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N° 3810

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2011.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2012 (n° 3775),

TOME V

JUSTICE ET ACCÈS AU DROIT

PAR M. Jean-Paul GARRAUD,

Député.

Voir le numéro : 3805 (annexe 28).

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, les réponses au questionnaire budgétaire devaient parvenir au rapporteur pour avis au plus tard le 10 octobre 2011 pour le présent projet de loi de finances.

À cette date, la totalité des réponses a été transmise. Votre rapporteur pour avis félicite donc la Chancellerie.

INTRODUCTION 5

I.– LA JUSTICE JUDICIAIRE 9

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL 13

1. L’évolution des emplois 13

a) L’évolution du plafond des équivalents temps plein travaillé 13

b) L’analyse des entrées et des sorties 13

c) Les effectifs de magistrats et de fonctionnaires 14

d) L’amélioration du ratio de greffier par magistrat 15

2. L’évolution des traitements et des primes 16

a) La réforme du régime indemnitaire des magistrats 16

b) Le régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires 20

B. L’ÉVOLUTION DES FRAIS DE JUSTICE 22

1. Une progression constante depuis 2006 22

2. L’évolution des principaux postes de frais de justice en matière pénale 24

3. Les crédits demandés pour 2012 27

C. LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT COURANT 27

1. Des difficultés dénoncées en 2010 dans un rapport d’information budgétaire 27

2. L’évolution au cours du premier semestre 2011 28

D. L’ACTIVITÉ DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES 29

1. L’activité judiciaire civile 29

a) La Cour de cassation 29

b) Les cours d’appel 30

c) Les tribunaux de grande instance 30

d) Les tribunaux d’instance et les juridictions de proximité 31

2. L’activité judiciaire pénale 32

a) La Cour de cassation 32

b) Les cours d’appel 32

c) Les tribunaux correctionnels 33

d) Les tribunaux de police et les juridictions de proximité 33

II.– L’ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE 34

A. L’ÉVOLUTION DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE 35

1. L’évolution des crédits 35

a) Des crédits en augmentation de plus de 7 % pour financer des dépenses appelées à croître 35

b) Des crédits complétés par le produit de la contribution pour l’aide juridique créée par la première loi de finances rectificative pour 2011 37

2. Les mesures de maîtrise de la dépense d’aide juridictionnelle 38

a) « Responsabiliser » les justiciables dans leur usage de l’aide juridictionnelle 38

b) Améliorer le recouvrement des dépenses d’aide juridictionnelle 39

3. L’accroissement attendu du nombre des bénéficiaires 39

4. Les délais de traitement des demandes d’aide juridictionnelle 41

B. LES CRÉDITS EN FAVEUR DE L’ACCÈS AU DROIT, DE LA MÉDIATION FAMILIALE ET DE L’AIDE AUX VICTIMES 41

1. Le développement de l’accès au droit 42

a) Les maisons de justice et du droit 42

b) Les conseils départementaux de l’accès au droit 43

2. L’aide aux victimes 44

a) Le renforcement des mesures favorables aux victimes 44

b) L’action du ministère en faveur des victimes 45

3. La médiation familiale 46

III.– LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE 48

A. LES CRÉDITS DE GESTION DE L’ADMINISTRATION CENTRALE 48

1. Les dépenses de personnel et les mesures indemnitaires 49

2. Les crédits de la politique immobilière et logistique 49

3. La création des plateformes interrégionales de services 50

B. LES CRÉDITS DE L’ACTION SOCIALE 51

C. LES CRÉDITS DE L’INFORMATIQUE ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS 51

IV.– LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE 52

EXAMEN EN COMMISSION 55

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION 87

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS 88

MESDAMES, MESSIEURS,

Dans un contexte international marqué par une crise financière majeure, malgré les contraintes particulièrement fortes pesant sur nos finances publiques et alors que le projet de loi de finances pour 2012, s’inscrivant dans la stratégie de redressement de nos comptes publics portée par la loi de programmation des finances publiques pour 2011-2014 (1), prévoit que budget total de l’État ne progressera pas en valeur, hors charges de la dette et des pensions (2), celui de la mission « Justice » augmente de 4 % en crédits de paiement.

Cette augmentation significative, qui contraste ainsi avec l’effort sans précédent pesant sur les dépenses d’autres missions du projet de loi de finances, est la preuve que la justice demeure au cœur des priorités de l’actuelle majorité, ce dont votre rapporteur pour avis se félicite. Cette forte progression fait d’ailleurs suite à plusieurs années de hausse continue : le budget de la mission avait ainsi progressé de plus de 4 % en 2011, après une hausse de 3,4 % en 2010, de 2,6 % en 2009, de 4,5 % en 2008, de 5 % en 2007, de 4,6 % en 2006 et de 4 % en 2005. Depuis le début de l’actuelle législature, le budget de la justice a progressé de 19 %. La part du budget de la justice dans celui de l’État s’établit pour 2012 à 2,54 %, contre 1,69 % en 2002.

Autre élément particulièrement notable, la mission bénéficie de la création nette de 515 postes sur l’année, chiffre à rapprocher de la réduction globale des effectifs de 30 401 postes sur l’ensemble des missions du budget de l’État. Le plafond des autorisations d’emplois de la mission est porté à 76 887 ETPT.

Votre rapporteur, qui se félicite que la politique de consolidation budgétaire menée par le Gouvernement ne se fasse pas au détriment des grandes priorités de la Nation, note toutefois que le budget de la mission doit financer un ensemble de réformes d’ampleur décidées ou poursuivies au cours de l’année 2011 :

—  la mise en œuvre, dans le prolongement de la réforme de la carte judiciaire, d’un programme immobilier ambitieux pour les juridictions. Des investissements à hauteur de 174,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 23,9 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus cette année pour permettre d’achever les regroupements de juridictions ;

—  les implications sur le budget de l’aide juridictionnelle de la mise en œuvre de la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue (3), qui a rendu possible l’assistance de l’avocat aux auditions des personnes placées en garde à vue. À cette fin, l’aide juridictionnelle a été profondément réformée par la loi de finances rectificative pour 2011 du 29 juillet 2011 (4) (cf infra, II. A. 1. b), qui a notamment prévu qu’une « contribution pour l’aide juridique », payée par les justiciables, viendrait compléter à partir du mois d’octobre 2011 les crédits versés par le budget de l’État au titre de l’aide juridictionnelle ;

—  la mise en œuvre de la loi du 5 juillet 2011 relative à la protection des personnes placées en hospitalisation sous contrainte (5)  aura également un impact non négligeable : cette loi, qui a instauré un contrôle systématique par le juge judiciaire des décisions de placement ou de maintien en hospitalisation psychiatrique contrainte, impliquerait selon les estimations de la Chancellerie la création de quatre-vingts emplois de magistrats et de soixante emplois de greffiers ;

—  l’introduction par la loi du 10 août 2011 (6), de manière expérimentale dans un premier temps, de citoyens assesseurs dans les juridictions correctionnelles et les juridictions d’application des peines impliquerait, quant à elle, l’affectation de soixante-cinq emplois de magistrats et cinquante emplois de greffiers, tandis que des investissements à hauteur de 30 millions d’euros sont prévus pour aménager les salles d’audience qui accueilleront ces nouveaux jurés.

À l’ensemble de ces textes s’ajoute la mise en œuvre de la loi du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel (7) qui fusionne les professions d’avoué et d’avocat afin de simplifier et moderniser les règles de représentation devant les juridictions en permettant au justiciable d’être représenté par un seul auxiliaire de justice en première instance et en appel (8), ainsi que la loi du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques (9) qui a mis en œuvre certaines préconisations du rapport sur les professions du droit remis par Me Jean-Michel Darrois (10) et le projet, en cours d’examen parlementaire, relatif à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles qui met en œuvre certaines préconisations du rapport remis par le Recteur Serge Guinchard sur la répartition des contentieux(11), et notamment la suppression des juridictions de proximité (12).

Il apparaît que l’ensemble des mesures nouvelles applicables en 2012 explique, pour une très large part, l’accroissement des moyens accordés dans le cadre du présent projet de loi de finances par rapport à l’annuité 2012 prévue par la loi de programmation des finances publiques, soit 41 millions d’euros supplémentaires à périmètre constant.

Les auditions conduites dans le cadre de la préparation du présent rapport pour avis ont permis à votre rapporteur de constater la persistance – l’aggravation parfois – des difficultés quotidiennes rencontrées par les magistrats et les fonctionnaires des services judiciaires : manque de personnels dans certaines juridictions, insuffisance des moyens alloués au fonctionnement courant des juridictions, engorgement de certains services… Comme l’an passé, votre rapporteur tient à souligner la qualité et le dévouement des magistrats et des fonctionnaires des services judiciaires de toutes catégories qui assurent, dans des conditions souvent difficiles, le bon fonctionnement du service public de la justice.

La mission « Justice », dotée pour 2012 d’un budget de 7,42 milliards d’euros se décompose cette année en six programmes, dont seulement quatre sont étudiées par le présent avis (13:

—  le programme « Justice judiciaire », dont les crédits progressent de 0,74 % si on intègre pour 2012 ceux du nouveau programme dédié au « Conseil supérieur de la magistrature » qui vient, en application de l’article 9 de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l’application de l’article 65 de la Constitution, remplacer l’action correspondante du programme « Justice judiciaire ».

—  le programme « Accès au droit et à la justice » dont les crédits sont en hausse de 7,1 % ;

—  le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice », dont les crédits progressent de 5,1 %.

SYNTHÈSE DE L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « JUSTICE »
FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT AVIS

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programme

LFI 2011

PLF 2012

LFI 2011

PLF 2012

Justice judiciaire

4 284

3 605

2 960

2 979

CSM (nouveau)

 

3,7

 

3,5

Accès au droit et à la justice

388

403

331

355

Conduite et pilotage de la politique de la justice

248

263

267

281

Total mission Justice

8 957

9 795

7 138

7 421

L’année 2012 verra également la poursuite de la modernisation de la justice et des efforts de rationalisation de ses moyens : la mutualisation des fonctions « support » se concrétisera par la montée en puissance du « plan achats » ministériel et la mise en place de plates-formes régionales de services interdirectionnelles (cf. infra III. A. 3).

La maîtrise des frais de justice constitue un enjeu majeur de ce budget : ils représentent en effet plus de la moitié des charges de fonctionnement du programme « Justice judiciaire » ; votre rapporteur pour avis reste particulièrement préoccupé de leur évolution, notamment en matière pénale.

I.– LA JUSTICE JUDICIAIRE

Le programme « Justice judiciaire » regroupe les crédits nécessaires au fonctionnement de la justice civile, pénale, commerciale et sociale. Il concerne les magistrats et les agents des services judiciaires – fonctionnaires et contractuels –, ainsi que les juges non professionnels bénévoles ou rémunérés à la vacation – juges consulaires, conseillers prud’hommes, assesseurs des tribunaux pour enfants, juges de proximité… –, assistants et agents de justice, déployés dans les juridictions judiciaires.

Au 1er janvier 2012, les juridictions de l’ordre judiciaire comprendront : la Cour de cassation, 36 cours d’appel – comprenant la nouvelle la cour d’appel de Cayenne et le tribunal supérieur d’appel de Saint-Pierre-et-Miquelon –, 165 tribunaux de grande instance, 306 tribunaux d’instance, 135 tribunaux de commerce, 9 tribunaux mixtes de commerce dans les départements et collectivités d’outre-mer et 216 conseils de prud’hommes et tribunaux du travail.

Les services judiciaires ont pour mission principale de rendre la justice. Ils participent également à la conduite des politiques publiques de prévention de la délinquance et de réinsertion, ainsi qu’à des politiques publiques menées en matière économique et sociale, telles la prévention des difficultés des entreprises ou la protection des mineurs.

La gestion des juridictions est assurée exclusivement par des personnels des services judiciaires et comprend deux fonctions :

—  le support logistique de l’activité judiciaire proprement dite revient aux greffiers et secrétaires administratifs (catégorie B) et agents de catégorie C, encadrés par des greffiers en chef (catégorie A). Les greffiers assistent, en outre, les magistrats dans leurs missions, notamment par le suivi et l’authentification des procédures ;

—  la gestion des moyens humains et matériels est pour l’essentiel assurée de manière déconcentrée au niveau des cours d’appel. Les chefs de cour disposent à cet effet d’un service administratif régional (SAR), composé de fonctionnaires et contractuels des services judiciaires, professionnels de la gestion, et dirigés par un coordonnateur, magistrat ou greffier en chef, placé sous l’autorité des chefs de cour.

Les services judiciaires assurent par ailleurs la formation de leurs personnels. L’École nationale de la magistrature (ENM), constituée sous la forme d’un établissement public, est en charge de la formation initiale et continue des magistrats professionnels et non professionnels. La formation initiale des greffiers et greffiers en chef et la formation continue de l’ensemble des fonctionnaires des services judiciaires incombent à l’École nationale des greffes (ENG), service à compétence nationale.

Le périmètre du programme évolue cette année : les crédits du Conseil supérieur de la magistrature n’y figurent plus, mais font l’objet d’un programme distinct (cf. infra IV).

Avec une dotation de 2 978,6 millions d’euros en crédits de paiement, le programme « Justice judiciaire » est en progression de 0,7 % par rapport à 2011 à périmètre constant (hors crédits du CSM), comme le montre le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME
« JUSTICE JUDICIAIRE »

(en millions d’euros)

Actions du programme « Justice judiciaire »

LFI 2011

PLF 2012

Évolution

Traitement et jugement des contentieux civils

911,4

925,6

+ 1,5 %

Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales

1 026,8

1 040,5

+ 1,3 %

Cassation

66,4

59,1

- 11 %

Conseil supérieur de la Magistrature (ancien)

2,9

   

Enregistrement des décisions judiciaires

14,0

13,6

- 2,8 %

Soutien

828,5

827

- 0,2 %

Formation

81,4

84,8

+ 4,2 %

Support à l’accès au droit et à la justice

28,7

28,1

- 2,4 %

Total

2 960,2

   

Total hors CSM

2 957,3

2 978,6

+ 0,7 %

Source : projet annuel de performances pour 2012

Lors de l’examen des crédits de la mission, votre commission des Lois a été saisie d’un amendement du Gouvernement réduisant les crédits du programme « Justice judiciaire » de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, un effort de 9,5 millions d’euros portant sur les crédits d’investissements immobiliers tandis que la subvention pour charges de service public allouée à l’École nationale de la magistrature serait réduite de 500 000 euros (cf. infra). Le garde des Sceaux a fait valoir qu’il s’agissait de la mise en œuvre du plan d’économies supplémentaires d’un milliard d’euros annoncé par le Premier ministre le 24 août 2011(14).

—  L’action « Traitement et jugement des contentieux civils », qui recouvre les moyens humains et budgétaires des juridictions civiles, commerciales et sociales, voit ses crédits progresser de 1,5 %, pour s’établir à 925,6 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

Les frais de justice en matière civile, commerciale et prud’homale, qui figurent à cette action, sont évalués à 63,1 millions d’euros, soit 13,5 % de la dotation globale dédiée aux frais de justice (d’un montant de 470 millions d’euros). Ces crédits doivent notamment permettre de financer les frais supplémentaires induits par la revalorisation tarifaire des enquêtes sociales (15), par l’augmentation attendue du nombre d’expertises psychiatriques prescrites en application de la loi du 5 juillet 2011 (16), ainsi que par l’augmentation du nombre de procédures collectives constatée en 2011.

—  Les crédits de l’action « Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales » (moyens humains et budgétaires des juridictions pénales) progressent sur un an de 1,3  %, pour atteindre 1,04 milliard d’euros en crédits de paiement.

Les frais de justice affectés à cette action s’élèvent à 325,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit près de 70 % de l’enveloppe globale des frais de justice. La dotation ainsi allouée permettra, notamment, le financement des dépenses induites par l’application de la réforme de la médecine légale (17) entrée en vigueur le 15 janvier 2011, et par la loi du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dit « LOPPSI II » (18) qui a étendu les cas d’immobilisation des véhicules d’auteurs d’infractions pour lesquels la confiscation du véhicule est encourue, réforme qui aura pour conséquence un alourdissement des frais d’enlèvement et de gardiennage estimé par le projet annuel de performances à 17 millions d’euros. En outre, la dotation pour 2012 comprend les dépenses correspondant à la part employeur des cotisations sociales des collaborateurs occasionnels du service public de la justice (30 millions d’euros) dans la mesure où ce dispositif concerne très majoritairement des collaborateurs occasionnels réalisant des prestations relevant de l’activité pénale.

En contrepartie, cette dotation tient compte des économies escomptées – évaluées à 6 millions d’euros – à l’issue des négociations qui sont menées avec les opérateurs de téléphonie afin de réduire les coûts des prestations tarifées (telles les interceptions sur téléphone mobile) et d’établir le tarif de prestations qui ne le sont pas encore (notamment celles liées à la géolocalisation).

—  Si les crédits de l’action « Cassation » régressent de 11 % sur un an, il convient de rappeler qu’ils étaient en hausse de 20 % l’an dernier, augmentation qui avait essentiellement financé des dépenses de structure. Les crédits, évalués à 59 millions d’euros, sont consacrés aux rémunérations des magistrats, fonctionnaires et autres personnes affectées à la haute juridiction, ainsi qu’aux frais de justice. Les crédits de fonctionnement courant sont désormais affectés à l’action « Soutien », conformément à la nouvelle architecture budgétaire de l’application Chorus.

—  Les crédits de l’action « Enregistrement des décisions judiciaires », qui recouvre l’ensemble des moyens humains permettant le fonctionnement du casier judiciaire national ainsi que ses frais de justice, connaissent une baisse de 2,8 %, pour s’établir à 13,6 millions d’euros. Cette réduction résulte, selon les informations transmises par la Chancellerie, des efforts menés en matière d’industrialisation du courrier.

—  Les crédits de l’action « Soutien » (moyens de la direction des services judiciaires) sont quasiment stables : ils diminuent de 0,2 % par rapport à la loi de finances pour 2011, pour se fixer à 827 millions d’euros en crédits de paiement.

Les crédits des frais de justice attachés à cette action s’élèvent à 79,5 millions d’euros, soit près de 17 % de l’enveloppe globale des frais de justice. Ils regroupent les frais qui ne sont rattachés ni aux actions civiles, ni aux actions pénales : il s’agit de certains frais postaux, des marchés de transport de dossiers et de scellés ou des marchés d’analyses génétiques, notamment.

—  Les crédits de paiement de l’action « Formation », qui recouvre l’ensemble des moyens humains et budgétaires permettant d’assurer la formation initiale et continue des magistrats et fonctionnaires de greffe, sont en hausse de 4,2 % en 2012 ; ils s’élèvent à près de 85 millions d’euros.

La subvention pour charges de service public accordée à l’École nationale de la magistrature s’élève, dans le cadre du projet de loi de finances initial, à 26,5 millions d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 7,5 %. Cette augmentation des ressources allouées à l’école prend en compte l’accroissement important du nombre d’auditeurs de justice qu’elle aura à former en 2012 (102 auditeurs supplémentaires). En outre, le renforcement de la formation continue des magistrats entraîne des coûts supplémentaires en matière de dépenses de personnel (intervenants extérieurs, notamment). D’importants travaux de restructuration des locaux sont en outre prévus en 2012. Dans un tel contexte, votre rapporteur pour avis émet une réserve sur l’imputation de la réduction des crédits opérée par l’amendement du Gouvernement, consistant à minorer la subvention pour charges de service public accordée à l’École nationale de la magistrature de 500 000 euros.

Les crédits consacrés, d’une part à l’École nationale des greffes, et d’autre part à la formation régionalisée, sont évalués respectivement à 4,1 millions d’euros et 1,8 million d’euros.

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL

Les crédits relatifs aux dépenses de personnel augmentent de 1,45 % entre 2011 et 2012, soit 29,5 millions d’euros supplémentaires.

1. L’évolution des emplois

a) L’évolution du plafond des équivalents temps plein travaillé

Le programme « Justice judiciaire » comprend 31 137 équivalents temps plein travaillé (ETPT) (19), dont 8 927 ETPT de magistrats, 2 811 ETPT de fonctionnaires de catégorie A+ ou A, 8 871 ETPT de fonctionnaires de catégorie B (dont 96 % de greffiers) et 10 528 ETPT de fonctionnaires de catégorie C.

Le tableau ci-dessous retrace l’évolution sur un an du nombre d’emplois en équivalent temps plein du programme par catégories d’emplois :

ÉVOLUTION DES PLAFONDS D’EMPLOIS EN ÉQUIVALENTS TEMPS PLEIN

 

Plafond LFI 2011

Plafond PLF 2012

Variation sur un an

Part dans l’effectif total de 2012

Magistrats de l’ordre judiciaire

8 785

8 927

+ 142

28,7 %

Personnels d’encadrement

2 889

2 811

- 78

9 %

Personnel de greffe, d’insertion et éducatifs (catégorie B+)

8 343

8 484

+ 141

27,3 %

Personnels administratifs et techniques de catégorie B

369

387

+ 18

1,2 %

Personnels administratifs et techniques de catégorie C

10 632

10 528

– 101

33,8 %

Total

31 018

31 137

+ 119

100 %

Source : projet annuel de performances pour 2012

b) L’analyse des entrées et des sorties

Le tableau des entrées et sorties présenté dans le projet annuel de performances prévoit que 282 emplois supplémentaires seront ouverts en 2012 :

Ÿ  Au titre des départs de magistrats et des fonctionnaires, le ministère estime qu’ils concerneront :

– 261 magistrats de l’ordre judiciaire, dont 250 départs en retraite ;

– 76 fonctionnaires d’encadrement (A+ et A), correspondant quasi exclusivement à des départs en retraite ;

– 350 fonctionnaires de la catégorie B+ (greffiers), correspondant uniquement à des départs en retraite ;

– 471 fonctionnaires de catégorie C, correspondant quasi exclusivement à des départs en retraite.

Au total, le ministère anticipe que 1 158 agents quitteraient leurs fonctions au cours de l’année 2012, dont 1 145 départs en retraite.

Ÿ  Au titre des entrées de magistrats et des fonctionnaires, le ministère estime qu’ils concerneront :

– 345 magistrats de l’ordre judiciaire ;

– 100 fonctionnaires d’encadrement (A+ et A) ;

– 720 fonctionnaires de catégorie B+ (greffiers) ;

– 30 fonctionnaires de catégorie B ;

– 245 fonctionnaires de catégorie C.

Au total, le ministère anticipe 1 440 entrées de magistrats et de fonctionnaires au cours de l’année 2012.

c) Les effectifs de magistrats et de fonctionnaires

Le tableau suivant montre l’évolution des effectifs de magistrats depuis 2005 :

ÉTAT DES EFFECTIFS (ETPT) DE MAGISTRATS
(
Situation au 1er septembre de chaque année)

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

A – Magistrats en détachement

218

221

228

217

215

247

253

B – Magistrats en congé de longue durée

20

25

16

21

15

19

12

C – Magistrats en congé parental

7

11

13

15

15

12

13

D – Magistrats en disponibilité

71

80

88

90

83

83

74

E – Magistrats en activité

7 586

7 718

7 950

8 113

8 208

8 187

8 080

F – Magistrats maintenus en activité en surnombre

47

50

45

51

61

71

92

G  Effectifs réels des magistrats en activité (E+F)

7 633

7 768

7 995

8 164

8 269

8 258

8 172

Source : ministère de la Justice et des libertés

En ce qui concerne les fonctionnaires des services judiciaires, le tableau ci-après montre l’évolution des effectifs depuis 2005.

EFFECTIFS RÉELS DE FONCTIONNAIRES DES SERVICES JUDICIAIRES
(Situation au 1er juillet de chaque année)

Catégories de fonctionnaires

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Greffiers en chef

1 775

1 843

1 839

1 785

1 797

1 824

1 797

Greffiers

8 904

8 753

8 762

8 772

8 875

8 782

8 934

Secrétaires administratifs

     

168

166

340

420

Personnel de catégorie C (administratifs et techniques)

10 881

11 595

11 575

11 317

11 342

11 161

10 393

Total

21 560

22 191

22 176

22 042

22 180

22 107

21 544

Source : ministère de la Justice et des libertés

Ce tableau permet de constater que le nombre de greffiers en chef en poste en 2011 diminue de nouveau pour atteindre le niveau de 2009 ; à l’inverse, les effectifs de greffiers s’accroissent, de même que ceux des secrétaires administratifs, ce qui permet aux greffiers de se recentrer sur leurs missions d’assistance des magistrats. Enfin, les effectifs réels de fonctionnaires de catégorie C ont baissé, depuis 2007, de près de 11 %.

Les syndicats de fonctionnaires entendus par votre rapporteur, toutes catégories confondues, ont de nouveau souligné la nécessité de recruter des fonctionnaires de catégorie C. Le manque de personnels techniques pèse sur le fonctionnement de certaines juridictions alors que les besoins sont grands pour la gestion des archives, la numérisation et l’indexation des dossiers, le rangement des scellés ou la circulation du courrier.

Si votre rapporteur salue les mesures permettant aux personnels de catégorie C de pouvoir accéder au corps des secrétaires administratifs, de catégorie B, il observe que les fonctions accomplies par les fonctionnaires de catégorie C doivent toujours être assumées dans les juridictions.

d) L’amélioration du ratio de greffier par magistrat

Votre rapporteur se félicite de l’amélioration cette année du nombre de greffiers affectés dans les services travaillant en liaison directe avec les magistrats, rapporté à celui des magistrats. Les données figurent dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DU NOMBRE DES MAGISTRATS ET DES GREFFIERS
AFFECTÉS AUPRÈS DE MAGISTRATS

 

2007

2008

2009

2010

2011

Magistrats

7 950

8 113

8 195

8 185

8 080

Greffiers affectés auprès de magistrats

6 942

7 012

7 059

7 079

7 433

Ratio

0,87

0,86

0,86

0,86

0,92

Source : ministère de la Justice et des libertés

Il convient de préciser que le nombre de magistrats présenté dans ce tableau correspond aux personnes physiques en activité au 1er juillet 2011. De même, le nombre de greffiers ne prend en compte que les greffiers affectés dans des services travaillant en liaison directe avec des magistrats à cette même date.

Votre rapporteur insiste sur le fait qu’un magistrat ayant besoin de se concentrer sur ses missions, les fonctionnaires des services judiciaires doivent pouvoir pleinement jouer leur rôle essentiel dans le fonctionnement de la justice. Il rappelle que, sans fonctionnaires, aucun magistrat ne peut prendre de décision et que les fonctionnaires et les magistrats forment une équipe dont tous les acteurs sont indispensables. Seul le très fort dévouement au service public des fonctionnaires permet de maintenir l’équilibre fragile dans lequel se trouvent nombre de juridictions.

2. L’évolution des traitements et des primes

Le total des crédits de personnel demandés pour la justice judiciaire atteint 2,04 milliards d’euros (en progression de 1,8 % sur un an). Leur répartition est présentée dans le tableau ci-après.

RÉPARTITION DES CRÉDITS DE PERSONNEL DEMANDÉS

(en millions d’euros)

 

2011

2012

Magistrats

979,0

959,6

Fonctionnaires d’encadrement

157,5

189,3

Fonctionnaires de catégorie B+

423

429,5

Fonctionnaires de catégorie B

16

18,4

Fonctionnaires de catégorie C

424, 2

439,2

Total

1 999,7

2 036

Source : projets annuels de performances pour 2011 et pour 2012

a) La réforme du régime indemnitaire des magistrats

Le régime indemnitaire des magistrats a fait l’objet d’une réforme d’ensemble en 2011 afin de le moderniser et de le mettre pleinement en conformité avec les règles de gestion de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Le régime indemnitaire en vigueur depuis 2003 prévoyait, outre l’indemnisation des astreintes, l’attribution d’une indemnité destinée à rémunérer l’importance et la valeur des services rendus et à tenir compte des sujétions afférentes à l’exercice des fonctions des magistrats.

Cette indemnité comprenait :

—  une prime forfaitaire servie à raison de la fonction exercée, calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut et versée mensuellement ;

—  une prime modulable attribuée en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l’institution judiciaire, également calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut et versée mensuellement ;

—  une prime pour travaux supplémentaires, attribuée à raison d’un surcroît d’activité résultant d’absences prolongées de magistrats, exprimée en points et versée semestriellement.

À ces primes pouvait s’ajouter, le cas échéant, une prime complémentaire versée mensuellement à raison des attributions spécifiques confiées.

Le décret du 29 juillet 2011 (20) et l’arrêté du même jour (21), publiés au Journal officiel le 31 juillet 2011, ont simplifié ce dispositif indemnitaire - ne sont maintenues que deux primes, la prime forfaitaire et la prime modulable, cette dernière intégrant désormais la prime pour travaux supplémentaires et la prime complémentaire – et prévu l’augmentation progressive du taux moyen de la prime modulable des magistrats exerçant leurs fonctions dans les juridictions du premier degré, ainsi que des magistrats de cours d’appel :

—  la prime forfaitaire continue à être versée à raison de la fonction exercée ; ses modalités ne sont pas modifiées ;

—  la définition de la prime modulable est modifiée afin qu’il soit désormais tenu compte, pour l’appréciation de la contribution au bon fonctionnement de la justice, des éventuelles attributions spécifiques confiées au magistrat ou, le cas échéant, du surcroît d’activité résultant d’absences prolongées de magistrats.

La revalorisation de la prime, à compter du 1er août 2011, concerne les magistrats relevant du « régime général » prévu par le décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003, à savoir ceux exerçant dans les juridictions du premier et du second ressort, y compris les chefs de cour et de juridiction. Elle s’applique également aux inspecteurs généraux des services judiciaires et aux magistrats affectés à l’École nationale des greffes. Le taux moyen de leur prime, fixé à 9 % du traitement indiciaire brut au 1er janvier 2011, augmentera progressivement pour atteindre 12 % en 2013, conformément à un barème fixé par l’arrêté du 29 juillet 2011 et reproduit dans le tableau ci-après :

REVALORISATION DES TAUX MOYENS ET MAXIMUM DE LA PRIME MODULABLE ATTRIBUÉE À CERTAINS MAGISTRATS,
EN APPLICATION DE L’ARRÊTÉ DU 29 JUILLET 2011

 

À compter du 1er août 2011

À compter du 1er août 2012

À compter du 1er janvier 2013

Taux moyen de la prime modulable attribuée aux magistrats exerçant leurs fonctions en juridiction du premier et du second ressort

10,5 %

11,5 %

12 %

Taux maximal d’attribution individuelle de la prime modulable

16,5 %

17,5 %

18 %

Taux de la prime modulable attribuée aux premiers présidents des cours d’appel et aux procureurs généraux près lesdites cours, aux présidents des tribunaux supérieurs d’appel et aux procureurs de la République près lesdits tribunaux ainsi qu’au directeur de l’École nationale des greffes

10,5 %

11,5 %

12 %

Taux de référence de la prime modulable attribuée à l’inspecteur général des services judiciaires

10,5 %

11,5 %

12 %

Taux maximal de la prime modulable attribuée à l’inspecteur général des services judiciaires

21,5 %

22,5 %

23 %

La revalorisation ne s’applique, en revanche, pas aux magistrats relevant de régimes indemnitaires spécifiques. Ainsi, ne sont concernés ni les magistrats exerçant leurs fonctions à la Cour de cassation, dont le taux moyen de la prime modulable est fixé par le décret n° 2003-1285 du 26 décembre 2003 à 14 % et le taux maximal à 20 %, ni les magistrats détachés à l’École nationale de la magistrature – les textes régissant ces emplois étant en cours de modification -, ni les magistrats du cadre de l’administration centrale du ministère de la Justice et des libertés, dont le dispositif indemnitaire distinct ne comprend pas les mêmes composantes.

Il revient aux chefs de cour de déterminer le taux d’attribution individuelle de la prime modulable en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l’institution judiciaire, notion entendue par le Conseil d’État comme « la qualité et la quantité de travail fourni », ainsi que le rappelle la circulaire du 9 août 2011 relative à la mise en œuvre de la revalorisation du régime indemnitaire des magistrats de l’ordre judiciaire ; cette circulaire invite les chefs de cour à ne pas appliquer mécaniquement la revalorisation à tous les magistrats mais à « procéder à une véritable modulation » afin d’assurer « une véritable reconnaissance du mérite des magistrats ». La circulaire dresse une liste, non exhaustive, de critères pouvant fonder la modulation, au titre desquels figure notamment : la gestion des flux et des stocks et le respect des délais, la charge de travail supplémentaire engendrée par le suivi de dossiers d’une particulière complexité ou la capacité à proposer des pratiques destinées à améliorer la qualité du service public de la justice.

La décision individuelle du chef de cour, qui n’a pas à être motivée, peut faire l’objet d’un recours gracieux, adressé, pour les magistrats du siège au premier président, pour ceux du parquet, au procureur général. Le Conseil d’État, qui a admis la légalité de la prime modulable, exerce un contrôle limité à l’erreur de droit et à l’erreur manifeste d’appréciation. Il a jugé que le taux individuel ne pouvait être fixé suivant des critères indépendants de la contribution au bon fonctionnement de l’institution judiciaire, tels l’existence d’un différend avec le supérieur hiérarchique (CE 8 juillet 2005, CE 22 février 2006), l’accomplissement d’une mobilité (CE 22 octobre 2010) ou encore l’ancienneté dans les fonctions (CE 6 avril 2006, CE 10 juillet 2006).

Le fait que la revalorisation indemnitaire des magistrats passe par une hausse de la prime modulable a été très critiqué par certains syndicats de magistrats entendus par votre rapporteur qui ont estimé que la détermination par les chefs de cour du taux individuel de la prime peut induire une forme de pression hiérarchique sur les magistrats.

Selon les éléments transmis à votre rapporteur par la Chancellerie, le montant global annuel de la prime modulable pour l’ensemble des budgets opérationnels de programmes du programme « Justice judiciaire », qui atteignait 34,5 millions d’euros en 2009 et 34,93 millions d’euros en 2010, devrait s’élever à 37,2 millions d’euros en 2011.

Par ailleurs, un autre arrêté du 29 juillet 2011 (22) a modifié les conditions d’attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) aux magistrats de l’ordre judiciaire exerçant des fonctions de responsabilité supérieure.

La NBI a été mise en œuvre par le décret n° 2004-676 du 5 juillet 2004 (23) et son arrêté d’application du même jour. Ce décret fixe la liste des fonctions pouvant ouvrir droit au versement de la NBI, tandis que l’arrêté d’application précise le montant de la bonification et le nombre d’emplois bénéficiaires pour chacune des fonctions ainsi mentionnées. Le nombre de points attribué repose sur une classification objective des emplois concernés, tels que le grade et l’importance de la juridiction. En 2004, la NBI concernait 117 magistrats ; en décembre 2006, un arrêté a étendu le bénéfice de la NBI à un nombre plus important de magistrats (296 bénéficiaires).

L’arrêté précité du 29 juillet 2011 a étendu le bénéfice de la NBI de 80 points à vingt-six chefs de juridiction supplémentaires, en raison de l’activité des juridictions dans lesquelles ils exercent ; il a, en outre, porté de 80 à 100 points la NBI des douze chefs de juridiction dont l’emploi a été requalifié « hors hiérarchie » par décret du 12 novembre 2010 (24). Le nombre de bénéficiaires de la NBI s’élèvera désormais à 334.

b) Le régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires

Le régime indemnitaire des greffiers en chef et des greffiers n’a pas été revalorisé depuis 2001, malgré plusieurs demandes en ce sens présentées par le ministère de la Justice. Le régime indemnitaire des fonctionnaires de catégorie C n’a pas été revalorisé depuis 2006.

En application du décret n° 2005-1602 du 19 décembre 2005, les greffiers en chef et les greffiers perçoivent une indemnité forfaitaire de fonction (IFF), fixée en pourcentage de l’indice réel moyen de leur grade. Le taux indemnitaire moyen de ces deux corps n’a pas été revalorisé depuis 2001. Il a même diminué pour les greffiers, lors de la mise en œuvre de la réforme statutaire en 2003. En effet, la transformation de la structure de ce corps (deux grades au lieu de trois) a entraîné une modification de l’indice réel moyen par grade. Cependant, cette baisse du taux indemnitaire n’a pas entraîné de diminution des montants individuels servis.

En application du décret n° 2005-1603 du 19 décembre 2005, les fonctionnaires de catégorie C des services judiciaires bénéficient d’une indemnité spéciale fixée en pourcentage de l’indice réel moyen de leur grade, dont le taux moyen a été régulièrement revalorisé.

Le régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires a été modifié en 2005, afin de permettre à ceux-ci de bénéficier, sous certaines conditions, d’une indemnité complémentaire liée aux attributions spécifiques qui peuvent leur être confiées. Si les conditions de son attribution sont réunies, l’indemnité complémentaire s’ajoute aux indemnités déjà perçues. L’indemnité complémentaire est attribuée :

—  aux fonctionnaires qui exercent à titre habituel leurs fonctions dans un service spécialisé dans la poursuite ou l’instruction des infractions terroristes (25) ;

—  aux fonctionnaires qui exercent par intérim la fonction de chef de greffe, lorsque l’emploi afférent à cette fonction est vacant et que le fonctionnaire est d’un grade inférieur à celui de l’emploi vacant (26).

Une réflexion est en outre actuellement menée sur la mise en place de d’une prime de fonction et de résultats (PFR). Cette prime, qui vise à simplifier l’architecture du régime indemnitaire applicable aux fonctionnaires des services judiciaires, doit permettre d’assurer une reconnaissance du mérite et de la performance individuelle mais aussi collective des agents, en lien avec la fixation d’objectifs professionnels et d’évaluation.

La prime de fonction et de résultats a vocation à s’appliquer aux corps et emplois de la filière administrative. Un premier projet de cotation des postes de secrétaires administratifs est actuellement en cours d’expertise par les services du ministère. La mise en place de la PFR est également à l’étude s’agissant des corps des greffiers et des greffiers en chef des services judiciaires, dans le prolongement de la mise en œuvre au titre de l’année 2011 de l’expérimentation de la procédure d’évaluation.

S’agissant du régime indemnitaire des fonctionnaires dans leur ensemble, votre rapporteur constate que le montant qu’ils perçoivent est sans commune mesure avec les primes perçues par les magistrats. Il souhaite donc que ces indemnités soient très significativement revalorisées afin que l’écart de rémunération ne s’accroisse pas. Les responsabilités des magistrats et des fonctionnaires n’étant pas de même nature, il ne s’agirait pas d’aligner les primes de ces derniers sur celles des magistrats mais d’envoyer un message fort de reconnaissance envers ces fonctionnaires pour lesquels l’effort aujourd’hui consenti n’est pas à la hauteur du rôle joué par eux dans le fonctionnement des juridictions. Votre rapporteur rappelle que l’amélioration du service public de la justice est l’affaire de tous les personnels, qu’ils soient magistrats ou fonctionnaires.

La question du régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires rejoint celle de la possible intégration par les greffiers du « nouvel espace statutaire » de la catégorie B de la fonction publique (27).

Par décret en date du 7 octobre dernier (28), le corps des secrétaires administratifs du ministère de la Justice et des libertés a été rattaché au nouvel espace statutaire de la catégorie B et aux nouvelles dispositions statutaires applicables aux secrétaires administratifs de la fonction publique de l’État.

La question du rattachement des greffiers pose, en revanche, difficulté, comme l’ont indiqué à votre rapporteur les représentants syndicaux ; ce projet est vécu par les greffiers comme un « déclassement », la négation de leur statut particulier de fonctionnaires investis d’une fonction juridictionnelle.

B. L’ÉVOLUTION DES FRAIS DE JUSTICE

1. Une progression constante depuis 2006

Les derniers exercices budgétaires sont marqués par une hausse significative du montant des frais de justice : de 2002 à 2005, la dépense globale a progressé de 68 % ; sur la même période, les frais de justice pénale ont globalement augmenté de 82 %. L’année 2006 a marqué une rupture avec cette tendance structurelle à la hausse. Mais depuis 2007, la dépense progresse à nouveau. Elle est passée successivement de 388,6 millions d’euros en 2007, à 401,7 millions d’euros en 2008 (+ 3,4 %) et à 432,5 millions d’euros en 2009 (+ 7,7 %). Elle atteignait 467,8 millions d’euros en 2010 (+ 8,2 %).

Le tableau ci-après présente l’évolution des frais de justice depuis 2005. Les frais postaux, figurant à l’action « Soutien » et non ventilés par catégorie sont présentés dans la ligne « Autres frais de justice ».

ÉVOLUTION DES FRAIS DE JUSTICE DEPUIS 2005

(en millions d’euros)

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

 Frais de justice pénale

376,7

262,4

260,7

269,5

293,4

323,5

 Frais de justice en matière civile et prud’homale

60,6

23,0

23,0

24,0

23,1

21,4

 Frais de justice commerciale

37,5

23,2

25,3

30,3

36,0

41,7

 Autres frais de justice

12,6

70,8

79,7

77,9

80,1

81,2

 Total frais de justice

487,4

379,4

388,6

401,7

432,5

467,8

Source : ministère de la Justice et des libertés

Les frais de justice pénale demeurent la composante essentielle des frais de justice : ils représentent 69 % du volume global, soit un peu plus de 323 millions d’euros en 2010, montant en hausse de plus de 10 % sur un an.

Les frais de justice en matière commerciale (plus de 41 millions d’euros en 2010) dépassent depuis 2006 les frais de justice en matière civile (21 millions d’euros, en baisse depuis 2008) (29).

Votre rapporteur pour avis a déjà souligné en octobre 2010, dans un rapport d’information budgétaire sur les moyens de fonctionnement courant des juridictions (30), les difficultés dans lesquelles se trouvent nombre de juridictions pour honorer certaines factures en fin d’année : c’est le cas des frais d’expertise mais aussi des frais postaux qui augmentent du fait de l’accroissement de certains contentieux, notamment le surendettement devant les tribunaux d’instance. Depuis plusieurs exercices budgétaires, la cessation des paiements intervient à une date à laquelle des charges restent pourtant à payer. Le montant des arriérés accumulés et la suspension des paiements à certains créanciers ont même conduit certains d’entre eux à menacer de suspendre leurs prestations. Un autre risque pèse sur l’expertise judiciaire : le vivier d’experts – et surtout de bons experts – pourrait s’appauvrir du fait des retards de paiement.

Votre rapporteur s’est également intéressé à l’évolution de la dépense moyenne de frais de justice par affaire faisant l’objet d’une réponse pénale, qui constitue l’indicateur attaché à l’objectif de maîtrise de la croissance des frais de justice du projet annuel de performances.

Cette dépense moyenne est passée entre 2009 et 2010 de 225 à 288 euros, soit une hausse de 28 %. Cette augmentation est sans doute en grande partie due à la baisse de 18 % en volume des affaires ayant reçu une réponse pénale ; elle n’en demeure pas moins préoccupante, car la tendance est à la poursuite de la croissance des frais de justice. Sur l’année 2011, les frais d’honoraires de médecins et experts médicaux ont augmenté de 11 millions d’euros, ceux de traducteurs et interprètes de 4,5 millions d’euros, les frais de location de 4 millions d’euros, les frais d’analyses génétiques de 2,5 millions d’euros, de même que les frais de réquisition des opérateurs de téléphonie. Comme le reconnaît le projet annuel de performances, « dans ces domaines, les efforts de régulation de la dépense, notamment grâce à l’élaboration de marchés publics nationaux, ne permettent pas encore de contrebalancer les évolutions légales, la complexification des dossiers et les exigences en matière de recherche de la vérité ».

2. L’évolution des principaux postes de frais de justice en matière pénale

Le tableau suivant présente l’évolution des principaux postes de dépenses de frais de justice en matière pénale, qui représentent eux-mêmes de l’ordre de 70 % de l’ensemble des frais de justice :

ÉVOLUTION DES PRINCIPAUX POSTES DES FRAIS DE JUSTICE EN MATIÈRE PÉNALE

(en millions d’euros)

Nature de dépenses

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Évolution 2004/2010

Évolution 2009/2010

Frais médicaux (hors analyses génétiques à partir de 2005)

77

70,3

61,4

65,0

72,3

75,1

85,9

+ 11,49 %

+ 14,3 %

Réquisitions aux opérateurs (hors location de matériel)

66

69,1

38,3

34,6

33,3

33,0

35,6

- 45,95 %

+ 8,1 %

Traduction et interprétariat

13,9

15,0

13,2

14,2

15,1

24,5

28,9

+ 107,9 %

+ 18,2 %

Enquêtes sociales rapides, de personnalité, contrôle judiciaire

10,7

20,3

19,8

21,0

22,6

22,7

23,6

+ 119,4 %

+ 3,9 %

Analyses génétiques

nd

23,9

20,5

16,8

17,5

20,9

23,3

nd

+ 11,3 %

Frais en matière de scellés

19,8

26,9

18,3

17,1

15,2

15,2

16,7

- 16 %

+ 9,4 %

Frais d’huissiers de justice

14,3

14,5

14,3

14,5

15,1

15,3

16,3

+ 13,87 %

+ 6,9 %

Source : ministère de la Justice et des libertés

L’ensemble de ces différents postes de dépenses connaissent une hausse sur un an, parfois très importante : c’est le cas des dépenses médicales et des frais de traduction et d’interprétariat.

—  Les frais médicaux demeurent le premier poste des frais de justice pénale : la dépense est passée de 65 millions d’euros en 2007 à 75,1 millions d’euros en 2009 et à plus de 85 millions d’euros en 2010, soit une hausse de plus de 14 % en un an.

Ces frais comprennent les honoraires et les indemnités alloués pour la réalisation d’examens psychiatriques, médico-psychologiques ou psychologiques, pour des examens toxicologiques, biologiques ou radiologiques, ainsi pour les autres examens médicaux réalisés aux cours de l’enquête sur les personnes placées en garde à vue, sur les victimes, avec fixation de l’incapacité temporaire de travail, ou encore les autopsies.

Alors que les dépenses baissaient entre 2004 et 2006, elles ont de nouveau augmenté à partir de 2007, sous l’influence de plusieurs facteurs. Si les frais médicaux font, pour la plupart, l’objet d’une tarification par le code de procédure pénale, les revalorisations successives du tarif de la consultation d’un médecin généraliste intervenues au 1er août 2006 et au 1er juillet 2007 ont conduit à augmenter le tarif de certaines prestations tel que l’examen médical de garde à vue ou l’examen médical des victimes.

En second lieu, les différentes lois de prévention de la sécurité routière ont encouragé les dépistages de stupéfiants, notamment par l’utilisation de tests salivaires, qui, s’ils sont positifs, induisent des frais d’analyse toxicologique. Ont également eu un impact la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté qui accroît les obligations de recourir à une expertise psychiatrique avant un aménagement de peine et l’augmentation continue au cours des dernières années du nombre de placements en garde à vue.

—  Les dépenses relatives aux analyses génétiques continuent leur forte progression ; après une hausse de plus de 19 % l’année précédente, elles ont progressé de plus de 11 % entre 2009 (20,9 millions d’euros) et 2010 (23,3 millions d’euros). Ces dépenses recouvrent les frais d’analyses génétiques effectuées à partir de prélèvements sur individus, les frais d’analyses réalisées à partir de traces biologiques – particulièrement coûteuses en matière criminelle –ainsi que les frais de validation de rapprochements entre des profils génétiques.

—  Les frais liés aux réquisitions adressées aux opérateurs de télécommunications, qui étaient en baisse depuis 2006, repartent à la hausse en 2010. Avant 2006, la très forte progression des frais de justice était largement due à ce type de frais. Entre 2006 et 2009, les efforts importants déployés afin de maîtriser les coûts  – mise en place de tarifications en matière de production et de fourniture de données techniques en 2006 (31) et en matière d’interceptions de communications téléphoniques en 2007 (32) – ont permis de les réduire substantiellement, même si cette baisse s’expliquait aussi par les retards accumulés dans le paiement des factures aux opérateurs de communications électroniques. Cette dépense qui s’élevait à 69,1 millions d’euros en 2005, ne représentait plus que 33,3 millions d’euros en 2008 et 33 millions d’euros en 2009. Toutefois la tendance s’est inversée en 2010 avec une progression de plus de 8 % sur un an ; cette augmentation traduit, d’une part, un effet volume, le nombre de réquisitions ayant progressé, d’autre part un effet prix, les réquisitions portant sur de nouvelles prestations, coûteuses et non encore tarifées, mais qui devraient l’être d’ici la fin de l’année 2011 selon les indications données par la Chancellerie : il s’agit des prestations liées à la géolocalisation et à l’Internet. En outre, il est prévu de revoir à la baisse les tarifs des interceptions sur téléphone mobile. Au total, les économies attendues sont évaluées à 6 millions d’euros.

Les frais de location de matériel d’interception ont progressé de 17,5 % entre 2009 (22,3 millions d’euros) et 2010 (26,2 millions d’euros). Cette hausse significative est liée tant au perfectionnement du matériel qu’à l’augmentation du nombre des interceptions judiciaires. Si ces frais ne sont pas tarifés, ils ont vocation à disparaître à terme avec la mise en place, prévue au cours de l’année 2012, d’une plateforme nationale des interceptions judiciaires.

—  Les frais d’interprétariat et de traduction, qui avaient connu une progression de 61,8 % entre 2008 (15,1 millions d’euros) et 2009 (24,5 millions d’euros), augmentent à nouveau de 18,2 % entre 2009 et 2010 (28,9 millions d’euros). La très forte progression de ce poste de dépenses s’explique par les revalorisations tarifaires prévues par un décret du 30 juillet 2008 (33) et son arrêté d’application du 2 septembre 2008. En effet, ces textes ont non seulement revalorisé le tarif de l’heure d’interprétariat, mais aussi introduit des majorations pour la première heure d’interprétariat (+ 40 %) et pour les missions réalisées la nuit, le week-end ou les jours fériés.

—  Les frais de gardiennage et de scellés connaissent sur un an une hausse significative de 9,4 %, qui fait cependant suite à plusieurs années de baisse. En 2007, un audit de modernisation sur la gestion des scellés avait conclu à la nécessité d’instaurer un contrôle effectif de la durée de garde des véhicules en fourrière et de développer leur vente durant l’instruction. L’application des préconisations de cet audit a permis une stabilisation de la dépense jusqu’en 2009 ; l’augmentation de la dépense en 2010 résulterait de la mise en place d’un plan d’apurement des objets placés sous scellés.

Votre rapporteur pour avis rappelle que la mise en œuvre de la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale, votée par le Parlement à l’initiative du Président Jean-Luc Warsmann, devrait être de nature à sensiblement diminuer ces frais au cours des prochains exercices.

—  Les frais d’enquêtes sociales rapides, d’enquêtes de personnalité et de contrôle judiciaire ont progressé que de 3,9 % en 2010, pour une dépense de 23,6 millions d’euros. Cette situation s’expliquerait par l’application des dispositions d’un décret du 26 septembre 2007 (34) qui, sans procéder à une revalorisation des tarifs, a arrondi leurs montants dans un souci de simplification.

—  La dépense relative aux frais d’huissiers passe de 15,3 millions d’euros en 2009 à 16,3 millions d’euros en 2009. Cette hausse de près de 7 % résulterait de la revalorisation des tarifs alloués aux huissiers audienciers en application du décret du 26 septembre 2007 précité et de la priorité donnée en 2010 au paiement de leurs mémoires.

3. Les crédits demandés pour 2012

Les crédits demandés pour 2012 s’élèvent à 470 millions d’euros, soit 10 millions d’euros de plus que le montant figurant dans le projet de loi de finances pour 2011.

La Chancellerie a indiqué à votre rapporteur pour avis que ce montant tenait compte des évolutions constatées depuis 2008 et de l’effet de diverses réformes, telles les dépenses induites par l’application de la réforme de la médecine légale (54,2 millions d’euros), par la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure en matière d’immobilisation de véhicules (17,2 millions d’euros) et par la réforme de l’hospitalisation sous contrainte.

Elle comprend en outre, comme l’an dernier, les dépenses correspondant à la part employeur des cotisations sociales des collaborateurs occasionnels du service public de la justice (30 millions d’euros).

C. LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT COURANT

1. Des difficultés dénoncées en 2010 dans un rapport d’information budgétaire

Dans un rapport d’information présenté en octobre 2010 sur les moyens de fonctionnement courant des juridictions (35), votre rapporteur pour avis avait montré que ces dépenses étaient particulièrement contraintes, conduisant les juridictions à renoncer le plus souvent aux dépenses dites « non obligatoires », tel le renouvellement de véhicules ou d’ordinateurs ou l’achat de nouveaux matériels, et à se limiter aux dépenses dites « obligatoires » (location de bâtiments, frais de télécommunications, entretien des matériels…).

Ce rapport avait notamment mis en évidence les difficultés de la programmation budgétaire des crédits de fonctionnement : chaque année, la dotation initiale est inférieure à la demande budgétaire ; aucune réserve de crédits ne peut être constituée au niveau régional pour faire face à d’éventuels aléas de gestion ou dépassements de prévision. De plus, il arrive souvent que des crédits complémentaires soient délégués en fin d’exercice, ce qui ne permet pas de les utiliser et conduit à reporter d’année en année les travaux les plus lourds.

2. L’évolution au cours du premier semestre 2011

La dotation du programme « Justice judiciaire » consacrée au fonctionnement courant des juridictions, de l’École nationale des greffes et du Conseil supérieur de la magistrature figurant au titre de la loi de finances initiale pour 2011 s’élevait à 290,1 millions d’euros.

La consommation totale en fonctionnement courant au 31 août 2011 s’élève à 142,9 millions d’euros (dont 117,4 pour les seules cours d’appel). Il doit être souligné que la transition informatique liée à l’utilisation du nouveau système d’information financière de l’État Chorus à partir de cette année a ralenti le rythme des dépenses au premier semestre et conduit à afficher un taux d’exécution au 31 août (49,3 %) légèrement en retrait par rapport à celui constaté en 2010.

Les cours d’appel ont dû définir leurs priorités avec la plus extrême rigueur, d’autant que l’augmentation des tarifs des fluides (notamment le gaz et l’électricité) ajoute encore à leurs contraintes budgétaires. Toutes ont mis en œuvre une politique d’optimisation de leurs crédits de fonctionnement : sont ainsi notamment favorisés la dématérialisation des échanges et l’usage de la visioconférence.

Dans certains ressorts, une mutualisation des équipements d’affranchissement est engagée, de même qu’un regroupement de certains services et de la documentation. De même, le regroupement d’achats grâce au recours à des marchés publics nationaux ou régionaux a permis d’obtenir des économies substantielles sur certains postes de dépenses (fournitures, gardiennage, nettoyage…).

Le tableau ci-après présente la part des sept postes de dépenses les plus importants pour l’ensemble du programme, ainsi que pour un échantillon de cours d’appel.

RÉPARTITION DES FRAIS DE FONCTIONNEMENT COURANT DE CERTAINES JURIDICTIONS SELON LES POSTES DE DÉPENSES

 

Loyers

Fluides

Gardiennage

Nettoyage

Frais de
déplacement

Documentation

Maintenance

Aix-en-Provence

10 %

15 %

14 %

12 %

11 %

5 %

9 %

Douai

21 %

14 %

9 %

11 %

9 %

4 %

8 %

Paris

62 %

9 %

4 %

5 %

2 %

1 %

4 %

Pau

14 %

12 %

13 %

13 %

9 %

3 %

2 %

Angers

8 %

15 %

27 %

12 %

6 %

3 %

7 %

Saint-Denis de la Réunion et Mayotte

18 %

7 %

7 %

9 %

7 %

2 %

3 %

Moyenne
nationale

20 %

12 %

9 %

10 %

6 %

3 %

5 %

D. L’ACTIVITÉ DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES

Comme chaque année, votre rapporteur pour avis a souhaité dresser le bilan quantitatif de l’activité de chaque niveau de juridictions, pénales comme civiles.

1. L’activité judiciaire civile

Le tableau ci-après présente, de manière synthétique, l’activité judiciaire observée en 2010 :

L’ACTIVITÉ JUDICIAIRE CIVILE EN 2010

Juridictions

Affaires nouvelles en 2010

Évolution par
rapport à 2009

Affaires terminées

Durée moyenne
de traitement

Cour de cassation

20 353

+ 3,8 %

19 855

NC

Cours d’appel

243 967

+ 5,6 %

233 577

11,2 mois

Tribunaux de grande instance

952 412

+ 0,4 %

930 999

7,1 mois

Tribunaux d’instance

692 470

+ 2,2 %

655 848

5,3 mois

Sources : Répertoire général civil et rapport annuel de la Cour de cassation.

a) La Cour de cassation

Le nombre d’affaires civiles nouvelles (20 353) portées en 2010 devant la Cour de cassation a progressé de 3,8 % sur un an. Cette même année, la Cour a rendu 19 855 décisions, soit 2,7 % de moins qu’en 2009.

La procédure de filtrage institué par la loi organique du 25 juin 2001 (36) permet à la Cour de cassation de déclarer « non admis » les pourvois « irrecevables ou non fondés sur un moyen sérieux de cassation ». Depuis 2002 les affaires en « non-admission » viennent diminuer à la fois les rejets et les irrecevabilités. En 2010, un nombre d’affaires relativement stable – 3 714 – se termine ainsi, soit près d’une décision rendue sur cinq.

Les cassations ont augmenté en 2010 (+ 4,3 %), confirmant le mouvement à la hausse constaté en 2009. Elles ont représenté 22,8 % des décisions rendues. Les rejets de pourvois ont, quant à eux, diminué sur un an de près de 5 %, représentant 24,6 % de l’ensemble des affaires et plus de 30 % des seules affaires admises.

b) Les cours d’appel

Le nombre d’affaires nouvelles portées en appel en 2010 (243 967, dont 214 793 affaires au fond) est en augmentation de 5,6 %. Si l’on examine les juridictions qui sont à l’origine des décisions appelées, on constate que la hausse est particulièrement nette pour les tribunaux d’instance, les conseils de prud’hommes et les tribunaux de commerce. On note en revanche, après des années de hausse continue, une baisse de plus de 5 % des appels sur décisions des tribunaux de grande instance.

Pour analyser ces chiffres, il convient d’observer si l’évolution des affaires nouvelles des cours d’appel est un simple corollaire de la variation de l’activité des juridictions de première instance ou s’il s’y superpose une évolution de la propension des justiciables à faire appel. On constate que le taux d’appel contre les décisions des tribunaux d’instance et des conseils de prud’hommes augmente depuis 2001 respectivement de 0,5 point et de 7,4 points, tandis que le taux d’appel diminue de 2,8 points contre les décisions des tribunaux de grande instance.

Le nombre des affaires terminées (233 577) connaît une augmentation de près de 2 %. Malgré cette augmentation, le stock global des cours d’appel s’accroît de 10 000 affaires pour atteindre 229 849 affaires âgées en moyenne de 9,8 mois. Au rythme moyen d’évacuation des affaires en 2010, ces affaires en stock dans les cours fin 2010 demanderaient désormais 11,8 mois pour être traitées (contre 11,5 mois l’année précédente).

La durée moyenne des affaires terminées par les cours d’appel en 2010 s’établit à 11,2 mois, contre 11,5 mois en 2009.

c) Les tribunaux de grande instance

En 2010, le nombre d’affaires nouvelles portées devant les tribunaux de grande instance s’élève à 952 412 affaires (+ 0,4 %), parmi lesquelles on peut dénombrer 118 109 référés et 141 938 ordonnances sur requête. La légère augmentation constatée en 2010 est moindre que celle observée récemment (+ 1,1 % en 2008 et + 2,9 % en 2009).

Le nombre d’affaires terminées en 2010 (930 999) est en légère diminution sur un an (- 0,4 %), due à la réduction des affaires terminées jugées au fond (- 0,5 %) que ne compense pas l’augmentation des référés (+ 0,8 %). Son niveau reste inférieur à celui des affaires nouvelles, ce qui provoque une hausse des affaires en cours de plus de 21 000 affaires. Le stock s’établit en fin d’année à 641 103 affaires, âgées en moyenne de 13,1 mois.

La durée moyenne de traitement toutes affaires confondues  – fond et référé – s’établit, comme en 2009, à 7,1 mois, étant précisé que cette durée intègre les ordonnances sur requête qui durent en moyenne 10 jours et les référés dont la durée moyenne s’établit à 1,9 mois. La durée moyenne des affaires jugées au fond s’établit à 9,3 mois.

d) Les tribunaux d’instance et les juridictions de proximité

En 2010, les tribunaux d’instance et les juridictions de proximité ont été saisis de 692 470 affaires nouvelles, soit 2,2 % de plus qu’en 2009. Le nombre de référés – 80 893 – est en hausse de 4 %. L’activité des juridictions de proximité confirme une tendance à la baisse : avec 99 704 affaires nouvelles, la saisine des juridictions de proximité baisse de 4,4 % sur un an, après une baisse de 4,8 % entre 2008 et 2009.

Le nombre d’affaires terminées en 2010 par les tribunaux d’instance et les juridictions de proximité atteint 655 848, en hausse de 0,8 %. Par rapport à 2001, le nombre d’affaires terminées a augmenté de 21 %.

Le stock d’affaires restant à traiter au 31 décembre 2010 (595 751 affaires) s’est accru mécaniquement de plus de 36 000 affaires par rapport à l’année précédente. La durée moyenne de toutes les affaires terminées en 2010 par les tribunaux d’instance s’est à nouveau établie, cette année, à 5,3 mois. Les référés sont traités en moyenne en 3,4 mois. Il apparaît que 25 % des affaires terminées par les tribunaux d’instance l’ont été en moins de 2,3 mois, 50 % l’ont été en moins de 3,8 mois et qu’en revanche, 25 % des affaires ont été terminées en plus de 6,4 mois.

Votre rapporteur pour avis demeure particulièrement préoccupé par la charge de travail incombant à l’instance en matière de protection des personnes (tutelle ou curatelle des majeurs) du fait de l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs (37) qui a prévu que toutes les mesures ouvertes avant le 1er janvier 2009 devraient être revues et révisées dans un délai de cinq ans, délai porté au 1er janvier 2014 par la loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures du 12 mai 2009 (38).

Lors des auditions qu’il a menées magistrats et fonctionnaires de l’instance ont fait à nouveau part de leur vive inquiétude face à l’ampleur de la tâche qui leur incombe pour contrôler les comptes de tutelle. La suppression envisagée des juridictions de proximité (39) verra en outre plus de 90 000 affaires nouvelles supplémentaires chaque année arriver à l’instance s’agissant du « petit contentieux civil » impliquant des montants inférieurs à 4 000 euros.

2. L’activité judiciaire pénale

a) La Cour de cassation

En 2010, le volume d’affaires pénales nouvelles soumises à la Cour de cassation a diminué de 4,5 %, s’établissant à 8 033 affaires. La Cour a rendu 8 082 décisions, soit 1,3 % de moins qu’en 2009.

Les arrêts de cassation prononcés en matière pénale (600) sont en hausse en 2010 ; ils ont constitué 7,4 % de l’ensemble des décisions et 17 % des seules affaires soumises à la chambre (non-admission exceptée), soit des parts en augmentation constante depuis 2002. De leur côté, les rejets de pourvois représentent près de 43,3 % des seules affaires admises.

b) Les cours d’appel

En 2010, les chambres des appels correctionnels ont été saisies de 48 409 affaires, ce qui constitue une baisse de 2,4 % sur un an, faisant suite à une diminution de 6 % au cours de l’année précédente. Avec 51 952 arrêts et ordonnances rendus, le volume des affaires terminées a augmenté de 0,7 %. Dans ces conditions, le stock d’affaires en cours au 31 décembre 2010 (30 207) régresse de plus de 6 %. Le nombre de personnes condamnées (37 390) augmente de 6,7 % sur un an, tandis que celui des personnes relaxées (3 122) diminue de 5,4 %.

Depuis le 1er janvier 2005, les appels contre les décisions des juges de l’application des peines relèvent de la chambre de l’application des peines ou de son président. En 2010, cette juridiction a été saisie de 15 704 affaires (- 0,3 % sur un an) et a rendu 16 673 décisions (- 0,5 %), dont plus de la moitié ont été rendues par le seul président de la chambre.

Par ailleurs, les chambres de l’instruction ont rendu en 2010 35 059 arrêts, chiffre en baisse de 2,9 % par rapport à 2009. Le stock d’affaires en attente devant ces chambres a augmenté de 600 affaires sur un an.

c) Les tribunaux correctionnels

L’ensemble des décisions rendues par les tribunaux correctionnels est en baisse de 1,7 % en 2010. Le nombre de jugements portant condamnation ou relaxe (332 189) diminue (de 2,8 %) pour la septième année consécutive.

Pour la première année depuis 2003, le nombre des ordonnances pénales délictuelles (136 812) se réduit (-1,6 %), de même que les ordonnances d’homologation de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (-1,9 %), avec 61 543 ordonnances rendues.

Au total, 403 576 personnes physiques ont été soit condamnées (371 252), soit ajournées (3 591), soit relaxées (28 733), ce qui porte le taux de relaxe à 7,1 %, en hausse sur un an.

Par ailleurs, 3 064 personnes morales ont été soit condamnées (2 250), soit relaxées (776), ce qui porte le taux de relaxe à 25,3 %, également en hausse sur un an.

Globalement le nombre des personnes condamnées en 2010, ordonnances pénales comprises – 509 828 –, a diminué de plus de 5 % par rapport à 2009.

d) Les tribunaux de police et les juridictions de proximité

La réforme de la carte judiciaire, qui a conduit à la fermeture de plus de 170 tribunaux d’instance et au regroupement de l’activité dans certains tribunaux, rend délicates les comparaisons avec les années précédentes.

Les affaires traitées par les tribunaux de police (hors intérêts civils) sont en baisse de 3,1 % en 2010, cette réduction globale masquant des évolutions contrastées : les jugements des contraventions des quatre premières classes rendus par les tribunaux de police, quoique résiduels, augmentent, tandis que les jugements des contraventions de cinquième classe(40) (27 908) diminuent de plus de 13 % sur un an.

Les ordonnances pénales pour les contraventions des quatre premières classes voient leur nombre quadrupler (6 496) tandis que celles relatives à des contraventions de cinquième classe s’établissent à 27 205, en baisse de 12,6 %.

Parallèlement, devant la juridiction de proximité, qui ne traite que des contraventions des quatre premières classes, les poursuites connaissent une baisse de 1,4 % avec 417 996 affaires poursuivies. L’ensemble des affaires traitées par la juridiction de proximité baisse de 1,1 % par rapport à 2009. Cette baisse s’observe uniquement sur les jugements (– 10 %), les ordonnances pénales augmentant de 2,7 %.

II.– L’ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE

Le programme « Accès au droit et à la justice » regroupe les crédits destinés à permettre au citoyen de connaître ses droits afin de les faire valoir, quelle que soit sa situation sociale et où qu’il se trouve sur le territoire. Ces politiques comprennent quatre volets :

—  L’aide juridictionnelle, qui s’adresse aux personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits devant une juridiction, en matière gracieuse ou contentieuse, en demande comme en défense.

Elle s’applique aux procédures, actes et mesures d’exécution pour lesquels une admission a été prononcée. Les prestations sont versées aux auxiliaires de justice soit directement, soit par l’intermédiaire des caisses de règlements pécuniaires des avocats (CARPA) ;

—  Le développement de l’accès au droit, qui repose sur les conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) institués dans presque tous les départements.

Ces groupements d’intérêt public sont chargés de recenser les besoins, de définir une politique locale, de faire l’inventaire des dispositifs en place et d’engager des actions nouvelles. Leurs interventions sont complétées par le réseau judiciaire de proximité, le plus souvent implanté dans les zones urbaines sensibles, constitué d’une centaine de maisons de la justice et du droit (MJD), ainsi que d’antennes et de points d’accès au droit ;

—  L’aide aux victimes, qui vise à améliorer la prise en compte par l’institution judiciaire des victimes d’infractions et à rechercher des modalités d’indemnisation plus justes et plus transparentes.

Elle s’appuie sur les commissions d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) qui constituent des juridictions spécialisées, installées dans chacun des tribunaux de grande instance, et sur un réseau d’associations d’aide aux victimes chargées d’accueillir, d’orienter et d’accompagner les victimes.

—  La médiation familiale, inscrite depuis la loi de finances pour 2007 dans le périmètre du programme « Accès au droit et à la Justice ».

Ses crédits sont destinés au soutien des fédérations nationales et du réseau des associations et services intervenant en ce domaine.

Il est proposé de doter en 2012 le programme « Accès au droit et à la justice » de 354,9 millions d’euros en crédits de paiement, en hausse de 23,5 millions d’euros par rapport à 2011 (+7,1 %).

L’essentiel de ces crédits sont des dépenses d’intervention ; les dépenses de fonctionnement destinées à l’équipement des maisons de la justice et du droit représentent moins de 0,15 % de la dotation totale (463 000 euros).

Le tableau suivant détaille, par action, l’évolution des crédits de paiement du programme « Accès au droit et à la Justice » :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME
« ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE »

(en millions d’euros)

Actions du programme « Accès au droit et à la Justice »

LFI 2011

PLF 2012

Évolution

Aide juridictionnelle

312,3

336,3

+ 7,7 %

Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité

6

5,9

- 0,9 %

Aide aux victimes

10,5

10,2

- 2,9 %

Médiation familiale et espaces de rencontre

2,6

2,4

-7,7 %

Total

331,3

354,8

+ 7,1 %

Source : projet annuel de performances pour 2012

Seuls les crédits de l’aide juridictionnelle progressent au sein du programme ; la dotation des autres actions diminue, conformément aux orientations du Gouvernement relatives à la maîtrise des dépenses de l’État.

A. L’ÉVOLUTION DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE

1. L’évolution des crédits

a) Des crédits en augmentation de plus de 7 % pour financer des dépenses appelées à croître

Le projet de loi de finances prévoit d’allouer 336,3 millions d’euros au dispositif d’aide juridictionnelle, dont les crédits représentent près de 95 % du programme « Accès au droit et à la Justice ». Cette dotation est en hausse avec 24 millions d’euros supplémentaires en crédits de paiement, soit 7,7 % d’augmentation sur un an.

Les dotations aux CARPA pour la rétribution des avocats et les droits de plaidoirie représentent, comme l’an dernier, 91 % de cette dépense, les paiements directs à destination des autres auxiliaires de justice 9 %.

Cette augmentation de crédits est rendue nécessaire, malgré la création d’une contribution pour l’aide juridique (cf infra b), pour financer les nouvelles dépenses d’aide juridictionnelle résultant des admissions supplémentaires induites par deux récentes réformes :

—  la réforme de la garde à vue, qui prévoit désormais une assistance par un avocat de toute personne gardée à vue ou placée en retenue douanière lors de ses auditions, ainsi que lors des confrontations avec la victime, cette dernière pouvant demander une assistance analogue dans ce cadre (41;

—  l’introduction d’un contrôle juridictionnel du maintien en hospitalisation complète sans consentement en raison de troubles mentaux (42).

Au sein de l’enveloppe allouée à l’aide juridictionnelle, les crédits dédiés à l’aide à l’intervention de l’avocat au cours d’une garde à vue, en matière de médiation et de composition pénales, au cours d’une procédure disciplinaire ou d’une mesure d’isolement concernant un détenu représentent 107,4 millions d’euros, dont 103,8 millions pour la seule assistance aux personnes placées en garde à vue ou en retenue douanière. Cette dernière enveloppe doit permettre de rétribuer 264 000 entretiens et auditions au cours des vingt-quatre premières heures, 66 000 au cours de prolongations et 59 000 confrontations entre la personne gardée à vue et la victime. 750 000 euros sont en outre inscrits pour le financement de conventions pour l’organisation matérielle de la garde à vue.

La réforme de la garde à vue n’a commencé à avoir une incidence sur le montant de la dépense d’aide juridictionnelle qu’à compter du second semestre 2011, le décret fixant le montant du barème de rétribution des interventions des avocats ayant été publié le 6 juillet 2011 (43).

Ce décret a modifié le barème de la contribution de l’État à la rétribution de l’avocat, qui varie selon la nature de l’intervention de ce dernier :

—  Lorsque l’avocat intervient uniquement pour un entretien avec la personne gardée à vue au début de mesure ou de sa prolongation, la contribution de l’État est forfaitairement fixée à 61 euros hors taxes, comme c’était déjà le cas avant la réforme ;

—  Lorsque l’avocat intervient pour s’entretenir avec la personne gardée à vue, puis pour l’assister lors de ses auditions et confrontations au cours des vingt-quatre premières heures, la contribution de l’État est forfaitairement arrêtée à 300 euros hors taxes. En cas de prolongation, la rétribution complémentaire est de 150 euros hors taxes ;

—  Lorsque l’avocat assiste la victime lors de confrontations avec la ou les personnes gardées à vue, le forfait est de 150 euros hors taxes.

Ce barème est applicable à toutes les demandes de règlement présentées au titre des missions d’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue, d’une retenue douanière ou d’une retenue pour mineurs de moins de 13 ans accomplies depuis le 15 avril 2011.

La contribution de l’État à la rétribution d’un avocat ayant accompli plusieurs interventions par période de vingt-quatre heures est, quel que soit le nombre d’interventions réalisées, plafonnée à 1 200 euros hors taxes.

En cas de changement d’avocat désigné d’office pendant une mission d’assistance, il n’est dû qu’une contribution de l’État, allouée au dernier avocat intervenu, à charge pour ce dernier de la partager avec le ou les avocat(s) intervenus auparavant. L’attestation d’intervention est délivrée au dernier avocat. Les difficultés liées au partage sont tranchées par le bâtonnier.

b) Des crédits complétés par le produit de la contribution pour l’aide juridique créée par la première loi de finances rectificative pour 2011

Pour compléter les crédits budgétaires destinés au règlement aux avocats de leurs missions d’aide juridictionnelle, la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 a instauré une « contribution pour l’aide juridique », régie par l’article 1635 bis Q du code général des impôts. Cette taxe, d’un montant de 35 euros, doit être acquittée par chaque justiciable qui, à compter du 1er octobre 2011, introduit une instance en matière civile, commerciale, prud’homale, sociale ou rurale devant une juridiction judiciaire ou qui introduit une instance devant une juridiction administrative.

Cette contribution n’est cependant pas due lorsque la partie est bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, ainsi que dans le cadre de certaines procédures pour lesquelles le versement de la contribution apparaîtrait comme une entrave disproportionnée au droit d’accès à la justice, telles que les procédures devant le juge des libertés et de la détention. Elle n’est pas non plus exigible dans les affaires pénales.

Lorsque l’instance est introduite par un auxiliaire de justice, l’article 1635 bis Q du code général des impôts prévoit qu’elle doit être acquittée par voie électronique ; lorsque l’instance est introduite sans auxiliaire de justice, elle doit être acquittée par le justiciable sous forme d’un droit de timbre mobile ou dématérialisé.

La contribution est intégralement affectée au Conseil national des barreaux (CNB) qui la répartit entre les barreaux et confie, dans le cadre d’une convention, à l’Union nationale des caisses des règlements pécuniaires des avocats (UNCA) la gestion du versement du produit de la taxe aux CARPA pour le paiement des missions d’aide juridictionnelle effectuées par les avocats.

Lors des auditions qu’il a menées pour la préparation de cet avis, votre rapporteur a pu constater que la contribution pour l’aide juridique faisait l’objet de très vives critiques, tant de la part des magistrats et fonctionnaires des services judiciaires que des avocats. Ces derniers ont notamment dénoncé l’impréparation de la mise en œuvre de la mesure au 1er octobre 2011 : le timbre électronique n’étant alors pas encore opérationnel, il revient en effet aux avocats désirant déposer une assignation de se munir de timbres mobiles, dont il y a eu rapide pénurie, au risque de priver les justiciables d’un accès à la justice, la présence de ce timbre étant une condition de recevabilité de l’assignation.

La mesure a également été critiquée sur son principe au motif qu’elle remet en cause le principe de gratuité d’accès à la justice et risque de décourager certains justiciables lorsque les montants en jeu sont faibles, notamment devant les conseils de prud’hommes.

Lors de son audition par votre commission des Lois, le garde des Sceaux a indiqué que le choix avait été fait d’une contribution reposant sur la solidarité entre justiciables plutôt que celui, moins cohérent avec les finalités du financement, d’une taxe sur les actes juridiques ou d’une contribution mise à la charge des assureurs. Il a en outre indiqué que la contribution pourrait être réglée par voie électronique à compter du 1er janvier 2012 (44).

2. Les mesures de maîtrise de la dépense d’aide juridictionnelle

a) « Responsabiliser » les justiciables dans leur usage de l’aide juridictionnelle

L’article 74 de la loi de finances pour 2011 (45) a instauré une participation financière sous la forme d’une avance par le bénéficiaire de l’aide juridictionnelle des droits de plaidoirie dus à son avocat.

Ce droit, égal à 8,84 euros, auparavant versé par l’État à la Caisse nationale des barreaux français (CNBF) devra désormais être avancé par le justiciable admis à l’aide juridictionnelle à son avocat, à charge pour lui de le reverser à la CNBF.

Ce droit est dû pour toute audience de plaidoirie devant les juridictions administratives de droit commun et de l’ordre judiciaire. Toutefois, il n’est pas dû devant les conseils de prud’hommes, les tribunaux d’instance statuant en matière prud’homale, les tribunaux de police statuant en matière de contraventions des quatre premières classes et les juridictions statuant en matière de contentieux de la sécurité sociale ou de contentieux électoral, ni devant le Conseil d’État et la Cour de cassation pour les affaires dispensées du ministère d’avocat.

S’il gagne son procès, le bénéficiaire de l’aide pourra obtenir le remboursement des droits de plaidoirie contre la partie condamnée aux dépens. En effet, ces droits constituent, en application de l’article 695 du code de procédure civile, des dépens afférents aux instances recouvrables contre la partie perdante.

b) Améliorer le recouvrement des dépenses d’aide juridictionnelle

Afin d’améliorer le niveau des recettes d’aide juridictionnelle, la loi de finances pour 2011 a, en outre, prévu que les dépenses d’aide juridictionnelle seront désormais recouvrées comme des créances étrangères à l’impôt et au domaine, sur la base des règles de recouvrement régissant les produits divers de l’État.

La procédure antérieure de recouvrement n’était plus adaptée à la nature de la créance de l’État : il s’agissait de la même procédure qu’en matière d’amendes ou de condamnations pécuniaires alors que les dépenses d’aide juridictionnelle correspondent à des sommes « avancées » par l’État. En outre, ces dépenses ne sont pas liquidées par la décision de justice, contrairement aux amendes, mais constatées, liquidées et ordonnancées par le premier président et le procureur général institués conjointement ordonnateurs secondaires des recettes des juridictions de leur ressort (46).

Le montant des sommes à recouvrer par les trésoreries reste encore limité (18,4 millions d’euros en 2010) et stable depuis 2002, malgré l’introduction dans le projet annuel de performances pour 2008 d’un objectif et d’un indicateur de performance relatifs à la mise en recouvrement des frais avancés par l’État au titre de l’aide juridictionnelle.

Ces évolutions constituent aux yeux de votre rapporteur pour avis des avancées qu’il faut saluer : pour autant, il conviendra d’envisager une réforme de plus grande ampleur, se fondant sur les préconisations faites en avril 2011 par la mission d’information constituée par notre commission des Lois sur l’accès au droit et à la justice et dont nos collègues Philippe Gosselin et George Pau-Langevin étaient rapporteurs (47). La mission avait notamment fait des propositions visant à rationaliser le circuit financier des aides.

3. L’accroissement attendu du nombre des bénéficiaires

Depuis 2006, le nombre total des admissions demeurait stable, aux environs de 900 000. En 2010, les admissions (912 191) ont augmenté de 1,2 %. Les prévisions pour 2011 et 2012 prennent en compte les effets attendus du contrôle juridictionnel obligatoire du maintien en hospitalisation sans consentement (48), qui concernera majoritairement une population éligible à l’aide juridictionnelle ; la hausse des admissions induite est évaluée à 2 % par an.

Le tableau ci-après présente l’évolution des admissions annuelles, constatées ou prévisionnelles, à l’aide juridictionnelle.

ÉVOLUTION DES ADMISSIONS ANNUELLES À L’AIDE JURIDICTIONNELLE DE 2006 À 2012

Nombre d’admissions

2006

2007

2008

2009

2010

2011
prévisions

2012
prévisions

Civil et autres

515 420

500 718

489 247

502 658

517 758

528 000

538 000

Pénal

389 541

389 420

400 773

398 046

393 651

402 000

410 000

Total

904 961

890 138

890 020

900 704

911 409

930 000

948 000

Évolution

+ 2,1 %

- 1,2 %

- 0,01  %

+ 1,2 %

+ 1,2 %

+ 2 %

+ 2 %

Source : Projet annuel de performances pour 2012 (49)

En 2010, les admissions concernaient pour 49 % d’entre elles des procédures civiles, 43 % des procédures pénales et 8 % des affaires administratives ou relatives aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers. En 2002, la répartition était quasiment similaire : on comptait 52 % de procédures civiles et 42 % de procédures pénales.

Le tableau suivant présente la répartition par type de contentieux des admissions à l’aide juridictionnelle :

RÉPARTITION PAR TYPE DE CONTENTIEUX DES ADMISSIONS À L’AIDE JURIDICTIONNELLE

Nature du contentieux

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Civil

388 020

430 118

448 623

457 436

440 563

423 022

433 258

445 467

Pénal

320 439

353 407

383 498

389 541

389 420

400 773

398 636

394 120

Administratif

13 720

14 402

14 614

17 691

20 224

21 489

29 955

34 586

Entrée et séjour des étrangers

33 672

33 950

39 798

40 293

39 820

44 619

39 519

37 700

Total

755 851

831 877

886 533

904 961

890 138

890 020

901 630

912 191

Source : Répertoire de l’aide juridictionnelle

L’évolution, en 2010, est contrastée selon la nature de l’aide : les admissions relatives au contentieux civil augmentent (+ 2,8 %), alors que celles concernant le contentieux pénal se réduisent légèrement (- 1,1 %), ainsi que celles concernant le contentieux relatif aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers
(- 4,6 %). Enfin les admissions à l’aide juridictionnelle pour des contentieux administratifs ont connu une forte progression (+ 15,5 %).

Les rejets s’établissent en 2010 à 82 533, en baisse de 5,1 % par rapport à 2009, soit un taux de rejet de 7,7 % par rapport aux demandes examinées par les bureaux d’aide juridictionnelle (1 068 927). Ce taux était de 8,2 % l’année précédente. Un des motifs de rejet est le défaut de communication des pièces justificatives demandées par le bureau d’aide juridictionnelle.

Le décret n° 2007-1142 du 26 juillet 2007 a par ailleurs introduit une sanction spécifique du défaut de production par le justiciable des pièces demandées par le bureau d’aide juridictionnelle dans le délai imparti : la caducité de la demande d’aide juridictionnelle. Dans ce cas de figure, les bureaux d’aide juridictionnelle ne prononcent plus de décision de rejet, mais une décision de caducité de la demande (29 461 décisions de caducité en 2010).

4. Les délais de traitement des demandes d’aide juridictionnelle

Les bureaux d’aide juridictionnelle (BAJ) sont chargés de traiter les demandes d’aide juridictionnelle relatives aux instances et procédures portées devant les juridictions du premier et du second degré, ainsi qu’à l’exécution des décisions de justice. Ils se prononcent au regard du niveau de ressources du demandeur et du caractère manifestement recevable et fondé de l’action en justice.

L’admission à l’aide juridictionnelle conditionne l’ouverture du droit à la prise en charge de la représentation ou de l’assistance, ainsi que des frais de procédure. Le délai de traitement de la demande a, par conséquent, une incidence sur le déroulement de l’instance.

Or il apparaît que les délais de traitement des demandes par les bureaux d’aide juridictionnelle ont tendance à augmenter : selon les projets annuels de performances pour 2011 et 2012, le délai moyen s’établissait respectivement à 50 jours en 2009 et 52 jours en 2010. La proportion de BAJ dépassant le seuil de 60 jours en moyenne a augmenté, passant de 18 % en 2009 à 23 % en 2010. Il semble toutefois qu’au premier semestre 2011, la situation s’améliore, la proportion passant à 16 %.

Votre rapporteur pour avis est attentif à l’évolution de cet indicateur dont l’amélioration doit permettre de renforcer l’égalité des usagers du service public de la justice.

B. LES CRÉDITS EN FAVEUR DE L’ACCÈS AU DROIT, DE LA MÉDIATION FAMILIALE ET DE L’AIDE AUX VICTIMES

L’amélioration de la prise en compte des victimes d’infractions par l’institution judiciaire est un élément essentiel de la politique pénale. Cette évolution majeure s’est traduite par un renforcement des droits des victimes dans le cadre de la procédure pénale et la mise en place de structures appropriées.

1. Le développement de l’accès au droit

Le budget de l’action « Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité » s’élève, en 2012, à 5,95 millions d’euros en crédits de paiement, contre 6 millions d’euros en 2011 et 6,36 millions d’euros en 2010. La diminution de l’enveloppe concerne exclusivement les crédits à destination des maisons de justice et du droit, notamment ceux destinés au renouvellement informatique ou au mobilier.

a) Les maisons de justice et du droit

Les 131 maisons de justice et du droit (MJD) sont réparties au sein de 28 cours d’appel ; 59 départements en sont ainsi dotés. Ces structures de proximité sont implantées prioritairement (pour 91 % d’entre elles) dans les zones urbaines sensibles ou à proximité.

Les projets de création sont instruits par le service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes (SADJAV), puis examinés par un comité réunissant les différentes directions du ministère de la Justice et des libertés concernées. Les MJD sont créées par arrêté du garde des Sceaux.

Leur création repose sur des conventions, signées par l’ensemble des partenaires de chaque structure : le préfet de département, les chefs de juridiction dans le ressort duquel est située la MJD, le président du conseil départemental de l’accès au droit, le maire du lieu d’implantation, le bâtonnier de l’ordre des avocats, les associations œuvrant dans le domaine judiciaire, et le cas échéant, les directions départementales de la protection judiciaire de la jeunesse et de l’administration pénitentiaire.

Les MJD ont reçu, en 2010, plus de 700 000 personnes (personnes convoquées et visiteurs), dont 480 000 personnes dans le cadre de l’accès au droit, 167 000 dans celui de leur activité judiciaire civile et pénale, 32 000 au titre de l’aide aux victimes, plus de 6 000 personnes dans le cadre de la protection judiciaire de la jeunesse et 14 700 personnes envoyées par le médiateur de la République.

Les crédits des MJD s’élèveront à environ 900 000 euros en 2012, contre 975 000 en 2011. Sur cette enveloppe, 740 000 euros seront consacrés à l’attribution de subventions d’investissement aux collectivités locales qui aménagent leurs propres locaux pour accueillir des MJD.

S’agissant des personnels, il n’est pas toujours possible d’affecter des greffiers dans les MJD, compte tenu des contraintes existant dans certaines juridictions. Les postes sont, dans certains cas, pourvus grâce à la mise à disposition de contrats aidés par les conseils départementaux de l’accès au droit et l’affectation d’agents de catégorie C des services judiciaires.

Dans le cadre de la réorganisation de la carte judiciaire, le garde des Sceaux a annoncé la création de MJD de « nouvelle génération » afin de maintenir une présence judiciaire de proximité en milieu rural.

Depuis 2010, huit MJD de nouvelle génération ont ainsi ouvert leurs portes à Châteaubriant (Morbihan), Toul (Meurthe-et-Moselle), Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loir), Lodève (Hérault), Briançon (Hautes-Alpes), Faulquemont (Moselle), Porto-Vecchio (Corse-du-Sud) et Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie).

Ce processus devrait se poursuivre en 2012 avec la création annoncée de huit nouvelles MJD de ce type à Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher), Saint-Jean-de-Maurienne (Savoie), Loudéac (Côtes-d’Armor), Saint-Lô (Manche), Ussel (Corrèze), Château-Thierry (Aisne), Prades (Pyrénées-Orientales) et Romilly-sur-Seine (Aube).

Ces nouveaux établissements judiciaires seront équipés de bornes dénommées « contacts visio-justice » permettant aux usagers d’entrer en contact à distance et d’échanger des documents avec le greffier de la juridiction de rattachement.

b) Les conseils départementaux de l’accès au droit

La loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, modifiée par la loi du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et la résolution amiable des conflits, prévoit l’institution, dans chaque département, d’un conseil départemental de l’accès au droit (CDAD).

Les CDAD, groupements d’intérêt public dotés de la personnalité morale, sont créés à l’initiative du président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département qui en assure la présidence. Le procureur de la République exerce la fonction de commissaire du Gouvernement.

Ces conseils sont chargés de définir une politique locale d’accès au droit en animant un réseau de différents intervenants, comprenant notamment les travailleurs sociaux, les associations et les professionnels du droit.

Après une mise en place assez lente, on comptait au 1er août 2011 96 départements dotés d’un CDAD ; les conseils départementaux des quatre départements n’en disposant pas, le conseil de Mayotte ainsi que les conseils de l’accès au droit de Polynésie française et de Saint-Martin et Saint-Barthélemy devraient être créés en 2012 pour un montant évalué à 20 000 euros par conseil.

En 2012, les crédits du ministère de la Justice et des libertés destinés au soutien de l’activité des centres départementaux d’accès au droit s’élèveront à 4,66 millions d’euros (hors frais de personnel) contre 4,55 millions en 2011. Les dépenses de soutien à l’activité des CDAD sont calculées sur la base d’une dotation moyenne de 46 800 euros par centre.

2. L’aide aux victimes

a) Le renforcement des mesures favorables aux victimes

Des évolutions majeures ont été réalisées depuis plusieurs années et se traduisent non seulement par un renforcement des droits des victimes dans le cadre de la procédure pénale, mais aussi par la création de structures appropriées.

En application de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (50), une commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI), juridiction civile composée de deux magistrats et d’un assesseur non professionnel, a été mise en place dans chaque tribunal de grande instance. Les CIVI sont avec le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) les éléments clefs du dispositif autonome d’indemnisation des victimes d’infractions. Un décret du 13 novembre 2007 a par ailleurs institué un juge délégué aux victimes (JUDEVI) qui préside la CIVI ainsi que les audiences sur intérêts civils.

Un service d’aide au recouvrement des dommages et intérêts pour les victimes d’infractions (SARVI) a été créé par la loi n° 2008-644 du 1er juillet 2008 créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l’exécution des peines. Le SARVI permet aux victimes non éligibles à la CIVI mais qui bénéficient d’une décision pénale de s’adresser à un service unique aux fins de recouvrer les dommages et intérêts alloués par les juridictions répressives. Ce service, géré par le FGTI, verse à la victime une avance sur indemnisation et recouvre directement auprès de l’auteur les montants alloués en réparation des préjudices subis et des frais de procédure.

Aux termes de l’article 706-14-1 du code de procédure pénale, introduit par la loi du 1er juillet 2008 précitée, les automobilistes dont le véhicule a été volontairement incendié par un tiers bénéficient de conditions d’indemnisation étendues devant la CIVI.

En 2009, le plan gouvernemental de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes pour les années 2010 à 2012 a retenu plusieurs actions prioritaires en faveur des victimes : développement des permanences des associations d’aide aux victimes au sein des unités de police et de gendarmerie, extension des bureaux d’aide aux victimes à cinquante tribunaux de grande instance, lancement d’une campagne nationale de communication sur le numéro de téléphone « 08VICTIMES », développement de l’aide aux victimes dans chaque plan départemental de prévention de la délinquance.

La loi n° 2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale prévoit que le juge de l’application des peines peut informer la victime ou la partie civile de la possibilité dont elle dispose de présenter des observations dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision entraînant une cessation temporaire ou définitive de l’incarcération d’une personne condamnée, avant la date d’échéance de sa peine. Le juge de l’application des peines doit également adresser un avis à la victime afin de l’informer d’une décision de cessation de l’incarcération assortie d’une interdiction d’entrer en relation avec elle et, le cas échéant, de paraître à proximité de son domicile et de son lieu de travail. Cet avis doit préciser les conséquences pour le condamné du non-respect de cette interdiction.

Enfin, la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein du couple et aux incidences de ces dernières sur les enfants a créé l’ordonnance de protection qui est rendue en urgence par le juge aux affaires familiales dans l’hypothèse où des violences ont été exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin. Cette ordonnance peut être assortie d’un ensemble de mesures destinées à protéger la victime ou les enfants.

b) L’action du ministère en faveur des victimes

Depuis 2009 ont été progressivement mis en place des bureaux d’aide aux victimes dans les juridictions : treize premières juridictions en ont été dotées en 2009 (Bonneville, Bourg-en-Bresse, Cambrai, Châteauroux, Lille, Lyon, Marseille, Mulhouse, Nîmes, Pau, Quimper, Les Sables d’Olonne et Senlis), treize nouvelles en 2010 (Bayonne, Évry, Nanterre, Paris, Bobigny, Pontoise, Créteil, Saint-Denis de la Réunion, Fort-de-France, Toulouse, Nantes, Nice et Orléans), douze autres en 2011 (Amiens, Boulogne-sur-Mer, Bordeaux, Dijon, Basse-Terre, Cayenne, Metz, Grenoble, Perpignan, Rennes, Strasbourg et Versailles). En 2012, il est prévu que le dispositif soit étendu à douze autres tribunaux de grande instance, portant le nombre de bureaux à cinquante.

La mission des bureaux d’aide aux victimes est d’offrir aux victimes un accueil, de leur apporter des informations non seulement sur le fonctionnement judiciaire en général, mais également sur les procédures en cours ainsi que sur les modalités pratiques de recouvrement des dommages et intérêts à la suite des jugements rendus, de les accompagner lors des audiences, de les orienter vers d’autres structures ou de les aider dans leurs démarches de saisine des services d’aide au recouvrement ou des commissions d’indemnisations des victimes d’infractions. Afin de déterminer le cadre de leur action, une convention est signée entre le procureur, le président du tribunal, le juge délégué aux victimes et l’association d’aide aux victimes locale, ce qui renforce les liens et les échanges entre les magistrats et l’association en charge de la permanence.

Le ministère de la Justice et des libertés accompagne en outre la mobilisation du secteur associatif en finançant, par l’intermédiaire des crédits déconcentrés auprès des cours d’appel, l’action des associations d’aide aux victimes.

En 2011, 178 associations (contre 180 en 2010) sont conventionnées par les cours d’appel afin de pouvoir exercer leurs missions dans un cadre judiciaire. Au cours de l’année 2010, les associations d’aide aux victimes ont assuré 23 112 permanences mensuelles (soit + 6,82 % par rapport à 2009) et ont été présentes dans plus de 1 450 lieux de permanences.

Pour 2012, les crédits de l’action « Aide aux victimes » sont évalués à 10,19 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, contre 10,45 millions d’euros en 2011.

Le financement du réseau des associations d’aide aux victimes se décompose de la manière suivante :

—  8,49 millions d’euros consacrés au soutien des activités du réseau des associations locales d’aide aux victimes sur le territoire national (contre 8,67 millions d’euros en 2011) ;

—  1,6 million d’euros au titre des actions nationales et associations ou fédérations intervenant au niveau national (contre 1,69 million d’euros en 2011) ;

—  100 000 euros sont par ailleurs alloués au fonds de réserve pour les accidents collectifs et les procès exceptionnels (contre 90 000 en 2011).

Votre rapporteur pour avis s’inquiète de la réduction des crédits alloués au réseau d’associations d’aide aux victimes. Il craint que ces crédits ne leur suffisent plus pour continuer à offrir le même niveau d’aide aux victimes : la formation des intervenants, la création de permanences d’accueil, la prise en charge des victimes sont autant d’investissements lourds pour des associations qui souffrent de l’absence de visibilité à long terme de leur financement (51).

3. La médiation familiale

L’action « Médiation familiale et espaces de rencontre » serait dotée de 2,4 millions d’euros en 2012, contre 2,56 millions en 2011 (hors dépenses de personnel).

Cette action s’inscrit dans les orientations du ministère de la Justice et des libertés qui visent à maintenir les liens familiaux au-delà des séparations et des divorces. La mise en œuvre de ces dispositions repose essentiellement sur le réseau de cent deux associations locales de médiation familiale, soixante-quatre espaces de rencontre entre parents et enfants et quatre-vingt-cinq structures mixtes qui bénéficie d’un soutien financier de l’État. Ces différentes structures se voient confier par les juridictions ou, à titre conventionnel, par d’autres organismes ou par les intéressés eux-mêmes, des missions dont la finalité est d’informer les parties et de permettre un règlement apaisé des conflits familiaux (médiation familiale) et le maintien des liens entre un enfant et ses parents dans des situations où ces derniers ne peuvent les accueillir à leur domicile (espaces de rencontre).

L’essentiel de ces crédits d’intervention (2,32 millions d’euros) est destiné au financement du réseau des associations de médiation familiale et d’espaces de rencontre sur le territoire national. Sur cette somme, des crédits de 0,91 million d’euros permettront de payer les dépenses courantes de ces structures et une dotation de 1,42 million d’euros sera destinée aux espaces de rencontre qui doivent faire face à une hausse constante du nombre des mesures ordonnées par les juges.

Une dotation de 80 000 euros est par ailleurs consacrée au développement du partenariat avec les fédérations et associations nationales de médiation familiale et d’espaces de rencontre.

III.– LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE

Placé sous la responsabilité du secrétaire général du ministère de la Justice et des libertés, le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice » a une double finalité :

—  d’une part, il vient en appui des directions du ministère de la Justice et des libertés, notamment dans les secteurs de l’action sociale, de l’informatique, de la statistique, des études et de la recherche ;

—  d’autre part, il regroupe les crédits nécessaires au fonctionnement des services centraux de la Chancellerie.

L’évolution des crédits de ce programme est retracée dans le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE  LA CONDUITE
ET DU PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE

(en millions d’euros)

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en 2011

Demandées pour 2012

Évolution

Ouverts en 2011

Demandés pour 2012

Évolution

247,9

263,2

+ 6 %

267,0

280,7

+ 5 %

Les crédits du programme ont été minorés de 6,56 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement par la loi de finances rectificative du 30 juillet 2011, afin d’abonder le financement de l’aide juridictionnelle.

Au 1er septembre 2011, la consommation des crédits s’élevait à 161,3 millions d’euros en crédits de paiement.

A. LES CRÉDITS DE GESTION DE L’ADMINISTRATION CENTRALE

Les crédits de l’action « Gestion de l’administration centrale », qui regroupe les moyens nécessaires à l’activité du service de l’administration centrale placé sous l’autorité du secrétaire général du ministère, ainsi que le budget de fonctionnement du casier judiciaire, progressent de 11,7 %, pour atteindre 101,2 millions d’euros en crédits de paiement. Cette augmentation est due à une hausse importante des crédits de personnel liée aux transferts d’ETPT dans le cadre de la création des plateformes interrégionales de services (cf. infra 3.).

1. Les dépenses de personnel et les mesures indemnitaires

Les dépenses inscrites au titre 2 de l’action « Gestion de l’administration centrale » passent de 33,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement en 2011 à 45,2 millions d’euros en 2012. Le plafond d’emplois de l’action augmente dans le même temps, passant de 472 à 746 ETPT, du fait de transferts d’autres programmes de la mission en vue de la création des plateformes interrégionales de services.

Le ministère de la Justice et des libertés, et notamment son administration centrale, était traditionnellement peu attractif sur le plan indemnitaire par rapport à l’ensemble des autres grands ministères ; il lui était ainsi souvent difficile d’attirer, mais aussi de retenir dans les services de l’administration centrale les collaborateurs de bon niveau dont il avait besoin. C’est pourquoi des mesures indemnitaires ont été inscrites au cours des derniers exercices. Le présent budget ne déroge par à cette règle puisqu’est prévue une mesure nouvelle indemnitaire, d’un montant plus élevé que l’an dernier – 300 000 euros – destinée à financer, d’une part, le volet « résultats » de la prime de fonction et de résultats mise en place en 2011 pour les attachés d’administration centrale ainsi que la prime de fonction et de résultats des secrétaires administratifs qui sera mise en place à partir du 1er janvier 2012 et, d’autre part, la réforme statutaire des agents de catégorie B, mise en place en octobre 2011 (52).

2. Les crédits de la politique immobilière et logistique

Dans le domaine de la politique immobilière et logistique, le report du projet de regroupement sur un site unique de l’ensemble des directions et services des sites parisiens de l’administration centrale, hors le site du 13, place Vendôme aura un impact sur les crédits demandés pour 2012. Ce nouveau délai entraîne en effet des dépenses supplémentaires liées à la poursuite de l’occupation des sites actuels, pour certains aux termes d’une convention d’occupation précaire.

Les crédits demandés pour 2011 s’élèvent à 22,16 millions d’euros en autorisations d’engagement et 36,77 millions d’euros en crédits de paiement, contre respectivement 19,23 millions d’euros en autorisations d’engagement et 39,51 millions d’euros en crédits de paiement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011. L’essentiel de ces crédits est consacré aux locations et charges immobilières (18,23 millions d’euros en autorisations d’engagement et 32,84 millions d’euros en crédits de paiement).

La réduction du nombre des sites parisiens de l’administration centrale est l’axe principal de la stratégie immobilière de la Chancellerie, définie en 2008 dans le schéma pluriannuel de stratégie immobilière présenté au Conseil de l’immobilier de l’État. L’administration centrale du ministère de la Justice et des libertés occupe aujourd’hui sept sites principaux à Paris qu’il est envisagé de regrouper dans trois implantations : le site historique de la place Vendôme, appelé à regrouper, autour du cabinet du garde des Sceaux, les deux directions législatives (direction des Affaires civiles et du sceau et direction des Affaires criminelles et des grâces), les locaux pris à bail de la rue Thoreton dans le XVe arrondissement, qui hébergent l’inspection générale des services judiciaires (IGSJ) et un grand site à même de réunir 1 570 agents sur une surface utile brute d’environ 30 000 m² et dont la localisation sera déterminée à la fin de l’année 2011. Sa mise en service pourrait avoir lieu en 2013 (dans l’hypothèse d’occupation d’une construction existante) ou en 2015 (dans l’hypothèse d’un bâtiment à construire).

Un tel regroupement, offrant des perspectives de mutualisation et de rationalisation du fonctionnement des services, permettra en outre de réduire le coût annuel des charges immobilières ainsi que certaines dépenses de fonctionnement par l’effet d’échelle et la suppression induite de tâches doublonnées jusqu’ici, telles l’accueil, la sécurité ou la maintenance, notamment.

Dans cette attente, le montant des loyers et charges relatifs aux cinq locations principales des services de la justice s’élèvera en 2012 à 24,2 millions d’euros.

Votre rapporteur pour avis sera attentif à la bonne réalisation de ce projet qui constitue un enjeu majeur pour le fonctionnement du ministère de la Justice et des libertés.

3. La création des plateformes interrégionales de services

Le ministère de la Justice et des libertés a entrepris au cours de ces dernières années d’importants efforts de modernisation qui se sont traduits aussi bien au niveau de l’administration centrale, dont la réorganisation est entrée en vigueur le 1er septembre 2008, qu’au niveau des cours d’appel et services déconcentrés, avec en particulier une mutualisation progressive des fonctions support ; la professionnalisation de la fonction « achat » relève de cet effort.

La création à partir de 2012 de neuf plateformes interrégionales de services constitue l’un des principaux enjeux du programme, dont les objectifs sont le renforcement de la qualité des prestations de soutien aux services et directions du ministère et la modernisation de l’organisation et du fonctionnement du ministère au service d’une gestion efficiente. Il s’agit de mutualiser au niveau régional certaines fonctions (budget et comptabilité, immobilier, informatique, formation continue, notamment) entre les trois grandes directions des services judiciaires, de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse. Après une première plateforme installée à Toulouse en 2010, devraient être mises en place huit autres plateformes à Aix-en-Provence, Amiens, Bordeaux, Dijon, Lyon, Nancy, Rennes et Paris.

Les crédits consacrés au déploiement des plateformes interrégionales en 2012 s’élèvent à 2,83 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Leur création se traduit en outre par le transfert de 381 ETPT en provenance des programmes « Justice judiciaire », « Administration pénitentiaire » et « Protection judiciaire de la jeunesse ».

B. LES CRÉDITS DE L’ACTION SOCIALE

Les crédits de l’action sociale sont en hausse de 3,5 % sur un an, passant de 33,9 à 35,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

En 2012, l’ensemble des moyens consacrés à l’action sociale – hors dépenses de personnel – s’établit à 22,4 millions d’euros. La dotation du titre 2 correspond à des prestations versées directement aux agents et consacrées aux enfants handicapés et aux séjours d’enfants. Les dépenses de fonctionnement correspondent à des prestations essentiellement assurées par des organismes tiers : il s’agit notamment de la protection sociale complémentaire, de la médecine de prévention, du logement social ou des activités socioculturelles et sportives.

C. LES CRÉDITS DE L’INFORMATIQUE ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Le budget de « l’Action informatique ministérielle », qui constitue le support budgétaire des crédits de la sous-direction de l’informatique et des télécommunications, devrait atteindre 97,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et 100,6 millions d’euros en crédits de paiement, dont 20,56 millions d’euros consacrés aux dépenses de personnel. Les effectifs de la sous-direction de l’informatique et des télécommunications seront renforcés : selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, la mise en place de départements de l’informatique et des télécommunications en 2012 s’accompagnera du transfert de 89 emplois de contractuels en provenance des programmes « Administration pénitentiaire », « Justice judiciaire » et « Protection judiciaire de la jeunesse ».

Les crédits en faveur des grands projets informatiques du ministère sont inscrits sur cette action, parmi lesquels figurent :

—  5,28 millions d’euros pour l’amélioration des infrastructures ;

—  9,25 millions d’euros pour la plateforme des interceptions judiciaires ;

—  3,37 millions d’euros pour la chaîne applicative supportant le système d’information opérationnel pour le pénal et les enfants (CASSIOPEE) ;

––  3,62 millions d’euros pour le projet GENESIS qui permet la réécriture du projet GIDE (gestion informatisée des détenus en établissement) ;

—  1,22 million d’euros pour le casier judiciaire national.

IV.– LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE

Le Conseil supérieur de la magistrature est un organe constitutionnel qui, par ses missions en matière de nomination des magistrats du siège et du parquet et ses compétences disciplinaires sur le corps judiciaire, est le garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. Depuis l’entrée en vigueur de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, les justiciables peuvent saisir le Conseil supérieur, s’ils estiment que le comportement adopté par un magistrat dans l’exercice de ses fonctions est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire.

Afin de lui assurer une pleine autonomie budgétaire, l’article 9 de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l’application de l’article 65 de la Constitution, a prévu qu’un nouveau programme spécifiquement dédié aux crédits affectés au Conseil supérieur de la magistrature se substituait à l’action correspondante du programme « Justice judiciaire ».

La création de ce nouveau programme a rendu nécessaire le transfert de vingt-deux emplois en provenance du programme « Justice judiciaire », dont trois de magistrats, quatre de personnels d’encadrement, huit de personnels de catégorie B et sept de catégorie C.

Le nouveau programme est doté en autorisations d’engagement de 3 664 654 euros et de 3 521 124 euros en crédits de paiement.

Votre rapporteur pour avis note que ces crédits semblent en forte augmentation si on les compare avec les crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale pour 2011 au sein du programme « Justice judiciaire » pour l’action « Conseil supérieur de la magistrature », qui s’élevaient à 2 929 394 euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Il s’est interrogé sur une telle évolution mais aussi sur l’écart entre autorisations d’engagement et crédits de paiement.

Il est expliqué dans le projet annuel de performances pour 2012 que l’action « Conseil supérieur de la magistrature » était dotée en 2011 d’un plafond d’emplois de 13 ETPT, plafond porté pour 2012 à 22 ETPT au sein du nouveau programme : aux 13 ETPT existants s’ajoutent en effet 6 ETPT précédemment inscrits sur l’action « Cour de cassation » du programme « Justice judiciaire », ainsi que 3 ETPT nouveaux (sont prévus le recrutement d’un deuxième secrétaire général adjoint, d’un greffier et de deux agents non titulaires recrutés pour six mois).

Selon les éléments complémentaires transmis par la Chancellerie à votre rapporteur pour avis l’augmentation des crédits de personnel se justifie, en premier lieu, par le paiement du traitement de fonctionnaires mis à la disposition du Conseil supérieur, jusqu’ici pris en charge par l’administration centrale ou les juridictions dont ils dépendent, en second lieu, par la réforme de la rémunération des membres du Conseil et, enfin, par les nécessaires adaptations liées à la possibilité ouverte désormais aux justiciables de saisir directement le Conseil supérieur.

La différence entre le niveau des autorisations d’engagement et des crédits de paiement est justifiée dans le projet annuel de performances par le nouveau déménagement du Conseil, prévu au 1er avril 2012 : il est nécessaire de couvrir l’écart de loyer entre le futur bail et l’ancien bail, sans toutefois que le coût du futur loyer puisse « être estimé à ce stade », mentionne le projet annuel de performances.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 26 octobre 2011, la Commission procède, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés, sur les crédits de la mission « Justice » pour 2012.

M. Yves Censi, vice-président de la commission des Finances. Monsieur le garde des Sceaux, M. Sébastien Huyghe, vice-président de la commission des Lois et moi-même sommes heureux de vous accueillir. Le président de la commission des Finances, M. Jérôme Cahuzac, retenu ailleurs, vous prie d’excuser son absence.

Nous sommes réunis en commission élargie afin d’examiner les crédits de la mission Justice pour 2012. Cette année, les débats seront chronométrés, ce qui nous incitera à respecter la durée prévue, qui, pour la mission « Justice », a été fixé à trois heures.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Pour la première année, j’ai l’honneur d’être rapporteur spécial sur la mission « Justice », laquelle constitue une prérogative régalienne et se trouve au cœur du quotidien des Français. En 2012, le budget de la justice, en hausse pour la huitième année consécutive, augmente de 4 % en crédits de paiement, les autorisations d’engagement s’élevant à 9,8 milliards, et les crédits de paiement à 7,42 milliards.

Je me félicite que le Gouvernement continue à en faire une priorité, alors que la dépense publique est plus que jamais contenue. Depuis 2002, les gouvernements successifs ont eu à cœur de rattraper le retard français de la justice, dont le budget passera de 1,6 % du PIB en 2002 à 2,6 % pour 2012, ce qui nous rapproche de la moyenne de l’OCDE.

En 2010 et 2011, les réformes ont été nombreuses : loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, du 5 juillet 2011 relative au droit et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, et du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

Le budget proposé se caractérise par un vaste programme d’investissements pour le parc judiciaire, surtout pénitentiaire, qui fait appel au partenariat public-privé, et par une politique d’emploi ambitieuse, particulièrement saillante dans un contexte général de diminution des effectifs publics.

Pour l’immobilier judiciaire, le rythme est plus soutenu que l’an dernier. Aux investissements de 175 millions qui permettront d’achever les regroupements décidés dans le cadre de la réforme judiciaire, s’ajoute une enveloppe complémentaire de 190 millions, qui financera de nouvelles opérations de rénovation. Pour l’immobilier pénitentiaire, l’État consent un effort considérable, en vue d’accroître le nombre de places de prison – le Président de la République a fixé l’objectif de 80 000 places – et de mettre le parc carcéral aux normes prévues par la loi pénitentiaire, notamment en matière d’encellulement individuel. Ces investissements sont inscrits à hauteur de 1,85 milliard dans le nouveau programme immobilier. En trente-cinq ans, le nombre de détenus a été multiplié par deux et demi, passant de 26 300 à 64 900.

La mission « Justice » est la seule à connaître des créations de postes, qui se montent à 515 équivalents temps plein ; 285 postes de greffier sont créés, ce qui est considérable. En tout, le ministère compte 6 625 emplois de plus qu’en 2002.

Si le budget de 2012 est à la fois généreux et ambitieux, quelques questions se posent. Sur le programme « Justice » judiciaire, la gestion des ressources humaines semble complexe. La charge de travail varie fortement d’une juridiction à l’autre. Le nombre d’affaires par magistrat ou par fonctionnaire peut aller du simple au double, voire au triple. Les redéploiements d’effectifs ne sont peut-être pas assez nombreux. Le ministère profitera-t-il du grand nombre de départs à la retraite pour mener une politique volontariste ? Si l’on veut rendre des postes plus attractifs, pourquoi ne pas utiliser le levier indemnitaire ou l’attribution de bonifications d’ancienneté, comme on le fait pour l’outre-mer ?

Le 1er juin 2011, la France disposait de 56 358 places opérationnelles pour 64 971 détenus, soit un taux d’occupation moyen des établissements de 115,3. La construction de nouvelles places de prison est donc une nécessité, même si, depuis vingt-cinq ans, les plans de construction se sont enchaînés. L’administration s’est appuyée sur la gestion privée. Le nouveau programme immobilier sera réalisé uniquement via des partenariats public-privé. La Cour des comptes estime que les dépenses de loyers correspondant aux investissements passeraient en 2017 de 25 à plus de 263 millions. La question de la soutenabilité budgétaire se pose-t-elle pour les PPP ? La hausse significative des dépenses obligatoires de l’administration sous forme de loyers ne va-t-elle pas provoquer l’éviction d’autres dépenses du programme ?

L’administration pénitentiaire devra assumer, à compter de 2012, l’extraction de détenus entre les palais de justice et les centres de détention, mission coûteuse en personnel jusque-là assurée par les forces de police et de gendarmerie. L’enveloppe de 250 emplois supplémentaires prévue à cet effet est-elle suffisante ? Ne faut-il pas changer les méthodes de travail des magistrats, en recourant par exemple à la visioconférence pour limiter le nombre d’extractions judiciaires ?

Depuis 2009, la Direction de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a recentré son intervention auprès des mineurs délinquants. Dans le cadre de la RGPP, son organisation connaît une modernisation profonde, qui l’oriente davantage vers les mineurs ayant commis des actes de délinquance. Cette année, après avoir diminué pendant trois années consécutives, les crédits de paiement du programme augmentent de 4,6 %, comme le reste de la mission, mais une réforme aussi importante ne se fait pas sans quelques grincements de dents des personnels, particulièrement de ceux qui sont chargés de la fonction éducative. La création de 60 postes d’éducateur est-elle suffisante au regard de la mise en route de nouveaux centres éducatifs fermés ? Comment la PJJ initiera-t-elle la généralisation des mesures judiciaires d’investigation éducative ?

M. Sébastien Huyghe, vice-président et rapporteur pour avis de la commission des Lois, pour l’administration pénitentiaire et la protection judicaire de la jeunesse. Je vous prie d’excuser l’absence du président de la commission des Lois, qui ne peut être présent.

Je ne peux que me féliciter de l’évolution des crédits ouverts pour l’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse dans le projet de loi de finances pour 2012. L’évolution des crédits amorcée depuis le début de la législature prouve que l’exécution des décisions de justice pénale est une priorité du Gouvernement et de la majorité parlementaire.

Les crédits de l’administration pénitentiaire augmentent de 44 % en autorisations d’engagement et de 7,4 % en crédits de paiement, afin de poursuivre l’agrandissement et la rénovation du parc immobilier, ainsi que la mise en œuvre de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009. De même, les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse augmentent de 4,6 % en autorisations d’engagement et de 2 % en crédits de paiement, ce qui permettra non seulement d’achever la reconcentration des moyens de la PJJ sur la prise en charge des mineurs faisant l’objet d’une mesure pénale, mais aussi d’ouvrir vingt centres éducatifs, afin d’appliquer la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

Le Gouvernement a déposé un amendement visant à réduire les crédits de la mission « Justice » de 20 millions d’euros, imputés à parts égales entre les programmes « Justice judiciaire » et « Administration pénitentiaire ». La mesure s’inscrit dans le plan d’économies de 1 milliard annoncé fin août par le Premier ministre et dicté par la situation de nos finances publiques.

Pour ce qui concerne l’administration pénitentiaire, la baisse de 10 millions d’euros représente une diminution globale des crédits de 0,2 %. Si l’amendement est voté, la hausse des crédits passera de 44,1 % à 43,8 % en autorisations d’engagement et de 7,4 % à 7 % en crédits de paiement. La hausse restant importante, je ne suis pas défavorable à l’amendement.

J’émets cependant une réserve sur l’imputation de la réduction des crédits au sein du programme « Administration pénitentiaire ». La baisse s’imputerait à hauteur de 9,5 millions pour le programme immobilier et de 0,5 million pour l’École nationale d’administration pénitentiaire (ENAP). Il serait problématique que celle-ci voie diminuer de 1,8 % les crédits prévus pour 2012, alors que la formation tant initiale que continue revêt une importance particulière. Peut-on répartir la réduction des crédits d’une manière moins défavorable à l’ENAP ?

À cette réserve près, les crédits de l’administration pénitentiaire et de la PJJ prévus dans le PLF pour 2012 ne pouvant qu’être pleinement approuvés, je me contenterai de poser cinq questions sur les évolutions liées au fonctionnement et aux missions de ces deux acteurs essentiels du service public de la justice.

Commençons par l’administration pénitentiaire.

Depuis la fin de l’année 2010, un nouveau programme immobilier a été engagé pour prendre la suite du programme « 13 200 », dont les derniers établissements doivent être livrés en 2014 ou en 2015. L’objectif du nouveau programme, qui prévoit l’ouverture de vingt-sept établissements et la fermeture de trente-six autres devenus inadaptés, est de porter la capacité d’hébergement de nos établissements pénitentiaires à 70 000 places en 2017. Depuis, le chef de l’État a annoncé que le projet de loi de programmation pour l’exécution des peines, que nous examinerons sous peu, porterait la capacité du parc pénitentiaire à 80 000 places. Comment ce nouvel objectif se traduira-t-il sur le plan budgétaire ? Quel est le calendrier prévu ?

Fin 2010, il a été décidé de transférer progressivement la compétence des extractions judiciaires à l’administration pénitentiaire, ce qui doit s’accompagner du transfert de 800 emplois en trois ans de la mission « Sécurité » vers la mission « Justice ». Depuis le 1er septembre, c’est-à-dire depuis presque deux mois, l’administration pénitentiaire assure les extractions judiciaires dans deux régions, l’Auvergne et la Lorraine. Pouvez-vous dresser un premier bilan ? Comment se passent sur le terrain les relations avec les forces de police et de gendarmerie lorsque l’administration pénitentiaire ne peut assurer des extractions par manque de moyens ou en raison du profil du détenu ? Enfin, le nombre de 800 emplois devant être transférés de l’administration pénitentiaire vers la mission « Sécurité », fixé par un arbitrage interministériel fin 2010, suffira-t-il pour que l’administration pénitentiaire assume sa charge dans de bonnes conditions sur l’ensemble du territoire ?

Troisièmement, début 2011, l’affaire de Pornic a révélé des difficultés concernant la continuité du suivi des personnes placées sous main de justice, notamment lors de la transition entre milieu fermé et milieu ouvert. Les travaux et déplacements que j’ai effectués pour préparer la discussion budgétaire m’ont permis de constater que, si des efforts réels ont été accomplis dans ce domaine, il faut encore résoudre des difficultés, notamment de communication entre les services de l’application des peines des tribunaux et les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP). Quelles orientations le ministère a-t-il retenues pour améliorer la continuité du suivi des personnes placées sous main de justice ?

Les effectifs des SPIP, qui ont pourtant augmenté de 75 % depuis 2002, sont fréquemment invoqués pour expliquer qu’ils peinent à assurer le suivi des condamnés. Récemment, un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des services judiciaires vous a été remis sur leur organisation et leurs éventuels besoins en personnels. Quelles en sont les conclusions et quelles suites envisagez-vous de lui donner ?

J’en viens à la protection judiciaire de la jeunesse. La loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et la justice des mineurs a élargi les cas de placement sous contrôle judiciaire, donc les possibilités de placement en centre éducatif fermé (CEF) pour les mineurs de treize à seize ans. Afin de mettre ces dispositions en application, le Gouvernement prévoit de créer vingt CEF. Quel est l’impact budgétaire de cette mesure et quel est l’état d’avancement des travaux ?

Si tout le monde ou presque reconnaît le bien-fondé des principes qui fondent l’action éducative dans les CEF, on manque de données objectives sur leur efficacité en termes de prévention de la récidive et de réinsertion. Le ministère va-t-il effectuer un suivi régulier du devenir des jeunes qui sont passés par ces centres, ce qui permettrait de mesurer leur efficacité ?

Les personnels des CEF que j’ai rencontrés posent la question de l’« après-CEF ». Souvent, les professionnels de la PJJ, qui peinent à trouver pour les mineurs une solution adaptée, formulent des propositions dans l’urgence et par défaut. Pour remédier à cette difficulté, il serait souhaitable de construire pour les mineurs délinquants un parcours de prise en charge par la justice, fondé sur la progressivité, et élaboré conjointement par le juge des enfants et par les services de la PJJ. Dès l’audience, un mineur placé en CEF sous contrôle judiciaire serait informé par le magistrat que, si le placement se passe bien, on envisagera une mesure éducative comme un placement en foyer, suivi d’un retour dans la famille accompagné d’une mesure d’activité de jour. Un tel parcours – qui nécessiterait, non une mesure législative, mais seulement une volonté commune des magistrats et des services de la PJJ – améliorerait la lisibilité des mesures et anticiperait les transitions, souvent difficiles et insuffisamment préparées, entre les différentes structures. Que pensez-vous de cette proposition ?

M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis de la commission des Lois, pour la justice et l’accès au droit. Je suis heureux d’assurer, cette année encore, la fonction de rapporteur pour avis du budget de la mission « Justice ». Continuellement en hausse depuis 2002, il progresse cette année de 4 % en crédits de paiement, le programme « Justice judiciaire » augmentant de 0,7 % et le programme « Accès au droit et à la justice » de 7,7 %.

Le budget intègre la réforme de la garde à vue, de l’hospitalisation sous contrainte, de la carte judiciaire et du rôle des citoyens assesseurs dans les tribunaux correctionnels. Au cours de mes déplacements dans les juridictions – j’ai rédigé un rapport d’information budgétaire sur leur fonctionnement –, j’ai mesuré, outre le dévouement des personnels de justice, notamment des magistrats, les difficultés qu’ils rencontrent.

Les premières portent sur les effectifs des fonctionnaires des services judiciaires et sur leur régime indemnitaire. Je me réjouis que vous ayez prévu de recruter 90 magistrats par concours exceptionnel et de porter de 105 à 180 le nombre de postes d’auditeur de justice offerts au concours. Il faut croire que j’ai été entendu sur ce point.

Je me félicite aussi que l’on compte désormais par magistrat 0,92 greffier et, toutes professions réunies, 2,5 fonctionnaires, preuve que l’équipe qui les entoure a été étoffée. Cependant, est-il opportun d’améliorer à nouveau le régime indemnitaire des magistrats sans rien prévoir pour les greffiers ? Plus généralement, quelles sont les perspectives indemnitaires des fonctionnaires du ministère de la justice, qui souffrent d’un manque de reconnaissance ? Quelles sont les perspectives d’intégration des greffiers, qui se sentent parfois déclassés, dans le nouvel espace statutaire ?

Depuis 2006, l’effectif des fonctionnaires de catégorie C diminue, ce qui est préjudiciable au fonctionnement des juridictions. L’exécution, la gestion des archives, la numérisation et le rangement des scellés nécessitent du personnel technique. J’entends dire qu’à Nanterre plus personne n’assure la distribution du courrier ou le transfert des dossiers entre le parquet et les services de l’instruction.

Venons-en à la situation des juridictions et à certaines fonctions spécifiques.

Comment les juges d’instance feront-ils face au surcroît d’activité induit par la révision systématique des mesures de protection des majeurs d’ici à 2014, et à la suppression des juridictions de proximité, qui ramènera vers eux le petit contentieux civil au-dessous de 4 000 euros ?

Certaines des personnes que j’ai auditionnées s’interrogent sur la répartition des tribunaux d’instance spécialisés par le décret du 23 août 2011 dans le contentieux du surendettement. Est-il exact que le tribunal d’instance de Villejuif a été choisi pour traiter, dès le 1er septembre 2011, l’ensemble des procédures de surendettement et de rétablissement personnel de tout le département de Val-de-Marne sans recevoir de moyens supplémentaires ?

Qu’en est-il du recrutement de cent nouveaux juges de l’application des peines, prévu par la loi pénitentiaire dont j’ai été le rapporteur ?

Dans la suite logique de la réforme de la garde à vue, les crédits de l’aide juridictionnelle augmentent fortement. Dans le même temps, une contribution de 35 euros est exigée du demandeur en justice à compter du 1er octobre 2011, dont le montant global attendu se monte à 84 millions. Les avocats ont dénoncé l’impréparation de la mesure. Les timbres n’ont pas toujours été faciles à trouver, et la question des timbres électronique est posée. Pouvez-vous faire le point sur ce dossier ? Par ailleurs, l’institution de la taxe a un effet pervers : l’exemption que procure toute demande d’aide juridictionnelle a fait sensiblement augmenter le nombre de dossiers.

La maîtrise des frais de justice, qui représentent encore 470 millions, est essentielle.

Les associations d’aide aux victimes voient diminuer leurs crédits. J’ai déposé en septembre 2011 une proposition de loi visant à pérenniser leur financement, en instituant un prélèvement en cas de condamnation. Peut-on explorer cette piste ?

Compte tenu des efforts imposés à tous les ministères, on peut comprendre que le Gouvernement dépose un amendement portant un coup de rabot de 20 millions, mais j’ai moins de mal à admettre les restrictions imposées à la justice pénitentiaire qu’à la justice judiciaire, car le fonctionnement courant des juridictions pose nombre de difficultés. Faut-il vraiment réduire de 500 000 euros les crédits pour charge de service public de l’École nationale de la magistrature, qui doit effectuer des recrutements complémentaires, compte tenu de l’augmentation du nombre d’auditeurs ?

M. Yves Censi, vice-président de la commission des Finances. Monsieur le garde des Sceaux, selon une étude de la direction de l’administration pénitentiaire, parue cet été, 60 % des détenus sortants sont condamnés dans les cinq ans qui suivent leur libération, et, dans les mêmes délais, 78 % des mineurs ont de nouveaux ennuis avec la justice. L’absence d’aménagement de peine semble aggraver le risque de récidive, qui augmente également avec la durée d’enfermement. Quelles actions comptez-vous mener pour développer les aménagements de peine ?

Les centres éducatifs fermés constituent une réponse à la lutte contre la délinquance des jeunes. La loi du 10 août 2011 sur le jugement des mineurs élargit les conditions de placement en CEF. Le projet de budget de la justice pour 2012 prévoit l’ouverture de vingt centres, en plus des quarante-quatre qui existent aujourd’hui. Sans remettre en cause leur existence, je m’interroge sur leur coût, qui se monte à 120 000 euros par an. Compte tenu du taux d’encadrement des mineurs délinquants, une journée coûte 663 euros dans ces centres contre 111,5 euros dans les établissements publics d’insertion de la défense (EPIDe). Comment justifier que les premiers soient cinq fois plus chers que les seconds ? Sont-ils réellement efficients ?

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Le budget de 2012, comme ceux qui l’ont précédé depuis 2002, et plus particulièrement depuis 2007, vise à donner plus de moyens à la justice, afin de rattraper un retard historique. Cela dit, un amendement du Gouvernement, qui ne peut s’affranchir de la crise financière actuelle, prévoit de réduire l’augmentation de 4 % prévue pour les crédits de la justice car, si les missions de mon ministère constituent une priorité, il doit, comme les autres, lutter contre la crise.

Le ministère de la justice affichera des créations nettes d’emplois en 2012, comme c’est le cas depuis 2007. Le budget triennal pour 2011-2013 prévoyait que le ministère serait autorisé à créer 200 emplois en 2012 ; ce sont finalement 515 emplois qui seront créés, sans compter les 250 emplois transférés du ministère de l’intérieur au titre de la reprise progressive des missions d’extraction judiciaire. Ces moyens supplémentaires doivent être mis au service d’un effort de modernisation des méthodes et de l’organisation du ministère, afin d’assurer une plus grande efficacité collective au service des justiciables.

Le budget de la mission « Justice » donnera au ministère les moyens de mettre en œuvre les réformes adoptées cette année, qu’il s’agisse de l’introduction des citoyens assesseurs dans les juridictions correctionnelles et les juridictions d’application des peines, de la réforme de l’hospitalisation sans consentement ou de celle de la garde à vue. Pour chaque réforme, le Gouvernement s’est efforcé de mobiliser les moyens nécessaires à une exécution effective et rapide des peines prononcées par les juridictions. Ainsi, les crédits relatifs au bracelet électronique augmenteront de 20 %, afin de permettre à l’administration pénitentiaire d’atteindre l’objectif de 12 000 bracelets.

Ce budget ouvre aussi des autorisations d’engagement à hauteur de plus de 1,8 milliard d’euros au titre des investissements prévus dans le cadre du nouveau programme immobilier, et pour renforcer la prise en charge des mineurs délinquants : 60 emplois d’éducateur seront ainsi créés au profit des vingt nouveaux centres éducatifs fermés. Sur ces points, le budget de 2012 annonce le projet de loi de programmation relatif à l’exécution des peines que le Président de la République m’a demandé de soumettre au conseil des ministres, puis au Parlement, dans les prochaines semaines.

Je remercie le rapporteur spécial, M. Alain Joyandet, pour sa présentation rapide mais exhaustive. Sa nouveauté dans la fonction lui a permis de faire litière des considérations historiques, et d’être ainsi plus bref que ses collègues, que M. le vice-président Yves Censi a laissé s’exprimer plus longtemps.

Dans son rapport, M. Joyandet pose plusieurs questions fondamentales au sujet de l’organisation du service public de la justice. La première d’entre elles concerne les différences entre les juridictions quant à la charge de travail, différences qui, selon le référé adressé à la chancellerie par le premier président de la Cour des comptes, peuvent aller du simple au double ou au triple. Si l’activité d’une juridiction n’est pas forcément quantifiable, les différences restent indéniables.

Depuis 2009 au moins, le Gouvernement s’efforce, à l’issue des dialogues de gestion avec les cours d’appel, de mieux localiser les emplois de magistrat et de fonctionnaire, en tenant compte des postes disponibles et, surtout, des règles statutaires. Mais le caractère inamovible des magistrats du siège, par exemple, gêne la mobilité des personnels. Néanmoins, 223 redéploiements – dont 190 au sein d’une même cour d’appel – ont été réalisés en 2010, et 49 – dont 32 à l’intérieur d’une même cour d’appel – en 2011. La localisation est encore loin d’être idéale. Aussi un groupe de travail, composé de magistrats et de représentants d’organisations syndicales, a-t-il été créé pour y réfléchir. Il fonctionne très bien, mais la question qu’il traite se heurtera toujours aux contraintes statutaires de la magistrature et aux effets des nominations décalées, pour les magistrats comme pour les fonctionnaires : compte tenu de la procédure de validation par le Conseil supérieur de la magistrature, une nomination proposée en février, et annoncée plusieurs mois plus tôt pour respecter la transparence, ne devient effective qu’en juillet ou septembre, si bien qu’au total elle prend pratiquement un an. De surcroît, on ne peut muter les gens contre leur gré. Néanmoins, la localisation s’améliore.

Les extractions judiciaires concernent, pour l’essentiel, le transfert des détenus devant les juges ou les tribunaux. Il a été décidé en 2010 que ces missions, nombreuses et difficiles, seraient désormais assurées par l’administration pénitentiaire, après l’avoir été par la police et la gendarmerie. À cette fin, 800 emplois seront transférés du ministère de l’intérieur à l’administration pénitentiaire d’ici à 2014. Ce chiffre me semble toutefois insuffisant, pour une raison simple : utiliser des policiers ou des gendarmes pour extraire des détenus peut désorganiser une brigade ou un commissariat, mais cela reste possible ; en revanche, on ne peut demander aux personnels qui surveillent les prisonniers de quitter leur poste. Cette difficulté s’est constatée dès la mise en œuvre de l’expérimentation dans les deux régions concernées, d’autant que la prison d’Aurillac et le palais de justice de Riom, par exemple, sont si éloignés l’un de l’autre que toute opération d’extraction prend une journée entière. Les agents de l’administration pénitentiaire qui assureront cette tâche ne feront donc pratiquement rien d’autre : il faudra une tout autre organisation, y compris dans les méthodes de travail des magistrats. Les extractions doivent être regroupées quand c’est possible, et n’être utilisées qu’en l’absence de tout autre moyen technique ; ainsi les visioconférences, qui ont augmenté de 35 % en un an, avaient permis de réduire le nombre d’extractions de 10 % en 2008.

Les expérimentations ont vite révélé que la méthode à suivre n’était pas de proratiser les effectifs en fonction du nombre de transferts réalisés dans chaque région. L’ensemble des postes transférés ont donc été utilisés pour les deux régions concernées ; mais le problème est que les personnels correspondants ne sortiront de l’École nationale d’administration pénitentiaire, à Agen, qu’en mars prochain. Jusqu’à cette date, et à titre d’expérimentation, l’administration pénitentiaire continuera d’affecter tous les personnels disponibles – équipes régionales d’intervention et de sécurité ou réservistes – sans toucher aux effectifs des personnels pénitentiaires. C’est sur cette base, et non sur celle de l’arbitrage initial, que seront évalués les besoins réels.

Des réunions ont eu lieu, tant au niveau national qu’au niveau régional. Les préfets de région ont ainsi rappelé les principes de la nouvelle organisation aux directeurs départementaux de la sécurité publique et aux colonels commandant les groupements de gendarmerie. Je rappelle que le code de procédure pénale, qui n’a pas été modifié, permet aux tribunaux de procéder à des réquisitions en cas de besoin. En attendant la mise en place de la nouvelle organisation, les tribunaux s’efforcent d’anticiper les dates des extractions en informant la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP), laquelle, en cas de manque d’effectifs, fait appel aux forces de police et de gendarmerie. L’expérimentation est en ce sens utile pour évaluer les besoins.

S’agissant du programme immobilier, l’objectif est de créer 80 000 places supplémentaires dans les prisons d’ici à 2017, conformément aux annonces du Président de la République et aux orientations du futur projet de loi de programmation. Ces places ne sont pas toutes identiques : les prisons destinées aux peines courtes, par exemple, seront plus simples à construire que d’autres.

L’objectif sera atteint grâce à l’achèvement de programmes antérieurs – notamment le programme « 13 200 », qui touche à son terme –, au maintien en activité d’établissements dont la fermeture était prévue et à la création de nouveaux établissements. Le ministère prendra directement en charge la transformation des anciens établissements, et les nouvelles constructions seront réalisées via des partenariats public-privé. L’avantage de ces derniers est qu’ils permettent de mener rapidement à bien plusieurs projets à la fois ; leur inconvénient est qu’ils mobilisent, pendant toute leur durée, l’essentiel des ressources publiques – il faut bien payer ceux qui ont investi. Reste que, sur le nombre de places de prison, notre pays doit combler son retard par rapport à ses voisins. À cet égard, s’ils ne constituent peut-être pas en eux-mêmes la formule idéale, les PPP permettent des réalisations plus rapides.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Merci pour vos réponses, monsieur le garde des Sceaux. Je veux revenir sur un point que je n’ai pas abordé tout à l’heure, ayant strictement respecté mon temps de parole.

S’agissant des affectations de personnels, est-il possible d’utiliser des moyens indemnitaires ou d’attribuer des bonifications d’ancienneté pour favoriser le volontariat dans les régions où celui-ci demeure insuffisant ?

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Le régime indemnitaire est déjà utilisé à cette fin. Le problème est que les régimes indemnitaires des fonctionnaires et des greffiers font actuellement l’objet d’une refonte. Si les greffiers sont gagnants au départ, ils le sont moins à l’arrivée. Les discussions portent davantage sur le régime indemnitaire commun que sur les éventuelles différenciations entre les juridictions. Je demanderai cependant à mes services d’engager des négociations avec les syndicats sur les moyens d’intéressement des personnels.

Certains postes sont difficiles à pourvoir, pour des raisons qui tiennent, par exemple, au prix des logements. C’est par exemple le cas à Compiègne, où nul ne s’est porté candidat, ou à Montargis, où il a fallu un an pour trouver un candidat au poste de procureur.

M. Yves Censi, vice-président de la commission des Finances. Je vous rappelle, chers collègues, que vous ne disposez chacun que de deux minutes pour poser vos questions.

M. Patrice Verchère. Le budget que vous nous présentez, monsieur le garde des Sceaux, illustre la priorité donnée à la justice, et répond ainsi aux préoccupations légitimes des Français.

Alors que des efforts substantiels sont demandés aux autres ministères, celui de la justice est l’un des rares à voir ses crédits augmenter, et ce à hauteur de 4 %. Il atteindra ainsi 7,42 milliards d’euros en 2012, soit une hausse de 19 % depuis 2007.

Cette progression continue traduit la volonté du Président de la République, du Gouvernement et de la majorité de replacer les missions de la justice au cœur de notre société, et vise à combler les retards accumulés dans le passé. Nous devons nous en féliciter.

Des difficultés sont apparues cette année quant à l’exécution des peines. Quelles sont les avancées prévues par le budget de 2012 en ce domaine ?

Les nombreuses réformes engagées nécessitent des moyens humains supplémentaires ; or plusieurs rapports ont fait état d’un manque de personnels, notamment de greffiers. Des créations de postes sont-elles prévues ?

Enfin, la délinquance des mineurs augmente, tant par sa fréquence que par la violence des actes commis. Quelles sont les réponses envisagées par le ministère ?

M. Dominique Raimbourg. N’ayant que deux minutes pour poser sept questions, j’irai vite.

Je me félicite de l’augmentation du budget de la justice, mais mon satisfecit s’arrêtera là, puisque les retards historiques dont vous avez parlé tiennent aux demandes croissantes dont la justice fait l’objet. M. le rapporteur spécial a ainsi souligné que le nombre de détenus avait été multiplié par 3,5. À quand un véritable plan de rattrapage ?

Pour le coup, vous annoncez un plan de rattrapage en matière d’exécution des peines. Pourquoi vous cantonner à ce domaine, et ce, semble-t-il, à la demande du Président de la République, dont les initiatives en matière de justice n’ont pas été des plus heureuses jusqu’à ce jour ?

On se plaint de la délinquance des mineurs, mais le nombre de postes dédiés à la protection judiciaire de la jeunesse est en diminution de 106 équivalents temps plein travaillé, alors que l’on annonce l’ouverture de vingt nouveaux centres éducatifs fermés. En d’autres termes, selon mes informations, le nombre d’encadrants par centre passera de 27 à 24, quand le nombre de mineurs, lui, augmentera quant à lui de 10 à 12. Dans ces conditions, l’efficacité des CEF est-elle garantie ?

Par ailleurs, vous dites attendre 215 emplois de la simplification des procédures, mais le projet de loi en la matière n’est toujours pas voté. Votre optimisme n’est-il pas excessif ?

Quand disposerons-nous d’une évaluation du coût des PPP sur l’ensemble de leur durée ?

Quant aux services pénitentiaires d’insertion et de probation, cette année a été marquée par d’importantes difficultés. Quel est le ratio ?

Enfin, pourquoi la mesure de l’activité de l’administration pénitentiaire n’inclut-elle pas un ratio de la surpopulation pénale ?

M. Michel Hunault. Je n’ai pas de question à vous poser à ce stade, monsieur le garde des Sceaux : nous débattrons du présent budget dans l’hémicycle.

L’exercice est convenu : la majorité se félicite, comme je le fais moi-même, de l’augmentation du présent budget dans une période difficile, et l’opposition juge que l’on n’en fait jamais assez.

Tout au long de la législature, le groupe Nouveau Centre a apporté son soutien et sa contribution à un certain nombre de réformes. Je souhaite que celles-ci soient appliquées. Qu’il s’agisse de la carte judiciaire, des avoués ou des magistrats, des besoins existent, qui justifient les créations de postes annoncées. L’accès au droit est en effet une question importante.

Vous vous êtes rendu vendredi dernier à Nantes pour la Convention nationale des avocats. Répondre aux besoins croissants de l’aide juridictionnelle est un défi.

Nous avons voté des réformes, qui concernent par exemple la protection des droits – en application de la Convention européenne des droits de l’homme – ou la garde à vue, réformes dont l’application suppose des moyens, notamment budgétaires. Je vous demande donc d’y veiller, main dans la main avec les magistrats et les professionnels du droit, notamment avec les avoués.

Enfin, je le répète, l’accès de nos concitoyens à la justice doit être amélioré.

M. Marc Dolez. Limiter l’intervention des porte-parole des groupes à deux minutes sur un sujet de cette importance est à mes yeux inacceptable : nous ne manquerons pas de le signaler à la Conférence des présidents.

Les chiffres tels qu’ils sont présentés masquent mal le fossé qui sépare les discours de la réalité. On nous parle ainsi de crédits en augmentation, mais jamais les juridictions, les établissements pénitentiaires et les services de la protection judiciaire de la jeunesse n’ont été dans une situation aussi difficile. Quant à la prétendue augmentation des effectifs, il s’agit d’un trompe-l’œil puisque, si tant est qu’elle soit avérée, elle ne rattrape pas les retards accumulés au cours des années précédentes, et ne permet pas davantage d’appliquer les réformes que vous avez fait voter. Enfin, il y a un manque criant de fonctionnaires dans les juridictions.

Ma première question portera sur l’immobilier. En ce domaine, l’essentiel du budget est consacré à la création de nouvelles places de prison, mais les investissements pour 2012 ne concerneront qu’un nombre restreint de tribunaux. Combien d’entre eux sont concernés, et quels sont les crédits prévus pour l’entretien des bâtiments ?

La protection judiciaire de la jeunesse étant le secteur sacrifié du ministère, avec 632 éducateurs en moins depuis 2008, comment celle-ci peut-elle assumer sa mission ?

Enfin, les 336 millions d’euros de crédits de paiement prévus pour l’aide juridictionnelle incluent-ils les 85 millions d’euros attendus de la taxe de procédure de 35 euros, que combattent l’ensemble des syndicats d’avocats et de magistrats ?

M. Yves Censi, vice-président de la commission des Finances. Je rappelle que c’est la Conférence des présidents qui a fixé la nouvelle procédure, cher collègue : je crains donc que vos protestations ne soient vaines.

M. Marc Dolez. Nous ferons valoir à la Conférence des présidents qu’il vaut mieux revenir à l’ancienne formule.

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. M. Huyghe m’a interrogé à propos des centres éducatifs fermés. Les vingt centres supplémentaires seront créés en transformant des unités éducatives d’hébergement collectif : la PJJ a organisé dès cet été, avec les directeurs interrégionaux, une étude de faisabilité pour sélectionner les établissements susceptibles de devenir des CEF. L’opération est en cours de lancement à Bures-sur-Yvette, Laon, Épinay-sur-Seine, Aix-en-Provence, Angoulême, Villeneuve-d’Ascq, Épernay, Marseille Chutes-Lavie, Saint-Genis-les-Ollières et Pluguffan. Ce choix répond en particulier aux besoins importants en matière de placement dans la direction interrégionale d’Île-de-France et d’outre-mer et dans celle du Sud-Est. Une seconde liste de douze établissements est actuellement à l’étude.

Le coût d’investissement est évalué à 30 millions d’euros, et les autorisations d’engagement sont d’ores et déjà ouvertes dans le projet de loi de finances pour 2012. Outre les opérations immobilières, la mise en place de ces nouveaux centres nécessite la création de 60 postes d’éducateurs.

Je précise, monsieur Dolez, qu’aucun poste d’éducateur n’a été supprimé à la protection judiciaire de la jeunesse depuis 2008. Au contraire, leur nombre s’est accru de 17 %. En revanche, d’autres postes ont pu être supprimés, notamment dans les fonctions support.

M. Jean-Jacques Urvoas. C’est du jésuitisme !

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Vous pouvez critiquer, mais vous ne pouvez nier la vérité ! Il est facile de vérifier que le nombre d’éducateurs de la PJJ a augmenté : ils sont payés tous les mois, et s’ils ne l’étaient pas, vous le feriez savoir !

S’agissant du prix de journée en centre éducatif fermé, il est vrai qu’il est relativement élevé : plus de 600 euros par personne. Cela tient au fort taux d’encadrement.

Bien que nous ayons affaire à un public très difficile, nous avons choisi de lui éviter la prison « sèche », afin de rester fidèle à la conception française de la justice pour les mineurs – une justice qui donne la primauté à l’éducatif sur le répressif. Des moyens importants sont donc consacrés à la formation dans les CEF.

Mais il faut aussi des gardiens, car il s’agit tout de même d’établissements pénitentiaires : en cas d’échec, l’étape suivante est l’établissement pour mineur, puis la prison. Nous avons en effet essayé de diversifier les modes de placement des mineurs afin d’offrir au juge la palette la plus large possible.

Ce public difficile nécessite donc un encadrement important : éducateurs, psychologues et enseignants à plein temps, directeurs, chefs de service, personnel doublé la nuit. Les frais d’équipement sont également importants. Tout cela explique l’ampleur du coût de fonctionnement de ces centres.

L’expérience en est encore à ses débuts, et nous essayons d’en évaluer les résultats. Une enquête a ainsi été réalisée dans sept centres éducatifs fermés, ce qui a permis d’en améliorer notablement le fonctionnement. Une autre, en cours de finalisation, est destinée à mesurer l’impact du séjour en CEF dès la sortie du mineur, et six mois après celle-ci. Enfin, une troisième étude est en projet, afin de procéder à l’évaluation comparée de l’impact sur la réitération des différentes décisions de justice concernant les mineurs délinquants.

La continuité du parcours éducatif des mineurs sortant de CEF est une préoccupation majeure. Des travaux permettant de prévenir toute rupture dans le suivi éducatif ont donc été initiés. Une circulaire du 13 novembre 2008 définit les modalités précises d’audiences et d’échanges pendant la durée du placement afin de préparer au mieux la sortie de chaque mineur. L’ordonnance du 2 février 1945 prévoit d’ailleurs qu’à l’issue du placement « le juge des enfants prend toute mesure permettant d’assurer la continuité de la prise en charge éducative du mineur en vue de sa réinsertion durable dans la société ».

Les mineurs sortant de CEF peuvent aussi faire l’objet d’un suivi renforcé par le trinôme judiciaire réunissant le parquet, le juge des enfants et le service éducatif. Les services de la PJJ se sont récemment réorganisés afin de garantir à la fois la mise en œuvre sans délai des décisions du magistrat, la qualité de la prise en charge, le caractère pluridisciplinaire des équipes et la continuité de l’action éducative, au sein de chaque unité éducative mais aussi entre les unités de plusieurs établissements.

La continuité de la prise en charge éducative à la sortie d’un CEF ne peut s’envisager uniquement en termes de placement. Les modalités d’un accompagnement renforcé en milieu ouvert font donc actuellement l’objet d’une réflexion. À cet égard, l’affaire de Pornic a marqué les esprits, car elle touchait aussi bien à la question du suivi des personnes incarcérées qu’à celle de l’agrément donné aux familles d’accueil.

J’ai rappelé à l’administration pénitentiaire la nécessité d’une affectation nominative des dossiers de prise en charge par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, sous la responsabilité d’un cadre de ce service. Un choix a été fait il y a quelques années, celui de placer les SPIP dans le cadre de l’administration pénitentiaire plutôt que dans celui de la pure administration judiciaire. Il faut donc donner une nouvelle orientation à l’administration pénitentiaire, qui va devoir modifier ses métiers et se tourner vers le milieu ouvert, ce qui ne correspond pas à sa tradition. J’ai demandé au nouveau directeur de veiller à doter les SPIP des moyens dont ils ont besoin. L’utilisation de l’informatique, notamment le système « APPI », devra être automatique et vérifiée régulièrement.

J’en viens aux questions de M. Garraud.

Est-il opportun d’améliorer à nouveau le régime indemnitaire ? J’observe tout d’abord que, sur les 90 postes de magistrat mis au concours, tous ne sont pas pourvus. Ensuite, les magistrats ont toute liberté pour fixer la date de leur départ à la retraite, si bien que l’on ne sait pas combien vont partir chaque année. L’estimation effectuée lors du recrutement des auditeurs de justice peut être juste ou non et, souvent, elle ne l’est pas. Cela explique que l’on puisse manquer de magistrats même lorsque l’on crée de nombreux postes. Le mode de fonctionnement des carrières dans la magistrature est donc peu compatible avec une bonne gestion des ressources humaines.

Nous avons essayé, dans le cadre du budget qui nous est alloué, d’améliorer le régime indemnitaire. Ainsi, la prime modulable versée aux magistrats va passer de 9 à 12 %, ce qui représente un effort relativement important. Les greffiers ne sont pas oubliés, puisqu’une enveloppe de 3,4 millions d’euros leur a été spécialement dévolue en 2011 et qu’une autre enveloppe de 1,05 million est prévue en 2012, afin d’augmenter leurs primes à l’occasion de la mise en place dans leur corps du nouvel espace statutaire.

Nous menons depuis plusieurs années une politique de promotion sociale qui permet aux personnels de catégorie C de passer le concours pour devenir greffiers. Le problème est que l’on commence à manquer d’agents dans cette catégorie. En outre, nous devons veiller à éviter tout déclassement de la fonction de greffier, faute de voir ce dernier accomplir un travail relevant de la catégorie C. Il faut non seulement que l’équipe formée par le magistrat et le greffier puisse bien fonctionner, mais aussi qu’elle bénéficie du soutien des fonctionnaires de catégorie C pour la réalisation de travaux simples, ne nécessitant pas des connaissances juridiques poussées. Nous n’allons pas payer des gens titulaires d’un master 2 pour faire des photocopies ou classer des dossiers !

D’ailleurs, pourquoi n’a-t-on plus recours, pour effectuer ces tâches, aux personnes condamnées à un travail d’intérêt général ? Il est pour le moins paradoxal que la justice soit la seule administration à ne pas en accueillir, ni, d’ailleurs, à recourir à des emplois aidés.

L’important est de permettre aux greffiers de faire leur métier. Ils n’ont jamais été aussi nombreux à s’y préparer, puisque l’école de Dijon accueille 800 élèves. Les candidats sont de très haut niveau : la plupart sont titulaires d’un master 2, alors qu’il y a encore quelques années, on passait le concours après avoir obtenu le DEUG. Ainsi, de nombreux greffiers sont plus diplômés en droit que les magistrats qu’ils assistent…

M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis. Cela dépend !

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Bien entendu, je ne parle pas du premier président de la Cour de cassation, ni de certains juges d’instruction…

Vous avez par ailleurs évoqué l’augmentation de la charge de travail du juge d’instance. Lors de l’examen du projet de loi relatif à la répartition des contentieux, j’ai confirmé que la situation des juridictions d’instance ferait l’objet d’un examen attentif en lien avec les chefs de cour et de juridiction, dans le cadre des dialogues de gestion actuellement en cours. Nous en tirerons toutes les conséquences en termes de localisation des emplois et donc d’augmentation des effectifs dans les tribunaux d’instance où cela sera justifié. Des transferts depuis les TGI vers les tribunaux d’instance sont en effet envisageables puisque les juges de proximité siégeront désormais dans les formations collégiales civiles des TGI, libérant ainsi des emplois de magistrat. Il pourra également être mis fin aux tâches annexes qui étaient jusqu’à présent confiées aux juges d’instance, comme la participation aux sessions d’assises ou aux audiences correctionnelles.

La prochaine législature devra par ailleurs être l’occasion d’examiner l’hypothèse d’une fusion des juridictions de première instance, car la coexistence de juridictions d’instance et de grande instance pose des problèmes d’organisation et manque de souplesse.

En ce qui concerne la répartition des tribunaux spécialisés dans le contentieux du surendettement, prévus par le décret du 23 août 2011, vous avez affirmé que le tribunal de Villejuif était, dans le département du Val-de-Marne, le seul qui n’ait pas bénéficié dans ce cadre de moyens supplémentaires. Le choix des tribunaux d’instance concernés a été effectué à partir des propositions des chefs de cour et de juridiction. Dans le Val-de-Marne, le président du TGI de Créteil a désigné le tribunal d’instance de Villejuif et prévu le redéploiement d’effectifs depuis le tribunal de grande instance. Un magistrat du siège, deux greffiers et un adjoint administratif de la deuxième chambre civile seront ainsi attribués au tribunal de Villejuif, qui bénéficie donc bien de moyens supplémentaires.

Le groupe de travail sur l’exécution des peines a élaboré trente et une recommandations autour de deux grands axes : évaluation de la charge de travail des services d’application des peines et pilotage de ces services. Nombre de ces mesures pouvaient être mises en œuvre immédiatement : elles ont fait l’objet de la circulaire ministérielle du 7 octobre 2011, qui a notamment diffusé les tableaux de bord destinés à la modélisation du rapport d’activité des juges d’application des peines afin de mesurer l’activité du service dans chaque tribunal. Cette circulaire a également repris les préconisations destinées à améliorer la communication entre les différents acteurs de la chaîne pénale : promotion de l’ensemble des instances de dialogue déjà existantes, organisation de réunions thématiques entre le parquet et le service de l’application des peines ou entre ce dernier et les services du tribunal pour enfants.

Le groupe de travail a par ailleurs estimé que la charge d’activité des magistrats compatible avec la nécessité de rendre des décisions de qualité dans des délais raisonnables était de 700 à 800 dossiers par juge de l’application des peines. Nous en avons tenu compte lors des travaux préparatoires au projet de loi de programmation sur l’exécution des peines, qui sera présenté dans quelques semaines au Parlement.

Plusieurs questions ont été posées sur l’aide juridique.

Du point de vue pratique, tout d’abord, il est exact que l’on ne trouve pas partout des timbres à 35 euros, mais à partir du 1er janvier 2012, la contribution pourra être réglée par voie électronique. En attendant, il est nécessaire de recourir à des timbres en papier.

Il manquait 85 millions d’euros, sur un coût total de 103 millions, pour financer l’intervention des avocats consécutive à la réforme de la garde à vue. Après avoir examiné différentes voies possibles, le Gouvernement a tranché en faveur d’une contribution reposant sur la solidarité entre justiciables. Certains proposaient de taxer tous les actes, y compris les actes notariés, mais il nous a semblé qu’il y avait eu suffisamment de discussions entre avocats et notaires cette année, et qu’il était préférable de ne pas lancer un nouveau chantier de cet ordre. De son côté, le rapport de Mme Pau-Langevin et de M. Gosselin sur l’aide juridique et l’accès au droit a présenté plusieurs pistes, dont celle d’une taxe sur les actes juridiques – notamment sur ceux soumis à la procédure d’enregistrement ou d’immatriculation au registre du commerce – et d’une contribution à la charge des assureurs.

S’agissant de la première hypothèse, la question était de savoir s’il était légitime de taxer l’activité économique – celle des entreprises, mais aussi celle des particuliers, notamment quand ils vendent ou achètent un bien immobilier – pour financer l’intervention de l’avocat en garde à vue. Techniquement, les droits d’enregistrement sont actuellement partagés entre communes, départements et État. Ajouter une tranche d’imposition additionnelle affectée au Conseil national des barreaux aurait inutilement accru la complexité de ce prélèvement et réduit sa lisibilité.

Quant à taxer les assureurs, cela serait indirectement revenu à taxer les contrats d’assurance, et donc les assurés, ce qui aurait posé à peu près les mêmes questions que le droit finalement créé.

Dès lors qu’il avait été décidé de financer la réforme de la garde à vue par une taxe affectée, il était sain que cette taxe ait un rapport avec la dépense considérée. De ce point de vue, le droit de timbre était la moins mauvaise des solutions.

La justice a un coût, il faut l’assumer et l’organiser pour prendre en compte les facultés contributives de chacun !

En termes d’organisation, la contribution pour l’aide juridique – qui ne doit pas être confondue avec le droit de timbre sur appel – sera affectée au Conseil national des barreaux et gérée par la profession. Le produit attendu est estimé à 86 millions d’euros compte tenu du nombre de procédures annuelles enregistrées, déduction faite du nombre de bénéficiaires exonérés – notamment les attributaires de l’aide juridictionnelle.

Sur les premiers mois d’application de la réforme de la garde à vue, la dépense liée à l’intervention de l’avocat reste dans les limites de ce qui avait été prévu : il n’y a pas lieu de craindre, à ce stade, une insuffisance de financement. Par ailleurs, rien ne permet d’affirmer que la mise en place de la contribution aura pour effet d’augmenter de façon significative le nombre de demandes d’aide juridictionnelle. Le cas échéant, les bureaux d’aide aux victimes seraient à même de traiter ces demandes supplémentaires. Le nombre de bureaux d’aide juridictionnelle dans lequel le délai de traitement moyen est supérieur à deux mois est d’ailleurs redescendu à cinq ; il devrait être de douze en 2012.

Répondant à M. Verchère, je préciserai que nous allons créer cette année 370 nouveaux emplois de greffier, après en avoir créé 399 en 2011. L’École nationale des greffes n’avait d’ailleurs jamais connu de recrutements aussi importants : cette année, 774 greffiers stagiaires y sont entrés, et ils seront autant l’année prochaine.

Ces recrutements massifs vont permettre d’augmenter le ratio entre nombre de magistrats et nombre de greffiers, de façon à parvenir à une proportion de 1 pour 1. Aujourd’hui, ce taux est d’environ 0,92 : nous avons donc déjà notablement progressé.

La délinquance des mineurs, qui marque beaucoup les gens, connaît une aggravation en termes tant de fréquence que de violence des actes. Lorsque l’on visite des établissements pénitentiaires, on rencontre de nombreux jeunes, mais peu de mineurs. Nous avons en effet, et c’est une bonne chose, réduit le nombre de mineurs incarcérés en prison : alors qu’ils étaient plus de 1 000, ils sont désormais moins de 800, notamment grâce à la création des CEF. Je précise, monsieur Dolez, que les crédits attribués à la PJJ augmenteront de 1,98 % en 2012 pour atteindre 773 millions d’euros. Cela devrait permettre d’assurer une meilleure prise en charge des délinquants et surtout d’éviter la récidive. C’est en effet le vrai problème s’agissant des mineurs : il ne suffit pas de les suivre au moment de leur placement, mais aussi après. Le placement est destiné à rompre avec l’état de délinquance ; par la suite, le suivi permet de maintenir cette rupture.

Je rappelle que la loi du 10 août 2011 a permis d’apporter un certain nombre de réponses pénales plus efficaces et plus visibles, notamment avec le tribunal correctionnel pour mineurs. De son côté, le Conseil constitutionnel, à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité, a eu l’occasion de préciser le contenu du principe fondamental reconnu par les lois de la République relatif à la justice des mineurs, en s’appuyant sur les lois de 1906 et de 1912 ainsi que sur l’ordonnance de 1945. Cette décision est capitale en ce qu’elle permettra à la prochaine législature de rédiger un code pénal des mineurs, dont nous avons le plus grand besoin.

Je répondrai maintenant à M. Raimbourg.

Je suis d’accord avec lui : nous avons lancé un véritable plan de rattrapage…

M. Dominique Raimbourg. Ce n’est pas tout à fait ce que j’ai dit !

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Les crédits ont en effet augmenté de 19 % depuis 2007, et de 63 % depuis 2002.

En ce qui concerne l’évaluation des partenariats public-privé, je crois avoir déjà répondu. Les établissements construits selon cette procédure sont récents, et la direction de l’administration pénitentiaire travaille sur la comptabilité analytique afin de comparer les coûts. J’y suis très favorable, car nous devons savoir qui paye quoi. Si des services entiers sont transférés au contractant privé, cela doit se traduire sur les effectifs, au moins dans l’établissement concerné – quitte à les redéployer.

Les SPIP ont eu recours aux moyens existants lors de leur création, ce qui explique la forte présence des travailleurs sociaux. Ces derniers sont nécessaires, mais nous avons aussi besoin d’équipes pluridisciplinaires, entre autres de personnes ayant des connaissances en criminologie.

Le nombre de conseillers d’insertion et de probation a fortement augmenté : il est passé de 1 300 à 2 671 entre 2002 et 2011. Un rapport conjoint de l’inspection générale des services judiciaires et de l’inspection générale des finances a d’ailleurs jugé le niveau des effectifs globalement satisfaisant. Il préconise toutefois de mettre en place des équipes mobiles afin de faire face à des pics d’activité. Naturellement, nous en tiendrons compte.

M. Raimbourg a réclamé des indicateurs pour mesurer la surpopulation carcérale. Le phénomène est réel – il existe environ 58 000 places en prison pour 65 000 personnes incarcérées –, mais il se manifeste très inégalement sur le territoire. En Loire-Atlantique, la surpopulation est très forte – nous allons d’ailleurs construire un nouveau centre à Nantes –, mais à Marseille, par exemple, il y a des places libres.

Nous devons trouver les moyens de réduire cette surpopulation. C’est le premier objectif de la loi pénitentiaire. Si nous y parvenons, nous pourrons alors appliquer les autres dispositions de la loi – ce qui est impossible si des détenus doivent dormir par terre, comme cela a pu arriver à Nantes.

Mme George Pau-Langevin. Ou en Guyane !

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Monsieur Dolez, les opérations immobilières du ministère de la justice concernent tout d’abord, c’est vrai, le pénitentiaire, mais plus de 1 300 visent les palais de justice – la plus grosse opération, qui est nécessaire compte tenu de l’évolution du fonctionnement de la justice judiciaire, concernera le palais de justice de Paris. Ce sont 135 millions d’euros de crédits qui seront consacrés à ces opérations. De 2009 à 2011, l’investissement de la carte judiciaire s’est élevé à 330 millions d’euros.

M. Jacques Alain Bénisti. Monsieur le garde des Sceaux, vous avez déclaré dans la presse que l’année prochaine serait la première de la mise en œuvre du projet stratégique national (PSN) 2012-2014, visant notamment à optimiser l’emploi des moyens humains dans la magistrature. Dans ces conditions, pourquoi le nombre de personnels de la PJJ diminuera en 2012 par rapport à 2011, passant de 8 837 personnes à 8 395 ? Il est vrai que cette baisse ne concerne pas les éducateurs spécialisés, et c’est fort heureux. Mais pouvez-vous nous assurer qu’elle n’aura aucune incidence sur les actions éducatives menées par la PJJ, notamment dans les établissements publics d’insertion de la défense – EPIDe – dont nous avons voté la semaine dernière l’extension aux jeunes de seize à dix-huit ans ?

Je me réjouis par ailleurs que des moyens supplémentaires – 30 millions d’euros – soient alloués aux centres éducatifs fermés, ce qui permettra d’en créer vingt supplémentaires. Toutefois, où en est ma proposition de les transformer en plateformes de réinsertion des multirécidivistes, prolongeant de six mois la période de reconstruction sociopsychologique par une seconde période vouée à la formation et à l’apprentissage d’un métier ?

Je vous enverrai mon rapport sur les CEF, monsieur le garde des Sceaux, où chacun s’accorde à reconnaître que six mois, c’est trop court pour remettre sur le droit chemin un délinquant désocialisé, désœuvré et en perte d’identité.

M. Bernard Gérard. Au cours de l’examen du texte sur la participation des citoyens à la justice pénale, nous avons voté le renforcement des évaluations de dangerosité : vous avez alors annoncé la création d’un centre national d’évaluation à Lille – sujet qui me tient à cœur compte tenu du drame qui s’est déroulé dans cette ville. Où en est ce dossier ?

Par ailleurs, quels moyens seront affectés au renforcement, qui a été adopté, de l’usage du bracelet électronique ?

M. Yves Nicolin. Monsieur le garde des Sceaux, pourriez-vous faire un point sur la situation du centre pénitentiaire de Roanne qui, ouvert en décembre 2008, a fait récemment l’objet de manifestations de la part de personnels ?

Le tribunal de Roanne manque également de psychiatres, ce qui allonge les délais des demandes d’aménagement de peine.

Enfin, quelles actions avez-vous développées ou allez-vous développer pour rattraper les pays anglo-saxons qui règlent l’immense majorité de leurs conflits par le biais de la médiation, laquelle est une alternative à l’action en justice ?

M. Serge Blisko. En dépit des efforts déjà accomplis en matière de modernisation des places de prison, il en reste encore beaucoup à réaliser pour que les règles pénitentiaires européennes soient appliquées dans leur totalité et que l’objectif raisonnable de 95 % d’encellulement individuel, inscrit dans la loi pénitentiaire de 2009, soit atteint. Or nous sommes encore loin du compte – on a évoqué le chiffre de 400 matelas par terre !

C’est pourquoi nous sommes opposés au programme immobilier visant à atteindre les 80 000 places. Compte tenu de la loi pénitentiaire, des alternatives à l’incarcération et du programme très justifié d’augmentation de la présence des SPIP auprès des personnes en sursis avec mise à l’épreuve (SME), il n’est pas utile de prévoir plus de 60 000 à 62 000 places de bonne qualité, telles qu’elles ont été définies. Il faut rappeler qu’une place de prison coûte aujourd'hui entre 80 000 et 100 000 euros, ce qui surenchérit le programme. Alors que, comme vous l’avez noté, monsieur le garde des Sceaux, Paris aura bientôt un beau palais de justice, qui coûtera 250 millions d’euros, est-il besoin de dépenser autant d’argent pour l’enfermement ?

De plus, la volonté du Président de la République de multiplier les places de prison va à l’encontre du développement du bracelet et des actions que la PJJ, notamment, peut mener en matière d’alternative à la prison, laquelle doit prendre le pas sur la construction de 15 000 places supplémentaires.

Mme George Pau-Langevin. Monsieur le garde des Sceaux, ce débat laisse les parlementaires sur leur faim car nous devons nous contenter de la portion congrue.

La hausse du budget de la justice profite en grande partie à la pénitentiaire. Or l’augmentation du nombre de places de prison a un impact évident sur l’accès au droit, dont le budget ne prévoit aucun crédit en relation avec les nouvelles missions que nous avons votées.

Le budget de l’accès au droit, nous dit-on, permettrait de pallier les nouvelles sujétions liées à la garde à vue, alors même que vous n’avez pas retenu les préconisations que M. Gosselin et moi-même avions faites pour élargir l’assiette finançant l’aide juridictionnelle. Vous avez déclaré que ces préconisations ne vous semblaient pas justes, mais est-il juste que ce soient des justiciables entamant des procédures de divorce ou faisant des réclamations pour leur loyer ou l’obtention d’une allocation handicapée qui financent la garde à vue ? Il aurait été plus juste de faire payer les compagnies d’assurances !

Par ailleurs, s’il est vrai qu’on ouvre des maisons de justice et du droit (MJD), c’est également une manière de faire reposer l’accès au droit en partie sur les collectivités territoriales, qui sont déjà taxées en matière de politique de la ville puisque les crédits dédiés à celle-ci sont asséchés.

Si vous avez créé des postes de greffiers, vous avez supprimé des agents de catégorie C, si bien que les greffiers se trouvent obligés de faire eux-mêmes des photocopies, ce qui, comme vous l’avez vous-même observé, est une anomalie.

M. Yves Censi, vice-président de la commission des Finances. Je tiens à rappeler que, en vertu de la Constitution, le Gouvernement prend la parole lorsqu’il le souhaite.

De plus, l’objet des commissions élargies est d’obtenir des réponses du Gouvernement.

Enfin, la procédure actuelle a été proposée par tous les groupes, y compris le vôtre, madame Pau-Langevin : vous n’avez pas à la remettre en cause à chaque prise de parole.

Mme Sylvia Pinel. Alors que ce budget devrait être une priorité, la justice connaît de graves difficultés de fonctionnement.

Quels moyens prévoyez-vous pour accélérer l’activité judiciaire, raccourcir les délais de jugement ou éviter l’inexécution des peines – 80 000 peines n’ont pas été appliquées cette année ? Que répondez-vous aux forces de l’ordre exaspérées par le décalage entre l’action qu’elles mènent pour lutter contre une délinquance croissante et l’absence de sanctions dont peuvent bénéficier des délinquants parfois dangereux, qui commettent des délits à la chaîne, puisque les sanctions ne sont ni systématiques ni suffisamment rapides ?

De même, plutôt que de se fixer comme principale priorité budgétaire le programme immobilier pénitentiaire pour satisfaire les dernières annonces du Président de la République, ne serait-il pas plus judicieux de développer les peines alternatives à la prison pour désengorger les centres de détention ? Le système judiciaire prévoit pourtant de nombreuses dispositions alternatives qui permettraient d’y parvenir, dispositions insuffisamment utilisées par manque de moyens. Que comptez-vous faire pour les développer ? Je pense notamment, pour la justice des mineurs, aux centres éducatifs renforcés, aux centres éducatifs fermés et aux foyers ouverts, dont plus de la moitié a fait l’objet d’une fermeture depuis 2008, ce qui a pour triste conséquence le placement en détention d’un trop grand nombre de mineurs, avec tous les effets contre-productifs qu’un tel placement peut engendrer.

Pourquoi ne pas pérenniser ce qui fonctionne ? Il faut, pour éviter de porter atteinte régulièrement à la justice des mineurs, la doter des moyens nécessaires. Or la PJJ est depuis dix ans une grande sacrifiée des arbitrages budgétaires et elle devra encore supporter l’année prochaine une diminution de ses effectifs – moins 106 ETP –, alors même qu’elle manque déjà de magistrats, de personnels de greffe et d’éducateurs, si bien qu’à l’heure actuelle une décision d’assistance éducative attend entre trois et cinq mois avant d’être appliquée et une peine prononcée près de dix mois pour être exécutée. Comment la baisse considérable du budget des services judiciaires pourrait-elle permettre de remédier à cette situation ?

Enfin, monsieur le garde des Sceaux, pensez-vous que ce budget permettra à la France de ne plus être classée au trente-septième rang des pays du Conseil de l’Europe pour la part de PIB consacrée à la justice ?

M. François Rochebloine. Monsieur le garde des Sceaux, permettez-moi d’appeler votre attention sur la situation de la maison d’arrêt départementale de La Talaudière, dans le département de Loire, dont nous espérons la prochaine réhabilitation ou reconstruction.

Je tiens tout d’abord à vous remercier d’avoir répondu favorablement à mon invitation et effectué une visite complète de cet établissement l’été dernier. Vous avez ainsi pu constater directement l’état des locaux qui, sans être très anciens, posent de vrais problèmes quant à la sécurité, aux conditions de travail des personnels pénitentiaires et aux conditions de détention des personnes incarcérées, non conformes au principe de dignité.

Cette maison d’arrêt n’étant plus aux normes, il convient ou de la moderniser ou de la reconstruire.

De plus, les riverains immédiats de l’établissement subissent depuis de très longues années d’importantes nuisances en raison des parloirs sauvages.

Monsieur le garde des Sceaux, la décision de réhabilitation ou de reconstruction sur un autre site a-t-elle été prise ? Si oui, quels en seraient les coûts respectifs et à quelle date débuteraient les travaux ?

Votre visite a été appréciée de tous : elle a permis des échanges de qualité. À ce titre, elle a suscité beaucoup d’espoir du côté des personnels.

M. Marcel Bonnot. Le budget de la justice, qui s’élève à 7,42 milliards d’euros, a des objectifs ambitieux.

S’agissant de l’aide juridictionnelle, quelle jauge vous a permis de fixer le montant des crédits à 422 millions d’euros, d’autant que la prestation des avocats se trouve accrue dès la première heure de garde à vue et pendant toute la durée de celle-ci ?

Il ne faudrait pas que l’accès au droit, désormais garanti pour chacun, entraîne la création d’une sorte de sécurité sociale sur le dos de la corporation des avocats.

En outre, une contribution pour l’aide juridique a été instaurée pour tous les justiciables, donnant lieu à l’acquittement d’un timbre de 35 euros, payé, suivant ses ressources, par celui qui appréhende une procédure devant le tribunal de grande instance. À combien les ressources dégagées par cette contribution sont-elles estimées ? Sera-t-elle affectée en partie à l’indemnisation des avoués ? Quelle est la part de l’État ? Est-elle suffisante pour faire face à l’exigence financière engendrée par la loi du 14 avril 2011 sur la réforme de l’aide juridictionnelle ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Monsieur le garde des Sceaux, quel est le montant des crédits prévus pour la rénovation du parc immobilier pénitentiaire, notamment pour le centre de Mende ? Mme Alliot-Marie avait conservé cette prison pour des raisons d’aménagement du territoire mais, faute d’entretien, elle risque de disparaître.

Par ailleurs, les prisons ouvertes concernent en France moins de 1 % des détenus, contre 34 % au Danemark, 32 % en Finlande et 24 % en Suède. La moyenne de l’Union européenne s’élève à 6 %. Jean-Marie Bockel avait beaucoup œuvré sur le sujet. Quelles sont les réflexions engagées à ce sujet ?

La France, enfin, est régulièrement condamnée en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’homme pour délai non raisonnable par la CEDH. Quel montant atteint la totalité de ces condamnations ? Quelles réponses envisagez-vous d’apporter à cette situation ?

Mme Chantal Berthelot. Monsieur le garde des Sceaux, vous m’avez tenu informée, le 30 août dernier, de la répartition des effectifs dans les juridictions de la Guyane et des créations de postes à Cayenne et à Saint-Laurent-du-Maroni. Je tiens à saluer ici cette avancée.

Vos avez précisé que le nombre de fonctionnaires prévus s’élevait à 81 : 69 postes étant actuellement pourvus, je présume que le rattrapage sera réalisé en 2012.

La création de la cour d’appel de Cayenne a été actée pour le 1er janvier 2012. Quand entrera-t-elle effectivement en fonctions pour répondre aux besoins des justiciables et des professionnels de la justice ?

Prévoyez-vous un effort pour l’aide juridictionnelle en Guyane, compte tenu du taux élevé d’affaires dans lesquelles les justiciables y ont recours ?

Le centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly a été épinglé par l’Observatoire international des prisons : il n’y a que 532 places pour 665 détenus. De plus, les syndicats dénoncent régulièrement le manque de surveillants. Quand annoncerez-vous la création d’un centre de rétention à Saint-Laurent-du-Maroni ? Surtout, quand mettrez-vous en place les services de justice dans l’ouest de la Guyane, à Saint-Laurent précisément, services qui font à l’heure actuelle cruellement défaut ?

M. Jean-Jacques Urvoas. Je souhaite revenir sur la protection judiciaire de la jeunesse. Vous avez affirmé que son budget augmentait de 1,2 % : l’honnêteté devrait vous conduire à rappeler que, de 2008 à 2011, il a baissé continûment de 6 %. De plus, cette augmentation ne compense pas l’inflation, qui s’élève à 2 %. Enfin, vous transformez plusieurs établissements de placement éducatifs actuellement gérés par la PJJ en CEF – vous consacrez à cet objectif 30 millions d’euros. L’augmentation que vous avez évoquée ne se traduit donc pas en moyens supplémentaires pour la PJJ.

S’agissant des personnels, vous ne cessez de confier, à longueur de textes, des missions supplémentaires à la PJJ – c’est une marque de reconnaissance – et vous souhaitez toujours plus d’éducateurs dans les établissements de réinsertion scolaire. Or, dans le même temps, vous supprimez 130 équivalents temps plein travaillé. Ainsi, sur la période 2007-2012, vous aurez supprimé 7 % des 9 000 agents de cette administration, soit quelque 650 postes. Alors que vous affirmez vouloir améliorer la qualité du traitement de la délinquance des mineurs, comment réussirez-vous à réduire les délais de prise en charge et à renforcer la réinsertion des mineurs – tel est l’objectif – tout en supprimant des agents – je n’ai pas dit : « éducateurs » – dont c’est précisément la compétence ? Comment ferez-vous mieux avec, au total, moins de personnels ?

M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le garde des Sceaux, j’ai déjà posé, il y a un an et demi, à M. Jean-Marie Bockel la question de l’inadaptation des moyens, en nombre de magistrats, dans les tribunaux administratifs pour traiter rapidement des recours relatifs à des projets publics importants en termes de création d’activités et d’emplois.

Le département du Loir-et-Cher offre trois exemples.

Le premier concerne l’ancien site Giat Industries de Salbris, où 600 emplois se sont évaporés du fait des procédures qui ont traîné en longueur durant cinq ans, aboutissant au retrait de l’investisseur. À Dhuizon, Pierre et Vacances attend depuis quatre ans et demi de pouvoir créer un village de vacances. Enfin, à Romorantin, Unibail s’est désengagé après avoir attendu quatre ans, de recours en recours, une décision lui permettant de réaliser le projet de Carré des Marques.

Monsieur le garde des Sceaux, l’État doit assurément faire des économies : nous en sommes tous persuadés. Toutefois, les économies que l’État réalise, d’un côté, en nombre de magistrats, économies qui retardent le traitement des dossiers, ne les perd-il pas, de l’autre, en même temps que les collectivités locales, en termes d’emplois, de chômage et d’assistance ? Les pertes engendrées par la disparition de projets créateurs d’activités et d’emplois sont bien plus lourdes pour la collectivité nationale que ne sont importantes les économies réalisées par le ministère de la justice.

M. Jacques Valax. Première observation : nous sommes passés du trente-cinquième au trente-septième rang des pays du Conseil de l’Europe pour la part de PIB consacrée à la justice.

Ma deuxième observation est tirée du rapport sur le budget de la justice de M. Jean-Paul Garraud, rapporteur spécial, qui note la persistance, l’aggravation parfois, des difficultés quotidiennes rencontrées par les magistrats et les fonctionnaires des services judiciaires.

Troisième observation : l’USM « dénonce un budget de la justice en trompe-l’œil, en réalité en baisse en ce qui concerne les services judiciaires et la protection judiciaire de la jeunesse, malgré quelques recrutements qui demeurent insuffisants pour faire face aux nouvelles charges nées de lois adoptées en cours d’année 2011 ».

Enfin – quatrième observation –, s’agissant de l’accès au droit et à la justice, si le budget de l’aide juridictionnelle, après des années de baisse, est de nouveau en hausse, c’est au détriment des budgets du développement de l’accès au droit, de l’aide aux victimes et de la médiation – médiation dont on parle beaucoup mais qui demeure le parent pauvre de la justice : depuis dix ans, rien n’a été fait pour son développement.

Quant à la contribution complémentaire de 35 euros, que je dénonce et dont je prétends qu’elle est contraire au principe du libre accès à la justice, je suis certain qu’elle servira à abonder les fonds de l’aide juridictionnelle. Et ce ne sont pas les quelques explications que vous nous avez données qui ont pu me rassurer.

En ce qui concerne le transfert des charges d’escorte et de garde des palais de justice, le rapport de l’USM évalue à 1 000 le nombre d’agents nécessaires – il y est même question de 2 000 à 3 000 ETPT. Or vous avez affirmé que 250 agents suffiraient. Qu’en est-il exactement ? Peut-être vos services pourront-ils me répondre sur le sujet.

Quel sera le nombre de greffiers en 2011 et 2012 ?

M. Jean-Michel Clément. Je partage la préoccupation de M. Michel Hunault relative à l’application des lois que nous votons, et ce ne sont pas les chiffres dont nous débattons aujourd'hui qui nous rassureront en la matière.

L’augmentation du budget de la justice traduit son recentrage général sur la justice pénale au détriment implicite de la justice civile et de la justice judiciaire.

Les parents pauvres du budget sont les procédures autres que les procédures pénales. Or les indices des documents budgétaires ne nous permettent pas d’apprécier la qualité de cette justice autrement qu’en en ressentant, au quotidien, les méfaits sur la vie de nos concitoyens. Je pense notamment à la justice familiale et aux procédures de tutelle, qui ne peuvent pas être appliquées conformément aux lois et aux décrets existants.

Vous avez évoqué le juge de proximité, monsieur le garde des Sceaux. Mais ce n’est pas lui qui réglera la situation. Nous sommes face à un dysfonctionnement majeur. Par-delà les chiffres, je le répète, il y va de la qualité de la justice !

M. Pierre Morel-A-L’Huissier a évoqué le coût de cette lenteur pour le budget de l’État, remarquant qu’il nous manque un indicateur en la matière.

Il faut savoir en effet que, trop souvent, parce que la justice ne peut pas rendre ses décisions en temps utile, nos concitoyens sont victimes de cette lenteur sur le plan économique, notamment lorsque la vie des entreprises est en jeu, si bien qu’ils demandent réparation financière à l’État. Cette lenteur fait donc deux victimes : l’entreprise et l’État. Les documents budgétaires nous masquent ce coût, qu’il conviendrait à l’avenir d’identifier.

M. Philippe Goujon. Où en est le regroupement des services centraux du ministère – je fais allusion à différents projets, notamment dans le 5e arrondissement de Paris et à Bagnolet ?

Par ailleurs, nous avons voté des lois en vue de lutter contre des désordres préoccupants pour nos concitoyens – attroupements dans les halls d’immeubles, racolage passif, vente à la sauvette –, ce qui conduit à de nombreuses interpellations. Or les jugements rendus montrent que la justice a des difficultés à appréhender ces contentieux. Qu’en est-il exactement ?

M. Laurent Hénart. Monsieur le garde des Sceaux, disposez-vous d’éléments d’appréciation des juridictions interrégionales spécialisées (JIRS), qui ont été installées dans plusieurs villes afin de permettre une concentration des compétences sur certaines affaires particulièrement techniques et complexes ?

Puisqu’il s’agit de petites unités, la défaillance d’un poste de magistrat ou d’agent administratif suffit pour nuire au bon fonctionnement de l’ensemble de la structure. Une attention particulière pourrait-elle être portée à ces nouvelles unités, notamment en termes de moyens humains ?

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Monsieur Martin-Lalande, je ne peux vous répondre, pour la simple raison que le budget des juridictions administratives relève, non du ministère de la justice, mais du vice-président du Conseil d’État. Soyez toutefois assuré que je transmettrai à ce dernier les questions que vous avez posées.

Au total, quelque 250 000 personnes sont placées sous main de justice en France, parmi lesquelles 175 000 exécutent leur peine en milieu ouvert. Il est donc erroné de prétendre que l’on ne fait que du carcéral ! La population écrouée est de 64 000 personnes. Il est vrai que l’on compte 85 000 personnes qui ont été condamnées, mais dont la peine n’a pas été exécutée ; encore faut-il préciser qu’il s’agit de condamnations à de courtes peines.

Il convient d’adapter le système pénitentiaire à ces courtes peines : les besoins ne sont pas les mêmes suivant que les gens sont condamnés à trois mois ou à trois ans de prison. L’une des ambitions du programme de 80 000 nouvelles places est de différencier les établissements pénitentiaires, afin de répondre aux particularités individuelles. L’exécution des peines a été diversifiée grâce au placement sous bracelet électronique, qui concerne aujourd’hui 12 000 personnes ; cela impose toutefois une surveillance spécifique, qui peut être compliquée à mettre en œuvre, notamment pour les délinquants sexuels.

La protection judiciaire de la jeunesse est-elle, comme vous l’affirmez, le parent pauvre de la justice ? J’admets que vos critiques soient recevables, même s’il convient de noter, premièrement, que l’on essaie cette année de mettre un terme à des coupes certes nombreuses et, deuxièmement, que l’on n’a jamais touché au cœur du métier, notamment aux effectifs des éducateurs. Il reste que des suppressions de postes ont touché les fonctions de support, ce qui a imposé une réorganisation territoriale des services. En 2012, cent quarante emplois de soutien seront supprimés, tandis que cent dix postes d’éducateur seront créés, dont soixante pour les centres éducatifs fermés – soit un solde négatif de trente emplois.

Monsieur Gérard, outre le Centre national d’évaluation de Fresnes, un deuxième centre vient d’être créé au sein du nouvel établissement pénitentiaire de Réau, et la décision d’en ouvrir un troisième dans le Nord a été prise. La direction de l’administration pénitentiaire travaille sur plusieurs scénarios : celui qui semble actuellement privilégié consisterait à transformer le quartier maison centrale du centre pénitentiaire de Lille-Sequedin en centre national d’évaluation à l’occasion de l’ouverture de la maison centrale de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, prévue pour 2013.

Monsieur Nicolin, vous avez raison, il convient de développer la médiation. Mais quand on le propose dans un texte, il serait bon de voter celui-ci ! Il faut savoir que 60 % du temps des juridictions est occupé par le traitement du contentieux familial, dont une part importante pourrait être réglée par la médiation : ce n’est pas nécessairement au juge d’intervenir dans la vie d’un couple.

M. Yves Nicolin. Il faudrait aussi développer la médiation économique…

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Commençons déjà par la médiation sociale !

Le centre de détention de Roanne semble effectivement aller mal. J’irai le visiter après les élections professionnelles.

Il est également vrai que cette région manque de psychiatres. Il s’agit toutefois d’un problème national, que le ministère de la justice ne pourra régler seul.

L’objectif de 80 000 places est-il nécessaire ? M. Blisko et Mme Pinel ont tenu à ce sujet des propos contradictoires. Il est vrai que l’on n’a pas besoin de 80 000 places identiques, dans des maisons d’arrêt, mais il convient de différencier les places suivant les peines à accomplir. Il est également vrai que, même si l’on mène ce programme à bien, on restera à un niveau inférieur à celui de l’Espagne ou de l’Angleterre. Il est tout aussi vrai que des peines ne sont pas exécutées et que l’on doit y remédier. Mais, pour ce faire, il existe d’autres solutions que la prison : on peut notamment augmenter le nombre de placements sous bracelets électroniques – même si l’on atteindra bientôt, pour des raisons techniques, le maximum. Il reste que Mme Pinel a raison : il faut davantage de places.

Madame Pau-Langevin, le budget consacré à l’accès au droit et à la justice augmentera de 7,1 % en 2012, ce qu est bien. Néanmoins, on constate que le recours à un avocat lors de la garde à vue est, pour l’instant, plus modeste que prévu. Il faut voir comment les choses évolueront et attendre la décision du Conseil constitutionnel sur les deux questions prioritaires de constitutionnalité concernant la garde à vue dont il a été saisi. Je pense toutefois que les mesures qui ont été prises permettront d’assurer le bon fonctionnement du service.

On a en effet supprimé de nombreux emplois de catégorie C dans les services judiciaires. Je pense que l’on peut difficilement aller plus loin. Je tiens, comme vous, à préserver la spécificité des missions des greffiers. Je suis persuadé qu’il faudra demain repenser leur rôle dans les juridictions et, pour les affaires de première instance, comme la vérification de la gestion des comptes de tutelle ou les injonctions de payer, peut-être modifier la répartition des compétences entre magistrats d’instance et greffiers, comme cela se fait en Allemagne. En tout cas, laissons-nous la possibilité de le décider, et faisons en sorte que les autres tâches puissent être remplies par d’autres fonctionnaires.

Madame Berthelot, la situation en Guyane est bien délicate. Nous essayons de l’améliorer. Je viens de proposer la nomination d’un nouveau procureur à Cayenne. L’installation d’une cour d’appel à Cayenne – demande ancienne – sera effective au début du mois de janvier ; j’y assisterai. Je proposerai au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) un candidat pour le poste de procureur général. Je sais que la formation du siège du CSM est en train de procéder à la sélection du candidat au poste de premier président de la cour d’appel de Cayenne.

S’agissant de la délicate affaire de Saint-Laurent-du-Maroni, je ne vous promettrai pas la création d’un tribunal de grande instance. En revanche, nous essayons d’établir une présence constante de la justice ; on dispose d’ores et déjà d’un greffe détaché renforcé, comprenant deux fonctionnaires et deux magistrats, un vice-président et un vice-procureur.

Mme Chantal Berthelot. Ils ont quitté les lieux !

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. De nouvelles personnalités viennent d’être nommées, qui arriveront sous peu. Je vous promets que, lorsque j’irai à Cayenne pour l’installation de la cour d’appel, je me rendrai aussi à Saint-Laurent-du-Maroni.

Monsieur Morel-A-L’Huissier, la maison d’arrêt de Mende doit recevoir 57 prisonniers ; 357 970 euros ont été prévus pour la sauvegarde du bâtiment, 53 000 euros pour la sécurité incendie et 51 000 euros pour le système d’interphonie.

Monsieur Rochebloine, on ne réhabilitera pas l’établissement de La Talaudière : on construira une nouvelle prison sur un terrain disponible. Si vous ne parvenez pas à trouver un terrain disponible, je pourrai vous en montrer un.

Monsieur Valax, vous savez fort bien que le budget de la justice est en hausse ! Il est en outre erroné de prétendre que tout est destiné au pénal. Sur ce point, l’USM s’est trompée – j’en ai d’ailleurs discuté avec M. Régnard.

Monsieur Goujon, deux sites seront en réalité conservés : la place Vendôme et un autre. On parle de ce projet depuis des années. L’objectif est de réaliser des économies, le ministère de la justice utilisant des locaux dont les loyers sont extrêmement élevés. Parmi les nombreuses propositions qui ont été faites, j’étais pour ma part favorable à celle du président Giscard d’Estaing d’installer nos services dans l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde. Cet avis n’a pas été partagé. Une mission a donc été confiée par le ministère et par France Domaine à un cabinet, qui a sélectionné cinquante-deux sites, parmi lesquels nous en avons retenus quatre : deux à La Défense, un dans le 15e arrondissement de Paris et un autre vers la porte de la Chapelle. Les négociations sont en cours.

Mme George Pau-Langevin. Et le projet d’une installation à la porte de Bagnolet ?

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Personne ne voulant y aller, je ne l’ai pas retenu. Quoique je ne sois pas spécialiste des questions immobilières, je trouve fort curieux que ces locaux n’aient pas trouvé preneur depuis trente ans. Je me dis qu’il doit bien y avoir une raison…

Monsieur Hénart, les juridictions interrégionales spécialisées font du très bon travail. Si certaines ont démarré tardivement, comme à Lyon, toutes fonctionnent correctement aujourd’hui. À Marseille, la JIRS est même devenue indispensable.

J’entends veiller à ce que ces juridictions disposent des outils nécessaires à leur bon fonctionnement, notamment en termes de profils de postes pour les magistrats, d’assistants spécialisés et de fonctionnaires détachés d’autres ministères, ainsi que de moyens techniques spécifiques, qui seront financés notamment grâce au fonds de concours géré par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT). À ce jour, les JIRS ont traité 1 843 procédures.

M. Yves Censi, vice-président de la commission des Finances. Monsieur le garde des Sceaux, nous vous remercions pour la précision de vos réponses.

*

* *

À l’issue de l’audition de M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés, la Commission examine, sur le rapport de M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis des crédits de la justice et de l’accès au droit, et de M. Sébastien Huyghe, rapporteur pour avis des crédits de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, suppléé par M. Jean-Paul Garraud, les crédits de la mission « Justice » pour 2012.

Article 32 : Crédits du budget général. État B mission « Justice ».

La Commission examine l’amendement n° II-9 du Gouvernement.

M. Guy Geoffroy, président. Cet amendement a déjà fait l’objet d’une présentation lors des débats qui viennent de se tenir en présence de M. le garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés.

Suivant l’avis de M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis des crédits de la justice et de l’accès au droit et suppléant M. Sébastien Huyghe, rapporteur pour avis des crédits de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, la Commission donne un avis favorable à l’amendement n° II-9.

Conformément aux conclusions de M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis des crédits de la justice et de l’accès au droit, et de M. Sébastien Huyghe, rapporteur pour avis des crédits de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, suppléé par M. Jean-Paul Garraud, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Justice » pour 2012.

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION

Amendement n° II-9 présenté par le Gouvernement :

Article 32 (état B)

Mission Justice

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

Programmes

+

-

Justice judiciaire

Dont titre 2

0

0

10 000 000

0

Administration pénitentiaire

Dont titre 2

0

0

10 000 000

0

Protection judiciaire de la jeunesse

Dont titre 2

0

0

0

0

Accès au droit et à la justice

0

0

Conduite et pilotage de la politique de la justice

Dont titre 2

0

0

0

0

Conseil supérieur de la magistrature

Dont titre 2

0

0

0

0

TOTAUX

0

20 000 000

SOLDE

-20 000 000

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le présent amendement a pour objet de réévaluer le plafond des crédits de la mission « Justice » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 au titre de la mise en œuvre du plan d’économies supplémentaires d’un milliard d’euros annoncé par le Premier ministre le 24 août 2011.

Il est proposé de réduire de 20 millions d’euros le montant des autorisations d’engagements (AE) et des crédits de paiement (CP) de cette mission. Cette diminution se décompose de la manière suivante :

– minoration de 9,5 millions d’euros des crédits de chacun des programmes « Administration pénitentiaire » et « Justice judiciaire » ; il a en effet été observé au cours des derniers exercices une sous-consommation récurrente des crédits d’investissements immobiliers hors partenariats public-privé (PPP) sur ces deux programmes, liée notamment au décalage de certaines opérations programmées par l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (sous-consommation moyenne de ces dépenses respectivement de 9 % et 18 % sur les programmes « Administration pénitentiaire » et « Justice judiciaire » au cours des trois dernières années). Une programmation au plus proche des besoins tenant compte des aléas de nature à retarder certaines opérations justifie l’ajustement proposé sur chacun des programmes ;

– minoration de 1 million d’euros portant sur deux des opérateurs rattachés à la mission : les subventions pour charges de service public de l’École nationale de la magistrature, rattachée au programme « Justice judiciaire », et de l’École nationale d’administration pénitentiaire, rattachée au programme « Administration pénitentiaire », sont chacune réduites de 0,5 million d’euros.

PERSONNES ENTENDUES
PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

  Union syndicale des magistrats

– M. Christophe RÉGNARD, président

– Mme Virginie DUVAL, secrétaire générale

  Syndicat de la magistrature

– Mme Clarisse TARON, présidente

– Mme Odile BARRAL, vice-présidente

  Syndicat FO magistrats

– M. Emmanuel POINAS, secrétaire général

  Association nationale des juges de l’application des peines

– Mme Martine LEBRUN, présidente

  Syndicat Interco Justice CFDT

– M. Michel BESSEAU, représentant CFDT au comité technique paritaire des services judiciaires, greffier en chef du tribunal de grande instance d’Évreux

–  Mme Leila NEKAA DA CUNHA, greffière au tribunal de grande instance d’Orléans

  Syndicat CGT des chancelleries et des services judiciaires

–  Mme Martine MOTARD, secrétaire générale

–  M. Joël THEILLARD, secrétaire général adjoint

  Syndicat des greffiers de France

– Mme Sophie GRIMAULT, greffière au tribunal de grande instance de Limoges

– Mme Annette PELLETIER, greffière au conseil de prud’hommes de Lons le Saunier

  Association des greffiers en chef des tribunaux d’instance et de police

– Mme Sonia SAINGRAIN, directrice de l’association, directrice de greffe du tribunal d’instance de Gonesse

– Mme Nathalie BARTHELEMY, secrétaire de l’association, directrice de greffe du tribunal d’instance de Villejuif

  Union syndicale autonome justice - UNSA

– M. Serge BILLIG, secrétaire général adjoint

  Syndicat C-Justice

– Mme Lydie QUIRIÉ, secrétaire générale

  GIE Conseil national des Barreaux – Ordre des avocats de Paris – Conférence des Bâtonniers

– Me Denis LEQUAI, membre du bureau du Conseil national des Barreaux

– Me Brigitte MARSIGNY, présidente de la commission « Accès au droit et à la Justice » du Conseil national des Barreaux

– Me Dominique BASDEVANT, membre du Conseil national des Barreaux

– Me Dominique HEINTZ, membre du conseil de l’ordre du Barreau de Paris

© Assemblée nationale

1 () Loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

2 () Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit une stabilisation au niveau de 2011 en euros courants des crédits du budget général et des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne, hors dette et pensions. L’objectif est de faire passer le déficit public de 7,1 % du PIB en 2010 à 5,7 % en 2011, 4,5 % en 2012 et 3 % en 2013.

3 () Loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue.

4 () Loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

5 () Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

6 () Loi n° 2011-939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

7 () Loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel.

8 () L’article 52 du présent projet de loi de finances a pour objet de proroger de deux ans, jusqu’en 2020, la perception du droit de 150 euros dû par les parties à l’instance d’appel, institué par l’article 54 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009. Le produit de ce droit est affecté au fonds d’indemnisation de la profession d’avoués près les cours d’appel, chargé du paiement des sommes dues aux avoués près les cours d’appel et à leurs salariés dans le cadre de la réforme de la représentation devant les cours d’appel. Le droit est dû par les parties à l’instance d’appel lorsque la constitution d’avocat est obligatoire devant la cour d’appel ; il n’est, en revanche, pas dû par les parties bénéficiaires de l’aide juridictionnelle. Les simulations effectuées ayant fait apparaître que le montant des ressources du fonds devait être augmenté pour tenir compte des charges induites par la réforme, il est prévu de proroger le droit fixe de deux ans.

9 () Loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées.

10 () Rapport sur les professions du droit, remis au Président de la République par Me Jean-Michel Darrois, mars 2009.

11 () « L’ambition raisonnée d’une justice apaisée », rapport de la Commission sur la répartition des contentieux présidée par Serge Guinchard, remis au garde des Sceaux le 30 juin 2008.

12 () cf. Rapport établi, en nouvelle lecture, par M. Marcel Bonnot, n° 3642, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 juillet 2011.

13 () Les crédits des programmes « Administration pénitentiaire » et « Protection judiciaire de la jeunesse » font l’objet d’un autre avis de votre commission des Lois, dont le rapporteur est M. Sébastien Huyghe.

14 () cf. compte rendu et amendement annexé au présent avis.

15 () cf. décret n° 2011-54 du 13 janvier 2011 modifiant le décret n° 2009-285 du 12 mars 2009 relatif aux enquêteurs sociaux et à la tarification des enquêtes sociales en matière civile.

16 () cf. loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

17 () Cette réforme met en place des structures hospitalières, organisées autour de la thanatologie (autopsies) et de la médecine du vivant (examens en garde à vue et examens des victimes), le financement de ces structures étant assuré par un transfert de crédits du programme « Justice judiciaire » vers le programme « Offre de soins et qualité du système de soins », dont le pilotage est confié à la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins du ministère chargé de la santé. La montée en puissance de cette réforme étant progressive, il est encore recouru au réseau médical de proximité et donc à la prise en charge d’examens supplémentaires sur le budget des frais de justice des cours d’appel (cf. circulaire relative à la mise en œuvre de la réforme de la médecine légale du 27 décembre 2010, CRIM-2010-27/E6-21-12-2010 ).

18 () Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

19 () Il en comprenait 31 018 en 2011, 29 653 en 2010, 29 295 en 2009 et 29 349 en 2008.

20 () Décret n° 2011-913 du 29 juillet 2011 modifiant le décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l’ordre judiciaire.

21 () Arrêté du 29 juillet 2011 modifiant l’arrêté du 3 mars 2010 pris en application du décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l’ordre judiciaire.

22 () Arrêté du 29 juillet 2011 modifiant l’arrêté du 3 janvier 2008 fixant les conditions d’attribution de la nouvelle bonification indiciaire en faveur des magistrats de l’ordre judiciaire exerçant des responsabilités supérieures.

23 () Décret n° 2004-676 du 5 juillet 2004 instituant la nouvelle bonification indiciaire en faveur des magistrats de l’ordre judiciaire exerçant des fonctions de responsabilité supérieure.

24 () Décret n° 2010-1396 du 12 novembre 2010 relatif aux emplois hors hiérarchie, aux fonctions du premier grade et aux fonctions de premier substitut à l’administration centrale du ministère de la Justice.

25 () Le montant mensuel maximal de l’indemnité complémentaire « antiterroriste » est de 90 euros pour l’ensemble des fonctionnaires concernés, quel que soit leur grade, les personnels de ces services étant exposés au même risque.

26 () Le montant mensuel de cette indemnité complémentaire est fixé à 70 euros, sauf pour les greffiers en chef du premier grade assurant l’intérim d’un emploi de chef de greffe hors hiérarchie, pour lesquels il s’élève à 110 euros, eu égard à l’importance des responsabilités exercées.

27 () Cette réforme, présentée en avril 2009, vise, dans le cadre de la politique de fusion des corps de fonctionnaires menée par le ministère chargé de la fonction publique, à regrouper en une grille unique, harmonisée et revalorisée, les personnels de catégorie B qui relèvent actuellement de grilles indiciaires différentes et ainsi à fluidifier leur carrière.

28 () Décret n° 2011-1252 du 7 octobre 2011 portant statut particulier des secrétaires administratifs relevant du ministère de la justice.

29 () Cette évolution correspond, pour partie, à une modification de la nomenclature budgétaire, consécutive de l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. En effet, les frais postaux relevant des frais de justice sont désormais imputés sur l’action « Soutien ». Or, ils représentaient près de 60 % des dépenses de frais de justice en matière civile et prud’homale. Par ailleurs, la présentation de la nouvelle nomenclature budgétaire ne permet plus de distinguer les différentes composantes des dépenses en matière commerciale.

30 () Rapport d’information présenté par M. Jean-Paul Garraud sur les moyens de fonctionnement courant des juridictions, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 20 octobre 2010 (n° 2909).

31 () Décret n° 2006-358 du 24 mars 2006 relatif à la conservation des données des communications électroniques.

32 () Décrets n° 2007-1519 du 22 octobre 2007 portant modification du code des postes et des communications électroniques et relatif à la tarification des interceptions de communications électroniques et n° 2007-1520 du même jour portant modification du code de procédure pénale et relatif à la tarification des interceptions judiciaires.

33 () Décret n° 2008-764 du 30 juillet 2008 relatif au recouvrement des amendes forfaitaires et à certains frais de justice criminelle ou assimilés.

34 () Décret n° 2007-1388 du 26 septembre 2007 pris pour l’application de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et modifiant le code pénal et le code de procédure pénale.

35 () Rapport d’information présenté par M. Jean-Paul Garraud sur les moyens de fonctionnement courant des juridictions, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 20 octobre 2010 (n° 2909).

36 () Loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.

37 () Loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

38 () Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures.

39 () Projet de loi, en cours d’examen, relatif à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles.

40 () Rappelons que depuis la loi n° 2005-47 du 26 janvier 2005, la juridiction de proximité est compétente pour juger les contraventions des quatre premières classes à l’exception des contraventions de diffamation et d’injure non publiques présentant un caractère raciste ou discriminatoire (décret n° 2005-284 du 25 mars 2005), le tribunal de police ayant compétence pour juger toutes les contraventions de la cinquième classe.

41 () Loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue.

42 () Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

43 () Décret n° 2011-810 du 6 juillet 2011 relatif à l’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue et de la retenue douanière.

44 () cf. compte rendu

45 () Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

46 () Décret n° 2004-435 du 24 mai 2004 relatif aux compétences en qualité d’ordonnateurs secondaires des premiers présidents et procureurs généraux de cour d’appel.

47 () Rapport de la mission d’information en vue d’améliorer l’accès au droit et à la justice, présenté par M. Philippe Gosselin et Mme George Pau-Langevin, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 avril 2011 (n° 3319).

48 () Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

49 () À partir de 2007 sont seules comptabilisées les admissions pouvant donner lieu à paiement effectif ; les admissions résultant du maintien de plein droit de l’aide sont exclues du champ de cette statistique.

50 () Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

51 () Cf. proposition de loi de M. Jean-Paul Garraud tendant à la création d’une contribution additionnelle afin d’assurer la pérennité du financement des actions associatives d’aide aux victimes (n° 3732), enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 septembre 2011.

52 () Décret n° 2011-1252 du 7 octobre 2011 portant statut particulier des secrétaires administratifs relevant du ministère de la justice.