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N
° 2857

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2010

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2011 (n° 2824),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur général,

Député.

——

ANNEXE N° 21

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Dominique BAERT

Député.

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SYNTHÈSE 5

INTRODUCTION : L’EXPLOSION DE LA DETTE PUBLIQUE 7

I.– LE PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT : BIENTÔT LE PREMIER PROGRAMME DU BUDGET GÉNÉRAL 13

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT 15

B.– UN BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT TOUJOURS INDÉCENT MALGRÉ SA BAISSE ANNONCÉE EN 2011 18

1.– Le financement définitif de l’État en 2009 : un déficit de l’État multiplié par deux et une augmentation de la dette publique de plus de 12 points ! 21

2.– Le programme révisé de financement de l’État en 2010 24

a) L’impact du grand emprunt national 25

b) L’impact du soutien en faveur de la Grèce 28

3.– Le financement prévisionnel de l’État en 2011 29

C.– L’ENVOLÉE DE LA CHARGE DE LA DETTE À COMPTER DE 2011 35

1.– Le paradoxe de 2009 et 2010 : en dépit de l’explosion de la dette, des charges d’intérêt atténuées par la faiblesse des taux 38

2.– Une forte augmentation de la charge de la dette dès 2011 : quand l’effet « taux » et l’effet « volume » jouent dans le même sens 40

D.– LES RISQUES LIÉS AU SURENDETTEMENT PUBLIC 44

1.– Le risque d’une stérilisation durable des marges de manœuvre budgétaires de l’État 44

2.– Le risque d’emballement de la dette publique 47

II.– LE PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT : DES FINALITÉS HÉTÉROGÈNES 53

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT 53

B.– LES DÉPENSES DU PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT 54

1.– L’action Agriculture et environnement 54

2.– L’action Soutien au domaine social, logement, santé 54

3.– L’action Financement des entreprises et industrie 56

4.– L’action Développement international de l’économie française 56

5.– L’action Autres garanties 61

III.– LE PROGRAMME ÉPARGNE : DU REPORT DE CHARGES AUX DÉPENSES FISCALES, UN CALIBRAGE INCERTAIN 63

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME ÉPARGNE 63

1.– Favoriser l’investissement dans le logement 63

a) Favoriser l’accès au financement des organismes de logement social 63

b) Favoriser l’accession à la propriété 64

2.– Financer l’économie 65

B.– LES DÉPENSES DU PROGRAMME ÉPARGNE 66

1.– Les dépenses budgétaires : une sous-budgétisation chronique 66

a) L’action Épargne logement 66

b) L’action Instruments de financement du logement 71

2.– Les dépenses fiscales : une réduction apparente 71

a) Un dispositif défaillant de prévision et de suivi 71

b) Quatre principaux objectifs 72

IV.– LE PROGRAMME MAJORATION DE RENTES : DES DISPOSITIFS EN VOIE D’EXTINCTION 75

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 28 OCTOBRE À 15 HEURES 77

EXAMEN EN COMMISSION 83

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Le Rapporteur spécial se félicite que, cette année, le Gouvernement ait répondu à près de 95 % de ses questions, dans le délai imparti. Que l’ensemble des services compétents soient ici remerciés.

SYNTHÈSE

● « Historique », « sans précédent »... : cette année encore, les mots ne manquent pas pour qualifier la réduction du déficit de l’État de 60 milliards d’euros entre 2010 et 2011. Il n’en demeure pas moins que ce dernier reste à un niveau particulièrement élevé – 92 milliards d’euros – et n’est que l’arbre qui cache la forêt vu l’explosion de la dette publique prévue sur la nouvelle période de programmation budgétaire 2011-2014. Il est bon de rappeler quelques chiffres simples : 1 741 milliards d’euros de dette publique en 2011, soit 26 378 euros de dette par habitant, cela représente 33 % de dette supplémentaire depuis 2008. Or, les perspectives sont alarmantes puisque le Gouvernement anticipe une progression de 30 % de la charge de la dette entre 2010 et 2013. Comment croire encore à la soutenabilité de nos finances publiques ?

Après le répit offert en 2009 et 2010 par des taux d’intérêt historiquement bas et par le report massif des investisseurs vers les valeurs refuge que constituent les emprunts publics, les dépenses du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État devraient augmenter d’environ 4,5 milliards d’euros pour s’établir à 45,45 milliards d’euros en 2011, puis de 5 milliards d’euros en moyenne en 2012 et 2013.

Cette hausse n’est malheureusement qu’un prélude à une série d’autres augmentations, dont l’ampleur dépendra de l’évolution des taux d’intérêt, à laquelle la France se trouve d’autant plus exposée que 70 % de sa dette est dorénavant détenue par des non-résidents. Des risques de défiance, d’assèchement de certains segments de titres publics, de liquidité et, au final, de hausse de taux ne sont plus à négliger. L’État est dorénavant surendetté. Sans imputer au seul Gouvernement la responsabilité de la crise économique, le Rapporteur spécial entend dénoncer l’absence de perspective crédible de remise sous contrôle de l’endettement public d’ici 2014 compte tenu des hypothèses irréalistes de croissance et de réduction de la dépense envisagée dans le projet de loi de programmation des finances publiques. Rien ne donne à penser que la réduction de la dette soit au cœur de la politique économique gouvernementale. Or le paiement de celle-ci va amputer, et pour longtemps, les marges de manœuvre budgétaires pour les années à venir.

● Le programme Appels en garantie de l’État, dont les crédits baissent d’environ 10 % pour s’établir à 227,3 millions d’euros est principalement marqué par la réduction de 45 % des dépenses liées aux garanties en faveur de l’Agence française du développement, la Banque de France et la Banque européenne d’investissement. Il faut néanmoins regretter le manque d’explication dans le projet annuel de performances 2011 sur ce sujet.

● Depuis 2006, le programme Épargne est systématiquement sous-budgétisé, malgré une réévaluation de ses crédits en 2010. En 2011, face à une augmentation prévisible des primes associées aux plans épargne logement (PEL), il n’est pas certain que les crédits proposés dans le présent projet de loi de finances (1 118 millions d’euros) soient suffisants. Il faut cependant relever la réduction massive de la dette de l’État vis-à-vis du Crédit foncier de France qui passe de 719 millions d’euros en 2010 à 145 millions d’euros en 2011. En revanche, l’évaluation du montant et l’efficacité des dépenses fiscales rattachées à ce programme, dont le montant total représente trois fois les crédits budgétaires, demeure un enjeu essentiel des prochains exercices.

INTRODUCTION : L’EXPLOSION DE LA DETTE PUBLIQUE

À près de 47 milliards d’euros de crédits pour 2011, la mission Engagements financiers de l’État, est, en volume, la troisième mission du budget général, après la mission Remboursements et Dégrèvements (82,15 millions d’euros) et la mission Enseignement scolaire (61,9 milliards d’euros).

La mission Engagements financiers de l’État réunit quatre programmes. Deux sont dotés de crédits évaluatifs (Charge de la dette et trésorerie de l’État et Appels en garantie de l’État), deux sont dotés de crédits limitatifs (Épargne et Majoration de rentes). Ces programmes trouvent leurs prolongements au plan patrimonial, en tant que passifs figurant au bilan de l’État ou en tant que passifs éventuels mentionnés en annexe de ce bilan.

D’après les prévisions gouvernementales, les perspectives pluriannuelles à moyen terme pour 2012 et 2013 (1) confirment toute l’importance de cette mission dans l’équilibre global des finances publiques : en 2013, les crédits atteindraient 56,7 milliards d’euros, soit une augmentation de près de 30 % par rapport aux crédits initiaux pour 2010 (44,16 milliards d’euros).

Le Rapporteur spécial ne peut que souligner le formidable accroissement des Engagements financiers de l’État, dans un contexte d’explosion de la dette publique. Selon les prévisions du Gouvernement associées au présent projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, après 67,5 % du PIB en 2008, l’endettement public devrait progresser de 20 points de PIB d’ici 2012 avant d’entamer une lente régression si l’on reste particulièrement optimiste (voir tableau ci-après). Ainsi, à la fin de l’année prochaine, la dette publique s’élèverait à plus de 1 741 milliards d’euros, ce qui représente plus de 26 378 euros par habitant (2).

TRAJECTOIRE DE DÉFICIT ET DE DETTE POUR LES ANNÉES 2011-2014

 

2010

2011

2012

2013

2014

Solde public

– 7,7 %

– 6,0 %

– 4,6 %

– 3,0 %

– 2,0 %

Dette

82,9 %

86,2

87,4 %

86,8 %

85,3

Source : Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

Il y a quelques années, la littérature économique distinguait usuellement cinq phases distinctes dans l’évolution de la dette des administrations publiques en France depuis le début des années quatre-vingt. Force est de constater que, depuis 2007, une sixième phase d’évolution de la dette publique a commencé, qui s’apparente à une véritable explosion.

LES SIX GRANDES PHASES D’ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE

(en % du PIB)

Le graphique ci-avant présente les grandes phases d’évolution de la dette publique depuis trente ans :

– de 1981 à 1987, la dette progresse à un rythme de 1,8 point de PIB par an en moyenne, sous l’effet d’une augmentation sensible des dépenses publiques ;

 de 1987 à 1991, la progression de l’endettement public ralentit, à la faveur notamment d’une croissance économique soutenue ;

– entre 1991 et 1997, la troisième phase d’augmentation de la dette est particulièrement marquée : après deux années de ralentissement de la croissance, la récession de 1993 (3) porte le déficit public à 6,4 % du PIB ;

– de 1997 à 2001, grâce aux efforts d’assainissement budgétaire et à une forte croissance économique, le taux d’endettement public se stabilise en deçà de la limite « maastrichtienne » de 60 % du PIB. Les années 1999 à 2001 connaissent même une diminution de l’endettement, passé de 59,3 % en 1997 à 56,9 % en 2001 ;

– entre 2001 et 2007, la cinquième phase d’évolution, voit la dette publique repartir à la hausse de 1,2 point de PIB en moyenne chaque année. Au demeurant, cette progression moyenne apparemment modérée est trompeuse. Elle intègre en effet la spectaculaire baisse de l’endettement public obtenue en 2006 (- 2,7 points de PIB) par des moyens en grande partie étrangers à l’amélioration de la situation des finances publiques (4;

– depuis 2007, la sixième phase d’évolution est celle d’une augmentation sans précédent de la dette publique, de 4,7 points de PIB en moyenne chaque année, pour atteindre 87,4 % en 2012. Entre 2007 et 2010, la dette a progressé de près de 20 points de PIB. Cette situation n’est pas sans rappeler celle de la troisième phase précédemment décrite, marquée par la récession de 1993 puis par plusieurs années de progression incontrôlée de l’endettement. Ce constat est vrai pour les financements sociaux comme pour ceux de l’État. Ce sont en effet plus de 130 milliards d’euros de déficits cumulés que le régime général de la sécurité sociale et le Fonds de solidarité vieillesse vont enregistrer de 2009 à 2012. Le traitement des déficits cumulés de la sécurité sociale est urgent, il n’est plus possible de le reporter, tout simplement parce qu’il n’est plus possible de faire reposer sur l’ACOSS le poids du portage de la dette, sa vocation étant de gérer le découvert infra-annuel et non les déficits cumulés, comme le rappelle de manière insistante la Cour des comptes.

La conjoncture actuelle partage d’ailleurs un autre trait commun avec cette période : l’accroissement du recours par les pouvoirs publics à l’endettement à court terme depuis 2007, qui représente près de 18,5 % de la dette totale en France en 2009 ! Quoique de tels pics soient concevables en période de dérapage soudain du déficit budgétaire (en témoignent les précédents de 1992 et de 2002-2003), il s’agit d’un niveau sans précédent (même en 1992, la part des bons du trésor à taux fixe, à 12 mois au plus, les BTF n’avait pas dépassé 15 %), qui expose dangereusement l’État à l’évolution des taux d’intérêt, et à un certain risque de liquidité.

PART DES BTF DANS L’ENCOURS DE LA DETTE AU 31 DÉCEMBRE 2009

Bien sûr, dans le contexte de crise, l’augmentation de la dette publique est loin de constituer une spécificité française. La plupart des États ont vu leurs finances publiques se dégrader en raison des diverses mesures de relance budgétaire et, surtout, des pertes de recettes fiscales occasionnées par le repli de l’activité.

L’IMPACT DE LA CRISE SUR LE DÉFICIT ET LA DETTE DE L’ÉTAT
SELON LE GOUVERNEMENT

En 2009, la part du déficit imputable à la crise est estimée à 96 milliards d'euros dont 57 milliards d'euros liés à la baisse conjoncturelle des recettes et 39 milliards d'euros résultant de la mise en œuvre du plan de relance. En exécution cependant, l’impact du plan de relance a été limité à 31,4 milliards d'euros. Au total, le déficit de crise est réestimé à 88,4 milliards d’euros en 2009. À ce déficit de crise s’est ajouté le financement du plan de soutien au secteur financier et, en particulier, le financement de la Société de prise de participation dans l’économie (SPPE) dont le montant, qui représentait 11,11 milliards d’euros au 1er janvier 2009, atteignait le 30 septembre de la même année 20,36 milliards d’euros. L’ensemble des dépôts de liquidités consenti à la SPPE a été remboursé à l’État avant la fin de l’année 2009, suite à la mise en place d’un financement autonome de la SPPE ou suite au rachat par certains établissements bancaires des titres en capital émis au profit de la SPPE. Ces reversements des établissements bancaires, représentant 13,25 milliards d’euros, ont toutefois été maintenus sur le compte du Trésor en vue du financement des investissements d’avenir prévus par la loi de finances rectificative pour 2010 du 9 mars dernier. La crise économique et financière a donc contribué à l’augmentation de la dette négociable de l’État au cours de l’exercice 2009 à hauteur d’environ 101,7 milliards d’euros, soit 88,4 milliards d'euros résultant du déficit et 13,25 milliards d'euros au titre des remboursements des prêts réalisés au profit de la SPPE et conservés sur le compte du Trésor.

Pour 2010 et 2011, il est fait l’hypothèse conventionnelle que le niveau de dégradation conjoncturelle des recettes constaté en 2009 serait repris en base. Il s’agit d’une approximation qui se justifie par la proximité de la croissance attendue avec la croissance potentielle estimée pour les années correspondantes (faible résorption de l’output gap). Il faut, toutefois, tenir compte d’éléments exceptionnels : en 2010 et 2011, le déficit budgétaire se creuse du fait des prêts à la Grèce, pour respectivement 5,8 milliards d'euros et 6,1 milliards d'euros en 2010 et 2011 ; en 2010, il faut en outre déduire l’utilisation des 13,25 milliards d’euros conservés à la fin de l’année 2009 sur le compte et ajouter le solde de l’exécution du plan de relance, soit 8,6 milliards d’euros.

La couverture du besoin de financement lié à la crise en 2009 a été opérée par une augmentation significative de l’encours de titres de moyen et long termes entre la fin et le début de l’année 2009 (+ 54,9 milliards d’euros par rapport au montant prévu en LFI) et, pour le solde, par l’augmentation de l’encours de BTF (+ 46,8 milliards d’euros). En 2010 et 2011, la couverture du besoin de financement qui serait lié à la crise sera intégralement financée par émissions de moyen et long termes : l’encours de BTF devrait en effet baisser en 2010 puis se stabiliser en 2011.

Au total, le montant de dette imputable à la crise économique et financière s’élèverait contribuerait à 101,7 milliards d’euros en 2009, 159,8 milliards d’euros en 2010 et 222,9 milliards d’euros en 2011. Dans la mesure où l’encours de la dette négociable de l’État en 2011 serait de 1 333 milliards d’euros, la part de la dette résultant de la crise serait de 16,7 %.

Toutefois, le risque est grand qu’une fois la crise passée, notre dette publique soit durablement hors de tout contrôle. De ce point de vue, le passé n’est pas de nature à rassurer : l’histoire financière française des trente dernières années témoigne de la très grande difficulté à maîtriser l’endettement public.

Tout dépendra en réalité de la capacité de l’État à redresser nos comptes publics et à respecter les objectifs fixés par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

Pour 2011, le Gouvernement prévoit une augmentation de la dette publique de 3,3 % passant de 82,9 % à 86,2 % du PIB, résultant pour 3 points du déficit public et pour 0,3 point de l’effet des flux de créances de l’année (5).

Au-delà, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit une augmentation de la dette publique jusqu’en 2012 pour atteindre un pic historique de 87,4 % du PIB avant de démarrer une lente réduction en 2013 (86,8 % du PIB) et 2014 (85,3 % du PIB). Le ratio d’endettement resterait donc supérieur de plus de 25 points à la limite posée dans le cadre du traité de Maastricht (60 % du PIB).

Si cette perspective apparaît inquiétante, elle repose toutefois sur des prévisions macroéconomiques particulièrement optimistes à compter de 2012. Elles supposent un retour de la croissance économique à 2,5 % en volume dès 2012, niveau qui se maintiendrait jusqu’à la fin de la période de programmation. Grâce à un effort sans précédent de maîtrise des dépenses publiques – dont le rythme d’évolution annuelle serait réduit des deux tiers (à 0,8 % en volume en moyenne) – et une quasi-stabilité du taux de prélèvements obligatoires par rapport à 2008, le Gouvernement propose une réduction drastique du déficit public passant de 7,7 % en 2010 à 2 % en 2014.

Sans nullement prétendre au rôle de Cassandre, mais soucieux de prendre la mesure de la vulnérabilité actuelle de nos finances publiques, le Rapporteur spécial proposera néanmoins deux scénarios différents : l’un reposant sur une moyenne des estimations des principaux experts en macroéconomie en France et l’autre reposant sur des hypothèses volontairement pessimistes. Or, même dans le premier scénario (dit scénario moyen), le danger d’une dette publique insoutenable ne semble guère très éloigné. En refusant toute augmentation d’impôt pérenne, le Gouvernement fait donc preuve d’une véritable insouciance à l’égard de nos générations futures.

I.– LE PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT : BIENTÔT LE PREMIER PROGRAMME DU BUDGET GÉNÉRAL

Le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État représente à lui seul 96,7 % des crédits de mission Engagements financiers de l’État demandés pour 2011, soit 45,4 milliards d’euros. Composé de trois actions (Dette négociable, Dette non négociable, Trésorerie de l’État), il a pour objet de permettre à l’État d’honorer ses engagements financiers en toutes circonstances, au meilleur coût et dans des conditions de sécurité maximales : couverture du solde budgétaire, remboursement de la dette échue, financement quotidien et gestion de la trésorerie.

Les deux encadrés ci-après présentent les principales données chiffrées relatives à la dette et à la trésorerie de l’État et rappellent succinctement les grands principes de leur gestion.

(en milliards d’euros)

LA DETTE DE L’ÉTAT EN 2011

I.– HYPOTHÈSES RETENUES (6)

– Déficit à financer (en exercice) :

92

(152 en 2010)

– Amortissements de titres :

 

97,4

(87,1 en 2010)

– Émissions nettes à moyen et long terme

186

(188 en 2010)

– Émissions nettes à court terme :

– 0,7

(1,2 en LFI 2010 ; – 14,5 en prévision actualisée 2010)

– Taux d’intérêt moyens :

• à 3 mois en 2011 :

1 %

(LFI 2010 : 1,3 %)

 

• à 10 ans en 2010 :

3,2 %

(LFI 2010 : 3,9 %)

II.– ÉVOLUTIONS ATTENDUES

– Encours nominal de dette négociable fin 2009 :

1 148

(60,2 % du PIB)

– Projections d’encours

• Fin 2010

1 241

(64,4 % du PIB)

 

• Fin 2011

1 333

(66,1 % du PIB)

– Trésorerie (charge nette)

• constatée en 2009 :

204

 
 

• prévue en 2010 :

623

 
 

• prévue en 2011 :

661 (PAP)

 

LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA GESTION DE LA DETTE
ET DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Au milieu des années 1980, il est apparu que les besoins de financement de l’État devaient s’accroître très fortement et que le Trésor ne pourrait plus recourir à ses moyens traditionnels de financement : principalement l’accès à des ressources non négociables, à bon marché. Le Trésor s’est fait alors l’instigateur et l’acteur principal d’une réforme visant à modifier profondément la nature des titres émis par l’État, ainsi que les conditions de leur mise sur le marché et de leur négociation sur le marché secondaire. Il a impulsé des mutations essentielles pour le financement de l’État. Trois principes structurent la politique d’émission.

1/ La simplicité. La dette négociable de l’État a été réorientée autour de trois composantes standardisées, les « valeurs du Trésor ». Elles se distinguent par leurs échéances, qui couvrent tous les domaines de la courbe des taux :

– les BTF (bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés) couvrent les besoins de trésorerie à court terme : leur durée de vie à l’émission est inférieure à un an. Ils financent les décalages temporaires de trésorerie entre les encaissements et les décaissements. Les BTF sont aussi une variable d’ajustement dans le programme de financement ; ainsi, leur encours peut varier d’une année sur l’autre. Un nouveau type de BTF à très court terme (de 2 à 6 semaines) a été créé en 2006 ;

– les BTAN (bons du Trésor à taux fixe et intérêts annuels) assurent un financement à moyen terme. Chaque année sont émis deux BTAN à 5 ans et un BTAN à 2 ans ;

– les OAT (obligations assimilables du Trésor) sont l’instrument du financement à long terme du Trésor, qui sert d’emprunt de référence au marché obligataire français. Leur durée de vie à l’émission peut aller jusqu’à 50 ans. Deux lignes d’OAT à 10 ans sont émises chaque année, ainsi qu’une OAT plus longue (15 ou 30 ans) suivant la demande.

2/ La transparence. Pour assurer le placement de ses titres, le Trésor a fait le choix d’une procédure assurant l’égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence : l’adjudication « à prix demandé ». Avant chaque adjudication, le Trésor annonce le volume total de titres qu’il souhaite émettre. Les offres des investisseurs soumissionnaires sont compilées par la Banque de France et présentées au Trésor de façon anonyme, classées selon leur prix. Le Trésor décide du montant des soumissions qu’il retient, dans la limite de la fourchette annoncée auparavant.

Par ailleurs, le Trésor publie en début d’année un calendrier prévisionnel d’émission et s’attache à respecter la régularité des appels au marché. Ainsi, une adjudication d’OAT a lieu le premier jeudi de chaque mois et les BTAN sont adjugés le troisième jeudi de chaque mois (sauf en août et décembre). Les BTF sont adjugés chaque lundi.

La procédure de syndication, qui consiste à pré-placer le montant de l’emprunt auprès d’un syndicat d’établissements financiers chargé d’assurer ensuite son véritable placement auprès des investisseurs, n’est plus utilisée que de façon exceptionnelle. L’État y a recours pour le premier placement de titres aux caractéristiques innovantes.

3/ La liquidité. Attirer les investisseurs vers la dette de l’État supposait que fût rénové par ailleurs, pour le dynamiser, le marché secondaire. Le dynamisme du marché repose en partie sur la liquidité des titres qui peuvent s’y négocier. C’est pourquoi le Trésor a fait le choix d’émettre des titres dits « assimilables », qui peuvent être rattachés à des lignes déjà existantes présentant les mêmes caractéristiques. Les titres nouvellement émis deviennent, dès leur émission, totalement indiscernables des titres anciens composant la ligne.

Le gisement total de la ligne peut ainsi devenir important, favorisant la liquidité des échanges. Une quinzaine de lignes ont ainsi un encours de l’ordre de 20 milliards d’euros chacune.

Sur toutes ces questions, afin de répondre au mieux à la demande des acteurs de marché, l’Agence France Trésor (AFT) bénéficie des conseils de 19 spécialistes en valeurs du Trésor (SVT), ensemble de banques et d’institutions spécialisées, françaises ou étrangères, liées à l’État par une charte. Le renouvellement de cette charte et de la liste des SVT a été effectué en 2009. On relèvera notamment que la banque Scotiabank Europe (filiale de la banque canadienne Nova Scotia) a rejoint le groupe des SVT en 2010.

 

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Les orientations stratégiques du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État pour 2011 devraient théoriquement faire l’objet d’une présentation au début du projet annuel de performances (PAP) annexé au présent projet de loi de finances. En pratique, la « présentation stratégique » consiste en une série de développements descriptifs reconduits à l’identique chaque année, redondants avec la présentation du programme figurant quelques pages plus loin et, de surcroît, dépourvus de tout lien avec l’actualité de la gestion budgétaire.

Sous cette réserve, la performance du programme peut être appréciée au moyen de 12 indicateurs associés à 7 objectifs, très bien éclairés par les commentaires figurant dans le rapport annuel de performances (RAP) annexé au projet de loi de règlement du budget de 2009. Le Rapporteur spécial renvoie à son commentaire de ce dernier pour l’analyse des résultats obtenus l’année dernière (7).

Le PAP 2011 appelle en lui-même peu de commentaires spécifiques, dans la mesure où les prévisions pour 2011 apparaissent peu ou prou comme la reconduction des objectifs des années précédentes. Dans ces conditions, le Rapporteur spécial se bornera ici à quelques brèves remarques.

En premier lieu, la suppression en 2011 de l’objectif Optimiser la gestion de la trésorerie au regard de l’endettement public mesuré par un indicateur constatant le taux de Mise en œuvre de la feuille de route visant à une optimisation de la gestion de la trésorerie, doit être approuvée car elle était réclamée de longue date par le Rapporteur spécial (8). Introduit dans le projet de loi de finances pour 2008, cet indicateur devait permettre au Parlement de suivre l’état d’avancement de certaines réformes importantes relatives à l’exécution de la dépense, au pilotage de la trésorerie ou aux stratégies de placements. Cependant, cet indicateur mesurait moins de véritables performances (c’est-à-dire des résultats) qu’une simple activité (c’est-à-dire la mise en œuvre d’un plan). Le Rapporteur spécial regrette toutefois que le Gouvernement n’ait pas retenu sa proposition de construire un indicateur permettant de vérifier que les différents risques inhérents à l’objectif d’une « trésorerie zéro » sont bel et bien contenus. À cet égard, sauf à mettre en danger la continuité financière de l’État, il ne semble plus guère exister de marges de manœuvre significatives permettant, par une limitation de la trésorerie, de réduire sensiblement la charge de la dette (9).

En deuxième lieu, il faut saluer, cette année, le relèvement des cibles des indicateurs 4.1 Solde du compte de l’État à la Banque de France (qui passe de 75 % à 80 %) et 6.2 Taux d’annonce par les établissements publics de leurs opérations financières supérieures à un million d’euros et affectant le compte du Trésor (qui passe de 92 % à 95 % soit un taux équivalent à celui retenu pour les collectivités locales). Le Rapporteur spécial observe que le Gouvernement aurait pu en profiter pour préciser les cibles afférentes aux indicateurs Temps et Allocation dont la réitération et la réalisation chaque année posent la question de l’insuffisante ambition des objectifs fixés.

En troisième lieu, le Rapporteur spécial souligne que si, jusqu’à présent, le PAP mentionnait le taux d’annonce des collectivités locales par département de leurs opérations financières supérieures à un million d’euros et affectant le compte du Trésor, la version 2011 prive le Parlement de cette information, sans raison ni explication. Il serait bon de l’intégrer dans le prochain rapport annuel de performance.

En dernier lieu, comme de coutume, la pertinence de l’indicateur relatif à la réduction de la durée de vie moyenne de la dette est directement corrélée à l’éventualité d’une reprise du programme de swaps (10), interrompu depuis septembre 2002. Ces dernières années, le niveau historiquement bas des taux d’intérêt à long terme n’a pas été propice à ces opérations. Comme le soulignait le PAP, en 2007, « la conjonction de taux extrêmement bas en perspective historique et d’une appétence très forte des investisseurs pour des maturités longues allait dans le sens d’un allongement volontaire de la durée de vie moyenne de la dette : l’AFT a intégré cette situation dans ses émissions en abondant les OAT à 30 ans et à 50 ans ». Dans ces conditions, la durée moyenne de la dette a atteint 6 ans et 246 jours à la fin 2009. Si le programme de swaps était réactivé, l’objectif pour 2011 serait de maintenir cette durée à un peu moins de 7 ans (11). Le Rapporteur spécial ne peut donc que réitérer son souhait de réfléchir à la construction d’un indicateur susceptible de rendre compte au Parlement du bon « arbitrage » entre réduction de la durée de vie de la dette et augmentation de la variabilité de sa charge.

À titre de récapitulation, le tableau présenté ci-après rend compte de l’ensemble des performances du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État réalisées en 2010 et prévues pour 2011.

PERFORMANCE DU PROGRAMME
CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Objectif

Indicateur

Résultat 2010

Prévision 2011

1. Couvrir le programme d’émission en toute sécurité

Adjudications non couvertes

0

0

Taux de couverture moyen des adjudications

BTF : 248 %

BTF : 200 %

OAT et BTAN : 209 %

OAT et BTAN : 150 %

2. Améliorer la pertinence des choix de mise en œuvre de la gestion de la dette obligataire

Indicateur « temps »

2,9

+ 10 à – 10

Indicateur « allocation »

2,4

+ 10 à – 10

3. Piloter la durée de vie moyenne de la dette après swaps

Durée de vie moyenne de la dette après swaps

Sans objet (a)

6,9 ans

4. Optimiser le solde du compte de l’État à la Banque de France en fin de journée en fonction des conditions de marché

Solde du compte de l’État à la Banque de France en fin de journée (pourcentage de journées où la cible est atteinte)

85 %

80 %

5. Placer les excédents ponctuels de trésorerie de l’État au meilleur prix

Rémunération des opérations de dépôts réalisées avec les SVT

EONIA – 0,025 %

EONIA (b)

Rémunération des opérations de pensions livrées réalisées avec les SVT

swap EONIA 
– 0,063 %

swap EONIA
– 0,02 %

6. Améliorer l’information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor

Taux d’annonce par les collectivités locales de leurs opérations financières supérieures à un million d’euros et affectant le compte du Trésor

93 %

95 %

Taux d’annonce par les établissements publics de leurs opérations financières supérieures à un million d’euros et affectant le compte du Trésor

92 %

95 %

7. Obtenir un niveau de contrôle des risques de qualité constante et qui minimise la survenance d’incidents

Qualité du système de contrôle : incidents ou infractions au cahier interne de procédures

0

0

Qualité du système de contrôle : notation externe du contrôle interne

(composite)

(composite)

Nombre d’incidents d’exécution des opérations de dette et de trésorerie

Dégradant le niveau du compte BdF : 11

Dégradant le niveau du compte BdF : 0

Ne dégradant pas ou améliorant le niveau du compte BdF : 34

Ne dégradant pas ou améliorant le niveau du compte BdF : 0

Autres incidents : 3

Autres incidents : 0

(a) La réalisation de cet objectif est conditionnée à la reprise du programme de swaps, interrompu depuis 2002. Pour mémoire, la durée de vie moyenne effective de la dette à la fin 2009 était de 6 ans et 246 jours.

(b) European overnight interbank average. Ce taux représente le taux moyen, pondéré par les volumes, des prêts à un jour réalisés sur le marché interbancaire par un panel d’établissements bancaires de la zone euro.

B.– UN BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT TOUJOURS INDÉCENT MALGRÉ SA BAISSE ANNONCÉE EN 2011

Avant de s’intéresser à la dépense budgétaire que constitue la charge de la dette, il apparaît indispensable d’examiner les modalités de financement de l’État entre 2009 et 2011, la première dépendant très largement des secondes. Il conviendra ensuite de s’interroger sur les risques suscités par l’emballement actuel de l’endettement public.

Depuis l’entrée en vigueur de la LOLF en 2006, le programme d’emprunt fait l’objet d’un vote du Parlement, qui se prononce sur le tableau de financement figurant à l’article d’équilibre des lois de finances.

En prévision, le programme d’emprunt éclaire l’origine du besoin de financement qui sera supporté par l’État l’année considérée et définit la structure des ressources qui seront utilisées pour le couvrir. En exécution, le tableau de financement retrace les conditions d’exécution des lois de finances, l’effet des éventuels rachats de titres avant échéance et l’évolution effective des ressources à court terme du Trésor (dont certaines, telles que les comptes de dépôt des correspondants, échappent à son contrôle).

Si l’an passé, l’Assemblée nationale était placée dans une situation quelque peu singulière lors de l’examen de la loi de finances initiale puisque le programme d’emprunt prévu par le tableau de financement n’intégrait pas l’« emprunt national » annoncé par le Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès le 22 juin 2009, cette année, les choses sont plus claires : le besoin de financement de l’État est passé de 117,4 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2010 à 149,2 milliards d’euros au terme de la première loi de finances rectificative pour 2010 du 9 mars 2010 instituant les Investissements d’avenir (voir encadré). « L’emprunt national » a donc eu un impact immédiat et massif – mais, on le verra, peu significatif en comptabilité nationale – sur le déficit budgétaire. Le besoin de financement de l’État s’est également creusé au terme de la deuxième loi de finances rectificative du 7 mai 2010 sous l’effet d’un surcroît de dépenses de 3,9 milliards d’euros destinés à l’assistance financière de la Grèce contrebalancé par une augmentation de recettes de 0,9 milliard d’euros.

Le tableau présenté ci-après rend compte des modalités de financement de l’État au cours de ces dix dernières années, en précisant les évolutions intervenues entre la loi de finances initiale pour 2010 et ses multiples révisions (12).

LE « GRAND EMPRUNT NATIONAL » POUR LE FINANCEMENT
DES INVESTISSEMENTS D’AVENIR

En mobilisant 34,64 milliards d’euros en 2010, la loi de finances rectificative du 9 mars 2010 a lancé un programme d’investissements sur cinq secteurs de l’économie française : enseignement supérieur et formation (11 milliards d’euros), recherche (7,9 milliards d’euros), industrie et PME (6,14 milliards d’euros), économie numérique (4,5 milliards d’euros) et développement durable (5,1 milliards d’euros). Selon le Gouvernement, l’effet d’entraînement sur d’autres acteurs – entreprises, collectivités territoriales, Union européenne – participant au financement de certains projets devrait conduire à un investissement total de l’ordre de 60 à 65 milliards d’euros.

Les crédits ouverts par la loi précitée, ont été regroupés au sein de 13 programmes spécifiquement créés à cette fin, dans le cadre des missions budgétaires existantes. La création de ces programmes spécifiques doit ainsi permettre d'assurer une stricte séparation entre les investissements d’avenir et les autres dépenses du budget général et de garantir ainsi le suivi de leur utilisation. De par leur caractère exceptionnel, ils sont suivis en dehors de la norme de dépense à l’exception des dépenses correspondant à la rémunération des fonds non consomptibles (13).

Selon la Cour des comptes (14), ces crédits se répartissent selon cinq catégories de dépenses : les dotations non consomptibles (15,03 milliards d’euros), les subventions (9,775 milliards d’euros), les prises de participation (3,515 milliards d’euros), les avances remboursables (2,82 milliards d’euros), et les prêts (3,5 milliards d’euros).

En pratique, l’intégralité de ces crédits devrait être versée au cours de l’année 2010 aux différents organismes gestionnaires (15) par le biais d’une convention qui fixe leur cadre d’emploi. Ces derniers ont ensuite la responsabilité de sélectionner les projets à financer et d’en assurer le suivi ainsi que l’évaluation, sous l’autorité de l’État (et en particulier du Commissariat général à l’investissement). À l'issue du deuxième comité interministériel qui s’est tenu le 21 juillet 2010, 34 des 35 conventions prévues ont été signées représentant 33,64 milliards d’euros de crédits, et la dernière relative à l’opération du plateau de Saclay, devrait l’être dans les semaines à venir.

Cette démarche repose sur un financement budgétaire original car les fonds affectés au financement des investissements d’avenir opèrent selon deux types de modalités distinctes.

À hauteur de 20 milliards d’euros, les fonds sont dits consommables et feront l’objet de retraits à partir des comptes de correspondant du Trésor sur lesquels ils sont déposés au fur et à mesure de leur versement aux porteurs de projets ou de l’acquisition d’actifs par les opérateurs pour le compte de l’État. En 2010 et 2011, les retraits sur le compte du Trésor à ce titre devraient atteindre respectivement près de 1 milliard d’euros puis environ 5 milliards d’euros. Au total, environ 20 milliards d’euros devraient être décaissés au titre des fonds consommables et peser à cet égard sur la dette publique.

À hauteur de 15 milliards d’euros, les fonds ne sont pas consommables, ce qui signifie que l’opérateur ou le porteur de projet qui en bénéficie et qui les dépose sur un compte ouvert dans les écritures du Trésor, n’a pas la possibilité d’opérer de retrait sur ce capital. Au titre du dépôt au Trésor, il lui est versé une rémunération selon une périodicité trimestrielle ; ce sont ces intérêts qui contribuent au financement pérenne des investissements d’avenir. Les fonds du Plan Campus (3,7 milliards d’euros) versés à partir du compte d’affectation spéciale connaissent le même traitement.

DIX ANS DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

LFI
2010

LFR 1 2010

LFR 2 2010

PLF 2011

Déficit en gestion (y. c. FMI et FSC) (b)

39,3

50,2

57,0

46,4

47,3

35,4

34,6

56,4

134,7

117,4

149,0

152,0

92,0

Amortissement des OAT

14,8

14,6

30,3

36,0

33,1

43,2

31,9

39,3

62,8

31,6

29,5

29,5

48,8

Amortissement des BTAN

36,5

44,8

32,2

30,5

32,5

34,4

37,2

58,3

47,4

60,3

53,5

53,5

48

Amortissement des dettes reprises par l’État (c)

2,8

0,6

10,3

1,6

4,1

4,1

4,1

0,6

Variation des dépôts de garantie et autres (d)

0,5

– 0,3

-0,3

 

 

 

Total amortissements

51,3

59,4

62,5

66,5

65,6

80,4

69,7

107,9

111,8

96,0

87,1

87,1

97,4

Besoin de financement de l’État

90,6

109,6

119,5

112,9

112,9

115,8

104,8

164,0

246,2

213,4

236,1

239,1

189,4

Émissions brutes d’OAT (e)

51,6

53,9

66,3

76,3

75,5

62,8

62,3

76,1

 102,8

 

 

 

 

Émissions brutes de BTAN (e)

42,0

43,0

52,6

55,2

50,9

58,3

45,3

54,5

 75,8

 

 

 

 

Total Émissions brutes à moyen et long terme

93,6

96,9

118,9

131,5

126,4

121,1

107,6

130,6

 178,6

 

 

 

 

Rachats avant échéance (e)

14,9

10,0

7,4

9,9

16,7

17,0

10,1

2,1

 13,7

 

 

 

 

dont rachat par la CDP (f)

7,8

2,5

2,5

2,5

2,9

Total Émissions nettes à moyen et long terme

78,7

86,9

111,5

121,6

109,7

104,1

97,6

128,5

164,9

175,0

188,0

188,0

186,0

Annulation de titres d’État par la CDP

+ 7,8

+ 2,5

+ 2,5

+ 2,5

+ 2,9

Variation nette des BTF

+ 9,4

+ 35,7

+ 20,5

– 11,6

– 1,7

– 29,1

+ 12,2

+ 59,8

+75,8

+ 31

+ 1,2

+ 1,2

– 0,7

Variation des dépôts des correspondants du Trésor

– 2,3

+ 5,1

– 14,6

+ 1,7

+ 6,7

+ 5,1

+ 2,6

– 1,6

+0,8

– 3,0

+ 27,0

+ 27,0

– 3,0

Variation du compte courant du Trésor

+ 8,0

– 16,4

+ 0,2

– 2,2

– 5,9

+ 25,9

– 8,1

– 25,3

– 0,5

+ 4,8

+ 14,3

+14,9

+ 1,2

Divers

– 3,2

– 1,7

+ 1,9

+ 3,4

+ 4,2

+ 1,9

+ 0,5

+ 2,5 

+5,3

+ 3,1

+ 3,1

+ 5,5

+ 3,0

Ressources de financement de l’État

90,6

109,6

119,5

112,9

112,9

115,7

104,8

164,0

246,2

213,4

236,1

239,1

189,4

(a) En 2006, le déficit indiqué est diminué de l’opération exceptionnelle de régularisation comptable des pensions de décembre 2005 (3,3 milliards d’euros). En 2007, le déficit indiqué est augmenté de l’opération exceptionnelle de cession de titres EDF (3,7 milliards d’euros) destinée à financer l’opération « Campus » en faveur des universités.

(b) Le montant indiqué ne rend compte que des opérations dénouées d’un point de vue bancaire sur le compte du Trésor entre le 1er et le 31 décembre.

(c) Ligne non renseignée avant 2006.

(d) Ligne non renseignée avant 2007.

(e) En valeur nominale. En 2008, cette ligne prend également en compte le bilan net (+ 0,2 milliard d’euros) de l’opération d’échanges de titres du 4 décembre 2008 (voir infra).

(f) CDP : Caisse de la dette publique (ligne créée par la loi de finances initiale pour 2007).

1.– Le financement définitif de l’État en 2009 : un déficit de l’État multiplié par deux et une augmentation de la dette publique de plus de 12 points !

En raison de la crise économique et financière qui a notamment frappé la France en 2009, le financement de l’État a connu de très substantielles modifications en cours d’année.

Les modalités de financement de l’État en 2009 ont été définitivement arrêtées, en exécution, lors de l’adoption de l’article 2 de la loi de règlement du budget de l’année 2009 (16).

LE FINANCEMENT DE L’ÉTAT EN 2009

(en milliards d’euros)

 

LFI 
2009

LR 2009

Écart

I.– Besoin de financement

     

Impact en trésorerie du solde de la gestion 2009

67,0

134,7

+ 67,7 

Amortissement de la dette à long terme (OAT)

63,6

62,8

– 0,8

Amortissement de la dette à moyen terme (BTAN)

47,4

47,4

Amortissement des dettes reprises par l’État

1,6

1,6

Variation des dépôts de garantie

– 0,3

– 0,3 

Total Besoin de financement

179,6

246,2

+ 66,6 

II.– Ressources de financement

     

Produit des émissions d’OAT et de BTAN (nettes des rachats)…......

135,0

164,9

+ 29,9 

Annulation de titres par la Caisse de la dette publique

2,5

– 2,5 

Variation nette des BTF...

+ 20,9

+ 75,8

+ 54,9 

Variation des dépôts des correspondants

+ 0,8

+ 0,8 

Variation du compte courant du Trésor

+ 19,0

– 0,5

– 19,5 

Autres ressources de trésorerie

+ 2,2

+ 5,3

+ 3,1 

Total Ressources de financement

179,6

246,2

+ 66,6 

OAT : obligations assimilables du Trésor ; BTAN : bons du Trésor à taux fixe et intérêts annuels ; BTF : bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés.

 La dégradation subie en cours d’année est vertigineuse : entre le programme de financement prévisionnel et son exécution, le besoin de financement de l’État s’est alourdi d’un tiers (+ 66,6 millions d’euros).

Cette augmentation est intégralement due à la dérive du déficit budgétaire qui a doublé par rapport à la prévision pour atteindre 134,7 milliards d’euros fin 2009.

Il importe néanmoins de rappeler que cet « impact en trésorerie du solde de la gestion 2009 » ne correspond ni au déficit en exercice (ce qui est logique s’agissant d’une approche en trésorerie), qui s’est établi à 138 milliards d’euros, ni même (ce qui est plus problématique) au déficit en gestion, qui s’élève lui à 134,1 milliards d’euros (17).

On relèvera par ailleurs que les rachats de titres par l’Agence France Trésor (AFT) ont sensiblement augmenté par rapport aux années précédentes. Des OAT et des BTAN de maturité 2010 et 2011 ont été rachetés de gré à gré pour un montant de 13,6 milliards d’euros, à comparer à 2,3 milliards d’euros en 2008 et 10,4 milliards d’euros en 2007.

LES RACHATS DE TITRES ENTRE 2007 ET 2009

(valeur nominale, en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

1. Rachats de gré à gré

10 366

2 285

13 564

– par l’État (AFT)

10 366

2 285

13 564

– par la Caisse de la dette publique (CDP)

2. Rachats par adjudications à l’envers (CDP)

Total des rachats de l’année n [(1) + (2)]

10 366

2 285

13 564

hors titres d’échéance de l’année n

10 066

2 285

13 564

Source : Rapports annuels de l’AFT.

 Pour faire face à l’augmentation du besoin de financement de l’État en 2009, les ressources de trésorerie ont dû être adaptées en conséquence :

– le programme d’émission de dette à moyen et long terme (OAT et BTAN) a été revu à la hausse de près de 30 milliards d’euros et porté à 164,9 milliards d’euros (à comparer à 128,5 milliards d’euros en 2008 et à 188 milliards d’euros prévus en 2010) ;

– l’encours des emprunts à court terme (BTF) a augmenté de près de 76 milliards d’euros en cours d’année (soit 55 milliards d’euros de plus qu’en prévision), portant l’encours des BTF en fin d’année à 214 milliards d’euros, soit un niveau jamais atteint (voir graphique).

– en revanche, aucune opération de rachat de dette par la Caisse de la dette publique (CDP) n’a pu être réalisée en 2009 faute d’affectation à cette fin de recettes de cessions d’actifs ;

– il faut enfin souligner la quasi-nullité de l’impact du compte du Trésor sur le financement de l’État, qui contraste avec la contribution attendue de 19 milliards d’euros initialement envisagée comme la contrepartie de la très forte augmentation du compte à la fin 2008 (liée au préfinancement du plan de relance de l’économie). Ce décalage par rapport à la prévision de la loi de finances initiale, qui prive l’État d’autant de ressources de financement, s’explique principalement par la conservation sur le compte du Trésor des sommes remboursées par anticipation par les banques ayant bénéficié, lors de la crise financière, du soutien de l’État. Dans le cadre du « grand emprunt », ces sommes ont en effet été affectées, à hauteur de 13,5 milliards d’euros, au financement d’une partie des investissements d’avenir définis par la loi de finances rectificative du 9 mars 2010 : elles ne quitteront donc le compte du Trésor qu’en 2010 ou 2011 (voir infra).

Dans le contexte de crise, les investisseurs se sont donc montrés particulièrement attirés par des titres à court terme (BTF) aussi sûrs que liquides. Le Rapporteur spécial souligne cependant que la part des BTF dans l’encours de dette au 31 décembre 2009 atteint 18,6 %. Elle s’est ainsi rapprochée dangereusement du seuil de 20 %, jugé par certaines agences de notation, comme Moody’s, comme pouvant constituer un facteur de risque.

À l’inverse, le Rapporteur spécial constate qu’une fraction du programme de financement à moyen et long terme porte sur l’émission de titres indexés sur l’inflation française (depuis 1998) et sur l’inflation européenne (depuis 2001). Pour l’État, l’avantage est d’éviter d’intégrer au taux d’intérêt servi sur son titre la « prime de risque » généralement exigée des souscripteurs pour se protéger contre le risque d’erreur dans la prévision d’inflation sous-jacente à la formation des taux : en d’autres termes, l’émetteur s’expose à l’inflation, mais encaisse la prime de risque.

Depuis plusieurs années, la demande du marché – en particulier
des investisseurs institutionnels (fonds de pensions, compagnies d’assurance, etc.) – pour ce type de produits est forte. Toutefois, la crise a logiquement entraîné une baisse de l’appétence pour les titres indexés, dans un contexte désinflationniste de ralentissement économique et de préférence pour des actifs plus liquides. La demande s’est quelque peu redressée après le premier trimestre 2009, à mesure que les indices de prix cessaient de baisser. En 2009, 12,3 milliards d’euros de titres indexés ont été émis, soit environ 7,5 % de l’ensemble des émissions brutes après 15,5 milliards d’euros en 2008 et 18 milliards d’euros en 2007. La part des titres de moyen et long terme, indexés sur l’inflation, dans la dette totale a donc diminué sensiblement, passant de 15 % en 2008 à 12,8 % en 2009.

ÉVOLUTION DE LA DETTE INDEXÉE SUR L’INFLATION

(encours en fin d’année, en milliards d’euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Total dette négociable

653

717

788

833

877

877

921

1 017

1 148

Dette indexée (a)

19

30

47

71

90

110

132

152

148

soit part dans la dette totale

3,0 %

4,1 %

5,9 %

8,5 %

10,3 %

12,6 %

14,3 %

15 %

12,8 %

(a) Ensemble des OAT et des BTAN indexés sur l’inflation française ou européenne.

 En conséquence, l’encours de la dette négociable de l’État a explosé de plus de 12 % en 2009, pour atteindre 1 148 milliards d’euros en fin d’année. En y ajoutant la dette non négociable et les autres emprunts, la dette de l’État s’est élevée à 1 162,6 milliards d’euros fin 2009, soit 61 % du PIB (après 52,1 % du PIB en 2008 et 48,6 % en 2007).

L’ENCOURS DE LA DETTE DE L’ÉTAT EN 2008 ET 2009

(en milliards d’euros)

 

2008

2009

1. Dette négociable (en valeur nominale)

1 016,7

1 147,9

OAT

680,6

718,8

BTAN

197,8

215,0

Sous-total Dette à moyen et long terme

878,4

933,8

BTF

138,3

214,1

2. Dette non négociable (a)

0,3

0,25

3. Autres emprunts (a)

12,0

10

Total Dette de l’État

1 029,0

1 158,7

(a) Au sens du Compte général de l’État. Les « autres emprunts » désignent notamment les dettes reprises de tiers, en particulier la dette du service annexe d’amortissement de la dette (SAAD) de la SNCF (4,7 milliards d’euros), reprise par l’État en application de l’article 82 de la loi de finances rectificative pour 2007.

2.– Le programme révisé de financement de l’État en 2010

En raison du lancement de l’ « emprunt national » et du sauvetage impromptu de la Grèce en 2010, le financement de l’État a connu d’importantes modifications en cours d’année compte tenu de l’accroissement très important du besoin de financement de l’État (+ 30 %).

Le tableau ci-après en rend compte, en distinguant le programme officiel de financement, publié en loi de finances pour 2010, la version de ce tableau modifiée par l’article 2 de la première loi de finances rectificative du 9 mars 2010 et par l’article 2 de la deuxième loi de finances rectificative du 7 mai 2010 (18).

TABLEAU PRÉVISIONNEL DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT EN 2010

(en milliards d’euros)

 

LFI 2010

LFR 1
 2010

Écarts à la LFI

LFR 2 2010

Écarts à la LFR 1

I.– Besoin de financement

         

Déficit budgétaire

117,4

149,0

+ 31,6

152

+ 3

Amortissement de la dette à long terme

31,6

29,5

– 2,1

29,5

Amortissement de la dette à moyen terme

60,3

53,5

– 6,8

53,5

Amortissement des dettes reprises par l’État

4,1

4,1

4,1

Total Besoin de financement

213,4

236,3

+ 22,9

239,1

+ 2,8

II.– Ressources de financement

         

Produit des émissions à moyen et long terme (nettes des rachats)….

175

188

+ 13,0

188

Annulation de titres par la Caisse de la dette publique

2,5

2,5

2,5

Variation nette de titres à court terme...

+ 31,0

+ 1,2

 29,8

+ 1,2

– 0,2

Variation des dépôts des correspondants

– 3,0

+ 27,0

+ 30,0

+ 27,0

Variation du compte courant du Trésor

+ 4,8

+ 14,3

+ 9,5

+ 14,3

Autres ressources de trésorerie

+ 3,1

+ 3,1

+ 5,5

+ 2,4

Total Ressources de financement

213,4

236,3

+ 22,9

239,1

+ 2,8

a) L’impact du grand emprunt national

Du point de vue du besoin de financement de l’État, la comparaison entre le tableau de financement de la LFR 1 avec celui de la loi de finances initiale pour 2010 permet de constater :

– la nouvelle dérive du déficit budgétaire de l’État qui s’élève de 31,6 milliards d’euros (compte tenu de la révision à la hausse des recettes fiscales à hauteur de 3,5 milliards d’euros) pour atteindre le record de 149 milliards d’euros ;

– les amortissements de titres à moyen et long terme (19) arrivant à échéance en 2010 sont inférieurs de près de 9 milliards d’euros aux prévisions initiales. Cette réduction du besoin de financement pour 2010, qui a en quelque sorte pour effet de « compenser » une partie de l’augmentation du déficit budgétaire, est la conséquence de la politique de rachats de titres avant leur échéance mise en œuvre dès la fin de l’année 2009 par l’Agence France Trésor, qui a pu profiter du bas niveau des taux d’intérêt constaté sur les marchés (20).

Du point de vue des ressources de financement de l’État, il apparaît que :

– le programme d’émissions de titres à moyen et long terme est porté de 175 milliards d’euros dans la loi de finances initiale à 188 milliards d’euros en loi de finances rectificative, soit une augmentation de 13 milliards d’euros.

– la trésorerie disponible sur le compte courant du Trésor sera mobilisée à hauteur de 14,3 milliards d’euros en 2010, soit 9,5 milliards d’euros de plus qu’initialement prévu. Ce mouvement est rendu possible par les remboursements à l’État, par l’intermédiaire de la Société de prise de participation de l’État (SPPE), d’une partie des aides au secteur bancaire consenties en application de l’article 6 de la loi de finances rectificative du 16 octobre 2008 pour le financement de l’économie. Ces remboursements, enregistrés parmi les ressources de trésorerie de l’État en 2009, représentent plus de 13 milliards d’euros (21).

Dès lors, et quoique cette présentation ait un caractère nécessairement conventionnel (22), les modalités de financement des 35 milliards d’euros d’investissements d’avenir peuvent être décrites selon la répartition suivante.

LE « GRAND EMPRUNT »

(en milliards d’euros)

Diminution du besoin de financement 2010 permise par les rachats de dette en 2009 sans réduction corrélative des émissions de 2010

9

Réduction de l’encours du compte du Trésor entraînée par l’utilisation des remboursements anticipés des aides aux banques accordées par la SPPE

13

Augmentation des emprunts à moyen et long terme en 2010 (188 Mds€ au lieu de 175 Mds€)

13

TOTAL

35

Compte tenu de ces nouvelles conditions de financement de l’État en 2010, le plafond de variation nette de la dette négociable d’une durée supérieure à un an, proposé au 2° du II de l’article 5 de la « LFR », s’établit désormais à 105 milliards d’euros, en hausse de près de 22 milliards d’euros par rapport à l’article d’équilibre de la loi de finances initiale. Cet accroissement est la conséquence de l’augmentation de 13 milliards d’euros du programme de financement à moyen et long terme et de la diminution de près de 9 milliards d’euros des amortissements de titre prévus en 2010 (à la suite des rachats avant échéance pratiqués en 2009). Pour le dire autrement, au 31 décembre 2010, la dette de l’État à moyen et long terme sera supérieure de 22 milliards d’euros à ce qu’elle était au 31 décembre 2009. Toutefois, cette augmentation ne devrait faire sentir ses effets sur la charge de la dette qu’à partir de 2011 (23).

Par ailleurs, la version « LFR 1 » du tableau de financement pour 2010 permet d’appréhender concrètement une des conséquences de l’obligation de dépôt auprès du Trésor des fonds qui doivent être versés par l’État aux différents organismes gestionnaires des investissements d’avenir : parmi les ressources de financement de l’État, la variation des dépôts des correspondants du Trésor atteindrait 27 milliards d’euros en 2010, soit une augmentation de 30 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale (24). Ce surcroît de trésorerie, qui correspond à la fraction estimée des fonds versés aux opérateurs qu’ils ne dépenseront pas en 2010, permet de réduire à due concurrence les émissions de titres à court terme (BTF), dont l’encours ne progresserait plus que de 1,2 milliard d’euros en 2010 (25). On ne peut que s’en réjouir, compte tenu de la part croissante prise par ces titres au sein de la dette de l’État depuis 2007.

Au total, l’accroissement de la dette de l’État nécessaire au financement des investissements d’avenir demeure tout de même conséquent. L’impact propre des 35 milliards d’euros d’investissements d’avenir sur la dette publique d’abord évalué à 5 milliards d’euros en 2010 a été révisé à 1 milliard d’euros en 2010. Trois facteurs doivent être pris en considération.

En premier lieu, la partie non consomptible des dotations – soit 15 à 16 milliards d’euros – ne majore pas la dette publique, dès lors que ces fonds sont obligatoirement déposés sur un compte du Trésor public (ce qui réduit d’autant l’appel de l’État aux marchés) et que leur rémunération est compensée par des économies sur d’autres dépenses. Pour 2010, le Gouvernement a précisé que la charge représentée par les fonds non consomptibles resterait limitée (environ 172 millions d’euros).

En deuxième lieu, au sein de la fraction consomptible des fonds dédiés aux investissements d’avenir, les décaissements qui, en 2010, seront qualifiés de dépenses publiques au sens de la comptabilité nationale sont évalués par le Gouvernement à environ 800 millions d’euros. À l’instar du déficit public, la dette publique s’en trouve alourdie d’autant.

En troisième et dernier lieu, certaines sorties en trésorerie de fonds consomptibles ne constitueront pas des dépenses publiques mais pèseront malgré tout sur la dette publique. C’est le cas par exemple des prêts et des prises de participation qui, à moins qu’ils soient accordés à une autre administration publique, sont inclus dans la dette publique en comptabilité « maastrichtienne » –laquelle oblige à raisonner en termes de dette « brute » (26). Ce phénomène ne commencerait à jouer qu’en 2011, à hauteur d’environ 1,4 milliard d’euros en moyenne par an (27).

Le Rapporteur spécial rappelle en tout état de cause que les capacités d’emprunt de l’État français ne sont pas extensibles à l’infini et qu’une telle expérience est particulièrement risquée : ces capacités d’emprunt dépendent des facultés d’absorption par les marchés des émissions massives de titres observées depuis le déclenchement de la crise (28); elles ne sauraient être plus sollicitées au point d’aboutir à une dégradation de la qualité de la signature de la France, de nature à renchérir le service de sa dette.

b) L’impact du soutien en faveur de la Grèce

La « LFR 2 » qui permet l’octroi d’une aide financière temporaire en faveur de la Grèce le temps nécessaire à la résorption de ses déséquilibres budgétaires accroît encore le besoin de financement de l’État de 3 milliards d’euros.

Toutefois, cette aide financière ne devrait pas peser sur l’encours de la dette publique ni d’ailleurs sur le déficit public « maastrichtien » (dès lors que les prêts sont traités en comptabilité nationale comme des opérations financières affectant tant le passif – du fait des fonds versés à la Grèce – que l’actif – du fait de la créance détenue sur la Grèce).

Le besoin de financement de trois milliards d’euros lié à l’aggravation du déficit devrait donc être entièrement couvert par des ressources de trésorerie sans qu’il soit besoin pour l’Agence France Trésor d’émettre davantage d’emprunts.

3.– Le financement prévisionnel de l’État en 2011

TABLEAU PRÉVISIONNEL DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT EN 2011

(en milliards d’euros)

I.- Besoin de financement

Prévisions actualisées pour 2010

LFI 2011

Déficit budgétaire

152

92,0

Amortissement de la dette à long terme

29,5

48,8

Amortissement de la dette à moyen terme

53,5

48,0

Amortissement de dettes reprises par l’État

4,1

0,6

Total Besoin de financement

239,1

189,4

II.- Ressources de financement

   

Émissions à moyen et long terme (nettes des rachats).............

188

186,0

Annulation de titres par la Caisse de la dette publique

0

2,9

Variation nette des titres à court terme

– 14,5

– 0,7

Variation des dépôts des correspondants

+ 39,9

– 3,0

Variation du compte courant du Trésor

+ 17,2

+ 1,2

Autres ressources de trésorerie

+ 5,5

3,0

Total Ressources de financement

239,1

189,4

     

● Il ressort du projet annuel de performances pour 2011 que les éléments du besoin de financement au 30 septembre 2010 n’ont pas évolué par rapport à la loi de finances rectificative du 9 mai 2010. Parallèlement, l’objectif d’émissions nettes à moyen et long terme ne varie pas (188 milliards d’euros).

La principale évolution concerne la variation des BTF dont l’encours est largement revu à la baisse (- 15 milliards d’euros contre + 1,2 milliard en LFR 2). Alors que l’encours de titres à moins d’un an avait fortement augmenté en 2009 sous l’effet de la crise (la part des BTF dans l’encours total de dette passant de 8,5 % en 2007 à 18,6 % en 2009), l’année 2010 marque donc le pas vers un recours nettement moins important à la dette à court terme, la part des BTF dans l’encours total de la dette devant passer de 16,8 % au 30 septembre 2010 à 16,1 % à la fin de l’année 2010. Cette révision à la baisse résulte d’une politique de rachat de certains titres venant à échéance en 2011 qui réduit l’exigence du niveau de solde du compte du Trésor en fin d’année et à la politique de centralisation des excédents de trésorerie des structures publiques qui a été entamée en 2010 et qui se traduit par une augmentation plus forte qu’attendue des dépôts des correspondants (+2,3 milliards par rapport à la LFR 2).

 Selon le Gouvernement, l’année 2011 se caractériserait par une réduction historique du déficit de l’État et par tant de son besoin de financement qui passe de 239,1 milliards d’euros à 189,4 milliards d’euros (– 49,7 milliards d’euros).

Le Rapporteur spécial ne conteste pas cette réduction sans précédent du besoin de financement de l’État mais entend quand même rappeler que la réduction du déficit de l’État (de 152 à 92 milliards d’euros) résulte essentiellement d’un simple effet mécanique lié à la non-reconduction des mesures exceptionnelles de crise en 2011 (35 milliards d’investissements d’avenir + 15 milliards d’euros de mesures liées au plan de relance).

De surcroît, deux remarques doivent être prises en considération.

D’une part, on ne croit à la diminution du besoin de financement de l’État que pour autant que l’on pense possible la réduction du déficit de l’État. Or, le Rapporteur spécial ne manque pas d’affirmer son doute sur une telle diminution, ne serait-ce que parce que la stratégie économique suivie, tant en France qu’en Europe, risque bien de ralentir la croissance économique (plutôt que de la stimuler). Dès lors, après la relance de 2009, 2011 pourrait être un coup de frein macroéconomique (après le « go », il y a un risque de « stop »), dont l’incidence pourrait être, précisément, de freiner la réduction du déficit. Et l’État de connaître un déficit passif, subi, plus difficile encore à résorber, que celui né de la stimulation de la relance.

D’autre part, la diminution du déficit budgétaire de près de 60 milliards d’euros en 2011 ne se répercute pas entièrement sur la réduction du besoin de financement de l’État. En effet, l’année 2011 sera marquée par une augmentation des amortissements de titres négociables venant à échéance : 96,8 milliards d’euros (hors dette reprise) l’année prochaine, au lieu de 87,1 milliards d’euros en 2010 (ceux-ci pourront toutefois être revus à la baisse d’ici à la fin de l’année, en fonction des rachats de titres de maturité 2011 qu’aura pu effectuer l’Agence France Trésor dans les prochaines semaines).

De plus, le remboursement de dettes reprises par l’État compterait pour environ 583 millions d’euros en 2011, correspondant à des échéances de dettes du service annexe d’amortissement de la dette de la SNCF (SAAD) pour 82,6 millions d’euros (29) (cette dette ne devrait être totalement remboursée qu’en 2023) et de Charbonnages de France pour 500 millions d’euros (30) (l’amortissement complet serait acquis en 2013).

Le graphique ci-après présente l’évolution des deux principales composantes du besoin de financement de l’État depuis 1999. Au-delà de la forte augmentation enregistrée depuis 2008, il permet de constater la spécificité des années 2009 et 2010 : au sein du besoin de financement total, le déficit budgétaire pèse davantage que les amortissements de l’année. D’après les prévisions gouvernementales, l’année 2011 marquerait ainsi le retour à la normale : les amortissements de l’année prenant le pas sur le déficit de l’État au sein du besoin de financement.

STRUCTURE DU BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT (1999-2011)

(en milliards d’euros)

 Les ressources de financement de l’État en 2011, soit 189,4 milliards d’euros au total, se répartiraient selon les modalités suivantes.

Les émissions de dette à moyen et long terme (OAT et BTAN), nettes des rachats, atteindraient 186 milliards d’euros. Ainsi, alors même que le besoin de financement attendu en 2011 serait nettement moins important que celui de 2010, les émissions à moyen et long terme seraient quasiment équivalentes. Le Gouvernement entend ainsi limiter l’accroissement des titres à court terme au sein de l’encours total de dette ce qui paraît plus que nécessaire pour les raisons exprimées précédemment (voir le graphique ci-après).

Cette stratégie est confortée par le regain de demande de la part des investisseurs pour les titres de très long terme depuis le milieu de l’année 2009. Elle vient notamment de la part de fonds de pension d’Europe du Nord et de compagnies d’assurance qui cherchent, d’une part à réduire leur exposition au risque en substituant au sein de leurs actifs des obligations longues à des actions, d’autre part à stabiliser leurs ratios de solvabilité en augmentant leurs encours de titres souverains longs au détriment de leur exposition via les contrats d’échange de taux.

Ce regain de demande de la part des investisseurs pour les titres de très long terme a d’ailleurs permis le lancement d’une nouvelle obligation de référence de maturité 30 ans, l’OAT 4,50 % 25 avril 2041, en juin 2009. En 2010, il a permis de rouvrir le segment des obligations de maturité 50 ans, qui n’avait pas été exploré depuis janvier 2008 et le dernier abondement de l’OAT 4 % 25 avril 2055, lancée en mars 2005. Il a ainsi été créé un nouveau titre de référence de maturité 50 ans, l’OAT 4 % 25 avril 2060, lancée au mois de mars 2010 par syndication, pour un montant de 5 milliards d'euros et au taux actuariel de 4,175 %.

Dans ces conditions, compte tenu des amortissements prévus en 2011, le plafond de variation de la dette négociable soumis au vote du Parlement pour 2011 est de 89,2 milliards d’euros (31), à comparer aux 105 milliards d’euros en loi de finances rectificative pour 2010 du 9 mars 2010 (32). Aux termes de l’article 34 de la LOLF, ce plafond ne porte que sur la dette négociable dont la durée de vie à l’émission est supérieure à un an, c’est-à-dire les OAT et les BTAN (y compris les titres venant à échéance l’année en cours ou l’année suivante).

PRINCIPALES RESSOURCES DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT DEPUIS 1998

(en milliards d’euros)

Émissions à moyen et long terme : émissions d’OAT et de BTAN,

nettes des rachats et annulations.

Variation nette de la dette à court terme : variation de l’encours des BTF.

Par ailleurs, la Caisse de la dette publique annulerait 2,9 milliards d’euros de titres d’État l’année prochaine. Toutefois, depuis 2007, cette ligne du tableau de financement tend à devenir purement conventionnelle, dès lors que sa mise en œuvre suppose que la CDP bénéficie effectivement de l’affectation de recettes de cessions d’actifs lui permettant de procéder aux rachats et aux annulations de dette (33).

Voilà comment, toujours d’après les prévisions gouvernementales, le stock de dette à court terme poursuivrait sa baisse en 2011 (– 700 millions d’euros).

S’agissant de la variation des dépôts de correspondants (– 3,0 milliards d'euros), elle correspond à une approche prudente et relativement conventionnelle, pour un montant équivalent à ce qui avait été inscrit dans le projet de loi de finances pour 2010. Elle anticipe notamment une décollecte des collectivités territoriales après la hausse significative des dépôts constatée en 2009.

Le solde du compte de Trésor resterait en revanche quasiment stable (+ 1,2 milliard d’euros), la variation résultant des écarts qui peuvent être estimés entre les besoins de trésorerie du début de l’année 2011 et ceux du début de l’année 2012 (34). Enfin, les autres ressources de trésorerie (+ 3,0 milliards d'euros) comprennent la charge d’indexation (pour neutraliser l’impact de la charge budgétaire correspondante, intégrée au besoin de financement mais qui ne donne pas lieu à décaissement) et les indexations à l’émission. En prévision, par convention, les primes et décotes sont portées à zéro.

 En conséquence de ce programme de financement, la dette négociable de l’État devrait s’établir à 1 241 milliards d’euros à la fin de l’année 2010 et à 1 333 milliards d’euros, soit plus de 66 % du PIB. Cet encours de dette se répartirait en 1 041 milliards d’euros d’OAT et de BTAN et 200 milliards d’euros de BTF en 2010. Pour 2011, la répartition serait la suivante : 1 133 milliards d’euros d’OAT et de BTAN et 199 milliards d’euros de BTF.

En 2011, la baisse de la part des BTF devrait se poursuivre à un rythme relativement soutenu pour passer sous la barre des 15 % du stock de dette en fin d’année. Selon le Gouvernement, ce mouvement de baisse du ratio de BTF se prolongera très probablement en 2012-2013 pour faire revenir à terme ce ratio dans la zone de 12 % à 14 %.

Or, comme le Rapporteur spécial ne cesse de le répéter, il est absolument nécessaire que l’État réussisse à réduire son programme de financement à moyen et long terme d’une année sur l’autre, tout en réduisant également son financement à court terme, afin de ne pas s’exposer à l’évolution des taux d’intérêt. L’année 2011 pourrait donc nous donner une lueur d’espoir à ce titre.

Il convient enfin de signaler qu’une part croissante de la dette française est détenue par des investisseurs étrangers. Il n’y a en soi certes pas lieu de s’en offusquer, dès lors que ce financement permet d’apporter à l’État une certaine sécurité de refinancement face aux éventuels chocs de marché et de limiter les effets d’éviction au plan intérieur, en libérant a priori davantage l’épargne nationale pour le financement des entreprises.

PART DE LA DETTE FRANÇAISE DÉTENUE
PAR DES NON-RÉSIDENTS

(en pourcentage en fin d’année)

 

BTF

BTAN

OAT

Total dette négociable

2003

56,7

70

39,7

48,1

2004

64,5

71,8

45,1

52,7

2005

71,6

72,7

49,7

56,5

2006

69,5

73,5

53,2

58,9

2007

63,4

75,1

56,5

61,2

2008

68,3

88,2

58,8

65,6

2009

67,9

87,4

60,2

67,9

2010

     

70,6 (a)

Sources : Banque de France et AFT.

(a) au 30 juin 2010 selon les données transmises par le Gouvernement

PART DE LA DETTE FRANÇAISE DÉTENUE PAR DES NON-RÉSIDENTS

(en pourcentage de la dette négociable de l’État)

Sources : Banque de France et AFT.

Pour 2010, données au 30 juin 2010.

Pour autant, la France se trouve ainsi placée dans une position de plus en plus dépendante de l’extérieur. À cet égard, il est regrettable qu’aucune donnée totalement fiable sur la nationalité des détenteurs de la dette française ne soit disponible. La dernière enquête du Fonds monétaire international donne une indication partielle remontant à fin 2008 : elle montrait que parmi les titres de dette française (dette publique et dette bancaire étant mêlées) détenus par les non résident, la part provenant de l’extérieur de la zone euro s’élève à 52,6 % (contre 58,3 % en Allemagne, 43,5 % aux Pays-Bas et 33 % en Espagne et en Italie). L’AFT ne manque d’ailleurs pas de faire savoir que, chaque année, ses responsables se déplacent aux États-Unis, au Moyen-Orient, en Asie du Sud-est, en Chine ou au Japon pour tirer parti de l’intérêt des investisseurs de ces zones pour les titres financiers en euro.

Il serait appréciable que le Parlement puisse bénéficier d’informations plus précises et plus régulières sur la répartition géographique des détenteurs de la dette française : le Rapporteur spécial en est demandeur depuis maintenant trois ans (35).

C.– L’ENVOLÉE DE LA CHARGE DE LA DETTE À COMPTER DE 2011

Le Rapporteur spécial rappelle que l’évolution de la charge d’intérêt annuelle de la dette de l’État ne saurait être considérée comme un quelconque indicateur de la performance du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État. Pour le responsable de ce dernier, la charge de la dette apparaît en effet très largement comme une contrainte exogène, sur laquelle il n’est possible d’agir qu’à la marge, au moyen d’une gestion « active » de la dette.

Techniquement, le montant de la charge de la dette de l’État résulte des opérations retracées sur le compte de commerce Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État (36). Sur sa première section sont imputées les opérations relevant du service primaire des intérêts de la dette, à savoir le versement des intérêts échus (en dépenses) et l’encaissement des coupons courus ou des revenus tirés de la rémunération de la trésorerie (en recettes). Cette section est équilibrée par un versement du budget général, égal au montant des crédits du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État (37). Conformément à l’article 113 de la loi de finances rectificative pour 2004, elle fait l’objet d’une autorisation de découvert évaluative, dont le montant est proposé pour 2011 à 17,5 milliards d’euros (article 51 et état E du présent projet), soit un niveau légèrement supérieur à ceux votés de 2006 à 2009 (15 milliards d’euros).

La seconde section du compte de commerce retrace les opérations de gestion active de la dette via des produits financiers dérivés – c’est-à-dire les produits et les charges des opérations, autorisées en loi de finances, d’échange de devises ou de taux d’intérêt (swaps), ainsi que d’achat ou de vente d’options ou de contrats à terme sur titres d’État. Dénuée d’impact sur le budget général, cette section fait l’objet d’une autorisation de découvert limitative, qui serait fixée l’année prochaine à 1,7 milliard d’euros, à l’instar des années précédentes.

L’exécution 2008 s’est traduite par un dépassement de la charge de la dette de 3,3 milliards d’euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale pour 2008. Or l’essentiel de ce dérapage s’explique par l’exceptionnelle hausse des prix constatée au premier semestre 2008 (+ 2,8 % contre 1,6 % en prévision) qui a pesé sur la part des titres indexés de la dette à moyen et long terme.

L’exécution 2009 a elle aussi été marquée par l’extrême sensibilité de la charge de la dette au taux d’inflation et aux taux d’intérêt réels. Profitant à l’inverse d’une inflation réelle de 0,1 % contre 1,5 % en prévision notamment, l’État a pu bénéficier d’une économie de 6,8 milliards d’euros sur la charge nette de la dette (qui a atteint 37,5 milliards d’euros) par rapport à sa prévision en loi de finances initiale pour 2009 (fixée à 42,9 milliards d’euros) (38).L’année 2010 s’inscrit, quant à elle, dans une tendance proche de celle rencontrée en 2009.

Le tableau ci-après présente le détail de la composition de la charge de la dette prévue dans la loi de finances initiale et la loi de finances rectificative du 9 mars 2010 ainsi que dans le présent projet de loi de finances pour 2011.

LA COMPOSITION DE LA CHARGE DE LA DETTE EN 2010 ET 2011

(en millions d’euros)

 

LFI 2010

LFR 1 2010 (1)

PLF 2011

DETTE NÉGOCIABLE

     

Intérêts des BTF

3 586

3 286

2 595

Intérêts des BTAN

7 596

7 596

7 517

Intérêts des OAT (hors OAT indexées)

28 361

28 361

30 692

Intérêts des OAT indexées

3 432

3 432

3 618

Charge d’indexation du capital des OAT indexées

1 654

1 954

2 529

Frais et commissions

24

24

20

Intérêts sur autres dettes reprises par l’État

456

456

294

Intérêts couverture des risques

58

58

41

Total charge brute de la dette négociable

45 167

45 167

47 306

DETTE NON NÉGOCIABLE

     

Charge d’intérêts

3

3

3

Intérêts sur autres dettes reprises par l’État

Total charge brute de la dette non négociable

3

3

3

GESTION DE LA TRÉSORERIE

     

Trésorerie : comptes de dépôts des correspondants

289

289

292

Trésorerie : fonds non consommables versés par l’État

 

500

569

Total charge brute gestion de la trésorerie

289

789

861

Charge brute de la dette

45 459

45 959

48 170

À déduire : Recettes en atténuation de la charge de la dette (-)

– 3 009

– 3 009

– 2 788

Coupons courus des OAT et des BTAN

2 746

2 746

2 515

Couverture des risques

97

97

73

Rémunération compte Trésor à la Banque de France

3

3

3

Rémunération prêts court terme et pensions sur titres

163

163

197

Charge nette de la dette avant swaps

42 450

42 950

45 382

À déduire : solde des opérations de gestion active de la dette (A – B)

– 280

– 280

– 333

A. Recettes :

     

dont Intérêts perçus au titre des swaps

890

890

611

dont Rémunération des appels de marge sur swaps

20

20

10

B. Dépenses :

     

dont Intérêts payés au titre des swaps

590

590

268

dont Intérêts des appels de marge sur swaps

     

Charge nette de la dette après swaps

42 170

42 670

45 049

(1) Loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.

1.– Le paradoxe de 2009 et 2010 : en dépit de l’explosion de la dette, des charges d’intérêt atténuées par la faiblesse des taux

Comme en 2009, l’année 2010 cultive le paradoxe : alors que le déficit budgétaire atteint un niveau historique de 152 milliards d’euros et que l’encours de la dette de l’État explose à près de 1 241 milliards d’euros, la charge d’intérêt versée au titre de cette dette s’avère relativement modérée et, en tout état de cause, inférieure aux crédits prévus.

En effet, si les crédits initiaux du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État s’établissaient à 42,45 milliards d’euros majorés de 0,5 milliard d’euros supplémentaires en loi de finances rectificative du 9 mars 2010 en liaison avec la mise en place dans ce texte des investissements d’avenir, la charge de la dette en 2010 sera inférieure de 1,5 milliard d’euros par rapport à la prévision initiale et de deux milliards d’euros par rapport à la prévision révisée en mars 2010. Quatre facteurs concourent à cette évolution :

– en premier lieu, la baisse significative des taux courts des BTF : initialement estimés à 1,3 % en moyenne annuelle, ils sont finalement attendus à 0,4 % sur l’année ; cet « effet taux » contribuerait à hauteur de 1,6 milliard d’euros environ à la révision à la baisse de la charge de la dette ;

– en deuxième lieu, la révision à la baisse de la charge liée à la rémunération des dotations non consommables mises en place pour le financement des investissements d’avenir (– 0,3 milliard d’euros) : évaluée à 0,5 milliard d’euros lors de la loi de finances rectificative du 9 mars 2010, cette charge devrait finalement être limitée à 0,2 milliard d’euros. En effet, les intérêts dus par l’État ne courent qu’à compter du versement effectif des fonds aux opérateurs gestionnaires des fonds. Ils sont donc conditionnés par la conclusion des conventions entre l’État et les opérateurs gestionnaires, préalable nécessaire pour que la mécanique des investissements d’avenir fonctionne conformément à la logique de sélectivité et d’excellence voulue tant par le Gouvernement que par le législateur ;

– en troisième lieu, les effets calendaires : ceux-ci résultent, d’une part, du choix de la date anniversaire pour les lignes créées et, d’autre part, du choix des lignes abondées lors des adjudications effectivement opérées, donc de leurs dates anniversaires respectives. Ces effets, qui influent sur le montant des coupons courus ou versés, viendraient réduire la charge de la dette à hauteur de 0,5 milliard d’euros ;

– enfin, la charge d’indexation s’avère en revanche supérieure de 0,3 milliard d’euros en exécution par rapport au niveau anticipé en mars : elle s’établit à 2,3 milliards d’euros contre 2 milliards d’euros au moment de la première loi de finances rectificative, compte tenu d’une inflation plus élevée qu’anticipé en glissement de mai à mai. On retrouve ainsi l’une des caractéristiques notables des titres indexés sur l’inflation : si la charge de la dette est ainsi davantage soumise aux évolutions des prix, cette variabilité est partiellement compensée par un effet de « lissage » en fonction du cycle économique. En phase haute, du fait d’une inflation plus forte, le service de la dette indexée est généralement plus élevé et vient limiter les gains budgétaires provenant de meilleures rentrées fiscales ; en bas de cycle, le creusement du déficit budgétaire est partiellement compensé par l’amoindrissement de la charge de la dette indexée.

CHARGE DE LA DETTE INDEXÉE SUR L’INFLATION DEPUIS 2002

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

LFI 2009

LFI
2010

LFR 2010

PLF 2011

Charge brute de la dette indexée

1,2

1,7

2,9

3,5

4,6

4,7

7,9

6,0

5,1

5,4

6,1

dont paiement des intérêts

0,8

1,2

1,8

2,1

2,5

2,9

3,3

3,8

3,4

3,4

3,6

dont provisionnement du capital

0,4

0,5

1,1

1,4

2,1

1,8

4,6

2,2

1,7

2,0

2,5

Coupons reçus

0,2

0,2

0,3

0,1

0,1

0,2

0,2

0,2

0,2

0,27

0,3

Charge nette de la dette indexée

1,0

1,5

2,6

3,3

4,5

4,5

7,7

5,8

4,9

5,1

5,9

Part dans la charge de la dette totale

3,2%

4,5%

7,6%

9,0%

11,8%

11,8%

17,4%

13,5%

11,9%

11,3%

11,7%


(en milliards d’euros)

N.B. : En exécution, la charge de la dette indexée en 2010 sera sensiblement supérieure à la prévision (+ 0,3 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale).

Au total, la charge de la dette en 2010 devrait être inférieure d’environ 2 milliards d’euros aux crédits inscrits dans la loi de finances rectificative du 9 mars 2010. Le tableau ci-dessous synthétise les principaux facteurs précités.

LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT EN 2010 : DE LA PRÉVISION À L’EXÉCUTION

(en milliards d’euros)

LFR du 9 mars 2010

43

Économie sur la dette à court terme

– 1,6

Économie sur les charges de trésorerie et autres

– 0,8

Creusement de la charge d’indexation

+ 0,3

Exécution 2010

41

Le Rapporteur spécial se réjouit évidemment de la « bouffée d’oxygène » sur la charge de la dette qu’apporte provisoirement le niveau historiquement bas des taux d’intérêt depuis la fin 2008. Il lui faut néanmoins remarquer que c’est essentiellement ce facteur qui, tel un effet d’aubaine, a permis au Gouvernement de respecter en exécution 2009 la « norme de dépense » régissant l’ensemble du budget de l’État (39), et le permettra sans doute encore en 2010.

Malheureusement, la modération de la charge de la dette observée en 2009 et 2010 n’a pas vocation à perdurer : à l’effet d’aubaine pourrait rapidement succéder un effet boomerang.

2.– Une forte augmentation de la charge de la dette dès 2011 : quand l’effet « taux » et l’effet « volume » jouent dans le même sens

En 2011, les crédits proposés pour le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État atteignent 45,4 milliards d’euros. Comme de coutume, cela en fait le deuxième programme du budget général par le volume de ses crédits, après les remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (82,1 milliards d’euros) et avant l’enseignement scolaire public du second degré (29,4 milliards d’euros).

 Ce montant correspond à la réalisation du programme de financement de l’État déjà commenté compte tenu d’hypothèses de taux d’intérêt présentées dans le tableau ci-après.

HYPOTHÈSES DE TAUX D’INTÉRÊT RETENUES DANS LE PLF 2011

 

Taux à 3 mois

Taux à 10 ans

Fin 2008 (pour mémoire)

1,7 %

3,4 %

Fin 2009 (pour mémoire)

0,62 %

3,69 %

Fin 2010 (estimation)

0,46 %

3,2 %

Fin 2011 (prévision)

1,16 %

3 %

N.B. : Les hypothèses présentées dans le tableau ci-dessus ne constituent pas une prévision des choix à venir en matière de politique monétaire et ne sauraient être interprétées comme une anticipation officielle de l’évolution des taux.

Pour 2011, le scénario retenu est fondé, comme les années précédentes, sur le Consensus Forecast de septembre 2010 qui anticipe qui anticipent des taux à 3 mois de 1,3 % à la fin septembre 2011. Par interpolation avec les taux constatés en 2010, la moyenne annuelle des taux à 3 mois s’établirait à 1,0 %. Toutes maturités confondues, le taux moyen des BTF sur l’année 2011 atteindrait alors 1,16 % contre environ 0,46 % en 2010.

Toutefois, l’impact de la hausse des taux courts serait partiellement compensé par les gains de refinancement constatés sur la dette à moyen et long terme. Malgré la remontée attendue des taux au cours des prochains mois, (de 2,55 % en septembre 2010 à 3,1 % l’année d’après), le taux annuel moyen des OAT devrait s’établir à 3 % seulement.

Si cette situation peut apparaître encore intéressante, il convient néanmoins de la nuancer par le fait que la France se trouve dans une situation traditionnellement moins favorable que son voisin allemand. En effet, les investisseurs ont tendance à considérer que les titres de moyen et long termes allemands bénéficient d’une liquidité légèrement supérieure à ceux de la France. En outre, l’Allemagne présente des ratios de déficit public inférieurs à ceux de la France qui reflètent la différence perçue par les investisseurs sur la qualité du crédit. Ces deux éléments (liquidité et qualité supérieures) expliquent donc l’écart de taux à dix ans entre les obligations de la France et l’Allemagne. Or, en période d’incertitude notamment, les investisseurs ont tendance à se reporter sur les titres allemands plutôt que français. Il s’ensuit que l’écart de taux (« spread ») entre l’Allemagne et la France peut largement fluctuer, au détriment de la France, comme le montre l’histoire récente de la crise financière et économique.

ÉCART DE TAUX FRANCE ALLEMAGNE À 10 ANS EN POINTS DE BASE

 Dans ces conditions de taux malgré tout favorables, et compte tenu de l’ampleur de la dette accumulée par l’État, la charge de la dette prévue pour 2011, soit 45,4 milliards d’euros, progresse d’environ 2,9 milliards d’euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale pour 2010, soit une croissance de + 6,9 %. Il s’agit du plus haut niveau de charge jamais atteint !

En outre, par rapport au montant que devrait effectivement atteindre la charge de la dette en 2010, soit environ 41 milliards d’euros (40), l’accroissement attendu en 2011 s’élève à 4,5 milliards d’euros (+ 10 %). Cette augmentation s’explique principalement par trois facteurs :

– un « effet volume » sur la dette à plus d’un an (dont le stock aura augmenté de 105 milliards d'euros en 2010) soit une augmentation d’environ 3,3 milliards d'euros ;

– un « effet taux » compte tenu de l’augmentation des taux courts en 2011 (+ 0,8 milliard d’euros) pour les raisons exprimées précédemment ;

– enfin, il faut s’attendre à l’augmentation de la rémunération des dotations non consomptibles pour le financement des investissements d’avenir compte tenu de la montée en charge de la sélection des projets à financer ainsi qu’à l’effet « année pleine » pour les projets déjà sélectionnés (+ 0,4 milliard d’euros).

LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT EN 2010 ET 2011

(en millions d’euros)

 

LFI 2010

PLF 2011

Charge brute de la dette négociable

45 167

47 306

Charge brute de la dette non négociable

3

3

Charge brute de la gestion de la trésorerie

289

861

Total charge brute

45 459

48 170

Recettes d’ordre (à déduire)

– 3 009

– 2 788

Total charge nette dette (hors swaps)

42 450

45 382

Excédent opérations swaps (à déduire)

280

333

Total charge nette dette après swaps

42 170

45 049

N.B. : La prévision d’exécution est inférieure d’environ 1,5 milliard d’euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale pour 2010.

Comme de coutume, c’est évidemment la charge de la dette négociable qui regroupe la quasi-totalité des crédits nécessaires (imputés sur l’action n° 1 du programme), soit 44 718 millions d’euros.

Les intérêts de la dette non négociable (action n° 2) demeureraient négligeables, à 3 millions d’euros en 2011 comme en 2010 (41).

De plus, comme en 2008 et 2009, la charge de la trésorerie de l’État (action n° 3) devrait se traduire par une dépense nette, les intérêts payés sur les comptes de dépôt des correspondants du Trésor étant appelés à excéder le produit des placements des excédents de trésorerie réalisés par l’État, sous l’effet d’une augmentation des encours rémunérés, du maintien d’un solde de trésorerie relativement bas et de conditions de placement sur les marchés moins favorables. La charge nette de la trésorerie s’établirait ainsi à 661 millions d’euros en 2011 après 123 millions d’euros en 2010.

Cette augmentation considérable des charges de trésorerie (+ 537 %) s’explique par l’augmentation de la rémunération des dotations non consommables pour le financement des investissements d’avenir et le plan Campus compte tenu de la montée en charge de la sélection des projets à financer et de la mise en œuvre des projets déjà sélectionnés.

Enfin, une vision plus fine de la charge de la dette en 2011 suppose de prendre en compte les opérations d’échange de taux d’intérêt (swaps). Si le programme de swaps est interrompu depuis 2002 (42), les contrats d’échange de taux d’intérêts « courts » initialement conclus sont en revanche toujours renouvelés, afin d’éviter une exposition de l’État à la volatilité des taux infra-annuels. Au 30 juin 2010, l’encours du portefeuille de swaps s’établissait encore à 18 milliards d’euros.

Les dépenses et recettes (43) résultant de ces opérations sont, depuis 2006, retracées sur la seconde section du compte de commerce Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État. Les excédents qui en découlent peuvent être déduits de la charge nette de la dette afin de disposer d’une vision plus juste de cette dernière. Après 273 millions d’euros en 2007, 156 millions d’euros en 2008, 140 millions d’euros en 2009, celle-ci devrait atteindre 280 millions d’euros en 2010 et 333 millions d’euros en 2011.

Dans ces conditions, la charge nette de la dette après swaps s’établirait à 45,0 milliards d’euros en 2011, en hausse de 2,9 milliards d’euros par rapport à la prévision en loi de finances pour 2010 (voir le tableau ci-dessous). Le solde budgétaire de l’État se trouverait ainsi en situation de déficit primaire, à hauteur de près de 46,9 milliards d’euros.

SYNTHÈSE DE LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

 

Exécution 2009

LFI
2010

LFR 1 2010

PLF
2011

Charge brute dette négociable

40 339

45 167

45 167

47 306

Charge brute dette non négociable

2

3

3

3

Charge brute gestion de la trésorerie

540

289

789

861

Total charge brute

40 881

45 459

45 959

48 170

Recettes d’ordre (à déduire)

3 256

3 009

3 009

2 788

Total charge nette de la dette (hors swaps)

37 625

42 450

42 950

45 382

Excédent opérations swaps (à déduire)

140

280

280

333

Total charge nette de la dette après swaps

37 485

42 170

42 670

45 049

Rapportée aux recettes fiscales nettes attendues l’année prochaine, la charge de la dette de l’État représenterait 17,7 % en 2011, après 17 % en 2010, 18,1 % en 2009 et 17 % en 2008.

Le graphique ci-après permet de constater que, depuis 2006, l’État consacre une part croissante de ses revenus au paiement des intérêts de sa dette.

ÉVOLUTION DE LA PART DES RECETTES FISCALES
CONSACRÉES AU PAIEMENT DE LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT

N.B. : L’histogramme rapporte la charge de la dette après swaps aux recettes fiscales nettes des remboursements et dégrèvements (échelle de gauche). La courbe rappelle l’évolution de la charge de la dette en milliards d’euros (échelle de droite).

Encore convient-il de préciser qu’en 2009 et 2010 le ratio entre la charge de la dette et les recettes fiscales nettes est, par rapport aux années précédentes, mécaniquement diminué par les changements de nomenclature entre recettes non fiscales et recettes fiscales effectués dans la loi de finances initiale pour 2009 (pour environ 5,2 milliards d’euros) et dans le projet de loi de finances pour 2010 (pour environ 4,2 milliards d’euros). À périmètre constant, c’est-à-dire avec la structure des recettes fiscales de 2008, le ratio s’établirait à 18,9 % en 2009 et à 17,4 % en 2010.

D.– LES RISQUES LIÉS AU SURENDETTEMENT PUBLIC

1.– Le risque d’une stérilisation durable des marges de manœuvre budgétaires de l’État

L’endettement d’hier avait un coût relativement modéré. Le surendettement d’aujourd’hui et plus encore celui de demain aura un coût sensiblement plus élevé, qui risque de priver l’État de toute marge de manœuvre budgétaire. En effet, selon les projections du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, la charge de la dette pourrait augmenter de 5,1 milliards d’euros en 2012 pour s’établir à 50,5 milliards d'euros et de 4,7 milliards en 2013 pour s’établir à 55,2 milliards d’euros.

Cette hausse s’expliquerait en premier lieu par un « effet volume » sur la dette de moyen et long terme (+ 3 milliards d'euros).

La prévision repose également sur une hausse des taux courts d’environ 110 points de base entre 2010 et 2011, partiellement compensée par les gains de refinancement dont l’État continuerait de bénéficier. Au total, l’« effet taux » contribuerait à hauteur de 1,5 milliard d’euros à l’augmentation de la charge de la dette.

Enfin, en lien avec la prévision d’inflation fixée à 1,75 % pour 2012 contre 1,5 % en 2011, la provision pour charge d’indexation croîtrait de 0,4 milliard d’euros. Le solde serait imputable à la rémunération des investissements d’avenir qui n’atteindrait sa pleine charge qu’en 2012 (+ 0,1 milliard d’euros).

Comme le graphique ci-après invite à le constater, le stock de dette accumulée est aujourd’hui tel que les variations annuelles de la charge de la dette ont, depuis 2008, véritablement changé d’échelle.

NB : Dépenses exécutées jusqu’en 2009 et prévisions révisées pour 2010-2013 du Gouvernement

Compte tenu de ces éléments, le Rapporteur spécial ne peut que regretter que l’accroissement de la charge de la dette couvre à lui seul presque l’intégralité de la progression des charges qu’autorise chaque année la norme de dépense à compter de 2012.

CALCUL DE LA NORME DE DÉPENSE « ZÉRO VOLUME » POUR 2011

(en milliards d’euros)

Dépenses prévues en PLF 2011

 

Dépenses nettes du budget général (hors relance) dont

– charges de la dette

– pensions

– dépenses de personnel

– autres dépenses du budget général

285,68

45,38

36,66

82,74

120,90

PSR Union européenne

18,24

PSR collectivités locales (hors relance FCTVA et hors compensation relais TP)

52,89

Dépenses totales (1)

356,88

Inflation prévisionnelle 2012

 

Indice des prix à la consommation hors tabac (programme de stabilité) (2)

1,75 %

Dépenses supplémentaires autorisées dans le PLF 2012 (1) x (2)

6,2

Étant donné l’évolution à la hausse des charges de pensions (+ 4,5 % entre 2011 et 2013), le gel des concours de l’État aux collectivités territoriales et l’introduction des nouvelles règles d’encadrement de la dépense publique résultant du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, le Gouvernement, s’il refuse toute augmentation d’impôt, n’aura pas d’autre choix que de réduire les dépenses des missions du budget général, pour respecter la norme « zéro volume » en 2012 ! Il est alors certain que la qualité de nos services publics va en pâtir.

La situation est d’autant plus grave que les prévisions du Gouvernement sont fondées sur l’hypothèse d’une remontée progressive des taux d’intérêt. Il pourrait, à moyen terme, en aller autrement. De ce point de vue, les projections présentées dans le PAP 2011 du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État montrent qu’une hausse des taux globale et pérenne de 1 %, répercutée sur l’ensemble de la courbe des taux, entraînerait une augmentation des intérêts de la dette d’environ 2 milliards d’euros dès la première année, de 4 milliards d’euros l’année suivante, de 6 milliards d’euros la troisième année, jusqu’à environ 14 milliards d’euros à un horizon de dix ans. Dans une telle situation, la charge de la dette deviendrait rapidement – probablement en 2014 ou en 2015 – le premier poste budgétaire de l’État, devant l’enseignement scolaire (44).

Encore faut-il avoir en mémoire que ces prévisions reposent sur des hypothèses particulièrement favorables de croissance, et donc d’assainissement des finances publiques. Le projet de loi de programmation des finances publiques précité prévoit en effet une diminution du déficit de l’État de 152 milliards d’euros en 2010 à 92 milliards d’euros en 2011 puis 72 milliards d’euros en 2012, 52 milliards d’euros en 2013 et 42 milliards d’euros en 2014.

Avec une croissance du PIB de 2 % en volume en 2011 et 2,5 % entre 2012 et 2014, et à supposer que les exécutions budgétaires 2010 et 2011 soient conformes aux prévisions, le déficit de l’État reviendrait à un niveau stabilisant la progression de l’endettement en 2013.

Or, le graphique ci-après, établi à partir des hypothèses économiques et budgétaires du Gouvernement, montre les très forts écarts entre le déficit stabilisant la dette et le déficit prévu pour 2010 et 2011.

COMPARAISON DU DÉFICIT STABILISANT LA DETTE DE L’ÉTAT
ET DU DÉFICIT EFFECTIF DE L’ÉTAT

(Comptabilité budgétaire, en milliards d’euros)

Sources : exécution budgétaire jusqu’à 2009 ; loi de finances rectificative du 9 mars 2010 ; projet de loi de programmation des finances publiques 2011-2014 ; calculs de votre Rapporteur spécial.

2.– Le risque d’emballement de la dette publique

● Au-delà de la seule dette de l’État, l’analyse mérite d’être élargie à l’ensemble de la dette publique, qui inclut également les passifs des organismes divers d’administration centrale (ODAC), des administrations publiques locales et des administrations de sécurité sociale. En 2010, la contribution de chaque sous secteur des administrations publiques à l’endettement public exprimé en point de PIB est retracée dans le tableau ci-après.

DÉCOMPOSITION PAR SECTEUR DE LA DETTE PUBLIQUE EN 2010

Dette publique à la fin 2010

En % de PIB

En % de la dette totale

 

82,9 %

100 %

Contribution de l’État

64,4%

77,68%

Contribution des organismes divers d’administration centrale (ODAC)

5,5%

6,63%

Contribution des administrations publiques locales (APUL)

8,6%

10,37%

Contribution des administrations de sécurité sociale (ASSO)

4,50%

5,43%

Source : ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État.

LA GESTION DE LA DETTE SOCIALE

L’évolution des déficits du régime général et du financement de notre dette sociale, met en évidence le risque financier auquel le système est aujourd’hui confronté, avec l’exceptionnelle aggravation des déficits sur les deux derniers exercices, liée en grande partie à la crise et à son effet dévastateur sur la masse salariale. Ce sont en effet plus de 87 milliards d’euros de déficits cumulés que le régime général et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) vont enregistrer de 2009 à 2011. Il s’agit d’un véritable « risque dans le risque », un risque financier endogène à notre système de sécurité sociale, qui se matérialise aujourd’hui : comment en effet garantir le financement des déficits passés, garantir celui des déficits structurels à venir et amortir la dette sociale dans un contexte où les montants en jeu atteignent de telles proportions et où, plus que jamais, la qualité de la signature publique doit être sauvegardée vis-à-vis des marchés ?

Le texte initial de la loi organique relatif à la gestion de la dette sociale a fixé le cadre suivant : une reprise de dette de près de 130 milliards d’euros au total, qui se matérialise essentiellement en PLFSS et en PLF pour 2011, autour de trois points essentiels :

un report de quatre ans de l’échéance d’amortissement de la CADES pour permettre le transfert de 34 milliards d’euros, correspondant à la « dette de crise » du régime général et du FSV sur 2009 et 2010 ;

des recettes nouvelles à hauteur de 3,2 milliards d’euros non pérennes qui seraient affectées à la Caisse pour permettre la reprise des déficits hors crise du régime général et du FSV sur 2009 et 2010, ainsi que le déficit prévisionnel 2011 de la branche maladie et de la branche famille.

– enfin, les actifs du FRR et le produit du prélèvement social de 2 % sur les produits de placement qui lui est affecté à hauteur de 65 % serviraient à assurer la reprise par la Caisse des déficits cumulés à venir de la branche vieillesse et du FSV sur la période 2011-2018. Ce sont ainsi 3,6 milliards d’euros qui seraient mobilisables chaque année par la CADES (2,1 milliards d’euros au titre du décaissement, linéaire, des actifs du FRR et 1,5 milliard d’euros au titre de la recette issue du prélèvement de 2 %).

Sans remettre en cause le schéma de financement global de la dette, un certain nombre de modifications devraient être apportées par voie d’amendements :

– un premier amendement à l’article 9 du PLFSS permettrait d’affecter à la CADES 0,28 point de CSG, en provenance de la branche famille, de manière à lui confier les ressources pérennes nécessaires pour tenir, en prévision, son calendrier d’amortissement et respecter la future règle organique qui dispose que l’assiette des impositions de toute nature affectées à la CADES porte sur l’ensemble des revenus des personnes physiques. Les recettes initiales envisagées à hauteur de 3,2 milliards d’euros seraient en contrepartie affectées à la CNAF.

– un deuxième amendement introduisant un article additionnel après l’article 12 du PLFSS affecterait pour solde de tout compte les recettes du panier de compensation des allègements généraux à la sécurité sociale (dit « panier Fillon ») à compter de 2011 : cette opération permettrait d’accroître les ressources de cette dernière compte tenu de l’excédent prévisionnel des recettes du panier par rapport au coût des exonérations.

– un troisième amendement à l’article 14 du PLFSS pour le mettre en cohérence les amendements précédents puisque cet article prévoit l’affectation de nouvelles ressources au FSV afin que celui-ci bénéficie de l’effort en recettes décidé dans le cadre de la réforme des retraites. Il est ainsi prévu à cet article d’attribuer au Fonds le rendement d’une part égale à 16,7% de la taxe sur les salaires, soit le rendement de la mesure d’annualisation du calcul des allègements généraux en « débasant » d’autant le panier « Fillon » en raison de cette baisse du coût des exonérations.

– un amendement de coordination consistant à supprimer l’article 40 du présent projet de loi de finances au bénéfice de la rédaction retenue dans l’amendement procédant à l’affectation définitive de l’ensemble des taxes du panier. La part « État » serait majorée à cette occasion pour tenir compte de la mesure périmétrique sur la taxe sur les salaires mentionnée plus haut.

Or, il faut rappeler qu’une dette publique importante n’est pas nécessairement problématique, dès lors que l’évolution de l’endettement reste compatible avec le maintien de la solvabilité à moyen terme des administrations publiques. Seul un endettement incontrôlé peut être source de multiples effets d’éviction :

– en limitant, au sein des dépenses publiques, les marges de manœuvre des pouvoirs publics ;

– en détournant l’épargne privée du financement de l’économie, au détriment de l’investissement des entreprises. L’économie japonaise fournit une illustration d’une telle situation depuis la fin des années 1990 ;

– en encourageant une épargne de précaution chez les ménages anticipant de futures augmentations des prélèvements obligatoires, entraînant un affaissement de la demande intérieure. La récession de 1993 a par exemple fait bondir le taux d’épargne des ménages de 14,6 % à 15,5 % de leur revenu disponible brut d’une année sur l’autre ;

– en conduisant à l’augmentation des taux d’intérêt à long terme, dissuadant l’investissement du secteur privé. Pour l’instant évité par des politiques monétaires particulièrement expansionnistes (mesures « non conventionnelles » des banques centrales permettant la monétisation directe ou indirecte des dettes publiques ; accumulation de réserves de change par les pays émergents), cet écueil pourrait resurgir lorsque les banques centrales procéderont à une normalisation de leurs politiques.

Face à ces multiples risques, la réponse du Gouvernement ne paraît pas à la hauteur des enjeux. En effet, l’emballement actuel de la dette – commencé bien avant la crise – est de nature à faire douter de la soutenabilité de nos comptes publics. À cet égard, les hypothèses associées au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 font état d’une sensible augmentation du taux d’endettement public entre 2010 (78,1 % du PIB) et 2012 (87,4 % du PIB) avant d’espérer un possible retournement de la tendance en 2013 (86,8 % du PIB).

 Pour le Rapporteur spécial, les perspectives pluriannuelles pour les années 2011 à 2014 appellent trois séries de réserves.

En premier lieu, si le Gouvernement se montre plutôt optimiste dans sa prévision de croissance pour 2011 (+ 2 % en volume), il s’emporte à rêver à une croissance de 2,5 % par an en volume sur l’ensemble de la période 2012-2014 couplée à une inflation prévisionnelle de 1,75 %, niveaux qui ne faibliraient pas jusqu’à la fin de la période considérée.

Or, rien ne garantit un rebond économique de cette ampleur, ni a fortiori le maintien d’un tel niveau d’activité pendant trois années. Comme le montre le Rapporteur général dans son exposé général relatif au projet de loi de finances pour 2011 (45), la plupart des économistes anticipent en France dès 2011 une croissance molle qui ne saurait dépasser 2 % du PIB. La reprise économique s’annonce donc très graduelle, dans un contexte d’affaiblissement de la croissance potentielle de l’économie.

CROISSANCE DU PIB EN FRANCE EN 2011
Prévision du gouvernement comparée aux prévisions du groupe technique

(en % du PIB)

CROISSANCE DU PIB EN FRANCE (46)
Prévision du Gouvernement comparée à une synthèse des prévisions du groupe technique

(en %)

En deuxième lieu, le « tabou » régnant autour de toute idée de relèvement de la pression fiscale conduit le Gouvernement à faire porter l’essentiel de l’ajustement budgétaire annoncé pour 2011-2013 sur la limitation des dépenses publiques.

Les perspectives gouvernementales intègrent un ralentissement de leur rythme d’évolution, à 0,8 % en volume en moyenne annuelle. La crédibilité d’un tel objectif, qui suppose de diviser par trois le rythme de la dépense publique(47), était déjà sujette à caution avant la crise : elle l’est davantage dans le contexte d’après-crise, ne serait-ce qu’en raison de l’inéluctable augmentation de la charge de la dette dans les prochaines années.

En ne jouant que sur ces deux aléas susceptibles d’affecter la crédibilité des perspectives pluriannuelles associées au présent projet de loi de finances, le Rapporteur spécial expose ci-après deux variantes possibles du scénario d’évolution de la dette publique présenté par le Gouvernement.

ÉVOLUTIONS PRÉVISIONNELLES DE LA DETTE PUBLIQUE À L’HORIZON 2014

Le scénario moyen se fonde d’une part sur la moyenne des prévisions de croissance du groupe technique de la Commission économique de la Nation réuni le 8 octobre 2010, soit +1,5 % du PIB en 2011. Il est fait l’hypothèse d’une croissance de 1,5 % du PIB en 2012 et 2 % du PIB en 2013 et 2014. D’autre part, ce scénario repose sur une hypothèse de réduction du rythme de progression des dépenses publiques de moitié par rapport à la tendance 2000-2008 (+ 2,3 % par an en moyenne), soit +1,1 % par an. Ce scénario implique une réduction du déficit public progressive à partir de 2011 et rejoint l’hypothèse moyenne du groupe technique selon laquelle le déficit public serait proche de 6,5 % du PIB en 2011.

Dans un tel scénario qui peut être considéré comme raisonnable, il apparaît que la dette publique n’est pas maîtrisée et qu’elle dépasse 90% du PIB en 2012 et dépasse 100% du PIB en 2014. Or, selon une analyse récente, menée par Reinhart et Rogoff (48), au regard de l’évolution de la dette et de la croissance de 20 pays avancés depuis plus d’un siècle, une dette supérieure à 90 % du PIB est associée à une croissance très inférieure à la moyenne.

Le scénario « bas » se veut volontairement pessimiste afin de montrer les risques liés à une faible croissance en terme d’insoutenabilité de la dette publique. Il est donc fait l’hypothèse d’une reprise économique lente marquée par une croissance de 1 % en 2011, 1,5 % du PIB en 2012 et 2013 avant de remonter à 2 % en 2014. En outre, il est fait l’hypothèse d’une réduction du rythme de progression des dépenses publiques très progressive passant de 2,3 % en 2011 à + 0,8 % en 2014. Ce scénario montre que la dette publique deviendrait très rapidement insoutenable : elle atteindrait 93,4 % du PIB en 2012 et dépasserait 100 % du PIB en 2014.

SYNTHÈSE DES HYPOTHÈSES RETENUES POUR LES TROIS SCÉNARII*

     

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Scénario du Gouvernement

             

PIB en volume

   

– 2,6 %

1,50 %

2,00 %

2,5 %

2,5 %

2,5 %

Élasticité des recettes

     

1,1

1,1

1,1

1,0

1,0

Dépenses en volume

   

3,7 %

0,8 %

0,8 %

0,8 %

0,8 %

0,8 %

Solde public

   

– 7,6 %

– 7,3 %

– 6,0 %

– 4,8 %

– 3,5 %

– 2,5 %

Dette

   

78,1 %

83,3 %

86,5 %

87,8 %

87,7 %

86,7 %

Scénario moyen

             

PIB en volume

 

– 2,6 %

1,5 %

1,5 %

1,5 %

2,0 %

2,0 %

Élasticité des recettes

   

1,1

1,1

1,1

1,0

1,0

Dépenses en volume

 

3,7 %

1,1 %

1,1 %

1,1 %

1,1 %

1,1 %

Solde public

   

– 7,6 %

– 7,3 %

– 6,5 %

– 5,8 %

– 5,0 %

– 4,4 %

Dette

   

78,1 %

83,4 %

87,4 %

90,5 %

92,3 %

93,3 %

Scénario bas

               

PIB en volume

   

– 2,6 %

1,5 %

1,0 %

1,5 %

1,5 %

2,0 %

Élasticité des recettes

     

1,1

1,1

1,1

1,1

1,0

Dépenses en volume

   

3,7 %

2,3 %

2,3 %

2,0 %

1,5 %

0,8 %

Solde public

   

– 7,6 %

– 7,3 %

– 7,4 %

– 7,4 %

– 7,1 %

– 6,3 %

Dette

   

78,1 %

83,4 %

88,7 %

93,4 %

97,5 %

100,3 %

* Calculs du Rapporteur spécial à partir des hypothèses du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 appliquées aux données définitives 2009, INSEE.

*

* *

II.– LE PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT :
DES FINALITÉS HÉTÉROGÈNES

Placé sous la responsabilité du directeur général du Trésor, le programme Appels en garantie de l’État retrace les dépenses budgétaires découlant de la mise en jeu de la garantie de l’État. Conformément à l’article 10 de la LOLF, les crédits de ce programme sont évaluatifs.

Le présent projet de loi de finances propose d’ouvrir 227,3 millions d’euros de crédits pour 2011, soit 20,5 millions d’euros de moins que le montant prévu en 2010 (49).

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT

Du fait de son indulgence, le volet « performance » du PAP 2011 appelle peu de commentaires. Le Rapporteur spécial renvoie sur ce sujet à son analyse du RAP annexé au projet de loi de règlement du budget de l’année 2009 (50), ainsi qu’à son appréciation globale du dispositif de performance associé au programme, présentée dans le rapport d’information que la commission des Finances a consacré à la performance en juin 2009 (51).

Pour 2011, les objectifs assignés à l’action Développement international de l’économie française – la seule à faire l’objet d’une mesure de la performance – sont strictement identiques à ceux de la loi de finances initiale pour 2010. Il s’agit :

– du maintien d’une cible de « risque pays » du portefeuille de l’assurance-crédit géré par la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface) compris entre 2 et 4,5 ;

– de la gestion à l’équilibre du dispositif de garantie de change (mesurée par l’indicateur dit de « position nette réévaluée ») ;

– de l’objectif de faire bénéficier de la garantie de change 120 entreprises, dont 20 PME (à comparer à une réalisation de 115 entreprises, dont 20 PME, en 2008) ;

– d’un effet de levier de l’assurance prospection permettant de voir un euro versé générer vingt euros d’exportations ;

– d’un taux de retour de l’assurance prospection en fin de période garantie de 25 %, soit le même niveau que le taux constaté en 2008.

B.– LES DÉPENSES DU PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT

Le tableau ci-après présente les crédits et les dépenses correspondant à l’ensemble des garanties couvertes par le programme.

CRÉDITS ET DÉPENSES DES PROCÉDURES DE GARANTIE DU PROGRAMME

(AE=CP, en millions d’euros)

Actions

Agriculture et environnement

Soutien au domaine social, logement, santé

Financement des entreprises et industrie

Développement international de l’économie française

Autres garanties

Total

2007

Crédits initiaux

5,5

23,5

32

52

179,1

292,6

Dépenses

21,8

13

40,7

206,9

282,5

2008

Crédits initiaux

2,5

24

16

52

192,8

287,7

Dépenses

22,1

37,7

174,0

234,0

2009

Crédits initiaux

1,1

25

16

68

168,5

278,8

Dépenses

22,2

15,9

77,5

82,8

120,9

2010

Crédits initiaux

1,1

26

86,1

134,4

247,8

Dépenses (a)

23,8

nc

0,4

24,2

2011

Crédits initiaux

1,1

28,8

122,5

74,9

227,3

Dépenses

(a) Au 1er octobre 2010.

1.– L’action Agriculture et environnement

Comme pour 2010, les seules dépenses attendues sur l’action Agriculture et environnement l’année prochaine sont liées aux appels en garantie de l’État par la Caisse régionale du Crédit agricole corse dans le cadre de la procédure d’abandon de créances et de restructuration de la dette des agriculteurs installés en Corse. Les crédits nécessaires pour 2011 sont de 1,1 million d’euros, un montant identique à celui de 2010 et 2009.

2.– L’action Soutien au domaine social, logement, santé

Les dépenses les plus significatives sur cette action concernent les prêts à l’accession sociale (PAS) et les prêts à taux zéro (PTZ) antérieurs à 2007, engagements pris en charge jusqu’à 2006 par la société chargée de gérer le Fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (FGAS). Le Rapporteur spécial rappelle que l’article 34 de la loi de finances pour 2006 a organisé la reprise par l’État de la totalité des engagements antérieurement souscrits par cette société, les disponibilités du FGAS au 31 décembre 2005 étant corrélativement reversées en totalité au budget de l’État. Désormais, ce dernier indemnise donc les établissements de crédit en fonction des sinistres constatés et non plus par le versement d’une cotisation annuelle à un fonds (52).

Cette réforme entraîne deux types de dépenses sur l’action Soutien au domaine social, logement, santé :

– l’indemnisation des sinistres des prêts PAS et PTZ des générations 1993 à 2006, soit un encours au 1er janvier 2010 estimé à 31,9 millions d’euros. En 2011, la dépense serait de 5 millions d’euros (soit 1,9 million d’euros de plus qu’en loi de finances pour 2009). Toutefois, l’évolution contrastée des prix sur le marché immobilier incite, selon les termes du PAP, « à être prudent sur la prévision des sinistres » ;

– le remboursement d’une créance conditionnelle des établissements de crédit d’un montant total de 100 millions d’euros, réparti entre chacun d’eux. Le remboursement effectif de cette créance est conditionné, pour chaque établissement, au maintien de la sinistralité constatée sur les prêts repris par l’État à une valeur inférieure au plafond de malus tel qu’il résulte des conventions en vigueur. Le montant annuel du remboursement est égal au cinquième de la créance totale, soit 20 millions d’euros. S’y ajoutent des intérêts, qui s’élèvent à 3,6 millions d’euros en 2011, portant la dépense totale à 23,6 millions d’euros (53).

RÉPARTITION DU MONTANT DE LA CRÉANCE CONDITIONNELLE

(en milliers d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

Total

Principal

20 000

20 000

20 000

20 000

20 000

100 000

Intérêts

903,7

1 543,4

2 202,6

2 882

3 582,2

11 114,9

Total

20 903,7

21 543,4

22 202,6

22 882

23 582,2

111 114,9

Source : ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi.

En ajoutant les dépenses liées aux prêts de consolidation consentis aux rapatriés (100 000 euros) et à la garantie donnée par l’État au Crédit foncier de France et à Entenial au titre des prêts complémentaires aux fonctionnaires (100 000 euros), les dépenses totales sur l’action Soutien au domaine social, logement, santé atteindraient 28,8 millions d’euros en 2011, après 26,2 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2010.

3.– L’action Financement des entreprises et industrie

Comme en 2010, aucune dépense n’est prévue pour 2011 sur cette action, qui retrace notamment la garantie accordée à la Société de financement de l’économie française (54) (SFEF), la garantie accordée à la Société de prises de participation de l’État (55), les prêts octroyés avec la garantie de l’État et les autres garanties de passif.

L’encours couvert par ces garanties s’établissait à 26 millions d’euros au 1er janvier 2010, après 53,7 millions d’euros au 1er janvier 2009.

4.– L’action Développement international de l’économie française

Cette action regroupe les crédits consacrés aux garanties à l’exportation. Elle se compose de six sous-actions, chacune correspondant à un instrument mis par l’État à la disposition des exportateurs. À l’exception de la garantie de taux d’intérêt qui relève directement de Natixis, l’ensemble de ces procédures de garantie est géré par la Coface (56). Cette dernière exerce en effet à la fois des activités pour son compte propre (assurance-crédit, information commerciale, recouvrement de créances) et des activités pour le compte de l’État.

Le tableau ci-après présente les crédits consacrés à l’action Développement international de l’économie française de 2009 à 2011.

CRÉDITS DE L’ACTION DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE

(en millions d’euros)

 

2009

LFI
2010

PLF
2011

 

LFI

Exécution

Assurance-crédit

Assurance prospection

52

67,9

63

95,3

Risque de change

6

2

Risque économique

14

4,9

8,6

5,6

Stabilisation de taux d’intérêt

Risque exportateur

2

4,7

8,5

19,6

Total action

68

77,5

86,1

122,5

● L’assurance-crédit couvre un exportateur (assurance-crédit fournisseur) ou sa banque (assurance-crédit acheteur) contre le risque de défaut de remboursement d’un crédit à l’exportation. Fin 2009, l’encours couvert par ce dispositif s’établissait à 52,9 milliards d’euros.

Depuis 1995, l’assurance-crédit présente un solde excédentaire et ne suscite donc plus de dépense budgétaire. Le tableau ci-après permet cependant de constater que si les produits perçus par la Coface continuent de dépasser les indemnités versées, les récupérations prévues en 2009 et 2010 sont nettement inférieures à celles des années précédentes. Cette diminution apparaît comme le « contrecoup » des nombreux remboursements anticipés enregistrés en 2005, 2006 et, dans une moindre mesure, 2007 et 2008 (57). De même, le montant des indemnités a encore diminué en 2009 pour atteindre son niveau historique le plus bas. Cette évolution à la baisse a surtout été enregistrée sur le risque politique.

RÉSULTAT COMPTABLE DES PROCÉDURES COFACE (assurance-crédit)

(en millions d’euros)

 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

I. Produits

             

Récupérations

1 524

1 806

2 982

5 558

1 519

2 307

973

Primes

241

216

155

206

159

131

179

II. Charges

             

Indemnités

485

384

254

87

31

27

13

Résultat brut

1 280

1 638

2 883

5 677

1 648

2 411

1 139

Source : Coface.

Les excédents dégagés par la Coface permettent à l’État de la mettre à contribution pour abonder ses propres recettes (58). Ainsi, 2,9 milliards d’euros ont été prélevés en 2007, puis 2,5 milliards d’euros en 2008, afin d’abonder les recettes non fiscales du budget général. Du fait de la diminution du résultat de l’assurance-crédit, le prélèvement de l’État sur la trésorerie de la Coface ne cesse cependant de diminuer : un milliard d’euros en 2009, 850 millions d’euros en 2010 et seulement 600 millions prévus pour 2011.

Toutefois, comme l’a relevé M. le Rapporteur général l’année dernière, « compte tenu des difficultés actuelles du secteur de l’assurance-crédit, il n’est pas impossible que l’État doive renoncer à tout ou partie de ce prélèvement » (59). Il faut en ce sens rappeler qu’au premier semestre 2008, Eurostat a considéré que l’État ne pouvait s’octroyer une recette supérieure au résultat d’exploitation de la Coface, requalifiant en conséquence la fraction de la recette excédant ce résultat courant (soit 1,3 milliard d’euros) et majorant d’autant le déficit 2007 de l’État en comptabilité nationale.

PRÉLÈVEMENT DE L’ÉTAT SUR LA COFACE

(en millions d’euros)

2007

Exécution

2 900

2008

Exécution

2 500

2009

LFI 2009

1 500

Révisé 2009 du présent PLF

1 000

2010

LFI 2010

700

Révisé 2010

850

2011

Présent PLF

600

● Gérée elle aussi par la Coface, l’assurance prospection a pour objet, d’une part, de couvrir les dépenses de prospection des entreprises recherchant de nouveaux marchés (moyennant le paiement d’une prime) et, d’autre part, de couvrir les frais engagés dans la participation à une manifestation commerciale agréée.

Le présent projet prévoit une dépense de 95,3 millions d’euros à ce titre en 2011, soit une augmentation de 50% par rapport à la loi de finances initiale pour 2010 (63 millions d’euros). Cette augmentation résulte d’une dégradation du solde entre les indemnisations qui ont fortement progressé (+ 28 millions d’euros), d’une part, et les récupérations et primes, d’autre part. Selon le PAP, l’augmentation attendue des indemnités est « due au recours croissant des entreprises à cette procédure suite aux réformes de janvier 2008 et de juin 2009 ».

Ces réformes (60) ont en effet rendu cette procédure plus attractive, notamment pour les entreprises innovantes. L’objectif est de parvenir, d’ici à 2012, à un stock de 10 000 entreprises bénéficiaires de l’assurance prospection (à comparer à environ 5 000 actuellement), générant un chiffre d’affaires à l’exportation de 1,8 milliard d’euros (au lieu de 0,7 milliard d’euros en 2008). Le coût de gestion de cette procédure a par ailleurs été maîtrisé puisqu’il est passé de 15,8 millions d’euros à 13,5 millions d’euros grâce à l’avenant signé à l’automne 2009.

● La garantie de change offre une protection contre la baisse éventuelle des devises de facturation des exportations. Elle permet de couvrir le risque de change auquel les exportateurs français font face lors d’appels d’offres internationaux concurrentiels (entre la remise d’une offre et la signature éventuelle du contrat, puis pendant la période de paiement). Cette procédure fonctionne selon un impératif de gestion à l’équilibre et généralement sans coût budgétaire pour l’État. Les crédits demandés pour 2011 s’élèvent à 2 millions d’euros, ce qui, selon les informations elliptiques fournies par le PAP, « correspond à une estimation des coûts de gestion de la procédure » (l’an passé évalués à 6 millions d’euros).

● La garantie du risque économique a pour objet de couvrir les entreprises contre la dérive de leurs prix de revient dans les marchés d’exportation conclus à prix fermes ou à prix révisables plafonnés et relatifs à la fourniture d’équipements élaborés. Du fait de la modération de l’inflation et, partant, de l’absence de nouveaux bénéficiaires, l’encours garanti diminue sans discontinuer depuis plusieurs années car aucun nouvel encours n’a été ouvert depuis 2004. Compte tenu des engagements antérieurs, les crédits relatifs à cette action seraient de 5,6 millions d’euros en 2011, soit 3 millions d’euros de moins que dans la loi de finances initiale pour 2010.

● La garantie de taux d’intérêt de crédits à l’exportation constitue l’une des missions assurées par Natixis pour le compte de l’État (61). Elle permet de proposer à un emprunteur étranger, au moment de l’offre d’un contrat commercial, un taux fixe défini par les autorités françaises selon les règles de l’« arrangement OCDE » (62) sur les crédits à l’exportation. Natixis prend en charge – ou reçoit – le différentiel entre le taux du crédit et le coût de la ressource bancaire, majoré d’une marge définie par l’État. En outre, Natixis peut procéder à la mise en place d’opérations de couverture du risque de taux, afin de constituer un portefeuille de swaps « payeurs » annulant le risque supporté par l’État qui est engagé dans des flux opposés.

À l’instar de ces dernières années, aucun crédit n’est prévu à ce titre pour 2011, du fait de prévisions excédentaires offertes par les couvertures mises en place sur les marchés financiers.

● La garantie du risque exportateur, sixième sous-action du programme introduite depuis 2008, regroupe deux garanties créées en 2005 et 2006 :

– la garantie des cautions permet à un exportateur d’honorer un contrat à l’international en lui fournissant les cautions de bonne fin et de restitution d’acomptes exigées par l’acheteur ;

– la garantie des préfinancements, qui couvre un prêt consenti par une banque pour financer le lancement d’un contrat d’exportation.

La dépense budgétaire prévue à ce titre pour 2011 explose pour atteindre 19,6 millions d’euros (contre 8,5 millions d’euros en la loi de finances initiale pour 2010). Cette évolution s’explique par la montée en puissance de la réforme de la procédure à l’automne 2008 (suppression des seuils quantitatifs ; relèvement des quotités garanties ; relèvement du niveau de chiffres d’affaires en deçà duquel les entreprises bénéficient d’une quotité garantie majorée). Ce coût reflète une faible augmentation des primes (+ 2,5 millions d’euros) mais des versements d’indemnités bien plus importants (+ 18 millions d’euros) avec des récupérations qui seront étalées dans le temps.

À titre de synthèse, le tableau ci-après présente les encours garantis par les procédures de garanties précédemment décrites (hors risque exportateur).

ENCOURS GARANTIS PAR LES PROCÉDURES COFACE

(en millions d’euros)

Sous-actions

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

1. Assurance-crédit

58 308

51 540

50 357

42 956

42 111

42 401

52 918

dont moyen terme

55 930

49 482

48 702

42 475

41 774

42 134

52 683

dont court terme

2 378

2 058

1 655

482

337

267

235

2. Assurance prospection

121

107

106

110

123

148

200

3. Garantie de change

3 420

2 360

1 930

1 900

2 104

1 690

1 200

4. Risque économique : montant transférable des contrats conclus

4 942

4 749

4 607

4 277

4 228

4 069

3 945

5. Stabilisation de taux d’intérêt

             

Euro

3 900

3 200

3 036

2 689

2 348

2 352

2 668

Dollar

8 900

7 800

5 350

5 395

4 529

4 141

3 764

Source : ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi.

Ce tableau permet de constater la diminution globale, depuis plusieurs années, des encours couverts par les procédures d’aide à l’exportation gérées par la Coface. Toutefois, on observe en 2009 une légère hausse de certains encours garantis, en particulier ceux couverts par le dispositif d’assurance-crédit (+ 25 %).

Par ordre décroissant, les risques garantis par l’assurance-crédit se concentraient, à la fin 2009, sur le Brésil (8,7 milliards), la Chine (4,4 milliards d’euros), le Luxembourg (2,8 milliards), l’Égypte (2,5 milliards), la Suisse (2,5 milliards d’euros), l’Afrique du Sud (2 milliards d’euros), le Maroc (1,4 milliard), la Russie (1,4 milliard), le Pakistan (1,3 milliard), l’Inde (1,2 milliard). Ces dix pays représentaient, à cette même date, 53 % de l’ensemble des encours. Quant aux principaux sinistres ayant entraîné des indemnisations par la Coface pour le compte de l’État, ils ont avant tout concerné, en cumul depuis 2005, des contrats en Jordanie, au Kazakhstan, au Brésil, au Pakistan, au Mexique et en Côte d’Ivoire. Toutefois, la « logique pays » est moins pertinente qu’autrefois : l’encours garanti par la Coface traduit aujourd’hui la prise de risques sur d’importants acheteurs privés, tout spécialement dans les secteurs spatial, naval et aéronautique. Une crise majeure dans ces secteurs pourrait donc générer des sinistres importants. Au 31 décembre 2009, la répartition des créances à échoir par secteur et par nature de débiteurs est récapitulée dans le tableau ci-après.

CRÉANCES À MOYEN TERME AU TITRE DE L’ASSURANCE CRÉDIT EN 2008

(en milliards d’euros)

 

Public

Privé

TOTAL

Airbus

2,0

5,9

7,9

ATR

0,1

0,3

0,4

Bateaux de croisière et ferries

6,2

6,2

Centrales nucléaires

3,5

0,7

4,2

Équipements militaires

5,3

1,3

6,6

Autres

6,4

4,1

10,4

TOTAL

17,3

18,5

35,8

Source : ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi.

5.– L’action Autres garanties

En dépit de la diversité de son objet, cette action est la plus importante du programme Appels en garantie de l’État en volume de crédits. En 2011, elle mobiliserait en effet plus de 33 % des dépenses, soit 74,9 millions d’euros (après 134,4 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2010, 184,5 millions d’euros en 2009 et 192,8 millions d’euros en 2008).

Une provision de 65,3 millions d’euros est constituée pour faire face à des appels en garantie non connus à ce stade (après une provision de 124,4 millions d’euros en 2009), l’essentiel des crédits de cette action concerne les garanties de l’État en faveur de dispositifs d’aide économique et financière au développement (63).

Ces garanties sont accordées afin de favoriser l’octroi de prêts sur fonds propres des établissements concernés – en particulier l’Agence française de développement (AFD) – ou pour faire face à un risque de retrait des États bénéficiaires du mécanisme de refinancement par don découlant du volet bilatéral de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE).

Il s’agit principalement :

– des prêts accordés par l’AFD aux pays de l’Afrique subsaharienne et aux pays éligibles à l’initiative PPTE ;

– des prêts accordés par l’AFD au titre de l’initiative PPTE et devant faire l’objet, dans le cadre du volet bilatéral complémentaire à cette initiative, d’un refinancement par dons (contrats de désendettement et de développement dits « C2D ») ;

– des prêts accordés par la Banque européenne d’investissement (BEI) aux États d’Afrique, des Caraïbes, du Pacifique et aux collectivités d’outre-mer dans le cadre de la mise en œuvre des conventions de Lomé et des accords de Cotonou.

Les mises en jeu de la garantie de l’État ne sont pas comptabilisées dans l’aide publique au développement (APD) au sens de l’OCDE. Toutefois, l’action Autres garanties retrace également les dépenses liées à l’indemnisation de Natixis en cas d’annulation par le Club de Paris de certaines créances garanties par l’État (64) : de telles annulations sont comptabilisées dans les statistiques d’aide publique au développement.

Pour 2011, les dépenses prévues se répartissent en deux catégories.

D’une part, 3 millions d’euros de crédits seraient nécessaires au titre des sinistres sur prêts de la BEI, compte tenu notamment de la situation de certains pays quant au risque induit de défaut de paiement.

D’autre part, les appels en garantie de l’AFD atteindraient 6,6 millions d’euros, du fait de la mise en œuvre de la garantie accordée par l’article 97 de la loi de finances initiale pour 2007 au bénéfice de la Facilité de financement internationale pour la vaccination (IFFIm) (65). Cette dernière, née d’une initiative conjointe du Royaume-Uni et de la France, affectataire de 10 % du produit de la contribution de solidarité sur les billets d’avion (66), vise à financer des programmes sanitaires dans les pays pauvres.

L’État a accordé sa garantie à l’AFD, afin que celle-ci couvre pour son compte, à hauteur de 372,8 millions d’euros au maximum, le remboursement d’une partie de la première émission obligataire de l’IFFIm, réalisée en novembre 2006. Cette garantie s’exerce dans l’hypothèse où le produit de la contribution sur les billets d’avion ne permet pas de couvrir l’intégralité des engagements de l’État envers l’IFFIm. Cela devrait être le cas en 2010 : le produit affecté de la contribution devrait s’établir à 16 millions d’euros, alors que le montant du remboursement dû à l’IFFIm s’élève à 22,6 millions d’euros (67). Le versement de 6,6 millions d’euros par le programme Appels en garantie de l’État couvrirait la différence, permettant à l’État d’honorer ses engagements.

*

* *

III.– LE PROGRAMME ÉPARGNE :
DU REPORT DE CHARGES AUX DÉPENSES FISCALES, UN CALIBRAGE INCERTAIN

Le programme Épargne mérite de retenir l’attention à un double titre : ses crédits sont régulièrement sous-évalués depuis 2006 ; les dépenses fiscales qui y sont rattachées, trois fois plus importantes que les crédits, représentent 5,6 % de l’ensemble des dépenses fiscales du budget de l’État en 2011.

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME ÉPARGNE

L’objet du programme Épargne est de favoriser et d’orienter l’épargne des ménages afin de permettre à l’économie française d’en retirer un bénéfice maximal.

1.– Favoriser l’investissement dans le logement

a) Favoriser l’accès au financement des organismes de logement social

Une partie des produits de l’épargne réglementée (livrets A, bleus, d’épargne populaire et de développement durable) est centralisée au fonds d’épargne géré par la Caisse des dépôts et consignations. Ces dépôts sont mobilisés notamment pour permettre aux organismes sociaux d’avoir accès à des moyens de financement attractifs, afin de favoriser le logement social.

Après un creux à 53,2 % en 2008, le pourcentage des ressources centralisées au fonds d’épargne employées au financement du logement social (indicateur n° 1.1) est à peine remonté à 56,4 % en 2009. En 2010 et 2011, il est prévu que cet indicateur dépasse 60 %. Cet objectif semble à première vue satisfaisant, car il paraît confirmer une tendance conduisant à diriger davantage de fonds vers le financement du logement social.

Cependant, pour séduisant que soit cet indicateur en termes d’affichage de volonté, il ne renseigne ni sur les besoins de financement des organismes de logement social, ni sur les montants effectivement prêtés. Il est donc peu pertinent. Le Rapporteur spécial a déjà préconisé l’utilisation d’un indicateur construit autour d’une évaluation de la part des ressources « fonds d’épargne » dans le total des ressources des organismes de logement social (68). Cet indicateur aurait l’avantage de mettre en évidence l’attractivité de la ressource publique. Jusqu’à présent, le Gouvernement ne s’y est pas montré favorable, en dépit des observations du Comité interministériel d’audit des programmes (CIAP), qui a notamment relevé que les objections opposées au Rapporteur spécial « ne sont pas entièrement convaincantes » (69).

L’indicateur n° 1.2 fournit des indications d’une utilité plus évidente. La marge moyenne des établissements de crédit sur les prêts locatifs sociaux (PLS) ne devrait pas excéder 10 points de base en 2011, après avoir vraisemblablement atteint un pic à 11 points de base en 2009. Ce résultat est à mettre en relation avec les marges nulles réalisées en 2007 et 2008. La tendance constatée est donc un brutal renchérissement de ce type de produit. Il est cependant difficile d’évaluer la fiabilité des prévisions pour 2011 : alors que la marge prévue pour 2009 ne devait pas excéder 5 points (PAP 2009), la prévision actualisée pour 2009 montre une marge de 11 points, soit plus de deux fois supérieure.

b) Favoriser l’accession à la propriété

Les dispositifs qui visent à faciliter l’accession à la propriété sont principalement les produits d’épargne logement : plans épargne logement (PEL) et, plus accessoirement, comptes épargne logement (CEL). Ces dispositifs ont un double objectif : ouvrir droit à un prêt, tout en permettant préalablement au bénéficiaire de se constituer un apport personnel.

Le taux de clôture de PEL donnant lieu à un prêt épargne logement est un indicateur pertinent du bon fonctionnement du mécanisme puisqu’il permet de vérifier que les PEL sont utilisés conformément à leur objectif (deuxième sous-indicateur de l’indicateur n° 1.3). La tendance récente semble marquée par une plus grande satisfaction des objectifs poursuivis. Le taux, qui était de 10,85 % en 2007 est passé à 19,29 % en 2008 et devrait atteindre 25 % en 2009. Un taux de 30 % est prévu pour 2010 et une cible de 40 % est fixée pour 2011. Cet indicateur est cependant imparfait, car il procède d’une comparaison en nombre et non en valeur. C’est pourquoi il est utilement complété par un indicateur rapportant l’encours des prêts à l’encours des dépôts (premier sous-indicateur de l’indicateur n° 1.3) (70). Ce taux de transformation des dépôts en prêts s’est, lui aussi, légèrement redressé en 2008, à 5,7 % et devrait atteindre 6,5 % en 2009 (voir le graphique ci-après). Cette tendance devrait se prolonger dans les années à venir, sous l’effet de la réforme de 2003, qui conditionne, pour les générations de PEL postérieures au 12 décembre 2002, l’octroi de la prime à la souscription effective d’un prêt (71).

ÉVOLUTION DE LA TRANSFORMATION DES DÉPÔTS D’ÉPARGNE LOGEMENT EN PRÊTS

(échelle de gauche en milliards d’euros)

Le prêt social de location-accession (PSLA) permet à certains locataires de logement social d’en devenir propriétaire. L’indicateur n° 1.2 (second sous-indicateur) fournit la marge moyenne des établissements de crédit sur le financement des PSLA accordés à partir des fonds d’épargne. Il est prévu que la marge n’excède pas 15 points de base en 2011. Pour 2010, la marge initialement prévue à 15 points de base a été actualisée à 10. S’il donne des informations relatives au coût du PSLA, cet indicateur ne permet pas de connaître le taux de satisfaction des demandes ou, mieux encore, le taux de satisfaction des demandes en fonction des ressources disponibles. Il ne permet donc pas d’apprécier toute l’ampleur du dispositif. Une approche comparative entre les conditions de financement couramment pratiquées par les établissements de crédit dans le cadre « normal » de l’accession à la propriété et dans le cadre des PSLA pourrait être un bon complément permettant d’apprécier qualitativement le dispositif.

Par ailleurs, en 2011, la part des « fonds libres » finançant les prêts à l’habitat devrait peu évoluer selon l’indicateur n° 1.3 (3ème sous-indicateur) : un léger reflux devrait être constaté avec une part de 95 %, après 96 % en 2010.

2.– Financer l’économie

À titre liminaire, il convient de souligner l’extrême complexité des dispositifs fiscaux rattachés au programme Épargne. La lisibilité est rendue plus difficile encore par la superposition de différentes réformes. Il est clair que cela prive une partie des bénéficiaires potentiels – ceux qui ne disposent pas de conseil – des avantages qu’ils pourraient retirer de tels dispositifs. Par suite, cela prive l’économie française d’une partie du bénéfice attendu de l’utilisation des mécanismes mis en place.

L’un des objectifs du programme Épargne est de stimuler le développement de l’épargne individuelle à long terme, afin de contribuer au financement des entreprises. Cet objectif est nouvellement affiché depuis le projet annuel de performance 2010. Précédemment, il en était fait mention dans l’évaluation des dépenses fiscales dites « à forts enjeux ». L’indicateur n° 3.1 montre que la part de l’assurance-vie dans l’épargne financière des Français s’élevait à 40 % en 2008 et 40,8 % en 2009. Elle devrait rester stable entre 2010 et 2011.

L’indicateur n° 3.2 donne des informations sur la destination des fonds collectés par les compagnies d’assurance dans le cadre des contrats d’assurance-vie. Pour les années 2010 et 2011, 50 % des fonds collectés devraient être utilisés conformément à l’objectif indiqué, c’est-à-dire la détention d’actions, d’obligations ou d’immeubles des entreprises (contre 53 % en 2009).

Ces deux indicateurs semblent pertinents pour apprécier la propension du dispositif à satisfaire l’objectif affiché. La proportion de 50 % de fonds finançant les entreprises paraît raisonnable, compte tenu des impératifs prudentiels qui doivent présider à la gestion des fonds d’assurance-vie. Il serait possible d’affiner cet indicateur en distinguant les fonds, selon qu’ils participent au financement d’entreprises françaises, européennes ou d’États tiers, ou encore de les ventiler par taille d’entreprise (TPE, PME, ETI, grandes entreprises). À ce titre, il est regrettable que ces informations, qui figuraient jusqu’en 2009, certes très partiellement, dans l’évaluation des dépenses fiscales « à forts enjeux », ne soient plus présentées dans le PAP.

B.– LES DÉPENSES DU PROGRAMME ÉPARGNE

1.– Les dépenses budgétaires : une sous-budgétisation chronique

a) L’action Épargne logement

Les produits d’épargne logement donnent lieu, sous certaines conditions, à l’octroi d’un prêt épargne logement et d’une prime versée par l’État. Comme le montre le tableau ci-après, l’action Épargne logement a été caractérisée depuis l’année 2006 par une sous-évaluation des crédits nécessaires au paiement des primes. Malgré l’augmentation des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2010 et la baisse des primes épargne logement depuis 2009, les reports de charges d’une année sur l’autre sont toujours monnaie courante et se traduisent par un découvert de l’État auprès du Crédit Foncier de France (CFF).

LES REPORTS DE CHARGES SUR L’ACTION ÉPARGNE LOGEMENT

(en millions d’euros)

 

2006

2007

2008

2009

2010 (prévision)

Crédits ouverts en loi de finances initiale

1 191,1

1 143,2

1 122

1 157

1 187,5(b)

Fonds appelés par le CFF (paiement des primes + frais de gestion)

1 794,6

1 489,4

1 610

911,6

612

Versement du Trésor au CFF (hors frais de gestion)

1 175(a)

1 142

1 119

1 156

1 186,5

Report de charges dues au titre de l’année n-1

95,7

495

622

963

719,2

Charges à payer au titre de l’année n

715,3

842

1 113

719,2

144,7

Ouverture de crédits en LFR ou par décret d’avance

220

220

150

0

n.d.

Charges restant à payer au titre de l’année n après LFR

495

623

963

719,2

144,7

(a) En 2006, la différence entre les crédits ouverts en LFI et les versements au CFF (15 millions d’euros) correspond au solde dû à la Banque Postale au titre du paiement des primes d’épargne logement lors du changement de statut de La Poste.

(b) Une réserve de 5 % a été appliquée en début de gestion 2010, soit 62,7 millions d’euros, à l’ensemble du programme 145, à ce jour maintenue. En conséquence, le montant des crédits effectivement ouvert n’est pas 1 250 millions d’euros mais 1 187,5 millions d’euros.

Source : ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi.

Depuis plusieurs années, l’action Épargne logement a été marquée par l’important mouvement de fermetures de PEL entraîné par les changements de leur régime fiscal et social décidés en 2005 (voir l’encadré ci-après).

LES MODIFICATIONS DU RÉGIME FISCAL ET SOCIAL DES PEL EN 2005

 L’article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (n° 2005-1579 du 19 décembre 2005) a fixé la date de versement des prélèvements sociaux sur les PEL :

– au 1er janvier 2006 pour les plans de plus de dix ans à cette date et pour ceux ouverts avant le 1er avril 1992 dont le terme est échu avant le 1er janvier 2006 ;

– à la date du dixième anniversaire du PEL ou, pour les PEL ouverts avant le 1er avril 1992, à leur date d’échéance ;

– lors du dénouement du PEL s’il intervient antérieurement au dixième anniversaire ou antérieurement à la date d’échéance pour ceux ouverts avant le 1er avril 1992 ;

– lors de leur inscription en compte, pour les intérêts courus à compter du 1er janvier 2006 sur des plans de plus de dix ans ou sur des plans ouverts avant le 1er avril 1992 dont le terme est échu.

 L’article 7 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) a prévu l’assujettissement à l’impôt sur le revenu des nouveaux intérêts générés à partir du 1er janvier 2006 sur les PEL détenus depuis plus de 12 ans (ou arrivés à l’échéance de leur contrat, pour les PEL ouverts avant le 1er avril 1992). Le contribuable peut choisir entre l’application du barème progressif de l’impôt sur le revenu ou le prélèvement forfaitaire libératoire.

Comme le montrent les tableaux reproduits ci-après, ces réformes ont amorcé un mouvement de « décollecte » à compter de l’année 2006, ce qui a donné lieu à l’augmentation du montant global des primes versées jusqu’en 2008.

Ce phénomène s’est traduit corrélativement par une forte hausse de la dépense budgétaire (1,4 milliard d’euros en 2006, contre 1,1 milliard en 2005). Au-delà du léger infléchissement constaté en 2007, la charge est restée élevée et a de nouveau augmenté en 2008. Les crédits ouverts en loi de finances initiale (1 122 millions d’euros) et les crédits supplémentaires ouverts en loi de finances rectificatives (150 millions d’euros) n’ont pas suffi à faire face aux charges incombant à l’action Épargne logement. La pratique du report de charges a donc été massivement utilisée entre 2006 et 2008. Le découvert de l’État auprès du Crédit foncier de France (CFF), établissement chargé de la liquidation des primes pour le compte de l’État, est passé de 95,7 millions d’euros à l’issue de l’année 2005 à 963 millions à l’issue de l’année 2008.

Cette sous-budgétisation a été mise en lumière à plusieurs reprises par le Rapporteur spécial qui dénonce notamment l’insincérité de la prévision budgétaire (72). Comme le montre l’encadré ci-après, la Cour des comptes a également souligné ce manquement. Il est toutefois constant qu’à terme, l’augmentation du versement des primes associées aux PEL ne doit pas s’interpréter comme un surcoût du dispositif, mais comme une dépense avancée : en tout état de cause, ces primes auraient dû être versées tôt ou tard.

LE POINT DE VUE DE LA COUR DES COMPTES
SUR LA GESTION BUDGÉTAIRE DES PRIMES D’ÉPARGNE LOGEMENT

Comme les années précédentes, les crédits ouverts en loi de finances [pour 2008] au titre des dépenses d’épargne logement ont été très insuffisants au regard des besoins, mais aussi des prévisions disponibles (de 466 millions d’euros en 2008 contre 593 et 332 millions d’euros en 2006 et 2007). Cet état de fait pouvait être expliqué, en 2006, par l’incertitude qui prévalait alors sur l’effet qu’aurait la modification, fin 2005, du régime fiscal et social de l’épargne logement sur le montant des remboursements par l’État des primes dues aux banques lors de la clôture par les ménages de leurs plans d’épargne logement. Il n’en était plus de même en 2007 et, a fortiori, en 2008.

L’insuffisante dotation du programme 145 Épargne constitue donc une entorse manifeste au principe de sincérité fixé par l’article 32 de la LOLF. Mais elle s’est accompagnée de deux autres irrégularités. Tout d’abord, l’État a financé cette dépense budgétaire par des avances de trésorerie du Crédit foncier de France (715 millions d'euros en 2006, 843 millions d'euros en 2007, 1 083 millions d'euros en 2008). Cette pratique contrevient en particulier à l’article 6 de la loi organique, en application duquel la loi de finances doit retracer l’ensemble des dépenses budgétaires de l’État.

De surcroît, outre qu’elles affectent le solde budgétaire, les modalités de financement des primes d’épargne logement retenues par le Gouvernement induisent des reports de charges croissants sur l’exercice suivant (495 millions d'euros en 2006, 623 millions d'euros en 2007, 953 millions d'euros en 2008). Ceci contrevient au principe de l’annualité budgétaire fixé par la LOLF.

Source : Rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l’État en 2008, p. 77.

L’année 2009 ouvre la voie vers une réduction du découvert de l’État auprès du CFF grâce à une baisse sensible du montant versé par le CFF au titre des primes associées aux PEL. Cette tendance se poursuit fort heureusement en 2010 sans pour autant résoudre toutes les difficultés.

ÉPARGNE LOGEMENT : ÉVOLUTION DE L’ENCOURS DES DÉPÔTS

(en milliards d’euros)

 

2005

2006

Écart

2007

Écart

2008

Écart

2009

Écart

Comptes

39,3

38,7

– 1,6 %

38,1

– 1,4 %

37,1

– 2,8 %

36,8

– 0,7 %

Plans

227,8

208,5

– 8,5 %

191,7

– 8,1 %

172,1

– 10,2 %

176,1

+ 2,4 %

Total

267,1

247,1

– 7,5 %

229,8

– 7,0 %

209,2

– 9,0 %

212,9

+ 1,8 %

Source : Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.

ÉPARGNE LOGEMENT : ÉVOLUTION DU MONTANT GLOBAL DES PRIMES VERSÉES

(en milliards d’euros)

 

2005

2006

Écart
%

2007

Écart

2008

Écart
%

2009

Écart
%

Comptes

48

34,4

– 28,4

48,5

+ 41,1

63,3

+ 30,4

54,7

– 13,55 %

Plans

1 049,7

1 749,9

+ 66,7

1 427,3

– 18,5

1 524,9

+ 6,8

853

– 44,06 %

Total

1 097,7

1 784,3

+ 62,6

1 475,8

– 17,3

1 588,1

+ 7,6

907

– 42,85 %

Source : ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi.

Deux facteurs semblent être à l’origine de cette baisse. D’une part, certaines générations de PEL (de 1997 à 1999) ayant atteint au moins 10 ou 12 ans d’ancienneté n’ont pas été clôturées, leur rémunération étant jugée plus intéressante que les taux des autres produits réglementés. D’autre part, les taux réglementés des prêts PEL peuvent apparaître peu intéressants au regard du taux moyen d’un prêt libre : ainsi, en juillet 2010, les taux du secteur concurrentiel se sont établis en moyenne à 3,39 % (hors assurance et coût des sûretés), soit un niveau proche des taux les plus bas observés au cours du quatrième trimestre 2005.

L’exécution 2010 montre que la tendance à la baisse se poursuit puisque le montant des primes s’élève à 414,2 millions d’euros au 31 août 2010, soit une réduction de 40 % par rapport au montant des primes réglé sur la même période en 2009. Néanmoins, les crédits ouverts en 2010 ne seront à nouveau pas suffisants pour couvrir la dépense due au titre des primes épargne logement car 60 % de ces crédits sont consacrés au règlement du montant de charge à payer au titre de 2009. Par conséquent, si le découvert de l’État auprès du CFF s’est fortement réduit en 2010, il devrait encore persister et s’élever à 144 millions d’euros (si la réserve n’est pas levée et à 82 millions d’euros si la réserve était levée avant la fin de l’année 2010).

Le graphique ci-après montre néanmoins que, pour la première fois depuis 2005, les dépenses de l’État au titre des primes d’épargne logement en 2009 sont en ligne avec les crédits initiaux.

CRÉDITS INITIAUX ET DÉPENSES BUDGÉTAIRES
AU TITRE DES PRIMES D’ÉPARGNE LOGEMENT

(en milliards d’euros)

Quelles sont donc les perspectives pour les années 2011 à 2013 ?

L’année 2011 devrait connaître une augmentation du montant de primes d’épargne-logement versées aux établissements de crédit par rapport à l’exécution 2010 (prévision fixée à environ 612 millions d’euros pour l’exercice 2010), pouvant aller jusqu’au niveau des crédits demandés en loi de finances initiale pour 2011(soit 1,116 milliard d’euros). Ce niveau serait cependant moins élevé (d’environ 10 %) que celui des crédits votés en loi de finances initiale pour 2010 (soit 1,249 milliard d’euros), mais également par rapport à la loi de finances initiale pour 2009 (– 3,6 %).

Cette situation s’explique par le fait que la génération de PEL de 2002, bénéficiant d’un montant de primes acquises très important (entre 2,4 et 2,6 milliards d'euros) aura 10 ans en 2012, date anniversaire à laquelle s’opèrent les prélèvements sociaux sur les intérêts. En prévision de cette échéance, les épargnants seront donc incités à clôturer leur PEL par anticipation dès 2011, le mouvement s’amplifiant en 2012.

Selon le Gouvernement, les crédits tels qu’évalués à ce jour pour 2012 (soit 1,124 milliard d’euros) et 2013 (soit 1,108 milliard d’euros) pour le règlement des primes épargne-logement devraient être en nette diminution par rapport aux années antérieures.

b) L’action Instruments de financement du logement

Consacrée essentiellement à des dispositifs en voie d’extinction (73), l’action Instruments de financement du logement est évanescente. La dépense budgétaire qui s’y rapporte devrait s’élever à 4,9 millions d’euros en 2011, à comparer à 4,4 millions d’euros en 2010 et 5,3 millions d’euros en 2009.

2.– Les dépenses fiscales : une réduction apparente

a) Un dispositif défaillant de prévision et de suivi

Les dépenses fiscales relatives au programme Épargne devraient représenter 5,6 % de l’ensemble des dépenses fiscales pour l’année 2011 contre 8,5 % en 2010 (hors plan de relance de l’économie). Le montant de ces dépenses fiscales devrait ainsi diminuer fortement, passant de 6,014 milliards d’euros en 2010 à 3,649 en 2011. Alors que la dépense fiscale relative au programme Épargne a connu une forte augmentation ces dernières années, le PAP 2011 pourrait laisser croire à une baisse de près de 40 % des dépenses fiscales du programme. Or, seules trois dépenses fiscales sont effectivement supprimées du programme 145 pour un montant de 0,5 milliard d’euros.

COÛT TOTAL DES DÉPENSES FISCALES RATTACHÉES AU PROGRAMME ÉPARGNE

(en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

Ensemble des dépenses fiscales rattachées au programme

4 976

5 616

6 024

6 014

3 649

Source : PAP 2009, 2010 et 2011.

COÛT DES DÉPENSES FISCALES SUPPRIMÉES DU PROGRAMME 145 EN 2011

(en millions d’euros en 2010)

100112 Déduction des cotisations versées au titre de l’épargne individuelle et facultative : PERP et produits assimilés (PREFON, COREM, CGOS)

410

140202 Abattement et crédit d’impôt en cas de reliquat d’abattement sur les produits imposables attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie d’une durée au moins égale à 8 ans

110

120139 Exonération des sommes prélevées sur un compte épargne temps pour alimenter un PERCO dans la limite de dix jours par an

< 0,5

Source : PAP 2010 et 2011.

Le tome II de l’annexe relative aux Voies et moyens indique cependant que les mesures n° 100112 et 120139 ne sont pas supprimées en 2011 mais seulement déclassées, c’est-à-dire désormais considérées comme des modalités de calcul de l’impôt, sans aucune explication complémentaire. Ce document budgétaire précise également que la dépense 140202 a fait l’objet d’un reclassement donnant lieu à une suppression de cette dépense suivie d’une fusion avec la dépense fiscale numérotée 140119 (Exonération ou imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie) sur recommandation de l’inspection générale des finances. Il reste néanmoins surprenant qu’après reclassement, l’évaluation de la dépense fiscale issue de la fusion et destinée à orienter l’épargne vers des produits de moyen ou de long terme soit de 1 milliard d’euro pour 2010 et 2011 alors que la seule dépense 140119 était évaluée à 3 milliards d’euros dans le PAP 2010.

En tout état de cause, l’évaluation des 27 dépenses fiscales du programme 145 en 2011 est inférieure de moitié à l’évaluation de ces mêmes dépenses en 2010 sans qu’aucune explication ne soit présentée dans les documents budgétaires.

De plus, sur les 27 dispositifs fiscaux mentionnés dans le PAP 2011, dix sont indiqués comme étant « non chiffrables », et trois ne sont pas pris en compte car ils représentent une dépense fiscale inférieure à 0,5 million d’euros. L’évaluation des dépenses fiscales en est rendue pour le moins approximative. Deux questions peuvent dès lors être soulevées : celle de l’opportunité de conserver des dispositifs d’importance très relative (inférieurs à 500 000 euros), ainsi que celle de l’appréciation de la performance de mesures qui ne sont pas chiffrables. Dans ce dernier cas, comment est-il possible de justifier de l’efficacité du dispositif, notamment de son bilan coût-avantage pour la collectivité ?

De plus, seules quatre dépenses font à l’heure actuelle l’objet d’une déclaration détaillée dans les bases d’imposition et peuvent, dès lors, être exactement chiffrées. Les autres dépenses sont en général estimées par le produit d’une base taxable et d’un taux marginal d’imposition. En l’absence de données déclaratives, l’administration est contrainte de caractériser les bénéficiaires des exonérations afin d’effectuer des recoupements avec les données figurant sur leurs déclarations fiscales. Cette méthode ne semble pas marquée du sceau de la précision. Un progrès doit cependant être relevé dans l’évaluation de certaines dépenses fiscales : les modalités de taxation retenues pour le calcul sont désormais, entre le barème de l’impôt sur le revenu et le prélèvement forfaitaire libératoire, les plus favorables pour le contribuable. En revanche, les exonérations de gains de cession ne dépassant pas un certain montant ne sont plus prises en considération.

b) Quatre principaux objectifs

Afin d’offrir une vision plus claire des dispositifs rattachés au programme, le Rapporteur spécial procède ci-après à la ventilation de la dépense fiscale en fonction des principaux objectifs affichés.

● Orienter l’épargne vers des produits de moyen-long terme

Pour 2011, suite à la fusion des dépenses fiscales 140202 et 140119 précitée, l’exonération ou l’imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie, constitue la principale dépense fiscale du programme destinées à orienter l’épargne vers des produits de moyen ou de long terme. Alors que la tendance était nettement à l’augmentation de cette dépense entre 2007 et 2010 au point de représenter la moitié de la dépense fiscale du programme Épargne dans le PAP 2010, l’estimation de cette dépense est largement revue à la baisse dans le PAP 2011 y compris s’agissant des années 2008, 2009 et 2010.

PRINCIPALES DÉPENSES FISCALES DESTINÉES À ORIENTER L’ÉPARGNE VERS DES PRODUITS DE MOYEN-LONG TERME

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

140202 Abattement et crédit d’impôt en cas de reliquat d’abattement sur les produits imposables attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie d’une durée au moins égale à 8 ans

(PAP 2010)

80

110

110

140119 Exonération ou imposition réduire des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie

PAP 2009 et 2010

PAP 2011 (après fusion avec la dépense 140202)

2 500

1 000

2 800

1 000

3 000

1 000

1 000

Source : Annexe relative aux voies et moyens

● Orienter la dépense fiscale vers l’investissement des salariés dans le capital de leur entreprise

Le tableau ci-après reproduit les trois dépenses fiscales principales destinées à orienter l’épargne des salariés vers le capital de leur entreprise. On constate que ces dépenses devraient représenter plus de 1,5 milliard d’euros en 2011 comme en 2010.

COÛT DES PRINCIPALES DÉPENSES FISCALES DESTINÉES
À ORIENTER L’ÉPARGNE DES SALARIÉS VERS LE CAPITAL DE LEUR ENTREPRISE

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

120108 Exonération des sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement aux plans d’épargne salariale

1 000

1 400

1 400

1 400

140109 Exonération des revenus provenant de l’épargne salariale (participation et plan d’épargne salariale)

300

300

nc

nc

150701 Exonération des gains réalisés lors des cessions à titre onéreux de titres acquis dans le cadre des dispositifs d’épargne salariale (participation aux résultats de l’entreprise, plan d’épargne entreprise, actionnariat salarié régi par la loi du 27 décembre 1973)

250

200

100

100

Total

1 550

1 550

>1 500

>1 500

Source : PAP 2011.

● Favoriser l’épargne afin de financer des missions d’intérêt général, notamment d’investissement dans l’immobilier social

La dépense fiscale dans ce domaine a fortement augmenté entre 2008 et 2009, avec un accroissement en valeur de 30 millions d’euros. En revanche, cette dépense connaîtrait une forte baisse en 2010 (– 30 %) qui se poursuivrait en 2011 (– 6,5 %).

PRINCIPALES DÉPENSES FISCALES DESTINÉES À FINANCER DES MISSIONS D’INTÉRÊT GÉNÉRAL, NOTAMMENT D’INVESTISSEMENT DANS L’IMMOBILIER SOCIAL

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

140102 Exonération des intérêts des Livrets A

250

280

200

190

140105 Exonération des intérêts des Livrets d’épargne populaire

100

60

50

50

140104 Exonération des intérêts des Livrets de développement durable

130

130

90

80

140103 Exonération partielle des intérêts des Livrets bleus

10

50

25

25

Total

490

520

365

345

Source : PAP 2010 et 2011.

● Favoriser l’épargne des contribuables modestes

En dehors des livrets d’épargne populaire (mentionnés ci-avant), un autre dispositif existe depuis 1992 en vue de favoriser l’épargne des contribuables les plus modestes. Il s’agit des plans épargne populaire. Depuis 2008, son coût fiscal annuel s’élève à 350 millions d’euros. Il devrait rester inchangé en 2011.

*

* *

IV.– LE PROGRAMME MAJORATION DE RENTES :
DES DISPOSITIFS EN VOIE D’EXTINCTION

Ce programme, doté d’une action unique, comporte les crédits par lesquels l’État participe aux majorations de rentes viagères, dispositifs en voie d’extinction (74). Compte tenu du caractère « fermé » des procédures concernées et de l’absence d’intervention directe de l’État dans leur gestion, ce programme est
– à juste titre – dépourvu de dispositif de mesure de la performance.

Les crédits votés en 2008 s’établissaient à 227 millions d’euros. Une partie d’entre eux (5 millions d’euros) a servi de gage à des ouvertures de crédits par le décret d’avance n° 2008-1244 du 28 novembre 2008. Compte tenu des crédits reportés depuis l’exercice 2007, les crédits ouverts sur ce programme en 2008 ont atteint 222 millions d’euros, pour une dépense effective de 221,8 millions d’euros. Les crédirentiers ayant bénéficié de majorations légales, de 78 ans d’âge moyen, sont au nombre d’environ 476 000.

En 2009, les dépenses se sont établies à 209 millions d’euros, soit légèrement moins que les crédits initiaux (216,3 millions d’euros). Les demandes de remboursement ont émané de 32 compagnies d’assurance et de 12 mutuelles et concernent environ 451 753 crédirentiers.

En 2010, les dépenses atteindraient 204,3 millions d’euros, à répartir entre 187,1 millions d’euros de majorations servies par les compagnies d’assurance et 16,8 millions d’euros de majorations servies par les mutuelles.

En 2011, la baisse tendancielle de ces dépenses devrait se poursuivre : les crédits prévus dans le présent projet de loi de finances s’établiraient à 196 millions d’euros.

*

* *

COMPTE RENDU
DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 28 OCTOBRE À 15 HEURES

(application de l’article 117, alinéa 2, du Règlement)

COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRLE BUDGÉTAIRE

(Application de l’article 120 du Règlement)

PRÉSIDENCE DE M. JÉRÔME CAHUZAC,
PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DES FINANCES

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures quinze.

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2011

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, je suis heureux de vous accueillir.

Nous sommes réunis en formation de commission élargie afin de vous entendre sur les crédits consacrés à la mission « Engagements financiers de l’État » dans le projet de loi de finances pour 2011.

Notre rapporteur spécial, M. Baert, m’a fait savoir qu’il aurait du retard, mais celui-ci s’aggravant, je me propose de commencer à donner lecture de son projet de rapport :

« Mon intervention », comptait-il indiquer en premier lieu, « aura d’abord pour objet de remercier et de féliciter les services de Bercy et de l'Agence France Trésor » – satisfaction que je lui laisserai finalement développer lui-même puisque je constate son arrivée !

Vous avez la parole, monsieur le rapporteur spécial.

M. Dominique Baert, rapporteur spécial, pour la mission « Engagements financiers de l’État »En vous priant, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président, chers collègues, de bien vouloir excuser mon retard, je comptais en effet, en introduction de mon projet de rapport, remercier les services de Bercy et de l'Agence France Trésor car le taux des réponses aux questionnaires budgétaires qui me sont parvenues le 10 octobre, date limite fixée par la loi organique relative aux lois de finances, était de 95 % alors que je n'avais reçu aucune réponse à pareille époque l'an passé.

Je constate, ensuite, que je suis en train de devenir le rapporteur spécial le plus important. Si la mission dont j'ai à rendre compte est le troisième poste de dépenses du budget général, après l'éducation nationale et les remboursements et dégrèvements en faveur des collectivités locales, avant même la défense, elle pourrait, malheureusement, devenir le premier poste dans les années qui viennent ! Songeons que la dette publique française représente déjà 82,9 % du produit intérieur brut – PIB – en 2010 et atteindra 86,2 % du PIB en 2011. Cela correspond à un montant de 1 748 milliards d'euros ou, pour être plus concret encore, environ 26 300 euros par habitant.

Permettez-moi de donner un coup de projecteur rapide sur trois programmes.

Le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'État » est le plus important des quatre que comporte la mission. Avec 45,45 milliards d'euros en 2011, il représente près de 97 % des 46,9 milliards de crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

La gestion « technique » de ce programme est satisfaisante, grâce à la grande réactivité de l'Agence France Trésor par rapport aux demandes du marché. Il n’y a de ce point de vue rien à dire. S'agissant en revanche des évolutions des finances publiques qui sous-tendent les dépenses de ce programme, quatre constats s'imposent.

Premier constat : le besoin de financement de l'État est en plein dérapage.

Ce besoin, constitué du déficit budgétaire et du montant des amortissements de titres arrivés à échéance, qui atteignait déjà des montants historiques dans le projet de loi de finances pour 2010, a progressé de 33 % en cours d'année 2010 – compte tenu de l'impact du grand emprunt national et du soutien en faveur de la Grèce – pour atteindre 239,1 milliards d'euros. Bien évidemment, en 2011, le besoin affiché serait en baisse de près de 40 milliards d'euros, mais cela résulte d'un simple effet mécanique lié à la non-reconduction des mesures exceptionnelles de crise. Il n'en demeure pas moins qu'avec 189,4 milliards d'euros, il dépasse de 25 milliards son niveau d'avant la crise – 164 milliards en 2008. C'est donc une donnée qui devient structurelle.

Deuxième constat : la part de la dette levée à court terme commencerait enfin à diminuer.

Le Gouvernement bénéficie en effet d'un regain de la demande des investisseurs pour les titres d'une maturité supérieure à quinze ans, qui avait été significativement affectée par la crise économique et financière. La part des bons du trésor à taux fixe (BTF) à moins d'un an, après avoir atteint un pic en 2009 – 18,6 % de l'encours total de la dette négociable de l'État –, a ainsi commencé à diminuer en 2010 et pourrait passer sous la barre des 15 % du volume de dette en fin d'année 2011. Cette démarche mérite considération car il n'est pas souhaitable que l'État finance ses déficits structurels de moyen et long terme avec des moyens de court terme ; comme tout emprunteur, il s'expose en effet à un double risque : d’abord de liquidité avec la rupture de la disponibilité de ses sources de financement ; ensuite de brutale remontée des taux d'intérêt. Cet appel croissant au court terme s’était imposé à mon attention et je vous avais interrogé précédemment sur ce point. J'observe avec intérêt ce tassement, mais je veux appeler de nouveau votre attention sur la vigilance nécessaire à cet égard.

Troisième constat : si, comme en 2009, la charge de la dette demeure contenue en 2010, elle ne le doit qu'à un effet d'optique, à savoir la conjonction opportune de taux d'intérêt encore bas et d'une inflation limitée. D'un montant d'environ 41 milliards d'euros – avant swaps – en 2010, la charge d'intérêts serait inférieure d'environ 1,5 milliard d'euros aux crédits votés. Mais cette situation ne durera malheureusement pas indéfiniment. Selon les prévisions du Gouvernement lui-même, qui table sur une remontée progressive des taux d'intérêt, la charge de la dette augmentera de 30 % entre 2010 et 2013, à un rythme d'environ 5 milliards d'euros par an, pour atteindre 45,4 milliards d'euros en 2011 et 55,2 milliards en 2013.

Cette dérive inexorable, je l'avais anticipée depuis déjà deux ans dans les prévisions que je fournissais à l’appui de mon rapport spécial. Sans doute vous en souvenez-vous, monsieur le secrétaire d'État, puisque nous les avions évoquées en commission élargie.

Quelle sera cette charge en cas de hausse des taux ? À titre indicatif, une hausse des taux globale et pérenne de 1 point entraînerait, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation des intérêts de la dette d'environ 2 milliards dès la première année, de 3,9 milliards l'année suivante, de 5,9 milliards la troisième année, jusqu'à environ 14 milliards à un horizon de dix ans. Confirmez-vous ces chiffres ?

Quatrième constat : au-delà de la question de la charge de la dette, c'est plus généralement le problème de l'emballement de l'endettement public et de ses conséquences lourdes et mécaniques qui est aujourd'hui posé. Ce sera le corset de toutes les politiques économiques et budgétaires pour de nombreuses années. Après 78,1 % en 2009, la dette publique devrait, selon les prévisions du Gouvernement, atteindre 82,9 % en 2010, puis 86,2 % en 2011 et 87,4 % en 2012.

Or, nul ne doute désormais du relèvement des taux d'intérêt de court, moyen et long terme, à laquelle la France se trouve d'autant plus exposée que 70 % de sa dette est dorénavant détenue par des non-résidents : des risques d'assèchement de certains segments de titres publics et de liquidités ne sont plus à négliger. Dans la mesure où les hypothèses macroéconomiques qui sous-tendent le scénario du Gouvernement sont plus qu'optimistes, avec une croissance de 2,5 % par an dès 2012 et une progression des dépenses publiques de 0,8 % – soit un niveau jamais atteint correspondant au tiers de la progression tendancielle desdites dépenses entre 2000 et 2008 –, la perspective d'un endettement supérieur à 90 % voire 100 % du PIB n'est plus un exercice théorique, comme le montrent les simulations que j'ai explorées dans le cadre de mon rapport spécial.

Une étude récente menée par les économistes Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff montre qu'au regard de l'évolution de la dette et de la croissance de vingt pays avancés depuis plus d'un siècle, une dette supérieure à 90 % du PIB est associée à une croissance très inférieure à la moyenne. La dette publique d'aujourd'hui va corseter non seulement les dépenses budgétaires de demain, mais aussi notre croissance économique d'après-demain.

Dès lors, quelles sont les garanties que peut apporter le Gouvernement pour nous démontrer le caractère soutenable de nos finances publiques à l'horizon 2013 ?

S'agissant du grand emprunt, pouvez vous expliciter les modalités de suivi et d'évaluation de l'action des opérateurs signataires d'une convention d'avenir ? On est vraiment sur une colossale opération de débudgétisation ! Quels sont les pouvoirs de l'État dans l'utilisation des fonds, par exemple en cas de performance non satisfaisante ? Comment l'État pourra-t-il réallouer les fonds ?

Le deuxième coup de projecteur concerne le programme « Appels en garantie de l'État », qui bénéficierait de 227,3 millions d'euros de crédits en 2011. Les principales dépenses concernent deux domaines.

D’abord, des garanties de prêts de l'Agence française de développement (AFD) et de la Banque européenne d'investissement (BEI) pour 74 millions d'euros, en réduction de 40 % par rapport à l'an passé. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de cette évolution à la baisse, le projet annuel de performances pour 2011 étant muet sur le sujet ? Faut-il y voir un désengagement du Gouvernement en faveur de l'aide publique au développement ?

Ensuite, des garanties d'aides à l'exportation de la Coface. D'un montant de 122 millions d'euros, les crédits de l'action « Développement international de l'économie française » ont progressé de 42 % entre 2010 et 2011. Cette augmentation me semble essentiellement imputable aux réformes des procédures de garanties de la Coface. Pouvez-vous, par conséquent, nous indiquer dans quelle mesure les garanties Coface ont effectivement permis de soutenir nos exportations et de réduire les défauts de paiement en 2010 ? Quelles sont les perspectives attendues pour 2011 ?

Le dernier coup de projecteur concerne les crédits budgétaires du programme « Épargne », systématiquement sous-évalués depuis 2006. Malgré l'augmentation des crédits ouverts en loi de finances initiale en 2009 et 2010 et la baisse des primes d’épargne logement depuis 2009, les reports de charges d'une année sur l'autre sont toujours monnaie courante. Si le découvert de l'État auprès du Crédit Foncier de France s'est fortement réduit en 2010, passant de 719,2 millions d'euros en 2009 à 144,7 millions d'euros, le problème n'est toujours pas réglé. Sachant que l'année 2011 devrait se traduire par une augmentation du montant des primes d'épargne logement, envisagez-vous d'apurer enfin les dettes de l'État vis-à-vis du Crédit Foncier de France dès 2010 ? Il y a deux ans, vous m’aviez affirmé que cela prendrait « un certain temps ». Sans doute avez-vous précisé le calendrier depuis, car il n'est pas normal ni sain que le Crédit Foncier soit un banquier de l'État. Proposerez-vous donc d'ouvrir des crédits en collectif budgétaire de fin d'année pour faire face à cette situation ?

Enfin, le programme « Épargne » se caractérise par d'importantes dépenses fiscales. Fait préoccupant, alors qu'elles représentaient 8,5 % de l'ensemble des dépenses fiscales en 2010, les dépenses fiscales rattachées à ce programme ne représentent plus que 5,6 % en 2011. S'agit-il, comme le projet annuel de performances pourrait le laisser croire, d'une baisse drastique de 40 % de ces dépenses en 2011 ? Non, puisque le tome II de l’annexe relative aux « Voies et moyens » lève le lièvre en indiquant que deux des principales dépenses fiscales du programme n'ont pas été supprimées, mais déclassées : elles sont désormais considérées comme des modalités de calcul de l'impôt. Il s’agit des mesures n° 100112, « Déduction des cotisations versées au titre de l’épargne retraite individuelle et facultative (PERP), et n° 120139, « Exonération des sommes prélevées sur un compte épargne-temps (CET) pour alimenter un PERCO » – plan d'épargne pour la retraite collectif.

De plus, alors que l'évaluation des 27 dépenses fiscales du programme en 2011 est inférieure de 40 % à l'évaluation de ces mêmes dépenses en 2010, aucune explication n'en est présentée dans les documents budgétaires. Je rappelle, que le montant total de ces dépenses passe de 6 milliards en 2010 à 3,6 milliards en 2011.

Je ne puis résister – et c'est ma mission de rapporteur spécial – à vous demander d'éclairer le Parlement sur les raisons de ce déclassement de deux des dépenses fiscales et de nous expliquer pourquoi l'évaluation des 27 dépenses fiscales du programme en 2011 est inférieure de 40 % à l'évaluation de 2010.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Permettez-moi tout d’abord de vous remercier, monsieur le rapporteur spécial, du satisfecit que vous adressez aux agents de l’Agence France Trésor pour leur gestion dynamique de la dette française.

L’accroissement de la dette est-il inéluctable ? Cela dépend de nous et de la rapidité avec laquelle nous reviendrons à l’équilibre budgétaire, seul moyen de stopper la spirale de l’endettement. Le tableau que vous dressez étant assez sombre, je voudrais vous donner quelques raisons d’espérer.

En 2011, le déficit de l'État baissera de 60 milliards d’euros, soit près de 40 %, passant de 152 milliards en 2010 à 92 milliards d’euros. Malgré les 15 milliards que représente la fin du plan de relance, il ne s’agit nullement d’une baisse faciale : 10 milliards proviennent de la réduction des niches fiscales et 35 milliards correspondent au grand emprunt. C'est donc une baisse historique. Jamais, un effort budgétaire aussi important n'a été consenti.

Les dépenses de l'État seront gelées en valeur et le Gouvernement conduira un effort pour réduire les dépenses de fonctionnement et d'intervention de 10 % d'ici à 2013. Les transferts de l'État aux collectivités territoriales seront également gelés en valeur.

S'agissant de la Sécurité sociale, la progression des dépenses d'assurance maladie sera ramenée à 2,9 %, soit nettement moins que leur tendance passée, qui était de 4,5 % par an en moyenne.

Toutes les mesures du PLF 2011 visent à réaliser notre objectif : faire passer le déficit public de 7,7 % en 2010 à 6 % du PIB en 2011, avec l'ambition d'atteindre 2 % en 2014. Ces efforts sont le gage de la réduction future de notre endettement.

S’agissant des modalités de pilotage du grand emprunt, je voudrais également vous rassurer. Aucun engagement ne sera pris en dehors de l’État. Les opérateurs ne feront rien sans l’accord de celui-ci. Les conventions qu’ils passent avec lui prévoient les modalités précises d’instruction des dossiers. Pour chacune des actions, il est institué un comité de pilotage où siègent, outre le commissaire général aux investissements, les ministères concernés auquel rapporte l’opérateur. Ce comité suit les actions engagées et prépare les décisions du Premier ministre, qui in fine valide ou non les opérations. Les conventions prévoient également des restitutions trimestrielles de l’opérateur – un reporting – et, en cas de performance insuffisante, elles donnent à l’État la possibilité de reprendre les fonds pour les réaffecter à d'autres usages.

En ce qui concerne les appels en garantie de l’État, vous avez indiqué que les montants des crédits destinés à couvrir les prêts de l’Agence française de développement et de la Banque européenne d’investissement connaîtraient une baisse de 40 % et s’élèveraient pour 2011 à 75 millions d’euros. Sachez qu’il n’existe aucun désengagement de l’État en matière d’aide publique au développement. En effet, les crédits de l’action n° 5 – « Autres garanties » – à laquelle vous faites référence couvrent les garanties de prêts à hauteur de près de 7 millions pour l’AFD et de 3 millions pour la BEI. Les 65 autres millions sont affectés au provisionnement de garanties non connues à ce jour, contre 124 millions en loi de finances initiale pour 2010. Donc la diminution des crédits de l’action n° 5 concerne exclusivement la partie non identifiée des garanties, qui nous a semblé trop importante.

Pour ce qui est du découvert de l’État auprès du Crédit Foncier de France, dans le programme « Épargne », vous avez bonne mémoire : j’avais en effet affirmé il y a deux ans qu’il faudrait « un certain temps » pour le résorber. Cela étant, il s’est déjà largement réduit, passant de 720 millions d’euros en 2009 à 145 millions cette année. Nous constatons en outre que les dépenses effectuées au titre des primes d’épargne logement sont dans une dynamique de baisse. Le montant total des primes versées au titre de l’année 2010 devrait être de l’ordre de 612 millions d’euros, contre 907 millions en 2009 et 1 588 millions en 2008. Quant à l’apurement total, il s’agit d’un point qui est aujourd'hui en examen et qui pourrait éventuellement être inscrit en loi de finances rectificative.

Vous avez également demandé des éclaircissements au sujet du déclassement de deux des principales dépenses fiscales du programme, la déduction des cotisations des PERP et l’exonération des sommes prélevées sur un compte épargne temps pour alimenter un PERCO. La baisse que vous évoquez tient à trois raisons.

La première tient à la réévaluation à la baisse de 2,1 milliards de la dépense fiscale « Exonération ou imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie », conformément à une recommandation de l’Inspection générale des finances. Jusqu’à l’an dernier, la dépense fiscale était estimée par différence entre un impôt théorique – consistant à prélever au fil de l’eau les produits générés par l’ensemble des contrats, qui faisaient ou non l’objet d’un dénouement – et l’impôt réellement perçu au titre des seuls contrats dénoués. L’IGF propose de retenir désormais comme modalité de chiffrage l’imposition des produits des contrats d’assurance-vie à leur dénouement, et non l’imposition au fil de l’eau. C’est ce que le Gouvernement a fait.

La deuxième raison est relative au déclassement des dépenses fiscales « Déduction des cotisations des PERP » et « Exonération des sommes prélevées sur un CET pour alimenter un PERCO ». En effet, il ne s’agit pas de dépenses fiscales, mais de simples reports d’imposition dans le temps. Là aussi, le Gouvernement a suivi les recommandations de l’IGF.

La troisième raison, enfin, tient à une réévaluation de la dépense d'exonération des sommes au titre de la participation, qui prend désormais en compte les produits des comptes courants bloqués, soit un montant de 400 millions d’euros.

M. Jean-Claude Flory. Si le crédit d’impôt recherche, le CIR, est un remarquable outil d’accompagnement du développement économique et de l’emploi futur, l’inspection générale des finances n’en recommande pas moins la réduction, dans l’assiette de ce crédit d’impôt, du forfait représentatif des frais de fonctionnement, ou encore la suppression du taux majoré pour les nouveaux entrants afin d’éviter des effets d’aubaine. Quel est votre avis à ce sujet ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Mon jugement est également très positif en ce qui concerne le crédit d’impôt recherche. Ce dispositif, le plus important de tous les pays de l’OCDE, a créé une dynamique d’accélération des dépenses de recherche et de développement en France.

Les recommandations de l’Inspection générale des finances sur les points que vous évoquez n’ont pas été reprises par le Gouvernement. Après de longs débats lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, le CIR n’a pas connu de modification sensible, conformément à ce que souhaitait la ministre de l’économie.

M. Dominique Baert, rapporteur spécial. Je souhaite également saluer la qualité de l’analyse des collaborateurs de la Commission des finances. Il y a deux ans, en effet, vous aviez jugé excessif le pessimisme des prévisions d’évolution de la dette contenues dans le rapport spécial qu’ils avaient contribué à préparer. Depuis, ces prévisions se sont confirmées presque chiffre pour chiffre ! Bref, nous avions déjà mis en exergue l’explosion et le caractère insoutenable de la dette de l’État.

Par ailleurs, si le besoin de financement de l’État est affiché en diminution, c’est à celle du déficit budgétaire que nous le devrons, je vous en donne acte. Permettez-moi néanmoins de formuler quelques réserves. Compte tenu de la stratégie de réduction des dépenses suivie en France et en Europe, il est à craindre qu’un trou d’air ne vienne freiner la croissance dans les mois à venir. Comme les taux d’intérêt ont tendance à augmenter, donc à accroître la charge de la dette, je redoute que le Gouvernement ne se retrouve l’an prochain avec un déficit subi et non plus voulu, ou accepté, comme cela a été le cas avec le plan de relance.

La dette risque donc de peser longtemps sur les comptes publics. Nonobstant les inflexions que vous affichez en matière de réduction du déficit budgétaire, on a créé ces dernières années un tel socle de dette que l’alourdissement de la charge paraît implacable.

Enfin, les équipes de l’Agence France Trésor, dont j’ai salué tout à l’heure le professionnalisme, ont pour objectif de capter l’épargne mondiale. Dans le contexte macroéconomique que j’ai évoqué, pensez-vous que la dette française pourra améliorer son attractivité ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Entre la commission élargie de 2008 et celle d’aujourd'hui est intervenue la crise économique qui est largement à l’origine de l’explosion des déficits de nombreux pays.

S’agissant des prévisions de croissance et de l’éventualité d’un trou d’air, nous verrons bien ce qu’il en est. Le Gouvernement se situe dans une hypothèse de croissance de 2 % en 2010 et de 2,5 % les années suivantes, et il fera tout pour y parvenir.

Nous ferons également tout pour respecter le rythme de réduction du déficit qui est affiché – à l’horizon 2014, le déficit devrait être ramené à 2 %. Je rappelle qu’un effort sans précédent a déjà commencé : on n’a jamais obtenu, jusqu’à présent, une réduction de deux points en seulement un an.

Vous avez raison de féliciter l’Agence France Trésor. Elle a su innover en instaurant de nouvelles règles pour les opérations de démembrement sur les obligations assimilables du Trésor (OAT). Les capacités de placement résultant de cette innovation, que nous sommes les premiers à mettre en œuvre, sont observées avec grand intérêt par d’autres pays. Ils devraient bientôt nous imiter.

La dette est bien sûr très élevée, mais on peut se féliciter du caractère innovant et performant de sa gestion.

M. le président Jérôme Cahuzac. Vous estimez que la crise est responsable du déficit actuel. Or, le rapport de la Cour des comptes attribue son origine pour un tiers à la crise et pour deux tiers aux politiques publiques qui sont menées. Mais ce n’est bien sûr que l’avis de la Cour des comptes…

Une question également sur la dette obligataire de l’État. Confirmez-vous qu’elle sera amortie à hauteur d’un tiers l’année prochaine ? Quel taux d’intérêt espérez-vous ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. J’ai un très grand respect pour la Cour des comptes, mais elle n’est pas à l’abri d’erreurs et de mauvaises évaluations. Je pourrai fournir des exemples précis.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je ne manquerai pas de transmettre cette remarque au Premier président lors d’une prochaine audition !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Pour ce qui est de l’amortissement du stock de dette, il s’élèvera à 97 milliards d’euros, ce qui représente moins de 10 % du total – environ 1 200 milliards. Le taux d’intérêt moyen attendu est de 3 %.

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie.

La réunion de la commission élargie s’achève à quinze heures cinquante-cinq.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du Commerce, de l’artisanat, des PME, du tourisme, des services et de la consommation, lors de la commission élargie (voir le compte rendu de la réunion du 28 octobre 2010), sur la mission Engagements financiers de l’État, la commission des Finances examine les crédits de cette mission.

Dominique Baert, Rapporteur spécial. L’an dernier, j’avais préconisé le rejet des crédits de la mission compte tenu de la dégradation rapide de la dette de l’État et c’était afin d’interpeller le Gouvernement. Cependant, en responsabilité il n’est pas possible de priver l’État de sa capacité à faire face à ses engagements. En conséquence, je préconise cette année l’adoption des crédits de la mission Engagements financiers de l’État. À titre personnel, je ne prendrai pas part au vote.

Conformément à l’avis favorable de M. Dominique Baert, Rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de cette mission sans modification.

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© Assemblée nationale

1 () La programmation triennale des crédits est présentée, d’une part, dans le projet annuel de performances (PAP) pour 2011 annexé au présent projet de loi de finances et, d’autre part, à l’article 6 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

2 () La seule dette négociable de l’État représenterait, quant à elle, près de 1 333 milliards d’euros à la fin 2011.

3 () Le PIB diminue alors de 0,9 % en volume.

4 () L’année 2006 a été marquée par un volume exceptionnel de produits de cessions d’actifs affectés au désendettement de l’État (13 milliards d’euros, apportés par les privatisations des sociétés d’autoroute) et par des mesures massives d’optimisation de la trésorerie publique (en particulier la réduction de l’encours du compte du Trésor en fin d’année de près de 26 milliards d’euros). Ces deux facteurs, non reconductibles, expliquent plus des trois quarts de la diminution du taux d’endettement public entre 2005 et 2006.

5 () Certaines opérations financières contribuent en effet à peser sur la dette publique au sens de Maastricht, car il s’agit d’une dette brute, c'est-à-dire non diminuée de la valeur des actifs financiers publics : il s’agit notamment de certaines mesures de réponse à la crise (prises de participation dans les banques, prêts aux constructeurs automobiles,…), des prêts accordés à la Grèce ou encore de prêts et de prises de participation réalisés dans le cadre des investissements d'avenir. À cet égard, l’estimation de la charge représentée par la rémunération des fonds non consommables consacrés aux investissements d’avenir et au plan Campus resterait limitée en 2010 et monterait sensiblement en charge en 2011, tout en restant en deçà du montant plein théorique de 670 millions d’euros. Le Gouvernement fait ensuite l’hypothèse conventionnelle selon laquelle la charge correspondante pourrait atteindre 1,4 milliard d’euros en moyenne chaque année à compter de 2012.

6 () Pour l’année 2010, sont retenues les hypothèses de la loi n° 2010-463 du 7 mai 2010 de finances rectificative pour 2010.

7 () Rapport sur le projet de loi de règlement du budget de l’année 2009, n° 2651, juin 2010, Tome 2, p. 229.

8 () Rapport d’information relatif à la performance dans le budget de l’État, n° 1780, juin 2009, p. 165.

9 () Sur l’importante réforme de la gestion de la trésorerie, le Rapporteur spécial se permet de renvoyer à son rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2008, n° 276, annexe 15, novembre 2007, p. 19 et s.

10 () Les swaps de taux d’intérêt sont des contrats négociés entre deux parties qui décident de s’échanger les flux d’intérêt correspondant, d’une part, à une échéance fixe (en général) moyenne ou longue et, d’autre part, à une échéance variable courte. Sans intervenir sur l’encours de la dette, il est donc possible de réduire sa durée de vie apparente en concluant avec une contrepartie déterminée un swap de taux visant à percevoir le taux fixe long et à payer le taux variable court. Ainsi, le débiteur paye le taux fixe long sur l’emprunt qu’il a émis, reçoit le taux fixe long du fait du swap et paye le taux variable court du fait du swap. S’il veut éviter d’être exposé à une charge d’intérêt variable, le débiteur peut conclure un swap inverse avec une autre contrepartie en recevant le taux variable court et en payant un taux fixe associé à une maturité intermédiaire. Dans ces conditions, l’ensemble des instruments financiers utilisés (emprunt, swap taux long / taux court et swap taux court / taux moyen) aboutit à ce que le débiteur paye sur sa dette à long terme un taux d’intérêt à moyen terme. En pratique, ces opérations substituent des taux de 2 à 3 ans à des taux de 8 à 10 ans.

11 () Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008, le Rapporteur spécial avait consacré des développements spécifiques à la question de la durée de vie de la dette : voir Dominique Baert, Rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2008, n° 276, annexe 15, novembre 2007, p. 25 et s.

12 () Lois de finances rectificative pour 2010 n° 2010-237 du 9 mars 2010 (LFR 1), n° 2010-463 du 7 mai 2010 (LFR 2), et n° 2010-606 du 7 juin 2010 (LFR 3).

13 () Ces dotations ne peuvent être consommées : seuls les éventuels revenus tirés de leurs placements peuvent être consommés par l’organisme attributaire.

14 () Rapport demandé à la Cour des comptes, en application de l’article 58-2° de la LOLF, relatif aux interventions de l’État dans l’économie par des moyens extrabudgétaires annexé au tome 1 du rapport général sur le présent projet de loi de finances.

15 () Les principaux sont : ANR, CDC, ADEME, OSEO, CEA, ONERA, ANAH, CNES, ANRU, ANDRA …

16 () Voir également les observations du Rapporteur spécial sur l’exécution 2009 dans le Rapport sur le projet de loi de règlement du budget de l’année 2009, n° 2651, juin 2010, Tome 2, p. 229.

17 () Dans les deux cas, est visé ici le déficit hors FMI. Le déficit « en exercice » (c’est-à-dire le « déficit budgétaire » dans son acception la plus commune) correspond au solde résultant de l’ensemble des opérations prévues par les lois de finances afférentes à cet exercice, quelle que soit leur date de réalisation. Le déficit « en gestion » résulte des opérations de l’année calendaire, peu importe la loi de finances à laquelle elles se rattachent juridiquement. En loi de finances initiale, le déficit à financer figurant dans le tableau de financement est, par convention, le déficit prévu en exercice. En exécution, c’est du déficit en gestion que dépendent les modalités pratiques du financement de l’État. Ce décalage, plusieurs fois signalé par la Cour des comptes, s’explique par le fait que la ligne du tableau de financement retraçant l’impact en trésorerie du solde de la gestion ne peut être réconciliée exactement avec les comptabilités budgétaire et générale, faute de système d’information adéquat Toutefois, l’écart ne serait que de 31 centimes d’euros en 2009 selon l’Agence France Trésor.

18 () Loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 (LFR 1), Loi n° 2010-463 du 7 mai 2010 (LFR 2) de finances rectificative pour 2010.

19 () BTAN (bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel) ; OAT (obligations assimilables du Trésor).

20 () Au total, l’AFT a procédé à 13,6 milliards d’euros de rachats de titres en 2009 (11 milliards d’euros de titres de maturité 2010 et 2,6 milliards d’euros de titres de maturité 2011).

21 () Ces remboursements ne constituent pas des recettes budgétaires de l’État, dès lors que les interventions de la SPPE n’ont elles-mêmes pas suscité de dépense budgétaire. Par ailleurs, l’écart entre le montant des aides remboursées (environ 13 milliards d’euros) et le montant de la différence de variation de trésorerie entre le présent projet et la loi de finances initiale (9,5 milliards d’euros) s’explique par l’impact d’autres facteurs jouant en sens inverse, notamment la révision à la hausse du niveau cible du compte courant du Trésor au 31 décembre 2010.

22 () Les ressources de trésorerie de l’État ne peuvent être affectées à la couverture d’une fraction déterminée de son besoin de financement, ni a fortiori à la couverture de dépenses budgétaires.

23 () Il convient en effet de rappeler que, pour les OAT et les BTAN, la technique dite de l’assimilation impose de percevoir à l’émission le montant du coupon couru depuis la date de versement du coupon précédent. Ainsi, les émissions de référence changeant tous les six mois, la charge brute des émissions d’une année est compensée à hauteur des trois quarts environ par les recettes de coupons courus encaissées cette même année. Dans ces conditions, la charge nette de la dette à moyen et long terme dépend principalement du niveau des taux d’intérêt servis sur l’encours à moyen et long terme de l’année précédente.

24 () Cette dernière prévoyait une variation négative (c’est-à-dire un retrait net du compte par les correspondants du Trésor) de – 3 milliards d’euros.

25 () Pour s’établir à environ 215,5 milliards d’euros à la fin 2010 (voir également infra). BTF : bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés.

26 () C’est-à-dire sans qu’en soient déduits les actifs financiers détenus par les administrations publiques. En revanche, la dette publique « maastrichtienne » étant consolidée, en sont exclus les éléments de passif d’une administration publique détenus par une autre administration publique.

27 () Selon le rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances pour 2011, p. 105.

28 () Dans la seule zone euro, les émissions à moyen et long terme sont attendues à près de 900 milliards d’euros en 2010. Le programme de financement annoncé par l’Allemagne représente 221 milliards d’euros.

29 () Article 82 de la loi de finances rectificative pour 2007.

30 () Article 55 de la loi de finances pour 2008.

31 () Au 4° du II de l’article 47 du présent projet de loi de finances. Ce plafond représente la différence entre les émissions à moyen et long terme et les amortissements à moyen et long terme.

32 () 2° du II de l’article 10 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.

33 () Le PAP 2011du compte spécial Participations financières de l’État prévoit des recettes de cessions d’actifs de 4 milliards d’euros l’année prochaine, qui seraient affectées pour 2,9 milliards d’euros à la Caisse de la dette publique et pour 1,1 milliard d’euros à l’Établissement public de financement et de restructuration (EPFR), chargé de l’amortissement de la dette contractée à l’égard du Crédit lyonnais.

34 () En l’occurrence l’arrivée à échéance d’un BTAN d’une valeur nominale de 18 milliards d’euros le 12 janvier 2012.

35 () Voir Dominique Baert, Rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2008, n° 276, octobre 2007, annexe n° 15, p. 47.

36 () Le II de l’article 22 de la LOLF dispose en effet que « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l’État, à l’exclusion de toute opération de gestion courante, sont retracées sur un compte de commerce déterminé. Ce compte est divisé en sections distinguant les opérations selon leur nature. Chaque section est dotée d’une autorisation de découvert (…) ».

37 () Les versements se font les 6, 16 et 26 de chaque mois, avec deux versements spécifiques en début et fin d’année, à hauteur du solde apparaissant à la première section.

38 () Rapport sur le projet de loi de règlement du budget de l’année 2008, n° 1775, juillet 2009, Tome 2, p. 173. Voir également, Dominique Baert, Rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2009, n° 1198, annexe n° 21, novembre 2008, p. 30 et s.

39 () Par « norme de dépense », on entend la stabilisation en volume de l’ensemble formé par les dépenses nettes du budget général et par les prélèvements sur recettes.

40 () Voir supra, 1.

41 () Les dépenses liées à la charge de la dette non négociable dépendent de la présentation physique pour remboursement, par le porteur, des titres d’emprunts d’État restés sous forme « papier » lors de l’opération de dématérialisation de la dette de l’État intervenue en 1984, ou de titres amortis à cette date et restés sous forme « papier ». Il s’agit essentiellement de bons du Trésor sur formules dont l’émission s’est poursuivie jusqu’en 1998. D’une durée de 5 ans, ils ouvrent droit à des intérêts capitalisés qui se prescrivent 30 ans après l’échéance.

42 () Sur cette question, voir Dominique Baert, Rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2008, n° 276, annexe 15, novembre 2007, p. 22.

43 () Il s’agit essentiellement des recettes de coupons courus des OAT et des BTAN.

44 () Hors mission Remboursements et dégrèvements. Pour 2010, les crédits de paiement de la mission Enseignement scolaire sont proposés à 61,7 milliards d’euros, à comparer à 46,9 milliards d’euros pour le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État.

45 () Gilles Carrez, Rapport général sur le projet de loi de finances pour 2011, n° 2857, tome 1, page 127.

46 () Le graphique doit être lu de la façon suivante : la pomme rouge constitue la valeur moyenne des prévisions du groupe technique et les deux pommes blanches représentent les bornes hautes et basse de la fourchette moyenne. Celle-ci est à deux écarts types de la distribution des données. La borne basse est donc égale à la valeur moyenne moins un écart type, la borne haute est égale à la valeur moyenne plus un écart type. Par définition de l’écart type, il existe des données excédant les bornes haute et basse.

47 () Si la progression des dépenses publiques a été limitée à 0,8 % en volume en 2008, leur évolution annuelle moyenne entre 1997 et 2008 est d’environ 2,3 % en volume.

48 () C.M Reinhart et K.S Rogoff (2010), Growth in a Time of Debt, NBER Working Papers 15639, National Bureau of Economic Research, Inc.

49 () Cette provision est conventionnellement rattachée à l’action Autres garanties.

50 () Rapport sur le projet de loi de règlement du budget de l’année 2009, n° 2651, juin 2010, Tome 2, p. 229.

51 () Rapport d’information relatif à la performance dans le budget de l’État, n° 1780, juin 2009, p. 163.

52 () Il convient par ailleurs de signaler que la garantie du FGAS s’applique désormais aux « éco-prêts » à taux zéro finançant des travaux de rénovation destinés à améliorer la performance énergétique des logements anciens (article 244 quater U du code général des impôts, introduit par l’article 99 de la loi de finances initiale pour 2009).

53 () Les intérêts ont été calculés à partir du 1er janvier 2006 au taux TEC 5 constaté en moyenne du 15 novembre au 15 décembre 2005, soit 3,06 %.

54 () Les encours SFEF atteignent au 30 juin 2010 80,8 milliards d’euros. Un premier remboursement de 2 milliards d’euros a eu lieu le 18 mars 2010 et les prochaines échéances arrivant à maturité sont fin octobre (3 milliards de dollars) et le 10 décembre (3 milliards d’euros). Les remboursements prévus en 2011 atteignent 18,5 milliards d’euros étalées sur quatre échéances.

55 () Ayant pour objectif de contribuer au renforcement des fonds propres des organismes financiers français, la SPPE a souscrit 20,75 milliards d’euros de titres de fonds propres émis par les banques en 2008 et 2009. Au 31 août 2010, l’État détient encore, via la SPPE, la participation de 1 milliard d’euros au capital de Dexia et 3,5 milliards d’euros de titres supersubordonnés et actions de préférence émis par BPCE. Le Groupe BPCE a annoncé le rachat de 0,6 milliard d’euros d’actions de préférence le 15 octobre 2010 et s’est engagé en faveur du remboursement intégral d’ici 2013.

56 () La Coface est elle-même une filiale de Natixis.

57 () Il s’agit, le plus souvent, de remboursements anticipés obtenus en contrepartie d’abandons de créances décidés par le Club de Paris.

58 () Prélèvement figurant à la ligne de recettes n° 2602 de l’état A annexé au présent projet de loi de finances.

59 () M. Gilles Carrez, Rapport général sur le projet de loi de finances pour 2010, n° 1967, Tome 1, octobre 2009, p. 99.

60 () Notamment : élargissement du champ d’éligibilité aux ETI ; majoration de la quotité garantie pour les entreprises innovantes ; simplification de la procédure ; développement de la commercialisation du produit.

61 () Conformément à l’article 116 de la loi de finances rectificative pour 2005 (n° 2005-1720 du 30 décembre 2005).

62 () L’ « arrangement relatif aux crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public » est un accord multilatéral né en 1978 sous l’égide de l’OCDE – et transposé en droit communautaire – tendant à encadrer l’intervention publique dans les échanges et favoriser la transparence en vue de maintenir des conditions de concurrence fondées sur des déterminants techniques, commerciaux et non financiers.

63 () À ce titre, cette action participe à la « politique transversale » que constitue, au sens de l’article 128 de la loi de finances rectificative pour 2005 (n° 2005-1720 du 30 décembre 2005), la politique française en faveur du développement.

64 () Au début des années 1980, Natixis (ex-BFCE) a refinancé des créances dans le cadre d’accords de consolidation décidés en Club de Paris. En contrepartie, l’État a accordé à Natixis sa garantie sur ces prêts.

65 () IFFIm : International finance facility for immunisation.

66 () Le reste du produit est affecté à la Facilité internationale pour l’achat de médicaments (Unitaid).

67 () Voir l’échéancier présenté dans le rapport spécial de M. Henri Emmanuelli sur la mission Aide publique au développement, projet de loi de finances pour 2007, n° 3363, annexe 5, octobre 2006, p. 91.

68 () Notamment : Dominique Baert, Rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2009, n° 1198, annexe 21, novembre 2008, p. 56.

69 () Rapport d’audit du CIAP sur le programme Épargne, décembre 2007, p. 18.

70 () Alors que les deux méthodologies se sont régulièrement succédées, elles semblent désormais appelées à cohabiter (voir les remarques du Rapporteur spécial dans le Rapport d’information relatif à la performance dans le budget de l’État, n° 1780, juin 2009, p. 168).

71 () Cette réforme n’a cependant d’impact que très progressif, puisque le versement de la prime ne peut pas intervenir avant le troisième anniversaire du plan (50 % du montant de la prime, puis 100 % au bout de quatre ans) : concrètement, les comptes ouverts à partir du 12 décembre 2002 (date d’entrée en vigueur de la mesure) n’ont donc donné lieu à une « demi prime » que depuis le 12 décembre 2005 et à une prime complète que depuis le 12 décembre 2006.

72 () Notamment : Dominique Baert, Rapport spécial sur la mission Engagements financiers de l’État, projet de loi de finances pour 2009, n° 1198, annexe 21, novembre 2008, p. 59 s. ; Rapport sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2008, n° 1775, tome 2, p. 180 et 181.

73 () Tels que les prêts spéciaux du Crédit Foncier de France, certains prêts aidés pour l’accession à la propriété ou les primes pour l’amélioration de l’habitat rural.

74 () Les contrats de rente viagère sont des conventions de droit privé par lesquelles un débirentier, en général une société d’assurance ou une mutuelle, s’engage à verser une rente à un crédirentier jusqu’à son décès. L’État majore certaines de ces rentes : rentes viagères constituées auprès des compagnies d’assurance-vie au titre de la loi du 2 août 1949, rentes allouées en réparation d’un préjudice (loi du 24 mai 1951), rentes constituées auprès des caisses autonomes mutualistes et de la caisse nationale de prévoyance par des anciens combattants (loi du 9 juin 1948 et article L. 321-9 du code de la mutualité). Depuis plusieurs années, l’État ne participe plus qu’au financement des rentes correspondant à des contrats souscrits avant le 1er janvier 1987.