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N
°2860

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2010

AVIS

présenté

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2011 (n° 2824),

TOME XI
VILLE ET LOGEMENT

VILLE

PAR M. Michel PIRON,

Député.

——

Voir le numéro : 2857 (annexe 46)

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : LE PROGRAMME 147 POLITIQUE DE LA VILLE 9

I.— LES PERFORMANCES SATISFAISANTES DES NOMBREUSES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DES QUARTIERS MASQUENT UN DÉFICIT DE TERRITORIALISATION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE 9

A.— UN DÉPLOIEMENT DE PROGRAMMES AMBITIEUX QUI OBTIENNENT D’ORES ET DÉJÀ DES RÉSULTATS POSITIFS 10

1. La discrimination positive, instrument de rattrapage à destination des habitants des quartiers 10

a) Le programme de réussite éducative 11

b) Le dispositif « adultes relais » 13

2. La rénovation urbaine, une action sur l’urbain à l’origine d’effets sociaux positifs incontestables 14

a) Un avancement des travaux satisfaisant 14

b) Des effets sociaux positifs incontestables 14

B.— DES RÉPONSES STÉRÉOTYPÉES AUX PROBLÈMES DES QUARTIERS PAR MANQUE DE TERRITORIALISATION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE 16

1. L’insuffisance des services déconcentrés de l’État suite à la réforme générale des politiques publiques 16

2. Une diversité des situations insuffisamment prise en compte 17

a) Un mécanisme institutionnel producteur d’uniformisation 17

b) Des quartiers pourtant très divers 17

c) Des efforts croissants pour mesurer l’état socio-économique des quartiers qui doivent se traduire par une évolution des politiques publiques 18

II.— AU-DELÀ DE LA SÉCURISATION DU FINANCEMENT DES ACTIONS EN FACTEUR DES QUARTIERS, IL IMPORTE DE DÉFINIR L’ÉCHELLE À LAQUELLE DOIT ÊTRE MENÉE LA POLITIQUE DE LA VILLE 19

A.— NE PAS SE CONTENTER D’UN MAINTIEN DES CRÉDITS À COURT TERME, RÉCLAMER DAVANTAGE DE VISIBILITÉ À LONG TERME 19

1. Une baisse des crédits de la politique de la ville contenue malgré la rigueur budgétaire 19

2. Un manque de visibilité sur les perspectives futures subi par les acteurs de la politique de la ville et les habitants des quartiers 21

a) Des opérateurs qui s’engagent dans une démarche de performance sans contrepartie de moyens 21

b) Un mécanisme de financement du PNRU peu académique qui ne remet pourtant pas en cause le déploiement du PNRU 22

c) Une incertitude qui plane sur les entreprises présentes dans les zones franches urbaines 23

B.— FAIRE MIEUX AVEC AUTANT : LA RÉFORME DE LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE ET DE LA GOUVERNANCE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE 24

1. Diriger les crédits « Politique de la ville » vers les publics prioritaires 24

2. Octroyer davantage de fongibilité aux acteurs locaux, sous réserve d’un fléchage rigoureux des crédits 26

a) Plus de mutabilité, plus de responsabilité 26

b) Une vision à l’échelle de l’agglomération nécessaire à la résolution des problèmes de fond des quartiers 27

c) Une redistribution des rôles entre les acteurs de la politique de la ville 27

DEUXIÈME PARTIE : LE PROGRAMME 177 PRÉVENTION DE L’EXCLUSION ET INSERTION DES PERSONNES VULNÉRABLES 31

I.— UNE PRIORITÉ : LE « LOGEMENT D’ABORD » 31

A.— UNE MONTÉE EN RÉGIME DE MESURES NOVATRICES 31

1. Produire du logement accessible 31

2. Mobiliser le parc existant 31

3. Favoriser la transition entre hébergement et logement 33

B.— UNE PÉNURIE DE LOGEMENTS DISPONIBLES QUI CONDUIT À UN ENGORGEMENT DU DISPOSITIF D’HÉBERGEMENT ET DE VEILLE SOCIALE 34

1. La politique du logement face à des blocages structurels 34

2. Le sans-abrisme : un phénomène en expansion et en perpétuelle évolution 34

II.— UNE NÉCESSITÉ : LA MODERNISATION DE L’HÉBERGEMENT D’URGENCE ET DE LA VEILLE SOCIALE 35

A.— LE RETOUR À LA SINCÉRITÉ BUDGÉTAIRE : UN EFFORT NOTABLE À DESTINATION DES ASSOCIATIONS ET DE L’ÉTAT 35

1. Une augmentation budgétaire significative en trompe l’œil 35

2. Une visibilité accrue pour les services de l’État et le monde associatif grâce à la fin de la pratique des décrets d’avance 36

B.— UNE « HUMANISATION » DU PARC D’HÉBERGEMENT BIENTÔT TERMINÉE, UNE RATIONALISATION EN COURS DE LANCEMENT 36

1. Une création de places à un rythme soutenu parallèle à une amélioration des places existantes 36

2. Une rationalisation du dispositif nécessaire à l’harmonisation des services proposés aux sans-abri 37

a) Une harmonisation nécessaire des prestations délivrées par les associations 37

b) Vers un véritable « service public de l’hébergement et de l’accès au logement » ? 38

EXAMEN EN COMMISSION 41

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 85

« Chaque ville diffère de toutes les autres : il n'y en a pas deux semblables. Et une ville a des émotions d'ensemble ». John Steinbeck, La Perle

MESDAMES, MESSIEURS,

Votre rapporteur a la charge d’examiner les crédits des programmes « Politique de la ville » et « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables ». Le premier programme est consacré à l’ensemble des actions mises en œuvre en faveur des quartiers prioritaires. Le second a trait au financement du dispositif d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans domicile.

Ces deux domaines de l’action publique semblent relativement éloignés. Néanmoins, plusieurs similitudes et rapprochements peuvent être dégagés.

S’agissant de leur contenu, tout d’abord, la lutte contre le phénomène du sans-abrisme et les efforts soutenus en destination des habitants de quartiers défavorisés relèvent de ce que l’on qualifie, au sens large, de la « politique du logement » – leur rattachement à la mission éponyme n’est donc pas usurpée. D’un côté, la solution au problème du sans-abrisme se trouve dans le développement d’une offre de logement à destination des personnes les plus vulnérables. De l’autre, les difficultés d’accès au logement et l’urbanisme ont leur part de responsabilité dans les difficultés rencontrées par les habitants des quartiers, ce qui justifie notamment l’existence du Programme national de rénovation urbaine (PNRU).

S’agissant de l’ambition qui guide ces deux programmes, ensuite, votre rapporteur la qualifiera d’ « élevée ». La politique de la ville et la prise en charge des personnes sans abri ou mal logées ont toutes deux été érigées par le Gouvernement actuel au rang des priorités. La politique de la ville a fait l’objet d’une relance, à travers la « dynamique Espoir banlieues », annoncée le 8 février 2008 par Nicolas Sarkozy. Mme Fadela Amara, Secrétaire d’État à la Ville, est ainsi chargée de la mise en œuvre d’un plan que l’on a été jusqu’à surnommer le « Plan Marshall des banlieues ». Le programme 177 n’est pas en reste : suite à la remise du rapport du député Étienne Pinte, le 29 janvier 2008, le Premier ministre a déclaré l’hébergement et l’accès au logement « Chantier national prioritaire 2008-2012 ». L’objectif fixé est que nul ne soit contraint de vivre dans la rue ou dans un habitat indigne. M. Alain Régnier, nommé délégué général, puis délégué interministériel pour la coordination et l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées, a pour mission de suivre l’avancée des travaux menés dans le cadre du Chantier prioritaire.

S’agissant de l’effort budgétaire qui leur est consacré, enfin, est-il à la hauteur des ambitions proclamées ? Là encore, il faut signaler les similitudes entre les deux programmes, qui n’ont pas subi de diminutions significatives de leurs crédits, malgré le contexte de rigueur budgétaire. Il appartiendra néanmoins à votre rapporteur de véritablement s’assurer qu’au maintien, en apparence, du niveau des crédits associés à ces programmes, est associé un maintien effectif de l’effort financier en direction des quartiers ou des personnes sans-abri ou mal logées.

Dans sa volonté de synthèse, votre rapporteur voudrait examiner les programmes 147 et 177 sous un angle commun, celui de la gouvernance. Cette question, qui paraît éloignée de la discussion budgétaire, est en fait intimement liée à celle-ci. Il s’agit, avant tout, de s’interroger sur la façon dont sont dépensés les crédits. Une chose est de respecter la définition de la performance inscrite dans la LOLF – réaliser des objectifs fixés à partir d’indicateurs. Parvenir à une dépense réellement efficiente des crédits en est une autre. À ce titre, seule une gouvernance bien pensée permettrait de réaliser les dépenses adaptées aux problèmes rencontrés par les citoyens. Votre rapporteur s’interrogera dans un premier temps sur ce que serait la « bonne » échelle décisionnelle de la politique de la ville. À partir du bilan des différentes mesures mises en œuvre dans les quartiers et du constat de certaines de leurs insuffisances, il montrera en quoi l’organisation actuelle des administrations chargées de la politique de la ville doit être aménagée pour s’ajuster davantage aux réalités locales. S’intéressant ensuite à l’organisation du dispositif de l’hébergement d’urgence et de l’accès au logement, votre rapporteur constatera que la puissance publique et le monde associatif ne réaliseront pas leur ambition commune tant que ne sera pas mis un terme au cloisonnement des structures et des politiques publiques du secteur.

PREMIÈRE PARTIE : LE PROGRAMME 147

POLITIQUE DE LA VILLE

I.— LES PERFORMANCES SATISFAISANTES DES NOMBREUSES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DES QUARTIERS MASQUENT UN DÉFICIT DE TERRITORIALISATION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

Une configuration institutionnelle novatrice
qui a pour but de s’adapter aux spécificités de la politique de la ville

La politique de la ville : transversalité et ciblage territorial

La politique de la ville est un principe ancien, qui consiste en un traitement territorial particulier mis en œuvre au nom de l’équité. Elle rompt avec le principe républicain d’égalité à l’échelle du territoire national qui avait prévalu jusqu’alors, mais se justifie sur des territoires qui concentrent des populations précarisées.

Articulant action urbaine, sociale, scolaire et économique, la politique de la ville se caractérise par une remarquable transversalité, et, dans le même temps, par un ciblage territorial extrêmement précis. Sa mise en œuvre s’est donc accompagnée d’innovations importantes en matière d’organisation administrative, avec l’objectif d’adapter les services administratifs et le niveau territorial aux spécificités de l’action à mener.

Une organisation administrative complexe, mêlant interministérialité, décentralisation fonctionnelle (1), décentralisation territoriale, déconcentration et démocratie participative.

Par son double caractère interministériel et contractuel, la politique de la ville met en jeu, autour de l’État, de nombreux intervenants institutionnels et associatifs. Au niveau national, la politique de la ville est interministérielle. Le comité interministériel des villes (CIV) est l’instance gouvernementale qui arrête les orientations de la politique de la ville, définit les programmes qui la mettent en œuvre et répartit les moyens. Le secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV), est chargé de préparer les travaux du CIV et de veiller à l’application de ses décisions. Quant au Conseil national des villes (CNV), il s’agit d’une instance participative rassemblant élus locaux, responsables associatifs, syndicalistes et personnalités qualifiées. Il peut être saisi par le gouvernement sur toute question ayant trait à la politique de la ville, et émet des avis. Le nouveau CNV a été installé par François Fillon le 25 mai 2010.

Trois établissements publics nationaux concourent, sous la tutelle du SG-CIV, à la mise en œuvre de la politique de la ville. L’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) a été créée par la loi Borloo afin de simplifier et d’accélérer les procédures de financement des opérations de rénovation urbaine en mutualisant l’ensemble des crédits disponibles. L’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (ACSE), créée par la loi de 2006 pour l’égalité des chances et mise en place courant 2007, est chargée des opérations en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Enfin, l’établissement public d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) a été créé en 1996 pour restructurer les pôles commerciaux situés sur les territoires de la géographie prioritaire de la politique de la ville.

Au niveau local, le préfet de région dirige les nouvelles DRJSCS (directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale), dans lesquelles ont été intégrés, depuis 2010, les services régionaux de l’ACSÉ et de l’ANRU. Les préfets de département s’appuient sur les DDCS (directions départementales de la cohésion sociale). Dans les départements les plus concernés, ils sont épaulés de préfets délégués à l’égalité des chances, de sous-préfets à la ville et de délégués du préfet dans les quartiers. Les préfets de département sont responsables de la mise en œuvre de la contractualisation avec les collectivités territoriales, par le biais de la signature des Contrats Urbains de Cohésion Sociale (CUCS). Ces contrats, signés en 2007 pour une durée de trois ans, fédèrent les actions de l’ensemble des partenaires de l’État au service d’un projet portant sur cinq champs prioritaires (emploi et activité économique, habitat et cadre de vie, réussite éducative, prévention de la délinquance et citoyenneté, santé).

De cette description de l’appareil administratif mis en place pour faire vivre la politique de la ville ressort une impression de complexité. Il semble important à votre rapporteur d’interroger la pertinence de ce dispositif et, notamment, de vérifier que la responsabilité propre de chacun des acteurs puisse bien être distinguée.

A.— UN DÉPLOIEMENT DE PROGRAMMES AMBITIEUX QUI OBTIENNENT D’ORES ET DÉJÀ DES RÉSULTATS POSITIFS

L’administration centrale de la politique de la ville a été réduite à son plus simple appareil et ne joue qu’un rôle de pilotage et de tutelle. L’ACSÉ et l’ANRU sont les nouveaux dépositaires de la décentralisation fonctionnelle opérée par l’État en matière de politique de la ville. Les deux agences sont en charge de l’« ingénierie » des différents dispositifs. Votre rapporteur s’est efforcé d’obtenir des services de ces deux agences, mais aussi du SG-CIV, l’autorité de tutelle, une évaluation des actions menées à destination des quartiers. Il ressort des auditions qui ont été conduites que l’ACSÉ et l’ANRU mobilisent des moyens importants et, dans les cas où des études d’impact ont été menées, obtiennent des résultats satisfaisants.

1. La discrimination positive, instrument de rattrapage à destination des habitants des quartiers

L’ACSÉ constitue, dans le cadre du programme 147, le principal récipiendaire de crédits destinés aux actions de terrain. L’exécution 2010 de l’unité budgétaire ACSÉ devrait s’élever à 396 millions d’euros, sur un total de 705 millions d’euros pour l’ensemble du programme. La part des crédits de la politique de la ville dont l’exécution est confiée à l’ACSÉ s’élève donc à 61 % ; cette part atteint 96 % lorsque l’on exclut du calcul les exonérations de charges sociales et d’impôts en ZFU et ZRU ainsi que les subventions à l’Établissement public d’insertion de la défense (EPIDE), à la charge du SG-CIV.

L’ACSE met en œuvre la politique de la ville à travers des actions de discrimination positive. Parmi ces actions, elle a la responsabilité des deux dispositifs du programme 147 les plus massifs en termes de crédits : les programmes « Réussite éducative » et « Adultes relais », qui représentent 83 millions d’euros et 76,6 millions d’euros. Ces chiffres illustrent à quel point l’ACSÉ peut être considérée comme l’outil privilégié de la politique de la ville, ce qui justifie l’attention portée son action ainsi qu’aux effets de celle-ci sur la population des quartiers.

a) Le programme de réussite éducative

La loi de programmation n°2005-32 du 18 janvier 2005 pour la cohésion sociale a permis la mise en œuvre du programme de réussite éducative, conçu pour prendre en charge les élèves en difficulté par une intervention sur un champ plus large que le seul champ scolaire. À ce jour ont été validés 531 programmes de réussite éducative (PRE), dont 520 connaissent une activité régulière en 2010 dans le cadre des CUCS.

Le programme de réussite éducative en chiffres

Durant l’année scolaire 2009-2010, le programme de réussite éducative a représenté :

- 135 000 bénéficiaires

- 60 000 parcours

- 740 communes

- près de 1 600 quartiers, dont la moitié classés en quartier CUCS 1

- 1 550 équipes de soutien actives

- une durée de prise en charge moyenne des élèves de 19 jours.

Votre rapporteur souligne son adhésion au principe de l’individualisation du suivi des élèves que permettent les PRE.

Une croissance de l'individualisation des PRE entre 2007 et 2010

 

2007

2008

2009

2010

Proportion de parcours individualisés

23%

20%

35%

45%

Source : ACSÉ

Une première enquête a été adressée aux PRE portés par un établissement public d'enseignement local EPLE (2). Six qualificatifs (très mauvais, mauvais, passable, moyen, bon et très bon) étaient proposés afin que les responsables locaux du PRE qualifient l’évolution de la situation des enfants concernés selon trois critères : les résultats scolaires, la motivation vis-à-vis des apprentissages, les relations entre établissement scolaire et parents. Le tableau suivant permet de répertorier les améliorations sur ces trois critères et de constater un effet très positif de la mise en œuvre des PRE, proche de 100 % pour les 2 premiers critères, et de 75 % pour le 3ème.

Améliorations consécutives à la mise en œuvre d'un PRE

Amélioration

Oui +

Oui

Pas d’amélioration

Non renseigné

Résultats scolaires

23,08%

76,92%

0,00%

 

Motivation

46,15%

46,15%

7,69%

 

Relations entre établissement scolaire et parents

46,15%

30,77%

15,38%

7,69%

Source : ACSÉ

Selon le codage proposé, des améliorations sont constatées dans tous les domaines. Le passage d’un qualificatif au qualificatif supérieur est quasi-systématique (colonne oui). Mieux, pour près de la moitié des cas analysés, l’amélioration de la motivation se traduit par un glissement de deux qualificatifs (colonne oui +).

Finalement, cette enquête corrobore l’avis de la présidente du Conseil d’orientation de l’Observatoire national des zones sensibles (ONZUS) : « on peut relever que les collèges bénéficiant de ce dispositif voient leur taux de succès s’améliorer tout en restant très loin des résultats nationaux ». Les PRE sont une première étape vers une prise en compte spécifique des élèves des établissements en difficulté, mais doivent être complétés par d’autres mesures. Dans le cadre du volet éducation de la dynamique « Espoir banlieues », l’ACSÉ mène plusieurs actions nouvelles :

– le « Busing », initié en septembre 2008 sur le modèle américain, organise le transport en bus d’élèves de quartiers défavorisés vers des écoles offrant une plus grande mixité sociale ;

– les internats d’excellence permettent d’offrir un cadre structurant et un accompagnement éducatif renforcé pour les élèves en situation de fragilité ;

– le dispositif des « cordées de la réussite » met en relation grandes écoles, universités et établissements scolaires situés dans des quartiers prioritaires. Il a pour but de rapprocher, tant scolairement que culturellement, les élèves des quartiers de débouchés qui leur sont statistiquement fermés.

De plus, ces actions ne sont pas cloisonnées entre elles ; l’ACSÉ s’efforce de développer une complémentarité entre les différents dispositifs, de façon à offrir aux élèves des quartiers prioritaires un accompagnement complet. Ainsi, les « cordées de la réussite » seront-elles mises en place avec plus d’efficacité dans les internats d’excellence, où les élèves bénéficient d’un cadre de travail approprié. Toutefois, votre rapporteur souligne le danger que peut représenter une complémentarité des dispositifs qui concentrerait les actions sur un nombre trop restreint de bénéficiaires. Il importe d’offrir les mêmes outils à l’ensemble des élèves qui en éprouvent le besoin.

b) Le dispositif « adultes relais »

La médiation sociale est une fonction aujourd’hui reconnue et soutenue. Le programme adulte relais a été créé par le comité interministériel des villes (CIV) du 14 décembre 1999 afin d’offrir un cadre stable aux nombreuses initiatives locales existantes visant à favoriser le lien social par des actions de médiation dans les sites de la politique de la ville. 4 230 postes d’adultes relais ont été notifiés en 2009 aux préfectures de métropole et des DOM.

Consciente de l’important poids budgétaire du programme, l’ACSÉ a souhaité procéder à une enquête approfondie en 2009 basée sur l’interrogation par questionnaire de 2 000 employeurs d’adultes relais et sur une enquête qualitative portant sur 60 postes. Cette étude complète celle précédemment réalisée par le Centre d’études de l’emploi en juin 2008 auprès de 30 structures employeuses. Les résultats de tels travaux mettent en valeur un impact positif des adultes relais sur les points suivants :

– ils assurent une fonction pacificatrice qui permet une régulation des conflits, la diminution du sentiment d’insécurité et l’amélioration de la tranquillité publique ;

– dans le champ scolaire, les adultes relais participent à la diminution de l’absentéisme, l’amélioration des résultats scolaires et l’implication des parents dans la scolarité de leurs enfants ;

– ils jouent un rôle dans la diminution de l’isolement et la mobilisation des publics ;

– ils facilitent l’accès des habitants des quartiers au droit, aux services publics, aux institutions, mais aussi aux loisirs pour les enfants ;

– le dispositif donne un accès prioritaire à un emploi aux femmes des quartiers ; près de 70 % des adultes relais intervenant dans la médiation généraliste et 65 % de ceux intervenant dans la médiation scolaire sont des femmes. En revanche, 70 % des adultes relais intervenant dans le champ de la médiation dans les espaces publics sont des hommes.

L’étude qualitative de l’effet des adultes relais dans les quartiers fait donc ressortir des résultats optimistes, qui justifient pleinement l’effort budgétaire consenti.

En conclusion, votre rapporteur souligne donc l’importance de perpétuer ces deux dispositifs phares de la politique de la ville. D’autres dispositifs, comme les « Ateliers santé ville » ou bien l’opération « Ville, vie, vacances », jouent un rôle positif dans la réduction des inégalités sanitaires, culturelles, économiques, et sociales entre habitants des quartiers et reste de la population. Plus modestes en termes de crédits budgétaires, ils ne feront pas l’objet d’une présentation dans ce rapport pour avis.

2. La rénovation urbaine, une action sur l’urbain à l’origine d’effets sociaux positifs incontestables

a) Un avancement des travaux satisfaisant

Le Comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU estime que l’ANRU ne réalisera que les deux tiers du programme initialement prévu. Le directeur général de l’agence, M. Pierre Sallenave, n’a pas contesté ce chiffre, mais n’a pas non plus estimé qu’il traduisait un quelconque échec dans la mise en œuvre du PNRU. En effet, l’objectif d’origine, fixé par la loi de cohésion sociale de 2005, était de reloger quatre millions de personnes, ce qui avait donné lieu à une estimation de 250 000 logements à démolir. Or, le programme de rénovation s’est affiné au fur et à mesure de son avancement et de l’élaboration de chacun des projets qui le composent. D’une vision globale reposant sur des estimations, l’ANRU est passée à un pilotage projet par projet. Les impératifs locaux de faisabilité ont donc conduit à revoir à la baisse les projets de départ, sans que l’on puisse parler pour autant de recul des objectifs de l’ANRU, mais plutôt d’un calibrage précis.

L’objectif véritable que se fixe l’agence est de rénover 500 quartiers. À ce titre, on peut considérer que le PNRU est bien engagé : au 1er juin 2010, 390 projets de rénovation urbaine ont été approuvés par le comité d’engagement (dont 370 conventions signées), représentant 485 quartiers (dont 199 prioritaires) et 3,31 millions d’habitants. Ces projets validés en comité d’engagement portent sur la reconstitution de 128 075 logements sociaux, la réhabilitation de 314 294 logements sociaux, la démolition de 135 291 logements sociaux, la résidentialisation de 331 808 logements, mais aussi le financement d’aménagements, d’équipements, de requalification d’habitat privé dégradé en quartiers anciens ou de changement d’usage.

L’élaboration des conventions étant largement achevée, le PNRU est aujourd’hui pleinement dans une phase de mise en œuvre. Le programme global pour 2004-2013 est financièrement engagé à 52 % au 31 décembre 2009, soit une progression de 16 points par rapport au 31 décembre 2008. La montée en charge du programme se poursuit, et le retard initial de l’engagement des opérations par rapport aux calendriers prévisionnels des conventions diminue fortement : le ratio engagement/programmation, qui était de 47 % sur la période 2004-2008, est de 61 % sur la période 2004-2009. On observe également une augmentation des paiements aux maîtres d’ouvrage : le montant cumulé des dépenses d’intervention atteint 2,356 milliards d’euros à la fin de l’exercice 2009, soit 39,5 % des engagements. Pour l’exercice 2009, les paiements représentent un montant de 955,6 millions d’euros, soit une progression de 61 % par rapport à 2008. Les paiements sont supérieurs de 165 millions d’euros à l’objectif défini au budget 2009.

b) Des effets sociaux positifs incontestables

Tout d’abord, votre rapporteur souhaiterait insister sur le fait que le PNRU est bien accepté par les populations des quartiers rénovés. Alors que les projets de rénovation rencontrent, lors de leur lancement, un taux d’hostilité proche de 80 %, une fois le relogement effectué, ils obtiennent un taux de satisfaction supérieur à 50 %. Dans certaines villes, comme à Colmar, ce taux est proche de 90 %. Certes, une frange de la population, de l’ordre de 15 %, restera attachée à son quartier d’origine et s’opposera à la rénovation urbaine. Il n’en demeure pas moins que le taux d’acceptation globale des projets favorise leur effet social positif dans les quartiers.

S’agissant de l’effet de la rénovation sur les quartiers prioritaires, l’ANRU ne dispose pas encore de tendances nationales, mais a reçu des retours extrêmement positifs de certains projets. C’est dans les quartiers rénovés qu’ont été relevées les plus fortes baisses du nombre de faits délictueux constatées entre 2008 et 2009. Les quartiers d'Angers, de Toulouse, de Valenciennes, de Grigny, de Meaux, et de Clermont-Ferrand connaissent des améliorations significatives. A contrario, les dix quartiers qui ont connu la plus forte dégradation en matière de délinquance étaient pratiquement tous à l’écart de cette dynamique. De plus, une baisse importante du taux de chômage a été enregistrée dans des quartiers ayant bénéficié du PNRU, comme à Trélazé, où ce taux est tombé de 28 % à 13 %, ou encore comme Meaux.

Des quartiers qui faisaient peur, où personne ne voulait s’installer, sont redevenus fréquentables, voire recherchés, ne serait-ce que parce que les écoles y ont été refaites à neuf. Ainsi à Angers, à Belfort, à Lyon, à Grenoble, à Bordeaux, à Dreux, à Nantes, à Châteauroux, à Val-de-Reuil, au Havre. En témoignent les taux de vacance des logements, proches de s’annuler dans certains quartiers.

L’ACSÉ et l’ANRU mobilisent massivement des crédits à destination des quartiers. Votre rapporteur constate avec satisfaction que leurs actions produisent des effets tangibles dans la plupart des cas.

B.— DES RÉPONSES STÉRÉOTYPÉES AUX PROBLÈMES DES QUARTIERS PAR MANQUE DE TERRITORIALISATION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

Malgré l’importance des dispositifs mis en place et leur efficacité indéniable, votre rapporteur estime que la politique de la ville est loin de donner pleinement satisfaction. En dépit des moyens engagés jusqu’alors, elle échoue à résoudre les problèmes de certains quartiers. Le manque de territorialisation de la politique de la ville, qui aboutit à un traitement standardisé des problèmes, se heurte à la diversité des publics concernés.

1. L’insuffisance des services déconcentrés de l’État suite à la réforme générale des politiques publiques

La réforme des services déconcentrés engendre, jusqu’à présent, davantage de désorganisation que de rationalisation des personnels de l’État sur le terrain.

Au niveau régional, les DRJSCS (directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale) rassemblent des agents issus de services différents. Par exemple, les directions régionales de l’ACSÉ, issues de celles du FASILD (Fonds d'Action et de Soutien pour l'Intégration et la Lutte contre les Discriminations), qui avaient été instituées dans les années 1980, étaient composées d’agents contractuels ; à l’inverse, les agents issus des DRASS (Directions régionales de l’action sanitaire et sociale), dont une part seulement n’est pas passée sous le contrôle des Agences régionales de santé (ARS), sont des fonctionnaires. La différence de statut, autant que les habitudes de travail différentes rendent plus difficile, au moins dans un premier temps, l’action territoriale de l’État. Toutefois, l’importance des directions régionales permet de préserver des moyens d’actions suffisants.

En revanche, il ressort de plusieurs auditions menées par votre rapporteur que le niveau départemental est insuffisamment doté. L’action des services départementaux, les DDCS (directions départementales de la cohésion sociale) apparaît en recul, au regard des services de l’État historiques, DDASS et DDE. Les délégués du préfet, compte tenu de leur relative faiblesse, jouent un rôle central dans la mise en œuvre de la politique de la ville sur le terrain. Au nombre de 300, ils assurent la coordination des actions des services de l’État dans le quartier et la présence de l'État dans sa mission interministérielle. Ce sont les véritables interlocuteurs quotidiens des acteurs et partenaires locaux des contrats urbains de cohésion sociale.

Votre rapporteur met donc en valeur l’incertitude actuelle qui pèse sur la présence territoriale de l’État. L’importance croissante des délégués des préfets dans les quartiers doit-elle se traduire par un recul des services « classiques » ? Quel que soit le choix effectué, le maintien de moyens d’actions importants reste une condition sine qua non de la bonne marche de la politique de la ville.

2. Une diversité des situations insuffisamment prise en compte

a) Un mécanisme institutionnel producteur d’uniformisation

La diversité des dispositifs mis en place ne remplace pas le besoin d’une diversité des réponses apportées aux multiples quartiers défavorisés. Or, le maintien du caractère national de la politique de la ville, même après avoir procédé à une décentralisation fonctionnelle du pouvoir, ne laisse pas d’espace disponible à l’élaboration de solutions locales. Le mécanisme institutionnel de la politique de la ville, qui va directement du sommet de l’État vers le quartier, a pour conséquences d’unifier l’appréhension des problèmes et des actions à mener. Même en créant plusieurs sous catégories – dans l’ordre croissant des « difficultés » : quartiers couverts par des CUCS, zones urbaines sensibles, zones franches urbaines et zones de redynamisation urbaine –, le principe même du zonage uniformise.

b) Des quartiers pourtant très divers

Certaines villes sont confrontées à des phénomènes sans commune mesure avec ce qui se passe sur le reste du territoire, y compris dans des zones considérées comme sensibles. Deux cas de figure peuvent être distingués : d’une part, les quartiers « populaires », où l’objectif de mixité sociale fait sens, et où l’on peut espérer un rapprochement avec le reste de l’unité urbaine du quartier ; d’autre part, les quartiers « sas d’accueil » de l’immigration, dont les caractéristiques culturelles et sociales sont en touts points différentes. « En 2005, la proportion de jeunes d’origine étrangère dépasse 60 % dans 20 villes. Toutes, excepté Vaulx-en-Velin, sont en Île-de-France » relèvent Michèle Tribalat et Bernard Aubry (3). La proportion de jeunes d’origine étrangère a augmenté à l’échelle du territoire, mais elle a littéralement explosé dans quelques dizaines de ville.

Par ailleurs, comme l’explique l’une des personnes auditionnées, d’après la lecture d’un ouvrage de Luc Bronner, paru en 2010, La Loi du Ghetto, nous avons tendance à penser l’immigration d’un seul bloc, alors qu’il existe en fait d’importantes différences entre les populations immigrées. D’un point de vue social et culturel, les situations des personnes issues de l’Afrique du Nord ou de l’Afrique subsaharienne n’ont pas grand-chose à voir entre elles : arrivées en France plus tôt, les premières paraissent mieux intégrées que les secondes. Les populations maghrébines se sont en effet principalement installées en France dans les années 1960 alors que les familles issues d’Afrique subsaharienne, notamment du Sénégal et du Mali, ont commencé à arriver de façon significative, par la voie du regroupement familial, dans les décennies 1980 et 1990. Dans les populations qui viennent de cette partie de l’Afrique, on trouve un nombre important de familles avec très peu de ressources, un faible investissement scolaire, une connaissance limitée de la langue et des fratries nombreuses. Les populations qui arrivent aujourd’hui en France sont des familles qui s’installent dans des zones urbaines avec une conception très traditionnelle de l’éducation où tout le monde est responsable des enfants. Les primo-arrivants ont tendance à avoir la même attitude ici ; or, ce qui fonctionnait dans un monde rural n’est plus du tout adapté à une cité de 15 000 personnes. Les caractéristiques de l’immigration actuelle expliquent donc en partie l’existence de clivages importants entre quartiers prioritaires. D’autres phénomènes, comme le dynamisme de l’agglomération dans laquelle ils se trouvent par exemple, peuvent constituer d’autres facteurs de divergences.

Il ne s’agit bien évidemment pas de déplorer de tels clivages au sein même des zones sensibles, mais bien de penser une configuration institutionnelle qui permette de s’y adapter. Dès lors que le système français a fait le choix de donner plus de moyens aux habitants des quartiers pour tenir compte de leurs problèmes spécifiques, il doit aller jusqu’au bout, en adaptant les dispositifs aux caractéristiques des publics ciblés. La politique de la ville ne prend qu’insuffisamment en compte cet état de fait car elle se limite à une vision uniforme des quartiers.

c) Des efforts croissants pour mesurer l’état socio-économique des quartiers qui doivent se traduire par une évolution des politiques publiques

Pour saisir la réalité des quartiers et organiser la politique de la ville en fonction de celle-ci, encore faut-il s’appuyer sur un outil statistique adapté. La création de l’ONZUS constitue à ce titre un progrès notable : la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003 fixe à cette institution l’objectif de « mesurer l’évolution des inégalités sociales et des écarts de développement dans chacune des zones urbaines sensibles […], de mesurer les moyens spécifiques mis en œuvre et d’en évaluer les effets par rapport aux objectifs [fixés par la loi du 1er août 2003] ».

Sept ans après, une partie du chemin seulement a été parcourue. Une chose est de mesurer, s’appuyer sur les données recueillies pour faire évoluer la politique de la ville en est une autre. Nous faisons face à un système en tuyaux d’orgues : d’un côté, on dresse un panorama de la situation des quartiers ; de l’autre, on établit des indicateurs destinés à mesurer l’efficacité des politiques mises en œuvre. Les deux démarches suivent des logiques différentes, et sont portées par des personnes dont les intérêts ne convergent pas – trop de scientisme, peu de pragmatisme de la part des institutions statistiques ; pratique orientée de l’évaluation, difficulté à intégrer une logique d’évaluation systématique de la part des administrations en charge de la mise en œuvre.

En conclusion, votre rapporteur déplore le fait qu’à des avancées certaines – l’introduction d’une démarche systématique d’évaluation, la création de nouveaux dispositifs en même temps que le maintien d’autres plus anciens – répondent une standardisation de la prise en compte des quartiers et une incertitude sur les moyens accordés aux administrations mobilisées.

II.— AU-DELÀ DE LA SÉCURISATION DU FINANCEMENT
DES ACTIONS EN FACTEUR DES QUARTIERS, IL IMPORTE
DE DÉFINIR L’ÉCHELLE À LAQUELLE DOIT ÊTRE MENÉE LA POLITIQUE DE LA VILLE

A.— NE PAS SE CONTENTER D’UN MAINTIEN DES CRÉDITS À COURT TERME, RÉCLAMER DAVANTAGE DE VISIBILITÉ À LONG TERME

1. Une baisse des crédits de la politique de la ville contenue malgré la rigueur budgétaire

Les crédits du programme n° 147 « Politique de la ville » ont été réduits, en 2011, d’environ 100 millions d’euros. Alors que les autorisations d’engagement votées en 2010 s’élèvent à environ 714 millions d’euros, elles n’atteindraient que 618 millions d’euros en 2011. Cette diminution résulte :

– de l’extinction naturelle de certaines dépenses ;

– de mesures de transfert ;

– de l’application de la règle des moins 10 %, conformément aux lettres de cadrage envoyées le 11 mai 2010 par le Premier ministre aux membres du Gouvernement.

Source : Projet annuel de performance

Source : Projet annuel de performance

Les réductions de crédits sont concentrées sur deux actions :

– l’action n° 2, intitulée « Revitalisation économique et emploi », qui regroupe les crédits dédiés aux compensations aux régimes de sécurité sociale des exonérations de charges en zone franche urbaine (ZFU) et en zones de redynamisation urbaine et à la subvention pour charge de service public de l’établissement public d’insertion de la défense (EPIDE). En prenant en compte l’impact du recentrage du dispositif, qui s’achève en 2011, le montant des compensations d’exonérations de cotisations sociales aux organismes de sécurité sociale est de 198 millions d’euros. Le coût du dispositif diminue de 25 millions d’euros pour l’exercice 2011, soit une baisse de 12 %, en raison de la chute des montants liés aux exonérations de cotisations sociales patronales et, dans une moindre mesure, de la baisse des montants d’exonérations de taxe professionnelle.

– l’action n° 4, intitulée « Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie », regroupe le volet « amélioration du cadre de vie » de la dynamique « Espoir banlieues » et le programme national de rénovation urbaine. Or, la contribution de l’État à ce dernier étant très minoritaire, la réduction des crédits de cette action n’empêche en rien le déploiement du programme.

votre rapporteur constate avec satisfaction que le programme n° 1, « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville », qui regroupe l’ensemble des crédits des quartiers dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) ou les dispositifs spécifiques tels que la réussite éducative, les « adultes-relais », l’opération « Ville, vie, vacances », les internats d’excellence et les écoles de la « deuxième chance », n’est pas confronté aux réductions budgétaires, ce qui constitue un signal positif fort envoyé aux acteurs de la politique de la ville.

2. Un manque de visibilité sur les perspectives futures subi par les acteurs de la politique de la ville et les habitants des quartiers

a) Des opérateurs qui s’engagent dans une démarche de performance sans contrepartie de moyens

Une part essentielle de la performance inscrite dans les projets annuels de performance est de la responsabilité des opérateurs que sont l’ACSÉ et l’ANRU. Les deux agences sont ainsi concernées à titre principal par les objectifs n°s 3, 4 et 5.

Objectifs et indicateurs de performance du programme 147

OBJECTIFS

INDICATEURS

1

Renforcer la mixité fonctionnelle des territoires urbains prioritaires

1.1

Écart entre la densité d’établissements exerçant une activité d’industrie, de commerce ou de service dans les ZFU et celle constatée dans les unités urbaines correspondantes.

1.2

Écart entre l’évolution du nombre d’emplois salariés existant dans les ZFU et celle constatée dans les unités urbaines correspondantes.

2

Améliorer l’encadrement éducatif et les chances de réussite scolaire des élèves les plus en difficulté

2.1

Évolution des chances de « réussite scolaire » des élèves des ZUS.

2.2

Efficience de l’allocation de moyens consacrés à la réussite éducative et aux internats d’excellence.

3

Optimiser l’utilisation des fonds dédiés au programme, capitaliser les expériences et diffuser l’information

3.1

Part des crédits consacrés aux communes prioritaires (hors compensation des allègements de charges sociales).

3.2

Part des crédits mobilisés pour la rénovation urbaine selon le niveau de priorité des zones à rénover.

4

Améliorer la qualité de l’habitat pour les habitants concernés par le PNRU

4.1

Taux de couverture des démolitions par des reconstructions.

4.2

Respect de la programmation pour l’amélioration de l’habitat.

5

Maîtriser les coûts et les délais du programme national de rénovation urbaine

5.1

Respect du calendrier d’engagement du PNRU.

5.2

Évolution du coût moyen des opérations d’investissement financées dans le cadre du PNRU.

Source : Projet annuel de performance

Afin de s’inscrire dans une telle démarche de performance, chacune des agences a mis sur pied un système d’information qui permet de rendre compte de manière précise et localisée des actions conduites au titre de la politique de la ville. À titre d’exemple, l’ACSÉ dispose de nombreux indicateurs de moyens (nombre d’organismes subventionnés selon une typologie d’objectifs, par territoire, par catégorie d’organismes, répartition des subventions par montant et montant moyen des subventions selon une typologie d’objectifs et par territoire, délais moyens d’instruction et de mise en paiement), Elle travaille à un recueil a posteriori des données sur l’activité réelle des organismes subventionnés (nombre de bénéficiaires, ainsi que leur sexe, tranche d’âge, nationalité, territoire et rattachement éventuel à un CUCS, date de démarrage de l'action et durée). De plus, elle développe le contrôle de gestion afin de favoriser l’optimisation des fonds publics gérés par l’établissement.

Fruit de cette démarche de performance, l’ACSÉ a élaboré un document de performance proposant 14 indicateurs, dont 3 indicateurs inscrits dans le PAP, soumis au vote du conseil d’administration de l’agence et diffusé aux délégués départementaux de l’agence afin de les orienter vers les objectifs à atteindre. D’ores et déjà, le dialogue de gestion engagé chaque fin de semestre avec les délégués de l’Agence dans le cadre des demandes d’abondements de budget et de redistribution interdépartementale des crédits tient compte notamment du niveau d’atteinte des objectifs.

Cette démarche devait trouver sa concrétisation et sa formalisation dans la signature prochaine des contrats d’objectifs et de performance, dont votre rapporteur a eu connaissance. Or, selon les termes mêmes de M. Rémi Frentz, Directeur général de l’ACSÉ, il ne s’agit pas véritablement d’un contrat, mais plutôt d’une assignation unilatérale d’objectifs de la part de l’État. Alors que les conditions étaient remplies pour que la contractualisation entre l’État et son opérateur contienne un volet « moyens », le contrat d’objectifs et de performance, dans la version en attente de la signature du Premier ministre, ne comprend aucun engagement de l’État en matière d’évolution de postes ou de crédits.

b) Un mécanisme de financement du PNRU peu académique qui ne remet pourtant pas en cause le déploiement du PNRU

Jusqu’en 2008, il était prévu que le financement du PNRU soit assuré à parts égales par l’État et par le 1 % logement, rebaptisé par la suite « Action logement ». Le PLF de la mission « Ville et logement » a mis un terme à cet équilibre par une débudgétisation intégrale des engagements de l’État dans le PNRU. Pour les exercices 2009 à 2011, un décret en Conseil d’État, pris selon les dispositions prévues dans la loi de mobilisation pour le logement, a fixé la participation d’ « Action logement » au renouvellement urbain à hauteur de 770 millions d’euros. La contribution de l’État sur cette période est limitée à une subvention pour charge de service public destinée à couvrir les dépenses de fonctionnement de l’ANRU.

S’agissant de la période ultérieure à 2011, l’ANRU, dont la plupart des projets sont désormais entrés en phase de réalisation, devra faire face à une montée du niveau de paiements annuels. Ce niveau resterait supérieur au milliard d’euro jusqu’en 2015, avec un pic atteint en 2012 de l’ordre de 1,5 milliard d’euros. Si les dispositions du projet de loi de finances pour 2011, qui prévoient une dotation de 260 millions d’euros sur le programme 135 du ministère du logement, issue d’un nouveau prélèvement sur les bailleurs sociaux, permettent d’aborder l’année 2011 dans de bonnes conditions, la résolution de l’équation financière pour les années 2012 et 2013, avec des besoins annuels d’environ 1,5 milliard d’euros, restera subordonnée à un nouvel accord pluriannuel entre l’État et Action logement. Or, la situation financière d’Action logement rend complexe la signature d’un tel accord. La hausse des octrois de subventions, par opposition aux prêts, qui constituaient jusqu’à ces dernières années, le moyen d’action traditionnel du 1 % logement, assèche ses ressources annuelles, constituées pour moitié de retour de prêts et de produits financiers générés par sa trésorerie.

Votre rapporteur estime qu’il est de son ressort de s’inquiéter du manque de simplicité du dispositif de financement. Les difficultés rencontrées par Action logement ne sont pas de nature à susciter l’inquiétude des porteurs de projet car le financement du PNRU à hauteur de 12 milliards d’euros est garanti par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. En revanche, ces difficultés posent la question du mode de financement du PNRU 2, que la grande majorité des élus et des acteurs de la politique de la ville appellent de leurs vœux.

c) Une incertitude qui plane sur les entreprises présentes dans les zones franches urbaines

Les zones franches urbaines (ZFU) visent à favoriser l’installation d’entreprises par un dispositif d’exonération fiscales et sociales. La mise en place du dispositif s’est effectuée selon trois vagues successives, en 1997, 2004 et 2006. On dénombre aujourd’hui 100 ZFU, dont 93 en métropole.

L’évaluation des zones franches urbaines

Dans un article intitulé Zones Franches Urbaines : quels effets sur l’emploi salarié et les créations urbaines (4), Roland Rathelot et Bruno Sillard, ont procédé à l’évaluation du dispositif à l’aide de techniques économétriques. Leur approche a consisté à comparer des quartiers bénéficiant d’exonérations avec d’autres quartiers, aux caractéristiques socio-économiques similaires, qui se sont trouvés exclus du dispositif. Les résultats montrent que la politique des zones franches produit des effets positifs incontestables. S’agissant de la création d’établissements, le fait d’appartenir à une ZFU augmente de 24 points de pourcentage le taux de croissance des flux bruts de création d’établissement l’année d’attribution du label. Ensuite, le taux de croissance retombe au niveau qui prévalait avant le passage en ZFU. Ceci peut s’interpréter comme un choc modifiant durablement le niveau du flux sans en modifier la tendance. S’agissant de l’emploi, le passage en ZFU provoque une augmentation durable du stock d’emplois salariés de 18 % par rapport à son niveau en début d’année, avec, là encore, un effet de tassement une fois le choc absorbé. Par ailleurs, les auteurs estiment que la création d’entreprises en zone franche profite d’un «  effet d’aubaine » dans deux tiers des cas, le tiers restant correspondant à des créations d’entreprises qui n’auraient pas eu lieu sans la mise en place du dispositif.

Votre rapporteur estime que le dispositif des zones franches est un élément essentiel au maintien de l’activité économique dans les quartiers. Or, comme le confirme le SG-CIV, sous réserve d’une décision contraire, elles semblent définitivement condamnées. En effet, il est prévu que les exonérations, dégressives sur une durée de cinq ans, cessent à partir du 31 décembre 2011 pour les nouvelles implantations ; le dispositif serait donc amené à s’éteindre définitivement en 2017.

Il n’est pas envisageable qu’une telle disparition intervienne sans qu’un véritable débat public sur ce sujet se soit tenu. Le coût des exonérations pour l’État est certes conséquent, et il est légitime de le mettre en regard avec l’effet de l’exonération sur l’activité économique et l’emploi. Selon l’étude précitée, en 2005, le coût budgétaire des ZFU est de 125 millions d’euros pour un nombre d’emplois créés situé dans un intervalle de 1 700 à 11 000, soit un coût budgétaire par emploi créé de 11 000 à 73 000 euros. À titre de comparaison, le coût budgétaire d’un emploi créé par les mesures d’allègement de charges sur les bas salaires serait compris entre 11 000 et 29 000 euros, ce qui témoigne d’une plus grande efficacité de ces dernières. Il faut toutefois aller au-delà d’une simple comparaison de l’efficacité relative de chacun des dispositifs, qui aurait pour corollaire la suppression des zones franches sans autre forme de procès. Dans la mesure où les ZFU sont des territoires plus en difficulté, il est possible que le rendement d’une exonération soit plus faible qu’ailleurs, c’est-à-dire qu’il soit nécessaire d’y dépenser davantage pour un résultat similaire. De plus, mesurer les effets des ZFU en termes uniquement économiques est réducteur, car l’implantation d’activités économiques nouvelles produit nécessairement des effets sociaux positifs. Autant d’éléments qui poussent à ne pas condamner définitivement les zones franches sans s’être posé la question de leur succession.

La politique de la ville ne se trouve donc pas dans une situation aussi satisfaisante que la lecture du projet de loi de finances pour l’année 2011 ne le laisserait le croire : épargnée par la rigueur budgétaire, elle souffre toutefois du manque de visibilité à long terme sur les moyens qui lui sont accordés. Une telle situation génère des incertitudes fortes pour les acteurs de cette politique, ce qui va à l’encontre des efforts menés par ailleurs, qui ont pour objectif de rapprocher durablement la situation des quartiers de celle des unités urbaines auxquelles ils appartiennent.

B.— FAIRE MIEUX AVEC AUTANT : LA RÉFORME DE LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE ET DE LA GOUVERNANCE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

1. Diriger les crédits « Politique de la ville » vers les publics prioritaires

En dépit des moyens engagés jusqu’alors et des programmes de relance successifs, dont le dernier en date, la dynamique « Espoir banlieues », le fossé socioéconomique entre les quartiers de la politique de la ville et les entités urbaines dont ils font partie reste trop important, faute d’un ciblage adéquat.

La liste des zones urbaines sensibles remonte à 1996. Selon le SG-CIV, parmi les 750 ZUS actuelles, un tiers ne devrait plus faire l’objet de mesures au titre des politiques de la ville. Parallèlement, de nombreux quartiers qui sont à l’écart du zonage devraient être classés prioritaires, et bénéficier ainsi de moyens plus concentrés. De même, certains quartiers bénéficient encore de certains programmes alors qu’ils n’y sont plus éligibles, faute d’un réexamen régulier des conditions d’éligibilité. Cette rigidité nuit aux quartiers dont la population devrait constituer, en théorie, le cœur du dispositif.

Le dispositif de réussite éducative fournit une bonne illustration de ce phénomène. La loi de programmation pour la cohésion sociale de 2005 prévoyait que toutes les « zones urbaines sensibles » soient couvertes par un PRE. Or, fin 2009, on constate qu’une cinquantaine de ces quartiers prioritaires de niveau 1 ne le sont pas encore, notamment dans les départements de Seine-Saint-Denis et du Nord. Dans un contexte budgétaire tendu, cette situation ne devrait pas s’améliorer en 2011. Le budget inscrit au PLF 2011 pour la réussite éducative connaît une baisse de 7,8 %, passant de 83 millions d’euros, contre 90 millions d’euros en loi de finances 2010. L’élargissement aux territoires en difficulté de mesures qui ont fait la preuve de leur efficacité est paralysé par l’absence de remise en cause du périmètre des PRE en vigueur. Aucune labellisation nouvelle n’est ainsi intervenue au cours des dix-huit derniers mois. Selon les réponses au questionnaire budgétaire envoyé par votre rapporteur, « les budgets des différents programmes seront adaptés à cette dotation, selon les priorités géographiques et dans une logique de normalisation progressive ». Une phrase sans doute condamnée à demeurer lettre morte.

Ce constat amène votre rapporteur, dans la perspective de la refonte prochaine de la géographie prioritaire, à soulever la question des critères utilisés pour le zonage de la politique de la ville. L’utilisation la plus efficace, mais aussi la plus démocratique, des crédits de la politique de la ville ne peut se faire qu’à la condition de disposer d’une connaissance approfondie de la population des quartiers. Il faut cependant aller plus loin dans l’analyse. Le dessin de la géographie prioritaire aura beau s’appuyer sur l’arsenal statistique le plus fin, il n’en restera pas moins rigide. La réforme de la géographie prioritaire ne doit pas s’entendre comme une « simple » actualisation de la carte actuelle, mais bien comme une réforme du mode d’octroi des aides en fonction de critères sociaux. À ce stade, deux solutions permettant une allocation « au plus juste » des crédits pourraient être envisagées. La première consisterait en une géographie prioritaire évolutive : plutôt que de fixer un zonage, par voie législative ou réglementaire, qui resterait en vigueur jusqu’à la prochaine réforme, le législateur devrait poser le principe d’une géographie révisée périodiquement ; il reviendrait au pouvoir réglementaire de définir les critères retenus et la périodicité de révision du zonage. Toutefois, cette approche ne constituerait pas une véritable évolution du cadre actuel, en ce qu’elle laisserait au niveau national le pouvoir de piloter le déploiement de dispositifs au niveau local. C’est pourquoi votre rapporteur se prononce en faveur d’une seconde solution : seules les collectivités territoriales sont à même de déterminer le niveau d’effort adapté à chaque quartier.

2. Octroyer davantage de fongibilité aux acteurs locaux, sous réserve d’un fléchage rigoureux des crédits

a) Plus de mutabilité, plus de responsabilité

La voie contractuelle est la plus à même d’offrir la mutabilité temporelle et spatiale indispensable à une « bonne » politique de la ville. Votre rapporteur estime qu’il est primordial de laisser les acteurs locaux déterminer les quartiers cibles, ainsi que les dispositifs à mettre en œuvre.

L’exemple du PRE illustre bien les gains que l’on pourrait retirer d’une évolution de la gouvernance de la politique de la ville vers davantage de responsabilité du pouvoir local. On observe une part croissante de cofinancement de certains programmes par les collectivités territoriales qui bénéficient depuis longtemps d’un PRE financé intégralement par l’État ou qui sont considérées comme moins prioritaires. En 2009, 49,5 millions d’euros ont été ajoutés aux financements accordés par l’État, essentiellement par les collectivités locales. La contribution des institutions partenaires a augmenté de 25 % environ sur la période couverte par la loi quinquennale de 2005. En laissant aux élus le choix du maintien ou non du PRE sur le périmètre de leur commune, et surtout, en exigeant de leur part une participation, on « révèle les préférences » des acteurs locaux. Ainsi, les programmes considérés comme des succès perdureront, tandis que les autres seront abandonnés. Par ailleurs, l’extension du dispositif à d’autres établissements sera de nouveau possible, grâce à un redéploiement des crédits, à enveloppe constante.

Toutefois, votre rapporteur souhaiterait mettre en valeur le double danger susceptible de mettre en péril les programmes de réussite éducative si une telle approche était généralisée. Il importe de lutter contre un désengagement progressif de l’État : celui-ci garderait son rôle dans le financement de programmes, notamment dans le cas des quartiers les plus en difficulté, de façon à conserver une dimension forte de péréquation nationale. En sens inverse, les collectivités territoriales ne doivent pas freiner la mise en place de tels dispositifs dans le but de réaliser des économies.

Le schéma décliné dans le cas de la réussite éducative est tout à fait adaptable à l’ensemble des dispositifs de la politique de la ville. Il convient d’acquérir davantage de mutabilité temporelle et spatiale des programmes, et de transférer des responsabilités vers les collectivités territoriales.

b) Une vision à l’échelle de l’agglomération nécessaire à la résolution des problèmes de fond des quartiers

La politique de la ville, caractérisée par un ciblage territorial sur les quartiers, peine à trouver des solutions de fond aux problèmes des quartiers. Alors qu’il faudrait faire tomber les barrières qui les séparent du reste de la ville, l’urbanisme ou la mise en place de dispositifs de discrimination positive ne combattent pas l’origine profonde de la discrimination. Plus préoccupant encore, la politique de la ville contribue parfois à perpétuer les stigmates associés à l’image des quartiers.

Votre rapporteur estime que la verticalité inhérente à la gouvernance de la politique de la ville ne contribue pas à combler le fossé entre les quartiers et l’unité urbaine à laquelle ils appartiennent. Alors qu’il serait bon de créer de la solidarité entre les espaces d’une même commune ou d’une même agglomération, la géographie prioritaire contribue à renforcer les séparations. Là encore, transférer la compétence en matière de politique de la ville aux élus locaux, ou, dans une moindre mesure, leur laisser une marge d’adaptation des dispositifs nationaux, contribuerait à les responsabiliser : les succès ou les échecs de la politique menée dans les quartiers de leur circonscription leur seraient directement imputables.

Par ailleurs, l’un des arguments les plus forts en faveur de la contractualisation de la politique de la ville est qu’elle permet un traitement des problèmes des quartiers au niveau de l’agglomération. Or, la plupart des mesures en faveur des quartiers créées buttent sur le problème de la fermeture des quartiers sur eux-mêmes. Les zones franches, par exemple, ont contribué à accroître l’activité économique, mais elles ne constituent pas une réponse durable au problème du chômage des jeunes, qui est, rappelons-le, deux fois plus important dans ces quartiers qu’ailleurs. Malgré la mise en place de contrats spécifiques et d’un dispositif d’accompagnement vers l’emploi, les jeunes des quartiers sont encore trop éloignés du marché du travail, géographiquement – l’insuffisance de la desserte de transports en commun est ici en cause –, mais aussi socialement. L’une des solutions envisageables serait d’inverser le dispositif en vigueur dans les ZFU : au lieu de la clause de localisation actuellement en vigueur, une clause d’embauche de salariés résidant dans les quartiers prioritaires associerait l’ensemble des entreprises de la commune ou de l’agglomération à l’effort de réduction du chômage dans les quartiers. D’autres problèmes, et non des moindres, ne peuvent trouver une solution qu’à une échelle plus globale que celle des seules zones prioritaires : l’organisation de l’offre de soins, la mixité sociale résidentielle et scolaire.

c) Une redistribution des rôles entre les acteurs de la politique de la ville

Les contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) fournissent le cadre actuel de la répartition des rôles entre les acteurs de la politique de la ville. Les premiers CUCS, dont l’échéance était fixée au 31 décembre 2009, auraient dû faire l’objet d’une évaluation et d’une renégociation entre l’État et les communes ou EPCI concernés. Or, elle ne pourra débuter qu’à l’issue du processus de révision de la géographie prioritaire. En effet, on le voit bien, les deux géographies, l’une administrative, l’autre contractuelle, poursuivent le même objectif. Il s’agit, au fond, de délimiter l’espace des quartiers aidés, le contenu des dispositifs spéciaux dont ils bénéficieront et la responsabilité de chacun des acteurs chargés de les mettre en œuvre. La refonte prochaine des CUCS serait l’occasion d’une réforme d’ampleur de la politique de la ville.

i. Une responsabilisation des collectivités territoriales dans la mise en œuvre de la politique de la ville et des politiques de droit commun à destination des quartiers

Votre rapporteur n’a nullement l’intention de remettre en cause le travail des agences nationales, qui gèrent de façon efficace des dispositifs lourds et mettent en place d’importants dispositifs de contrôle à même de rationaliser la dépense publique. Les associations mandatées doivent désormais rendre compte de manière approfondie de leur activité. Toutefois, la situation difficile des services déconcentrés de l’État, notamment départementaux, à la suite de la RGPP, ainsi que le manque de latitude laissée aux collectivités territoriales dans l’élaboration des dispositifs à destination des quartiers, paralysent l’évolution de la politique de la ville vers un traitement moins standardisé des problèmes des quartiers. Selon votre rapporteur, la réforme future de la politique de la ville devrait donc entériner la remise aux acteurs territoriaux de crédits fongibles en même temps que le transfert de la responsabilité du traitement territorial des problèmes des quartiers.

Par ailleurs, il est important de lier les dispositifs de politique de la ville aux politiques de droit commun, notamment dans le domaine de l’éducation. Les résultats probants des programmes de réussite éducative, par exemple, ne doivent pas masquer la nécessité de définir des façons d’enseigner qui soient adaptées à la réalité des quartiers, dans les établissements où la proportion de jeunes d’origine étrangère atteint des niveaux élevés, votre rapporteur est ainsi favorable à une réduction très importante de la taille des classes et à un apprentissage de la langue française comme substitut à celui d’une langue étrangère. Il s’agirait certes d’une entorse au principe selon lequel tout citoyen sur le territoire français doit recevoir la même éducation, mais cette entorse aurait pour but de rétablir une égalité dans la maîtrise des savoirs de base.

ii. La réorientation de l’administration territoriale vers des tâches de contrôle de l’action des collectivités territoriales

Le SG-CIV fait état des deux risques inhérents à une plus grande liberté laissée aux villes dans la gestion des crédits de la politique de la ville.

Tout d’abord, comme le montre l’exemple de la dotation de solidarité urbaine, remettre aux collectivités territoriales des crédits fongibles ne les incite pas nécessairement à utiliser ces crédits pour résoudre le problème des quartiers défavorisés. Bien au contraire, aussi longtemps qu’elles ne s’attaqueront pas au problème, elles resteront éligibles à davantage de crédits, ce qui favorise leur immobilisme. De manière générale, il existe une réelle dichotomie entre richesse des collectivités territoriales et niveau de vie des quartiers défavorisés. Une commune ou un département peuvent bénéficier d’importantes recettes fiscales ou de transferts financiers conséquents de la part de l’État sans pour autant les diriger vers les publics prioritaires. Il serait du rôle de l’État, dans un schéma plus décentralisé, de parer à cette situation ; dans cette optique, les services déconcentrés auraient pour rôle de négocier des contrats comportant des clauses précises, ciblant des quartiers et des populations remplissant des critères définis. Ils assureraient également le suivi de ces mêmes contrats en s’assurant que le fléchage des crédits soit rigoureusement organisé.

Une gouvernance décentralisée de la politique de la ville ferait également naître le risque d’une forme de clientélisme dans l’attribution des crédits aux associations chargées de la mise en œuvre des programmes dans les quartiers. Dans le dispositif actuel, ce risque est faible, tant l’attribution des aides est lointaine. Là encore, le contrôle de l’action des collectivités territoriales par les services de l’État apparaît comme nécessaire. De même, l’ACSÉ conserverait un rôle d’harmonisation au niveau national des pratiques des associations ; le maintien d’un contrôle de gestion de celles-ci contribuerait à maintenir une uniformité minimale des traitements territoriaux des territoires.

iii. Une inconnue : le poids de l’intercommunalité

Votre rapporteur se pose la question du rôle des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dans la définition de la politique de la ville, s’il s’avérait que celle-ci soit davantage décentralisée. L’intérêt d’un traitement du problème des quartiers au niveau de l’agglomération est indéniable. Toutefois, on observe une grande diversité des situations entre EPCI : alors que certains sont chargés de mettre en œuvre une véritable politique d’agglomération, d’autres sont des coquilles vides.

DEUXIÈME PARTIE : LE PROGRAMME 177

PRÉVENTION DE L’EXCLUSION ET INSERTION DES PERSONNES VULNÉRABLES

I.— UNE PRIORITÉ : LE « LOGEMENT D’ABORD »

Le dispositif d’hébergement d’urgence et de veille sociale fait partie de cette catégorie des politiques publiques qui ont pour objectif leur propre fin. Il n’existe de politique de prise en charge des sans-abri que « par défaut » : d’une certaine manière, l’existence de centres d’hébergement est une manifestation de l’échec de la politique du logement. C’est pourquoi, dans le cadre du « Chantier national prioritaire 2008-2012 pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans-abri ou mal logées », l’accent a été mis sur la logique du « logement d’abord » et le développement d’une offre de logement à destination des personnes les plus démunies. L’évolution du portefeuille d’Alain Régnier, délégué interministériel pour l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées et chargé du suivi du « Chantier national prioritaire » illustre bien cette priorité gouvernementale. En application de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion (loi MLLE) du 25 mars 2009, le délégué interministériel animera aussi les travaux du pôle national de lutte contre l'habitat indigne et assurera le secrétariat général du comité interministériel pour le développement de l'offre de logements (CIDOL).

A.— UNE MONTÉE EN RÉGIME DE MESURES NOVATRICES

1. Produire du logement accessible

La production neuve de logements est d’abord constituée des logements sociaux, notamment ceux à destination des personnes les plus modestes. L’année 2009, historique, a vu le financement de 120 000 logements sociaux, soit trois fois plus qu’en 2000. Cet effort devrait se poursuivre en 2010, avec l’objectif de 140 000 logements sociaux, ainsi qu’en 2011.

2. Mobiliser le parc existant

La construction de nouveaux logements n’est toutefois pas la solution miracle. Elle est coûteuse, elle ne peut intervenir que sur le long terme et est difficile à mettre en oeuvre dans les zones où le marché immobilier est tendu, zones où les besoins en logement sont pourtant les plus importants. Ces raisons ont poussé le Gouvernement à se doter d’instruments juridiques facilitant la mobilisation de l’offre existante.

Certains leviers sont déjà actionnés pleinement. Le préfet dispose du contingent préfectoral de logements réservés : un minimum de 50 % des logements libérés chaque année dans le parc HLM doit être proposé aux ménages sortant de structures d’hébergement ou reconnus prioritaires au titre de la loi DALO. Par ailleurs, les collecteurs d’Action logement, les CIL, ont désormais l’obligation d’orienter le quart de leurs attributions en faveur des bénéficiaires DALO, salariés, demandeurs d’emploi ou personnes issues des centres d’hébergement.

De plus, les mesures introduites par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion sont en phase de montée en régime :

– l’intermédiation locative consiste à sécuriser le bailleur en lui permettant de louer son logement à une association, qui elle-même le sous-loue à des ménages dans le besoin. En novembre 2008, le Gouvernement a lancé l’expérimentation de Solibail en Île-de-France, visant l’objectif de 210 logements en sous-location à capter sur le territoire de la petite couronne. Le Plan de relance de l’économie a fixé un objectif de captation de 5 000 logements en intermédiation locative dans le parc privé à la fin 2010, dont la moitié en Île-de-France. Enfin, un dispositif de prévention des expulsions en intermédiation locative est expérimenté en Seine-Saint-Denis, à hauteur de 70 logements.

Le bilan de l’intermédiation locative au 1er septembre 2010

Près de 2000 logements ont d’ores et déjà été captés, dont plus de 200 en mandat de gestion, ce qui représente un total de près de 4 000 personnes relogées. Même dans une région où le marché de l’immobilier est aussi tendu que l’Île-de-France, le dispositif Solibail ne cesse de se développer.

En région francilienne, 1 272 baux ont été signés, ce qui représente un total de 2 801 personnes relogées. 71 % des logements sont situés en petite couronne (20 % dans le 92, 31 % dans le 93 et 20 % dans le 94). Les logements sont principalement des F2 et des F3 (respectivement 37 % et 33 % des logements mobilisés). Le revenu moyen des familles bénéficiaires du dispositif est de l’ordre de 1 300 euros par mois ; il s’agit de familles monoparentales dans 65 % des cas.

Le bilan de l’intermédiation locative est très positif. Le dispositif est de plus en plus opérationnel, le rythme de captation progresse régulièrement, et des ménages commencent à être relogés en sortie de Solibail. À ce jour, 211 personnes ont accédé à un logement pérenne après un passage en intermédiation locative.

– un cadre juridique dérogatoire au droit commun a été instauré pour les logements vacants, permettant d’occuper ces logements à titre temporaire, en échange d’une redevance modeste acquittée par le résident ;

– des commissions départementales de prévention ont été instituées, avec comme mission de prévenir les expulsions locatives en amont. Ces commissions fonctionnent à ce jour dans 70 % des départements, et seront étendues à tout le territoire d’ici à la fin de l’année ;

3. Favoriser la transition entre hébergement et logement

Il ne suffit pas de proposer des logements aux personnes les plus démunies. Il faut encore que la transition entre hébergement et accès au logement fasse l’objet d’un véritable travail, de façon à ce que le maintien dans le logement soit durable et non pas suivi d’un retour dans le système d’hébergement et de veille sociale. Ce travail s’effectue en amont, au sein des structures de réinsertion, mais aussi en aval, par le biais de mesures d’accompagnement dans le logement.

Suite aux préconisations de l’IGA et de l’IGAS datant de 2006, un rééquilibrage est intervenu de l’hébergement d’urgence vers l’hébergement d’insertion.

 

Hors CHRS

En CHRS

 

Hébergement d’urgence

Hébergement de stabilisation

Hébergement d’urgence

Hébergement de stabilisation

Hébergement d’insertion

Au 31/12/2008

12 283

4 273

4 672

3 502

30 124

     

Total CHRS : 38 298

Au 31/12/2009

13 487

4 048

4 708

3 902

30832

     

Total CHRS : 39 442

Source : DGCS

L’année 2009 s’est traduite, grâce aux effets du plan de relance de l’économie, par une augmentation des capacités d’hébergement relevant du statut de CHRS (Centre d’hébergement et de réinsertion sociale), traduisant ainsi la volonté du Gouvernement d’offrir aux personnes sans abri des modalités d’hébergement dignes et permettant leur insertion durable vers le logement.

Autres structures de réinsertion, les maisons-relais et pensions de famille font l’objet d’un développement important. Ce sont des formes de logement adapté, associant des logements privatifs et des locaux collectifs, qui offrent un cadre de vie convivial et chaleureux, notamment grâce à la présence quotidienne d’un hôte. Elles permettent une réadaptation à la vie sociale et visent à faire retrouver à des personnes, jusque-là en situation de grande exclusion, tous les aspects de la citoyenneté. 9 900 places seront ouvertes au 31 décembre 2010. Compte tenu du succès que représentent les maisons-relais, l’objectif est de porter ce nombre à 15 000.

Enfin, un dispositif renforcé d’accompagnement vers le logement a été mis en place. Il s’agit d’un regroupement de mesures visant à assurer une meilleure prise en charge des personnes afin de favoriser les sorties réussies des structures d’hébergement et de logement temporaire vers le logement.

Les premiers résultats sont là : pour le seul premier semestre 2010, sur près de deux tiers des départements, plus de 9 000 personnes sont déjà sorties du dispositif d’hébergement vers un logement ordinaire ou adapté. Toutefois, malgré les mesures en faveur du développement de l’offre de logement, les problèmes structurels auxquels fait face la politique du logement rendent très difficile une réinsertion durable :

B.— UNE PÉNURIE DE LOGEMENTS DISPONIBLES QUI CONDUIT À UN ENGORGEMENT DU DISPOSITIF D’HÉBERGEMENT ET DE VEILLE SOCIALE

1. La politique du logement face à des blocages structurels

Les efforts faits en matière de logement sont insuffisants, notamment en Île-de-France. D’une part, trop peu de communes respectent le quota de 20 % de logement sociaux. D’autre part, la construction de logements sociaux ne correspond pas toujours aux besoins : sur les 125 000 logements sociaux financés en 2008, seuls 40 % l’ont été dans des zones où le marché immobilier est très tendu.

Tant que les solutions durables de logement seront limitées, le passage par un centre d’hébergement ne prémunira pas contre le risque de redevenir sans-abri.

2. Le sans-abrisme : un phénomène en expansion et en perpétuelle évolution

Aux difficultés profondes auxquelles se heurte la politique du logement, il faut ajouter une évolution constante du phénomène du sans-abrisme, qui rend inadaptée la prise en compte de ce public suivant un schéma classique bien établi.

La population accueillie par le dispositif d’hébergement reste en grande majorité masculine (deux tiers de la population) et d’un âge compris entre 26 et 55 ans (54 % des personnes hébergées). Toutefois, on assiste à la progression de plusieurs catégories « nouvelles » de personnes accueillies. Alors que la part des hommes isolés diminue, celle des femmes victimes de violence progresse, tout comme celle des jeunes travailleurs pauvres, notamment en région parisienne, et celle des étrangers.

De plus, une expansion brutale du nombre de sans-abri est à craindre. Les observations montrent qu’une crise économique produit ses effets sur le nombre de personnes en situation d’exclusion dix-huit mois après son déclenchement. Le nombre de sans-abri devrait donc progresser significativement dans les prochains mois. La crise économique de 2009 devrait ainsi pousser 5 000 personnes supplémentaires dans la rue.

Face à la conjugaison d’une expansion future du nombre de personnes exclues et de l’évolution des caractéristiques sociales de cette population, l’objectif de disparition du dispositif d’hébergement d’urgence et de veille sociale par absorption dans le parc de logement durable paraît bien utopique. C’est pourquoi il faut parvenir à une amélioration immédiate et significative de l’accueil et de l’hébergement d’urgence, ce qui constitue le second axe du « Chantier national prioritaire 2008-2012 ».

II.— UNE NÉCESSITÉ : LA MODERNISATION DE L’HÉBERGEMENT D’URGENCE ET DE LA VEILLE SOCIALE

A.— LE RETOUR À LA SINCÉRITÉ BUDGÉTAIRE : UN EFFORT NOTABLE À DESTINATION DES ASSOCIATIONS ET DE L’ÉTAT

1. Une augmentation budgétaire significative en trompe l’œil

Rappelons que le budget dédié par l’État à la lutte contre les exclusions a augmenté de 40 % entre 2006 et 2010. Ces chiffres témoignent de la volonté du Gouvernement de ne pas laisser le « Chantier national prioritaire » à l’état de «vœu pieux».

Pour 2011, le budget consacré au Programme 177 augmentera de 90 millions d’euros, soit une augmentation de près de 8 %. 1 184 millions d’euros seront inscrits en loi de finance initiale. Les principales mesures bénéficiaires de cette hausse seront l’intermédiation locative (+21,4 millions d’euros, soit une hausse de 237 %) et l’hébergement d’urgence (+34 millions d’euros, soit une hausse de 16 %).

Évolution des principales unités budgétaires du programme 177 entre 2010 et 2011

Source : DGCS

Toutefois, le montant inscrit au PLF 2011 est inférieur à l’exécution budgétaire 2010, qui est de 1 212 millions d’euros. Si le montant dépensé au titre du programme 177 se limitait à ce qui est inscrit en loi de finance, on ne pourrait pas parler de hausse du budget mais bien de baisse.

2. Une visibilité accrue pour les services de l’État et le monde associatif grâce à la fin de la pratique des décrets d’avance

Doit-on pour autant considérer qu’aucun effort budgétaire n’a été fourni ? En réalité, les projets de loi successifs n’ont pas pris en compte la nature même des dépenses en jeu dans le programme, qui sont des dépenses « à guichet ouvert ». La hausse du budget consacré à la lutte contre les exclusions est bien réelle sur les dernières années, mais elle n’est pas retranscrite de façon sincère dans le budget, qui l’intègre avec un retard systématique d’une année. Ces dernières années, le montant des crédits accordés en loi de finances initiale a toujours été inférieur à l’exécution constatée l’année précédente, ce qui conduisait systématiquement à un abondement du programme 177 en cours de gestion.

Par exemple, la dépense pour l’hébergement d’urgence en 2009 était de 253,2 M€ en exécution, dont 65,5 au titre du plan de relance de l’économie, alors que la loi de finances initiale pour 2010 prévoyait un financement à hauteur de 214 M€ pour l’hébergement d’urgence. Un abondement en cours de gestion a donc complété la LFI à hauteur de 66,1 M€ pour l’hébergement d’urgence et la veille sociale. Pour l’exercice 2010, le décret d’avance qui a permis de clôturer l’exercice s’est élevé à 110 millions d’euros.

Un audit de modernisation commun de l’IGA et de l’IGAS portant sur la procédure de prévision et de gestion des crédits d’hébergement d’urgence, publié en 2006, préconisait déjà un « rebasage » des crédits d’hébergement d’urgence sur la base de leur exécution constatée l’année précédente. Le projet de loi de finances pour 2011, en augmentation de près de 8 %, devrait enfin procéder au « rebasage » demandé par l’ensemble des associations et mettre fin à l’utilisation des décrets d’avance. C’est le principal progrès contenu dans le projet de loi de finances pour 2011 s’agissant du programme 177.

B.— UNE « HUMANISATION » DU PARC D’HÉBERGEMENT BIENTÔT TERMINÉE, UNE RATIONALISATION EN COURS DE LANCEMENT

1. Une création de places à un rythme soutenu parallèle à une amélioration des places existantes

Le nombre de places d’hébergement est passé, entre 2006 et 2010, de 57 000 à 112 000. La DGCS considère la situation française comme satisfaisante, bien que cette appréciation soit contestée par le monde associatif en charge de la population des sans-abri. La période de sortie de l’hiver exceptée, le nombre de places semble suffisant pour faire face à la demande.

Au-delà du seul bilan quantitatif, le Chantier national prioritaire inclut un objectif qualitatif de transformation du parc d’hébergement, nommé « plan d’humanisation », dont l’axe central est de rapprocher les structures d’hébergement des normes du logement et de poser la chambre individuelle comme norme de référence. Les projets recensés, réalisés ou à l’étude, visent la transformation de 20 696 places sur la période 2008-2012, soit plus de 35 % de l’ensemble des places d’hébergement concernées. Le programme d’humanisation est pleinement engagé. D’ores et déjà, un financement a été accordé pour 11 087 places, ce qui représente un montant de subventions de l’État de 106 millions d’euros et un montant total de travaux de 297 millions d’euros. Les études préparatoires se poursuivent pour des projets susceptibles de solliciter un financement au cours de la période 2010-2012.

2. Une rationalisation du dispositif nécessaire à l’harmonisation des services proposés aux sans-abri

a) Une harmonisation nécessaire des prestations délivrées par les associations

Tout d’abord, le système d’hébergement et de veille sociale est marqué par de réelles inégalités. On observe ainsi d’importantes disparités territoriales dans la répartition de l’offre de places. La région Île-de-France est surreprésentée, au même titre que les régions de grandes villes françaises.

Capacités d'accueil des sans-abri selon les régions françaises

Régions

CHU

Places d'hôtels

RHVS

Stabilisation (hors CHRS)

CHRS

Maison-relais

Total

Alsace

147

0

0

370

1 040

380

1 937

Aquitaine

105

34

0

66

1 440

542

2 187

Auvergne

47

40

0

19

411

128

645

Basse-Normandie

191

284

0

75

488

125

1 163

Bourgogne

348

40

0

0

1 069

323

1 780

Bretagne

394

17

0

15

1 127

385

1 938

Centre

806

75

0

60

1 063

441

2 445

Champagne-Ardenne

158

14

0

10

916

204

1 302

Corse

9

8

0

0

178

28

223

Franche-Comté

165

94

0

54

579

179

1 071

Haute-Normandie

188

103

32

0

1 680

225

2 228

Île-de-France

3 614

11 024

86

2 863

9 981

1 235

28 803

Languedoc-Roussillon

265

64

20

154

1 001

560

2 064

Limousin

19

94

0

0

259

106

478

Lorraine

832

322

0

107

1 819

305

3 385

Midi-Pyrénées

312

53

0

117

1 170

302

1 954

Nord-Pas de Calais

2 218

575

0

9

3 499

392

6 693

Pays-de-Loire

193

68

0

314

1 672

380

2 627

Picardie

504

41

0

57

995

408

2 005

Poitou-Charentes

78

46

0

0

1 001

295

1 420

PACA

835

159

0

113

3 464

428

4 999

Rhône-Alpes

1 858

466

0

25

3 945

760

7 054

France métropolitaine

13 286

13 622

138

4 428

38 797

8 131

78 401

DOM-TOM

50

677

0

40

559

109

1 435

Total Général

13 336

14 299

138

4 468

39 356

8 240

79 836

Source : DGCS

Toutefois, les inégalités géographiques ne sont pas les préoccupantes, car elles s’expliquent avant tout par la géographie du sans-abrisme.

En revanche, comme l’a montré le rapport du 10 mars 2005 sur les difficultés de financement des CHRS présenté par la mission conjointe IGAS/IGF, il existe d’importants écarts de coût des prestations délivrées par les associations. Ces écarts peuvent atteindre un facteur quatre à cinq, ce qui peut s’expliquer par la conjonction de plusieurs phénomènes. Les prestations délivrées ne sont pas les mêmes. Parfois, la comparaison entre les tarifs pratiqués par les différentes associations n’est donc pas significative. En outre, les taux d’encadrement pratiqués par les associations sont variables, en fonction du financement que les associations sont parvenues à obtenir. Enfin, il n’existe pas, comme dans le secteur sanitaire, d’outil de tarification à l’activité, qui permettrait de fixer un forfait pour chaque type de prestation d’accueil et d’hébergement.

Le dispositif d’accueil et d’hébergement se caractérise donc par une réelle opacité et un manque d’équité. Certaines régions, notamment, sont structurellement sous-financées, pour des raisons qui tiennent principalement à l’inertie du financement au secteur associatif. Aucun outil n’a jamais été élaboré pour mettre à plat l’ensemble des situations et remédier à de tels écarts qui, in fine, sont subis par une partie des personnes vulnérables.

Pour faire suite au rapport de la mission IGAS/IGF, le plan d’action CHRS, arrêté en mars 2005, a posé comme objectif le développement du contrôle de gestion. Pour cela, des mesures ont été définies pour mieux appréhender l’évolution des dépenses et des recettes des établissements. De plus, un référentiel des coûts des prestations est en cours d’élaboration, tout comme la rédaction de deux guides d’aide aux associations, l’un sur la démarche de contrat d’objectifs et de moyens, l’autre sur le contentieux de la tarification.

Ces initiatives sont un premier pas vers la définition d’une politique de l’accueil et de l’hébergement, tant au niveau national que départemental, pour faire converger, sous la pression budgétaire, les coûts à la place et la qualité des prestations fournies.

b) Vers un véritable « service public de l’hébergement et de l’accès au logement » ?

L’éclatement du dispositif est un obstacle majeur à la gestion coordonnée de l’offre d’hébergement et au suivi des personnes accueillies. La prise en charge des personnes à la rue reste trop défaillante à cause d’une mauvaise coordination des acteurs ou de l’inadéquation entre les besoins des personnes et les solutions proposées. Avec plus de 2000 structures, le système d’hébergement et de logement est éclaté, non régulé, en incapacité de maîtriser les flux d’entrée et de garantir une sortie vers le logement. Il devrait être capable de proposer des réponses adaptées à chaque profil de sans-abri – femme violentée, jeune en errance, étranger demandeur d’asile, etc.

Deux nouveautés devraient engendrer une amélioration notable de la gestion du système, en favorisant notamment le décloisonnement entre les structures. La première date de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion du 25 mars 2009 : il s’agit de l’élaboration de Plans départementaux de l’accueil, de l’hébergement et de l’insertion, les PDAHI. Concrètement, ces plans prendront la forme d’un document de planification unique, élaboré par le préfet pour une période maximale de cinq ans, recensant les besoins de la population et déterminant les perspectives de développement de l’offre. La seconde nouveauté est le lancement, avant le 1er novembre 2010, des Services intégrés de l’accueil et de l’orientation, les SIAO. Sur chaque territoire, une plate-forme unique sera chargée de coordonner les structures existantes pour les sans-abri. Recevant toutes les demandes de places d’insertion et étant informé de toutes les places disponibles, elle procédera aux orientations. Elle aura par ailleurs un rôle central dans la mise en place d’observatoires locaux.

Le développement conjoint des PDAHI et des SIAO constitue bel et bien la première étape de la mise en place du « service public de l’hébergement d’urgence et de l’accès au logement ». Chaque département sera désormais contraint de réfléchir à la structure de son offre, compte tenu des tendances locales des besoins de la population. Les personnes en situation d’exclusion ne seront pas « jetées en pâture » dans le système d’hébergement, mais orientées vers les structures adaptées à leur situation.

Toutefois, se doter d’outils juridiques et de dispositifs novateurs ne sera pas suffisant. Il faudra également résoudre le problème de fond qu’est la collaboration entre les différents acteurs de l’accueil et de l’hébergement. Aujourd’hui, le cloisonnement entre eux empêche la définition d’une politique globale, qui aille de la veille sociale et de l’accueil au logement durable, via l’hébergement et l’insertion. Les associations responsables de l’hébergement, par exemple, sont en situation de conflit ou de totale ignorance du monde du logement social et des politiques du logement. La collaboration entre les services déconcentrés de l’État n’est pas meilleure, de l’avis même de la Direction générale de la cohésion sociale. Chaque acteur désirerait prendre en charge intégralement les sans-abri en outrepassant le champ de ses propres compétences et savoir-faire. Dans la résolution de cette crise de confiance entre acteurs d’un même secteur, le préfet devra jouer un rôle majeur. Il disposera, avec le PDAHI, d’un outil qui lui permettra de renforcer sa position de conciliateur et d’organisateur.

L’enjeu central est donc bien de contraindre l’ensemble des acteurs à se rassembler autour d’une même table pour dresser un diagnostic partagé de la situation et élaborer des réponses communes.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a procédé à l’audition, le 2 novembre 2010, lors d’une réunion ouverte à la presse, de M. Benoist Apparu, secrétaire d’État, chargé du logement et de l’urbanisme, auprès du ministre d’État, ministre de l’écologie et du développement durable, sur les crédits de la mission « Ville et logement » pour le projet de loi de finances pour 2011 (n° 2824).

M. le président Patrick Ollier. Nous sommes réunis pour examiner les crédits des quatre programmes de la mission « Ville et logement » du projet de loi de finances pour 2011. Les crédits des programmes « prévention et lutte contre l’exclusion et « politique de la ville » sont suivis par M. Michel Piron. Ceux du programme « aide à l’accès au logement » et « développement et amélioration de l’offre de logement » par M. Jean-Pierre Abelin.

Monsieur le secrétaire d’État, l’examen de ce budget est aussi pour nous l’occasion, sinon de faire un bilan d’étape, du moins d’avoir des informations sur la politique que vous conduisez dans le cadre de vos responsabilités, laquelle ne se réduit pas à son budget.

Je souhaiterais rappeler que notre commission a eu une activité très importante dans le domaine du logement et de l’urbanisme.

En premier lieu, nous nous sommes substitués au Gouvernement qui n’avait pas respecté les engagements de la LME sur l’urbanisme commercial. Je tiens d’ailleurs à vous rendre hommage pour l’attitude que vous avez eue à l’égard de la proposition de loi que nous avons déposée, qui visait à transférer dans le code général de l’urbanisme les dispositions relatives à l’urbanisme commercial. M. Piron, qui en était le brillant rapporteur, et moi-même attendons l’inscription de ce texte à l’ordre du jour du Sénat. J’espère que la date du 6 décembre sera confirmée, pour un vote définitif avant la fin de l’année.

En second lieu, nous sommes intervenus à l’occasion du Grenelle de l’environnement, qui comportait un volet « bâtiment et urbanisme ». Ce fut pour nous une longue lutte et la Commission, majorité et opposition confondue, a fait un travail considérable.

Dans le cadre du budget, vous proposez des réformes importantes. Ainsi, la fiscalité de l’accession sociale à la propriété a été entièrement revue. Je souhaite que vous nous en parliez, car nous suivons de très près ce sujet, et à titre personnel, j’y suis très sensible.

De même, je souhaiterais que vous nous parliez du mécanisme que vous proposez de « péréquation » entre bailleurs sociaux, alimenté par la suppression de l’exonération de contribution sur les revenus locatifs pour les organismes HLM.

Les budgets de la ville et de la lutte contre l’exclusion se caractérisent par leur stabilité, ce qui traduit un réel effort, en ces temps de rigueur budgétaire. Il n’en demeure pas moins que certains éléments extrabudgétaires interpellent notre Commission : les zones franches doivent s’éteindre progressivement à partir de 2011, pour disparaître en 2016. J’aimerais que nous puissions, après la discussion budgétaire, débattre avec le Gouvernement du dispositif qui pourra éventuellement leur succéder ; le financement du PNRU, pour les années 2012 et 2013 est subordonné à la signature d’un accord pluriannuel entre l’État et Action logement, qui a récemment révélé ses difficultés financières. Il n’est pas menacé, mais nous aimerions avoir des précisions sur le circuit de financement auquel le Gouvernement travaille.

Voilà quelques questions d’ordre général qui nous intéressent et qui m’intéressent tout particulièrement en tant que président de cette Commission.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En préalable, je m’étonne, monsieur le président, que nous n’ayons pas également le plaisir de recevoir Mme Amara : dans notre esprit, les deux ministres compétents devaient intervenir sur chacun des deux aspects de cette mission.

M. François Brottes. Mme Amara est en charge de la politique de la ville. Il nous semble impossible de débattre de cette question hors de sa présence.

M. le président Patrick Ollier. Même si nous ne sommes pas cette année dans le cadre d’une commission élargie, vous avez raison et le fait que Mme Amara n’ait pas été convoquée est une erreur, que j’assume en tant que président de la Commission et que nous allons faire en sorte de réparer. Dans cette attente, je vous propose de procéder néanmoins dès à présent à l’étude des crédits qui relèvent de la responsabilité de monsieur le secrétaire d’État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme, auprès du ministre d’État, ministre de l’écologie et du développement durable. Je vous propose d’insister sur les points principaux du budget et de la politique que nous menons et, bien évidemment, de répondre aux premières questions du Président.

Je souhaite d’abord appeler votre attention sur la refondation de la politique de l’hébergement de notre pays que nous avons engagée l’année dernière avec l’ensemble de nos partenaires associatifs. Au mois de novembre 2009, nous avons signé à cette fin un accord avec les trente et une associations qui représentent l’ensemble du secteur de l’hébergement.

Ces dernières années, le monde associatif a multiplié les coups de boutoir, notamment médiatiques, qui ont poussé les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, à créer un certain nombre d’outils visant à organiser ce secteur. Nous avons décidé, à sa demande – plus exactement à la demande des trente et une associations, qui s’étaient organisées en collectif à la suite de la « crise » des Don Quichotte et travaillaient sur le sujet depuis trois ans – d’inverser complètement la logique et de refonder notre politique pour aboutir à un véritable service public de l’hébergement et de l’accès au logement.

Cette refondation repose sur trois outils principaux :

Premièrement, une véritable planification de l’offre départementale d’hébergement et d’accès au logement, que nous avons fait établir l’année dernière par nos services déconcentrés et par les associations, afin de regarder la réalité des besoins de chacun de nos territoires.

Deuxièmement, les SIAO – systèmes intégrés d’accueil et d’orientation – des publics à la rue ou des publics hébergés. A partir du moment où une personne entre dans un hébergement, quelle que soit sa nature, y compris en gymnase pour une nuit, il faut pouvoir la prendre en charge individuellement et immédiatement pour lui proposer une orientation et un parcours d’insertion. L’ensemble de ces SIAO est en place depuis le 15 octobre, et leur installation sera finalisée le 1er novembre, en relation étroite entre les partenaires associatifs et l’État.

Troisièmement, la réorganisation complète du pilotage et du financement des structures associatives.

Depuis une quinzaine d’années, la loi de finances présentée devant le Parlement sur ce secteur d’activité n’est ni transparente ni sincère. Ce qui est inscrit en loi de finances initiale ne correspond pas à la réalité des dépenses qui seront engagées dans l’année en cours. Chaque année, un, deux, trois, voire quatre décrets d’avance sont nécessaires pour financer cette politique de l’hébergement. Cette année n’a pas fait exception : nous savions, dès le vote de la LFI, que les sommes inscrites n’étaient pas suffisantes, et nous avons pris un décret d’avance de 110 millions d’euros, un autre intervenant peut-être d’ici à la fin de l’année.

Dans le cadre de l’accord global que nous avons passé avec le secteur associatif, l’État s’est, notamment, engagé à faire voter une loi de finances initiale transparente, sincère, qui reflète la réalité des sommes qui seront dépensées en cours d’année. C’est chose faite : ce budget reprend intégralement l’ensemble des sommes qui ont été dépensées en 2010 : loi de finances, plus décret d’avance. Il augmente d’environ 8 %, passant de 1,1 milliard à 1,2 milliard, augmentation qui correspond en fait à l’addition du décret d’avance aux crédits inscrits en loi de finance initiale.

L’avantage de cette transparence et de cette sincérité budgétaire est de pouvoir contractualiser sur le long terme avec l’ensemble du monde associatif, de sécuriser les financements et de donner de la visibilité aux politiques d’hébergement et d’accès au logement, via les contrats de performances et d’objectifs, qui courent sur trois ans.

J’en viens à un autre point important de ce budget, que le président a évoqué dans son introduction : la refonte complète de nos dispositifs d’accession à la propriété. Cette réforme, qui a été présentée par le Président de la République à Thiais il y a quelques semaines, se traduit concrètement dans ce budget, puisqu’il s’agit d’une dépense fiscale pour l’État, dans le cadre de cette loi de finances.

A l’occasion de la campagne présidentielle, le Président de la République avait souhaité mettre en avant ce qu’il avait appelé lui-même la « France des propriétaires ». Ce n’est pas qu’un slogan, mais un véritable projet de société pour notre majorité. Nous considérons que l’accès à la propriété est l’aboutissement naturel d’un parcours résidentiel. C’est le rêve de la plupart de nos compatriotes, qui correspond à un besoin de sécurité. L’accession sociale contribue également à la mixité dans les quartiers. C’est un élément de responsabilité. Elle répond enfin à la volonté de tout un chacun de se constituer un patrimoine. Bref, nous considérons que notre devoir est de transformer en réalité cette ambition naturelle de nos compatriotes, et pas simplement pour les plus riches d’entre nous. En effet, force est de constater que, depuis une quinzaine d’années, le pouvoir d’achat immobilier, notamment celui des classes moyennes, s’est fortement érodé : entre 1995 et aujourd’hui, les prix de l’immobilier ont été multipliés par 2,5 tandis que les revenus de nos compatriotes ont été multipliés par 1,6. Le résultat est que le taux de propriétaires dans notre pays a peu augmenté même s’il n’a pas régressé en raison de la faiblesse des taux d’intérêt et de l’allongement de la durée moyenne des prêts.

Le Président de la République nous a demandé d’imaginer et de présenter une réforme globale de l’ensemble des outils d’accession à la propriété, visant à resolvabiliser, notamment, les classes moyennes et modestes. C’est ce que nous avons fait.

Aujourd’hui, il existe près de douze outils d’accession à la propriété, répartis en cinq grandes familles : le PEL, pour 1,8 milliard ; l’APL à l’accession, pour 1,1 milliard ; l’actuel prêt à taux zéro, pour 1,2 milliard ; le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt qui coûterait 3 milliards par génération ; enfin le Pass foncier qui coûte 300 millions à l’État en taux de TVA réduit, et 1 milliard aux partenaires sociaux.

Nous avons décidé de réorganiser l’ensemble de ces outils dans une logique de simplification, en en conservant trois.

Le premier est le PEL, outil un peu atypique qui aide nos compatriotes à préparer leur accession, c’est-à-dire à épargner pour constituer l’apport personnel pour devenir propriétaire. Ce produit coûte à l’État 1,8 milliard d’euros, ainsi répartis : 1,3 milliard au titre de la prime qui est versée à celui qui l’a souscrit lorsqu’il sort de son PEL et accède à la propriété ; 500 millions d’euros de fiscalité au titre de la non imposition sur le revenu des intérêts générés par le PEL. Objectivement, ce 1,8 milliard d’euros ne déclenche pas, en tant que tel, de l’accession à la propriété. Si nous maintenons ce produit, c’est parce que retirer la prime d’État engendrerait un départ massif de l’épargne des Français de ce produit, qui représente pas moins de 140 milliards d’euros dans les comptes des banques. Dans la situation actuelle, ce ne serait guère opportun…

Le deuxième outil est constitué de ce qui déclenche, en tant que tel, de la propriété, c’est-à-dire l’accession, sur laquelle je reviendrai.

Le troisième est l’APL accession. Une fois l’accession préparée et le logement acheté, il faut sécuriser cette accession, notamment celle des plus modestes. Là encore, c’est un outil un peu atypique, le seul qui s’adapte aux évolutions de revenus des accédants. Même si vous n’en bénéficiez pas quand vous entrez dans votre propriété, vous pouvez en bénéficier par la suite en cas de baisse de revenus. Son montant – en moyenne, 150 euros par mois – n’est pas négligeable. C’est donc un outil solvabilisateur, pris en compte par les banques, qui sécurise l’accession. D’ailleurs, si nous n’avons pas eu de « sursinistralité » dans l’accession à la propriété pendant la crise, c’est notamment en raison du rôle de régulation de l’APL accession en cas de baisse de revenus des accédants.

J’en viens au cœur du dispositif : l’accession elle-même. En la matière, nous fusionnons les trois produits principaux : le PTZ (prêt à taux zéro) actuel, le crédit d’impôt TEPA et le Pass foncier, en les remplaçant par un nouveau produit : le Prêt à taux zéro Plus.

Ce produit est réservé aux primo-accédants. C’est un produit universel, largement « verdi » et beaucoup plus efficace que le PTZ actuel : dans le neuf, par exemple, son montant pourra être quadruplé. Par ailleurs, l’investissement de l’État passera d’1,2  à 2,6 milliards d’euro. C’est surtout un produit qui épousera la réalité des prix du marché.

Aujourd’hui, l’écart entre un PTZ dans une zone où les prix de l’immobilier sont peu élevés et dans une zone où ils sont très élevés, est de 30 %. Or, dans la réalité, les prix du marché peuvent quadrupler – entre 7 000 euros au mètre carré à Paris et 1 900 euros au mètre carré dans ma ville de Châlons-en-Champagne, par exemple. Si on ne prend pas en compte ce différentiel des prix de l’immobilier, on interdit l’accession à la propriété dans les zones les plus tendues, là où les prix sont les plus élevés. Nous y reviendrons, mais je précise tout de suite que l’investissement de l’État dans les zones dites les moins tendues, c’est-à-dire la zone C, sera supérieure avec le nouveau PTZ : 800 millions contre 600 avec l’ancien.

Cela dit, nous devons faire attention. Avec ce nouveau PTZ, comme avec tout produit logement, il y a un risque d’impact sur les prix. Si resolvabiliser les publics en aidant les gens à devenir propriétaires se traduit par une augmentation à due concurrence des prix de l’immobilier, nous n’aurons pas réussi notre pari, et même fait exactement l’inverse, à savoir alimenté la spéculation immobilière. Nous reviendrons, si vous le souhaitez, sur les façons de l’éviter.

Je terminerai sur un point qui, j’imagine, fera débat au sein de votre Commission : les moyens consacrés au logement social, notamment la contribution dite « de péréquation » sur le monde HLM.

Je vous rappelle quelques chiffes importants : en 2008, le potentiel financier du monde HLM s’élevait à 6,5 milliards d’euros et sa marge d’autofinancement à 12,5 %. Pour avoir quelques éléments de comparaison, la marge d’autofinancement d’un groupe comme La Poste est de moins de 5 % et celle d’ACCOR, qui est là pour réaliser des bénéfices, est de 15 %. Cette moyenne, en tant que telle, n’a aucun sens, mais elle reflète une diversité totale sur le territoire, la marge d’autofinancement de certains bailleurs sociaux dépassant 22 % – plus qu’un groupe de promotion immobilière purement privé comme Nexity, qui doit plafonner la sienne à 19 %.

L’idée de cette contribution est d’organiser une péréquation au sein du monde HLM entre ceux qui ont une marge d’autofinancement, donc un potentiel financier important, et ceux qui ont un potentiel financier moins important et qui doivent construire beaucoup.

Nous avions prévu une contribution de 340 millions d’euros, avec une assiette basée sur les loyers. La contribution des revenus locatifs, c’est-à-dire la suppression d’une dépense fiscale dont bénéficiait le monde HLM …

M. Marcel Rogement. Non !

M. le secrétaire d’État. Je n’ai pas parlé de « niche », mais de dépense fiscale : une contribution qui touche l’ensemble des bailleurs personnes morales, mais dont certains sont exonérés.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est plutôt une moindre recette !

M. le secrétaire d’État. Appelez cela comme vous voulez…

Nous avions prévu de supprimer cette exonération d’impôt. Des membres des commissions des affaires économiques et des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat nous ont interpellés. S’ils étaient d’accord sur le principe de cette contribution, ils en critiquaient l’assiette et faisaient remarquer que prélever 2,5 % sur le chiffre d’affaires ne permettait pas d’organiser une réelle péréquation. C’est la raison pour laquelle, ce matin même, en Commission des finances de l’Assemblée, le Gouvernement a donné un avis favorable à un amendement visant à modifier l’assiette prévue.

Cette contribution serait assise sur le potentiel financier du monde HLM, lequel est aujourd’hui en moyenne de 1 800 euros par logement. La contribution que nous préconisons serait la suivante : pas de contribution de zéro à 1 000 euros de potentiel financier – 25 % des bailleurs sociaux seraient ainsi exonérés – ; puis une contribution progressive : de 1 000 à 2 000 euros – 0,2 pour 1 000 – puis de 2 000 à 3 000 euros, de 3 000 à 4 000 euros, etc. La taxe augmente en fonction du potentiel financier dégagé pour chaque logement par le bailleur social. Voilà la nouvelle assiette qui est proposée. Elle a été calibrée pour générer les 340 millions d’euros que j’ai évoqués tout à l’heure.

M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis pour le logement. Le budget de la mission « ville et logement » participe de l’effort national de diminution de la dépense publique dans un contexte incertain pour le secteur de la construction. Ainsi, à périmètre constant, le budget des aides à la pierre progresse de 9,32 % en autorisations d’engagement, mais diminue de 17,67 % en crédits de paiement. Le budget des aides au logement enregistre une très légère baisse. Il convient toutefois de nuancer cette diminution, puisque le poids de la dépense fiscale demeure important, notamment avec la TVA à taux réduit sur les travaux, qui représente à elle seule une dépense fiscale de 5,05 milliards d’euros en 2011.

Il convient de saluer la réforme de l’aide fiscale à l’accession à la propriété – création d’un nouveau prêt à taux zéro et simplification du dispositif – et la réforme des aides de l’ANAH, dont j’ai reçu ce matin le président, le sénateur Braye. L’action de l’ANAH se trouve ainsi recentrée sur les propriétaires occupants et sur l’habitat indigne. Pour autant, nous sommes plusieurs à nous interroger à propos des besoins en zones peu tendues et des apports des collectivités locales.

Je ne reviendrai pas sur le mécanisme de la péréquation évoquée par M. le secrétaire d’État. La taxe initialement prévue touchait tous les offices d’HLM et toutes les SEM, les sociétés d’économie mixte, quelle que soit leur politique d’investissement. La nouvelle base est certainement plus intéressante. Reste que l’on se demande si l’on pourra atteindre la production de 120 000 logements sociaux, dans une période où les aides du plan de relance se terminent et où les taux d’emprunt remontent légèrement.

On constate par ailleurs des changements de périmètre au sein du programme « développement et amélioration de l’offre de logement », avec la création d’une nouvelle action consacrée à la garantie des risques locatifs.

J’ai quelques questions plus directes à vous poser, monsieur le secrétaire d’État.

Dans le PLFSS, il est prévu de supprimer le versement rétroactif de trois mois d’aide personnelle entre la date d’ouverture du droit et celle de la demande d’aide sur les aides personnelles. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

S’agissant de la politique de production de logements sociaux, nous avons connu trois années importantes. Le mouvement HLM a contribué à jouer son rôle de stabilisateur dans la crise que nous avons connue. Au Congrès national du mouvement HLM, vous avez appelé à une nouvelle économie. Pouvez-vous nous en dire davantage ? Que deviendrait, dans ce cadre, la stratégie de la production de logements sociaux en France ?

Pouvez-vous nous éclairer sur la pérennité du financement du 1 % ? L’ANAH recevra à ce titre, en 2011, une contribution de 480 millions d’euros. Mais nous nous interrogeons sur le long terme. Notamment, comment l’ANAH sera-t-elle financée dans les années qui viennent ?

Une convention, passée avec le mouvement HLM, fixait comme objectif la vente de 40 000 logements sociaux par an, c’est-à-dire 1 %. Aujourd’hui, avec 5 000 à 6 000 logements vendus, on en est loin – entre 0,1 et 0,15 %. Comment « booster » cette vente HLM qui représente un potentiel de fonds propres extrêmement important et permettrait de réinjecter des crédits dans la production de nouveaux logements ?

Quel bilan peut-on tirer de la loi DALO ? Le dispositif sera universel à compter de 2012. Sera-t-on prêt à relever ce défi ?

Je terminerai par deux questions très précises, qui m’ont été suggérées ce matin par le président de l’ANAH. Celui-ci s’étonnait que la subvention pour charges de service public n’ait pas été versée à l’Agence depuis 2009. Comment l’expliquez-vous et comment comptez-vous y remédier ? Par ailleurs, les travaux d’office pour la résorption de l’habitat insalubre relèvent de la compétence régalienne de l’État. Dès lors, pourquoi créer un fonds de concours alimenté par l’ANAH ?

M. Michel Piron, rapporteur pour avis pour la ville. La Commission m’a confié la tâche d’examiner les crédits du programme « prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables ». La lutte contre le phénomène du « sans-abrisme », au même titre que les efforts à destination des habitants de quartiers prioritaires, relèvent de la politique du logement au sens large. En effet, la solution au problème du « sans-abrisme » se trouve dans le développement d’une offre de logement durable à destination des personnes les plus vulnérables. Votre présence, monsieur le secrétaire d’État, lors de l’examen des crédits du programme 177, est l’occasion d’aller au-delà de la simple discussion budgétaire et de réfléchir à l’orientation que nous souhaitons donner à la politique du logement dans notre pays.

L’ambition qui guide ce programme semble élevée. La prise en charge des personnes sans abri a été érigée par le gouvernement actuel au rang de priorité. Suite au rapport Pinte du 29 janvier 2008, le Premier ministre a déclaré l’hébergement et l’accès au logement « Chantier national prioritaire 2008-2012 ». L’effort budgétaire qui lui est consacré est-il à la hauteur des ambitions proclamées ? Ce programme n’a pas subi de diminution significative de crédits dans un contexte budgétaire pourtant extraordinairement contraint. Le budget consacré par l’État à la lutte contre les exclusions a augmenté de 40 % entre 2006 et 2010. Pour 2011, le programme 177 augmentera de 90 millions d’euros, soit de près de 8 %. Votre rapporteur ne peut qu’exprimer sa satisfaction.

Il convient néanmoins de ne pas se limiter à une vue d’ensemble trop lointaine. Ce n’est qu’en s’intéressant au détail des programme que l’on pourra s’assurer du maintien de l’ambition de la puissance publique, qui est incontestable.

Je commencerai par le programme « politique de la ville » pour ce qui vous concerne, en ne vous interrogeant que sur les points qui recoupent votre plan d’action ministérielle.

Le PLF ne rend pas compte de la totalité de l’effort financier à destination des quartiers. Dans le cadre du Plan national de rénovation urbaine pour l’exercice 2009, les paiements de l’ANRU s’élèvent à 956 millions d’euros, soit davantage que l’ensemble du programme « politique de la ville ». Le financement du PNRU à hauteur de 12 milliards d’euros est garanti par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion et n’est donc pas menacé. Toutefois, les difficultés financières que semble rencontrer Action au logement soulèvent au moins deux séries de questions.

Premièrement, quel sera le contenu de l’accord pluriannuel entre l’État et Action au logement ? Comment sera financé le PNRU pour les années 2012 et 2013 ? Je rappelle que le niveau des paiements annuel de l’ANRU devrait rester supérieur au milliard d’euros jusqu’en 2015, avec un pic en 2012 de l’ordre de 1,5 milliard d’euros.

Deuxièmement, les effets dans le temps de la rénovation urbaine ont leurs limites. Si ce PNRU 1 n’est pas suivi d’un PNRU 2, ces effets risquent fort d’être fragilisés. Compte tenu des difficultés présentes à dégager des financements, je suis quelque peu inquiet. Le PNRU 2 verra-t-il le jour ?

Par ailleurs, vous êtes plus directement en charge du programme intitulé « prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables ».

Ces trois dernières années, le montant des crédits accordés en lois de finances initiale a toujours été inférieur à l’exécution constatée l’année précédente, comme vous le souligniez tout à l’heure, ce qui a conduit systématiquement à un abondement du programme 177 en cours de gestion. Les acteurs de la politique de l’hébergement et de l’accès au logement réclamaient donc avec insistance une inscription des crédits sur la base de leur exécution constatée l’année précédente. Le projet de loi de finances pour 2011 devrait enfin procéder à ce que l’on peut qualifier de « rebasage » et mettre fin à l’utilisation des décrets d’avance, ce dont on ne peut que se réjouir. Je ferai simplement deux remarques à ce sujet.

D’une part, on se félicitera sans doute du retour à cette sincérité budgétaire, mais sans excès, car on aurait pu imaginer qu’elle puisse avoir lieu quelques années auparavant. Quoi qu’il en soit, les crédits inscrits au PLF 2011 sont supérieurs de 8 % à ceux ouverts par la loi de finances 2010. Mais on sait que ceux-ci étaient sous-évalués. Ainsi, les crédits inscrits au PLF 2011 seront légèrement inférieurs à l’exécution constatée pour 2010. Parler, dans ces conditions, d’une hausse des crédits relève sans doute d’une curieuse. « coquetterie budgétaire ».

Au-delà de cette critique de forme, je ne peux que saluer le fond. Je me réjouis de mesures comme l’intermédiation locative, dédiée au développement de l’offre de logement à destination des personnes les plus démunies. Quand et comment comptez-vous procéder à une montée en régime des différents dispositifs ?

Enfin, monsieur le secrétaire d’État, je vous adresserai deux dernières questions transversales.

D’abord, au cours des auditions budgétaires que j’ai pu mener, j’ai constaté à quel point les acteurs de terrain regrettaient l’affaiblissement de certains services déconcentrés de l’État suite à la RGPP, notamment celui des services opérationnels, alors que les services conceptuels semblent se protéger plus facilement. Cet état de fait sera-t-il passager ou durable ?

Ensuite, dans les deux domaines sur lesquels je me suis penché, l’action publique est confrontée à un manque de données statistiques ou à leur inadaptation, qui demeure. Comment comptez-vous remédier à un tel manque, que vous avez vous-même relevé à plusieurs reprises ? Plus généralement, je note l’absence récurrente de cohérence entre ingénierie publique et prise de décision politique. C’est un problème central lorsque l’on parle d’efficacité de l’action publique.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes en train de porter la quasi ultime étape d’une politique visant à ce qu’il n’y ait plus de budget du logement… Je fais ce constat avec regret.

Peut-on encore parler d’un budget du logement quand on sait que, depuis 2002, l’État conduit ses stratégies par des prélèvements hors budget ? On a tout vécu : les SACI (sociétés anonymes de crédit immobilier), le 1 %, la tentative visant l’an dernier les organismes d’HLM dans le cadre de la loi de mobilisation et de lutte contre l'exclusion, dite loi MOLLE ; mais cette année, c’est le paroxysme ! Nous avions raison lorsque nous annoncions que l’État finirait par ne plus concourir à la construction du logement social : vous n’en financiez déjà plus qu’une infime partie et vous êtes encore en train de la réduire !

Cette politique a tout cassé : les crédits immobiliers ont été ravagés ; le 1 % est dans une situation catastrophique, au point que demain, il ne pourra plus remplir sa mission, c’est-à-dire le logement des salariés. Les gestionnaires du logement social, et pas seulement ceux de l’opposition, s’inquiètent du sort qui est réservé aux organismes HLM.

L’État pourrait parler vrai, de temps en temps, au lieu de tenter de justifier le prélèvement sur les HLM par la suppression de la contribution sur les revenus locatifs : il serait devenu tout à coup scandaleux que l’Union des HLM ne soit pas concernée par ce dispositif fiscal. Au moins ne parle-t-on plus de niche fiscale, et je vous en remercie. Cela vous aurait peut-être d’ailleurs épargné quelques brouhahas intempestifs, mais fondés, au Congrès des HLM …

Autre problème : le prélèvement sur les organismes constitue, pour une grande partie d’entre eux, un prélèvement sur les loyers, c’est-à-dire sur les locataires. Moi qui suis président d’un organisme, je peux vous dire que nous n’avons aucun fonds disponible pour éviter d’augmenter les loyers de plus de 2 %. Ma collectivité verse chaque année une subvention à mon office. Et, lorsqu’il est opérateur, elle l’aide davantage que l’État en cas de surcharge foncière. Iil y a là un vice fondamental.

Il est inacceptable de vouloir, en définitive, faire payer les organismes pour que l’État continue un peu à subventionner le logement social. Ce n’est pas une politique d’État et cela ne peut en être une, quel que soit par ailleurs ce que vous faites contre ceux qui ont de l’argent de côté.

Bien évidemment, l’aide au logement continue à baisser, en particulier l’aide à la pierre baisse : 10 760 euros par logement pour un PLAI – prêt locatif aidé à l’intégration ; 800 euros pour un PLUS – prêt locatif à usage social – contre 2 000 euros il y a deux ans. Cela signifie que la participation de l’État à chaque construction de logement diminue. Par ailleurs je vous demande une nouvelle fois, monsieur le secrétaire d’État, de nous indiquer la répartition des PLAI entre les collectifs, les foyers et ce qui appartient aux familles.

Vous réduisez en fait d’un milliard d’euros la participation de l’État au financement global du PTZ : alors que les trois opérations représentaient plus de 3 milliards vous revenez, par un tour de passe-passe, à 2 milliards. En outre, et contrairement à ce que vous aviez annoncé, vous ne travaillez pas sur l’accession sociale à la propriété. Depuis 2002, la vraie accession sociale a baissé, de telle sorte que l’ensemble des dispositifs d’accession sociale n’a pas servi à la population la plus en difficulté. Ce qui veut dire qu’il n’y a pas d’accession sociale légitime.

Je terminerai par l’insupportable suppression du versement rétroactif dans le cadre du PLFSS. Vous tapez sur ceux qui auront le plus de mal à établir rapidement leur dossier d’APL, soit ceux qui seront dans la situation sociale la plus difficile. Si vous avez des économies à trouver, faites-les ailleurs que sur cette catégorie de population.

Je vous assure, monsieur le président, que la nuit ne serait pas suffisante pour exposer toutes les critiques que nous faisons à ce budget du logement, qui est une véritable catastrophe.

M. le président Patrick Ollier. Je viens de contacter Mme Amara, qui a accepté de venir le mardi 2 novembre, à 21 heures 30. Nous pourrons ainsi reprendre alors la discussion sur la politique de la ville.

M. Bernard Gérard. Les enjeux de la mission « Ville et logement » sont considérables. Le logement est l’une des principales préoccupations de nos concitoyens, qui y consacrent une part non négligeable de leur budget. Quant à la politique de la ville et à la rénovation urbaine, elles constituent des problématiques essentielles pour l’avenir et pour la cohésion de notre société.

La mission traduit la mobilisation du Gouvernement en faveur de l’accès des Français au logement en proposant une offre diversifiée et accessible et en solvabilisant les ménages grâce aux aides personnelles. Elle a également pour objectifs de renforcer la lutte contre l’habitat indigne et de favoriser le développement des solutions d’hébergement pour les personnes en très grande difficulté. Enfin, elle regroupe les crédits alloués par l’État aux quartiers prioritaires dans le cadre de la politique de la ville.

Ces thématiques sont souvent au cœur des travaux de notre commission et on trouve dans de récents rapports, notamment celui de MM. Goulard et Pupponi, outre une évaluation des effets et résultats des politiques de la ville, ont émis des recommandations pertinentes à même d’alimenter ou d’impulser de prochaines réformes.

Le Gouvernement a conscience des enjeux et poursuit sa mobilisation en faveur de ces deux missions divisées en quatre programmes – trois pour le logement, un pour la politique de la ville. Si les crédits de paiement et les autorisations d'engagement demeurent importants, ce budget n’en participe pas moins à l’objectif de réduction des déficits publics.

Les objectifs des différents programmes sont renforcés, notamment en ce qui concerne le développement et l’amélioration de l’offre de logement du parc locatif social, avec un objectif de 120 000 logements sociaux nouveaux contre 110 000 en 2010, l’objectivité conduisant toutefois à rappeler que 30 000 logements supplémentaires ont été construits au titre du plan de relance. Concernant le parc privé, le budget 2011 voit la continuation du dispositif Scellier qui soutient la construction et l’emploi.

Le budget est également marqué par un objectif de rationalisation, d’efficacité et de plus grande lisibilité des politiques publiques. Les mécanismes sont souvent complexes et peu compréhensibles pour des non-initiés. La réforme de l’accession à la propriété annoncée début octobre et qui se traduit dans ce projet de loi de finances permettra la fusion de plusieurs dispositifs en un outil renforcé, sur-mesure, avec une importante visée environnementale. Cet outil, le PTZ Plus, marque un effort sans précédent en la matière.

Œuvrer à une mobilisation forte des acteurs concernés vise à rendre les politiques publiques plus équitables et plus efficaces, en concentrant les moyens sur les besoins les plus importants. Cet esprit rejoint les réflexions menées sur la géographie prioritaire de la politique de la ville et sur les limites de la logique de zonage. À ce titre, il convient de saluer la réforme annoncée de la géographie prioritaire de la politique de la ville, qui permettra dès 2011de renforcer l’effort des politiques publiques.

On ne peut traiter de la politique de la ville sans souligner le rôle de l’ANRU dans la mise en œuvre du plan national de rénovation urbaine, le PNRU. Devant les inquiétudes suscitées par son financement dans un avenir proche, je vous saurais gré, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir préciser les solutions envisagées. Chaque jour l’actualité montre combien il est fondamental de mobiliser nos efforts en faveur des quartiers et de leurs habitants. La dynamique Espoir banlieues est un outil essentiel pour ces quartiers qui sont confrontés à des problèmes majeurs de sécurité, d’éducation, d’emploi ou de transports. Aucun levier n’est à négliger.

Vous me permettrez, en tant que président de l’EPARECA, (Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux) de citer le rôle important qu’il joue dans la rénovation commerciale et artisanale et le dynamisme économique de certaines zones urbaines. Qu’en sera-t-il à l’avenir de son financement ? Le rapport de MM. Pupponi et Goulard montre qu’il ne bénéficie d’aucune subvention du programme 147 « Politique de la ville » alors qu’il est tourné en très grande partie vers les quartiers prioritaires. Il n’émarge qu’au FISAC pour un montant de 10,5 millions d’euros sur un budget très modeste de 42 millions d’euros, alors même que son efficacité est incontestable.

Fruit d’une réflexion moderne, réaliste et pragmatique, ce budget poursuit les efforts du Gouvernement en faveur du logement, tout en prenant en considération nos concitoyens les plus vulnérables. Il confirme la mobilisation en faveur de l’amélioration des conditions de vie dans les quartiers prioritaires.

C’est pourquoi le groupe UMP votera ce budget.

M. François Pupponi. Monsieur le secrétaire d'État, sachant que la bosse devrait atteindre 1 milliard d’euros, nous attendons avec impatience de savoir comment l’ANRU sera financée cette année. Il convient de rappeler que l’article 99 du PLF, qui instaure une ponction sur les organismes d’HLM, devait participer au financement de l’ANRU en 2011. Si l’Assemblée suit le Sénat et si ce prélèvement disparaît, l’amendement Scellier suffira-t-il à récupérer 340 millions d’euros sur les « dodus dormants » ?

Michel Piron a eu raison d’évoquer la nécessité d’un PNRU 2. On sait en effet que l’ANRU n’a pas pu rénover la totalité de certains quartiers, notamment en Île-de-France. Que deviendront ces quartiers à demi rénovés ? Par ailleurs, certaines communes, qui ont bénéficié de l’ANRU, seront dans l’incapacité d’entretenir les quartiers rénovés, ce qui ramène au débat sur la péréquation horizontale.

S’agissant de la loi DALO, tous les ministres chargés du logement nous ont assurés depuis trois ans qu’ils demanderaient aux préfets de ne pas attribuer de logements DALO dans les ZUS ni dans les quartiers ANRU. Or tel n’est pas le cas : les préfets le font tous les jours, ce qui renforce les ghettos urbains. On court ainsi allégrement à la catastrophe.

M. Jean-Pierre Nicolas. L’examen de la mission « Politique de la ville » est d’autant plus important que le logement peut être facteur de discrimination ou d’ascension sociales. Le budget est contraint en raison de la crise économique et financière et de trente années de déficits cumulés, tous bords politiques confondus.

Je me réjouis que l’accession à la propriété ait été simplifiée, ce qui permettra notamment aux primo-accédants d’y voir plus clair.

S’agissant de l’autofinancement des organismes HLM, vous avez raison d’instaurer une péréquation financière. Les moyens consacrés à la politique de la ville, dans le cadre notamment de la dynamique Espoir banlieues, permettront de trouver des solutions ciblées sur les communes et les EPCI les plus défavorisés. L’État a raison de continuer de donner des moyens financiers aux communes les moins riches qui rencontrent de grandes difficultés. Quels critères seront pris en compte pour l’attribution de la dotation de solidarité urbaine et pour celle de la nouvelle dotation de développement urbain ?

Enfin, je souhaite que notre objectif de 120 000 logements sociaux soit atteint.

M. Daniel Goldberg. Le secrétaire d’État nous a rappelé la ligne de conduite de la majorité depuis huit ans : la France du « tous propriétaires ».

M. le secrétaire d’État. Ce n’est pas vrai !

M. Daniel Goldberg. Nous sommes, quant à nous, partisans de la France du « tous logés », ce qui n’est pas exactement la même chose.

De plus, pour vous, le logement social doit être destiné aux plus pauvres de nos concitoyens alors que nous considérons qu’il a vocation à loger les deux tiers des Français, s’ils le souhaitent.

Je tiens par ailleurs à noter, monsieur le président, que le « bleu » budgétaire n’a été disponible, sous sa version papier, que vendredi dernier dans l’après-midi, ce qui ne facilite pas l’examen d’un budget aussi important. Quant à l’amendement qui a été examiné ce matin en commission des finances, nous avons dû aller le chercher nous-mêmes. Or les chiffres que M. le secrétaire d’État nous a donnés ne sont pas exacts.

Il est clair que vous financez la politique du logement par le biais d’un double racket : sur le 1 % logement depuis plusieurs années et, à partir de l’année prochaine, un racket sur les organismes HLM. En quoi ces pratiques augmentent-elles la contribution de l’État au budget du logement ? Combien l’État verse-t-il, notamment pour le locatif social, au titre de la solidarité nationale ?

Alors que l’État accorde 1 milliard d’euros d’exonération fiscale au titre de l’investissement locatif, dans la plupart des cas sans condition de ressources, quelles sommes investit-il dans le locatif social ? Il serait intéressant d’en comparer le montant avec celui de l’investissement des collectivités locales en la matière, d’autant que le nombre de logements sociaux financés dans le cadre du budget 2011 sera en baisse de quelque 20 000 par rapport à 2010.

Pourriez-vous également nous préciser quelle est la part des vrais PLAI – les PLAI individuels – par rapport aux prêts collectifs ?

Enfin, comment le projet de budget permet-il, d’encourager la production de PLAI dans des zones où le logement social est déficitaire par rapport à des PLS construits dans des quartiers populaires ?

M. François Brottes. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez écrit la fable des petits cochons à l’envers : l’histoire part de la maison en paille et passe par la maison en bois pour aboutir à la maison en pierre. Avec ce projet de budget qui coupe les vivres des organismes HLM, ceux-ci se verront contraints de passer de la maison en pierre à la maison en bois, avant de revenir à la maison en paille…

Connaissez-vous le coût de la construction d’un logement social T3 en norme BBC – bâtiment basse consommation –, ainsi que celui de la réhabilitation d’un T3 vieux de vingt ans ? Savez-vous combien les organismes HLM versent de leurs fonds propres dans ces opérations et à quelle hauteur les collectivités locales se voient contraintes de combler la différence ?

Où avez-vous trouvé ces 12 %, voire 15 % qu’il serait possible de ponctionner sur les fonds propres des HLM, comme si leurs organismes avaient trop d’argent ? Ces chiffres sont à nos yeux incompréhensibles.

Par ailleurs, combien de ménages seront concernés par la suppression de la rétroactivité sur trois mois du versement de l’aide au logement ? Cette suppression freinera la construction de logements sociaux, ce qui est une énorme bêtise en période de relance.

M. Louis Cosyns. M. Abelin a évoqué la réforme des crédits de l’ANAH.

Le report des crédits affectés aux propriétaires bailleurs vers l’habitat indigne ne risque-t-il pas de compromettre les engagements signés par les collectivités locales dans le cadre des OPH ?

Je préside un OPH depuis trois ans. Or je remarque que si nos objectifs sont atteints pour l’habitat des propriétaires bailleurs, il n’en est pas de même de l’habitat indigne, les habitants souvent âgés refusant de libérer leur logement pour réaliser les travaux.

Pourrez-vous maintenir les conventions jusqu’à leur terme ? Par ailleurs, financerez-vous une éventuelle révision des objectifs des conventions que nous avons signées avec les PACT dans le cadre de l’animation ?

M. Marcel Rogemont. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez évoqué les « dodus dormants » : je veux des noms ! Il n’est pas acceptable d’accuser les organismes HLM dans leur ensemble.

Par ailleurs, je tiens à rappeler que la taxe additionnelle sur le droit de bail concernait tous les propriétaires sauf les organismes d’HLM avant 2005, année où les propriétaires personnes physiques ont été également exonérés de contribution sur les revenus locatifs – nouveau nom de cette taxe. À combien s’élève cette « dépense fiscale » – c’est ainsi que vous l’appelez – dont bénéficient ces propriétaires depuis 2005 et que le projet de loi de finances prévoit de supprimer pour les HLM cette année ?

L’amendement voté ce matin en commission des finances préfère évoquer un prélèvement fondé sur le « potentiel financier par logement examiné sur les cinq derniers exercices ». En tant que président d’un organisme d’HLM, je reconnais disposer de fonds propres – entre 40 et 45 millions d’euros. Toutefois, chaque année, une fois soustraits les 7 millions que nous dépensons pour la construction de 400 à 500 logements et les 20 millions du plan patrimoine, il reste seulement de quoi renouveler le patrimoine sur dix ans.

Est-il normal que vous vouliez taxer ces fonds propres, qui sont simplement le signe d’une gestion prévisionnelle ? Car il s’agit bien d’une ponction et non d’une péréquation : au lieu de conduire une politique du logement financée par l’État, vous préférez ponctionner l’argent des organismes HLM. N’oublions pas que les 340 millions d’euros que le Gouvernement souhaite obtenir de cette manière visent essentiellement à combler le déficit de financement des opérations de rénovation urbaine, qui ne devraient pas être à la charge des propriétaires bailleurs mais relever du seul budget de l’État.

Enfin, la fongibilité des indus des caisses d’allocations familiales pénalise les organismes d’HLM : en effet les erreurs de la CAF sont systématiquement répercutées sur les APL.

Mme Frédérique Massat. Monsieur le secrétaire d'État, même les territoires ruraux souffriront de la ponction que vous voulez opérer sur les organismes HLM car elle pèsera sur les projets de construction et de réhabilitation. Elle se traduira par la hausse des loyers de publics déjà très précarisés et par une baisse des investissements préjudiciable aux entreprises du BTP, au plan national comme local.

Par ailleurs, le rapport Attali, qui a été présenté il y a quelques jours, juge l’actuelle politique du logement « inefficace » car « face à la hausse des prix immobiliers alimentée par la rareté du foncier en zones urbaines, la puissance publique solvabilise la demande les ménages accédants et celle des investisseurs. Les aides publiques sont donc captées par les logeurs » et non plus par les locataires ; « injuste » car « la part, parmi les propriétaires, des ménages accédants à la propriété a décliné (32 % en 2008) en particulier pour les ménages dont les revenus sont inférieurs à deux SMIC (22 %) » ; « néfaste pour l’environnement » car elle entretient l’« étalement urbain », qui exige la création de voies, de transports et de réseaux nouveaux. Quelles sont vos réactions, monsieur le secrétaire d'État ?

Enfin, les crédits liés à l’allocation logement temporaire – ALT – sont en baisse de 41 millions d’euros à 38,8. Or l’ALT permet de favoriser les transitions dans les parcours. Les associations gestionnaires de logements transitoires demandent donc une réactualisation de ce barème, d’autant plus nécessaire que les loyers ont augmenté sans compensation à ce jour. Je rappelle que les logements temporaires, donc les aides qui y sont liées, concernent surtout des femmes seules ou avec enfants.

Mme Marie-Lou Marcel. Le PLFSS prévoit une mesure privant les ménages de trois mois d’aide au logement, puisqu’il supprime le caractère rétroactif du versement de ces aides. C’est une mesure d’économie préjudiciable aux populations vulnérables : elle risque de laisser à la rue bien des personnes.

Je regrette que les mesures les plus injustes ne touchent, une fois de plus, que les plus faibles, et ce au moment où le nouveau dispositif du prêt à taux zéro ne prévoit plus aucun plafond de ressources. Affirmer qu’on veut faire de la France un pays de propriétaires quand on étrangle les ménages, c’est de l’entêtement, d’autant que les banques sont frileuses. Les efforts budgétaires ne doivent pas porter sur le parc HLM, qui ne constitue pas une niche fiscale : au contraire, il contribue à atténuer les conséquences sociales de la crise en jouant un rôle d’amortisseur.

Il vous appartient donc de mettre d’autant moins en œuvre des mesures aussi coûteuses sur le plan social, que la ponction que vous effectuerez sur les HLM, qui ne sera pas sans conséquences sur leurs fonds propres, s’ajoutera au coût des normes environnementales auxquelles les organismes doivent déjà faire face. Cette mesure se traduira par des loyers d’équilibre élevés et un ralentissement de l’investissement au détriment du bâtiment.

Enfin, je tiens à souligner que la commission des finances du Sénat a adopté ce matin un amendement de suppression de l’article 99, estimant que « ce dispositif, abusivement qualifié de suppression d’une niche fiscale, ne constituait pas un outil adéquat de péréquation. […] Le comblement du déficit de financement des opérations de rénovation urbaine ne devait pas être mis à la charge des bailleurs sociaux mais relevait bien du budget général de l’État ».

M. Patrick Lebreton. Monsieur le secrétaire d’État, qu’en est-il de la politique du logement dans les DOM, alors que votre document fait apparaître qu’il s’agit bien d’une mission transversale ?

Il y a deux jours, les sénateurs Marc Massion et Éric Doligé ont rendu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 un rapport sur le logement outre-mer : il en ressort que seuls 6 200 logements sociaux neufs ont été financés en 2009 pour un besoin de 45 000 dans l’ensemble des DOM. Nos deux collèges estiment qu’il conviendrait de permettre le cumul entre la nouvelle mesure de défiscalisation sur le logement social outre-mer née de la loi de développement de l’outre-mer et la ligne budgétaire unique. Or telle ne semble pas être la position défendue par Mme Penchard, ministre de l’outre-mer. Par ailleurs la remise en cause de la défiscalisation sur l’investissement locatif n’améliorera pas la situation du logement outre-mer.

Monsieur le secrétaire d’État, quelles initiatives fortes et novatrices pourriez-vous prendre dans un très proche avenir pour répondre à une situation aussi alarmante ? La position défendue par la quasi-unanimité des élus des DOM est le cumul de la défiscalisation et de la ligne budgétaire unique jusqu’à ce qu’on aboutisse à un rythme de croisière soutenu en matière de logement social.

Mme Jacqueline Maquet. Monsieur le secrétaire d’État, en 2009, 56 % des personnes modestes pouvaient bénéficier du PTZ. En 2011, le PTZ Plus sera ouvert à toutes les catégories de population, sans plafond de ressources, dans le neuf et dans l’ancien.

Pensez-vous que ce soit la meilleure solution pour lutter contre la pénurie de logements sociaux ? Ce sont en effet les revenus modestes primo-accédants qui libèrent du locatif social, ce qui permet d’augmenter l’offre de logements accessibles à tous.

Par ailleurs, la mesure d’économie, en matière d’aide à la personne, inscrite dans le PLFSS pour 2011, est un nouveau coup dur porté plus particulièrement aux étudiants et aux ménages modestes habitant dans le privé, notamment aux ménages qui changent de situation ou se séparent. Comment arrivez-vous à estimer cette mesure injuste à 240 millions d’euros ?

M. Jean-Michel Villaumé. Monsieur le secrétaire d’État, que pensez-vous de la proposition de l’Union sociale de l’habitat de supprimer les deux tranches supérieures du barème du nouveau PTZ ? Elle concerne des ménages dont le revenu imposable est supérieur à 36 000 euros annuels.

Par ailleurs, confirmez-vous la mesure, inscrite dans le PLFSS, visant à supprimer le versement rétroactif sur trois mois de l’APL, qui risque de mettre à mal les ménages les plus défavorisés ?

M. Louis-Joseph Manscour. Monsieur le secrétaire d’État, la durée d’attente moyenne pour obtenir un logement social aux Antilles est de cinq à six ans. En 2007 et en 2008, seuls 250 logements ont été construits en Martinique, alors qu’il faudrait en construire entre 2 500 à 3 000 par an pour satisfaire les besoins de la population.

La récession imposée au budget du logement, principalement pour l’outre-mer, nous inquiète car, loin d’être de nature à permettre de nouvelles réalisations, elle aggravera la situation. Force est de constater que l’outre-mer ne sera pas épargné par la politique d’austérité du Gouvernement. Comme l’a rappelé M. Lebreton, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances du Sénat reconnaissent eux-mêmes que les résultats outre-mer en matière de logement ne sont pas à la hauteur des besoins des populations.

De plus, privilégier le dispositif de défiscalisation outre-mer masque la volonté du Gouvernement de réduire, voire de supprimer à terme, la ligne budgétaire unique qui rassemble les aides spécifiques à la construction de logements outre-mer.

Les bailleurs sociaux sont du reste très inquiets car ils constatent déjà une forte augmentation des impayés de loyers et des retards de paiement dus à la situation économique et sociale des ultramarins. Compte tenu de la baisse des aides au logement et à la personne, ne craignez pas qu’un nombre toujours plus grand de familles modestes, notamment outre-mer, soit jeté à la rue tout en étant dans l’incapacité de bénéficier de logements ?

M. Serge Poignant, vice-président de la Commission, remplace M. Patrick Ollier au fauteuil présidentiel.

M. William Dumas. En Languedoc-Roussillon, 70 % des familles répondent aux critères d’accès à un logement HLM. Or, plus de 55 000 demandes restent sans réponse alors que le rythme de la construction est passé de 2 000 logements en 2004 à 6 000 en 2009, l’objectif étant de 10 000 logements par an, l’INSEE prévoyant une augmentation de la population de 800 000 personnes à l’horizon 2030.

Compte tenu de l’instauration d’une taxe sur les organismes HLM, comment les bailleurs sociaux poursuivront-ils leurs efforts de construction et de rénovation du parc, en matière de travaux de performance énergétique, lesquels permettent de réduire les charges locatives ? Il ne leur restera que la possibilité d’augmenter les loyers, qui sont déjà supérieurs de 33 % au plafond conseillé.

Comme les collectivités territoriales, qui ont déjà fourni des efforts très importants pour se substituer aux aides de l’État en voie de disparition, n’ont plus de marges budgétaires, je suis très inquiet pour l’avenir du logement social. Comment ferons-nous pour loger les familles modestes de nos départements ?

M. le secrétaire d’État. M. le rapporteur pour avis Jean-Pierre Abelin a fait un tour d’horizon très large.

S’agissant de l’ANAH, nous avons constaté que 80 % des aides allaient à des propriétaires bailleurs et les 20 % restants à des propriétaires occupants. L’État aide donc davantage les propriétaires qui réalisent un investissement locatif que les autres. Or la proportion de revenus modestes est plus importante chez les propriétaires occupants que chez les propriétaires bailleurs. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de procéder, à enveloppe constante, à un rééquilibrage des aides – 50 % pour les propriétaires bailleurs et 50 % pour les propriétaires occupants – et non à une suppression des aides destinées aux bailleurs. Il convient de savoir que l’État aide actuellement à hauteur de 15 000 euros les propriétaires bailleurs contre seulement 2 000 euros pour les propriétaires occupants.

Ce rééquilibrage sera intéressant surtout pour les zones peu tendues : la proportion de propriétaires occupants modestes est plus importante en milieu rural. C’est pourquoi nous avons développé, via le grand emprunt, un produit particulier, permettant d’investir 500 millions d’euros dans la lutte contre la précarité énergétique, à destination notamment des propriétaires occupants modestes en zone rurale.

On affirme, par ailleurs, que la péréquation visant les organismes HLM constituera un frein à la construction de logements.

MM. François Brottes, Jean-Yves Le Bouillonnec et Marcel Rogemont. Il ne s’agit pas d’une péréquation, mais d’une ponction !

M. le secrétaire d’État. Chacun a le droit d’utiliser le vocabulaire qui lui convient !

D’aucuns affirment que la péréquation, en dégageant 340 millions d’euros, coûtera la construction de 20 000 logements. Telle est la cote mal taillée établie par le président de l’USH et porte-parole du groupe socialiste du Sénat, M. Thierry Repentin. La vraie question est tout autre. En matière de politique de logement social, de nombreux spécialistes ou commentateurs refusent d’admettre que nos besoins de construction ne sont pas également répartis sur tout le territoire. Le lundi précédant le congrès des organismes HLM de Strasbourg, une étude sur deux sites internet immobiliers – SeLoger et PAP – m’a permis d’y repérer 300 offres de logements sociaux, pour lesquels les bailleurs sociaux ne trouvent pas preneurs. Dans certains territoires, la vacance des logements HLM atteint 10 %. M. Thierry Repentin a lui-même reconnu au Sénat que 165 000 logements HLM étaient vacants. De plus, les délais d’obtention peuvent varier selon les territoires de quatre jours à huit ans. Tant qu’on continuera de financer 75 % du logement social dans les zones B et C et à peine 25 % dans les zones A, nous ne remplirons pas notre rôle qui est de produire des logements sociaux là où c’est nécessaire. C’est la raison pour laquelle il convient de réaliser une péréquation.

Si, dans le quart nord-est de la France, le taux de fonds propres par logement social est le double de ce qu’il est dans le reste du pays, c’est que le logement social a une histoire : le quart nord-est correspondait au bassin industriel. Le logement social y étant plus important et plus ancien, il est amorti et dégage des fonds propres considérables. La démographie s’étant aujourd'hui déplacée, il se révèle nécessaire d’organiser une péréquation interne au monde HLM.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n’est pas à vous de la faire.

M. le secrétaire d’État. J’ai demandé aux organismes HLM d’organiser une péréquation interne par groupes : ils m’ont répondu par la négative.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est faux !

M. le secrétaire d'État. Ils acceptent uniquement de faire des prêts participatifs. En revanche les partenaires sociaux qui s’occupent du 1 % logement, de la CGT au MEDEF, partagent mon analyse.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est faux. C’est de la manipulation.

M. le secrétaire d'État. Pour le savoir, il vous suffira, monsieur Le Bouillonnec, de lire le livre blanc que les partenaires sociaux ont présenté et adopté au congrès de Roubaix, à la fin du mois de mars dernier. C’est vous qui manipulez la réalité !

De plus, vous affirmez que la péréquation, portant sur 340 millions d’euros, se traduira par 20 000 logements construits de moins. Or la convention signée entre l’État et l’USH n’a pas pour objectif la mise en vente mais, à terme, la vente effective de 40 000 logements sociaux.

Si la convention signée par M. Delebarre, alors président de l’USH, était respectée, elle dégagerait 2 milliards de fonds propres. Du fait que l’USH ne respecte pas ses engagements en la matière, ce sont donc, selon votre propre équation, plus de 100 000 logements sociaux qui ne sont pas construits.

S’agissant de la rétroactivité sur trois mois de l’APL vous n’évoquez pas la mesure visant à relever le taux de cotisation pour les revenus élevés, laquelle permet d’abonder l’APL.

Au total, l’APL, versée aux plus fragiles de nos compatriotes, s’élève à 15 milliards d’euros par an – 5 milliards sur le budget de l’État et 10 milliards en provenance des partenaires sociaux par le biais de la CAF. Nous avons considéré que le régime de l’APL devait être aligné sur celui des autres prestations sociales, pour lesquelles aucune rétroactivité n’est prévue. Quant à l’économie budgétaire sur le triennal, elle est dégressive, en vue d’anticiper les comportements des bénéficiaires actuels de la rétroactivité. Votre argument selon lequel nous pénalisons les pauvres est politicien : la réalité budgétaire vous contredit.

Par ailleurs, il est vrai que si le décret d’emploi des fonds du 1 % logement, qui concerne les années 2009, 2010 et 2011, était reconduit à l’identique, le 1 % logement serait dans une situation financière catastrophique proche du dépôt de bilan. En effet, il repose sur un taux de participation des employeurs à hauteur de 0,45 %, et sur les retours de prêts, qui génèrent quelque deux milliards d’euros. Or nous avons demandé au 1 % logement de financer l’ANAH et l’ANRU et de transformer une partie de ses prêts en quasi-subventions – à savoir des prêts sur trente-cinq ans. Le modèle économique fondé sur les retours de prêts se trouvait donc mécaniquement en voie d’assèchement. Nous avons décidé de maintenir dans le cadre du triennal budgétaire les subventions versées par le 1 % logement à l’ANRU et à l’ANAH à la même hauteur. En revanche, dans le cadre des négociations que nous ouvrirons en 2011 pour les trois années suivantes, nous retransformerons, via la suppression du Pass foncier et pour 1 milliard d’euros, ces quasi-subventions en prêts à court terme, ce qui permettra, de nouveau, de générer des retours de prêts. L’équilibre économique du 1 % logement sera donc préservé jusqu’en 2014.

S’agissant des ventes de logements HLM, je le répète, la convention signée par l’USH n’est malheureusement pas respectée. Quant aux partenaires sociaux, ils se sont engagés, au congrès de Roubaix, à vendre chaque année 1 % de leur patrimoine afin de dégager des fonds propres. Cette mesure fait partie de leurs cinq priorités. Je rappelle que leur patrimoine couvre 700 000 des 4,2 millions logements sociaux existants.

En ce qui concerne le dispositif DALO, chacun sait qu’il sera élargi en 2012 aux délais anormalement longs. Je ne suis pas convaincu que la production actuelle de logements soit suffisante. Je rappelle que, s’il est vrai que nous avons doublé ces dernières années la production de logements sociaux, les collectivités locales financent à la fois des offres nouvelles et des acquisitions-réhabilitations déjà occupées par des publics qui ne sont pas des publics sociaux de fait. Or ces acquisitions-réhabilitations ne deviendront des offres nouvelles que dans quinze ou vingt ans. Cette politique est pratiquée, malheureusement, aussi bien par la gauche que par la droite, Paris et les Hauts-de-Seine fonctionnant en la matière de la même façon.

Enfin, je souligne que le fonds de péréquation permettra de franchir la « bosse » de l’ANRU.

M. Daniel Goldberg. Les HLM financeront donc l’ANRU.

M. le secrétaire d'État. Il me paraît logique que le monde HLM paie une partie de la rénovation urbaine. Aujourd'hui, le 1 % logement y contribue à hauteur de 770 millions d’euros. La « bosse » de l’ANRU nécessitant 1 milliard d’euros pour les années 2012, 2013 et 2014 – l’année 2012 connaîtra même une « surbosse » –, le financement complémentaire sera assuré par la CGLLS – Caisse de garantie du logement locatif social – et par la péréquation.

Je ne me prononcerai pas sur l’éventuelle nécessité d’un PNRU 2, puisque la question concerne le secrétariat d’État à la ville et que vous auditionnerez Mme Fadela Amara le 2 novembre prochain.

Quant à l’intermédiation locative, il s’agit d’une expérimentation que nous avons lancée en 2010 et qui portera sur 5 000 logements. Nous procéderons à un bilan au début de l’année 2011 en vue de développer ce dispositif qui est d’une grande efficacité.

Je partage, monsieur Piron, votre analyse sur le manque de données statistiques affinées. L’ingénierie publique en a effectivement besoin pour prendre des décisions adéquates. J’en veux pour preuve les prix au mètre carré publiés dans les magazines au début du mois de septembre dans leur numéro spécial immobilier : la même semaine, pour les mêmes quartiers de Paris, les prix variaient de 1 000 euros.

Je ne reviendrai pas sur certains propos excessifs. Convient-il de se focaliser sur le budget de l’aide à la pierre – 500 millions d’euros – pour oublier les 9 milliards d’euros investis chaque année par l’État – 1 milliard d’aides circuit, 5 milliards pour l’APL et quelque 3 milliards de dépenses fiscales et d’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, laquelle est une dépense budgétaire ? Tel est l’ensemble des dépenses consacrées par l’État au logement social.

J’observe que lorsque nous supprimons une dépense fiscale, en l’occurrence celle qui porte sur la CRL, chacun se met à protester !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n’est pas une dépense fiscale…

M. le secrétaire d'État. Si !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je peux vous donner la liste de tous ceux qui sont exemptés de CRL.

M. le secrétaire d'État. Vous assénez des contrevérités, monsieur Le Bouillonnec. De plus, vous ne contestez les dépenses fiscales que lorsqu’elles bénéficient au dispositif Scellier et à l’accession à la propriété, alors que le logement social en bénéficie également, ce que vous refusez d’admettre. Les différents dispositifs se complètent : arrêtez de les opposer. Une bonne politique du logement ne consiste pas à ponctionner l’accession à la propriété au bénéfice du logement social. Il faut prendre en considération l’ensemble du parcours locatif, lequel doit, à nos yeux, déboucher sur l’accession à la propriété – tel est le souhait de nos compatriotes.

En ce qui concerne le contingent préfectoral DALO, je tiens à noter que je n’ai pu signer qu’avec un tiers seulement des bailleurs sociaux d’Île-de-France une convention visant expressément à ne pas reloger les bénéficiaires du DALO dans les zones urbaines sensibles, ce qui signifie que les deux tiers des bailleurs sociaux d’Île-de-France ont refusé de signer la convention. Je le regrette parce que je partage votre analyse en la matière, monsieur Brottes : si nous logeons les bénéficiaires du DALO dans les ZUS, nous créerons de nouveaux ghettos. J’espère que l’ensemble des bailleurs sociaux d’Île-de-France finiront par signer cette convention sur le contingent préfectoral du DALO.

Enfin, l’outre-mer a un budget spécifique : les crédits pour le logement n’apparaissent donc pas dans la mission que nous examinons aujourd'hui mais dans la LBU.

M. Victorin Lurel. Monsieur le secrétaire d’État, les Eco-PTZ ne sont pas appliqués outre-mer du fait qu’ils n’y sont pas adaptés. C’est pourquoi le PTZ Plus risque, comme l’a souligné le président de la commission des affaires sociales, M. Pierre Méhaignerie, de se transformer outre-mer en « PTZ Moins », en raison notamment de l’inadaptation de la réglementation thermique. Dois-je rappeler qu’on a supprimé la déduction des intérêts pour les primo-accédants pour le remplacer par un PTZ qui ne s’applique pas chez nous ?

M. le secrétaire d'État. Avant d’asséner des contrevérités, monsieur le député, peut-être pourriez-vous vérifier le bien-fondé de vos affirmations. Aujourd'hui l’outre-mer en matière de PTZ Plus nouvelle formule est éligible sur la zone B 1 : les prix au mètre carré outre-mer ne correspondant pas à cette zone, ils ont été surclassés pour créer un avantage comparatif.

Il est vrai que la réglementation thermique n’est pas la même outre-mer et en métropole. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé d’appliquer la réglementation bâtiment basse consommation à tous les logements outre-mer.

Nous appliquerons à tous les logements outre-mer le meilleur taux existant.

Article 99

La Commission est saisie de l’amendement CE 1 de M. Jean-Yves Le Bouillonnec, tendant à supprimer l’article 99.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous proposons la suppression de l’article 99 qui organise non pas une péréquation, comme l’a affirmé le secrétaire d’État, mais bien une ponction de 340 millions d’euros sur les organismes HLM. En effet, l’État ne cherche pas à organiser une répartition solidaire entre les organismes HLM mais à régler ses problèmes financiers en injectant 80 millions de la somme prélevée dans l’aide à la pierre et 240 millions dans l’ANRU, qui n’est plus financée par l’État, et ce alors que M. Borloo avait affirmé en 2006 que celui-ci mettrait 6 milliards d’euros dans le dispositif.

Par ailleurs, concernant les prétendus fonds propres disponibles des organismes HLM, je rappellerai que Mme Boutin a déjà introduit dans la loi MOLLE un prélèvement qui a été un véritable fiasco : le Gouvernement est incapable de nous donner le montant pour 2010 de ce prélèvement sur les « dodus dormants » du fait d’une analyse financière totalement erronée.

La masse financière des bailleurs sociaux est en effet de 12 milliards d’euros, dont 5 milliards sont consacrés à la restitution des dépôts de garantie et aux travaux de réparation. Restent 6 milliards de fonds disponibles, somme inférieure de deux milliards à l’investissement annuel des organismes.

De plus, la dette des organismes s’élève à 80 milliards d’euros.

La plupart d’entre eux sont donc obligés de conserver des fonds pour préparer les opérations de réhabilitation qui ne sont plus financées par l’État et le seront de moins en moins par les collectivités locales dont la situation est catastrophique. Les opérations de réhabilitation seront donc supportées de plus en plus par les organismes HLM eux-mêmes.

Il faut également tenir compte, pour la construction de nouveaux logements sociaux, de la réduction de moitié, dans le budget de l’État, du montant de la surcharge foncière.

Enfin, le budget en préparation réduit à 800 euros le financement d’un logement PLUS et à 10 000 euros celui des PLI : les bailleurs sociaux devront ainsi davantage participer à la construction de tels logements.

Il n’existe donc pas de masses financières dormantes dont l’État pourrait prélever une partie en vue d’assumer ses compétences en matière de logements sociaux, alors même que la construction et la réhabilitation de ces logements ainsi que la rénovation urbaine incombera de plus en plus aux organismes HLM.

Telle est la raison pour laquelle le secrétaire d’État a été confronté à des protestations au congrès de Strasbourg. La stratégie gouvernementale réduira la capacité d’action des bailleurs.

Il convient également de rappeler que le logement social rapporte de l’argent à l’État, notamment par le biais de la TVA. De plus l’apport du logement social au secteur du bâtiment est loin d’être négligeable.

Cette disposition, qui vise uniquement à alimenter les caisses de l’État, est totalement irresponsable.

M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis. Je suis défavorable à cet amendement de suppression car nous avons besoin de ces 340 millions d’euros pour financer une partie des programmes de l’ANRU.

Il est vrai que la proposition initiale du Gouvernement ne permettait pas d’instaurer une véritable péréquation puisque tous les bailleurs sociaux étaient taxés de la même façon, qu’ils investissent ou non. L’amendement adopté ce matin en commission des finances améliore le dispositif puisqu’il permet d’instaurer une véritable péréquation – 25 % des offices HLM ne seront pas concernés. Cette nouvelle proposition n’interdit pas, du reste, de poursuivre la réflexion.

La Commission rejette l'amendement.

M. Serge Poignant, président. Le vote sur la mission « Ville et logement » aura lieu le 2 novembre, à l’issue de l’audition de Mme Fadela Amara, secrétaire d’État à la ville.

*

La Commission a procédé à l’audition, le 2 novembre 2010, lors d’une réunion ouverte à la presse, de Mme Fadela Amara, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville, sur les crédits de la mission « Ville et logement » pour le projet de loi de finances pour 2011 (n° 2824).

M. le président Patrick Ollier. Madame la secrétaire d’État, je vous prie de nous excuser pour le quiproquo qui a conduit à nous priver de votre présence lors de notre dernière réunion et je vous remercie d’avoir accepté si rapidement un nouveau rendez-vous.

Vous avez eu à cœur d’apporter un nouveau souffle à la politique de la ville en initiant la dynamique « Espoir banlieues », dès janvier 2008. Vous êtes chargée de la mise en œuvre de ce que l’on a été jusqu’à surnommer le « Plan Marshall des banlieues ». Considérez-vous que les moyens financiers dont vous disposez au titre du programme 147 « Politique de la ville » soient suffisants pour mener à bien une telle ambition ?

L’effort à destination des quartiers ne transite pas uniquement via ce programme ; dans le cadre de certaines politiques de droit commun, les quartiers prioritaires bénéficient de moyens supplémentaires par rapport au reste du territoire. En 2010, l’État leur consacrait au total près de 3,7 milliards d’euros. Quelle appréciation portez-vous sur les moyens accordés aux quartiers prioritaires ? Permettent-ils d’enclencher une dynamique positive ?

En ce qui concerne le financement de la rénovation urbaine, le projet de loi de finances pour 2011 prévoit de compléter la contribution d’Action logement par le produit de l’imposition sur les revenus locatifs, dont les bailleurs sociaux ne seront plus exonérés. Considérez-vous que ce circuit de financement sera de nature à pérenniser le financement du PNRU, le Plan national de rénovation urbaine ? Surtout, permettra-t-il de lancer le PNRU 2 ?

Enfin, j’ai été, dans cette Assemblée, à l’origine des zones franches urbaines – ZFU – et des zones de redynamisation urbaine – ZRU. L’idée était de faire en sorte que les inégalités territoriales donnent lieu à un traitement fiscal différencié, de prendre des mesures inégalitaires pour rétablir l’égalité dans les territoires. Je constate aujourd’hui que la politique des zones franches dans les quartiers prioritaires est menacée d’extinction à moyen terme. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est, et si vous avez envisagé un dispositif pour les remplacer ?

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Chacun connaît la situation économique et budgétaire de notre pays et les contraintes fortes qui ont pesé sur l’élaboration du budget. Je ne reviendrai pas sur le contexte qui a entouré la préparation de celui de la politique de la ville.

Les crédits de paiement du programme 147 diminuent de 12 %, ce qui portera la dotation budgétaire à 618,5 millions d’euros, auxquels il convient d’ajouter 467 millions de dépenses fiscales rattachées au programme.

Pour lever ici toute ambiguïté, je précise d’emblée que la capacité d’intervention de l’ACSÉ, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, s’agissant des contrats urbains de cohésion sociale – les CUCS – sera préservée par rapport à 2010.

Cette diminution de 12 % est en effet imputable pour une large part aux prévisions de l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui a revu à la baisse le montant du remboursement des exonérations de charges sociales dans les zones franches urbaines.

De même, un cinquième de la baisse des crédits du programme s’explique par diverses mesures de transfert de crédits et de rationalisation concernant le fonctionnement des structures – SG-CIV (Secrétariat général du Comité interministériel des villes), ACSÉ, EPIDE (Établissement public d'insertion de la défense), ANRU –, et par l’apurement des dettes héritées de l’ex-Fonds interministériel des villes.

En ce qui concerne les dépenses d’intervention de l’ACSÉ, les besoins locaux ont été pris en compte. Ainsi, seuls 0,45 million d’euros sur les 2 millions prévus se sont révélés nécessaires au financement du Busing. Après trois ans de mise en œuvre, les crédits ont donc été ajustés à leur coût réel.

Par ailleurs, conformément à la logique de la dynamique « Espoir banlieues », certaines mesures ayant fait l’objet d’une expérimentation seront prises en charge par le droit commun et généralisées. C’est le cas notamment du contrat d’insertion à la vie sociale pour les jeunes sous main de justice.

Je conduis actuellement, en lien avec mes collègues, un travail de clarification des financements afin de mettre ceux-ci en cohérence avec les objectifs de nos programmes budgétaires respectifs. Par exemple, les services d’aide aux victimes d’urgence – SAVU –, dont le ressort excède très largement les quartiers, ainsi que les intervenants sociaux en commissariat ont vocation à être financés par le droit commun.

Toutes ces mesures nous ont permis de nous conformer aux orientations budgétaires arrêtées par le Premier ministre tout en préservant nos priorités d’actions en faveur des habitants des quartiers et des communes les plus pauvres.

Ainsi, au regard des crédits inscrits en loi de finances pour 2010, et à périmètre constant, l’ajustement portant sur les actions territorialisées de l’ACSÉ ne devrait pas excéder 3 %.

J’ajoute que dans le cadre du budget triennal, les crédits relatifs aux CUCS devraient être stabilisés au niveau de 2011, ce qui devrait permettre aux acteurs de terrain de bénéficier de davantage de visibilité.

J’en viens à la première de mes trois actions prioritaires, relative à l’égalité des chances et à l’éducation. Le budget des projets éducatifs des internats d’excellence augmente de 3 millions d’euros et passe à 7,1 millions, ce qui, dans le contexte actuel, traduit un effort réel en faveur de la politique de la ville. Les « cordées de la réussite », qui consistent en un accompagnement soutenu de lycéens par des grandes écoles ou universités, seront dotées de 4 millions d’euros. Après 149 cordées en 2009 et 250 en 2010, l’objectif est d’atteindre 300 en 2011. De plus, 4 200 élèves devraient être concernés par des mesures d’accompagnement destinées à favoriser l’accès aux classes préparatoires aux grandes écoles.

Par ailleurs, et conformément aux engagements du Président de la République, 23,6 millions d’euros – dont 5, 6 millions d’euros de crédits de paiement en 2011 – seront dégagés dans le cadre du budget triennal pour casser les ghettos en reconstruisant des collèges dégradés.

Le droit à une seconde chance constitue également, avec 7 800 élèves accompagnés, un pilier de cette politique. Les Écoles de la deuxième chance continuent d’essaimer et les engagements du programme 147 en ce domaine seront maintenus. Au total, 123 millions d’euros – soit 20 % du programme – seront consacrés à l’éducation et à l’accès aux savoirs de base. Les crédits du volet CUCS, quant à eux, sont maintenus à 22 millions d’euros.

De son côté, la Réussite éducative bénéficiera d’une dotation de 83 millions d’euros. En 2011, 530 projets seront financés, bénéficiant à 136 000 enfants – dont je souhaite qu’à court terme au moins 70 % puissent suivre un parcours individualisé.

Ma deuxième priorité concerne l’emploi et le développement économique, auxquels sont consacrés 43 % de mon budget, soit 265 millions d’euros. Les crédits du volet emploi et développement des CUCS sont en augmentation de 23 %, afin de capitaliser sur les actions menées dans le cadre du plan de relance. J’ai par ailleurs décidé de confier la présidence d’un groupe de travail sur les zones franches urbaines, le développement économique et l’emploi dans les quartiers à Éric Raoult.

M. Pierre Gosnat. Le maire du Raincy ? Quelle bonne idée !

Mme la secrétaire d’État. Je tiens à votre disposition la liste des membres de cette commission, qui comprend des personnalités éminentes et est politiquement équilibrée.

S’agissant du développement économique, je tiens à souligner le dynamisme des habitants des quartiers, qui se sont pleinement approprié le statut d’auto-entrepreneur : environ 30 % des nouvelles installations d’établissements dans les ZFU ont en effet été réalisées sous ce statut. Cet esprit d’initiative, qui va à l’encontre des idées reçues sur l’assistanat, j’entends l’accompagner en 2011.

Dans les zones urbaines sensibles, le taux de chômage des jeunes actifs a frôlé les 30 % en 2009. Il reste 8 000 contrats d’autonomie à signer en 2011 ; vous comprendrez que je ne puisse pas m’en contenter. La situation, en termes d’accès à l’emploi, me préoccupe, car elle n’est pas socialement soutenable. Je sais que les habitants des quartiers expriment une attente vis-à-vis des pouvoirs publics et je ferai donc des propositions à ce sujet. Je souhaite notamment des exonérations de charges sociales ciblées sur les jeunes des quartiers, et plus seulement sur les territoires.

Le troisième axe prioritaire, doté d’un budget de 125 millions d’euros – soit 20 % des crédits du programme –, concerne le lien social, le soutien aux associations, les adultes relais, la citoyenneté et la lutte contre les discriminations.

J’entends en particulier, après les avoir évaluées, encourager les actions de promotion du civisme et du vivre-ensemble. Une enveloppe de 76,6 millions d’euros permettra de financer 4 230 postes d’adultes relais, tout en offrant des parcours de professionnalisation aux intéressés.

Je souhaite également mentionner le soutien à la parentalité et l’émancipation des femmes : c’est tout le sens des actions de proximité que je mène en matière de développement des modes de garde d’enfant ou d’accès aux droits, sans parler du soutien à l’action menée par Alain Ducasse auprès des femmes des quartiers, notamment à Sarcelles. Cette priorité a vocation à être déclinée dans toutes les thématiques des CUCS et fera l’objet d’un suivi particulier en 2011.

Comme vous l’avez souligné, monsieur le président, le programme 147 n’est pas la seule source de financement de la dynamique « Espoir banlieue ». Les crédits spécifiques dont j’ai la charge complètent l’effort financier global réalisé par l’État et de ses partenaires au titre de la politique de la ville.

Dans un contexte de gel des dotations, une progression de la Dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale – DSUCS – n’était pas acquise d’avance. Elle augmentera pourtant de 6 %, pour atteindre un total de 77 millions d’euros en 2011. Deux ans après l’adoption du plan Borloo, il convenait de saluer ce geste.

Quant au montant de la dotation de développement urbain – DDU –, il est maintenu à 50 millions d’euros pour les trois prochaines années. Pour la Seine-Saint-Denis, cela représente 8,6 millions d’euros en 2010.

Cet effort en faveur des communes les plus pauvres trouve son prolongement dans le projet de loi de finances, avec la création d’un fonds de péréquation pour lequel je me suis, avec d’autres, beaucoup battue.

S’agissant des actions des ministères, je rappellerai simplement que l’Éducation nationale apportera à l’éducation prioritaire un milliard d’euros en 2011 – dont plus de 260 millions pour l’accompagnement éducatif –, tandis que le ministère de la jeunesse et de la vie associative consacrera aux jeunes des quartiers près du quart de son budget et 65 % du fonds d’expérimentation jeunesse.

De son côté, la fondation Total vient d’annoncer qu’elle abondera le fonctionnement des internats d’excellence de 2,5 millions d’euros, via le fonds d’expérimentation.

Enfin, la Caisse nationale d’allocations familiales s’implique fortement dans le développement des modes de garde dans les quartiers ; elle devrait y consacrer près de 25 millions d’euros en 2011 et 73 millions d’euros en trois ans.

J’en viens au Plan national de rénovation urbaine. La capacité d’affectation de l’Agence nationale de rénovation urbaine – ANRU –, abondée par des produits financiers, est désormais de 12,621 milliards d’euros. Le comité d’engagement de l’ANRU a validé des projets de rénovation urbaine portant sur 480 quartiers, dont 464 font l’objet de conventions signées, ce qui représente plus de 42 milliards d’euros de travaux programmés pour les cinq prochaines années.

Les engagements et les paiements de l’Agence se sont accélérés en 2009 : le montant total des engagements, 2,1 milliards d’euros, représente le double du niveau annuel moyen constaté sur les deux exercices précédents. Aujourd’hui, on construit plus qu’on ne démolit.

Mais, rançon de ce succès, nous sommes désormais entrés dans ce qu’on appelle la « bosse de l’ANRU », avec un besoin de financement plus important. Ainsi, pour l’année 2011, les besoins de trésorerie de l’Agence sont évalués à 250 millions d’euros.

Dans ce contexte, afin de permettre à l’ANRU de clôturer l’exercice 2011 et les suivants avec un niveau de trésorerie sécurisé, le projet de loi de finances pour 2011 propose de compléter les financements actuels en ayant recours à une partie du fonds géré par la CGLLS, la Caisse de garantie du logement locatif social, alimenté par une contribution des bailleurs sociaux. Toutefois, pour tenir compte des remarques pertinentes exprimées par un certain nombre de parlementaires quant à la nécessité de proposer un financement plus juste et d’assurer une meilleure péréquation, le secrétaire d’État au logement travaille, en concertation avec les organismes bailleurs, à l’élaboration de nouvelles propositions.

Vous le constatez, j’ai tout fait, dans un cadre contraint, pour préserver le budget de nos interventions territorialisées. Je défends plus que jamais le principe de la mobilisation du droit commun sur laquelle repose la dynamique « Espoir banlieues ». Certes, il y a encore à faire dans ce domaine, mais nous savons tous que le principe est bon et qu’il doit être renforcé.

L’évolution positive récente de certaines zones urbaines sensibles montre que la réduction des écarts n’est pas une utopie. À la condition que tous les acteurs concernés se mobilisent, nous pouvons donc atteindre cet objectif essentiel, clé du mieux-vivre des habitants les plus démunis de notre pays.

M. Michel Piron, rapporteur pour avis pour la ville. En matière de politique de la ville, le montant des autorisations d’engagement demandées au titre de l’année 2011, qui s’élève à 618 millions d’euros, est en baisse par rapport à l’année précédente. La restriction budgétaire touche le montant des crédits de paiement inscrits au projet de loi de finances dans une proportion sensiblement similaire.

Toutefois, il convient de nuancer cette analyse en remarquant que l’action n° 2 « Revitalisation économique et emploi », qui regroupe les crédits dédiés aux compensations, au bénéfice des régimes de sécurité sociale, des exonérations de charges en zones franches urbaines, absorbe une part prépondérante de la variation entre les deux années.

Constatant que l’action n°l du programme, qui porte l’essentiel des crédits à destination des quartiers, ne connaît pas de baisse significative, j’oserai donc la remarque suivante : « l’essentiel est sauf ! » Le maintien d’un tel niveau d’engagement constitue en effet un signal fort pour les acteurs de la politique de la ville. Je soulignerai toutefois l’incertitude qui pèse sur les moyens attribués aux acteurs de la politique de la ville, et qui vient atténuer quelque peu mon sentiment de satisfaction.

M. Pierre Gosnat. Quel enthousiasme…

M. Michel Piron, rapporteur pour avis. Les opérateurs principaux de la politique de la ville que sont l’ANRU et l’ACSÉ signent des « contrats » d’objectif et de performance mais ne reçoivent aucune garantie quant aux moyens, financiers ou humains, de les réaliser. C’est un bien curieux contrat que celui qui ne lie qu’une seule des deux parties. Pourquoi, madame la secrétaire d’État, n’a-t-on pas inclus de clause de moyens dans les conventions signées avec l’ANRU et l’ACSÉ ?

Les porteurs de projets de rénovation urbaine n’ont pas à redouter la cessation des paiements de l’ANRU, car le financement du PNRU à hauteur de 12 milliards d’euros est garanti par la loi. Cependant, compte tenu de la complexité du montage, couplée aux difficultés d’Action Logement, je ne peux manquer d’être inquiet : le PNRU 2 verra-t-il le jour ? Même s’ils sont importants, les effets dans le temps de la rénovation urbaine sont limités. S’il n’est pas suivi d’un deuxième plan, le PNRU verra donc ses effets fragilisés. Qu’adviendra-t-il, dans ces conditions, des quartiers rénovés, et, a fortiori, des quartiers qui n’ont pas pu bénéficier de la première vague de rénovation ?

Le SG-CIV, l’ANRU et l’ACSÉ, soit l’ensemble des services centraux chargés du pilotage de la politique de la ville, m’ont confié leur inquiétude quant à la situation des services déconcentrés de l’État. La RGPP, révision générale des politiques publiques, engendre jusqu’à présent autant, sinon davantage, de désorganisation que de rationalisation. Certes, le facteur temps doit être pris en compte. Mais les directeurs des services déconcentrés se décrivent – je cite une note interne de l’ANRU – comme des « robots RGPP à deux lames ». Pire, alors que le niveau départemental, opérationnel, subit de plein fouet les restrictions budgétaires, l’échelon régional, plus éloigné du terrain, grossit. Mon sentiment est que l’on ne peut pas mener une politique de la ville digne de ce nom uniquement à coup de tableurs Excel. Peut-on espérer d’autres méthodes avec d’autres moyens ?

À ces incertitudes qui pèsent sur les administrations publiques s’ajoute la perspective de l’extinction des zones franches. Comment ferons-nous pour y éviter l’exode progressif de l’activité économique ? J’ai conscience du coût économique des zones franches ; je sais aussi que leur effet porte davantage sur la localisation de l’activité que sur la création d’emploi : deux tiers des entreprises en zone franche bénéficieraient, dit-on, d’un effet d’aubaine. Soit, mais n’est-il pas dangereux de les supprimer sans autre forme de procès ? Au moins faudrait-il envisager leur succession !

Vous comprendrez bien qu’après avoir recueilli tous ces éléments lors des auditions budgétaires, je n’aie plus la vision optimiste que la seule lecture du projet annuel de performances pouvait faire naître. Je m’interroge sur les perspectives futures, car on est en train de fragiliser une présence publique locale nécessaire à la mise en œuvre de la politique de la ville. Celle-ci peut d’ailleurs à tout moment subir un « coup de rabot » ; la non-reconduction du PNRU, en particulier, mettrait en péril les résultats auxquels elle est parvenue. Les collectivités pourront-elles assurer le relais ?

Interrogeons nous maintenant sur la gouvernance de la politique de la ville. La question de fond est celle de l’échelle. Trop de politiques sont encore conçues au niveau national, puis plaquées sur les quartiers. Je crois que l’on passe ainsi à côté de la réalité des quartiers. Comme l’écrivait Steinbeck, « chaque ville diffère de toutes les autres : il n 'y en a pas deux semblables. Une ville a des émotions d'ensemble ». Peut-être ne faut-il pas une politique de la ville, mais plutôt une politique des villes.

Ne conviendrait-il pas d’associer davantage les élus locaux à la conception de la politique de la ville ? Pourquoi ne pas les rendre responsables, au sens politique du terme, de la mise en œuvre des dispositifs à destination des quartiers, en leur octroyant des compétences étendues en même temps que des crédits fongibles ?

Comment comptez-vous mettre en cohérence la nouvelle géographie prioritaire et la géographie contractuelle ? Comment parvenir à un zonage qui n'ait pas pour effet pervers de renforcer la perception négative des quartiers ? Autrement dit, faut-il conserver le quartier comme l'échelle d'action de la politique de la ville ou préférer une approche communale, voire intercommunale ?

Lors de votre dernière audition devant notre commission, en septembre, vous avez déclaré « faire du passage au droit commun votre politique », ajoutant que votre objectif était de rassembler l'ensemble des acteurs concernés. Qu'entendez-vous par là ? S'agit-il de permettre aux acteurs locaux de modifier, d'un commun accord, les politiques de droit commun en fonction des particularités des quartiers dont ils ont la charge ?

Considérez-vous que la DSU et la DDU soient des outils adaptés à la résolution des problèmes des quartiers ? Je pense, pour ma part, que la richesse d'une collectivité territoriale et celle de ses habitants sont parfois déconnectées. Donner davantage de moyens à une commune ou une agglomération sans l'obliger à un fléchage strict des crédits vers les quartiers prioritaires améliore-t-il leur situation ?

Vos réponses nourriront notre réflexion sur la politique de la ville, laquelle est, je crois, à un moment charnière de son histoire. Nous avons multiplié les dispositifs de discrimination positive à destination des habitants des quartiers, mais leur caractère stéréotypé a limité leurs résultats. Il nous faut désormais aller plus loin en cessant d'occulter le caractère territorial de la politique de la ville.

M. Pierre Gosnat.  En juin, vous refusiez, madame la secrétaire d’État, que la politique de la ville souffre des restrictions budgétaires et de la politique de rigueur. Force est de constater que ses crédits, à l’instar de ceux destinés au logement, diminuent de façon drastique. En 2009, on constatait une réduction de 350 millions et la fin du financement de l’ANRU par l’État ; en 2010, la baisse était de 48 millions ; elle sera de 83 millions en 2011. Comme l’a dit Michel Piron, l’essentiel est sauf, mais où ? Certes, ce programme ne vise qu’une partie de la politique de la ville, mais elle est importante puisqu’elle comprend le financement de l’ANRU et de l’ACSÉ. Et qu’en est-il du PNRU 2 ?

Tout le monde s’accorde à reconnaître les besoins et les enjeux immenses que recouvre la politique de la ville. Le rapport de nos collègues François Goulard et François Pupponi est très clair : les écarts en termes de pauvreté, de chômage, d’accès aux soins et de résultats scolaires n’ont pas été réduits depuis la loi de 2003. À certains endroits, ils se maintiennent à des niveaux préoccupants. Même s’il faut noter les efforts déployés en faveur du bâti, on ne peut éluder la question des enjeux sociaux.

Permettez-moi d’exprimer, sur ce point, mes plus profondes inquiétudes. L’Union nationale pour l’habitat des jeunes (UNHAJ) m’a interpellé quant à la suppression envisagée des postes du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP). Ce fonds, qui finance des associations oeuvrant pour le développement de l’emploi et de la médiation dans les quartiers difficiles, enregistre une perte de 5 millions, soit plus de 50 % de son budget. Les crédits en faveur des associations assurant le maintien du lien social baissent de 3 millions. Pouvez-vous rassurer ces associations quant à la pérennité de leur action et de leurs ressources ?

Je suis d’accord avec Michel Piron quant à la nécessité de renforcer le pouvoir des maires et des conseils municipaux, à condition que les moyens financiers et matériels soient bien affectés. Par ailleurs, les élus doivent pouvoir compter sur la réactivité des services de l’État dans l’instruction et le suivi des dossiers. Il nous arrive trop souvent, après avoir négocié et instruit d’importants dossiers pendant de longues années, de nous trouver face au mur de l’administration. Parfois même, les règles du jeu ont changé. Ainsi en va-t-il des projets ANRU, discutés âprement avec les populations, dont nous ne savons ce qu’il adviendra.

Mme Laure de La Raudière. Le groupe UMP salue l’engagement du Gouvernement dans le maintien de crédits importants en faveur de la politique de la ville. Les mesures de la dynamique Espoir banlieues méritent d’être soulignées : près de 29 000 contrats autonomie ont été signés depuis juin 2008 ; 300 délégués du préfet ont pris leurs fonctions dans les quartiers prioritaires ; l’accompagnement éducatif permet aux élèves volontaires de bénéficier d’une aide aux devoirs, d’activités culturelles ou sportives dans le cadre de leur école ou de leur collège.

Tous, nous saluons la rénovation urbaine menée par l’ANRU dans le cadre du PNRU. D’aucuns s’inquiètent de la pérennité des moyens de l’agence : où en est le dialogue entre députés de la majorité et Gouvernement ? Une solution a-t-elle été trouvée ? Pensez-vous que le PNRU 2 sera lancé, ainsi que le Premier ministre semblait l’annoncer en filigrane de son discours lors de l’installation du Conseil national des villes le 25 mai dernier ?

Comme le rapporteur, je m’interroge sur la politique « des villes ». Délocaliser les moyens, au plus près de chacun des quartiers, ne permettrait-il pas de les utiliser de façon plus souple et plus efficace ?

M. François Pupponi. Depuis 2008, les autorisations d’engagements ont chuté de 40 % ! Dans le cadre de la programmation triennale les crédits auront baissé de 50 % en 2013. Cette diminution dramatique s’explique par la fin du financement de l’ANRU par l’État et par l’extinction des zones franches urbaines.

Les quartiers auront ainsi perdu 550 millions en cinq ans, alors que la situation est alarmante : une enquête de l’ANRU montre que les inégalités n’ont pas reculé et qu’elles se sont même aggravées. En trente ans de politique de la ville, nous n’avons pas été capables de fixer des objectifs clairs, nous n’avons pas su mobiliser le droit commun et nous avons mal évalué les actions et leurs résultats. Par ailleurs, les documents budgétaires restent étrangement flous quant à la participation de chaque ministère au financement des quartiers.

La politique de la ville est une politique transversale, qui, pour être imposée aux grands ministères – notamment au ministère de l’emploi, le grand absent dans ces quartiers – doit être directement rattachée au Premier ministre. Elle ne fonctionne vraiment que dans les quartiers des villes disposant des moyens nécessaires pour la mettre en œuvre. En revanche, elle se trouve en échec dans les « villes-quartiers », comme Montfermeil ou Clichy-sous-bois. Quand 80 % de la ville est classé « zone urbaine sensible », c’est toute la ville qui est en difficulté.

Vous faites de l’emploi votre priorité. Mais là encore, les chiffres parlent d’eux-mêmes : avec la fin des zones franches, les crédits destinés à la revitalisation économique et à l’emploi sont passés de 375 millions en 2008 à 222 millions en 2011. Autant de crédits en moins qui permettaient aux habitants des quartiers, et pas seulement les jeunes, de trouver un emploi malgré les discriminations qui pèsent sur eux.

La DSU sera fléchée sur les 250 communes les plus pauvres et la DDU est maintenue à 50 millions : cela va dans le bon sens. Mais le remplacement des fonds départementaux et du fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF), par le fonds national de péréquation nous inquiète. Nous ne connaissons ni son montant ni les conditions d’attribution. Surtout, l’article 53 du PLF prévoit qu’à partir de 2012, les dotations de péréquation seront affectées aux intercommunalités. Cela marque une rupture dans la politique de la ville. Nous considérons pour notre part que seules les communes ont la capacité de mettre en oeuvre des politiques transversales.

Vous avez décidé d’expérimenter de nouveaux CUCS dans cinquante sites. Mais comment seront-ils financés en 2011 ? Le budget ne semble pas être appelé à augmenter.

Enfin, les crédits destinés à la réussite éducative sont amputés de 7 millions ; quelle sera l’évolution du PRE et des actions « coup de pouce » en 2011 ?

M. Jean Dionis du Séjour. Sans le rôle d’aiguillon joué par l’État depuis trente ans, les élus locaux ne se seraient pas investis aussi fortement dans la politique de la ville et n’auraient pas pu utiliser tous ces dispositifs.

Dans un contexte économique tel que celui que nous connaissons aujourd’hui, et après avoir entendu Jacques Attali prôner une réduction annuelle des dépenses publiques de l’ordre de 50 milliards, il faudrait être hypocrite pour ne pas voir que les crédits de la politique de la ville sont, eux aussi, affectés par le repli de l’État.

Quelles seront vos priorités et quels critères de sélection pensez-vous utiliser pour attribuer des crédits, forcément plus rares ? Lors de votre dernière audition, je vous avais mise en garde contre le syndrome des grandes métropoles. Si vous appliquez des critères sociaux –chômage, niveau de ressources, etc. – vous vous apercevrez que certains quartiers de villes moyennes passeront au rouge vif.

Pourriez-vous faire taire les rumeurs concernant la taxe de 2,5 % appliquée aux loyers HLM ? Est-elle destinée à financer l’ANRU ?

Contrairement à François Pupponi, je me demande s’il ne serait pas préférable d’orienter la politique de la ville là où il y a de l’argent : les intercommunalités et les régions.

Mme Jacqueline Maquet et MM. Henri Jibrayel, François Pupponi et Michel Lefait. Oh !

M. Henri Jibrayel.  Le contrat d’autonomie est un dispositif très coûteux. Sur les 28 000 contrats signés, combien ont débouché sur un emploi stable ?

M. René-Paul Victoria.  Je vous félicite, madame la secrétaire d’État, pour votre action dans les quartiers difficiles, où, malgré la crise, vous avez tenté d’apporter quelque espoir. La situation est particulièrement difficile outre-mer : en un an, le chômage a augmenté de 14,5 % à la Réunion. Comment comptez-vous décliner vos actions dans l’ensemble des territoires ultra-marins ?

M. Michel Lefait.  Trois ans après leur lancement, les 24 écoles de la deuxième chance affichent un bilan plus qu’honorable. Ces structures, présentes dans 33 départements, s’adressent aux 18-25 ans sortis du système scolaire sans qualification et leur proposent une formation de 8 à 10 mois en alternance. Le nombre de sorties positives avoisinait les 60 % en 2009, ce qui est rarement le cas de structures analogues. Ne pensez-vous pas que ce dispositif devrait faire partie des priorités de la politique de la ville en matière de formation ? Comptez-vous implanter davantage d’écoles de la deuxième chance dans les quartiers difficiles et les zones urbaines sensibles ?

M. Francis Saint-Léger. L’éducation est un pilier essentiel de la politique de la ville. Or les écoles sont souvent des ghettos, sans mixité sociale. Pour lutter contre ce phénomène, vous avez mis en place plusieurs dispositifs comme les cordées de la réussite, l’accompagnement aux grandes écoles, les internats d’excellence ou les écoles de la deuxième chance. Pouvez-vous évaluer leur efficacité ? Pensez-vous à d’autres dispositifs pour compléter cet ensemble ?

Mme Jacqueline Maquet.  Les opérations du PNRU 1 se dérouleront jusqu’en 2014 et, pour certaines, jusqu’en 2020. Mais qu’advient-il de la rénovation des secteurs hors ANRU, en ZUS ou hors ZUS ? Les quartiers continuent à se dégrader, et nous ne pourrons malheureusement plus compter sur les bailleurs sociaux pour s’autofinancer car ils contribueront dès 2011 au financement de l’ANRU. Sans contester les besoins de cette dernière, le désengagement de l’État, le prélèvement du 1 % et la contribution des bailleurs sociaux entraveront le développement de l’offre nouvelle de logements. Comment comptez-vous lutter contre la ghettoïsation ? Peut-on encore aujourd’hui parler de mixité sociale ?

M. William Dumas.  La pauvreté et le chômage restent à des niveaux élevés dans les quartiers sensibles. Pourquoi n’entend-on plus parler du plan Espoir banlieues, lancé en 2008 ? Ses objectifs – désenclaver les quartiers, fournir du travail aux habitants, lutter contre l’échec scolaire et la délinquance – ne semblent pas avoir été atteints.

Je suis très inquiet de la baisse des crédits destinés aux associations, qui effectuent un travail incomparable dans les quartiers. Pouvez-vous nous en dire plus ?

M. Jean-Pierre Nicolas.  Vous vous êtes efforcée, dans un contexte budgétaire contraint, à faire en sorte que la politique de la ville ne soit pas le tonneau des Danaïdes qu’elle fut il y a quelques années. Il était acquis que la démarche « zéro valeur » du Gouvernement s’appliquerait aussi à votre budget.

Votre stratégie est pragmatique et concrète ; elle repose sur trois piliers clairement identifiés : l’éducation et l’égalité des chances ; l’emploi et le développement économique ; le renforcement du lien social.

Sans socle économique fort, il ne peut y avoir de politique sociale pérenne. Comment comptez-vous sortir du dispositif des ZFU ? Avez-vous pensé à sanctionner les effets d’aubaine qui se manifestent ?

Malgré la RGPP, comment l’État se donne-t-il les moyens d’assumer sa mission ? Je pense notamment aux 300 délégués de préfet.

Mme Pascale Got. Ce budget en baisse révèle le décalage entre l’urgence sociale des quartiers et l’engagement financier de l’État, même si une partie des financements sont extrabudgétaires.

Ce n’est pas tant un problème de zonage qui nous interroge, mais la méthode : est-il encore crédible de vouloir gérer une politique de la ville au niveau central, alors que l’efficacité des actions suppose réactivité, adaptation aux réalités de terrain et gestion de proximité ? Ne faut-il pas changer, dès aujourd’hui, la politique de la ville en décentralisant les crédits et en les affectant directement aux maires ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous prenons acte de votre soutien au projet de taxer la trésorerie des bailleurs sociaux pour financer la rénovation urbaine. Je rappelle qu’aux termes de la loi, l’ANRU doit bénéficier d’une dotation de douze milliards d’euros. L’Agence n’a reçu qu’un milliard des six milliards d’euros qui devaient provenir du budget de l’État. Que se passera-t-il en 2012, lorsqu’il faudra fournir 1,5 milliard au titre de l’ANRU, que l’avenant avec les partenaires sociaux du 1 % logement sera achevé et que vous aurez largement puisé dans les caisses des bailleurs ? Est-il nécessaire dans ces conditions de poursuivre l’action n° 4 de votre programme, alors que vous ne défendez, en fait de budget, que des stratégies de prélèvement sur tous les acteurs du logement ?

Par ailleurs, en matière de démolition et de reconstruction, les chiffres que vous nous avez donnés ne sont conformes ni à ceux de Gilles Carrez, ni à ceux du rapport 2009 du comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU. Pour l’instant, le nombre de démolitions dépasse toujours celui des reconstructions.

Enfin, le rapport 2009 indique qu’on reconstruit beaucoup moins de logement de plus de quatre pièces qu’il n’en est démoli. De ce fait le parc de logements reconstitué après démolition ne correspond pas à la réalité vécue par les habitants.

M. Alfred Trassy-Paillogues. Dernièrement, le maire de Clichy-sous-Bois disait dans Libération tout le bien qu’il pensait de l’ANRU et de la rénovation de sa ville. Avez-vous des résultats quantifiés en termes de revitalisation des quartiers, d’emplois et plus généralement dans le domaine du vivre-ensemble ? Vous avez évoqué le recours massif au statut d’auto-entrepreneur par les jeunes : qu’avez-vous prévu pour donner plus de stabilité à ce statut ? Les résultats des internats d’excellence sont-ils bons ? Envisagez-vous des partenariats plus larges avec des entreprises locales ou de grands groupes, qui offrent des opportunités de formation plus importantes ? Que peut-on dire du traitement par notre pays de la question des banlieues au regard des pays qui rencontrent les mêmes problèmes ?

M. Daniel Goldberg. Si, pour notre rapporteur, « l’essentiel est sauf », je dirai quant à moi, s’agissant du financement de la politique de la Ville, que l’essentiel est partout sauf dans le budget de l’État ! M. Le Bouillonnec l’a montré, chiffres à l’appui. Ce qui nous intéresse, nous, parlementaires, c’est que vous nous disiez concrètement ce que l’État est prêt, aujourd’hui, à mettre sur la table pour ces quartiers. Loin de partager le point de vue de certains collègues, qui voient dans ces quartiers un boulet pour notre pays, je pense au contraire qu’ils sont notre énergie positive.

Qu’on nous dise très concrètement ce qui se passerait si les 770 millions d’euros du 1 % logement et les 260 millions prélevés sur les réserves des organismes HLM pour la rénovation urbaine disparaissaient du jour au lendemain. Je souhaiterais, pour ma part, que nous puissions examiner les budgets consolidés de certaines grandes politiques publiques, en tenant compte, non seulement des financements de l’État, mais également de ceux en provenance des collectivités territoriales ou de certains acteurs privés, s’agissant notamment de l’éducation, de l’emploi ou de la sécurité.

S’agissant de la lutte contre les discriminations, question à laquelle je sais que vous êtes sensible, le débat n’a absolument pas avancé : en dépit des promesses que vous aviez opposées il y a deux ans à notre proposition de loi, nous n’avons rien vu venir. Même sur la question de la discrimination à l’adresse, qui semblait pourtant faire l’objet d’un consensus parmi les membres de notre commission, nous n’avançons pas. Le rapporteur a cité Steinbeck, n’oublions donc pas qu’à force de faire du surplace nous risquons de voir mûrir Les Raisins de la colère

M. Jean-Pierre Grand. La Fédération nationale des associations d’entrepreneurs s’inquiète de la fin programmée le 31 décembre 2011 de l’ouverture des droits ZFU, et de la remise en cause des exonérations fiscales et sociales dont bénéficient les entreprises situées dans ces zones afin notamment de favoriser l’emploi des jeunes dans les quartiers sensibles. Entendez-vous, madame la secrétaire d’État, créer le groupe de travail réclamé par la Fédération et par de nombreux parlementaires afin d’appréhender l’après 2011 ?

M. François Brottes. On doit s’interroger, madame la secrétaire d’État, sur les effets collatéraux de certaines décisions qui ne relèvent pas de votre domaine de compétence. Comment analysez-vous l’incidence des récentes coupes claires opérées dans le budget des contrats d’accompagnement dans l’emploi, qui bénéficient très souvent aux activités dans les quartiers ? Ne pensez-vous pas par ailleurs que la suppression de la taxe professionnelle et la création du statut d’auto-entrepreneur, en transformant la France entière en une immense zone franche, ont porté préjudice à la spécificité des zones franches urbaines ?

Mme Frédérique Massat. Je m’inquiète des effets sur nos territoires, non seulement de la RGPP mais de la réforme des collectivités territoriales, qui risque d’aggraver le manque de moyens dont elles souffrent, notamment avec la fin des financements croisés et la suppression de la clause de compétence générale. Comment cette réforme s’articulera-t-elle avec la politique de la Ville ?

Je m’inquiète par ailleurs du désengagement de l’État du financement de la vie associative, le budget des postes FONJEP devant passer de 9,4 à 4,7 millions d’euros. La fonction d’animation et de gestion assurée par le Fonds, au travers des milieux associatifs, est pourtant essentielle pour ces territoires. Par quoi comptez-vous remplacer ce dispositif dans les quartiers ?

Enfin, vous vous êtes félicitée des effets du statut d’auto-entrepreneur pour la vie économique. Pour ma part, je souhaiterais savoir combien d’activités pérennes ont été effectivement développées grâce à ce statut dans les zones couvertes par la politique de la Ville et dans quels domaines ?

M. Frédéric Cuvillier. Autant on doit louer, madame la secrétaire d’État, la sensibilité dont vous savez faire preuve et votre connaissance des thématiques des quartiers – je les ai constatées en me rendant avec vous sur le terrain –, autant on ne peut qu’être frappé, en tant que parlementaire, par l’écart entre vos convictions et la réalité de votre politique.

Je m’associe aux interrogations que l’absence de financement de l’ANRU suscite chez mes collègues. Le prélèvement sur les réserves des bailleurs sociaux que vous envisagez sera évidemment répercuté sur les locataires, et in fine ce seront eux, plus sûrement que les crédits annoncés par l’État, qui devront financer la politique de la Ville. Je m’interroge par ailleurs sur le financement de la rénovation des quartiers situés en ZUS mais ne relevant pas de l’ANRU. Le directeur de l’ANRU nous a encore dit cet après-midi que son agence n’avait pas à financer des quartiers qui n’avaient pas passé de convention avec elle, contrairement aux allégations de l’État. Cela signifie concrètement qu’il n’y a pour ces quartiers aucune perspective de réhabilitation d’ici à 2020.

Mme la secrétaire d’État. Avant de vous répondre sur le fond, je voudrais faire un sort à ce reproche de contradiction, qu’on m’a déjà maintes fois adressé. Je suis profondément convaincue que ces quartiers sont riches de talents et de compétences dont notre pays a besoin. Pour y être née, je connais parfaitement leurs problèmes et je sais comment les résoudre. Mais il y a en politique des contradictions qu’il faut savoir gérer. Par exemple, si tout le monde reconnaît en paroles la nécessité de réformer la géographie prioritaire et de concentrer les besoins dans les quartiers les plus déshérités, certains étant en voie de paupérisation extrême, cette volonté se heurte dans la réalité à certains égoïsmes locaux. Il faut à chaque fois rassembler, fédérer et convaincre, non seulement que la situation reste extrêmement tendue dans ces quartiers, mais que les enjeux dépassent la question de la fracture sociale : c’est le pacte républicain qui est en cause.

Je pense comme vous, monsieur le rapporteur, que la commune est l’échelon pertinent de la politique de la Ville, le maire étant le plus à même de connaître les besoins de ses administrés. Je crois cependant qu’on doit privilégier le binôme préfet-maire pour l’évaluation des besoins des quartiers les plus en difficulté. On peut certes envisager de donner une plus grande efficacité à la politique de la Ville en transférant au maire certaines compétences mineures. Reste qu’on ne pourra pas réduire les écarts territoriaux sans d’abord définir les territoires en difficulté et flécher les crédits qui leur sont destinés. Je connais par expérience le cas de certains quartiers tombés en déshérence en dépit des moyens qui étaient à la disposition du maire.

À propos du budget de l’ACSÉ, j’ai déjà dit combien la prise en charge par les politiques de droit commun était à mes yeux primordiale et conditionnait la réussite de la « Dynamique Espoir banlieues ». On ne peut pas demander à la politique de la Ville de régler à elle seule tous les problèmes des quartiers en difficultés et des villes pauvres. La réduction de la fracture territoriale passera par une mobilisation des politiques de droit commun, la politique de la Ville n’ayant pas vocation à s’y substituer mais devant s’y ajouter comme la cerise sur le gâteau. Cela suppose de bousculer des habitudes prises depuis longtemps. L’expérimentation des cinquante sites permettra précisément de mobiliser les ministres qui se sont engagés dans ce cadre, ce qui signifie des moyens financiers accrus.

Il n’y a pas d’inquiétude à avoir à propos des postes FONJEP, puisque nous avons maintenu les financements pour les trois prochaines années : il y aura toujours 5,6 millions d’euros pour les 780 postes.

En réalité, les crédits de l’ACSÉ subissent la baisse de 10 % qui frappe tous les opérateurs de l’État. La direction du budget refuse qu’on intègre la question des moyens dans le cadre du contrat d’objectifs et de performance de l’Agence qui a été préparé en lien étroit avec son directeur général, M. Frentz, qui en a accepté les termes.

Alors qu’en 2009, monsieur Pupponi, le programme de réussite éducative a consommé environ 70,1 millions d’euros, comme l’indique le rapport annuel de performances transmis au Parlement, le PLF prévoit quatre-vingt-trois millions d’euros pour ce programme. Son financement est donc renforcé.

Le budget global du dispositif du contrat d’autonomie est de 169 millions d’euros, 61,42 millions ayant été effectivement dépensés depuis la mise en place du dispositif. L’objectif est de 45 000 contrats signés en 2011 ; 34 448 contrats ont d’ores et déjà été signés ; 13 646 sont en cours ; en moyenne, 400 contrats sont signés par semaine. Il y a 8 334 sorties positives, 68 % en CDD de plus de six mois et en CDI, soit un taux de près de 40 % par rapport à l’ensemble des sorties.

M. Henri Jibrayel. À quel prix !

Mme la secrétaire d’État. Cela ne coûte pas plus cher qu’une place dans une école de la deuxième chance.

Si le contrat d’autonomie est si important à mes yeux, c’est qu’il s’agit d’une mesure spécifiquement destinée aux jeunes des cités. Le public visé est constitué, à plus de 70 %, de jeunes, qui ne sont inscrits ni au pôle-emploi ni à une mission locale, sans formation ni qualification. S’agissant d’un public en situation d’exclusion totale, un taux de sortie de 38 % est un succès. Tous ceux qui s’occupent d’insertion savent combien il est difficile de ramener ces jeunes dans une dynamique d’insertion : c’est un travail énorme que de les convaincre d’apprendre la culture de l’entreprise, de se lever le matin, de changer leurs comportements. De ce point de vue, le contrat d’autonomie est un dispositif efficace, même si certains départements sont moins performants que d’autres, en raison de leur difficulté à travailler en cohérence avec les pouvoirs publics et les PME.

Il a été décidé de proroger les CUCS jusqu’en 2014, les expérimentations devant être permises par la mobilisation des ministères dans le cadre de projets spécifiques.

Les écoles de la deuxième chance ont accueilli 67 800 jeunes en 2010. Elles bénéficient de trois millions d’euros au titre de la politique de la Ville, et de vingt-six millions d’euros au titre du Fonds d’investissement social, le FISO. Les résultats sont bons, avec un taux de sortie de 62 %, dont 32 % dans l’emploi et 18 % dans une formation qualifiante. Certes nous travaillons en étroite collaboration avec les écoles de la deuxième chance, mais les régions sont un de leurs grands financeurs et si j’ai souhaité, dès mon arrivée au ministère, que la politique de la Ville soit partie prenante de cette expérience, je ne crois pas qu’elle ait à assumer une plus grande part de son financement.

M. Goulard et M. Pupponi, comme l’ensemble des élus, reconnaissent que le PNRU est un vrai succès. La transformation des quartiers est en marche, et pas seulement dans le domaine du bâti : la rénovation urbaine a également eu un impact en termes de sécurité, conséquence que nous n’avions pas à l’origine envisagée. Douze milliards d’euros ayant déjà été affectés à l’ensemble du programme, il n’est pas possible de répondre positivement à des demandes d’opérations complémentaires ou de projets nouveaux. C’est pourquoi je milite pour un PNRU 2, qui devra s’appuyer sur les enseignements du premier programme de rénovation urbaine. Il devra notamment être doté d’objectifs ambitieux en matière de développement durable. Il devra aussi pouvoir exercer un fort effet de levier sur l’emploi des habitants des quartiers, notamment dans les filières vertes. Il faudra également renforcer l’accompagnement social – je me félicite à ce propos de la signature, le 18 octobre, d’une convention entre l’ANRU et l’ACSÉ. Il devra enfin s’appuyer sur la géographie prioritaire.

M. Philippe Gosselin. Vous nous parlez de nouveaux objectifs, mais vous ne nous dites pas comment ce deuxième programme de rénovation urbaine sera financé.

M. Frédéric Cuvillier. Quid du financement des réhabilitations en ZUS ne relevant pas de l’ANRU ? Pour le moment, l’État et l’ANRU se renvoient la balle.

Mme la secrétaire d’État. Je ne nie pas qu’il y ait un vrai problème. Cette question pourrait être placée au centre de ce deuxième programme de rénovation urbaine. Je dis simplement qu’il faudra terminer le travail.

M. Frédéric Cuvillier. Que faire en attendant ?

Mme la secrétaire d’État. Je viens de vous dire que les douze milliards ont déjà été affectés. Par ailleurs nous avons fait des propositions de financement.

Ce prélèvement vous surprend, monsieur Le Bouillonnec, mais pas moi. Des dizaines de milliers de personnes ont payé pendant de longues périodes des loyers et des charges correspondant à la location de logements pourtant très délabrés. Il s’agit maintenant de revaloriser ce patrimoine immobilier mais aussi de construire des logements – et la construction n’est-elle pas l’une des missions assignées aux bailleurs sociaux ?

M. Pierre Gosnat. Avec des financements en baisse ?

Mme la secrétaire d’État. J’insiste : vous êtes locataire dans un immeuble en si mauvais état que les fuites sont la norme et les boîtes à lettres éventrées, et l’on vous explique qu’un programme de rénovation va être engagé, financé par les loyers et les charges qu’ils ont payés. Qu’y a-t-il de choquant à cela ? L’essentiel, c’est que les gens vivent dans des conditions décentes.

M. Pierre Gosnat. A ce détail près qu’avec ce système, leurs charges vont augmenter ! Pour eux, c’est la double peine !

M. Michel Piron, rapporteur pour avis. Si l’on en vient à parler d’un deuxième programme national de rénovation urbaine, c’est que le premier a connu un succès remarquable – et pourtant, avec quel scepticisme fut-il accueilli ! Il s’agissait alors de 170 quartiers ; nous en sommes à présent à 485. On peut bien sûr se plaindre que le verre ne soit pas assez plein : pour ma part, je salue l’engagement de la ministre, qui a souhaité aller plus loin en dépit d’un cadre budgétaire extrêmement contraint. Je ne doute pas qu’un deuxième programme national de rénovation urbaine suivra.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Encore faudrait-il rappeler aussi les conditions financières dans lesquelles les premières opérations se font, et ne pas oublier d’indiquer que sur les six milliards que l’État s’était engagé à verser, un seul a été débloqué ! Une fois encore, le ministre dit : « L’État fera » - mais que fera-t-il réellement ? Et de quelle manière finit-on le programme lancé ? Où irez-vous chercher, en 2011, l’argent que l’État ne verse plus ? Comment, sachant les conditions dans lesquelles le premier programme national de rénovation urbaine a été - ou n’a pas été - financé, imaginer en mener à bien un deuxième ?

Mme la secrétaire d’État. Le financement est garanti par la loi.

M. François Pupponi. Allons !

M. Pierre Gosnat. Qui paiera ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il manque 5 milliards !

Mme la secrétaire d’État. Mais vous n’ignorez pas quelles sont les contraintes budgétaires !

M. Pierre Gosnat. Elles ne sont pas les mêmes pour tous ! Certains se serrent la ceinture plus que d’autres !

Mme la secrétaire d’État. La politique de la ville a un prix.

M. le président Patrick Ollier. Je vous remercie, madame la ministre, pour ces réponses, dont je comprends que certaines aient pu ne pas plaire aux groupes d’opposition.

M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis pour le logement, a fait connaître son avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Ville et logement » pour 2011. Quel est l’avis de M. Michel Piron ?

M. Michel Piron, rapporteur pour avis pour la ville. Le contexte budgétaire étant celui que l’on sait, avis favorable.

*

Suivant l’avis de M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis pour le logement et de M. Michel Piron, rapporteur pour avis pour la ville, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Ville et logement » pour 2011.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

DIRECTION GENERALE DE LA COHESION SOCIALE (DGCS)

– M. Fabrice Heyriès, directeur général

– Mme Catherine Lesterpt, adjointe à la sous-directrice de l’inclusion sociale, de l’insertion et de la lutte contre la pauvreté

SECRETARIAT GENERAL DU COMITE INTERMINISTERIEL AUX VILLES (SG-CIV)

– M. Hervé Masurel, Secrétaire général du Comité interministériel aux villes

– M. Pascal Florentin, adjoint

– Mme Marine Courtois, responsable administratif et financier

AGENCE NATIONALE POUR LA COHESION SOCIALE ET L’EGALITE DES CHANCES

– M. Rémi Frentz, directeur général

– M. Michel Villac, secrétaire général

AGENCE NATIONALE POUR LA RENOVATION URBAINE (ANRU)

– M. Pierre Sallenave, directeur général

– Mme Catherine Lacaze, directrice financière

– Mme Anne Peyricot, directrice des relations institutionnelles

OBSERVATOIRE NATIONAL DES ZONES URBAINES SENSIBLES (ONZUS)

– Mme Bernadette Malgorn, Présidente du Conseil d’orientation

– M. Patrick Sillard, sous-directeur des études statistiques, de l'évaluation et de la prospective

UNION DES ENTREPRISES ET DES SALARIES POUR LE LOGEMENT (UESL)

– M. Jérôme Bédier, président du conseil de surveillance

– M. Jean-Luc Berho, vice-président

– M. Antoine Dubout, président du directoire

DELEGATION INTERMINISTERIELLE POUR L’HEBERGEMENT ET L’ACCES AU LOGEMENT DES PERSONNES SANS ABRI OU MAL LOGEES

– M. Alain Régnier, préfet

© Assemblée nationale

1 () On parle de « décentralisation fonctionnelle » ou « décentralisation technique » lorsqu’une compétence est transférée de l’État à une institution dotée de la personnalité juridique, le plus souvent un établissement public.

2 () Étude ACSé, Bilan de la mise en œuvre du programme de la réussite éducative, juillet 2008.

3 () Michèle Tribalat, directrice de recherche à l’INED et Bernard Aubry, INSEE, Commentaire, été 2009, n°127.

4 () Économie et statistique n°415-416, 2008.