport porte sur le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État et sur le programme Entretien des bâtiments de l’État de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines. Je vous ferai part également des contrôles que j’ai effectués.

En ce qui concerne le compte d’affectation spéciale, il devrait enregistrer des recettes estimées pour 2010 à 900 millions d’euros, contre 1,4 milliard d’euros en 2009. Avec la baisse des prix de l’immobilier, ce n’est pas le moment de vendre et il vaut mieux attendre des jours meilleurs.

Pour ce qui est des dépenses immobilières, l’État devrait continuer à acheter et à rénover, et les crédits de paiement à cet effet sont fixés à 870 millions d’euros pour 2010, contre 1 340 millions en 2009.

15 % du produit brut des cessions – soit 30 millions d’euros en 2010 – seront affectés au désendettement de l’État. En vertu d’une clause de retour, que nous essayons de remettre en cause, 65 % du produit des cessions est attribué au ministère qui vend, les 20 % restants étant mutualisés entre les ministères. Une partie des cessions prévues en 2009 sera reportée sur 2010 alors que les cessions réalisées en 2008 s’élevaient à 397 millions d’euros.

Le regroupement des services du ministère de la Défense à Balard est une opération particulièrement importante. Le montant de la cession des emprises parisiennes du ministère, estimé à 800 millions d’euros, par le biais d’une filiale ad hoc de la SOVAFIM et de la Caisse des dépôts et consignations, aurait dû logiquement financer la rénovation de l’existant et la construction de nouveaux bâtiments. Mais il servira finalement au financement de la loi de programmation militaire. Le projet Balard, évalué à 600 millions d’euros, sera réalisé sur la base d’un partenariat public-privé générant une dépense d’environ 100 millions d’euros par an sur trente ans. Cette somme couvrirait également le coût de services tels que l’entretien, la restauration et, ce qui me laisse perplexe s’agissant du ministère de la Défense, la sécurité extérieure des bâtiments.

L’article 28 de projet de loi de finances pour 2010 tend à modifier le périmètre du compte d’affectation spéciale en y intégrant les droits à caractère immobilier attachés aux biens. Cela se traduira par une extension des dépenses aux biens qui ne sont pas propriété de l’État. Je regrette à nouveau que le produit des cessions ne soit pas entièrement mutualisé entre les ministères. Parvenir à faire de l’État un propriétaire unique dont la gestion des biens serait confiée à un instrument unique, France Domaine, est une priorité absolue et partagée par la MEC et la Commission des finances depuis 2005.

Par ailleurs, la stratégie de performance du compte d’affectation spéciale ne comporte toujours pas de tableau de bord mesurant les indicateurs d’efficience immobilière des ministères, notamment les ratios de surface et de coûts, ce qui empêche les comparaisons entre ministères.

En 2010, il est prévu, et c’est un progrès, une extension du dispositif des loyers budgétaires à l’ensemble du parc immobilier de l’État, y compris aux services déconcentrés dans les départements. Les loyers seront logiquement indexés sur les prix du marché. Un mécanisme destiné à récompenser les ministères vertueux et à pénaliser les autres, ceux qui dépassent les 12 mètres carrés par agent, verra le jour. Pour limiter les comparaisons, on tente d’introduire des normes spécifiques de surface, mais il est indispensable de s’en tenir à la surface utile nette (SUN), qui est la norme retenue dans le bâtiment. Il faudrait faire vite pour étendre le dispositif des loyers budgétaires aux opérateurs de l’État, dont le patrimoine a été, enfin et pour la première fois, entièrement répertorié, ou presque.

Le programme Entretien des bâtiments de l’État, créé par la loi de finances pour 2009, regroupe les crédits d’entretien lourd incombant au propriétaire – dont le respect des objectifs du Grenelle de l’environnement – et qui sont prélevés sur les missions et programmes des ministères. Les dépenses d’entretien « sanctuarisées » à l’intérieur du programme, qui représentaient 12 % des loyers budgétaires en 2009, passeront à 16 % en 2010, puis à 20 % en 2011 - soit respectivement 77 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2009, et 169 millions en 2010. À ces dotations s’ajoutent les crédits adoptés dans le cadre du plan de relance : 120 millions d’euros en crédits de paiement et 220 millions en autorisations d’engagement en 2009, et encore 120 millions d’euros de crédits de paiement en 2010.

À l’issue des visites que j’ai faites dans les services déconcentrés, il me paraît indispensable que la gestion des crédits d’entretien soit mutualisée au niveau territorial. Les résistances à une gestion unifiée de l’immobilier viennent des administrations centrales tandis que, à l’inverse, les services déconcentrés font preuve de beaucoup de bonne volonté. Les services centraux, très souvent, refusent d’admettre de ne plus se comporter en propriétaires, d’où des conflits avec les préfets et les trésoriers payeurs généraux.

Venons-en aux contrôles.

Tout d’abord, il faut se réjouir de connaître enfin le patrimoine complet des opérateurs de l’État, obtenu grâce à un courrier comminatoire d’Éric Woerth menaçant de réduire les subventions et de supprimer la part variable de la rémunération des dirigeants. À une exception près, les quelques récalcitrants ne sont pas significatifs. L’évaluation du parc par France Domaine est en cours. Dans la foulée, tous les opérateurs devront présenter avant le 30 juin 2010 un schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI).

Du contrôle effectué auprès du Centre national et des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, il ressort que le CNOUS ne joue pas son rôle de tête de réseau en matière immobilière ; il n’est que destinataire d’une copie des recensements des CROUS. Le seul opérateur significatif à n’avoir pas répondu dans les délais impartis est le CROUS le plus important, celui de Versailles. Celui-ci mérite d’être montré du doigt.

Les contrôles ont porté sur les opérateurs qui, l’année dernière, n’avaient pas encore répondu. Il restait l’INAO, qui affiche un ratio de 17,8 mètres carrés par agent et une performance immobilière mesurée par le rapport de la surface utile nette à la surface hors œuvre nette de 57 %, ce qui dénote une performance immobilière très médiocre. Ses locaux prestigieux situés rue d’Anjou, dans le 8e arrondissement de Paris, abritent notamment des archives sur 900 mètres carrés…

Quant à Voies navigables de France (VNF), ses responsabilités s’enchevêtrent fâcheusement avec celles du ministère. Et un flou artistique règne dans la gestion des ressources humaines, notamment des personnels hébergés dans les maisons éclusières. VNF a un patrimoine immobilier important encore mal défini en dehors des zones portuaires, étendues en surface et dont la valeur est considérable. VNF est de fait chargé du recensement des concessions portuaires alors que ces biens immobiliers appartiennent directement à l’État. Cet établissement public assure également une activité d’aménageur promoteur très éloignée de sa mission initiale.

L’Office national des forêts (ONF) est également un très gros propriétaire immobilier. Or il n’y a pas de recensement exhaustif ni d’évaluation précise des maisons forestières. Il faudrait, de la part du ministère de tutelle, des objectifs précis de valorisation car certaines de ces maisons sont inoccupées et il n’y a plus de raison qu’elles restent dans le patrimoine de l’État.

Nous avons en outre opéré des contrôles sur la gestion immobilière des services déconcentrés de l’État en nous rendant dans des préfectures de région, une « petite », Caen, que je connais bien, et une très grande, Lyon. Il en est ressorti une absence de phasage adéquat entre la réforme de l’administration territoriale de l’État – la RéATE – mise en œuvre à compter du 1er janvier 2010 et l’établissement des schémas prévisionnels de stratégie immobilière (SPSI), que les vingt-cinq départements expérimentateurs n’ont toujours pas déposés alors qu’ils ont établi la partie relative aux diagnostics depuis mai 2008. Les décisions structurantes à prendre dans le cadre de la RéATE sont prévues avant la programmation stratégique, et cela au détriment de la performance immobilière. Il y aura en effet des mouvements importants de personnels et de locaux dans toutes les régions, et l’équilibre financier des regroupements ne peut se faire que dans une perspective pluriannuelle, les dépenses engagées la première année ne pouvant s’amortir qu’avec les économies réalisées les années suivantes. La mutualisation des moyens reste insuffisante pour gérer les conséquences immobilières de la RéATE, car les administrations centrales tentent de conserver leur emprise sur les crédits d’entretien au préjudice de l’effectivité de la gestion immobilière déconcentrée. La réforme de France Domaine en régions reste donc à faire.

Les deux agences immobilières du ministère de la Justice donnent encore cette année matière à observation et elles ont d’ailleurs fait l’objet de trois référés de la Cour des comptes. On s’interroge sur ce qu’apportent réellement l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) et l’Établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP), chargé de la construction d’un nouveau tribunal de grande instance à Paris. Dans les deux cas, il y a confusion des rôles entre le propriétaire et l’occupant. Comme l’Établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels (EMOC) du ministère de la Culture, ces deux agences ont une fâcheuse tendance à s’affranchir de la discipline commune de la nouvelle politique immobilière de l’État. En outre, il existe, au sein du ministère de la Justice, des rôles redondants entre les deux agences et les services du ministère, notamment les services administratifs régionaux (SAR).

Ma première recommandation consiste à mettre fin à l’absence totale de convention d’objectifs et de moyens. La réforme de la carte judiciaire devrait, selon le ministère, coûter 385 millions d’euros, qui s’ajoutent aux 1 268 millions d’euros de travaux programmés par ailleurs sur les bâtiments judiciaires. Les sommes en cause justifient largement que le contrôle soit perfectionné. Et l’Agence, contrairement à ses affirmations, n’a jamais brillé pour avoir tenu les coûts ni les délais.

L’EPPJP, inactif pendant cinq ans, a été réactivé puisque le projet est remis sur les rails. Le Président de la République a annoncé qu’il sera réalisé dans le quartier des Batignolles. L’achat du foncier est évalué à environ 60 millions d’euros. Dans le cadre du projet précédent, sur le site de Tolbiac, le coût des travaux avait été estimé à 800 millions d’euros. Est-il vraiment nécessaire de maintenir l’EPPJP en tant que maître d’ouvrage de l’opération ?

Nous avons enquêté sur la rémunération du directeur commun aux deux agences. Celui-ci ne perçoit qu’une rémunération, mais la Cour des comptes s’est rendu compte que cette dernière n’avait pas de base légale, son montant ayant été fixé par le ministre du Budget au-dessus du plafond voté par le conseil d’administration de l’Agence.

Je reviens une nouvelle fois sur le centre de conférences de l’immeuble du ministère des Affaires étrangères, situé rue de la Convention à Paris. Le ministère, souvenez-vous, a installé une grande partie de ses services dans l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale, vendu 85 millions d’euros à une filiale, de droit luxembourgeois, de Carlyle. Le montage a permis à cette société d’échapper à 40 millions d’imposition des plus-values puisque l’immeuble rénové a été revendu 375 millions d’euros au ministère des Affaires étrangères. Cet immeuble, de forme trapézoïdale, abrite en son milieu un centre de conférences qui aurait pu remplacer celui, cédé, de l’avenue Kléber. Mais il ne peut prétendre pour le moment au statut de centre international dans la mesure où des bureaux donnent dessus, ce qui n’est pas compatible avec les règles de sécurité ; il y manque au surplus des salles de réunion pour les délégations étrangères. Cela étant, les bureaux peuvent accueillir 1 400 agents alors que la RGPP n’en prévoit que 1 000. Un réaménagement éviterait de construire un nouveau centre international, qui coûterait au moins 100 millions d’euros.

À l’issue de cet exposé, je vous invite à donner un avis favorable au vote du compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État et des crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, dont j’ai évoqué le programme Entretien des bâtiments de l’État.

M. le président Didier Migaud. Je vous remercie de votre travail vigilant sur un sujet qui retient l’attention de la commission des Finances.

M. Alain Rodet. Le rapporteur spécial pourrait-il pousser plus loin ses investigations sur les CROUS et le CNOUS, notamment pour s’assurer que l’on peut vraiment loger un étudiant dans un studio tout équipé de neuf mètres carrés ?

Pourrait-il également être plus précis dans ses critiques des réalisations - cités judiciaires et centres pénitentiaires – du ministère de la Justice, lequel annonce pourtant que la révolution est en marche et que les choses avancent ?

Enfin, qu’est-il advenu de notre parc immobilier en Italie, notamment à Florence, où la France possède de magnifiques palais, mais qui sont mal entretenus ? Quelles ont été les suites données à un rapport spécial déjà ancien ?

M. Jean-Claude Mathis. À cause de la crise immobilière, il n’est plus urgent de vendre. Les prévisions pour 2009 ne seront donc pas atteintes, mais peut-on estimer les ventes pour le présent exercice ? Les 900 millions annoncés pour 2010 correspondent-ils à des reports ou à des inscriptions nouvelles ?

M. Marc Francina. Existe-t-il, en matière immobilière, un coordinateur entre les ministères, en particulier celui de l’Intérieur, et leurs interlocuteurs en province ?

M. Jean Launay. Mon attention a été attirée par l’opération du ministère de la Défense à Balard et son financement. Entre les 600 millions d’euros de travaux initialement prévus et les 100 millions d’euros pendant trente ans, il y a quintuplement.

Que pense le rapporteur spécial, qui semble regretter que le produit des cessions n’ait pas été réemployé, des partenariats public-privé – les PPP –, lesquels paraissent être systématiquement recherchés ?

Est-il en mesure de dresser le bilan de l’action de France Domaine depuis sa création ?

Peut-il expliciter une contradiction apparente entre son appel à la mutualisation de l’ensemble des recettes de cession et, précisément, son regret que l’opération Balard n’ait pas été financée par lesdites cessions ?

Dans le contexte de l’après-Grenelle et du vote de la taxe carbone, il faudra, après l’audit énergétique des bâtiments, faire des travaux. Comment les financer « avec un certain autofinancement constitué par les économies générées », sachant que les secondes ne pourront pas être réalisées avant les premiers ?

M. Jérôme Chartier. Ayant naguère étudié de près le parc immobilier du ministère des Affaires étrangères, je me demande ce que sont devenus, à Florence, la villa Finaly et le palais Lenzi, qui abrite le consulat général de France. Même question pour le 3 avenue de Lowendal, hôtel particulier du 7e arrondissement, propriété du ministère des Affaires étrangères, où étaient entreposées des archives qui devaient être déménagées à La Courneuve. À la lumière de ces dossiers en marge du centre de conférences internationales, on se demande si l’État a saisi toute l’importance d’une gestion immobilière active.

L’an dernier, nous avions remarqué que les autorités de régulation recherchaient en priorité des localisations dans le cœur de Paris. Le Conseil de l’immobilier de l’État a-t-il fixé des plafonds de prix au mètre carré ? Il faudrait parvenir à délocaliser l’ensemble des services centraux car il n’y a pas de raison particulière pour que l’administration soit concentrée à l’intérieur du périphérique.

M. François Goulard. De la présentation de notre rapporteur spécial, il ressort que la gestion de l’immobilier de l’État n’a pas fait de progrès considérables. Je suis surtout frappé par la lenteur des décisions : il faut des années avant qu’un bâtiment qui a perdu son utilité soit vendu, qui plus est dans des conditions loin d’être optimales. L’État n’a pas encore intégré la nécessité d’une gestion active, intelligente, efficace, de son parc immobilier. Le ministère de la Défense possède des bâtiments de valeur, désaffectés depuis dix ans. La situation présente des inconvénients à la fois pour le budget de l’État et pour les collectivités territoriales, qui déplorent des surfaces gelées.

Il reste beaucoup de progrès à faire !

M. le président Didier Migaud. Le rapport d’Yves Deniaud et les travaux de la MEC montrent en effet qu’il y a une marge de progression importante !

Dans le prolongement de la question de Jean Launay sur les PPP, je proposerai à la Cour des comptes de procéder à leur évaluation. Je me souviens d’un rapport de l’homologue britannique de celle-ci qui dressait un bilan plutôt défavorable sur le long terme. Cela n’a rien d’étonnant puisque le privé prend sa marge. Ne faut-il pas voir dans ces montages une facilité pour repousser dans le temps la charge du contribuable ? Il me semble que des investigations sont nécessaires et qu’il faut que nous regardions le sujet de plus près.

M. Jérôme Cahuzac. Le partenariat public-privé n’est-il pas en fait un moyen pour l’État d’échanger un investissement qu’il ne peut pas réaliser contre des dépenses de fonctionnement qu’il assume en recourant à l’emprunt ?

M. Dominique Baert. Le Gouvernement avait annoncé vouloir faire examiner les conditions d’attribution et les loyers des logements de fonction. Où en est-on ?

Le recensement des casernes et terrains militaires qui doivent être cédés est-il effectué ? Y a-t-il des acquéreurs ?

Enfin, parmi les nouveaux modes d’intervention de l’État et des autres opérateurs publics, on voit se multiplier les baux emphytéotiques administratifs ou hospitaliers, qui reviennent en fait à repousser à demain le paiement des investissements immobiliers d’aujourd’hui. Envisagez-vous de faire le point sur ces dépenses différées ?

M. le rapporteur spécial. Depuis le début de nos travaux sur ce sujet avec la Mission d’évaluation et de contrôle, en 2005, il est clair que l’immobilier est une question centrale pour l’État. Nous sommes partis de très loin : en 2005, on ne connaissait pas très bien le patrimoine direct de l’État et pas du tout celui des opérateurs. Chaque ministère, chaque opérateur agissait dans son coin, en se comportant comme le propriétaire. Il serait impensable de rattraper ces décennies d’incurie en peu de temps, même si l’on ne se heurtait pas en outre à de fortes réticences de la part des administrations centrales.

Monsieur Rodet, je n’ai aucune idée de l’aménagement des chambres universitaires, mais je sais qu’un programme de financement évalué entre 1 et 1,3 milliard d’euros a été lancé pour l’amélioration du logement étudiant.

Quant à l’immobilier de la justice, la réforme s’est engagée dans une précipitation tout à fait regrettable. Certes, son coût, qui avait été évalué à 545 millions par l’ancien directeur de l’Administration générale et de l’équipement du ministère de la Justice, a été réévalué à 385 millions, mais il reste bien trop élevé.

Cette réforme, sur le plan domanial, est entachée d’un péché originel. Généralement en effet, lorsqu’on regroupe des services, on doit acheter ou adapter certains bâtiments et en vendre d’autres. Il y a donc des dépenses et des recettes. Mais, en l’occurrence, sur les deux cents sites qui disparaissent, vingt seulement appartiennent à l’État. Celui-ci ne recevra aucun produit des autres sites, qui sont la propriété des collectivités territoriales. En outre, on peut relever de nombreux exemples de mauvaise gestion. Ainsi, le tribunal de grande instance de Rochefort a-t-il été fermé alors qu’il venait d’être rénové, pour rejoindre celui de La Rochelle, à 25 kilomètres par l’autoroute. Mais, ce dernier étant un bâtiment classé en plein centre-ville, on ne peut y réaliser les travaux nécessaires et un nouveau tribunal hors les murs va être construit pour 25 millions d’euros ! Je ne juge en rien ici de la question de l’organisation des tribunaux mais, sur le plan immobilier, il s’agit d’une erreur.

Pour ce qui est de la question des propriétés de l’État à l’étranger, une société foncière est en cours de constitution. Comme l’ont montré le rapport de Jérôme Chartier et d’autres études, l’État est propriétaire, hors de ses frontières, de bâtiments prestigieux et de grande valeur, qui ne sont pas bien répertoriés ni même parfois entretenus. Et nous avons récemment pu bloquer un projet très mal préparé de vente du bâtiment de l’ambassade de France à Dublin, qui aurait pu tourner à la catastrophe. La nouvelle société foncière ainsi que le rapport d’un des membres du Conseil de l’immobilier de l’État sur ce sujet nous permettront de mettre de l’ordre dans ce domaine, dans les mois ou les années à venir.

S’agissant du montant des cessions effectuées en 2009, je ne dispose encore d’aucun chiffre, mais il est clair qu’il sera très inférieur à ce qui avait été prévu. Il serait en effet stupide de vendre en l’état actuel du marché immobilier alors qu’il n’y a pas d’urgence. Les chiffres de cessions annoncés pour 2010 prennent en compte le report de ce qui n’aura pas été accompli cette année.

M. Francina, en évoquant le défaut de coordination entre l’administration centrale et les services déconcentrés, met le doigt sur le problème principal. Les représentants de France Domaine dans chaque région, qui sont chargés de veiller à l’application de la réforme de l’immobilier de l’État, se voient contredits par les administrations centrales des ministères. Une procédure d’arbitrage et de décision, qui soit incontestable, doit être mise en place.

M. Launay m’a interrogé sur les opérations du ministère de la Défense. Initialement, la vente de différentes emprises parisiennes du ministère devait financer, grâce à un mécanisme de portage, la rénovation de son site de Balard. Mais, en se fondant sur l’argument que le produit des cessions serait encaissé immédiatement alors que la rénovation ne devrait être payée qu’en 2014, il a été décidé d’affecter ces recettes au financement de la loi de programmation militaire pour 2010 et de s’occuper du financement de la rénovation au moment opportun. La rénovation du site doit être menée à bien dans le cadre d’un partenariat public-privé qui prévoit, alors que le coût des constructions et rénovation est évalué à 600 millions d’euros, un coût annuel pour le ministère d’environ 100 millions pendant trente ans. À mes questions, on a répondu que cette somme englobait, outre la construction, toutes les dépenses d’entretien, de fonctionnement, de nettoyage, et même de gardiennage privé des locaux. L’armée française n’arriverait-elle donc pas à se garder elle-même ? J’ai donc demandé à connaître précisément la ventilation de ces 100 millions d’euros annuels et je pense pouvoir vous la donner dans les détails l’an prochain.

J’en viens au partenariat public-privé. Pourquoi choisit-on ce procédé pour mener une opération ? Dans l’invraisemblable affaire de la rue de Convention, les anciens locaux de l’Imprimerie nationale ont été vendus au privé puis rachetés beaucoup plus cher par l’État après travaux. Pourquoi l’État n’a-t-il pas réalisé les travaux lui-même ? La réponse est simple : cela aurait pris vingt ans. Le choix quasi systématique du partenariat public-privé est donc un formidable aveu d’impuissance de l’État, tellement contraint par ses lourdeurs administratives et de procédure qu’il ne peut agir lui-même. C’est très grave !

Certes, il convient d’analyser le mécanisme de partenariat public-privé afin de savoir s’il est réellement rentable, mais il faut aussi s’intéresser plus généralement à la maîtrise d’ouvrage de l’État. Les différentes études sur les agences spécialisées développées par les ministères sont féroces. Un rapport sénatorial sur l’EMOC révèle ainsi qu’il n’a jamais livré un ouvrage dans les délais ni sans un surcoût d’au moins 25 %, et je ne pense pas que l’Agence publique de l’immobilier de la justice (APIJ) fasse beaucoup mieux. Il faut étudier sérieusement la question, avec la Cour des comptes, pour savoir pourquoi nous sommes si mauvais dans ce domaine.

M. le président Didier Migaud. C’est sur ce genre de sujets que notre intervention peut prendre toute sa valeur. Parce que le système ne fonctionne pas, on recourt à des solutions plus coûteuses. Mais si cela ne marche pas, c’est parce que nos procédures sont lentes et lourdes. Peut-être conviendrait-il de revoir nos procédures ?

M. le rapporteur spécial. On ne choisit ces procédures coûteuses que parce qu’on sait qu’on ne peut faire autrement !

Pour ce qui est de la mutualisation des recettes de cession du ministère de la Défense et de l’opération de Balard, je n’y vois pas de problème. France Domaine pourrait très bien recevoir le produit des ventes et s’en servir pour financer la rénovation du site de Balard, du moment qu’elle s’effectue sous son égide. Quant aux audits énergétiques, l’évaluation des travaux à engager pour mettre les bâtiments de l’État aux normes se monte à 24 milliards d’euros. Je suis sûr que nous serons amenés à en reparler abondamment.

L’État possède à l’étranger – à Florence certes, mais aussi à Rome, à Istanbul ou ailleurs – des immeubles prestigieux dont il ne fait pas bon usage. À Rome, il est propriétaire du palais Farnèse, un bâtiment magnifique qui abrite l’École française d’archéologie, laquelle possède un immeuble Piazza Navona, où elle entasse des caisses contenant le produit de ses fouilles. Peut-être ces caisses pourraient-elles laisser la place à l’École d’archéologie ?

Il en est de même pour les archives du ministère des Affaires étrangères, qui sont dorénavant regroupées à La Courneuve et qui n’avaient effectivement rien à faire dans le centre de Paris. L’immeuble de l’avenue Lowendal doit être vendu – il me semble que c’est déjà en cours. Tous les travaux parus sur le sujet, depuis la MEC, recommandent d’ailleurs la délocalisation hors du centre de Paris. Il n’y a aucune raison de payer très cher pour y rester. Pour ce qui doit demeurer dans la capitale, il est possible de trouver ailleurs qu’au centre des locaux bien desservis, confortables et fonctionnels.

Quant à la lenteur des évolutions, je vous rappelle que nous partons de très loin et que, en dépit de tous les problèmes qui demeurent, nous avons fait de grands progrès en peu de temps. Le Gouvernement montre une réelle volonté de faire avancer les choses, Éric Woerth en a apporté la preuve en mettant le couteau sous la gorge des opérateurs réticents à donner leurs informations. Mais il n’est pas si facile de revenir sur des pesanteurs qui durent depuis des décennies, voire des siècles.

La question des logements de fonction qu’a évoquée Dominique Baert reste problématique. Nous n’avons encore aucune vision interministérielle sur le sujet, et les réticences, là encore, sont fortes. On nous a annoncé une révision de la doctrine et des textes pour régler le problème, mais celui-ci se posera de manière encore plus criante chez les opérateurs, pour lesquels il n’y a pas de règles du tout !

Enfin, le recensement des bâtiments militaires qui doivent être cédés est effectué, mais il y a des retards inadmissibles dans la réalisation des opérations. Le délai moyen relevé par la Cour des comptes pour vendre un bâtiment militaire est de six ans. C’est ridicule !

M. Michel Bouvard. La mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF a mis en évidence les problèmes de recensement du patrimoine immobilier des opérateurs. Le ministre chargé des comptes publics s’était engagé à prendre des sanctions à l’encontre de ceux qui n’établissaient pas la liste de leurs actifs. Où en sommes-nous ?

Par ailleurs, le préfet d’Île-de-France nous a fait remarquer qu’il n’avait connaissance que du patrimoine des services déconcentrés dans sa région. Ainsi, certains de ces services ont loué des locaux, parfois avec des baux en augmentation de 35 %, alors que des bâtiments des services centraux de l’État étaient disponibles. La coordination va-t-elle être améliorée ?

M. Louis Giscard d’Estaing. Il y a des marges de progression indiscutables concernant la gestion de l’immobilier de l’État, et nous continuerons d’être très attentifs et de soutenir Éric Woerth dans ce domaine. En tant que rapporteur spécial du budget de la Défense, je suis prêt à travailler en commun avec Yves Deniaud sur le sujet, d’autant que l’année qui vient, avec ses recettes exceptionnelles, sera déterminante pour ce ministère.

M. Jean-Pierre Gorges. Existe-t-il des indicateurs par ministère sur le rapport entre le nombre de mètres carrés occupés et le nombre d’agents ?

Par ailleurs, au lieu de repousser les ventes prévues cette année à cause de l’état du marché, a-t-on étudié des dispositifs du type lease-back, qui permettent aux entreprises de vendre leurs locaux tout en continuant à les occuper, en attendant soit des jours meilleurs, soit d’autres solutions ? Si l’État agit ainsi, il paiera un loyer pour ses locaux, mais la vente aura aussi dégagé des masses financières pour faire autre chose.

J’ai bien noté que la réforme de la carte judiciaire coûterait 385 millions d’euros et que le ministère de la Justice ne fait pas appel au partenariat public-privé. Mais il existe des cités judiciaires qui ont besoin d’être reconstruites depuis cinquante ans, et dans lesquelles la situation est encore plus difficile depuis les regroupements induits par la réforme. Sans partenariat public-privé, la situation sera complètement bloquée. Si l’on doit choisir entre une procédure coûteuse et ne rien faire pendant encore un demi-siècle, il faut savoir se montrer responsable.

Enfin, on oublie trop souvent que certains actifs que vend l’État lui ont été à l’origine cédés par les collectivités locales pour une somme symbolique. Ainsi, on propose actuellement à ma commune de racheter pour 3 millions d’euros ce qui avait été cédé un franc à l’époque par le conseil général ! Et le problème est le même pour le foncier : les bases militaires se sont souvent installées sur des terrains mis à disposition par les communes, qui doivent aujourd’hui les racheter à prix fort. Il faut remettre un peu de morale dans tout cela !

M. Charles de Courson. Le rapporteur spécial nous parle de 50 000 à 70 000 mètres carrés cédés par an – bref, une moyenne de 60 000. Mais, parallèlement, le nombre des fonctionnaires baisse cette année de 35 000. Si l’on applique le ratio qui a été retenu, celui de 12 mètres carrés par fonctionnaire, la réduction de surface devrait être plus proche des 400 000 mètres carrés que des 60 000 ! Comment expliquer une différence aussi importante ?

Par ailleurs, nous avons connu de grands débats sur les biens immobiliers pollués, dont la situation a été longtemps bloquée par l’article du code des domaines interdisant toute cession sans certificat de dépollution. Il est maintenant permis à l’administration de vendre un bien au prix net du coût estimé de dépollution. Cette disposition a-t-elle été utilisée, pour les sites militaires par exemple ?

Enfin, et contrairement au rapporteur spécial, je pense que la règle du retour de la gestion par ministère est indispensable pour intéresser les ministères à la cession de leurs actifs inutilisés. La mutualisation au niveau national ne me paraît pas efficace.

M. Georges Ginesta. Les partenariats public-privé me semblent être une bonne solution au niveau de la commune : ils lui permettent de stimuler l’investissement et d’agir rapidement sans impact sur son budget, puisque le partenariat public-privé implique sa propre recette. Ainsi, dans ma commune, ce type d’opération a permis de réaliser un parking en sous-sol, une gare d’autocars au rez-de-chaussée et un cinéma à l’étage. La commune n’y a pas mis un sou mais, à l’issue des vingt-sept ans prévus par le contrat, elle sera propriétaire de l’ensemble – en centre-ville. Cela lui a aussi permis d’aller très vite – trois ans entre la décision et la fin des travaux – alors que l’opération était complexe : le parking est une régie municipale, qui paye son loyer, la gare est du domaine du conseil général et de la communauté d’agglomération, et le cinéma est locataire. Pour ce qui est des investissements communaux, je conseille donc le partenariat public-privé.

M. le président Didier Migaud. Il faut distinguer selon la nature de l’opération. Un parking ou une galerie marchande s’y prêtent très bien, pas une prison ou une cité judiciaire. Il faut des recettes !

M. le rapporteur spécial. Pour ce qui est de l’immobilier des opérateurs, le recensement est effectué presque intégralement, mis à part quelques réticents au patrimoine négligeable et le mauvais élève qu’est le CROUS de Versailles. Quant au manque de coordination en région, je ne peux malheureusement que le confirmer. La solution n’est pas encore en marche et l’on voit effectivement des services déconcentrés louer très cher des locaux alors que des bâtiments sont disponibles.

Comme l’a dit Louis Giscard d’Estaing, il y a encore des marges de progression importantes : nous sommes sur le sujet depuis quatre ans, et nous le serons encore pendant quelques années. Je serai heureux de travailler avec lui, notamment sur l’opération de Balard.

Bien que nous en ayons exprimé le souhait pressant, nous ne disposons pas encore d’indicateurs relatifs au nombre de mètres carrés par agent et par ministère. On comprend pourquoi ! Dès que nous les aurons, il sera possible de faire des comparaisons et de repérer ceux qui ne respectent pas les règles.

La procédure du lease-back a été exclue par le directeur de France Domaine. L’État ne vend pas occupé, sauf sur une période intermédiaire. Lorsqu’il l’a fait, avenue Kléber, cela a été fâcheux puisque les deux années dans lesquelles il est resté dans les locaux lui ont coûté 39 millions d’euros – en bref, il s’est « fait avoir ». Un des problèmes de France Domaine est d’ailleurs qu’il manque toujours de professionnels de l’immobilier. La MEC avait suggéré le recrutement de trente personnes, nous en sommes à quatre. C’est pourtant indispensable pour discuter d’égal à égal avec les acteurs du marché.

Quant à l’origine des biens vendus par l’État, il arrive aussi à celui-ci de transférer des locaux aux collectivités territoriales pour un euro symbolique, et ces locaux peuvent être vendus ensuite à titre onéreux.

M. Jean-Pierre Gorges. Et on laisse faire ?

M. le rapporteur spécial. Cela se fait de façon informelle. Je n’ai rien vu de particulièrement scandaleux à ce propos.

Monsieur de Courson, s’agissant de la différence entre le nombre de postes de fonctionnaires supprimés et les surfaces libérées, on est confronté à une pratique diffuse au sein des administrations. C’est pourquoi l’on exige de leur part non seulement un état des biens en leur possession et de leur taux d’occupation, mais aussi une estimation de l’évolution de leurs effectifs.

Quant à la dépollution préalable à toute cession d’un bien, certains terrains militaires ont été cédés sans avoir été dépollués. L’État a tout intérêt à le faire pour pouvoir vendre plus vite, mais ce ne doit pas être une contrainte.

Monsieur Ginesta, je ne critique pas les partenariats publics-privés en tant que tels. En revanche, je regrette qu’on y ait recours parce qu’on ne sait pas faire autre chose, et non pour des raisons financières.

M. le président Didier Migaud. Je vous rappelle que la Commission se prononcera le 29 octobre prochain sur les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Elle adopte ensuite les crédits du compte Gestion du patrimoine immobilier de l’État, conformément à l’avis favorable de M. Yves Deniaud, Rapporteur spécial.

ANNEXE N° 1 :
LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

● Opérateurs de l’État

M. Jean-François Cervel, directeur du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS), et M. Alexandre Aumis, sous-directeur programmation, travaux et contractualisation du CNOUS ;

Mme Marion Zalay, directrice de l'Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), accompagnée par M. Philippe Pons, secrétaire général de l’INAO ;

M. Thierry Duclaux, directeur général de Voies navigables de France (VNF), accompagné de M. Patrick Lambert, directeur général adjoint, et de M. Philip Maugé, directeur du développement de VNF.

● Services déconcentrés de l’État

– Préfecture de la région Basse-Normandie le 27 mai 2009

M. Laurent de Galard, secrétaire général aux affaires régionales (SGAR), en l’absence de M. Christian Leyrit, préfet de région, retenu par les cérémonies de commémoration du débarquement ;

M. François Berges, trésorier payeur général (TPG) ;

M. Guy Marnier, conservateur des hypothèques, responsable de la politique immobilière de l’État (RPIE) de la région ;

M. Yves Baron, RPIE du département du Calvados.

– Préfecture de la région Rhône-Alpes le 3 juin 2009

M. Jacques Gérault, Préfet de région ;

M. René Bidal, secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) ;

M. Paul-Henri Watine, trésorier payeur général de région (TPG) ;

M. Gérard Morier, responsable de la politique immobilière de l’État (RPIE) de région ;

Mme Pascale Prouvirault, chargée de mission au SGAR ;

Mme Marie-Helène Bovery, chef des services du Trésor du Rhône ;

Mme Catherine Doriath, responsable du service France Domaine du Rhône ;

M. F. Bernadet, du service France Domaine ;

M. Michel Thévenet, du service France Domaine ;

M. Guy Levi, de la direction départementale de l’équipement (DDE) du Rhône ;

M. Philippe Le Denvic, de la direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE) ;

M. Michel Delarue, de la direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP).

● Les agences immobilières du ministère de la Justice

M. Jean-Pierre Weiss, directeur général de l’Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la justice (AMOTMJ) et de l'Établissement public du Palais de justice de Paris (EPPJP) ;

Mme Claudine Renoux-Fages, directrice des affaires juridiques, administratives et financières de l’AMOTMJ ;

M. Alain Pichon, président de la 4ème chambre de la Cour des comptes ;

M. Gérard Moreau, conseiller maître, chef de section, Cour des comptes ;

M. Christian Michaud, rapporteur, Cour des comptes ;

M. Alexandre Jevakhoff, directeur de cabinet adjoint de Mme Michèle Alliot-Marie, garde des Sceaux, ministre de la Justice et de libertés.

● Ministère des Affaires étrangères et européennes

M. Jean-Marie Bruno, chef du service des Affaires immobilières, direction de l’Administration générale du ministère des Affaires étrangères et européennes.

● Ministère de l’Écologie (MEEDDM)

M. Michel-Régis Talon, secrétaire général, chef du service des politiques support et de systèmes d’information (MEEDDM) ;

Mme Marie-Odile Michel-Amiot, directrice de projet auprès de M. Dominique Figeat, délégué à l’action foncière et immobilière (MEEDDM).

ANNEXE N° 2 :
RÉPONSE FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET EUROPÉENNES AU QUESTIONNAIRE ADRESSÉ PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR L’IMMEUBLE DE LA RUE DE LA CONVENTION À PARIS

● Les surfaces

Le ministère indique dans sa réponse que le site de la rue de la Convention offre les surfaces indiquées dans le tableau ci-après à l'issue des travaux d'aménagement, auxquelles il convient d'ajouter 725 m² de locaux annexes (poste de sécurité, centre médical,…).

IMMEUBLE DU 27 RUE DE LA CONVENTION

(en m2)

En m²

Niveau 3

Niveau 2

Mezzanine

Niveau 1

R.-de-Ch.

TOTAL

Surface utile brute (SUB) Bureaux

4 749,50

4 747,00

-

6 369,50

6 952,00

22 818,00

Surface utile brute (SUB) Conférence

-

-

311,00

1 355,00

1 661,50

3 327,50

Surface utile nette (SUN)

3 274,50

3 368,50

-

3 887,00

2 536,50

13 066,50

Surface hors œuvre nette (SHON)

5 660,00

5 660,00

360,00

8 553,00

10 870,00

31 103,00

Source : ministère des Affaires étrangères

Concernant le centre de conférences, la répartition des espaces est la suivante :

– au 1er étage, une salle plénière pouvant accueillir jusqu’à 450 personnes, adossée à un hall d’accueil de 300 m², un espace VIP comprenant un salon VIP pour 20 personnes et un bureau Ministre avec salle d’eau, un espace dédié aux délégations comportant 5 salles capables d’accueillir chacune 8 à 10 personnes ;

– au rez-de-chaussée, un hall secondaire de 100 m², une grande salle de 450 m² divisible en trois pouvant accueillir jusqu'à 325 personnes, une salle de 32 personnes divisible en deux salles de 24 places, une salle de 24 places divisible en deux salles de 12 places.

● Les effectifs

Au 1er trimestre 2009, 894 agents étaient installés à la Convention et appartenaient respectivement à la direction générale de l’administration – DGA (444), à la direction générale de la mondialisation – DGM (349), au cabinet du secrétaire d’État chargé de la Coopération et de la francophonie (42) ou à des missions transversales et/ou thématiques (59).

À la fin de l’année 2009, 192 agents auront également rejoint le site : direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire – FAE (122), DGM (47), DGA (20), missions transversales et/ou thématiques (3). À cette date 1 086 agents occuperont leur poste de travail sur le site de Convention et appartiendront respectivement aux services suivants : DGA (464), DGM (396) FAE (122), cabinet et services associés du secrétaire d’État chargé de la coopération et de la francophonie (42), missions transversales et/ou thématiques (62).

Ces chiffres ne prennent pas en compte les recrutements en cours (dont 50 environ pour la seule DGM), ni les missions de certaines catégories d’agents contractuels ou de prestataires assurant une présence à plein-temps ou à temps partiel sur le site, ainsi que les organisations ayant par convention l’usage d’espace de bureaux (formateurs, agents d’accueil, de nettoyage et de restauration, cabinet médical, associations et organisations syndicales, etc.), ce qui représente un effectif supplémentaire de 150 postes de travail environ.

L’effectif total installé à fin 2009 sur le site sera donc d’environ 1 250 postes de travail. Compte tenu de la surface utile nette (SUN) indiquée ci-dessus, le ratio moyen de surface occupée par agent ressort donc à 10,45 m².

Au cours des années à venir, la réduction des effectifs du ministère des Affaires étrangères prévue dans le cadre de la RGPP (-700 emplois sur la période 2009–2011) concernera les effectifs d'administration centrale à hauteur de -128 emplois, l'essentiel des suppressions d'emplois étant réalisées sur les réseaux à l'étranger (-572 emplois dans les réseaux diplomatique, consulaire et culturel). Par ailleurs, conformément à son schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI), le ministère devra absorber dans ses locaux actuels les agents aujourd'hui installés dans des immeubles déjà cédés ou en cours de cession (rue de Talleyrand pour 15 agents, avenue de Lowendal pour 30 agents) ou ayant vocation à l'être à l'issue des travaux du Quai d'Orsay (boulevard des Invalides pour environ 400 agents). Bien entendu, une partie de ces effectifs rejoindra le Quai d’Orsay, dont la capacité devrait être augmentée d’environ 200 postes de travail à l’occasion des travaux de rénovation/restructuration, dont le démarrage est prévu en 2010. Ces espaces supplémentaires seront gagnés dans la partie du bâtiment libérée par le transfert des archives diplomatiques sur le site de La Courneuve, mis en service en février 2009 et où travaillent aujourd'hui 250 agents. Les possibles évolutions du périmètre de compétences du ministère consécutives à la mise en œuvre de la RGPP, s'agissant notamment de la création des opérateurs (agence culturelle, agence de la mobilité internationale, agence des immeubles publics à l'étranger), dont les conséquences en termes de transferts éventuels d'effectifs ne sont pas encore déterminées, ne permettent pas de dresser aujourd'hui un tableau définitif et précis de l'occupation de chacun des immeubles à l'échéance du budget triennal en cours. En tout état de cause, le ministère poursuivra son opération de regroupement, conformément au schéma initial.

● Le centre de conférences

L’occupation de l’immeuble de la Convention est conforme au projet de regroupement des services parisiens du ministère tel que défini dans le cadre de son schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) et tel qu'il a été approuvé. Il prévoit notamment la réduction progressive du nombre d’emprises du ministère des affaires étrangères et européennes à Paris et la cession concomitante de biens immobiliers (rue de l’Université en 2006, avenue Kléber et rue Monsieur en 2007, rue de Talleyrand en 2009) ou leur transfert à une autre administration (boulevard Saint-Germain au ministère de l’Écologie – MEEDDM au 1er novembre 2009). Les quelque 1 250 personnes installées sur le site Convention à la fin de l’année 2009 respectent les projections initiales.

S’agissant de la présence d’un « centre de conférences ministériel » (CCM) sur le site de la rue de la Convention, il convient de préciser que le site n'avait initialement pas vocation à abriter d'espaces de ce type. La disparition du « centre de conférences internationales » (CCI) de l'avenue Kléber, a amené le ministère à considérer qu'il devait reconstituer dans ses enceintes des espaces de réunion lui permettant de tenir l'essentiel des réunions dont il avait la responsabilité. Le bâtiment présente ainsi un niveau de sécurisation correspondant aux standards d'un bâtiment à usage administratif. Soucieux de vérifier les conditions de sécurité du site dans le cas de manifestations exceptionnelles, le ministère a sollicité des services compétents de la préfecture de police un audit sur cette question. Ces derniers ont conclu que le site de Convention ne présentait pas les garanties de sécurité nécessaires pour abriter des réunions internationales exigeant des mesures de sécurité particulières (structure du bâtiment, possibilités d'accès au bâtiment et de circulation aux abords extérieurs, flux de personnels, etc.). Même au prix d'investissements considérables, certaines des difficultés identifiées (voies d'accès et abords) ne pourraient pas être supprimées. En revanche, la préfecture de police a conclu que le site pouvait fonctionner pour les propres besoins du ministère en « centre de conférences ministériel ». Par ailleurs, certaines des conférences mentionnées dans la question entraînent la présence d'un nombre élevé de délégations que les surfaces existantes ne permettraient pas d'accueillir dans des conditions acceptables.

Il est à noter qu'à l'exception des bureaux de délégation, sensiblement moins nombreux, le CCM de la rue de la Convention offrira des surfaces de réunion comparables à ceux de l'avenue Kléber, mais offrira beaucoup plus de modularité et des capacités techniques et de traduction simultanée qui n'existaient pas dans l'ancien CCI.

En tout état de cause, la question de la création à Paris d’un véritable centre de conférences internationales (l'ancien CCI de l'avenue Kléber ne pouvant véritablement prétendre à cette qualité) ne relève pas directement de la compétence de ce ministère, mais des plus hautes autorités de l’État, seules à même d’apprécier l’opportunité et les possibilités de s’engager dans un tel projet. Pour sa part, le ministère ne dispose d'aucun élément lui permettant d'avancer le coût que pourrait avoir un tel projet.

Il estime que les installations offertes par le site Convention lui permettront de répondre à l’essentiel de ses besoins propres. Cette infrastructure a en outre bien entendu vocation à être mobilisée par d’autres utilisateurs publics, voire privés, comme l’était le centre Kléber, cet usage externe étant soumis à facturation.

● Le coût des travaux du site Convention et des loyers intercalaires du site Kléber

La dotation de l’opération d’acquisition a été inscrite sur les crédits du CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État pour un montant total de 390 millions d'euros TTC. À ce stade, 382,1 millions d'euros de paiements ont été effectués, 7,8 millions d'euros de paiements restant encore à venir pour clore l’opération.

Quelque 24,3 millions d’euros TTC de travaux d’aménagement hors acte d’achat ont été payés à ce jour, le budget total prévisionnel des travaux d’aménagement non inscrits à l’acte d’achat s’élevant à 31 millions d’euros TTC, ouverts sur le CAS (espaces de bureaux, mobilier et centre de conférences). Ces travaux seront achevés fin 2009 et seront maintenus dans le cadre de ce budget.

Le site Kléber a été libéré le 31 mars 2009, conformément au calendrier prévu. Les loyers intercalaires réglés au propriétaire pour l'occupation de cet immeuble à l'issue de sa cession se présentent comme suit.

LOYERS INTERCALAIRES DU SITE KLÉBER

(En millions d’euros)

 

TOTAL HT

TOTAL TTC

du 26/04 au 30 juin 2007

3

3,7

2ème semestre 2007

8,5

10,1

Année 2008

17

20,3

1er trimestre 2009

4,2

5,1

TOTAL

32,8

39,2

Source : ministère des Affaires étrangères

● Les ratios de performance immobilière de l’immeuble de la rue de la Convention

L’installation des services du ministère des Affaires étrangères dans l'immeuble de la rue de la Convention a permis d’améliorer de façon très significative la performance immobilière qui s'impose aujourd'hui aux immeubles de l'État, telle qu'elle est définie par le ministère du Budget.

Ainsi, France Domaine cite-t-il cette expérience en matière d'aménagement de ses espaces de bureaux comme exemplaire et a-t-il fait procéder à des visites des locaux au profit de certains de ses agents. Le ratio de 10,45m² par agent travaillant sur le site illustre à titre principal la performance immobilière globale du bâtiment au regard des normes retenues par France Domaine.

La rénovation de l’immeuble de la rue de Convention a été conçue par son précédent propriétaire, avant son acquisition par l'État, selon les standards environnementaux en vigueur à l'époque, soit la norme RT2000. Le ministère des Affaires étrangères n’a procédé qu’aux travaux d’aménagement des espaces intérieurs en vue de les adapter à son usage ; certains travaux sont d’ailleurs en cours d’achèvement (CCM, espaces modulaires). Les caractéristiques fondamentales du bâtiment, acquis en 2007, sont conformes à ces normes. Il n'est pas envisagé dans l'immédiat d'évolution substantielle ou de changement des équipements neufs installés par le vendeur : isolation, éclairage, climatisation, alimentation énergétique, etc. Le ministère étudiera toutefois les moyens techniques d'améliorer la performance énergétique du bâtiment (notamment par l'installation de panneaux solaires sur la toiture) pour autant qu'ils présentent un coût/avantage satisfaisant et ne mettent pas en péril les garanties en cours sur les éléments livrés par le vendeur.

Un audit énergétique de l’immeuble devrait être réalisé d’ici à la fin de l’année 2009, conformément aux obligations du Plan administration exemplaire.

Dès l’installation définitive des services et la mise en fonction du centre de conférences ministériel, et après une année 2009 consacrée à d’importantes opérations de travaux et de déménagement, le ministère des Affaires étrangères va s’attacher à mettre en place des méthodes et outils allant dans le sens des objectifs du Grenelle de l’environnement. Ces objectifs ont été décrits dans le Plan administration exemplaire remis par ce ministère en 2009, conformément à la circulaire du 3 décembre 2008 relative à l’exemplarité de l’État au regard du développement durable dans le fonctionnement de ses services et de ses établissements publics.

ANNEXE N° 3 : DÉFINITION DES DIFFÉRENTES SURFACES NORMALISÉES

À quoi ça sert ?

En clair, comment la calcule-t-on ?

La Surface Hors œuvre Brute (S.H.O.B.)

C'est la surface de référence dite du maçon, dont découlent toutes les autres. Elle est définie au premier alinéa de l’article R. 112–2 du Code de l’Urbanisme comme « égale à la somme des surfaces de plancher de chaque niveau de la construction », y compris les combles et les sous-sols, aménageables ou non, les toitures terrasses ainsi que les niveaux intermédiaires tels que les mezzanines et les galeries.

Elle est calculée à partir du nu extérieur des murs de façades et au niveau supérieur du plancher. Elle doit donc prendre en compte tous les prolongements extérieurs d’un niveau (balcons, loggias, coursives) à l’exception des terrasses non couvertes de plain-pied avec le rez-de-chaussée.

En sont exclus tous les vides notamment ceux occasionnés par les cages d’escalier ou d’ascenseur : les marches d’escalier et paliers intermédiaires, les rampes d’accès et les trémies d’ascenseur ne sont pas considérées comme de la surface de plancher.

La Surface Hors Oeuvre Nette (S.H.O.N.)

La notion de SHON est importante car elle est utilisée pour apprécier la conformité des ouvrages construits aux règles d'urbanisme, en particulier pour celles qui font appel à des notions de densité de la construction. Ainsi c’est la SHON qui est calculée dans les permis de construire ou les certificats d'urbanisme et qui permet de vérifier si un projet respecte les droits à construire autorisés sur le terrain d'implantation, ou de déterminer les droits résiduels sur un terrain bâti, Elle sert donc de base pour le calcul des différentes taxes d'urbanisme, le versement résultant du dépassement de Plafond Légal de Densité ou la participation en cas de dépassement du Coefficient d'Occupation des Sols.

Elle s’obtient en déduisant de la S.H.O.B les surfaces de plancher :

• des sous-sols et des combles non aménageables pour l’habitation ou pour des activités à caractère professionnel, artisanal, industriel ou commercial, c'est-à-dire disposant de hauteurs sous toiture ou sous plafond inférieures à 1,80 m ou exclusivement affectés au fonctionnement technique de l’immeuble (chaufferie, système d’air conditionné, machinerie d’ascenseurs, installation téléphonique…) ;

• des toitures-terrasses, balcons, loggias et surfaces non closes du rez-de-chaussée ;

• des aires de stationnement des véhicules.

La Surface Utile Brute (S.U.B.)

On parle également parfois de surface balayable. C'est elle qui sert de référence pour le calcul du loyer. Car, bien qu'il n'y ait pas d'unité de compte de superficie légalement obligatoire en immobilier d’entreprise, la surface utile brute est généralement inscrite dans le bail. Et, en l'absence de définition réglementaire en délimitant clairement les contours, sa détermination laisse dans une certaine mesure : place à la négociation contractuelle.

Il s’agit de la surface horizontale située à l’intérieur des locaux et dégagée de toute emprise. Elle est égale à la SHON, déduction faite des éléments structuraux (poteaux, murs extérieurs, refends gaines techniques, circulations verticales…) sans déduire les embrasures à 1 mètre du sol, des locaux techniques hors combles et sous sols (chauffages, ventilation, poste EDF, commutateur téléphonique) à l’exclusion de ceux exclusivement réservés à l’usage d’un locataire ou d’un co-propriétaire (salles informatiques par exemple). S’agissant des parties communes, un calcul basé sur une répartition par quote-part est généralement appliqué.

La Surface Utile Nette (S.U.N.)

Elle permet d’établir la surface effectivement réservée aux espaces de travail (bureaux, ateliers, laboratoires, salles de réunion, etc.).

Elle est obtenue en déduisant de la surface utile brute la quote-part pour les parties communes, les locaux techniques non partagés, les circulations horizontales (couloirs, paliers d’ascenseur et d’escalier, sas de sécurité) ainsi que les locaux sociaux et les sanitaires.

Source : CB Richard Ellis France, août 2008 (11)

TABLEAU RÉCAPITULATIF DES ÉLÉMENTS PRIS EN COMPTE DANS LES DIFFÉRENTES DÉFINITIONS

 

SHOB

SHON

SUB

SUN

Murs extérieurs

x

x

   

Murs intérieurs porteurs

x

x

   

Cloisons fixes

x

x

   

Cloisons mobiles

x

x

x

 

Toitures terrasses, aménageables ou non

x

     

Balcons, loggias…

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Vérandas non closes

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Coursives permettant l’accès à des locaux et vérandas closes

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Combles ou sous-sols aménageables (réserves foncières)

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Combles ou sous-sol non aménageables (ou hsp<1m80)

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Sous-sols ou niveaux dédiés au parking

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Niveaux intermédiaires (mezzanine, galeries, paliers)

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Circulations verticales

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Locaux techniques en infrastructure (combles, sous-sol)

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Locaux techniques en étage courant assurant le fonctionnement de l’immeuble

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Locaux techniques en étage courant dédiés à l’usage d’un occupant

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Circulations horizontales

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Espaces d’attentes intégrés aux circulations

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Sanitaires

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Hall d’entrée et sas d’accès

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quote-part

 

Archives

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Éléments de décor, placards en saillie ou non des murs

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Bureaux, salles de réunion, cafétéria

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Exemple de répartition des surfaces
pour un plateau de bureaux en rez-de-chaussée

ANNEXE N° 4 :
LE PROJET DE REGROUPEMENT DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE À BALARD

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Le ministère de la Défense prépare le regroupement, à l’horizon 2014, de l’ensemble des états-majors et organismes centraux du ministère sur le site de Balard, situé dans le XVème arrondissement de Paris. Il s’agit d’une emprise de l’État (affectée au ministère de la Défense) et qui abritait pour l’essentiel des installations techniques de la direction générale de l’armement, et des bureaux de l’armée de l’air.

Ce site s’étendra sur deux parcelles de 16,5 ha au total, et permettra d’accueillir environ 10 000 agents répartis sur 320 000 m2 de bureaux. Le projet, qui sera réalisé sur la base d’un contrat de partenariat (PPP) au sens de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 modifiée, dont l’investissement de la tranche ferme est évalué à 600 millions d’euros, et dont le coût global annuel se traduira par une charge d’une centaine de millions d’euros environ.

La signature du contrat de partenariat devrait intervenir au premier semestre 2011. Les travaux débuteraient alors en novembre 2011 pour une livraison de l’ensemble immobilier fin 2014. Le dossier de consultation a été transmis en septembre 2009 aux candidats.

L'objectif poursuivi dans le cadre du projet Balard est triple :

– améliorer la gouvernance du ministère en rassemblant sur un site unique les états-majors et les directions actuellement dispersées sur une quinzaine de sites parisiens ;

– rationaliser la gestion des emprises immobilières de la Défense en libérant une ressource foncière importante en plein Paris ; par ailleurs, rationaliser le soutien et le fonctionnement de l'administration centrale, en mutualisant les ressources ;

– réussir un grand projet architectural qui marquera Paris et le ministère de la Défense, tout en améliorant substantiellement le cadre de travail des personnels civils et militaires.

Le site de Balard (Paris 15ème) comprend deux parcelles Est (8,5 ha), actuelle « Cité de l’Air », et Ouest (8 ha), séparée par l’avenue de la Porte de Sèvres. La parcelle Ouest sera divisée en deux parties, par une voie nouvelle prévue au plan local d’urbanisme de Paris :

– d’une part, cinq hectares servant de réceptacle aux immeubles neufs du ministère de la Défense et, notamment, à ses zones les plus sensibles ;

– d’autre part, trois hectares en extrémité occidentale du site (ou « Corne Ouest »), près de l’emprise de SAFRAN, pour une valorisation sous forme d’immeubles locatifs de bureaux.

Sur le plan fonctionnel, le projet prévoit l'installation à Balard de 10 000 personnes de l’administration centrale : le ministre et son cabinet, le secrétaire d’État à la Défense et son cabinet, l'état-major des armées, les états-majors des trois armées, la délégation générale pour l’armement, le secrétariat général pour l’administration, les centres opérationnels des armées (CPCO), le centre opérationnel des forces nucléaires (COFN) et l’ensemble des services centraux de la Défense.

Le projet intègre également toutes les facilités nécessaires : centres de restauration pour 10 000 personnes, salles de sport, centre de communication, crèches pour les personnels et les habitants du XVème arrondissement, etc.

Le cas échéant, le projet devra intégrer la réalisation d’un garage à bus de la RATP prescrit par le plan local d’urbanisme (PLU) de Paris.

En termes de travaux, le projet comporte trois volets :

– construction de 140 000 m² SHON de bâtiments neufs ; principalement à l’Ouest du site (au plus 130 000 m²) ;

– rénovation de 140 000 m² SHON de bâtiments existants sur la parcelle Est et du bâtiment Perret (17 000 m²) ;

– dans l'optique de générer des recettes annexes, construction de 90 000 m² de bureaux locatifs et commerces sur la Corne Ouest.

La rénovation des deux tours de la Cité de l’Air est d’ores et déjà engagée sous maîtrise d’ouvrage publique. La Tour « F », actuellement en chantier, sera livrée en août 2011. La Tour « A » (anciennement « Tour de la DGA ») sera livrée en avril 2012.

Le projet doit être réalisé dans le cadre d’un contrat de partenariat public-privé, intégrant la conception architecturale et technique, la construction ou la rénovation, l’entretien et la maintenance, les services. Le contrat intégrera la réalisation et la maintenance des réseaux informatiques. Le cas échéant, la fourniture des postes informatiques pourra être également intégrée. La démolition est assurée préalablement par l’État en 2010, hors contrat de partenariat. La durée du contrat est a priori fixée à 30 ans (négociable dans la limite de 35 ans).

Du point de vue architectural, le projet devra respecter les normes du PLU, notamment le COS de 3 et la hauteur maximale de construction de 31 mètres. L’essentiel de la construction neuve et de la rénovation sera effectué entre décembre 2011 et juin 2014. Une partie de la rénovation de la Cité de l’Air pourra être décalée jusqu’en mai 2016. Les principales prestations de service intégrées dans le contrat (externalisation) sont les suivantes : restauration, gardiennage extérieur, gestion de l’hébergement des militaires sur le site, assistance bureautique, etc.

Le calendrier prévisionnel est le suivant.

2 juin 2009

lancement de la procédure de contrat de partenariat

15 juillet 2009

réception des dossiers de candidature

21 septembre 2009

remise du dossier de consultation des entreprises (DCE)

24 novembre 2009

remise des pré-esquisses architecturales

15 décembre 2009

élimination pour chaque candidat de deux pré-esquisses architecturales

Janvier 2010 à janvier 2011

déroulement du dialogue compétitif

Février 2011

choix du titulaire

Avril 2011

signature du contrat

Mai à novembre 2011

dépôt, instruction et délivrance du permis de construire

Décembre 2011

début du chantier

Juin 2014

fin du chantier principal

Juillet à décembre

levée des réserves, prise de possession des immeubles,

transfert des personnels

31 décembre 2014

fin du transfert des personnels, libération des emprises parisiennes.

30 avril 2016

fin de la rénovation des bâtiments de la parcelle Est

Le coût d’investissement annoncé est de l’ordre de 600 millions d’euros, tandis que le loyer annuel devrait être supérieur à 100 millions d’euros pendant 27 années et demie (30 ans moins la durée de la construction). Sur le plan financier, afin d'assurer de contrôler le capital de l'opérateur, un protocole a été passé avec la Caisse des dépôts et consignations pour que celle-ci dispose d’une minorité de blocage (34 %) dans le capital de la société de projet, interlocuteur du ministère de la Défense pendant 30 ans. Sur le plan économique, l’impact de l’ensemble du projet de janvier 2012 à juin 2014 est estimé à environ 2 000 emplois dans les bureaux d’études, cabinets d’architectes et entreprises du BTP.

L'avis d'appel public à la concurrence a été publié le 2 juin dernier. Trois candidatures ont été reçues le 15 juillet 2009.

© Assemblée nationale

1 () http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r1775-tII.pdf

2 () http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i1780.pdf

3 () Cf ci-dessous.

4 () Voir le compte rendu de l’audition du ministre du Budget Éric Woerth le 13 janvier 2009, disponible sur le site Internet de l’Assemblée nationale à l’adresse : http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cfiab/08-09/c0809057.asp

5 () Cf la deuxième partie du présent rapport, sur les contrôles effectués par le Rapporteur spécial dans les services déconcentrés de l’État.

6 () Courrier envoyé le 26 décembre 2009.

7 () Hors bourses, qui sont gérées sur un des programme du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche pour un montant global d’environ 1,5 milliard d’euros.

8 () L’AMOTMJ est visée dans plusieurs lois, ainsi celle du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

9 () Composé du bureau programmation et investissement immobilier, du bureau études et opérations immobilières et du service immobilier du Palais de justice de Paris.

10 () À l’exception des services de la direction générale de l’Aviation civile.

11 ( http://www.cbre.fr/fr_fr/metiers/amenagement_despace/amenagement_despace_content/ amenagement_despace_right/focussurfaces.pdf