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N° 3805

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2012 (n° 3775),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 28

JUSTICE

Rapporteur spécial : M. ALAIN JOYANDET

Député

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SYNTHÈSE 7

I.– UN BUDGET EN HAUSSE CONTINUE DEPUIS DIX ANS 11

A.– LA PROGRESSION DE 4 % DES CRÉDITS DE PAIEMENT DE LA MISSION 12

B.– LES PRIORITÉS POUR 2012 13

1.– La poursuite de l’effort budgétaire dans un contexte de réformes nombreuses 13

2.– La modernisation du fonctionnement de la justice 14

3.– La poursuite d’investissements immobiliers considérables 15

4.– La recherche d’économies afin de financer des créations d’emplois importantes 16

C.– LE PLAFOND D’EMPLOIS TOUJOURS EN PROGRESSION 16

1.– La répartition des emplois entre les programmes 17

2.– La réduction des emplois des opérateurs du ministère de la Justice 19

II.– 2012 : UN PREMIER BILAN DE LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE 20

A.– UNE CARTE JUDICIAIRE TOTALEMENT REMANIÉE 20

B.– L’ACCOMPAGNEMENT SOIGNÉ DES PERSONNELS DES JURIDICTIONS 21

C.– UN COÛT IMMOBILIER DE LA RÉFORME MAÎTRISÉ 22

III.– LA JUSTICE JUDICIAIRE 25

A.– LA MESURE DE LA PERFORMANCE 25

B.– UNE AMÉLIORATION DE LA PERFORMANCE INDISPENSABLE EN MATIÈRE DE DÉLAIS DE TRAITEMENT DES AFFAIRES 26

C.– DES CRÉDITS STABLES EN 2012 27

1.– Le plafond d’emplois encore en progression en 2012 27

a) Vers un rééquilibrage du ratio entre magistrats et greffiers 28

b) La progression de la politique indemnitaire 29

2.– Le léger recul des crédits hors titre 2 est dû à l’extinction progressive des opérations immobilières liées à la carte judiciaire 30

3.– Un effort important pour la formation qui ne transparaît pas à la lecture des crédits de l’action Formation 31

D.– LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES, TALON D’ACHILLE DE LA JUSTICE JUDICIAIRE 32

1.– Les observations de la Cour des comptes : la nécessité d’un redéploiement des effectifs au regard des besoins 32

2.– La rénovation de la localisation des emplois engagée en 2009 33

3.– Développer les moyens pour pourvoir les postes les moins attractifs 35

4.– Améliorer les outils de gestion des personnels 35

E.– LES FRAIS DE JUSTICE : UNE DOTATION EN AUGMENTATION MALGRÉ DES MESURES D’ÉCONOMIE 36

F.– LA FORTE RATIONALISATION DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT 39

G.– LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT 40

1.– Les crédits d’investissement hors carte judiciaire 41

2.– Le financement du volet immobilier de la réforme de la carte judiciaire 42

3.– Le programme de construction du Tribunal de grande instance de Paris 43

a) La révision du plan local d’urbanisme (PLU) de la Ville de Paris en juillet 2011 43

b) Le choix d’un partenariat public privé 43

IV.– L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE 45

A.– LES RÉPONSES AUX DÉFIS DE LA POLITIQUE PÉNITIENCIAIRE 45

B.– LA PERFORMANCE DE L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE 47

C.– LA PROGRESSION DES CRÉDITS 48

1.– L’action 1 Garde et contrôle des personnes sous main de justice 49

2.– L’action 2 accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice 50

3.– L’action 4 Soutien et formation 52

D.– DES CRÉATIONS D’EMPLOIS 54

E.– LA POURSUITE DE LA RÉNOVATION DU PARC PÉNITENTIAIRE 55

1.– Les ouvertures récentes d’établissement 56

2.– Un nouveau programme immobilier ambitieux : le NPI 57

3.– Un doublement du parc pénitentiaire qui s’appuie en grande partie sur la gestion privée 59

4.– Les inquiétudes quant aux risques budgétaires de la gestion déléguée et des PPP 60

F.– UNE ALTERNATIVE PROMETTEUSE À L’INCARCÉRATION : LE PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE 61

1.– Un dispositif qui en cache trois 62

2.– Une progression forte et régulière des effectifs 63

3.– Un dispositif peu coûteux et un taux de récidive faible 65

G.– UN MOTIF DE PRÉOCCUPATION : LES SOINS PSYCHIATRIQUES EN DÉTENTION 66

V.– LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE 69

A.– UN PROGRAMME QUI CONNAÎT DEPUIS TROIS ANS UNE RÉFORME STRUCTURELLE 70

1.– Le recentrage des missions autour de la prise en charge des mineurs délinquants 70

2.– Garantir la qualité du parcours du mineur faisant l’objet d’une décision judiciaire 71

B.– LA MESURE DE LA PERFORMANCE 72

C.– DES CRÉDITS EN LÉGÈRE AUGMENTATION 73

1.– Un plafond d’emplois en progression 74

2.– L’action 1 Mise en œuvre des décisions judiciaires : mineurs délinquants 75

3.– L’action 3 Soutien 75

4.– L’action 4 Formation 76

5.– L’action 5 Aide à la décision des magistrats : mineurs délinquants et mineurs en danger 76

D.– UN IMPORTANT PROGRAMME IMMOBILIER 76

1.– Les nouveaux établissements 76

2.– La création de 20 centres éducatifs fermés 76

a) La montée en charge du dispositif 77

b) Un premier bilan du fonctionnement des CEF 77

c) Le coût élevé des centres éducatifs fermés 80

E.– LES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS D’INSERTION DE LA DÉFENSE (EPIDE), NOUVEL OUTIL DE PRISE EN CHARGE DES MINEURS DÉLINQUANTS 81

1.– Une évolution importante du ministère de la justice 81

2.– Le dispositif prévu par la proposition de loi de M. Ciotti en cours d’examen au Parlement 82

3.– L’impact budgétaire de la réforme 83

VI.– LE PROGRAMME ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE 85

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME 85

B.– DES CRÉDITS EN HAUSSE GRÂCE À L’AIDE JURIDICTIONNELLE 86

C.– LES CRÉDITS DONT DISPOSERONT LES ACTIONS 87

1.– L’action 1 : Les crédits de l’aide juridictionnelle 87

a) L’évolution de la dépense et de la dotation depuis 2002 87

b) Les crédits demandés pour 2012 88

2.– Stabilité des crédits en faveur de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité 90

3.– L’aide aux victimes 91

4.– La médiation familiale et les espaces de rencontre 91

D.– LA RÉFORME DE LA GARDE À VUE ET SON IMPACT BUDGÉTAIRE 92

VII.– LE PROGRAMME DE CONDUITE ET PILOTAGE 95

A.– UNE MESURE DE LA PERFORMANCE REMANIÉE 95

B.– LES CRÉDITS DU PROGRAMME EN HAUSSE DE 5 % EN CRÉDITS DE PAIEMENT 96

C.– DES CHANGEMENTS IMMOBILIERS ET LOGISTIQUES TRÈS IMPORTANTS 97

D.– LA « RÉVOLUTION INFORMATIQUE » DU MINISTÈRE 100

1.– La nouvelle chaîne civile « Portalis » 101

2.– La mise en œuvre de la chaîne pénale « Cassiopée » 102

3.– La progression des échanges dématérialisés entre les professions de justice 105

a) Les échanges dématérialisés avec les avoués et les avocats 105

b) Les échanges dématérialisés avec les huissiers de justice 107

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 26 OCTOBRE 2011 À 16 HEURES 15 109

EXAMEN EN COMMISSION 135

Article 52 :Prorogation de deux années de la taxe finançant le fonds d’indemnisation des avoués 137

ANNEXE 1 : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 145

ANNEXE 2 : RAPPORT D’ENQUÊTE DE LA COUR DES COMPTES SUR LES PARTENARIATS PUBLICS-PRIVÉS PÉNITENTIAIRES 147

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 11 octobre 2011, 100 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial. L’effort est important par rapport à l’année dernière (85 %) et doit donc être souligné.

SYNTHÈSE

La Justice, dont les crédits de paiement augmentent de 4 %, apparaît cette année encore comme l’une des priorités gouvernementales. Sa part dans le budget global de l’État n’a cessé d’augmenter depuis 2002 (2,6 % en 2012 contre 1,7 % en 2002). Les crédits de paiement s’élèvent à 7,42 milliards d’euros.

Le budget de la Justice a progressé de 19 % depuis 2007. Les gouvernements successifs ont donc engagé un effort de rattrapage considérable pour donner au ministère de la Justice les moyens de répondre aux attentes des Français en matière de justice. Le budget 2012 poursuit cet effort d’autant plus remarquable dans un contexte particulièrement difficile de nos finances publiques.

La mission Justice est ainsi la mission qui connaît la plus importante augmentation d’effectifs (+ 515 postes) en 2012.

Le budget demandé pour 2012 va donc permettre de mener les réformes d’ampleur menées par le ministère :

– améliorer l’exécution des peines prononcées par les juridictions ;

– mettre en œuvre un programme immobilier très ambitieux pour les juridictions, les prisons et les centres de placement des mineurs délinquants ;

– appliquer les réformes votées par le Parlement. En 2010 et 2011 : contrôle par le juge des hospitalisations sans consentement, introduction des citoyens assesseurs dans les juridictions correctionnelles et dans les juridictions de l’application des peines, renforcement de la prise en charge des mineurs délinquants ;

– assurer la rémunération des avocats pour mettre en œuvre la réforme de la garde à vue.

Le programme Justice judiciaire est doté de 2,980 milliards d’euros, soit 20 millions de plus qu’en 2011 et poursuit l’amélioration de l’efficacité de la justice d’une part, et d’autre part, l’effectivité de la réponse pénale à la délinquance des majeurs comme des mineurs.

Le Rapporteur spécial constate que l’accent a été mis pour ce programme sur les créations de postes de magistrats et surtout de greffiers pour accompagner la mise en place des différentes réformes « demandeuses » de personnels supplémentaires :

– création de 65 emplois de magistrats et de 50 emplois de greffiers pour la mise en œuvre du dispositif des citoyens assesseurs issu de la loi du 10 août 2011 ;

– création de 80 emplois de magistrats et 60 emplois de greffiers pour garantir le contrôle du juge sur les décisions concernant les hospitalisations sans consentement et conformément aux exigences de la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques.

La remise à niveau de l’immobilier judiciaire est poursuivie cette année. Des investissements à hauteur de 175 millions d’euros permettront d’achever les regroupements réalisés dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire et une enveloppe de 190 millions d’euros financera des opérations nouvelles de rénovation.

Le programme Administration pénitentiaire bénéficie de 3,030 milliards d’euros de crédits de paiement, soit 17 millions de plus que l’an dernier.

La priorité du programme est depuis plusieurs années d’agrandir et de moderniser le parc pénitentiaire afin de garantir l’effectivité de l’exécution des peines.

L’effort de l’État en la matière est considérable cette année encore. Des investissements à hauteur de 1,852 milliard d’euros sont lancés dans le cadre du nouveau programme immobilier qui a un double fondement : accroître le nombre de places de prison avec un objectif pour 2017 de 80 000 places annoncé par le Président de la République et mettre le parc carcéral aux normes de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 notamment en matière d’encellulement individuel et d’activité des détenus. 290 emplois nets seront créés pour l’armement des nouveaux établissements pénitentiaires.

L’administration pénitentiaire poursuit le développement de l’aménagement des peines. Ainsi, le Rapporteur spécial constate avec satisfaction que 12 000 bracelets électroniques pourront être utilisés simultanément en 2012, contre 1 648 au 1er janvier 2007.

Enfin, l’administration pénitentiaire doit assurer une nouvelle mission : les extractions des détenus entre les palais de justice et les centres de détention jusqu’alors assurées par les forces de police et de gendarmerie. L’enveloppe de 250 emplois supplémentaires prévue en 2012 pour la reprise de cette activité par le ministère de la justice semble sous-calibrée selon de nombreuses personnes auditionnées par le Rapporteur spécial.

Le programme Protection judiciaire de la jeunesse voit ses crédits de paiement augmenter de 17 millions d’euros passant de 757,6 millions d’euros en 2011 à 772,6 en 2012. Cette augmentation des crédits va permettre à la protection judiciaire de la jeunesse d’achever sa modernisation engagée en 2008 dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.

En 2012, la protection judiciaire de la jeunesse achèvera donc son recentrage sur la prise en charge des mineurs délinquants, ainsi que la mutualisation de ses fonctions support.

Le PJJ aura pour principal chantier en 2012 la mise en œuvre de la loi du 10 août 2011 relative au jugement des mineurs. 60 emplois d’éducateurs sont créés pour l’application de réforme de la justice des mineurs et 30 millions d’euros d’investissements immobiliers seront engagés pour mettre en place 20 nouveaux centres éducatifs fermés.

En outre, la PJJ engage un mouvement de généralisation des mesures judiciaires d’investigation éducative susceptibles d’apporter une réponse plus rapide et mieux adaptée à la situation du mineur.

Le Rapporteur spécial a été attentif à deux points majeurs de ce budget : un vaste programme d’investissement faisant appel au partenariat public-privé et une politique d’emploi ambitieuse, particulièrement saillante dans un contexte général de diminution des effectifs publics.

Premièrement, le Rapporteur spécial tient à souligner l’ampleur du programme d’investissement pour la mission Justice. Pour l’immobilier judiciaire, le rythme est plus soutenu que l’année dernière (200 millions d’euros demandés en 2011). En effet, aux investissements à hauteur de 175 millions d’euros permettant d’achever les regroupements décidés dans le cadre de la réforme judiciaire, s’ajoutera une enveloppe complémentaire de 190 millions d’euros finançant des opérations nouvelles de rénovation. Il faut indiquer que cet effort d’investissement considérable dans les palais de justice n’est pas seulement illustré par les autorisations d’engagement et les crédits de paiement inscrits au budget, puisque le ministère de la Justice s’est engagé soit en AOT-LOA, soit en partenariat public privé comme pour la construction des quatre grands palais de justice : Caen, Lille, Perpignan et Paris.

Pour l’immobilier pénitentiaire, un nouveau programme immobilier (NPI) pluriannuel est lancé afin notamment de remplir l’objectif annoncé par le Président de la République le 11 septembre 2011 de disposer de 80 000 places de prison à l’horizon 2017. Ces investissements sont inscrits à hauteur de 1,852 milliard d’euros. Là encore, le ministère fait appel au partenariat public privé, qui étale la charge d’investissement sur plusieurs dizaines d’années.

Enfin, en 2012, 30 millions d’euros d’investissements immobiliers seront engagés sur le programme Protection judiciaire de la jeunesse pour mettre en place 20 nouveaux centres éducatifs fermés.

Le Rapporteur spécial a annexé à son rapport le rapport que la Cour des comptes a effectué sur la base de l’article 58-2° de la LOLF sur les partenariats public-privé menés par le ministère de la Justice pour son programme immobilier. Ce rapport, demandé par la commission des Finances, permet de comprendre si de tels choix de mode de financement s’avèrent, en tout état de cause, favorables aux finances publiques.

Deuxièmement, le Rapporteur spécial a noté la prévision de 515 emplois créés en 2012. La mission Justice est la seule mission du budget de l’État à connaître des créations de postes. 285 emplois viennent renforcer les effectifs des juridictions (magistrats et greffiers). 145 postes de magistrats seront créés.

L’écart par rapport au schéma défini dans la programmation triennale 2011-2013 (+ 315 emplois) s’explique principalement par les mesures nouvelles entrées en vigueur en 2011 : le contrôle par le juge des hospitalisations sans consentement et la mise en place des citoyens assesseurs décidée par la loi du 10 août 2011. L’augmentation d’emplois prévue pour 2012 porte la progression des emplois de la Justice à 6 625 emplois depuis 2007.

Le budget de la Justice, à la fois généreux et ambitieux, permet donc de poursuivre l’adaptation profonde du système judiciaire et pénitentiaire menée depuis 2002. Cette adaptation était devenue indispensable au regard du retard pris par la France et de l’évolution de la société et de la délinquance.

I.– UN BUDGET EN HAUSSE CONTINUE DEPUIS DIX ANS

La mission Justice correspond au ministère régalien du ministère de la Justice et des libertés. Elle comporte six programmes :

Trois programmes « métier » :

– le programme 106 Justice judiciaire  relatif à l’organisation et au fonctionnement des juridictions ;

– le programme 107 Administration pénitentiaire relatif à la gestion des services pénitentiaires ;

– le programme 182 Protection judiciaire de la Jeunesse.

Deux programmes « support » à la politique d’accès au droit et aux fonctions d’état-major et réglementaires :

– le programme 101 Accès au droit et à la justice ;

– le programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice.

Enfin, un nouveau programme 305 Conseil supérieur de la magistrature  a été créé en application de l’article 9 de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010. Ce programme se substitue à l’action correspondante du programme  Justice judiciaire et met en œuvre l’autonomie budgétaire de cette institution instituée par la loi organique.

Lors du passage des crédits du ministère dans le mode de gestion voulu par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), la mission Justice comprenait la justice administrative, qui a été intégrée ensuite dans la mission Conseil et contrôle de l’État, malgré l’opposition réitérée du Parlement. Alors que les exigences de la gestion par la performance se renforcent et se précisent, comme le Rapporteur spécial le constate en examinant l’évolution du système de performance de la justice judiciaire, il est très regrettable que l’on soit privé de la cohérence d’ensemble que donnait la réunion des deux ordres de juridiction dans une même mission. Les réussites et bonnes pratiques constatées dans tel ou tel domaine auraient pu être rapprochées, tant concernant les indicateurs de performance qu’en ce qui concerne l’efficacité de la gestion au niveau des budgets opérationnels de programme.

On soulignera que la mission est comme pour les trois années précédentes dotée de quatre indicateurs les plus représentatifs :

– le délai moyen de traitement des procédures par type de juridiction (indicateur 166-1.1) ;

– le taux de réponse pénal (indicateur 166-3.1) ;

– le pourcentage de personnes placées sous écrou et condamnées bénéficiant d’un aménagement de peine (indicateur 107-3.1) ;

– la part des jeunes âgés de moins de 17 ans à la clôture d’une mesure pénale qui n’ont ni récidivé, ni réitéré dans l’année qui a suivi (indicateur 182-1.3).

La part des crédits consacrés à la Justice au sein du budget de l’État avait commencé à croître de manière significative en 2003, sous l’effet de la loi d’orientation et de programmation pour la justice de 2002 ; cette part continue à progresser en 2012, pour atteindre 2,54 % du budget de l’État.

Entre 2002 et 2012, le budget de la Justice a vu une croissance de son périmètre de 3 milliards d’euros en crédits de paiement. Le rattrapage ainsi effectué apparaît dans le tableau suivant.

ÉVOLUTION DE LA PART CONSACRÉE À LA JUSTICE DANS LE BUDGET DE L’ÉTAT

 

2005

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Budget général de l'État

             

– Crédits LFI/PLF

288,85

266,85

271,28

277,10

281,11

286,40

292,50

– Dépenses loi de règlement

294,27

270,63

278,23

       

Part de la mission Justice dans le budget de l'État

1,83

2,34

2,39

2,39

2,43

2,50

2,54

Mission Justice

             

– Crédits initiaux

5 279,78

6 244,62

6 485,68

6 632,13

6 844,30

7 138,08

7 420,57

– Crédits ouverts

5 011,10

6 220,99

6 384,73

6 754,18

6 946,91

   

– Dépenses (loi de règlement)

5 088,95

6 166,98

6 376,69

6 701,55

6 905,24

   

A.– LA PROGRESSION DE 4 % DES CRÉDITS DE PAIEMENT DE LA MISSION

La dotation demandée pour la mission en 2011 s’élève à 9,79 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Il s’agit d’une dotation haute pour permettre la conclusion de nouveaux marchés de construction et de gestion déléguée pour l’engagement des nouveaux programmes de restructuration du parc immobilier pénitentiaire. Ce montant d’autorisations d’engagement, qui progresse de 8,9 % se situe à un niveau élevé comme l’année 2011. Les crédits de paiement progressent de 4 %, à 7,42 milliards d’euros.

Pour chacun des programmes, le projet de budget pour 2012 est présenté dans le tableau suivant.

LE PROJET DE BUDGET DE LA JUSTICE EN 2012

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme
et de l’action

LFI 2011

PLF 2012

LFI 2011

PLF 2012

166 – Justice judiciaire

4 283,51

3 605,45

2 960,26

2 978,58

107 – Administration pénitentiaire (1)

3 280,01

4 727,55

2 821,79

3 030,31

182 – Protection judiciaire de la jeunesse (1)

757,66

792,64

757,64

772,64

101 – Accès au droit et à la justice (1)

338,03

402,87

331,33

354,83

310 – Conduite et pilotage de la politique de la justice (1)

247,94

263,18

267,04

280,67

Total

8 797,40

9 795,38

7 138,08

7 420,05

Source : ministère de la Justice.

(1) LFI 2010 retraitée.

Les dépenses de personnel (titre 2) représentent 60,6 % de l’ensemble des crédits et augmentent de 2,9 % contre 3,6 % l’année précédente.

Les crédits demandés pour la mission Justice sont en progression de 4 % en crédits de paiement, après une progression de 4,15 % en 2011, 3,4 % en 2010, 2,6 % en 2009 et 4,5 % en 2008.

L’évolution des crédits de paiement résulte essentiellement d’une progression constante des crédits de l’administration pénitentiaire et des services judiciaires. Les autres crédits de la mission ont été stabilisés grâce aux réformes initiées par la révision générale des politiques publiques (RGPP) c'est-à-dire en matière de pilotage de la politique de justice et pour la protection judiciaire de la jeunesse qui s’est recentrée dans ses missions sur la prise en charge des mineurs délinquants.

B.– LES PRIORITÉS POUR 2012

1.– La poursuite de l’effort budgétaire dans un contexte de réformes nombreuses

En 2012 vont être poursuivis les efforts engagés en faveur de la modernisation de l’organisation et du fonctionnement des services judiciaires et de l’administration pénitentiaire, du renforcement de l’action de la protection judiciaire de la jeunesse au pénal et de la rationalisation et de la mutualisation des fonctions « support » du ministère, notamment par la mise en place de plates-formes régionales de services inter-directionnelles et la rationalisation au niveau national de la fonction achats.

Mais le budget 2012 se caractérise aussi par la mise en œuvre ou le déploiement de nouvelles réformes d’envergure votées en 2011 au Parlement. Ces nouvelles mesures expliquent les moyens supplémentaires accordés en projet de loi de finances pour 2012 par rapport à l’annuité 2012 de loi de programmation des finances publiques (+ 41 millions d’euros à périmètre constant).

En 2011 ont ainsi été adoptés pas moins de cinq textes législatifs dont la mise en œuvre a des incidences budgétaires notables en 2012 :

– la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel fusionne les professions d’avoué et d’avocat. Cette réforme vise à simplifier et à moderniser les règles de représentation devant les juridictions en permettant au justiciable d’être représenté par un seul auxiliaire de justice tant en première instance qu’en appel ;

– la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées ;

– la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue vient renforcer les droits de la personne gardée à vue en lui permettant désormais d’être assistée d’un avocat lors de chaque interrogatoire dans le respect des exigences posées par le Conseil constitutionnel ;

– la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, qui implique l’intervention de l’autorité judiciaire dans la procédure d’hospitalisation sans consentement ce qui n’était pas le cas auparavant ;

– la loi du 10 août 2011 introduit des citoyens assesseurs dans les juridictions correctionnelles et dans les juridictions de l’application des peines.

Enfin, le ministère de la Justice va consacrer des moyens financiers croissants à ses opérations immobilières, tant pour les juridictions que pour les établissements pénitentiaires.

2.– La modernisation du fonctionnement de la justice

La politique de modernisation des services du ministère de la Justice et des libertés se poursuivra en 2012. Le ministère de la Justice est engagé depuis 2007 dans une politique de modernisation tous azimuts de son organisation et de ses méthodes de travail. Sur les six axes de réforme retenus dans le cadre de la RGPP, treize nouvelles mesures ont été définies en 2011, venant compléter les treize mesures déjà en cours de réalisation. La simplification des démarches pour les citoyens grâce à la dématérialisation des procédures est l’un des axes de la modernisation.

La dématérialisation de la procédure civile d’appel est en cours, accompagnant la réforme de cette procédure : elle a imposé progressivement l’usage de la communication électronique pour la mise en état civile devant la cour d’appel. La dématérialisation sera étendue à toute la mise en état civile d’ici le 1er janvier 2013. Le programme Cassiopée, logiciel unique pour l’ensemble de la chaîne pénale, va voir son déploiement s’achever en 2012 devant les tribunaux de grande instance de la région parisienne. La dématérialisation et la numérisation seront poursuivies dans les échanges avec les services de police et de gendarmerie, ainsi qu’avec les avocats. La visioconférence sera privilégiée pour assurer le contrôle des gardes à vue et des hospitalisations sans consentement et limiter le nombre d’extractions judiciaires dont le coût est élevé.

L’action informatique du ministère recevra 80 millions d’euros, destinés pour moitié environ aux investissements.

Le Rapporteur spécial observe avec intérêt que le ministère souhaite mettre en œuvre de nouvelles méthodes de travail s’inspirant de systèmes judiciaires étrangers ou de la gestion prévalant dans les entreprises privées. Il en va ainsi du développement du diagnostic à visée criminologique pour évaluer la dangerosité des personnes suivies par les conseillers pénitentiaires d’insertion et probation et de la modernisation de l’organisation des juridictions par l’utilisation du lean management pour améliorer les délais de traitement.

3.– La poursuite d’investissements immobiliers considérables

Le ministère poursuivra en 2012 la remise à niveau de l’immobilier judiciaire selon trois axes. Premièrement, des investissements à hauteur de 175 millions d’euros permettront d’achever les regroupements décidés dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire. Deuxièmement, une enveloppe complémentaire de 190 millions d’euros a été débloquée afin de financer les opérations nouvelles. Troisièmement, est inscrit dans ce budget 2012 le financement dans le cadre de partenariats public-privé la construction ou la rénovation de quatre palais de justice parmi les plus importants : Caen, Lille, Perpignan et Paris.

Dans le secteur pénitentiaire, conformément aux annonces du Président de la République du 13 septembre 2011, l’effort d’investissement sera prolongé et amplifié par une loi de programmation relative à l’exécution des peines, qui viendra consacrer l’objectif de disposer de 80 000 places de prison à l’horizon 2017.

Ce nouveau programme immobilier (NPI) va mettre en œuvre trois types de place de prison :

– des places seront créées pour les détenus condamnés à de courtes peines, dans des établissements à sécurité allégée ;

– de nouvelles places de prison remplaceront celles des établissements les plus vétustes qui seront fermés (9 000) ;

– seront rénovés les établissements non-conformes aux critères posés par loi pénitentiaire : cellules individuelles, développement des locaux d’activité et de sport, construction d’unités de vie familiale et de parloirs familiaux …

Ces nouvelles constructions auront de nouvelles particularités afin de répondre aux exigences de la loi pénitentiaire, en particulier en termes de droits des détenus.

Enfin, 20 nouveaux centres éducatifs fermés vont être ouverts dans le cadre de la réforme du jugement des mineurs. Sur la période 2012-2014, 30 millions d’euros seront consacrés à leur construction.

4.– La recherche d’économies afin de financer des créations d’emplois importantes

Le ministère de la Justice est le dernier ministère dans le projet de budget pour 2012 à créer des emplois publics. Ces créations d’emplois importantes sont indispensables pour assurer l’ouverture de nouveaux établissements pénitentiaires et pour augmenter le nombre de greffiers par magistrat, garantie d’amélioration de l’efficacité de la justice, notamment en matière de raccourcissement des délais moyens de traitement des procédures. Ces créations d’emplois sont en partie financées par les économies réalisées grâce à :

– la simplification des procédures ou déjudiciarisation. Le vote du projet de loi sur la répartition des contentieux et l’allègement de certaines procédures juridictionnelles issues du rapport du groupe de travail présidé par le recteur Guinchard permettra d’alléger la charge de travail des juridictions et de dégager l’équivalent de 215 emplois ;

– la rationalisation des fonctions « support » du ministère (mise en place du plan achats ministériel et de plates-formes régionales de services interdirectionnelles) ;

– l’achèvement de la modernisation de la protection judiciaire de la jeunesse engagée en 2008 ans le cadre de la révision générale des politiques publiques ;

– l’optimisation des politiques menées en direction des personnes placées sous main de justice : développement des alternatives à l’incarcération (placement sous surveillance électronique…).

C.– LE PLAFOND D’EMPLOIS TOUJOURS EN PROGRESSION

Alors que 30 400 postes équivalents temps plein doivent être supprimés dans la fonction publique de l’État l’année prochaine, la mission Justice bénéficiera de la création de 515 emplois, après une progression de 550 emplois en 2011 et 1 030 en 2010. Le Gouvernement marque donc à nouveau sa détermination à renforcer les moyens en personnel du ministère de la Justice et des libertés, ce dont le Rapporteur spécial se félicite.

Ces créations seront principalement destinées à l’administration pénitentiaire pour permettre l’ouverture de nouveaux établissements en 2012, mais également à la justice judiciaire qui pourra recruter 370 greffiers et 85 magistrats supplémentaires.

Le plafond d’emplois de la mission s’élèvera de 75 827 ETPT pour 2011 à 76 025 pour 2012.

1.– La répartition des emplois entre les programmes

Le plafond d’autorisation d’emplois ministériel progresse entre 2011 et 2012 de 615 ETPT hors transfert. Cette évolution s’explique d’une part, par la création de 415 ETPT nouveaux, et de 200 ETPT au titre des extensions année pleine des ETPT créés en 2011.

Les transferts internes correspondent d’une part, à la création du programme 335 (22 ETPT), d’autre part, à la constitution de plateformes interdirectionnelles (381 ETPT), et enfin, à l’achèvement de la fédération des inspections du ministère (10 ETPT).

La mission Justice bénéficie du transfert de 250 ETPT pour prendre en charge les transfèrements judiciaires auparavant assurés par les services de la police et de la gendarmerie.

Enfin, 3 ETPT sont transférés de la mission Justice vers d’autres missions (2 ETPT pour la mutualisation des ateliers de reprographie, et 1 ETPT pour le renforcement de l’ANSSI).

Le tableau ci-après présente la répartition des créations et des transferts d’emplois entre les programmes.

CRÉATIONS ET TRANSFERTS D’EMPLOIS S PAR PROGRAMME EN 2012

Mission justice

107

166

182

310

335

Total mission

Plafond d’emplois 2011

35 057

31 018

8 501

1 449

0

76 025

Extension année pleine de 2010 sur 2011

207

63

– 70

0

0

200

Créations d’ETPT

145

245

40

– 15

0

415

Transfert interne d’ETPT

– 148

– 189

– 76

+ 391

+ 22

0

Transfert externe d’ETPT

+ 250

0

0

– 3

 

+ 248

Plafond d’emplois 2011 après transferts

34 858

31 019

8 501

1 449

0

75 827

Source : ministère de la Justice.

Le schéma d’emploi 2012 repose sur la création nette de 285 emplois correspondant au recrutement de magistrats (+ 85), de greffiers en chef (+ 25), de greffiers (+ 370), de secrétaires administratifs (+ 30) et à la suppression d’emplois de fonctionnaires de catégorie C (– 225).

La répartition des emplois pour 2012 par catégorie du plafond d’autorisation d’emplois figure dans le tableau suivant.

La répartition par programme pour 2012 et par catégorie du plafond d’autorisation d’emplois ministériel est la suivante :

– les transferts internes

La création du programme 335 a nécessité le transfert de 22 emplois en provenance du programme 166.

Pour la création des plateformes la mission aura besoin de 381 emplois qui sont transférés depuis les programmes suivants :

– 148 emplois en provenance du programme 107 ;

– 157 emplois en provenance du programme 166 ;

– 76 emplois en provenance du programme 182.

Enfin, l’Inspection générale du MJL bénéficie d’un transfert de 10 emplois en provenance du programme 166 permettant l’achèvement de la fédération des inspections du ministère.

– les transferts externes

La mission justice fait l’objet des transferts externes suivants :

– 250 emplois au profit du programme 107 en provenance des programmes police nationale et gendarmerie afin de procéder aux transfèrements judiciaires ;

– 3 emplois prélevés sur le programme 310 pour la création de l’atelier de reprographie et le renforcement de l’ANSSI.

PLAFOND D’AUTORISATION D’EMPLOIS RÉMUNÉRÉS PAR L’ÉTAT POUR 2012

(en ETPT)

Ministère de la Justice

Programme 107
Administration pénitentiaire

Programme 166
Justice judiciaire

Programme 182
Protection judiciaire de la jeunesse

Programme 310
Conduite et pilotage

Total

Catégories

         

Magistrats de l’ordre judiciaire

17

8 927

10

191

9 148

Personnels d’encadrement

1 391

2 811

2 467

734

7 407

B : métier du greffe, de l’insertion et de l’éducatif

4 131

8 484

4 455

78

17 153

B : administratifs et techniques

1 019

362

275

205

1 864

C : Personnels de surveillance

26 033

     

26 033

C : administratifs et techniques

2 920

10 553

1 188

614

15 282

Total

55 511

31 137

8 395

1 822

76 887

Source : ministère de la Justice.

Les départs en retraite des magistrats ne seront pas tous remplacés. Pour l’administration centrale, un départ en retraite sur deux sera remplacé.

2.– La réduction des emplois des opérateurs du ministère de la Justice

Les emplois des opérateurs du ministère sont en diminution, ainsi que le fait apparaître le tableau suivant.

EMPLOIS DES OPÉRATEURS RATTACHÉS À LA MISSION

 

LFI 2009

PLF 2010

LFI 2011

PLF 2012

École nationale d’administration pénitentiaire

240

242

239

234

École nationale de la magistrature

– auditeurs de justice

180

604

180

0

177

173

Établissement public du palais de justice de Paris

15

15

15

15

Agence de maîtrise d’ouvrage des travaux du ministère de la justice

84

95

95

98

GIP mission « droit et recherche »

1

1

1

1

Total mission justice

1 124

533

527

526

Source : ministère de la Justice.

L’évolution à la baisse des emplois des opérateurs répond aux exigences de la loi de programmation des finances publiques, mise en œuvre par la lettre de cadrage du budget pluriannuel 2011-2013 qui prévoit de réduire les emplois des opérateurs de 1,5 % par an.

Les effectifs de l’Agence publique pour l’immobilier de la Justice sont en augmentation compte tenu des opérations à mener pour la construction de nouveaux établissements pénitentiaires ou la rénovation de palais de justice. Ces emplois supplémentaires seront gagés par des suppressions dans les deux écoles du ministère (ENM et ENAP).

II.– 2012 : UN PREMIER BILAN DE LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE

La réforme de la carte judiciaire aura été mise en place progressivement, selon la nature des juridictions concernées, du 17 février 2008, date de la suppression des greffes détachés sans effectif et sans activité, au 1er janvier 2011, date de fermeture des tribunaux de grande instance.

Cet étalement était destiné à préparer, dans des conditions optimales et avec une anticipation suffisante, les évolutions de structure et de format des juridictions, tout en organisant dans le temps la prise en compte de la situation individuelle des personnels concernés.

A.– UNE CARTE JUDICIAIRE TOTALEMENT REMANIÉE

Au terme de la réforme les juridictions judiciaires sont au nombre de 866, contre 1 193 avant la réforme.

 La transformation de carte judiciaire a connu les étapes suivantes :

– 31 greffes détachés de tribunaux d’instance ont été supprimés au 17 février 2008 ;

– 62 conseils de prud’hommes ont été supprimés et une création a été effectuée (Avesnes-sur-Helpe), au 3 décembre 2008 ;

– 55 suppressions et 5 créations de tribunaux de commerce ont été achevées au 1er janvier 2009, ainsi que la création d’un tribunal mixte de commerce ;

– 14 suppressions et une création de tribunal d’instance et de juridiction de proximité ont été effectuées au 1er février 2009 ;

– deux TGI (Belley et Millau) ont été supprimés au 1er octobre 2009 ;

– les autres tribunaux d’instance, juridictions de proximité et greffes détachés ont été supprimés au 31 décembre 2009 ;

– le TGI de Péronne a été supprimé au 1er juillet 2010 et le TGI de Bressuire le 5 septembre ;

– enfin, la suppression des 17 TGI restants a été effective au le 31 décembre 2010, la fusion du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu avec celui de Vienne étant reportée à 2014 pour des raisons immobilières.

 On rappellera que les suppressions visaient 21 TGI (décision du Conseil d’État en date du 19 février 2010 annulant le décret n° 2008-1110 du 30 octobre 2008 en ce qu’il supprime le tribunal de grande instance de Moulins) ; 178 tribunaux d’instance et autant de juridictions de proximité ; 85 greffes détachés de tribunaux d’instance ; 62 conseils de prud’hommes ; 55 tribunaux de commerce et 35 bureaux fonciers dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Des transferts de compétence ont été opérés. 23 tribunaux de grande instance ont vu leur compétence commerciale transférée vers les tribunaux de commerce et vers un tribunal mixte de commerce.

 Le Rapporteur spécial insiste sur le fait que contrairement aux idées reçues la réforme de la carte judiciaire ne s’est pas limitée à la suppression de juridictions. En effet, en raison de nécessités locales liées notamment à une forte activité et à des préoccupations d’aménagement du territoire, 14 juridictions ont été créées : 7 tribunaux d’instance et autant de juridictions de proximité, un conseil de prud’homme, 5 tribunaux de commerce et un tribunal mixte de commerce.

Au total, 437 implantations judiciaires auront été supprimées et 14 juridictions auront été créées.

Le Rapporteur spécial constate que les regroupements se sont réalisés sans difficulté sur le plan immobilier et sur le plan matériel, les déménagements des juridictions et les transferts informatiques ayant été réalisés avant la date de fermeture officielle des juridictions.

B.– L’ACCOMPAGNEMENT SOIGNÉ DES PERSONNELS DES JURIDICTIONS

1 800 agents, 400 magistrats et 1 400 fonctionnaires, ont été affectés par la réforme. Plus de la moitié des personnels concernés ont rejoint la juridiction de rattachement, certains personnels ayant été affectés en surnombre, en accord avec les chefs de cour.

Des dispositifs d’accompagnement importants ont été appliqués, c'est-à-dire des entretiens individuels pour les magistrats ou fonctionnaires qui le souhaitent, des visioconférences avec les cours d’appel afin d’examiner les mesures d’accompagnement social, d’organisation, matérielle ou technique à mettre en œuvre : déménagement, informatique, transfert des procédures, des archives et des scellés, régie, projets de service, audiences foraines, notamment. Dans la majorité des cas, les souhaits de mutation ont été pris en compte par la Chancellerie.

Les magistrats et les fonctionnaires ont pu bénéficier d’une prime de restructuration de service, d’une allocation d’aide à la mobilité du conjoint et d’un remboursement des frais de changement de résidence. En outre, les fonctionnaires ont pu prétendre à une indemnité de départ volontaire et à la compensation pendant deux ans de la perte de la nouvelle bonification indiciaire.

Les primes et aides aux agents ont eu un coût budgétaire non négligeable mais ont été un facteur important du bon déroulement de la réforme au niveau des personnels. S’agissant des primes de restructuration et d’allocation d’aide à la mobilité du conjoint, les montants versés aux personnels ont été les suivants :

– en 2008, 1,18 million d’euros au bénéfice de 44 magistrats et 46 fonctionnaires ;

– en 2009, 2,87 millions d’euros au bénéfice de 31 magistrats et 206 fonctionnaires ;

– en 2010, 8,05 millions d’euros au bénéfice de 88 magistrats et 609 fonctionnaires ;

– en 2011, 3,50 millions d’euros au bénéfice de 78 magistrats et 167 fonctionnaires.

Par ailleurs, les quelque 500 avocats inscrits au barreau de l’un des 23 TGI supprimés peuvent, en application du décret n° 2008-741 du 29 juillet 2008, bénéficier d’une aide à l’adaptation de l’exercice de leur profession aux conditions nouvelles résultant de la suppression de ces juridictions. La première fraction – forfaitaire – de cette aide leur a été versée en fin d’année 2008, pour un montant total d’environ 4,7 millions d’euros. La deuxième fraction de l’aide, appelée à couvrir les dépenses supplémentaires engagées, doit être demandée avant le 31 décembre 2010. La prévision pour 2010-2012 est estimée à 5,6 millions d’euros. Au final, le dispositif devrait représenter un coût global de 10,3 millions d’euros.

C.– UN COÛT IMMOBILIER DE LA RÉFORME MAÎTRISÉ

 Cette réforme de la carte se traduit par la réalisation de 445 opérations immobilières, dont 326 pérennes et 119 provisoires permettant de respecter les délais prévus afin d’opérer le regroupement des juridictions. Les opérations provisoires ont consisté dans la plupart des cas à densifier les locaux de la juridiction d’accueil ou à recourir à des locations qui seront suivies par la livraison de locaux définitifs.

Le volet immobilier de la carte a été évalué à 375 millions d’euros, répartis sur cinq ans. Il est probable que cette prévision soit dépassée à nouveau, avec une durée de rénovation et de construction plus longue, allant jusqu’à dix ans. Le coût actualisé s’élève à 338,9 millions d’euros.

Le financement de la réforme de la carte judiciaire devait être assuré par un droit de tirage sur le compte d’affectation spéciale gestion immobilière de l’État en bénéficiant de l’ensemble des cessions immobilières de l’État dès lors que le ministère céderait 30 millions d’euros de biens immobiliers. Ce dernier objectif a été atteint. En revanche, les engagements du Gouvernement n’ont pas été complètement tenus car le produit des biens de cessions a été affecté au financement de la réforme de l’administration territoriale de l’État. Certaines cessions de la protection judiciaire de la jeunesse ont été affectées au financement de cette réforme. En conséquence, la réforme de la carte judiciaire ne sera financée que par dotations budgétaires.

Pour 2012, des crédits de 174,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 23,9 millions d’euros en crédits de paiement seront consacrés à la poursuite du financement de la réforme.

La cession de biens liée à la réforme de la carte concerne près de trente bâtiments appartenant à l’État. Ces biens représentent une valeur vénale de près de 11 millions d’euros. Sur l’ensemble des biens 15 ont d’ores et déjà été vendus par France Domaine pour un montant de 4,18 millions d’euros. D’autres sites dont le ministère de la Justice n’a plus l’utilité après la mise en œuvre de la réforme sont en grande partie des locaux appartenants aux collectivités territoriales mis gratuitement à la disposition des juridictions. Ils sont, dans la plupart des cas, restitués aux collectivités territoriales concernées.

Dans la recherche des solutions immobilières, le ministère de la Justice et des libertés s’est attaché à respecter les orientations en matière de politique immobilière de l’État. C’est ainsi que, dans de nombreux cas, la densification et les petites restructurations à moindre coût dans les locaux existants ont été privilégiées. Par ailleurs, lorsqu’une acquisition s’est révélée nécessaire, le recours à des biens domaniaux a été recherché.

Les opérations provisoires ont permis le regroupement de juridictions entre la date de suppression prévue par les décrets et celle de la livraison des locaux définitifs lorsqu’elle dépend d’opérations lourdes. Ces opérations provisoires consistent dans la plupart des cas à densifier des locaux existants ou à recourir à des locations.

 L’année 2008 a permis de réaliser les regroupements des tribunaux de commerce, des conseils de prud’hommes et des chambres commerciales. À cette fin, 114 opérations, dont 41 provisoires, ont été menées à bien pour les rattachements des 62 conseils de prud’hommes, des 55 tribunaux de commerce et des 23 chambres commerciales des TGI supprimés par les décrets de février 2008.

Pour l’année 2009, 136 opérations dont 38 provisoires ont été livrées permettant ainsi, s’agissant des tribunaux d’instance, l’entrée en vigueur de la réforme

Pour l’année 2010, 46 opérations dont 18 provisoires ont abouti permettant ainsi l’entrée en vigueur de la réforme de la carte judiciaire, s’agissant des tribunaux de grande instance.

L’année 2011 se traduit par la poursuite de 22 opérations provisoires et de 127 opérations pérennes dont les livraisons s’échelonneront jusqu’à 2016 pour celles les plus importantes, dont la construction de nouveaux TGI, ou de nouvelles cités judiciaires. Parmi ces opérations suivies par l’APIJ, peuvent être citées :

– des constructions neuves de palais de justice, (TGI/TC de Bourg-en-Bresse, TGI/TI/TC de Limoges, TGI/TC de Saint-Malo, TGI de Béziers) ;

– des restructurations lourdes et/ou extension (TGI de Lons-le-Saunier, TGI/TI de Périgueux, TI de Quimper, TGI-TI de Saint-Brieuc) ;

– des acquisitions-restructurations (TI d’Haguenau, TGI-TI de Lisieux).

Le Rapporteur spécial constate qu’en 2011 le ministère a achevé l’intégralité des petites opérations.

III.– LA JUSTICE JUDICIAIRE

Les crédits de paiement demandés pour 2012 s’élèvent à 2 978,58 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 0,7 % par rapport aux crédits alloués par la loi de finances pour 2011.

Dans cette évolution, ne sont pas prises en compte les opérations nombreuses de remise à niveau de l’immobilier judiciaire qui sont effectuées dans le cadre de partenariats public-privé. Ces opérations d’investissement s’élèvent à hauteur de 1 203,7 millions d’euros en autorisation d’engagement, dont la consommation en crédits de paiement ne commencera à s’exécuter qu’à compter des exercices postérieurs à 2013. Cette formule de financement ne permet pas à un réel contrôle de la Représentation nationale dans la mesure où elle est extra-budgétaire.

Les crédits de personnel augmenteront de 1,4 %, versement au compte d’affectation spéciale Pensions compris.

A.– LA MESURE DE LA PERFORMANCE

Une évolution majeure du périmètre du programme est opérée pour l’année 2012 avec la constitution d’un programme propre au Conseil supérieur de la magistrature. Ainsi, l’action 4 Conseil supérieur de la magistrature du programme Justice judiciaire disparaît au profit du programme 335. Cette autonomie budgétaire est le corollaire des changements introduits par loi n° 2008-274 du 23 juillet 2008 visant à garantir l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature dans l’exercice de ses missions.

Le Conseil supérieur de la magistrature exerce principalement une mission de conseil de l’État qui se prête difficilement à une mesure de la performance. M. Vincent Lamanda, Premier président de la Cour de cassation et à ce titre responsable de ce nouveau programme indique non sans humour dans le projet annuel de performances que l’indicateur le plus pertinent pour mesurer la performance de l’institution serait « un indicateur de qualité des nominations, difficile à construire et à documenter ».

Trois indicateurs ont cependant été introduits pour ce nouveau programme :

– indicateur 1.1 : délai utile d’examen des propositions de nomination du garde des Sceaux ;

– indicateur 2.1 : délai de traitement des plaintes des justiciables ;

– indicateur 3.1 : dépense de fonctionnement par membre.

Un indicateur et un sous-indicateur ont été supprimés dans le cadre du projet de loi de finances 2012. Le sous-indicateur (CA : appels sur décisions du juge des enfants en assistance éducative) de l’indicateur 1.1 (Délai moyen de traitement des procédures par type de juridiction) a été supprimé car les systèmes d’information utilisés ne permettent pas d’obtenir de résultats fiables. L’indicateur 1.4 (Délai moyen de délivrance de la copie revêtue de la formule exécutoire) a été supprimé également car la donnée est peu fiable. Peu de juridictions saisissaient cette donnée et les résultats étaient trop disparates.

Par ailleurs, le Rapporteur spécial se félicite de la progression du taux de réponse pénale.

B.– UNE AMÉLIORATION DE LA PERFORMANCE INDISPENSABLE EN MATIÈRE DE DÉLAIS DE TRAITEMENT DES AFFAIRES

Les cibles à atteindre ont été relevées pour beaucoup d’indicateurs, montrant une réelle ambition, notamment en matière de réduction des délais de justice et de performance individuelle des magistrats comme des fonctionnaires des juridictions. Des cibles ambitieuses ont été fixées au délai de traitement des affaires civiles et pénales relatives aux mineurs, au nombre d’affaires civiles traitées par magistrat, et enfin au taux d’alternatives aux poursuites des mineurs.

Les gestionnaires du programme rechercheront l’amélioration des résultats dans l’effort de réduction des délais de traitement des affaires. Pour certaines juridictions, des résultats significatifs ont été obtenus, pour d’autres, en revanche, des marges de progrès demeurent. Les délais doivent être réduits à nouveau surtout afin de respecter une plus homogénéité autour de la moyenne nationale.

Dans le domaine pénal, des résultats encourageants sont obtenus pour le taux d’alternatives aux poursuites (hors mesures de rappel à la loi) et l’administration a renforcé les exigences en revalorisant la valeur cible pour 2013.

De manière générale, le Rapporteur spécial observe que les efforts doivent être poursuivis en matière d’exécution des décisions pénales, dans la mesure où l’exécution des peines dans un délai raisonnable est l’une des conditions sine qua non de la crédibilité et de l’efficacité de notre système judiciaire.

Pour atteindre l’ensemble de ces objectifs, une nouvelle sous-direction de la performance et des méthodes a été créée au sein de la Direction des services judiciaires en vue d’initier et d’accompagner les différentes mesures visant à améliorer la performance qualitative et quantitative des juridictions (schémas d’organisation, cellule de contrôle de gestion, amélioration des applicatifs informatiques).

C.– DES CRÉDITS STABLES EN 2012

Les crédits du programme figurent dans le tableau suivant.

CRÉDITS DU PROGRAMME JUSTICE JUDICIAIRE

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action/sous action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
2012/2011

(%)

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
2012/2011

(%)

01 – Traitement et jugement des contentieux civils

910,7

925,5

2%

891,7

910,7

2%

02 – Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales

961,8

1 026,5

7%

962,4

1 026,5

7%

03 – Cassation

65,8

66,4

1%

65,8

66,4

1%

04 – Conseil supérieur de la magistrature

2,2

2,9

32%

2,2

2,9

32%

05 – Enregistrement des décisions judiciaires

13,9

14

1%

13,9

14

1%

06 – Soutien

835

2 002,2

140%

791

828,8

5%

07 – Formation (ENM, ENG)

80,6

81,4

1%

80,6

81,4

1%

08 – Support à l’accès au droit et à la justice

27,2

28,7

6%

27,2

28,7

6%

Total

2 878,2

4 132,8

44%

2 834,8

2 595,4

-8%

Source : ministère de la Justice

Les crédits demandés au titre 2 pour le personnel augmentent de 1,45 % (CAS Pensions compris) entre 2011 et 2012, soit + 29,5 millions d'euros. Cette évolution résulte essentiellement de la hausse du taux de cotisations des pensions civiles (65,72 % en 2011 ; 68,92 % en 2012), soit + 26,4 millions d'euros.

Toutefois, il est à noter que l'action 7 Formation connaît une augmentation de 6,7 % (soit + 3,3 millions d'euros), qui résulte essentiellement de l’accroissement du nombre d’auditeurs de justice, ainsi que du recrutement massif de greffiers prévus en 2012.

1.– Le plafond d’emplois encore en progression en 2012

Les emplois inscrits au programme Justice judiciaire s’élèvent à 31 018 ETPT, contre 29 653 ETPT autorisés en 2011, soit une augmentation de 1 365 ETPT.

Le schéma d’emploi 2011 du programme prévoit la création d’emplois en ETP de :

– 85 magistrats ;

– 25 greffiers en chef ;

– 370 greffiers ;

– 30 secrétaires administratifs.

Sont supprimés 225 emplois de fonctionnaires de catégorie C.

Ces créations d’emplois permettront de soutenir les deux réformes de 2011 ayant eu le plus d’impact en termes d’effectifs : la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale (65 magistrats) et la réforme de l’hospitalisation sans consentement (80 magistrats et 60 greffiers).

La création nette est donc de 285 emplois pour le programme contre 127 l’année précédente.

ÉTAT PRÉVISIONNEL DES SORTIES DU CORPS ET DES RECRUTEMENTS
ENTRE 2011 ET 2015

Année

Sorties

Entrées

Total

2011

– 247

197

– 50

2012

– 260

345

85

2013

– 276

nd

nd

2014

– 294

nd

nd

2015

– 307

nd

nd

a) Vers un rééquilibrage du ratio entre magistrats et greffiers

Le Rapporteur spécial souhaite rappeler qu’entre 1998 et 2008, les effectifs des magistrats ont cru d’environ 30 %, soit un rythme sensiblement supérieur à l’accroissement de l’activité judiciaire, civile et pénale. Pendant la même période, le nombre des personnels non magistrats n’a augmenté que de 10 %.

En 2008-2009, le plafond d’emplois des magistrats a progressé de 59 ETPT en deux ans, tandis que celui des fonctionnaires et non-titulaires a diminué de 373 ETPT.

Le Rapporteur spécial désapprouve cette évolution discordante. Il considère donc que le nombre de magistrats est suffisant, au terme du rattrapage effectué depuis le début de la programmation de la LOPJ de 2002 mais que le rééquilibrage entre les effectifs de magistrats d’une part, et de greffiers et fonctionnaires, d’autre part, est nécessaire. Ce rattrapage a commencé en 2010 avec 155 créations d'emplois de greffiers et en 2011 avec 203 créations d’emplois de greffiers. Il se poursuit cette année et le ministère a indiqué au Rapporteur que l’objectif est un ratio d’un greffier par magistrat.

Entre 2007 et 2011, l’emploi a évolué de manière nettement différenciée dans les différentes catégories de fonctionnaires des services :

– le nombre d’emploi en catégorie A (greffiers en chef) est en légère diminution : – 2,44 % entre 2007 et 2011. Une réflexion est actuellement menée sur le renforcement des personnels de direction et d’encadrement tenant compte de la multiplicité des structures et des effectifs dans les juridictions les plus importantes ;

– les emplois en catégorie B (greffiers et depuis la création en 2008 d’un corps de secrétaires administratifs) sont en augmentation continue : + 6,93 % entre 2007 et 2011. Les créations d’emplois de greffiers ont pour but à moyen terme, la parité entre le nombre d’emplois de greffiers et celui de magistrats. Les créations d’emplois de secrétaires administratifs constituent un effectif actuel de 420 agents affecté sur des tâches administratives permettant ainsi aux greffiers de se recentrer sur leurs missions d’assistance des magistrats ;

– les emplois de catégorie C (adjoints administratifs) sont en diminution, de près de 11 % des effectifs depuis 2007.

Globalement, les services judiciaires ont donc subi entre 2007 et 2011, une baisse relative des effectifs de fonctionnaires de greffe à hauteur de 2,84 %.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE MAGISTRATS ET DE GREFFIERS

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Magistrats

7 891

7 950

8 113

8 195

8 185

8 080

Greffiers

(greffiers affectés auprès de magistrats)

6 915

6 942

7 012

7 059

7 079

7 433

Ratio

0,88

0,87

0,86

0,86

0,86

0,92

Le Rapporteur spécial se félicite de ce renforcement des effectifs de greffiers même si le taux d’un greffier par magistrat n’est pas encore atteint. Il s’inquiète cependant de la suppression d’emplois de catégorie C, dont les juridictions manquent, en particulier de C techniques.

b) La progression de la politique indemnitaire

Pour 2012, une enveloppe de 5,95 millions d’euros est prévue au titre des mesures catégorielles afin de procéder à la revalorisation des régimes indemnitaires des magistrats et fonctionnaires des services judiciaires.

La prime modulable (introduite en 2003) attribuée aux magistrats et gérée par les chefs de cour progresse en coût annuel : si elle s’élevait au départ à environ 22,87 millions d’euros, elle est estimée à 37,20 millions d’euros pour 2011. Cette prime, versée mensuellement, est attribuée en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l’institution judiciaire. Elle est calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut.

Pour les magistrats exerçant leurs fonctions dans les juridictions du premier degré ou pour les magistrats de cours d’appel, le décret n° 2011-913 du 29 juillet 2011 a simplifié leur régime indemnitaire en supprimant les primes autres que les primes forfaitaire et modulable.

La définition de la prime modulable de ces magistrats a dès lors été modifiée afin de préciser qu’il doit notamment être tenu compte dans l’appréciation de la contribution au bon fonctionnement du service public de la justice des attributions spécifiques éventuellement confiées et, le cas échéant, du surcroît d’activité résultant d’absences prolongées de magistrats.

Le taux moyen de la prime versée aux magistrats exerçant en juridictions, aux membres de l’inspection générale des services judiciaires ainsi qu’aux magistrats affectés à l’École nationale des greffes était au 1er janvier 2011 fixé à 9 %. Ce taux augmente progressivement jusqu’en 2013 conformément à l’arrêté du 29 juillet 2011 susvisé, comme suit : 10,5 % au 1er août 2011, 11,5 % au 1er août 2012 et 12 % au 1er janvier 2013.

Le taux de la prime modulable des chefs de cour d’appel, des chefs du tribunal supérieur d’appel et du directeur de l’École nationale des greffes, également fixé à 9 % au 1er janvier 2011, évolue de façon identique et selon le même calendrier. Une augmentation progressive et dans les mêmes proportions est prévue pour le taux maximal d’attribution individuelle de la prime modulable : 16,5 % au 1er août 2011, 17,5 % au 1er août 2012 et 18 % au 1er janvier 2013.

Le taux moyen de la prime versée aux magistrats exerçant à la Cour de cassation est fixé à 14 % et le taux maximal à 20 %. Le taux de la prime modulable versée au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près ladite Cour est fixé à 14 %.

Le taux moyen de la prime versée aux magistrats exerçant leurs fonctions à l’École nationale de la magistrature est fixé à 9 % et le taux maximal à 15 %. Le taux de la prime modulable versée au directeur de l’ENM est fixé à 9 %.

2.– Le léger recul des crédits hors titre 2 est dû à l’extinction progressive des opérations immobilières liées à la carte judiciaire

Les crédits hors titre 2 connaissent une baisse de 31,5 % en autorisations d’engagement et de 1,2 % en crédits de paiement.

La forte diminution en autorisations d’engagement est largement optique, et s’explique en grande partie par la baisse des autorisations d’engagement de titre 5 (crédits d’investissement) est essentiellement liée à l’évolution des crédits destinés au financement de la construction de palais de justice, réalisée dans le cadre d’un partenariat public-privé puisque ces opérations immobilières s’élèvent en 2012 à 385,5 millions d'euros en autorisations d’engagement (pour la construction de palais de justice à Caen, Perpignan et Lille), contre 1 203,7 millions d'euros en 2011, année où ont été votées les autorisations d’engagement nécessaires au lancement de la construction du nouveau palais de justice de Paris.

– les frais de justice connaissent une diminution en autorisations d’engagement de 23 %, laquelle résulte principalement des autorisations d’engagement supplémentaires dont le programme 166 a bénéficié en loi de finances initiale 2011. En effet, en loi de finances initiale pour 2011, 150,8 millions d'euros d’autorisations d’engagement dites techniques sont venus abonder le programme 166 afin de couvrir la sous-consommation des autorisations d’engagement de frais de justice des années antérieures qui, lors de la migration vers Chorus le 1er janvier 2011, ont basculé en réservations de crédit. En effet, une part de ces autorisations d’engagement, estimée à 150,8 millions d'euros, n’est pas susceptible de faire l’objet d’une consommation en 2011 dans la mesure où les dépenses associées seront traitées en flux 4 qui mobilise obligatoirement et uniquement des autorisations d’engagement de l’année en cours.

Au total, les crédits hors titre 2 sont en recul de 1,2 % par rapport à 2011. Mais cette évolution globale recouvre des évolutions contrastées par titre, et s’explique surtout par l’extinction progressive des crédits exceptionnels et par nature non reconductibles qui avaient été mis en place les années précédentes pour financer la réforme de la carte judiciaire (opérations immobilières et accompagnement social) :

– les crédits de fonctionnement (titre 3) sont en augmentation de 1,5 %, à 762,7 millions d'euros, contre 751,6 millions d'euros en 2011 ;

– les crédits immobiliers (titre 5) s’établissent à 145 millions d'euros, dont 121 millions d'euros hors carte judiciaire, contre 158 millions d'euros en 2011, dont 40 millions d'euros au titre de la carte judiciaire : hors carte judiciaire, les crédits immobiliers restent donc stables, et sont même légèrement en hausse ;

– les crédits d’intervention sont en recul, s’établissant à 4,6 millions d'euros contre 13,1 millions d'euros en 2011, mais là encore l’essentiel de cette baisse apparente s’explique par l’extinction du volet social de la carte judiciaire : en 2011, une enveloppe de 8 millions d'euros était budgétée au titre de l’aide aux avocats dont le barreau était supprimé ; cette enveloppe n’est pas reconduite en 2012 ; hors cet effet de périmètre, les crédits d’intervention ne sont qu’en léger recul, baissant de 5,1 millions d'euros en 2011 à 4,6 millions d'euros en 2012.

3.– Un effort important pour la formation qui ne transparaît pas à la lecture des crédits de l’action Formation

S'agissant de l'action Formation, la dotation allouée est en légère augmentation de 0,4 %. Mais cette diminution est en réalité une conséquence du changement de périmètre de cette action afin de se conformer à la nouvelle architecture budgétaire du programme sous Chorus. Désormais, les dépenses de fonctionnement de l’École nationale des greffes sont imputées sur l’action Soutien.

À périmètre constant, le budget dédié à la formation des personnels des services judiciaires est en augmentation de 6,7 % par rapport à celui de 2011, soit 3,3 millions d’euros. Cette évolution s’explique, principalement par l’accroissement du nombre d’auditeurs de justice et du recrutement massif de greffiers prévus en 2012.

En effet, le plan de formation de l’École nationale de la magistrature (ENM) connaît, pour 2012, un accroissement du nombre d’auditeurs de justice à hauteur de 102 par rapport à 2011. Cet important recrutement génère mécaniquement une augmentation des dépenses de fonctionnement recouvrant notamment les frais liés aux périodes d’étude et de stages extérieurs des auditeurs de justice.

En ce qui concerne l’École nationale des greffes (ENG), en raison d’un volume important de recrutements en 2012, l’école devrait également accueillir un nombre plus important de stagiaires qu’en 2011, notamment dans le cadre de la formation initiale (+ 638). Concernant la formation continue, une augmentation de ce poste de dépense est à prévoir. Cette évolution s’explique en partie par la prise en charge de la classe préparatoire intégrée de janvier à mars 2012.

D.– LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES, TALON D’ACHILLE DE LA JUSTICE JUDICIAIRE

ÉTAT DES EFFECTIFS DE MAGISTRATS

(au 1er septembre 2011)

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

A.– Magistrats en détachement

218

221

228

217

215

247

253

B.– Magistrats en congé de longue durée

20

25

16

21

15

19

12

C.– Magistrats en congé parental

7

11

13

15

15

12

13

D.– Magistrats en disponibilité

71

80

88

90

83

83

74

E.– Magistrats en activité

7 586

7 718

7 950

8 113

8 208

8 187

8 080

F.– Magistrats maintenus en activité en surnombre

47

50

45

51

61

71

92

G.– Effectifs réels des magistrats en activité (E+F)

7 633

7 768

7 995

8 164

8 269

8 258

8 172

Plafond d’emplois

(PAP – emplois exprimés en ETPT –)

7 507

7 600

7 714

7 918

7 896

8 282*

8 785

Source : ministère de la Justice

1.– Les observations de la Cour des comptes : la nécessité d’un redéploiement des effectifs au regard des besoins

En application de l’article L.135-5 du code des juridictions financières, la Cour des Comptes a transmis au Garde des Sceaux un référé concernant la gestion des personnels judiciaires.

Dans ce référé, la Cour relève la nécessité de mieux adapter la répartition territoriale des effectifs à la réalité des besoins à travers une politique volontariste d’incitation et de fidélisation des agents.

En matière de charge de travail par agent, les indicateurs disponibles qui sont perfectibles mettent en évidence d’importants déséquilibres territoriaux, d’une juridiction à l’autre. Le nombre d’affaires, par magistrat ou par fonctionnaire, varie du simple au double, voire au triple selon les ressorts.

Le ministère dispose, grâce aux travaux de la cellule de contrôle de gestion, d’un diagnostic relativement précis des écarts et des déséquilibres existants. La Cour regrette que le ministère n’ait pas profité de la récente période d’accroissement des effectifs. Les redéploiements ne sont pas assez nombreux.

Le Rapporteur spécial pense que le départ à la génération des magistrats baby-boomers représente une opportunité pour mener une politique volontariste de redéploiement des postes.

Le Rapporteur spécial est cependant conscient que la gestion des ressources humaines des magistrats doit prendre en compte des impératifs d’ordre statutaire et les règles de nomination propres aux magistrats, associant le Conseil supérieur de la magistrature. Ainsi, aux termes de l’article 4 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, « les magistrats du siège sont inamovibles. En conséquence, le magistrat du siège ne peut, sans son consentement recevoir une affectation nouvelle, même en avancement. »

2.– La rénovation de la localisation des emplois engagée en 2009

L’administration a engagé un certain nombre d’actions au cours des dernières années pour réduire la durée des vacances de postes.

La procédure de détermination des emplois de magistrats a fait l’objet d’une refonte depuis la mise en œuvre de la LOLF. L’allocation des moyens humains repose sur deux procédures, l’une budgétaire de gestion des plafonds d’autorisations d’emplois, l’autre, administrative, de localisation des emplois. Jusqu’en 2008, l’outil utilisé dit « structure de référence » était hypertrophié et ne répondait pas aux exigences de la LOLF.

La note du 5 août 2008, par l’abandon de la structure de référence, a constitué la première étape d’un processus d’ajustement du cadre à la « réalité » du corps des magistrats. Elle visait à assurer une meilleure gestion prévisionnelle des emplois de la magistrature dans un contexte de stabilisation des effectifs et à favoriser une implication croissante des cours d’appel dans la gestion de leurs effectifs.

Les circulaires de localisation des emplois du 9 février 2009, du 8 avril 2010 et du 24 février 2011 ont concrétisé et poursuivi ce mouvement. Ainsi, le différentiel entre les postes localisés, qui peuvent potentiellement être pourvus, et le nombre prévisionnel de magistrats en fonction dans les cours d’appel et tribunaux a été réduit.

Établie en postes, la localisation exprime la répartition idéale, au vu de l’activité, des effectifs estimés par la Chancellerie pour un bon fonctionnement des juridictions pour une année considérée, dans la limite du plafond d’autorisations d’emplois. Le périmètre de la localisation est déterminé annuellement au vu de l’analyse de la performance conjuguée aux données prévisionnelles relatives aux arrivées en juridiction et départs définitifs. Elle est élaborée à l’issue des dialogues de gestion à l’occasion desquels, les chefs de cour sont invités à déterminer leur besoin en effectif et proposer une répartition des postes la plus à même de favoriser la performance des juridictions de leur ressort.

Afin de pourvoir les postes ainsi retenus, les candidatures sont examinées lors des mouvements de magistrats et les projets de nomination réalisés conformément aux règles statutaires régissant le corps. Le calendrier de ces mouvements est le suivant :

 Le mouvement annuel

Il s’agit de la « transparence annuelle », diffusée en février en vue d’installations début septembre. Ce mouvement tient compte de la prise de fonctions, début septembre, des auditeurs de justice. Ces derniers sont nommés sur des postes vacants ou sur des postes libérés par des magistrats faisant l’objet d’une proposition de nomination dans le cadre du mouvement annuel.

 Le mouvement d’« ajustement »

Il est généralement diffusé courant juin pour des installations en septembre. Il permet « d’ajuster » le mouvement annuel (désistements, avis non conformes ou défavorables, rééquilibrage des postes laissés vacants entre les cours d’appel) et de prévoir une affectation pour les magistrats issus de l’intégration directe (session de la commission d’avancement du mois de mai).

 Le mouvement de fin d’année

Ce mouvement est diffusé à l’automne (octobre-novembre), en vue d’installations en début d’année civile. Il répond à deux objectifs : la promotion au premier grade de magistrats nouvellement inscrits au tableau d’avancement et le comblement des « vacances » de postes résiduelles.

Ces trois principaux mouvements de magistrats, qui représentent plus de 85 % des nominations annuelles, sont complétés, en tant que de besoin, par des « transparences » complémentaires.

L’exercice de localisation des emplois a été rénové en lien avec la réforme de la carte judiciaire a donc été rénové afin de tendre vers une meilleure adéquation entre le nombre de postes localisés et les moyens disponibles.

Il a conduit à un certain nombre de redéploiements réalisés en 2010 (223 redéploiements dont 109 intra Cour et 33 inter Cour) et en 2011 (49 redéploiements dont 32 intra cour et 17 inter cour) afin de mieux répartir les emplois et corriger ainsi les déséquilibres constatés.

Cette mise en cohérence des effectifs et du besoin sera poursuivie dans le cadre de la localisation des emplois pour 2012.

Toutefois, Mme Malbec, directrice des Services judiciaires, lors de son audition par le Rapporteur spécial a souligné que l’une des difficultés à assurer un équilibre territorial d’une juridiction à l’autre tient à des entrées et sorties du corps (détachements, demandes de disponibilités, retraites, congés longue durée, congés parentaux) qui s’étalent tout au long de l’année.

3.– Développer les moyens pour pourvoir les postes les moins attractifs

La durée des vacances de certains postes est parfois liée à un défaut d’attractivité. La Chancellerie s’efforce de pallier ce déficit par la mise en œuvre de divers moyens.

Premièrement, la prime modulable allouée aux magistrats a été augmentée de manière significative, le taux moyen fixé aujourd’hui à 9 % devant atteindre progressivement 12 % en janvier 2013. Cette revalorisation doit permettre aux chefs de cour de mieux prendre en compte certains postes difficiles.

Deuxièmement, depuis plusieurs années, la Direction des services judiciaires s’est attachée à développer les postes d’encadrement. Ainsi en 2009, quarante-deux emplois de vice-président et de vice-procureur ont été transformés en emplois de premier vice-président et de procureur de la République adjoint. Ces postes attractifs ont pu permettre de compenser des déficits d’attractivité dans certaines juridictions de taille moyenne.

Troisièmement, la Direction des services judiciaires s’attache déjà à permettre une réalisation au premier grade plus rapide pour les candidats sur les postes moins attractifs, en proposant notamment des avancements sur place pour des postes ne recueillant aucun candidat et lorsqu’il existe un déficit d’encadrement intermédiaire.

À cet égard, une politique de sensibilisation aux règles de l’avancement est davantage développée auprès des magistrats, notamment par le biais d’entretiens de carrière et de mobilité, de nouvelles formations sur la gestion des ressources humaines dispensées par l’École Nationale de la Magistrature et de conférences de gestion des ressources humaines au sein des cours d’appel.

Par ailleurs des appels à candidatures sont régulièrement diffusés pour des postes peu sollicités.

La Cour des comptes suggère d’autres moyens pour attirer les magistrats sur les postes moins « attractifs » à raison de leur nature ou de leur localisation : le ministère pourrait utiliser le levier indemnitaire ou l’attribution de bonifications d’ancienneté, sur le modèle de ce qui existe aujourd’hui pour la Corse et l’outre-mer.

4.– Améliorer les outils de gestion des personnels

S’agissant de la répartition des charges de travail par cour d’appel et juridictions, la DSJ dispose depuis plusieurs années de l'outil OUTILGREF destiné à évaluer la charge de travail et les besoins des juridictions concernant les fonctionnaires des greffes. Un groupe de travail a été mis en place pour adapter cet outil à la juridiction parisienne, il a rendu son rapport, partagé avec les chefs de juridiction.

Par ailleurs, la demande des juridictions et de l'administration centrale est forte pour disposer d'un outil d'évaluation de la charge de travail des magistrats.

Un groupe de travail a été constitué fin mars 2011, sous la direction de deux chefs de cour et avec la participation de la sous-direction de la performance et des méthodes, afin d'étudier les travaux existants et de proposer une méthodologie d'évaluation de la charge de travail spécifique aux magistrats. Il doit livrer en novembre un rapport d’étape de ces travaux faisant un état des consultations effectuées et des pistes suivies. Son rapport définitif est attendu courant 2012.

Cet outil permettra à terme de mieux anticiper et analyser les besoins des juridictions, et de permettre des études prospectives (études d'impact, projections des évolutions futures, calculs de la performance ...).

E.– LES FRAIS DE JUSTICE : UNE DOTATION EN AUGMENTATION MALGRÉ DES MESURES D’ÉCONOMIE

De 2003 à 2005, la dépense de frais de justice a connu une progression de 42,7 %. Les efforts conjugués de l’administration centrale et des juridictions ont permis, en 2006 et 2007, de maîtriser la progression de la dépense en matière de frais de justice. Cependant les dotations en fin d’année sont depuis 2008 insuffisantes dans plusieurs juridictions et reparties à la hausse de manière générale.

Le projet de loi de finances 2011 avait prévu une dotation plus réaliste afin de faire face à l’augmentation des dépenses. Les crédits demandés en loi de finances étaient ainsi passés de 395 à 460 millions d’euros.

La dotation globale prévue pour 2012 est de 470 millions d’euros.

Le tableau suivant présente l’évolution des frais de justice et des crédits de 2005 à 2012.

FRAIS DE JUSTICE : ÉVOLUTION DES CRÉDITS

(en millions d’euros)

Année

2 005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

PLF 2012

Total frais de justice

487,37

379,42

388,62

401,730

432,54

395

460

470

Source : ministère de la Justice.

Si les frais de justice ont eu tendance à diminuer entre 2005 et 2006, ils ont à nouveau progressé depuis 2007.

L’augmentation de la dépense affecte principalement des postes liés à l’action pénale et à la sous-action commerciale. Elle est due pour partie à l’accroissement de l’activité pénale, s’explique également par les réformes suivantes : les revalorisations successives des prestations en matière de frais de justice (examen médical de garde à vue, examen médical des victimes), le développement du recours à l’expertise psychiatrique, que ce soit en début ou en fin de placement, dans le cadre de la loi n° 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté, la revalorisation des honoraires des experts psychiatres et l’application d’un tarif majoré pour les expertises des victimes d’infractions sexuelles par le décret n° 2008-764 du 30 juillet 2008.

La dépense pour les analyses génétiques a progressé de 19,1 % entre 2008 et 2009 et de 11,3 % entre 2009 et 2010. Elle concerne les frais d’analyses effectuées à partir de prélèvements sur individus, les frais d’analyses réalisées à partir de traces biologiques ainsi que les frais de validation de rapprochement entre des profils génétiques. L’augmentation significative de la dépense correspond principalement au développement du recours aux analyses génétiques « traces », particulièrement coûteuses en matière criminelle. La dépense de traduction et d’interprétariat avait progressé de 61,8 % entre 2008 et 2009. Elle a augmenté de 18,2 % en 2010 atteignant un montant de 28,95 millions d’euros. La très forte progression de ce poste de dépense s’explique par les revalorisations tarifaires introduites par le décret n° 2008-764 du 30 juillet 2008 et son arrêté d’application du 2 septembre 2008. En effet, ces textes ont non seulement revalorisé le tarif de l’heure d’interprétariat, mais aussi introduit des majorations pour la première heure d’interprétariat (+ 40 %) et pour les missions de nuit, de week-end et les jours fériés.

Selon le Gouvernement, les services judiciaires vont poursuivre leurs efforts visant à maîtriser l’évolution des dépenses des frais de justice. Pour le ministère, la maîtrise des frais de justice est un objectif majeur à l’heure où la police technique et scientifique et l’expertise jouent un rôle considérable dans l’élucidation des affaires.

Depuis le 1er janvier 2011, un bureau des frais de justice et de l’optimisation de la dépense a été créé au sein de la direction des services judiciaires avec pour objectif d’améliorer le pilotage de ces dépenses. Il a en particulier pour mission de renforcer l’animation du réseau des référents « frais de justice », de densifier le pilotage des projets visant à maîtriser ces dépenses et de diffuser les bonnes pratiques.

Cet objectif est particulièrement prégnant sur les trois actions Traitement et jugement des contentieux civils, Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales et Soutien.

Pour l’action Traitement et jugement des contentieux civils  63,1 millions d'euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement seront consacrés aux frais de justice soit environ 13,4 % de la dotation globale (470 millions d'euros) dédiée à cette dépense. Ces crédits ont été évalués sur la base des évolutions constatées depuis 2008 au titre de la dotation initiale et de la consommation de cette action. Cette évaluation tient également compte d'un certain nombre de facteurs d'évolution de la dépense. Ainsi, le budget 2012 devra notamment supporter le plein effet de la revalorisation tarifaire des enquêtes sociales prévue par le décret n° 2011-54 du 13 janvier 2011.

Les frais de justice relevant de l'action Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales s'élèvent à 325,6 millions d'euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit 69,3 % de l'enveloppe globale. La dotation allouée permettra, notamment, le financement des dépenses induites par les réformes suivantes :

– la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure du 14 mars 2011, dite LOPPSI 2, renforce la lutte contre les délits en matière de conduite en étendant les cas d’immobilisation du véhicule lorsque la peine de confiscation du véhicule est encourue. Ces nouvelles mesures auront un impact sur les frais de justice en matière de frais d’enlèvement et de gardiennage des véhicules, évalués à 17,2 millions d'euros ;

– la mise en œuvre du décret du 17 janvier 2000, correspondant à la part employeur des cotisations sociales des collaborateurs occasionnels du service public de la justice. Elles sont estimées à 30 millions d'euros. Ce dispositif concerne très majoritairement des collaborateurs occasionnels réalisant des prestations relevant de l’activité pénale ;

– la poursuite de la réforme de la médecine légale, qui a pris effet le 15 janvier 2011. Compte tenu des difficultés de mise en œuvre de cette réforme, la dépense devrait augmenter en 2012. Le programme 166 devra par ailleurs financer en 2012 des équipes mobiles destinées à assurer des examens médicaux des gardés à vue dans les locaux des commissariats et des unités de gendarmerie.

L’enveloppe prévue comprend par ailleurs la revalorisation des huissiers de justice audienciers, évaluée à hauteur de 1,96 million d'euros. Enfin, la dotation tient compte de diverses économies escomptées en matière de téléphonie, à hauteur de 6 millions d'euros (révision des tarifs applicables aux opérateurs de communications électroniques).

S’agissant de l'action Cassation, la dotation allouée en 2012 est destinée à financer uniquement les frais de justice, et plus particulièrement les frais postaux liés aux procédures des honoraires d’experts, de médecins ou d’interprètes. L’enveloppe ainsi prévue pour les frais de justice est en diminution de 4,5 % par rapport à 2011. Quant aux dépenses de fonctionnement courant de la Cour de cassation, elles seront désormais exécutées sur l’action Soutien, conformément à la nouvelle architecture budgétaire du programme sous Chorus. Ces dépenses, évaluées à 7,3 millions d'euros, seront en grande partie consacrées aux charges locatives.

S'agissant de l'action Soutien, la dotation prévue pour 2012 connaît une forte baisse de 34,3 % en autorisations d’engagement et une baisse de 2,3 % en crédits de paiement. Cet écart s’explique principalement par l’évolution des autorisations d’engagement, constatée supra, en matière de crédits d’investissement. En matière de frais de justice, les crédits sont évalués à 79,5 millions d'euros. Il est constaté une stagnation de leur évolution en crédits de paiement, ce qui est le résultat des mesures de rationalisation mises en œuvre par les juridictions ces dernières années (développement de la dématérialisation des procédures, diffusion des bonnes pratiques telles que la limitation des envois en recommandés aux cas prévus par les codes, mutualisation des achats en matière postale).

ÉVOLUTION DES PRINCIPAUX POSTES DE DÉPENSE DE FRAIS DE JUSTICE PÉNALE 2006-2010

Nature de dépenses

2006

2007

2008

2009

2010

Évolution 2004/2010

Évolution
2009/2010

Actes médicaux

61 437 081

65 009 964

72 316 996

75 142 389

85 853 670

+ 11,49%

+ 14,3%

Analyses génétiques

20 496 279

16 786 642

17 532 396

20 885 824

23 251 744

– 2,62%

+ 11,3%

Réquisitions opérateurs (hors location matériel)

38 280 064

34 606 456

33 257 430

32 969 588

35 648 139

– 45,95%

+ 8,1%

Traduction interprétariat

13 207 273

14 214 382

15 124 014

24 490 277

28 950 852

+ 107,9%

+ 18,2%

Enquêtes sociales rapides, enquêtes de personnalité, contrôle judiciaire

19 818 320

20 992 261

22 572 027

22 673 132

23 566 003

+ 119,4%

+ 3,9%

Scellés

18 311 214

17 117 247

15 209 950

15 224 404

16 656 009

– 16 %

+ 9,4%

Huissiers de justice

14 345 983

14 517 961

15 065 323

15 276 766

16 335 220

+13,87%

+ 6,9%

F.– LA FORTE RATIONALISATION DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT

Les crédits de fonctionnement courant s’établiront en 2012 à 283,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 292,7 millions d’euros en crédits de paiement, en diminution de 2,5 % en autorisations d’engagement et en légère augmentation de 0,3 % en crédits de paiement par rapport à 2011.

La ressource pour 2012 comprend 4,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et 5 millions d’euros en crédits de paiement au titre de la réforme de la carte judiciaire, correspondant aux coûts des locations provisoires et pérennes nécessaires au relogement des services.

Ce niveau de ressources s’inscrit dans un plan de rationalisation des moyens des services judiciaires et d’optimisation de l’emploi des crédits. Cependant, la couverture des dépenses obligatoires sera assurée dès lors que sera poursuivi l’ajustement de leur périmètre. À cet égard, les cours d’appel ont été invitées à adhérer aux dispositifs d’achats mutualisés existants ou qui seront mis en place, pour obtenir les économies attendues.

En effet, la stabilité des moyens alloués aux services judiciaires est la conséquence des démarches entreprises par les responsables de budgets opérationnels de programme pour amplifier la rationalisation de certaines composantes des dépenses de fonctionnement telles que les fournitures, imprimés, documentation, télécommunications, frais de réception, affranchissement, achat de matériel technique location de matériel et de mobilier. Le renforcement de la politique d’optimisation des achats menée par le secrétariat général et par la direction devra permettre de respecter, hors mesures nouvelles et hors inflation, l’objectif interministériel de contraction des dépenses de fonctionnement de 10 % de ces dépenses dans le cadre de l’exécution du budget pluriannuel 2011-2013.

Cependant, ces démarches se heurtent à certaines limites : ainsi les dépenses de structures (en particulier les postes « fluides » ou « loyers »), qui représentent la moitié des dépenses, ne sont pas susceptibles de dégager des marges de manœuvre supplémentaires. Elles sont en outre sensibles aux augmentations du coût des matières premières ou aux évolutions des indices des prix.

Enfin, les moyens supplémentaires octroyés n’ont pas permis de couvrir l’ensemble des besoins exprimés, en particulier s’agissant des dépenses d’entretien mobilier et immobilier (dépenses considérées comme non obligatoires dans la typologie de la Direction du budget), ce qui oblige les responsables de BOP à reporter les opérations d’entretien.

Depuis 2010, la couverture des dépenses obligatoires n’est pas assurée intégralement et tend à se dégrader. En effet, en 2010, celle-ci s’élevait à 90 % des crédits disponibles, après affectation des crédits de report issus de la gestion 2009 et dégel intégral de la réserve de précaution. En 2011, ce taux s’établissait à 86 % en début de gestion. L’entretien immobilier, en particulier, pâtit gravement de cette situation, tout comme le renouvellement du matériel technique et informatique (vieillissement du parc, alourdissement des charges d’entretien).

G.– LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT

Le budget général prévoit en 2012 une ressource en autorisations d’engagement de 395,2 millions d’euros et de 145 millions d’euros en crédits de paiement hors opérations en partenariat public privé pour la poursuite de la mise à niveau du patrimoine judiciaire et des opérations liées à la réforme de la carte judiciaire et la mise en œuvre de la réforme des jurés populaires. Si l’on comptabilise les opérations en partenariat public privé, les dépenses d’investissement s’élèvent à 780,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et 145 millions d’euros en crédits de paiement.

L’exercice 2012 sera caractérisé d’une part par la poursuite des livraisons des opérations liées à la réforme de la carte judiciaire et d’autre part par la poursuite et les livraisons des opérations de mise à niveau du patrimoine judiciaire. En effet, l’entretien et la maintenance des bâtiments judiciaires restent des priorités afin de maintenir en état le patrimoine immobilier et d’assurer de bonnes conditions de travail aux agents et un accueil satisfaisant aux usagers.

S’agissant du financement du volet immobilier de la réforme de la carte judiciaire, il est de 174,8 millions d'euros en autorisations d’engagement et de 23,9 millions d'euros en crédits de paiement. 30 millions d'euros en autorisations d’engagement et 9,9 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus au titre des opérations liées à l’adaptation des juridictions dans le cadre de la mise en place des jurés populaires.

Les opérations les plus « marquantes » pour 2012 s’élèvent à 385,5 millions d'euros en autorisations d’engagement pour la construction de 3 palais de justice réalisée dans le cadre d’un contrat de partenariat public-privé (PPP) et confiée à l’agence pour l’immobilier de la Justice. Il s’agit de :

– la construction d’un nouveau TGI à Caen (105,2 millions d'euros) ;

– la construction neuve ou réhabilitation à Perpignan (111,9 millions d'euros) ;

– la réhabilitation ou la construction d’un nouveau TGI de Lille (188,4 millions d'euros) ;

Le Rapporteur spécial se félicite de l’absence de mouvement de régulation sur le budget d’équipement du ministère de la Justice et des libertés en 2010 et en 2011, à ce jour.

1.– Les crédits d’investissement hors carte judiciaire

Ont été poursuivies ou lancées en 2011 les actions visant à une remise à niveau du parc immobilier judiciaire : amélioration de la fonctionnalité des locaux, résorption du déficit de surfaces, mise en sûreté, mise aux normes des installations techniques et des systèmes de sécurité incendie, amélioration de l’accessibilité aux personnes handicapées.

L’année 2011 se caractérise également par la mise en œuvre d’un plan en dispositif vidéo : protection et d’anti-intrusion destinées à une meilleure sécurisation des sites et des activités judiciaires. Une enveloppe spécifique de 11,5 millions d'euros est prévue à cet effet sur les exercices 2011 et 2012.

Dans le domaine des opérations de restructuration et de rénovation les plus importantes, ont été livrées en 2011 :

– le tribunal de commerce de Chambéry, le service administratif régional et les services informatiques dans les locaux de l’ancienne trésorerie générale pour un coût global de 3,9 millions d'euros dont 1,6 million d'euros pour l’acquisition. La livraison est intervenue en mai 2011 ;

– le relogement des tribunaux d’instance, de commerce et le conseil de prud’hommes de Montpellier, intervenu en janvier 2011, dans la cité judiciaire « espace Méditerranée ». Le coût de cette opération s’est élevé à 10,23 millions d'euros dont 4,7 millions d'euros pour l’acquisition ;

– le relogement du tribunal d’instance et du conseil de prud’hommes de Digne dans les locaux de l’ancienne trésorerie générale (2 millions d'euros) intervenu fin février 2011

– le regroupement de l’ensemble des juridictions de Tarascon dans l’ancienne caserne Kilmaine, pour un coût total de 10,5 millions d'euros HT, prévu fin 2011.

Ont été poursuivis les travaux de rénovation du palais de justice de Lyon qui abrite la cour d’appel pour un budget de 45,85 millions d'euros (dont 4,8 millions d'euros correspondant aux financements apportés par le Conseil général) et s’achèveront en 2012.

L’année 2012 verra la poursuite des importantes opérations nécessitées par des déficits de surfaces importantes et le mauvais état des bâtiments et confiées à l’APIJ, parmi lesquelles :

– la restructuration des juridictions de Poitiers ;

– la restructuration de la cité judiciaire à Strasbourg ;

– la construction du nouveau TGI de Pointe-à-Pitre ;

– la construction du nouveau PJ de Mont-de-Marsan ;

– la construction du nouveau TGI à Aix-en-Provence – Carnot ;

– la restructuration-extension du TGI-TI de Bobigny ;

– la restructuration-réhabilitation du TGI de Chartres ;

– la construction neuve pour les TI, CPH de Montmorency ;

– la mise aux normes de sécurité et rénovation du palais Monthyon à Marseille ;

– la construction du NPJ de Foix ;

– l’extension-réhabilitation du PJ de Châlon-sur-Saône ;

– l’extension-réhabilitation du PJ de Meaux ;

– la construction neuve pour les CPH et TI de Longjumeau.

2.– Le financement du volet immobilier de la réforme de la carte judiciaire

178,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 28,9 millions d’euros en crédits de aiment ont été inscrits pour financer les mesures liées à la mise en œuvre de la réforme de la carte judiciaire, notamment son volet immobilier. Ces crédits sont en augmentation, s’agissant des autorisations d’engagement, compte tenu de la mise en œuvre opérationnelle des opérations confiées à l’agence publique pour l’immobilier de la justice.

L’année 2011 se traduit donc par la poursuite de 22 opérations provisoires et de 127 opérations pérennes dont les livraisons s’échelonneront jusqu’à 2016 pour celles les plus importantes, dont la construction de nouveaux TGI, ou de nouvelles cités judiciaires.

Parmi ces opérations suivies par l’APIJ, peuvent être citées des constructions neuves de palais de justice (TGI/TC de Bourg-en-Bresse, TGI/TI/TC de Limoges, TGI/TC de Saint-Malo, TGI de Béziers), des restructurations lourdes et/ou extension (TGI de Lons-le-Saunier, TGI/TI de Périgueux, TI de Quimper, TGI-TI de Saint-Brieuc), des acquisitions-restructurations (TGI de Lisieux, TI d’Hagueneau).

3.– Le programme de construction du Tribunal de grande instance de Paris

Après un accord intervenu avec la ville de Paris, il a été décidé de construire le nouveau tribunal sur le site des « Batignolles » dans le 17ème arrondissement de Paris (ZAC Clichy-Batignolles), cette construction s’intégrant dans le cadre de l’aménagement du « Grand Paris ».

Le programme de construction intègre le regroupement sur un seul site des services de l’actuel TGI, actuellement répartis dans neuf lieux parisiens différents, ainsi que de tout ou partie des vingt tribunaux d’instance dont la plupart sont hébergés de manière malcommode dans les mairies d’arrondissement et du tribunal de police.

Les tribunaux seront intégrés dans l’emprise du nouveau TGI, de même que le tribunal de police (actuellement sis dans des immeubles en location) ainsi que le service des nationalités (également en location).

a) La révision du plan local d’urbanisme (PLU) de la Ville de Paris en juillet 2011

En décembre 2009, l’État a acquis directement les terrains nécessaires auprès de la SNCF et de RFF pour un montant total de 81,1 millions d’euros. La vente a été prise en charge pour plus des deux-tiers par la mission Justice et pour le reste par la mission Sécurité. Les dépenses liées à l’acquisition du terrain d’implantation du futur palais de justice sur le site des Batignolles ont été payées directement par le ministère de la Justice sur ses crédits budgétaires.

L’implantation du futur palais de justice de Paris nécessite la modification de la ZAC de Clichy-Batignolles ainsi qu’une révision simplifiée du Plan Local d’Urbanisme (PLU) de la Ville de Paris. Dans ce cadre, une concertation active avec les habitants du quartier a été engagée par l’aménageur de la ZAC, dans laquelle l’EPPJP est fortement impliqué.

La procédure de révision simplifiée s’est concrétisée début juillet 2011 par une délibération du conseil de Paris approuvant les dispositions permettant la réalisation du futur palais de justice. Le point le plus significatif de cette révision est le déplafonnement de la hauteur maximale de construction à 160 mètres de l’emprise affectée au projet.

b) Le choix d’un partenariat public privé

Le décret n° 2004-161 du 18 février 2004 portant création de l’Établissement public du palais de justice de Paris a été modifié par le décret n° 2010-43 du 12 janvier 2010 pour permettre à l’établissement de conclure un contrat de PPP.

Après avoir recueilli, début 2010, l’avis favorable de la Mission d’appui à la réalisation des contrats de partenariat sur le projet de construction du futur palais de justice en partenariat public privé, puis celui du conseil d’administration de l’EPPJP et des autorités de tutelle, l’établissement public a engagé en juin 2010 la procédure de consultation en vue de l’attribution du contrat de partenariat.

La procédure de dialogue compétitif engagée mi-2010, se poursuit en 2011. Pour mémoire, deux groupements avaient été sélectionnés avec trois architectes ou groupements d’architectes chacun.

Les architectes associés au groupement Vinci étaient l’agence Marc Mimram/Loci Anima (Françoise Raynaud), l’agence OMA (Rem Koolhaas)/AUC (Djamel Klouche), et l’atelier Christian de Portzamparc/Agence Anne Demians. Ceux associés au groupement Bouygues Bâtiment Île-de-France étaient Architecture Studio, Atelier Renzo Piano, et Valode & Pistre.

Lors de la première phase de dialogue, le conseil d’administration de l’établissement public réuni le 1er mars 2011 a retenu à l’unanimité le projet de Renzo Piano pour le groupement Bouygues Bâtiment Île-de-France et le projet de Marc Mimram/Loci Anima (Françoise Raynaud) pour le groupement Vinci.

Le dialogue compétitif s’est poursuivi tout au long de l’année 2011. La signature du contrat devrait intervenir d’ici mars 2012. Le nouveau palais de justice de Paris pourrait être livré fin 2015.

IV.– L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

A.– LES RÉPONSES AUX DÉFIS DE LA POLITIQUE PÉNITIENCIAIRE

Alors que le programme de construction « 13 200 » s’achève, les préconisations de la révision générale des politiques publiques (RGPP) ont conduit le ministère à prévoir l’engagement d’un nouveau programme de construction. Le garde des Sceaux a lancé le 28 juillet 2010 un nouveau programme immobilier (NPI) de 14 000 places de détention qui va être lancé en 2011, prévoyant 5 000 places nouvelles et 9 000 places remplaçant des places existantes dans des établissements vétustes qui seront fermés progressivement. Enfin, le Président de la République a annoncé le 13 septembre 2011 l’objectif de 80 000 places de prison à l’horizon 2017.

L’administration pénitentiaire a été confrontée à trois défis qu’elle est en train de relever : la forte augmentation de la population carcérale qui a doublé depuis 1980, parc pénitentiaire sous dimensionné et dégradé, et le renforcement des normes européennes sur l’humanisation des prisons.

Le Conseil de l’Europe a joué un rôle marquant dans l’élaboration et la diffusion de 108 règles pénitentiaires européennes (RPE) en 2006, non opposables aux États mais devenues un guide permettant d’orienter les politiques pénitentiaires nationales. La pression du Conseil de l’Europe a incontestablement contribué à accélérer les programmes immobiliers de la justice, pour lesquels le secteur privé a été de plus en plus sollicité.

L’Administration pénitentiaire s’est ainsi engagée dans une démarche de labellisation des établissements pénitentiaires au regard des normes européennes. Il s’agit de généraliser à l’ensemble des établissements d’une démarche qualité, validée par une labellisation AFNOR des quartiers arrivants, et qui porte sur 8 des 108 règles européennes. Mais cette démarche est une entreprise difficile, comme le révèle la démission collective en décembre 2010 des douze membres de la « commission RPE » composée de magistrats, d’universitaires et d’associatifs, que l’administration pénitentiaire avait créée, et qui n’a pas été remplacée en 2011.

À ce titre, 83 établissements ont, au 1er août 2011, obtenu un label qualité délivré par AFNOR Certification ou Bureau Véritas, qui sanctionne leur respect d’une vingtaine de règles pénitentiaires européennes, relatives à la prise en charge et à l’accompagnement de la personne détenue durant la phase d’accueil. Cette démarche de labellisation, mise en place afin de valoriser la qualité des pratiques professionnelles, permet une reconnaissance publique de l’action engagée par la DAP.

Certaines règles européennes semblent encore inatteignables en ce qui concerne le parc pénitentiaire le plus vétuste, et dans un contexte de forte augmentation de la population carcérale, en particulier dans les maisons d’arrêt. Il en est ainsi de la règle 18 qui prévoit que chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle ou la règle 12.1 qui prévoit que les personnes souffrant de maladies mentales et dont l’état de santé mentale est incompatible avec la détention en prison (on estime à 25 % la proportion de détenus souffrant de troubles psychotiques graves).

Le projet de budget du programme pour l’année 2012 s’élève à 4,727 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 3 ,030 milliards d’euros en crédits de paiement.

LES CINQ ORIENTATIONS MAJEURES DE LA LOI PÉNITENTIAIRE
N° 2009-1436 DU 24 NOVEMBRE 2009

1) Clarifier et actualiser les missions du service public pénitentiaire et les conditions de son exercice, en distinguant celles relevant de la compétence propre de l’administration pénitentiaire de celles nécessitant le concours d’autres partenaires publics ou privés.

La mission générale du service public pénitentiaire est l'exécution des décisions privatives de liberté et de certaines décisions restrictives de liberté. En affirmant que le service public pénitentiaire comprend les missions de surveillance et de réinsertion des personnes sous main de justice, la loi dépasse l’antagonisme entre ces notions et l'opposition entre milieu fermé et milieu ouvert, en articulant les fonctions du surveillant et celles du personnel d’insertion et de probation. Il rend compte de la participation du service public pénitentiaire au maintien de la sécurité publique, à la lutte contre la récidive, à la protection des intérêts des victimes et de la société.

2) Améliorer la reconnaissance des personnels par ses dispositions sur les conditions d’exercice de leurs missions et en créant une réserve civile pénitentiaire. La loi enrichit et valorise leurs fonctions, renforce leur autorité, et élargit leur protection dès lors qu’ils exercent des missions de sécurité publique dans des conditions difficiles, au contact d’une population de plus en plus dépourvue de repères.

L’évolution des missions de l’institution pénitentiaire et son ouverture sur l’extérieur confrontent les personnels à des exigences perçues comme contradictoires, de sécurité et de réinsertion. La nécessité de repères professionnels lisibles et communs à tous et d’une meilleure assistance des personnels, liée à leur mission, justifie les dispositions qui leur sont consacrées, qui prévoient notamment la création d’un code de déontologie et une prestation de serment. Ces dispositions législatives ont abouti à l’adoption du décret n° 2010-1711 du 30 décembre 2010 portant code de déontologie du service public pénitentiaire et du décret n° 2011-740 du 27 juin 2011 fixant les modalités de mise en œuvre de la réserve civile pénitentiaire

3) Régir la condition juridique de la personne détenue dans l’exercice de ses droits, en consacrant ce principe que la personne détenue conserve le bénéfice de ceux-ci : exercice des droits civiques, accès au droit avec la possibilité de se domicilier à l’établissement, droit à l’insertion et au travail et création d’un acte d’engagement, droit à la formation professionnelle et expérimentation de son transfert aux régions, respect de la vie privée et familiale et notamment généralisation de l’accès au téléphone, droit à la santé, accès aux moyens d’information, à la culture et au sport.

Le détenu ne perd pas sa qualité de citoyen et la loi, en application de l’article 34 de la Constitution, limite les restrictions à l’exercice des droits aux seules contraintes inhérentes à la détention, au bon ordre et à la sécurité de l’établissement pénitentiaire, à la protection de l’intérêt des victimes ou à la prévention de la récidive.

Les deux décrets du 23 décembre 2010 (décret n° 2010-1634 et n° 2010-1635) ont rendu applicables les principales dispositions de la loi pénitentiaire relatives aux droits des personnes détenues.

4) Améliorer la prévention de la récidive et l’insertion des personnes prévenues ou condamnées, en limitant le recours à l’incarcération pour lui substituer des mesures en milieu ouvert conciliant l’exigence de répression et celles d’humanité et d’efficacité.

La loi favorise le recours aux aménagements des peines privatives de liberté ou aux peines alternatives à l’emprisonnement, et les alternatives à la détention provisoire :

– en affirmant que l’emprisonnement ferme ne doit être prononcé qu’en dernier recours, lorsque toute autre sanction serait inadéquate, et qu’il doit si possible être aménagé,

– en étendant les possibilités d’aménagement ab initio par l’élargissement des critères de recours à ces mesures par la référence à la notion de projet sérieux d’insertion ou de réinsertion, et en portant de 1 à 2 ans la durée des peines pouvant faire l’objet de ces mesures, sauf pour les délinquants sexuels et les récidivistes,

– en favorisant par plusieurs dispositions le recours à la peine de travail d’intérêt général,

– en instituant l’assignation à résidence avec surveillance électronique, nouvelle alternative à la détention provisoire, qui permet une surveillance plus efficace que le contrôle judiciaire, et sera, comme la détention provisoire, imputée sur une peine privative de liberté,

– en modifiant les règles des aménagements de peines afin d’une part d’en renforcer les possibilités, et d’autre part de simplifier les modalités procédurales de leur prononcé, en permettant le prononcé des mesures sans débat contradictoire,

– en instaurant, s’agissant des personnes détenues, une modalité d’exécution de fin de peine sous surveillance électronique.

5) Renforcer la sécurité juridique en élevant au niveau législatif les principes fondamentaux relatifs aux régimes de détention :

– en modifiant les conditions dans lesquelles certains condamnés peuvent être maintenus en maison d’arrêt,

– en améliorant les critères de répartition des condamnés dans les établissements pour peines et de leur prise en charge par renvoi aux notions de parcours d’exécution de peine et de régimes de détention différents, fondées notamment sur le comportement et la dangerosité des détenus.

B.– LA PERFORMANCE DE L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

L’administration pénitentiaire a apporté les modifications suivantes à deux indicateurs dans le projet annuel de performance 2012 :

– indicateur 1.3 relatif au taux de formation à la prévention suicide : le premier sous-indicateur du Pourcentage de personnes formées « Terra » (formation initiale et formation complémentaire) par corps, grade et établissement devient Pourcentage de personnels formés Terra et le second sous-indicateur Pourcentage de personnels de surveillance formés Terra par corps, grade et secteur d’intervention sensible devient Pourcentage de personnels de surveillance formés Terra.

Le libellé devient ainsi plus conforme à la présentation d’une donnée unique par sous-indicateur. Par ailleurs, pour le second sous-indicateur il n’était pas possible d’identifier les personnels de surveillance intervenant dans les secteurs sensibles. En effet, l’organisation interne des petits établissements pénitentiaires ne permet pas d’avoir une équipe uniquement dédiée aux quartiers sensibles ;

– indicateur 4.2 Améliorer l’accès aux soins. Il a été complété d’un sous-indicateur Taux d’occupation des UHSA (unités hospitalières spécialement aménagées) différencié dorénavant du taux d’occupation des UHSI (unités hospitalières sécurisées interrégionales).

Les UHSI ont une compétence médicochirurgicale et ont vocation à réaliser les hospitalisations programmées de plus de 48 heures. Les UHSA accueillent les personnes détenues atteintes de troubles mentaux. La création des UHSA constitue une avancée considérable au regard de l’accès aux soins en hospitalisation psychiatrique : les malades détenus sont accueillis au sein de services disposant de moyens sanitaires adaptés, les hospitalisations ont lieu dans des unités hospitalières désormais sécurisées.

La volonté de l’administration pénitentiaire de garantir un haut niveau de qualité de la prise en charge des personnes détenues arrivant s’avère être une stratégie particulièrement pertinente. Un nouvel indicateur (4.3) du projet annuel de performances du programme 107 porte ainsi sur le taux d’établissements pénitentiaires labellisés dans le cadre du processus de « prise en charge et accompagnement des personnes détenues ».

L’indicateur, qui concerne la mise en œuvre d’une vingtaine de règles pénitentiaires européennes revêt un caractère qualitatif qui permet de mesurer la performance des établissements pénitentiaires.

Il convient d’ajouter que l’acuité de cet indicateur demeurera dans la mesure où la labellisation est un processus devant être reconduit annuellement.

Le Rapporteur spécial approuve ces modifications qui renforcent la précision de la mesure de la performance.

C.– LA PROGRESSION DES CRÉDITS

Les crédits du programme 107 inscrits dans le présent projet de loi de finances s’élèvent à 4 727,5 millions d'euros en autorisations d’engagement et 3 030,3 millions d'euros en crédits de paiement, dont 2 847,7 millions d'euros d’autorisations d’engagement et 1 150,5 millions d'euros de crédits de paiement pour les crédits hors titre 2 et 1 879,8 millions d'euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour les crédits du titre 2.

Les crédits de paiement augmentent de 3,9 % pour le titre 2 et de 13,7 % pour le hors titre 2 par rapport à ceux inscrits dans la loi de finances initiale pour 2011.

1.– L’action 1 Garde et contrôle des personnes sous main de justice

CRÉDITS DE L’ACTION 1

(en euros)

Action 1

LFI 2011

PLF 2012

Titre 2

Hors titre 2

Titre 2

Hors titre 2

AE et CP

AE

CP

AE et CP

AE

CP

01 Garde et contrôle des PPSMJ

1 273 061 959

977 676 609

373 315 859

1 337 722 744

2 392 400 000

505 903 948

L’action 1 Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice obtiendra 1,479 milliard d’euros supplémentaires en autorisations d’engagement et 197,3 millions d’euros en crédits de paiement pour la poursuite des programmes de construction immobilière. L’augmentation des crédits de personnel permet la prise en compte financière de l’impact du schéma d’emploi et de l’augmentation du taux du CAS Pensions.

 Personnel : Les crédits de paiement du titre 2 de l’action 1 inscrits dans le projet de loi de finances 2012 sont en augmentation de 64,66 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale 2011. Cette évolution permet la prise en compte financière de l’impact du schéma d’emploi et de l’augmentation du taux du CAS Pensions.

L’augmentation des crédits sur cette action est également liée aux transferts de crédits en provenance du programme 176 Police nationale et du programme 152 Gendarmerie pour la mise en œuvre des mesures d’extractions judiciaires. Le montant de ces transferts hors CAS Pensions s’élève à 7,03 millions d'euros et à 12,31 millions d'euros CAS Pensions inclus.

Par ailleurs, l’augmentation des crédits permet le financement des mesures catégorielles celles déjà engagées et des nouvelles.

Les mesures catégorielles déjà engagées

Le programme Administration pénitentiaire financera l’incidence des mesures déjà engagées en 2011 : l’effet extension année pleine du reclassement des secrétaires administratifs dans le nouvel espace statutaire des catégories B pour un montant de 0,07 million d'euros hors CAS Pensions  et de l’intégration des surveillants de Mayotte dans les corps de la fonction publique d’État pour un montant de 0,01 million d'euros hors CAS Pensions  et la prime de fonctions et de résultats des secrétaires administratifs pour un montant de 0,07 million d'euros.

Les mesures catégorielles nouvelles en 2012 sont la réforme statutaire de la filière des personnels d’insertion et de probation pour un montant de 0,68 million d'euros hors CAS Pensions , la revalorisation du statut des directeurs des services pénitentiaires et de la prime de sujétions spéciales des directeurs techniques pour un montant de 0,12 million d'euros hors CAS Pensions , la réforme indemnitaire de la filière des personnels d’insertion et de probation (2ème tranche) pour un montant de 0,15 million d'euros hors CAS Pensions et  la prime de fonctions et de résultats des attachés pour un montant de 0,02 million d'euros.

 Les crédits hors titre 2 de l’action 1 passent de 997,6 millions d'euros en autorisations d’engagement et 373,3 millions d'euros en crédits de paiement en loi de finances initiale 2011 à 2 392,4 millions d'euros en autorisations d’engagement et 505,9 millions d'euros en crédits de paiement en projet de loi de finances 2012.

Cette évolution des crédits permet quatre types de dépenses :

– la mise en œuvre du nouveau programme immobilier (NPI) qui se traduira par la construction de 25 établissements associée à la fermeture de 36 établissements, permettant ainsi à l’administration pénitentiaire de disposer, au terme du NPI, de 70 000 places de détention. Cette priorité est pour l’instant sans incidence en crédits de paiement, mais mobilise 1 852 millions d'euros d’autorisations d’engagement en 2012 ;

– la poursuite des investissements immobiliers nécessaires à l’entretien du gros œuvre, à la sécurisation des établissements, aux travaux de rénovation et de réhabilitation des établissements. Ces investissements mobiliseront 339 millions d'euros de crédits de paiement en 2012 contre 251,2 millions d'euros en 2011.

– le respect par l’administration pénitentiaire des engagements pris dans le cadre de partenariats public-privé. Les loyers dont est redevable l’administration pénitentiaire à ce titre passent de 80 millions d'euros en 2011 à 114 millions d'euros en crédits de paiement en 2012, du fait notamment de l’ouverture d’un établissement à Nantes ;

– le développement des aménagements de peine, et notamment du placement sous surveillance électronique qui devrait concerner près de 12 000 personnes en 2012. Au total, les crédits consacrés aux aménagements de peine passent de 24,5 millions d'euros à 31,1 millions d'euros en AE=CP.

2.– L’action 2 accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice

CRÉDITS DE L’ACTION 2

(en euros)

Numéro et intitulé de l’action

LFI 2011

PLF 2012

T2

HT2

T2

HT2

AE et CP

AE

CP

AE et CP

AE

CP

02 Accueil et accompagnement des PPSMJ

358 764 882

294 101 500

461 001 500

367 078 829

367 940 000

557 192 997

L’action 2 Accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice verra une augmentation de 121 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 48 millions en crédits de paiement, destinés aux dépenses d’entretien et de réinsertion, ainsi que les versements aux contractants de la gestion déléguée.

 Personnel : Les crédits de paiement demandés au titre 2 de l’action 2 inscrits dans le projet de loi de finances 2012 sont en augmentation de 8,31 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale 2011. Cette évolution permet la prise en compte financière de l’impact du schéma d’emploi et de l’augmentation du taux du CAS Pensions.

Par ailleurs, l’augmentation des crédits permet le financement des mesures catégorielles. D’une part, ces crédits permettront le financement des extensions en année pleine des mesures intervenues en 2011 : le reclassement des secrétaires administratifs dans le nouvel espace statutaire des catégories B pour un montant de 0,41 million d'euros hors CAS Pensions, l’intégration des surveillants de Mayotte dans les corps de la fonction publique d’État pour un montant de 0,02 million d'euros hors CAS Pensions, et la prime de fonctions et de résultats des secrétaires administratifs pour un montant de 0,38 million d'euros.

D’autre part, cette enveloppe permettra de financer les mesures statutaires et indemnitaires dont la mise en œuvre est prévue en 2012 :

– la réforme statutaire de la filière des personnels d’insertion et de probation pour un montant de 1,65 million d'euros hors CAS Pensions ;

– revalorisation du statut des directeurs des services pénitentiaires pour un montant de 0,21 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la réforme indemnitaire de la filière des personnels d’insertion et de probation pour un montant de 0,37 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la mise en œuvre de la prime de fonctions et de résultats des conseillers d’administration et des attachés pour un montant de 0,04 million d'euros ;

– l’augmentation d’un point de la prime de sujétions spéciales des directeurs techniques pour un montant de 0,07 million d'euros hors CAS Pensions.

Le programme financera l’incidence des mesures catégorielles déjà engagées en 2011 : l’effet extension année pleine du reclassement des secrétaires administratifs dans le nouvel espace statutaire des catégories B pour un montant de 0,16 million d'euros hors CAS Pensions , de l’intégration des surveillants de Mayotte dans les corps de la fonction publique d’État pour un montant de 0,001 million d'euros hors CAS Pensions  et la prime de fonctions et de résultats des secrétaires administratifs pour un montant de 0,15 million d'euros.

Les mesures nouvelles suivantes sont également mises en œuvre en 2012 :

– la réforme statutaire de la filière des personnels d’insertion et de probation pour un montant de 0,92 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la revalorisation du statut des directeurs des services pénitentiaires et de la prime de sujétions spéciales des directeurs techniques pour un montant de 0,1 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la réforme indemnitaire de la filière des personnels d’insertion et de probation (2ème tranche) pour un montant de 0,21 million d'euros hors CAS Pensions ;

– financement de la prime de fonctions et de résultats des attachés pour un montant de 0,01 million d'euros.

 Les crédits hors titre 2 de l’action 2 passent de 294,1 millions d'euros en autorisations d’engagement et 461 millions d'euros en crédits de paiement en loi de finances initiale 2011 à 367,9 millions d'euros en autorisations d’engagement et 557,2 millions d'euros en crédits de paiement en projet de loi de finances 2012.

Cette évolution des crédits doit notamment permettre d’assurer le fonctionnement des établissements en gestion publique dans un contexte d’augmentation de la population pénale. 127,5 millions d'euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sont mobilisés à ce titre en 2012. La comparaison avec les crédits mobilisés à ce titre sur cette action en 2011 n’est pas possible en raison des modifications de périmètre qui ont conduit à inscrire les dépenses de fonctionnement des établissements sur l’action 2 alors qu’elles étaient essentiellement imputées sur l’action 4 en 2011 ;

Le respect par l’administration pénitentiaire des engagements pris dans le cadre de l’externalisation de la gestion de certains établissements pénitentiaires. Les crédits consacrés à la gestion déléguée passent de 291 millions d'euros en 2011 à 294,7 millions d'euros en 2012 (en crédits de paiement). Cela permet notamment de regrouper le fonctionnement des services bâtimentaires de certains établissements outre-mer (principalement entretien-maintenance, maintien en propreté, gestion des déchets et espaces verts, contrôles légaux) dans un marché de gestion déléguée qui devrait commencer à partir du 2ème trimestre 2012.

La poursuite des actions permettant la réinsertion des personnes placées sous main de justice. Le poste consacré à la rémunération du travail au service général des établissements en gestion publique est notamment en augmentation de 5,4 millions d'euros entre 2011 et 2012 afin de caler une dotation plus conforme à la réalité de la dépense.

3.– L’action 4 Soutien et formation

CRÉDITS DE L’ACTION 4

(en euros)

Numéro et intitulé de l’action

LFI 2011

PLF 2012

T2

HT2

T2

HT2

AE et CP

AE

CP

AE et CP

AE

CP

04 Soutien et formation

178 001 758

198 409 288

177 645 963

175 009 506

87 407 301

87 407 301

L’action 4 Soutien et formation voit ses crédits baisser de 4 % en lien avec les économies dans la gestion du personnel et le pilotage des services.

 Les crédits de paiement demandés sur le titre 2 de l’action 4 inscrits dans le projet de loi de finances 2012 sont en diminution de 2,99 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale 2011. Cette évolution inclut la prise en compte financière de l’impact du schéma d’emploi et de l’augmentation du taux du CAS Pensions.

La baisse des crédits sur cette action est également liée aux transferts de crédits au profit du programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la Justice » pour un montant de – 5,16 millions d'euros hors CAS Pensions et
– 7,41 millions d'euros CAS Pensions inclus dans le cadre de la création de six plateformes inter-directionnelles de service du ministère de la Justice.

Par ailleurs, des mesures catégorielles sont financées au titre de cette action.

Les mesures catégorielles déjà engagées

Le programme financera l’incidence des mesures déjà engagées en 2011 : l’effet extension année pleine du reclassement des secrétaires administratifs dans le nouvel espace statutaire des catégories B pour un montant de 0,18 million d'euros hors CAS Pensions et la prime de fonctions et de résultats des secrétaires administratifs pour un montant de 0,17 million d'euros.

Les mesures catégorielles nouvelles

Les mesures catégorielles nouvelles sont mises en œuvre en 2012 :

– la réforme statutaire de la filière des personnels d’insertion et de probation pour un montant de 0,05 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la revalorisation du statut des directeurs des services pénitentiaires et de la prime de sujétions spéciales des directeurs techniques pour un montant de 0,07 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la réforme indemnitaire de la filière des personnels d’insertion et de probation (2ème tranche) pour un montant de 0,01 million d'euros hors CAS Pensions ;

– la prime de fonctions et de résultats des attachés pour un montant de 0,009 million d'euros.

 Les crédits hors titre 2 de l’action 4 passent de 198,4 millions d'euros en autorisations d’engagement et 177,6 millions d'euros en crédits de paiement en loi de finances initiale 2011 à 87,4 millions d'euros en AE=CP en PLF 2012.

Cette diminution des crédits s’explique essentiellement par la mesure de périmètre évoquée plus haut qui a conduit à redéployer une partie des crédits de fonctionnement des établissements en gestion publique sur l’action 2 du programme.

Les priorités de l’administration pénitentiaire concernant l’action 4 sont d’une part, la reprise par l’administration pénitentiaire des missions liées aux extractions judiciaires, auparavant assurées par le ministère de l’Intérieur : 3,5 millions d'euros en AE=CP sont prévus à ce titre et d’autre part, le financement du nouveau marché national de télévision dont l’objet est d’assurer un tarif unique de location d’un poste de télévision associé à la gratuité du bouquet de chaînes payantes pour les détenus.

D.– DES CRÉATIONS D’EMPLOIS

RÉPARTITION PRÉVISIONNELLE (2012) DU PLAFOND D’AUTORISATION D’EMPLOIS DU PROGRAMME ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE PAR ACTION ET PAR CATÉGORIE

 

Catégories d’emplois

Programme n° 107 :
Administration pénitentiaire

Nombre d’ETPT

Catégorie 1 magistrats

Catégorie A et A+ : personnels encadrement

Catégorie B+ : (greffe, insertion, éducation)

Catégorie B type : secrétaires et techniques

Catégorie C : personnels de surveillance

Catégorie C type : personnel administratif et technique

Total programme

35 511

17

1 391

4 131

1 019

26 033

2 920

Action 01 : garde et contrôle des PPSMJ

25 627

583

1 691

179

22 658

516

Action 02 :
accueil et accompagnement des PPSMJ

6 636

480

2 307

410

2 331

1 108

Action 04 : soutien et formation

3 248

17

328

133

430

1 044

1 296

À périmètre courant, incluant les transferts externes et internes, le plafond d’autorisation d’emplois alloué pour 2012 s’élève à 35 511 ETPT, soit une augmentation de 454 par rapport au plafond autorisé en 2011.

À périmètre constant, le plafond d’autorisation d’emploi 2012 est de 35 409 ETPT déterminé comme suit :

– 207 ETPT supplémentaires au titre de l’extension en année pleine de 2011 sur 2012 ;

– 145 ETPT supplémentaires au titre des créations d’emplois en 2012.

Une enveloppe de 4,75 millions d’euros hors CAS Pensions est prévue pour les mesures catégorielles. Les mesures les plus importantes sont les mesures statutaires : la réforme statutaire de la filière des personnels d’insertion et de probation pour un montant de 1,64 million d’euros et la revalorisation du statut des directeurs des services pénitentiaires. Cette enveloppe inclut un effet extension année pleine des mesures engagées en 2011 sur 2012 notamment pour e reclassement des secrétaires administratifs dans le nouvel espace statutaire des catégories B.

Le présent projet de loi de finances comprend pour le programme de l’administration pénitentiaire un total de 290 créations d’emplois dans le cadre des mesures nouvelles correspondant à l’armement de la nouvelle maison centrale de Condé sur Sarthe, la mise en œuvre du dispositif d’accroissement de capacité (DAC) de la maison d’arrêt de Bonneville, et à l’ouverture de l’unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) de Paris/Villejuif.

E.– LA POURSUITE DE LA RÉNOVATION DU PARC PÉNITENTIAIRE 

Après le pic de densité carcérale observé en 2008 (densité la plus forte jamais connue depuis 1997), on peut noter une diminution en 2009 et une véritable amélioration en 2010, explicable à la fois par l’aboutissement d’un certain nombre de constructions pénitentiaires et par la progression des alternatives à l’incarcération.

Le tableau suivant montre la progression des capacités des établissements, et l’évolution du taux d’occupation.

EFFECTIFS, CAPACITÉ ET DENSITÉ DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES (MÉTROPOLE ET OUTRE-MER)

au 1er janvier

Capacité

théorique

Détenus hébergés

Capacité opérationnelle

Densité carcérale
(%) 

1998

49 810

53 845

49 619

108,5

1999

50 014

52 961

49 549

106,9

2000

49 797

51 441

49 294

104,4

2001

49 043

47 837

48 593

98,4

2002

48 669

48 594

48 021

101,2

2003

48 476

55 407

47 987

115,5

2004

49 258

59 246

48 605

121,9

2005

50 717

58 231

50 094

116,2

2006

51 854

58 344

51 252

113,8

2007

51 076

58 402

50 588

115,4

2008

51 489

61 076

50 693

120,5

2009

52 843

62 252

51 997

119,7

2010

55 760

60 978

54 988

110,9

Source : Effectifs : statistiques trimestrielle, Capacité : EMSI.

Le nombre de détenus a été multiplié par 2,5 entre 1975 et 2011, passant de 26 332 à 64 971.

Un tel phénomène s’explique par l’accroissement global du nombre de condamnations à des peines d’emprisonnement ferme et a débouché sur une surpopulation carcérale.

Malgré une nette augmentation du nombre de places de détention depuis la mise en œuvre de trois programmes immobiliers à partir de 1990 (programme 13 000 places « Chalandon », programme 4 000 places « Méhaignerie », programme 13 200 « LOPSI »), il n’y a que 56 358 places opérationnelles pour 64 971 détenus soit un taux d’occupation moyen dans les établissements pénitentiaires de 115,3 % au 1er juin 2011.

À l’issue du programme de la LOPJ (dit « 13 200 »), en 2015, le nombre de places sera de 64 000. Le Président de la République a annoncé une montée en charge plus importante du Nouveau programme immobilier lancé en 2009, avec un objectif de 80 000 places de prison à l’horizon 2017.

Le programme en cours comporte trois types d’opération : fermetures, rénovations et ouvertures d’établissements.

Au 1er janvier 2011, il existe 189 établissements, répartis en plusieurs catégories selon les personnes incarcérées et le régime de détention appliqué (prévenus ou détenus) :

– 101 maisons d’arrêt, qui accueillent théoriquement les prévenus et les détenus dont le reliquat de peine au moment du jugement est inférieur à un an ;

– 82 établissements pour peine, dont :

– 6 maisons centrales ou les dispositifs de sécurité sont renforcés et reçoivent les condamnés les plus difficiles, souvent condamnés à de longues peines ;

– 25 centres de détention qui n’accueillent en théorie que des détenus dont la peine est supérieure ou égale à un an ;

– 11 centres de semi-liberté ou quartiers de semi-liberté situés dans les centres pénitentiaires ;

– 40 centres pénitentiaires, établissements mixtes comprenant au moins deux quartiers, avec des régimes de détention différents.

– 6 établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) réservés à l’accueil des détenus mineurs de 13 à 18 ans.

Au 1er avril 2011, le parc pénitentiaire comptait 56 150 places, soit une hausse de 10,9 % de la capacité opérationnelle de ce parc en trois ans. Entre 1990 et 2011, cette capacité a augmenté de 53 %. Outre l’autre l’augmentation de la capacité carcérale, les trois programmes de construction initiés depuis 1990 ont très largement contribué à moderniser le parc pénitentiaire français. En 2011, 58 établissements correspondant à 31 831 places de détention ont ainsi moins de trente ans, soit 55 % de la capacité carcérale.

1.– Les ouvertures récentes d’établissement

En 2010, ont été ouverts quatre nouveaux établissements, tous centres pénitentiaires (Rennes, Le Havre, Bourg en Bresse et Le Mans).

En 2011, deux établissements ont été ouverts : le centre de détention d’Île-de-France-Réau et le centre pénitentiaire de Lille-Annœullin ; ainsi que trois quartiers de semi-liberté à Bordeaux-Gradignan, Avignon et Aix-Luynes.

2.– Un nouveau programme immobilier ambitieux : le NPI

Le plan de restructuration du parc immobilier pénitentiaire, annoncé par le garde des Sceaux le 28 juillet 2010, vise à assurer des conditions dignes de détention, en conformité avec les règles pénitentiaires européennes, et à garantir la mise en œuvre des prescriptions de la loi pénitentiaire adoptée en novembre 2009 par le Parlement. Il augmentera les capacités d’hébergement de l’administration pénitentiaire dans le but d’améliorer le taux de mise à exécution des peines d’emprisonnement prononcées par les juridictions pénales et d’assurer l’encellulement individuel des détenus.

La construction de 23 nouveaux établissements (dont 2 en outre mer) est prévue, ainsi que la réhabilitation de la maison d’arrêt de Paris la Santé (MAPLS), du centre pénitentiaire de Nouméa ainsi que l’extension du centre pénitentiaire de Ducos.

20 établissements se feront en mode PPP, avec en plus l’établissement d’Aix, soit 21 établissements en PPP pour un total de 11 930 places.

Au terme du programme en 2017, 14 000 nouvelles places remplaceront 9 000 places vétustes. La France sera alors dotée de plus de 68 000 places de prison, dont plus de la moitié aura été ouverte après 1990.

À l’issue d’un examen approfondi de l’ensemble du parc immobilier, le choix des établissements à fermer a été dicté par leur vétusté, leur inadaptation fonctionnelle, sauf à engager d’importants travaux de restructuration, et par l'impossibilité de mettre en œuvre les prescriptions de la loi pénitentiaire et des règles pénitentiaires européennes.

La fermeture de 45 sites a été annoncée. Sept établissements (950 places) sont maintenus sous condition soit d’un plan de rénovation à négocier avec les collectivités locales (Clairvaux, Bar-le-Duc, Poissy), soit dans l’attente d’une expertise complémentaire sur le coût de mise aux normes (Versailles, Château-Thierry, Laval et Vesoul).

La fermeture de la plupart de ces établissements devrait intervenir entre 2015 et 2017 avec toutefois des fermetures antérieures pour certaines maisons d’arrêt. L’allotissement et la planification de la livraison des nouveaux établissements ne sont pour l’instant pas arbitrés.

De nouveaux établissements pour le NPI : les établissements à réinsertion active (ERA)

Ce nouveau concept d’établissement doit respecter les principes suivants :

– application des régimes différenciés consacrés par la loi (régime de détention adapté à la personnalité du détenu) avec des quartiers mode ouvert et mode fermé ;

– encellulement individuel : le taux d’encellulement individuel sera de 95 % et la taille des cellules sera fixée à 8,5 m2, ce qui rend impossible le doublement ;

– développement des activités : l’objectif est de proposer 5 heures d’activité par jour à chaque détenu ;

– maintien des liens familiaux : chaque établissement se verra doté d’unités de vie familiale et/ou de parloirs familiaux, ce qui permettra à chaque détenu de bénéficier d’un parloir de ce type par trimestre comme le prévoit la loi ;

– développement des UCSA pour la prise en charge des détenus présentant des troubles mentaux ;

– prise en compte des retours d’expérience du programme 13 200 : « humanisation » des prisons, lutte contre le caractère anxiogène, fiabilisation des installations de sûreté active…

L’enveloppe globale du nouveau programme immobilier, pour l’ensemble des lots prévus, a été arrêtée une seconde fois en juin 2011 par la direction de l’administration pénitentiaire (DAP), à un montant global de 5, 83 milliards d’euros. Les crédits de paiement n’ont pas été budgétés pour les années du triennal 2011-2013, car les décaissements ne commenceront qu’en 2015. Les dotations en autorisations d’engagement ont été inscrites comme le présente le tableau suivant après.

NOUVEAU PROGRAMME IMMOBILIER : INVESTISSEMENTS SUR 2011-2014

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

Autorisations d’engagement

491

1 852

2 878

614

Source : ministère de la Justice et des libertés.

Le besoin total en autorisations d’engagement sur le NPI sera donc de 5,835 milliards d’euros, soit une augmentation de 411 millions d’euros (+ 7,6 %) par rapport au montant arbitré en 2010. Ce montant peut être comparé à escient avec le montant de 550 millions d’euros prévu pour le contrat de PPP du programme de 13 200 places. Le NPI est donc un programme très ambitieux et devrait alourdir la charge des loyers dus par l’administration pénitentiaire. La Cour des comptes dans son rapport effectué en application de l’article 58-2° de la LOLF sur « les partenariats public-privé pénitentiaires » estime à 16,50 milliards d’euros le montant total des versements de l’État de 2014 à 2044 : 5,60 milliards d’euros au titre de l’investissement et 10,90 milliards d'euros au titre du fonctionnement.

3.– Un doublement du parc pénitentiaire qui s’appuie en grande partie sur la gestion privée

Pour couvrir ses besoins, l’administration pénitentiaire a eu recours de manière de plus en plus importante au secteur privé. Dans un premier temps, la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 modifiée relative au service public pénitentiaire dite loi Chalandon a confié au secteur privé la gestion de la maintenance et des services à la personne d’établissements pénitentiaires bâtis dans le cadre de marchés de « conception/réalisation ». Une forme de « gestion déléguée » a donc été instaurée. Dans ce dispositif, les fonctions régaliennes de surveillance et de greffe demeurent assurées par des personnels pénitentiaires. Dans un second temps, en vertu de l’ordonnance n° 200-559 du 17 juin 2004, des groupes d’entreprises se sont vu confier non seulement la gestion et l’exploitation des prisons mais aussi leur conception, financement et construction.

Cette formule de financement consiste en la conclusion de trois types de contrat : la gestion déléguée, la procédure AOT-LOA (autorisation d’occupation temporaire-location avec option d’achat) et le contrat de partenariat public-privé. Ces contrats sont négociés lors d’un dialogue compétitif devant permettre un partage des risques favorables à l’administration.

LES PROGRAMMES DE CONSTRUCTION PÉNITENTIAIRE
FAISANT APPEL AU SECTEUR PRIVÉ

Les établissements en « gestion mixte » ont été construits dans le cadre des derniers programmes d’augmentation du nombre de places de prison. À chacun de ses programmes correspondait un type spécifique de relation avec le secteur privé allant de plus en plus vers une délégation en maîtrise d’ouvrage privée et incluant un nombre croissant de services.

– Programme 13 000 places (« Chalandon ») décidé en 1990 : la maîtrise d’ouvrage des établissements pénitentiaires est restée publique mais leur entretien et fonctionnement ont été confiés à un prestataire privé dans le cadre d’un contrat multiservices. Les 25 prisons de ce programme ont été construites sur deux ans entre 1990 et 1992, quatre d’entre elles sont restées en gestion publique de façon à disposer de données permettant de comparer les deux modes de gestion.

– Programme 4 000 places (« Méhaignerie ») décidé en 1994 : 6 prisons construites en marchés de « conception/réalisation » ont fait l’objet de gestion déléguée.

– Programme 13 200 places (« LOPSI ») : ce programme a eu recours aux AOT/LOA et aux contrats de partenariat doit s’achever en 2017.

– Nouveau programme immobilier (NPI) : ce programme porte sur des réalisations à intervenir entre 2015 et 2019, majoritairement sous forme de PPP et pour un coût de 5,88 milliards d’euros.

La Cour des comptes a analysé les raisons de ce recours toujours plus important au secteur privé dans le rapport demandé le 2 décembre 2010 par la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire et transmis en octobre 2011 en application de l’article 58-2° de la LOLF sur « l’évaluation des partenariats public-privé (PPP) dans le domaine de la justice ». Le rapport figure en annexe ci-après.

Selon la Cour, la première raison a été la volonté de soulager les comptes de l’État. L’administration pénitentiaire peut ainsi lancer des investissements très lourds sans avoir à obtenir les autorisations d’engagement et crédits de paiement en loi de finances, nécessaires à des travaux en maîtrise d’ouvrage publique (MOP). Cette facilité budgétaire a expliqué pour une grande part le recours au PPP. Pourtant le 3° de l’article 2 de l’ordonnance de 2004 précise que « le critère du paiement différé ne saurait à lui seul constituer un avantage ».

La deuxième raison invoquée est la certitude d’une plus grande performance du secteur privé. Le ministère a encore fourni cette année au Rapporteur spécial des éléments indiquant très clairement une supériorité de la solution PPP en matière de mesure des coûts prévisionnels actualisés des deux solutions envisageables. La Cour observe que le recours au secteur privé donne des résultats satisfaisants surtout en ce qui concerne les constructions de prisons. Selon elle, la performance du secteur privé pour la gestion et l’exploitation des prisons est donc indéniable même si elle ne semble pas « hors de portée du secteur public ».

Enfin, la Cour des comptes rappelle, comme l’avait déjà relevé dans ses rapports publics thématiques (1) qu’il est difficile d’établir l’efficience de tel ou tel secteur en raison de l’insuffisance des outils de mesure et de comparaison des coûts des gestions pénitentiaires publiques et privées. Le Rapporteur spécial note à ce titre que la direction du Budget souhaite confier à la « mission d’évaluation des politiques publiques » une prochaine analyse sur ce sujet.

4.– Les inquiétudes quant aux risques budgétaires de la gestion déléguée et des PPP

La moitié du parc pénitentiaire sera en 2012 en gestion privée. Sur le plan de la gestion budgétaire, ce basculement aura pour conséquence une rigidité de plus en plus grande de la gestion des crédits de l’administration pénitentiaire, liée pour trente ou quarante ans par les contrats de partenariat public privé et assistant à la montée en puissance des loyers versés aux prestataires privés. Le fonctionnement quotidien des établissements en gestion publique souffre déjà de cette rigidité.

La Cour des comptes, dans le rapport mentionné plus haut fait le même constat et pose ainsi la question de la soutenabilité budgétaire des PPP. Les dépenses en PPP sont indolores les premières années mais ensuite entraînent une hausse très significative des dépenses obligatoires de l’administration pénitentiaire sous forme de loyers qui pourrait provoquer l’éviction des autres dépenses de fonctionnement.

À cet égard, le Rapporteur spécial note que dans les documents qui lui ont été fournis, notamment sur le nouveau programme immobilier (NPI), les projets PPP sont lancés en l’absence de projection à moyen et long terme des crédits de paiement stricto sensu.

Ainsi, la Cour estime que, calculées en euros constants, les dépenses de loyers correspondant aux investissements passeraient de 35 millions d’euros en 2010 à plus de 263 millions d’euros en 2017, soit une multiplication par 7,5 ; les dépenses de loyers relatives à la part investissement et à la part fonctionnement passant pour leur part de 95,4 millions d’euros à 567,3 millions d’euros, soit une multiplication par près de 6.

Le Rapporteur spécial constate que la question de la soutenabilité budgétaire se pose d’autant que l’élargissement du périmètre d’intervention du secteur privé dans les prisons n’a pas d’impact sur les charges de personnel de l’administration pénitentiaire qui continuent de progresser. L’effectif des personnels pénitentiaires a augmenté de 39 % en 11 ans, passant de 25 256 au 1er janvier 2000 à 35 121 au 1er janvier 2011.

L’externalisation des services assurés en gestion publique ne permet pas d’économiser immédiatement les charges de personnel correspondant au personnel administratif affecté aux tâches désormais déléguées.

Le Rapporteur spécial s’interroge sur cette progression sensible des effectifs pénitentiaires alors que la gestion déléguée menée depuis vingt-cinq ans et le recours aux nouvelles technologies (vidéosurveillance, détecteurs de présence) plus récemment aurait dû permettre un redéploiement de nombreux postes de fonctionnaires.

F.– UNE ALTERNATIVE PROMETTEUSE À L’INCARCÉRATION : LE PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE

La surveillance électronique fixe consiste à contrôler que la personne condamnée respecte les modalités d’une assignation dans un lieu déterminé (en général son domicile) lui ayant été imposée par l’autorité judiciaire selon des horaires définis. Elle ne permet pas la localisation du placé en dehors de ses horaires d’assignation, contrairement à la surveillance électronique mobile qui permet de localiser le porteur du bracelet en permanence grâce à un dispositif GPS.

Bien que certains risques inhérents aux technologies utilisées soient inévitables, il est à noter que les performances techniques des dispositifs s'améliorent au fur et à mesure des évolutions technologiques et du développement des infrastructures de télécommunication. La surveillance des placés est ainsi de plus en plus fiable.

Cependant, la réussite de la mesure dépend fortement du travail des agents pénitentiaires – agents de surveillance et CPIP – qui permet d'une part l'analyse et l'interprétation nécessaires des données fournies par le système informatique, et d'autre part, l'orientation des personnes placées dans leurs démarches d'insertion et le respect de leurs obligations.

1.– Un dispositif qui en cache trois

Dans le cadre d’un aménagement de peine : la première mesure de surveillance électronique introduite en France est le placement sous surveillance électronique (PSE). Introduit en droit français par la loi n° 97-1159 du 19 décembre 1997, il constitue l’une des trois mesures d’aménagement de peine sous écrou, avec le placement à l'extérieur ou la semi-liberté.

Après une phase d'expérimentation, ce dispositif a été généralisé sur l’ensemble du territoire métropolitain au cours de l’année 2004, et en outre-mer à partir de l’année 2006.

Depuis la loi du 24 novembre 2009, un PSE peut être accordé dès lors que la personne condamnée doit exécuter une ou plusieurs peines d’emprisonnement (ou un reliquat de peine) inférieures ou égales à deux ans (un an si la personne est en état de récidive légale) et lorsqu’il existe des efforts sérieux de réadaptation sociale résultant de son implication durable dans tout projet caractérisé d’insertion ou de réinsertion de nature à prévenir les risques de récidive.

Il peut être décidé à différents stades de la procédure pénale : dans le cadre d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, au stade du jugement par le tribunal correctionnel, ou par le juge d’application des peines saisi de la mesure avant l’incarcération ou en cours d’incarcération.

● Dans le cadre d’une assignation à résidence lors de la phase d’instruction du dossier avant jugement (pré-sentenciel) 

Il s’agit de la mesure d’assignation à résidence sous surveillance électronique (ARSE), instituée par la loi du 24 novembre 2009. Cette mesure succède au contrôle judiciaire avec placement sous surveillance électronique, possible depuis 2002. Il s’agit ici d’une mesure alternative à la détention provisoire.

Le placement sous ARSE peut être ordonné par le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention à l’encontre de toute personne mise en examen pour des faits punis d’au moins deux ans d’emprisonnement.

Cette mesure, entrée en vigueur le 3 avril 2010, se substitue au contrôle judiciaire avec placement sous surveillance électronique.

PART DES CJ-PSE OU ARSE SUR L’ENSEMBLE DES CJ EN COURS, DEPUIS 2005

Au 1er janvier

Nombre de CJ- PSE*
ou ARSE**

Nombre total
de CJ en cours

Nombre de CJ-PSE ou ARSE
sur l'ensemble des CJ en cours

2005

5

3 596

0,1 %

2006

13

3 907

0,3 %

2007

41

3 692

1,1 %

2008

60

3 841

1,6 %

2009

97

3 675

2,6 %

2010

105

3 697

2,8 %

2011

138

3 651

3,8 %

Source : DAP/PMJ5 statistique PSE.

*Contrôle judiciaire **ARSE ; à partir d’avril 2010 l’ARSE a remplacé le CJ-PSE 

Au 1er juillet 2011, on comptait 193 ARSE fixes en rapport avec un total de 16 791 prévenus détenus, soit 1,2 %. À la même date, on comptait 7 ARSE mobiles.

● Dans le cadre d’une exécution de la fin de la peine d’emprisonnement 

Il s’agit de la mesure de surveillance électronique de fin de peine (SEFIP), créée par la loi du 24 novembre 2009 pour les détenus condamnés à une peine initiale qui ne doit pas être supérieure à 5 ans et dont le reliquat de peine à subir est inférieur ou égal à 4 mois, sous réserve que des critères d’exclusion prévus par la loi ne fassent pas obstacle à son octroi. Il s’agit d’une modalité d’exécution de la peine et non d’un aménagement de peine.

L’objectif de cette dernière disposition est de permettre le placement sous surveillance électronique de détenus n’ayant pas construit en détention de projet préalable d’insertion.

2.– Une progression forte et régulière des effectifs

Les effectifs de condamnés sous écrou placés sous surveillance électronique progressent régulièrement depuis la création de cet aménagement de peine. Le seuil des 5 000 placements simultanés a été atteint pour la première fois en mars 2010. Au 1er juillet 2011, on comptait 7 971 placements sous surveillance électronique, dont 7 511 en aménagement de peine et 460 dans le cadre d’une surveillance électronique de fin de peine (SEFIP). Au total, ils représentent 14 % des condamnés sous écrou.

Du 1er août 2005 au 1er août 2010, ces effectifs ont augmenté de 46 % par an en moyenne. Cette croissance ralentit mais la progression des effectifs placés sous SE reste de 39 % sur les 12 derniers mois.

Sur l’année écoulée, l’effectif des condamnés sous écrou augmente fortement (+9 %), tandis que l’effectif des hébergés augmente plus modérément (+ 6,3 %). Le nombre d’écroués bénéficiant d’un aménagement de peine augmente de 23% sur la période. L’essentiel de cette hausse est lié au développement du PSE (+ 31 %).

En outre, depuis le 1er janvier 2011, date d’entrée en vigueur de la surveillance électronique de fin de peine, et juin 2011, 16 268 dossiers de SEFIP ont été traités par les SPIP dont 2 612 ont fait l’objet d’une proposition, soit 16 % des dossiers traités. Sur ces dossiers proposés, 1 305 SEFIP ont été octroyées, soit 50 %. 13 656 dossiers n’ont pas fait l’objet d’une proposition par les SPIP, dont 6 192 en raison d’une impossibilité matérielle tenant notamment à une fin de peine trop proche (soit un peu moins de la moitié des non propositions).

ÉVOLUTION DU NOMBRE DES PERSONNES PLACÉES SOUS SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE DANS LE CADRE D’UN AMÉNAGEMENT DE PEINE

Date

PSE (aménagement de peine) en cours

Condamnés sous écrou

Part des aménagés sous PSE parmi les condamnés

01/08/2008

3 333

50 993

6,5 %

01/08/2009

4 522

52 110

8,7 %

01/08/2010

5 718

51 874

11,0 %

01/07/2011

7 511

56 529

13,3 %

Champ : France entière.

Sous l’angle des flux, le PSE représente le premier aménagement de peine prononcé sur l’ensemble du territoire national, avec 51 % de l’ensemble des mesures accordées au cours de l’année 2010 (libération conditionnelle comprise).

PLACEMENTS EFFECTUÉS DEPUIS LE DÉBUT DE LA MESURE

Année

Placements effectués

2000

13

2001

130

2002

359

2003

948

2004

2 915

2005

4 128

2006

6 288

2007

7 900

2008

11 259

2009

13 994

2010

16 797

Total

64 731

Concernant les caractéristiques socio-démographiques des personnes placées sous surveillance électronique, une étude réalisée en 2008 (Source : Cahiers d’études pénitentiaires et criminologiques, fév. 2008 – DAP) révèle qu’entre 2000 et 2006, sur 2 680 placements, 5 % seulement concernaient des femmes et 7,5 % des personnes de nationalité étrangère. 42,6 % des placés étaient mariés ou vivaient en couple ; 46,4 % avaient un enfant à charge.

Quant à l’âge des personnes concernées, 70 % d’entre elles avaient entre 20 et 30 ans, l’âge moyen en début de placement étant de 34 ans. Presque deux tiers des placés exerçaient une activité professionnelle. Ces caractéristiques varient très peu selon que le placement sous surveillance électronique a été prononcé au début ou en cours d’exécution de la peine – la seule variable qui diffère sensiblement étant le fait d’exercer une activité professionnelle, nettement plus élevée chez les condamnés à des peines inférieures ou égales à un an.

En revanche, comme le montre le graphique suivant, les caractéristiques pénales des individus placés sous PSE varient sensiblement selon que cette mesure a été prononcée au début ou en cours d’exécution de la peine.

NATURE DE L’INFRACTION COMMISE SELON LA SITUATION PÉNALE DES PLACÉS (2008)

Source : DAP/PMJ Enquête DAP 2008

ÉVOLUTION DU PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE DEPUIS AVRIL 2004

Source : DAP/PMJ5 - Statistique mensuelle.

La durée moyenne du placement sous surveillance électronique dans le cadre d’un aménagement de peine était de 3,7 mois en 2010.

3.– Un dispositif peu coûteux et un taux de récidive faible

Le coût journalier d’un placement sous surveillance électronique s’élève sur l’année 2010 à 15,50 euros par jour (CAS Pensions compris).

La comparaison du coût du PSE avec le coût de la détention nécessite d'ajouter les dépenses liées à la cotisation ACOSS des établissements (3,51 euros / jour), afin d'être sur un même périmètre. Ainsi, le coût du PSE ACOSS comprise est égal à 19,01 euros.

À titre de comparaison, le coût d’une journée de détention est en 2010 de 94,91 euros (coût moyen, tout type de gestion confondu).

Pour ce qui est de la récidive, le placement sous surveillance électronique a fait l’objet d’une étude dès sa mise en place en 2000. Si les profils des placés ont été plusieurs fois analysés, de nombreux questionnements subsistent quant à l’évaluation de la mesure au regard de la récidive. Cinq années après le placement sous surveillance électronique, 6 condamnés sur 10 (58 %) n’ont pas de nouvelle condamnation inscrite sur leur casier judiciaire. Moins d’un quart (23 %) ont une nouvelle affaire sanctionnée par une peine de prison ferme. Ces résultats placent a priori la surveillance électronique dans une position plus favorable, en termes de récidive, que la détention. Les différences selon la nature de l’infraction, le passé judiciaire et l’âge entre les placés, et les détenus expliquent en partie le taux de récidive plus faible des PSE (2).

G.– UN MOTIF DE PRÉOCCUPATION : LES SOINS PSYCHIATRIQUES EN DÉTENTION

La santé mentale des personnes détenues constitue une grave préoccupation en raison de la proportion de personnes présentant des troubles mentaux et de son impact en termes de gestion des populations concernées.

Une enquête épidémiologique réalisée en 2003 et 2004 (Cemka Eval –décembre 2004) montre la fréquence des antécédents sociaux, judiciaires et médicaux : avant l'âge de 18 ans, 28 % de la population étudiée a été suivie par un juge pour enfant, 22 % a fait l'objet d'une mesure de placement, 28 % déclare avoir subi des maltraitances de nature physique, psychologique ou sexuelle et 16 % a été hospitalisée pour raisons psychiatriques avant l’incarcération.

Les principaux troubles rencontrés sont : la schizophrénie (3,8 % des détenus, soit environ 4 fois plus qu'en population générale), les états dépressifs majeurs (17, 9 %, soit 4 à 5 fois le taux en population générale) et l’anxiété généralisée (12 %). Ces deux derniers chiffres sont à interpréter avec précaution, car ces troubles peuvent être à l'origine du fait générateur de la détention, mais ils peuvent aussi résulter de la privation de liberté.

Les soins psychiatriques aux personnes détenues relèvent du ministère chargé de la santé. Ils sont organisés par le décret n° 86-602 du 14 mars 1986 qui confie le dispositif de soins psychiatriques en milieu pénitentiaire au service public hospitalier et la loi n° 94-43 du 18 janvier 1994 par laquelle l’organisation et la mise en œuvre de la prise en charge sanitaire des personnes détenues sont transférées au service public hospitalier.

Si l’on met à part le dispositif des UHSA (voir infra), les personnes détenues souffrant de troubles mentaux sont prises en charge : pour les soins ambulatoires, par le secteur psychiatrique hospitalier dont dépend l’unité de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) de l’établissement pénitentiaire, laquelle est une unité hospitalière, ou par le service médico-psychologique régional (SMPR) spécialisé dans la psychiatrie et ayant une vocation de coordonnateur au sein de la région pénitentiaire. Il existe aujourd’hui 26 SMPR qui sont situés dans les établissements les plus importants de chaque région pénitentiaire pour les soins en hospitalisation complète :

– s’agissant des soins avec le consentement du malade : par le SMPR dans des lits d’hospitalisation au sein de l’établissement pénitentiaire,

– s’agissant des soins sans le consentement du malade en hospitalisation d’office : toujours en milieu hospitalier, soit par le secteur psychiatrique habilité de l’hôpital de rattachement, soit en unité pour malades difficiles (UMD).

L’hospitalisation à temps complet des détenus en établissement de santé, en application de l’article D. 398 du code de procédure pénale (CPP) ne peut, en l’absence d’UHSA (voir ci-après), être réalisée que sous le régime de l’hospitalisation d’office, dans des établissements habilités à recevoir des patients hospitalisés sans consentement.

Même si cette organisation a considérablement amélioré la prise en compte des pathologies et troubles mentaux, l’ampleur du phénomène des troubles mentaux en prison est telle que cette prise en charge demeure encore insuffisante. Afin de remédier à cette situation, il a été prévu, en application de la loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, la création d’unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) chargées d’accueillir les personnes détenues souffrant de troubles psychiatriques nécessitant une hospitalisation à temps complet, avec ou sans consentement.

Le programme de construction porte sur 705 lits et comporte deux tranches de construction. La première tranche, d’une capacité de 440 places, couvre la période de 2010 à 2014. Toutefois, des arbitrages financiers nécessaires ainsi que des mises en chantier ont retardé le calendrier d’ouverture en 2012 pour certains sites.

LIEUX D’IMPLANTATION ET DATES D’OUVERTURE PRÉVUES

Direction Interrégionale

Localisation

Commune

Capacité

Date d’ouverture prévue

LYON

CH Le Vinatier

BRON

0

21 mai 2010

STRASBOURG

Centre Psycho-thérapeutique

de Nancy Laxou

LAXOU

0

Janvier 2012

TOULOUSE

CH Gérard Marchand

TOULOUSE

40

Janvier 2012

DIJON

CH Georges Daumezon

FLEURY LES AUBRAY

40

Septembre 2012

MARSEILLE

CH Édouard Toulouse

MARSEILLE

60

2ème trimestre 2014

LILLE

CH Seclin

SECLIN

60

2ème trimestre 2013

BORDEAUX

Centre Hospitalier spécialisé Cadillac

CADILLAC SUR GARONNE

40

2ème semestre 2014

La deuxième tranche de construction, comportant 265 places, sera réalisée à partir de 2014, les sites restant à déterminer par les services du ministère de la Justice et des libertés et du ministère en charge de la santé. Une évaluation sera réalisée à l’issue de la construction de la première tranche. En fonction de l’évolution de la situation carcérale et du retour d’expérience des premières UHSA, un réajustement portant sur la seconde tranche sera proposé, le cas échéant.

V.– LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

L’augmentation de la délinquance des jeunes n’a jamais été endiguée depuis 15 ans. En réalité, le Rapporteur spécial constate que l’évolution de la délinquance des mineurs est préoccupante à double titre : d’une part, le nombre de mineurs mis en cause dans les faits de délinquance tend à progresser et d’autre part, les faits commis par les mineurs s’aggravent et sont notamment de plus en plus des atteintes aux personnes.

Tant les données statistiques fournies par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) sur les mises en cause de mineurs par les services de police et de gendarmerie que les condamnations enregistrées par le casier judiciaire national révèlent que la délinquance des mineurs a progressé au cours des dernières années, même si cette progression s’est globalement ralentie depuis 2002, grâce à l’action résolue des gouvernements qui se sont succédé depuis cette année.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE MINEURS MIS EN CAUSE PAR LES SERVICES
DE POLICE ET DE GENDARMERIE ET DES CONDAMNATIONS DE MINEURS
ENTRE 1997 ET 2009

   

1997

2002

Progression annuelle moyenne sur la période 1997/2002

2009

Progression annuelle moyenne sur la période 2002/2009

Nombre de mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie

154 437

180 382

+ 3,4 %

214 612

+ 2,7 %

Condamnations pour crimes commis par des mineurs de…

moins de 13 ans

11

40

+ 52,7 %

26

- 5,0 %

13 à 15 ans

115

223

+ 18,8 %

297

+ 4,7 %

16 à 18 ans

246

235

- 0,9 %

215

- 1,2 %

Ensemble des condamnations de mineurs pour crimes

372

498

+ 6,8 %

538

+ 1,1 %

Condamnations pour délits commis par des mineurs de…

moins de 13 ans

876

870

- 0,1 %

1 823

+ 15,6 %

13 à 15 ans

12 747

11 959

- 1,2 %

21 942

+ 11,9 %

16 à 18 ans

16 570

15 395

- 1,4 %

30 629

+ 14,1 %

Ensemble des condamnations de mineurs pour délits

30 193

28 224

- 1,3 %

54 394

+ 13,2 %

Ensemble des condamnations pour crimes et délits

30 565

28 722

- 1,2 %

54 932

+ 13,0 %

Source : Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales et casier judiciaire national

Ce tableau met en évidence les évolutions suivantes de la délinquance des mineurs et de la réponse qui y a été apportée :

– tout d’abord, si le nombre de mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie n’a cessé d’augmenter entre 1997 et 2002, l’augmentation moyenne annuelle a toutefois été moins forte pendant la période 2002-2009 (+ 2,7 %) que pendant la période 1997-2002 (+ 3,4 %) ;

— en deuxième lieu, alors que le nombre de condamnations de mineurs pour crimes avait explosé entre 1997 et 2002 (+ 6,8 % par an), ce nombre a continué de progresser entre 2002 et 2009, mais de façon beaucoup plus lente (+ 1,1 % par an) ;

– enfin, si le nombre de condamnations de mineurs pour délits avait légèrement baissé entre 1997 et 2002 (– 1,3 % par an) puis a fortement augmenté entre 2002 et 2009 (+ 13 % par an), cette évolution traduit certes en partie une augmentation du nombre de mineurs auteurs de délits, mais elle traduit aussi et surtout la mise en place depuis 2002 d’une politique pénale beaucoup plus volontariste à l’égard des mineurs délinquants. Ainsi, la réponse pénale à l’égard des mineurs délinquants est devenue beaucoup plus systématique, afin de lutter contre le sentiment d’impunité que pouvaient ressentir jusque-là les mineurs.

Dans un tel contexte, l’action de la Protection judiciaire de la jeunesse est essentielle. Depuis 2009, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse a recentré son intervention auprès des mineurs délinquants

A.– UN PROGRAMME QUI CONNAÎT DEPUIS TROIS ANS UNE RÉFORME STRUCTURELLE

1.– Le recentrage des missions autour de la prise en charge des mineurs délinquants

Depuis 2009, la direction de la Protection judiciaire de la jeunesse a recentré son intervention auprès des mineurs délinquants. Les Conseils de sécurité intérieure avaient, dès les 8 juin 1998 et 27 janvier 1999, souhaité que « le secteur public de la PJJ se réorganise prioritairement autour de la prise en charge des mineurs délinquants ». Depuis, plusieurs rapports parlementaires et, surtout, plusieurs textes législatifs ont confirmé cette orientation. En particulier, la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance qui confirme et conforte la place du président du Conseil général dans la protection de l’enfance. Le projet stratégique national 2008-2011 de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse a permis d’atteindre cet objectif.

La direction de la Protection judiciaire de la jeunesse a profondément modifié son organisation territoriale pour rendre plus efficace l’action de ses services et établissements, assurer une prise en charge de qualité sans délais des jeunes, et favoriser la coordination avec l’ensemble des acteurs concernés : magistrats, services de l’État et élus. Le cadre éducatif de la spécificité de la prise en charge des mineurs ayant commis un acte de délinquance a été réaffirmé et les principales composantes de l’intervention éducative des services de la protection judiciaire de la jeunesse dans ce contexte ont été précisées par une circulaire du 2 février 2010.

L’année 2012 correspond à la première année du projet stratégique national 2012-2014 (PSN 3). Dans le cadre du PSN 2009–2011, la direction de la Protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) avait notamment recentré l’action des établissements et services sur la prise en charge des mineurs ayant commis des actes de délinquance.

Les prises en charge au civil étant d’ores et déjà marginales en 2011 en dehors des investigations qui restent de la compétence de l’État, ce recentrage se traduit essentiellement par la poursuite de l’amélioration des méthodes de l’action d’éducation en direction des mineurs délinquants.

Pour autant, si la DPJJ n’a plus de mission d’opérateur direct de la protection des jeunes majeurs et des mineurs en danger, elle est chargée, dans le cadre de la compétence du ministère de la justice et des libertés, de l’ensemble des questions intéressant la justice des mineurs et de la concertation entre les institutions intervenant à ce titre, que ce soit en matière civile ou pénale (décret du 9 juillet 2008).

2.– Garantir la qualité du parcours du mineur faisant l’objet d’une décision judiciaire

Au-delà des efforts réalisés au profit des mineurs délinquants, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse poursuivra en 2012 la mise en œuvre des réformes engagées dont l’objectif est de garantir cette coordination et la qualité du parcours de tous les mineurs faisant l’objet d’une décision judiciaire à travers quatre objectifs :

1° Garantir à l’autorité judiciaire, directement ou par le secteur associatif qu’elle habilite, une aide à la décision tant en matière civile que pénale

En 2011, une profonde réforme de l’investigation a été engagée. La mesure judiciaire d’investigation éducative remplacera en 2012 l’enquête sociale et l’investigation d’orientation éducative afin de réunir tous les éléments dont le magistrat a besoin pour évaluer la situation d’un mineur et pour prendre la décision la mieux adaptée. La DPJJ contribuera par ailleurs à l’amélioration des procédures de signalement en participant, aux côtés des parquets, aux instances créées par la loi relative à la protection de l’enfance, notamment aux protocoles concernant les cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP) et aux observatoires départementaux.

2° Renforcer l’intervention de la DPJJ en direction des jeunes confiés au pénal en leur assurant sans délai une prise en charge de qualité.

À cet effet, la DPJJ a parachevé en 2011 la réorganisation de ses propres structures et de ses directions territoriales afin d’améliorer leur taux d’encadrement et d’optimiser leur management au service de l’insertion des mineurs pris en charge. Pour ce faire, la protection judiciaire de la jeunesse a renforcé son activité en privilégiant :

– la structuration de l'intervention éducative par les activités de jour définie par la circulaire du 25 février 2009. Chaque mineur pris en charge par la protection judiciaire de la jeunesse qui serait en dehors des dispositifs de droit commun doit bénéficier d'une activité de jour ;

– le renforcement du taux d'encadrement des mineurs dans les établissements de placement éducatif en passant de 12 à 14 éducateurs par structure de 12 places.

Les établissements qui ne seraient pas aux normes doivent être restructurés ;

– la généralisation des bureaux d’exécution des peines (BEX). Ils contribuent à une prise en charge des mineurs sans délai par les services de la protection judiciaire de la jeunesse ;

– la signature avec des conseils généraux d’une convention de partenariat. Dans la recherche d'une complémentarité plus efficiente entre l’État et les conseils généraux, elles permettent d’auditer ensemble les établissements habilités conjointement ;

– l’objectif éducatif de chaque mesure pénale confiée par un magistrat. La circulaire du 2 février 2010 relative à l’action d’éducation dans le cadre pénal précise que quelle que soit la nature de la mesure mise en œuvre, l’un des objectifs de l’action d’éducation dans le cadre pénal est de prévenir la réitération d’actes délictueux.

3° Garantir à l’autorité judiciaire, aux usagers et aux citoyens, par le contrôle, l’audit et l’évaluation, la qualité de l’aide aux décisions et celle de la prise en charge dans les services publics ou associatifs habilités par la DPJJ.

En 2011, les équipes d’audit nouvellement constituées seront pleinement opérationnelles afin de garantir, a minima, un audit tous les cinq ans de chaque structure.

4° Concevoir des normes et des cadres d’organisation de la justice des mineurs qui conjuguent la contrainte judiciaire et l’objectif de socialisation.

B.– LA MESURE DE LA PERFORMANCE

Les objectifs du programme 182 n’évoluent pas entre 2011 et 2012. Les indicateurs font l’objet d’évolutions ou d’adaptations afin d’augmenter leur pertinence :

– les indicateurs 1.2 à 1.4 sont renumérotés sans changer de libellé. Pour l’indicateur 1.4 (niveau d’accompagnement éducatif des mineurs détenus), l’unité de compte est modifiée : l’application GAME 2010 mesure cette activité non pas en heures mais en demi-journées, unité jugée plus pertinente au regard de la prise en charge d’un public particulièrement difficile. L’indicateur est modifié en conséquence afin de rendre compte avec le niveau de précision disponible ;

– l’indicateur 1.5 devient le 1.6 et un nouvel indicateur 1.5 Taux d’audit des établissements et services est créé. La procédure d’audit est une garantie de la qualité des prises en charge. Chaque établissement et service doit être audité au moins une fois par période de 5 ans, soit 20 % (1/5) de l’ensemble des structures par an. La cible à terme doit être de 100 % des structures devant être auditées dans l’année. L’indicateur 1.5 ne concerne que les établissements et services du secteur public et du secteur associatif habilité exclusif État (CER, CEF) qui prennent seulement en charge les mineurs délinquants ;

– l’indicateur 3.1 « taux d’occupation des établissements » est complété par le taux de prescription (placements décidés par les magistrats) qui ne correspond pas toujours aux présences effectives des jeunes en raison des fugues, incarcérations ou hospitalisations, afin d’affiner l’analyse. En conséquence les trois sous-indicateurs portant sur les taux d’occupation des établissements de placement éducatif, des centres éducatifs renforcés et des centres éducatifs fermés sont complétés par trois autres qui portent sur les taux de prescription pour ces mêmes catégories ;

– l’indicateur 3.3 donnant les coûts complets des mesures judiciaires par journée ou par acte, le sous-indicateur « prix d’une mesure d’investigation et d’orientation éducative » est remplacé par un sous-indicateur « prix d’une mesure judiciaire d’investigation éducative » pour prendre en compte la réforme de l’investigation intervenue en 2011 : les mesures actuelles d’investigation (enquêtes sociales et IOE) sont progressivement remplacées cette année par une mesure unique (MJIE), mesure qui sera pleinement opérationnelle en 2012. Le sous-indicateur « prix d’une journée de placement en établissement non spécialisé (secteur associatif) » est abandonné : ces établissements non spécialisés prennent en règle générale beaucoup plus de mineurs en danger que de mineurs délinquants. Par ailleurs, il agrège les coûts d’un grand nombre d’établissements ayant des caractéristiques et des modalités de prise en charge diverses (Centres Sociaux Professionnels (CSP) ou Éducatifs et Professionnels (CEP), Maisons d’Enfants à Caractère Social (MECS), Centres d’Hébergement Diversifié (CHD), Centres de Placements Familiaux Socio Éducatifs (CPFSE), Lieux de Vie…) ;

– l’indicateur 4.1 Part des audits des établissements et services réalisés conjointement avec les Conseils généraux est modifié, en cohérence avec le nouvel indicateur 1.5, pour apprécier cette proportion au regard du nombre d’établissements qui devraient être audités dans l’année (soit 20 % du total afin que chaque établissement soit audité au moins une fois tous les cinq ans) et non plus par rapport au nombre total d’établissements.

L’architecture des budgets opérationnels de programme ne fera pas l’objet de modification en 2012.

C.– DES CRÉDITS EN LÉGÈRE AUGMENTATION

Les crédits du programme s’élèvent à 792,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 772,6 millions d’euros en crédits de paiement. Ils sont respectivement en hausse de 4,6 % et 2 %.

Cette augmentation est légère notamment par rapport aux autres programmes mais elle intervient après 3 ans de diminution des crédits liés au recentrage des missions de la PJJ.

CRÉDITS DU PROGRAMME PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action/sous action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
2012/2011

(%)

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
2012/2011

(%)

1 – Mise en œuvre des décisions judiciaires : mineurs délinquants

561,6

602,4

7 %

561,6

582,4

4 %

3 – Soutien

98,1

90,2

- 8 %

98,1

90,2

- 8 %

4 – Formation (École nationale de Protection judiciaire de la jeunesse)

33,8

31,4

- 7 %

33,8

31,4

- 7 %

5 – Aide à la décision des magistrats : mineurs délinquants et mineurs en danger

64,2

68,7

7 %

64,2

68,7

7 %

Total

757,7

792,7

5 %

757,7

772,7

2 %

Source : projet annuel de performances pour 2012.

1.– Un plafond d’emplois en progression

Le plafond d’autorisation d’emplois pour le programme Protection judiciaire de la jeunesse  en 2012 s’élève à 8 395 équivalents temps plein travaillés se répartissant ainsi.

PLAFONDS D’EMPLOIS POUR LE PROGRAMME

Par action

Mise en œuvre des mesures judiciaires : mineurs délinquants

5 857

Aide à la décision des magistrats : mineurs délinquants et mineurs en danger

783

Soutien

1 305

Formation

450

total

8 395

Par catégorie

Magistrats de l'ordre judiciaire

10

Personnels d'encadrement

2 467

B métiers du greffe, de l'insertion et de l'éducatif

4 455

B administratifs et techniques

275

C administratifs et techniques

1 188

total

8 395

Il était prévu dans le budget triennal, de supprimer 140 équivalents temps pleins travaillés (ETPT) en 2012 dans le cadre de l’application de la RGPP. Mais, le ministère a obtenu que 50 emplois soient redéployés au titre des fonctions éducatives, parallèlement, 60 emplois sont créés au 1er janvier 2012 au titre de la réforme de la justice des mineurs (pour transformer 20 UEHC en CEF).

Par ailleurs, le plafond d’emploi 2012 tient compte du transfert de 76 emplois au 1er janvier 2012 au profit du programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice dans le cadre de la mise en place des plateformes inter-directionnelles de mutualisation des fonctions support.

2.– L’action 1 Mise en œuvre des décisions judiciaires : mineurs délinquants

Les effectifs dédiés à la prise en charge hors investigation des mineurs délinquants seront stabilisés et les crédits de l’action n° 1 Mise en œuvre des décisions judiciaires : mineurs délinquants ajustés pour financer des ouvertures ou extension en année pleine de trois centres éducatifs fermés. L’activité au pénal augmente en effet de 4 % par an.

L’augmentation des crédits de l’action 1 correspond principalement à une dotation supplémentaire de 10 millions d’euros en crédits de paiement pour financer la transformation de 20 unités éducatives d’hébergement collectif en centres éducatifs fermés (CEF) en application de la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement du mineur (abaissement du seuil de 7 à 5 ans d’emprisonnement pour un placement en CEF), et qui portent essentiellement sur les crédits d’investissement. Il n’y a pas d’abondement des crédits de fonctionnement qui sont soumis comme pour les services judiciaires à un effort de rationalisation (plan achats).

3.– L’action 3 Soutien

Les crédits de l’action n° 3 Soutien continuent de baisser en 2011. La PJJ va achever la réorganisation des échelons déconcentrés afin d’adapter le nombre des directions territoriales à la cinquantaine de territoires pertinents de la prise en charge éducative des mineurs délinquants ; les effectifs dédiés aux fonctions de soutien seront réduits. Les dépenses immobilières seront imputées sur les actions en fonction de la réalité des opérations programmées et non plus arbitrairement sur le soutien.

Cette année l’imputation de loyers budgétaires pour des locaux servant à l’accueil des familles ou à l’organisation d’activités d’insertion et de remobilisation pour les jeunes change d’affectation d’action. Ces dépenses de 1,8 million d’euros imputées en 2011 sur l’action 3 (soutien), sont imputées en 2012 sur l’action 1 afin de mieux prendre en compte la destination des locaux.

L’action 3 est donc diminuée d’autant. La majeure partie de la baisse sur cette action, toutefois, s’explique par des économies en personnel résultant d’une part de la poursuite de la réorganisation territoriale de la PJJ (fusion des petites directions territoriales) et d’autre part, du transfert de 76 ETPT au profit du programme 310 Conduite et pilotage de la politique de justice dans le cadre de la mise en œuvre de plateformes inter directionnelles de mutualisation des fonctions support relevant du secrétariat général. De plus, malgré un grand effort sur cette fonction durant ces deux dernières années, la programmation tente de préserver autant que possible les moyens du « cœur de métier ». Pour autant, il est probable qu’en gestion seront affectés également les moyens de la fonction éducative.

4.– L’action 4 Formation

L’action 4 diminue du fait de la réforme de la formation initiale des éducateurs dont les salaires sont comptabilisés sur cette action pendant le temps de formation, ainsi que de la baisse du nombre de stagiaires dans les promotions, conséquence de la baisse des effectifs.

5.– L’action 5 Aide à la décision des magistrats : mineurs délinquants et mineurs en danger

L’action 5 correspond aux investigations (civiles et pénales) effectuées par le seul secteur associatif.

Cette action, dotée de 64 millions d’euros en PLF 2011
– augmentés à 67 millions d’euros en gestion pour mettre en place la nouvelle mesure d’investigation – est portée à 68 millions d’euros en 2012.

D.– UN IMPORTANT PROGRAMME IMMOBILIER

1.– Les nouveaux établissements

En 2011, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a ouvert 5 nouveaux établissements (10,2 millions d’euros) : 3 Établissements du secteur public (7,5 millions d’euros), une unité éducative d’hébergement collectif (UEHC) de Pessac (1 million d’euros), une UEHC à Bures-sur-Yvette (1,7 million d’euros), une UEHC à Limoges (1,3 million d’euros) et une à UEHC de Laon (3,5 millions d’euros) et un centre éducatif fermé (CEF) de Combs-la-Ville (2,7 millions d’euros) dépendant du secteur associatif habilité.

En 2012, la DPJJ devrait réceptionner 4 nouveaux établissements (8,2 millions d’euros) : une UEHC du Robert en Martinique (1,3 million d’euros), une UEHC d’Avignon (2,2 millions d’euros), un CEF de d’Épinaie sur Seine (3,7 millions d’euros) et une unité éducative d’activités de jour de Valence (1 million d’euros).

2.– La création de 20 centres éducatifs fermés

La loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale des mineurs et le jugement des mineurs élargit les conditions de placement en centre éducatif fermé (CEF).

Les CEF sont ouverts aux mineurs délinquants en ouvrant le recours à ce dispositif dans le cadre du contrôle judiciaire pour les mineurs de 13 à 16 ans auteurs de faits punis de cinq ans lorsqu’il s’agit de violences volontaires, agression sexuelle ou d’un délit commis avec la circonstance aggravante de violences et lorsque le magistrat envisage la révocation d’un sursis avec mise à l’épreuve, le placement en CEF devenant une alternative à l’incarcération dans ce cadre.

Cette modification de l’ordonnance de 1945 conduit à la création de 20 CEF par transformation d’unités éducatives d’hébergement collectif existantes. L’implantation des nouveaux établissements tiendra compte des bassins de délinquance et permettra une répartition géographique plus équilibrée des établissements. L’augmentation de 4,6 % des autorisations d’engagement s’explique par la construction de ces 20 nouveaux centres.

Au second semestre 2011, les unités ayant vocation à être transformées seront déterminées ce qui permettra de connaître précisément l’impact sur la répartition des UEHC. L’augmentation de l’annuité 2012 du budget triennal (30 millions d’euros en autorisations d’engagement et 10 millions d’euros en crédits de paiement) porte sur l’investissement immobilier. Une étude d’impact, concernant les aspects financiers et de ressources humaines, a chiffré le besoin à 60 ETP.

a) La montée en charge du dispositif

Depuis l’ouverture du dispositif en 2003, 44 CEF sont en fonctionnement dont 2 dans les départements d’outre-mer (34 du secteur associatif, 10 du secteur public) pour une capacité totale de 488 places. 11 CEF sont mixtes. Un CEF est habilité exclusivement pour la prise en charge des jeunes filles.

Ce programme en voie de finalisation comportera à terme 48 établissements soit 36 associatifs et 12 publics pour 576 places.

Le développement continu de ce type d’établissement depuis 2003 constitue le premier indicateur d’utilité et d’intégration réussie des centres éducatifs fermés dans le dispositif global de placement judiciaire.

b) Un premier bilan du fonctionnement des CEF

Après 7 ans de fonctionnement, on peut d’ores et déjà dresser quelques constats.

– Les centres éducatifs fermés sont destinés à la prise en charge exclusive des mineurs de 13 à 18 ans multirécidivistes ou ayant commis des faits d’une particulière gravité. 3 800 mineurs ont été placés en CEF depuis 2003 ; ils sont à 74 % des mineurs multi-réitérants et à 94 % des garçons. Le public accueilli en CEF est le plus souvent un public d’adolescents cumulant des carences éducatives avec des difficultés familiales, sociales et psychologiques.

Le caractère contenant des CEF offre aux magistrats des alternatives supplémentaires à l’incarcération. Les CEF contribuent fortement à la baisse du nombre de mineurs détenus enregistrée sur la période 2002/2010. La part des prévenus est également passée de 76,4 % à 58,2 % sur cette même période.

L’état de santé physique des mineurs présente des carences importantes. En fonction des troubles observés, une prise en charge médicale voire une hospitalisation sont mises en œuvre. Du personnel infirmier est présent sur chaque CEF ; certains des mineurs placés en CEF présentent des troubles du comportement difficilement contenus par les dispositifs éducatifs classiques.

– Le placement en CEF constitue une réelle alternative à l’incarcération en favorisant l’éducation dans un cadre contraint. Le projet pédagogique des centres éducatifs fermés répond à un objectif de réinsertion, tant sociale que scolaire et/ou professionnelle du mineur, poursuivi par le biais d’une mise en activité quotidienne. Un programme d’activités individualisé est mis en place après évaluation des besoins du mineur. Les activités d’apprentissage sont concentrées sur les cinq premiers jours de la semaine, à une fréquence au minimum bihebdomadaire, et souvent quotidienne. Les activités sportives sont organisées à un rythme soutenu, à raison de deux heures par jour en moyenne.

Enfin, certains centres éducatifs fermés proposent, dans leur projet d’établissement, la découverte d’activités culturelles et/ou professionnelles spécifiques (découverte du métier de marin pêcheur ; restaurant d’application sur place ; découverte des métiers équestres, etc.).

Chaque CEF bénéficie de la mise à disposition d’un professeur de l’Éducation nationale dont l’action vise à la réintégration des mineurs dans le système scolaire de droit commun et, pour les plus âgés, de s’engager dans une formation professionnelle et/ou une poursuite d’études en lycée général et technologique.

Les mineurs font l’objet d’une surveillance stricte et d’une prise en charge adaptée à leurs problématiques, visant notamment à fixer des repères que leur contexte familial et leur histoire personnelle ne leur ont pas donnés.

– Les incidents tendent progressivement à être moins nombreux depuis 2004. Sur l’année 2010, une dizaine d’incidents significatifs est à relever. Les incidents les plus fréquents, les fugues, se produisent principalement en début de séjour. Elles représentent environ 60 % des incidents ; les atteintes aux personnes environ 20 % (3).

Plus de 80 % des CEF ont aujourd’hui mis en place des modalités particulières de gestion des incidents : protocoles avec les juridictions et les services de police et ou de gendarmerie ; formation spécifique des personnels ; « débriefing » post-incident.

– La circulaire DPJJ/DACG du 13 novembre 2008 (incluant le cahier des charges des centres éducatifs fermés) précise et renforce les dispositions relatives au suivi et à la préparation à la sortie des mineurs.

Un projet éducatif construit, intensif et structuré permet d’assurer la prise en charge évolutive des mineurs. Le fonctionnement des centres éducatifs fermés prévoit plusieurs étapes : la phase d’accueil, la mise en place d’un programme intensif (basé sur la scolarité et/ou les apprentissages) et l’élaboration d’un projet de sortie proposant une perspective concrète d’insertion sociale et professionnelle.

Le cadre du projet stratégique national 2008/2011 de la protection judiciaire de la jeunesse renforce le pilotage du parcours de chacun des mineurs au niveau des services des directions territoriales de la protection judiciaire de la jeunesse afin de construire des projets de sortie concrets :

– en amont, par une évaluation précise de la faisabilité d’un projet en lien avec le milieu ouvert, la mission éducative en maison d’arrêt, le service éducatif en établissement pénitentiaire pour mineur,

– durant le placement, par le renforcement des liens entre les centres éducatifs fermés et les services de milieu ouvert.

Cette démarche permet de suivre l’évolution du mineur et de lui faire des propositions adaptées à l’issue de son placement. La signature de protocoles de travail entre le centre éducatif fermé et le service de milieu ouvert favorise les échanges d’informations avant et à l’issue de la prise en charge des mineurs.

– Les centres éducatifs fermés offrent une réponse pertinente aux mineurs les plus ancrés dans la délinquance ou qui commettent les actes les plus graves.

Le dispositif centré sur les mineurs multi réitérants (74 % des mineurs placés) a un effet positif sur la réitération des mineurs pour un placement au-delà de 4 mois, accentué au-delà de six mois.

– En matière de santé mentale, dès 2008, sept établissements (Moissannes, Soudaine la Vinadière, La Jubaudière, Liévin, Saint Venant, Valence, Savigny) ont pu bénéficier de la mise en œuvre d’une expérimentation visant au renforcement du CEF en moyens de santé mentale (soit 2,5 équivalents temps plein de psychiatre, psychologue, infirmier répartis selon les besoins de la structure). Les premiers résultats établissent l’utilité de ce renforcement : il améliore significativement les liens entre le CEF et les services de psychiatrie de proximité. On note également une amélioration significative du fonctionnement des centres éducatifs fermés qui se traduit selon les CEF, par une diminution des incidents dans la prise en charge, par une meilleure capacité des professionnels à les contenir ou encore par une baisse des arrêts maladie.

Ce dispositif est étendu en 2011 pour 6 nouveaux établissements (Brignoles, Sainte Ménéhould, L’Hôpital le Grand, Chatillon-sur-Seine, Allonnes, Saverne), soit un CEF renforcé santé mentale dans 8 des 9 directions interrégionales.

– La direction de la Protection judiciaire de la jeunesse est très attentive aux remarques et préconisations que le contrôleur général des lieux privatifs de liberté transmet à la suite des contrôles effectués dans les centres éducatifs fermés.

Les instructions nécessaires sont transmises aux établissements concernés afin de remédier aux points soulignés et porter les améliorations souhaitables. Ainsi, depuis les visites effectuées, des actions concrètes répondant aux recommandations du contrôleur général des lieux privatifs de liberté ont été mises en œuvre par les directions territoriales de la protection judiciaire de la jeunesse et ont permis des évolutions positives.

Au 30 mai 2011, 19 CEF sur 44 ont été visités par le CGLPL. Parmi eux : 6 CEF ont été contrôlés en 2009, 9 CEF ont été contrôlés en 2010 et 3 CEF ont été contrôlés en 2011.

– Fin 2011, la quasi-totalité des centres éducatifs fermés aura été audité. La formalisation des différents outils de la loi du 2 janvier 2002 (projet de service, document individuel de prise en charge, règlement de fonctionnement) qui participent à la cohérence de la prise en charge éducative est contrôlée lors des audits.

Une politique volontariste est mise en œuvre pour améliorer la formation et la qualification des personnels exerçant en centre éducatif fermé. Un questionnaire transmis en janvier 2011 à l’ensemble des établissements a permis de compléter l’étude des besoins en formation effectuée lors de la journée nationale du 17 juin 2009. Fin 2011, un programme dédié sera proposé à l’ensemble des personnels du secteur public et du secteur associatif habilité. L’attention portée sur le recrutement et la formation des personnels permet également de prévenir le recours inadapté aux moyens de contrainte physique.

Le renforcement des moyens en santé mentale expérimenté depuis 2008 dans sept centres éducatifs fermés a été généralisé à six nouveaux centres évaluation. Les liens entre les services de la protection judiciaire de la jeunesse et le secteur de santé mentale sont par ailleurs formalisés dans dix-huit établissements. Les centres éducatifs fermés disposent de pôles de soins opérationnels (présence d’infirmiers et de psychologues) qui conduisent des actions de prévention et d’éducation à la santé.

c) Le coût élevé des centres éducatifs fermés

Le cahier des charges des centres éducatifs fermés tel qu’il a été défini lors du lancement du dispositif en 2003 a comme principe premier le taux d’encadrement élevé. Il indique que « les mineurs font l’objet de mesures de surveillance et de contrôle permettant d’assurer un suivi éducatif et pédagogique renforcé et adapté à leur personnalité. »

Ce taux élevé d’encadrement explique le coût de ces structures notamment par comparaison aux autres modes de prise en charge des mineurs délinquants comme le montre le tableau suivant.

COÛT DE LA PRISE EN CHARGE
DES MINEURS DÉLINQUANTS

(en euros)

 

2008 Réalisation

2009 Réalisation

2010 Réalisation

2011 Prévision actualisée à
mi-année

2012 Prévision PLF

Secteur Public

Journée de milieu ouvert ou d’investigation

10,1

10,5

11,1

11,9

12,0

Journée de placement UEHC

506

487

500

490

480

Journée de placement CER

636

668

704

685

685

Journée de placement CEF

663

603

659

625

641

Secteur Associatif Habilité

Mesure d'investigation et d'orientation éducative (IOE)

3 217

3 242

3 246

3 358

3 391

Mesure d’enquête sociale

1 955

2 113

2 111

2 111

2 135

Mesure judiciaire d'investigation éducative

       

2 620

Mesure de réparation

725

798

849

840

846

Journée de placement en établissement non spécialisé mineurs délinquants

173

177

181

170

171

Journée de placement CPI

361

354

375

363

363

Journée de placement CER

489

482

503

480

480

Journée de placement CEF

625

599

603

579

553

E.– LES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS D’INSERTION DE LA DÉFENSE (EPIDe), NOUVEL OUTIL DE PRISE EN CHARGE DES MINEURS DÉLINQUANTS

1.– Une évolution importante du ministère de la justice

Alors que la proposition de loi de M. Éric Ciotti visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants était examinée en première lecture à l’Assemblée nationale, M. Michel Mercier a annoncé à l’Assemblée nationale le 5 octobre 2011 que dès février 2012, les trois établissements publics d’insertion de la Défense (EPID) de Bourges, Belfort et Val-de-Rueuil.

Les EPIDe reçoivent déjà des jeunes volontaires au titre du dispositif « Défense deuxième chance ». D’ici juin 2012, Le Garde des Sceaux a déclaré que 15 établissements pourront accueillir des mineurs délinquants et a rappelé que « l’EPIDe n’est pas une structure militaire mais bien une structure civile qui s’inspire du modèle militaire mais aussi des méthodes des travailleurs sociaux ».

Les vingt centres EPIDe qui offrent une capacité d’accueil de 2 250 places ne sont pas des établissements à statut militaire mais des établissements civils. Le personnel comprend trois types de personnel : les enseignants de l’Éducation nationale, les cadres chargés de l’encadrement des jeunes et de la formation civique et une équipe en charge de l’insertion professionnelle qui accompagne le jeune dans la définition et la validation de son projet professionnel. C’est dans la deuxième catégorie de personnels, en charge de l’encadrement et de la formation civique, que se trouvent d’anciens militaires, recrutés pour leur expérience en matière d’encadrement des jeunes, leur forte disponibilité et leur capacité d’investissement personnel importante.

Les résultats des centres EPIDe sont très encourageants puisqu’ils font apparaître un « taux de sorties positives » constitués soit par l’entrée dans la vie active avec un contrat de travail durable, soit par la poursuite d’une formation qualifiante, de 80 % (si on le rapporte aux jeunes sortis des centres et ayant achevé leur contrat, en excluant les démissions et les exclusions). Le dispositif a donc su combiner avec succès une méthode éducative inspirée de la culture militaire, une formation comportementale adaptée et une remise à niveau scolaire débouchant sur la possibilité d’entamer une formation professionnelle.

2.– Le dispositif prévu par la proposition de loi de M. Ciotti en cours d’examen au Parlement

La proposition de loi a pour objet d’enrichir la diversité des réponses pénales à la disposition des magistrats de la jeunesse en créant une nouvelle mesure pénale consistant en l’exécution par le mineur de plus de 16 ans auteur d’une infraction d’un contrat de service en établissement public d’insertion de la défense. Ce contrat sera calqué sur le régime du contrat de volontariat pour l’insertion exécuté dans les mêmes centres EPIDe que ceux accueillant les actuels volontaires.

Cette nouvelle mesure pourra être ordonnée par le juge dans le cadre de la composition pénale, de l’ajournement de peine et du sursis avec mise à l’épreuve. Il s’agit donc d’un cadre à la fois contenant  (4) et formateur sur les plans civique et professionnel, sans pour autant consister en une mesure privative de liberté.

Le Rapporteur spécial estime que l’accueil des mineurs dans les centres EPIDe constitue une alternative à l’incarcération ou au placement en centre éducatif fermé, qui permettra au mineur de réapprendre les valeurs de vie en société tout en bénéficiant d’une remise à niveau scolaire et d’une formation professionnelle.

3.– L’impact budgétaire de la réforme

Le ministère de la justice dès 2012 devra prévoir si la proposition de loi est adoptée par le Parlement des crédits pour financer le fonctionnement de l’établissement public d’insertion de la Défense. Ce n’est pas le cas aujourd’hui puisque les jeunes accueils dans les centres EPIDe ne sont pas délinquants. En 2011, le budget des 20 centres EPIDes s’est élevé à 85 millions d’euros, issus pour 48,5 millions d’euros d’une subvention de la mission Travail et emploi, 25 millions d’euros d’une subvention de la mission Ville et logement, 10,5 millions d’euros d’un financement du Fonds social européen (FSE) et 1 million d’euros de la taxe d’apprentissage. L’EPIDe a employé en 2011 961 ETPT.

Les modalités de financement de la prise en charge des mineurs qui exécuteront à l’initiative de l’autorité judiciaire un contrat de service en établissement public d’insertion pour la défense, devront être définies entre les ministères concernés. Le coût de la mesure de contrat de service en établissement public d’insertion apparaît toutefois modeste par comparaison avec les autres placements dont peuvent faire l’objet les mineurs délinquants. En 2010, le coût annuel d’un contrat de volontariat pour l’insertion s’élevait à 40 750 euros, le contrat d’objectifs et de moyens conclu entre l’EPIDe et ses autorités de tutelle ayant fixé un objectif de réduction de ce coût à 35 000 euros pour 2011. Le prix de journée de l’accueil en EPIDe  s’est donc élevé à 111,5 euros en 2010.

VI.– LE PROGRAMME ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE

La politique menée en matière d’accès au droit et à la justice doit permettre à chaque citoyen d’avoir la connaissance de ses droits et de les faire valoir quelle que soit sa situation sociale et où qu’il se situe sur le territoire.

Elle concerne l’usager dans tous les domaines de sa vie quotidienne (travail, logement, consommation, famille…), qu’il soit demandeur d’information, de diagnostic juridique ou d’aide aux démarches ou encore concerné par une action en justice ou un contentieux familial.

Il s’agit d’une politique partenariale qui se traduit :

– pour l’accès à la justice, par la prise en charge par l’État de tout ou partie des frais du procès au titre de l’aide juridictionnelle pour les justiciables dont les ressources sont insuffisantes ainsi que le financement de l’aide à l’intervention de l’avocat ;

– pour l’accès au droit et l’aide aux victimes ainsi que pour la médiation familiale et les espaces de rencontre par un soutien financier au secteur associatif et aux collectivités locales.

La Cour des comptes estime que, compte tenu de sa taille financière réduite, le programme 101 devrait être rattaché au programme 166. Le ministère considère qu’une modification de l’architecture budgétaire n’est pas opportune alors que les réformes envisagées devraient avoir une incidence sur le mode de gestion des crédits d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat ; l’argument est d’autant plus recevable que l’information du Parlement n’en est que meilleure.

A.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME

Les priorités d’action des gestionnaires du programme pour 2012 seront très proches de celles des années précédentes.

Le projet annuel de performances 2012 met l’accent sur :

– l’amélioration des délais de traitement des demandes d’aide juridictionnelle ;

– la maîtrise du coût de gestion de l’aide juridictionnelle ;

– l’amélioration du taux de mise en recouvrement des frais avancés par l’État au titre de l’aide juridictionnelle ;

– l’amélioration du service rendu en matière d’accès au droit ;

– le renforcement des dispositifs d’aide aux victimes en particulier au sein des juridictions notamment grâce à la tenue de permanences des associations d’aide aux victimes dans les bureaux d’aide aux victimes lorsqu’ils existent.

B.– DES CRÉDITS EN HAUSSE GRÂCE À L’AIDE JURIDICTIONNELLE

L’essentiel des crédits du programme 101 sont des dépenses d’intervention (titre 6). S’adressant aux publics pour lesquels l’accès au droit et à la justice est le plus difficile pour des raisons financières ou géographiques, ce programme repose quasi exclusivement sur des crédits d’intervention. Les effectifs qui contribuent à la réalisation de cet objectif sont gérés par la direction des services judiciaires. Le programme ne dispose pas de crédits de rémunération de personnel.

Les dépenses de fonctionnement, destinées à l’équipement des maisons de justice et du droit et au déploiement des « contacts visio justice » dans les MJD de nouvelle génération, dans des points d’accès au droit et des MJD actuelles, représentent moins de 0,15 % de la dotation totale.

Seuls les crédits d’aide juridictionnelle progressent au sein du programme, en revanche la dotation des autres actions diminue de – 2,17% conformément aux orientations du Gouvernement relatives à la maîtrise des dépenses de l’État visant à réduire de 10 % les dépenses d’intervention sur la période 2011-2013.

CRÉDITS DU PROGRAMME 101 (TITRE 3 ET TITRE 6)

Programme 101

Accès au droit et à la justice

PLF 2012

LFI 2011

     

AE

CP

AE

CP

TOTAL DES CRÉDITS

402 872 504

354 837 504

388 037 825

331 337 825

Titre 3 – Dépenses de fonctionnement

462 725

462 725

484 400

484 400

 

Action 2 : Maisons de justice et du droit

462 725

462 725

484 400

484 400

Titre 6 - Dépenses d'intervention

402 409 479

354 374 779

387 553 425

330 853 425

 

Aide juridictionnelle – action 1

384 335 000

336 300 000

369 000 000

312 300 000

 

Autres actions

       

Développement de l'accès au droit et du réseau judiciaire de proximité – action 2

5 487 275

5 487 275

5 515 600

5 515 600

Aide aux victimes – action 3

10 187 504

10 187 504

10 475 000

10 475 000

Médiation familiale et espaces de rencontre –  action 4

2 400 000

2 400 000

2 562 825

2 562 825

C.– LES CRÉDITS DONT DISPOSERONT LES ACTIONS

1.– L’action 1 : Les crédits de l’aide juridictionnelle

a) L’évolution de la dépense et de la dotation depuis 2002

La dépense d’aide juridictionnelle en crédits de paiements est passée de 219,18 millions d’euros en 2002 à 309,65 millions d’euros en 2010, soit une hausse de 41 % en euros courants et 23 % en euros constants. La consommation budgétaire augmente jusqu’en 2007 et baisse depuis cette date, avec une légère remontée en 2010.

La dotation en crédits de paiement inscrite en loi de finances s’est accrue globalement de 12 % entre 2002 et 2011, mais l’évolution est contrastée selon la période.

La dotation inscrite en loi de finances augmente de 2002 à 2007, baisse de 2008 à 2010, et remonte en 2011 et 2012. En 2011, la hausse résultait de l’application du taux normal de TVA à la rétribution des avocats et avoués.

b) Les crédits demandés pour 2012

En 2012, la dotation est de 384,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 336, 3 millions d’euros en crédits de paiement (+ 7,7%). L’augmentation des crédits, complétée par le produit de la contribution de l’aide juridique, permettra de faire face à la dépense effective d’aide juridictionnelle résultant des admissions, ainsi qu’aux dépenses engendrées par la réforme de la garde à vue et l’introduction d’un contrôle juridictionnel du maintien en hospitalisation complète sans consentement en raison de troubles mentaux.

L’action, qui s’élève à 336,3 millions d’euros en 2012 contre 312,3 millions d’euros en crédits de paiement 2011, représente 94,9 % du programme. Les dotations aux CARPA pour la rétribution des avocats et les droits de plaidoirie représentent 91 % de cette dépense, les paiements directs à destination des autres auxiliaires de justice 9 %.

Pour compléter les crédits budgétaires destinés au règlement des missions d’aide juridictionnelle aux avocats, la loi de finances rectificative 2011 a instauré une contribution pour l’aide juridique, taxe que doit acquitter chaque justiciable qui intente une procédure en matière civile et administrative. Cette contribution n’est pas due lorsque la partie est bénéficiaire de l’aide juridictionnelle et pour certaines procédures dans lesquelles le versement de la contribution apparaîtrait comme une entrave disproportionnée au droit d’accès à la justice (procédures devant le juge des libertés et de la détention par exemple). Elle n’est pas non plus exigible pour les affaires pénales. Lorsque l’instance est introduite par un auxiliaire de justice, elle devra être acquittée par voie électronique ; lorsque l’instance est introduite sans auxiliaire de justice, elle sera acquittée par le justiciable sous forme de droit de timbre mobile ou dématérialisé. La contribution est affectée au Conseil national des barreaux (CNB) qui la répartit entre les barreaux et confie, dans le cadre d’une convention, à l’Union nationale des caisses des règlements pécuniaires des avocats (UNCA) la gestion du versement du produit de la taxe aux CARPA pour le paiement des missions d’aide juridictionnelle effectuées par les avocats.

Le produit attendu de cette contribution (84 millions d’euros) et le supplément de crédits budgétaires alloués à cette action en 2012 (+ 24 millions d’euros de crédits de paiement) par rapport à 2011 permettront de faire face à la dépense effective d’aide juridictionnelle résultant des admissions, ainsi qu’aux dépenses engendrées par la réforme de la garde à vue et l’introduction d’un contrôle juridictionnel du maintien en hospitalisation complète sans consentement en raison de troubles mentaux.

La diminution du montant des autorisations d’engagement est liée à un nouveau mode de comptabilisation lié à la gestion sous le logiciel CHORUS. En effet, depuis que la gestion est opérée sous Chorus les dépenses d’aide juridictionnelle sont gérées en AE=CP. Les dotations attribuées aux CARPA au titre de l’aide juridictionnelle ou des aides à l’intervention de l’avocat sont considérées comme des subventions, les autorisations d’engagement couvrant exactement la dotation versée aux barreaux et gérée par les CARPA. Les autres dépenses, qui concernent la rétribution des auxiliaires de justice, dont le bénéficiaire n’est pas toujours connu au moment de l’admission, et dont on ne connaît le montant qu’au moment du paiement, sont traitées en flux 4 c'est-à-dire que le paiement et l’engagement sont concomitants.

Les principaux postes de dépense sont :

–les dotations aux CARPA destinées à la rétribution des avocats en matière d’aide juridictionnelle : 185 930 000 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 246 millions d’euros en crédits de paiement en 2011. Cette diminution est liée au fait qu’une partie de l’aide juridictionnelle sera financée par le produit de la contribution pour l’aide juridique affectée au CNB ;

– les dotations destinées à la rétribution des autres auxiliaires de justice : 36 490 000 euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit un montant identique à celui des crédits de paiement en 2011 ;

– la rétribution des avocats au Conseil d’État, frais de traduction des demandes d’aide juridictionnelle pour les litiges transfrontaliers en matière civile ou commerciale : 150 000 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement ;

– l’aide à l’intervention de l’avocat au cours d’une garde à vue, en matière de médiation et de composition pénales, au cours d’une procédure disciplinaire ou d’une mesure d’isolement concernant un détenu : 107,43 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 21,12 millions d’euros en 2011. Cette augmentation résulte de la rétribution par l’État de l’avocat qui assiste désormais les personnes gardées à vue ou en retenue douanière lors des auditions, et les victimes lors des confrontations avec la personne gardée à vue. Les crédits destinés à la rétribution des avocats pour leurs interventions au cours de la garde à vue ou de la retenue douanière sont évalués à 103,8 millions d’euros, à 0,23 million d’euros pour la médiation pour la composition pénale et à 3,4 millions d’euros pour l’assistance des détenus au cours des mesures disciplinaires ou d’isolement ;

– les protocoles d’amélioration de la défense des justiciables conclus entre les juridictions et les barreaux : 5,55 millions d’euros contre 6,3 millions d’euros en 2011 ;

– les conventions pour l’organisation matérielle de la garde à vue ou de la retenue douanière 750 000 euros. Aucun crédit n’était inscrit en 2011.

2.– Stabilité des crédits en faveur de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité

Le budget de l’action 02 s'élève en 2012 à 5,94 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, contre 6 millions d’euros en 2011. La diminution de l’enveloppe concerne exclusivement les crédits de premier équipement des maisons de la justice et du droit, de renouvellement du matériel informatique ou du mobilier de ces établissements judiciaires et de mise en place de bornes interactives, les « contacts visio justice », ainsi que le soutien aux associations nationales.

– La dotation au profit des maisons de la justice et du droit (MJD) s’élèvera à 0,9 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2012 contre 0,975 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement programmés en 2011 : 0,16 million d’euros relèveront du titre 3 (pour l’équipement de ces structures) et 0,74 million d’euros du titre 6 (pour l’attribution de subventions d’investissement aux collectivités locales qui aménagent leurs propres locaux pour accueillir des MJD). Le coût de la dotation de 1er équipement par MJD pour l’achat de mobilier et de postes informatiques a été porté à 13 000 euros en 2012 contre 11 455 euros en 2011.

– 0,297 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement seront affectés au financement, en titre 3, de bornes interactives pour une inscription de 0,31 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement au PLF 2011.

– 0,08 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 0,17 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement l’an passé sont destinés au soutien des associations nationales spécialisées réalisant des actions d’envergure nationale dans le domaine de l’accès au droit.

– 4,66 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 4,55 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011 sont destinés au soutien de l’activité des 96 conseils départementaux d’accès au droit (CDAD) existants au 1er août 2011, 1 CDAD supplémentaire devrait voir le jour d’ici la fin de l’année. La création des 4 derniers CDAD, et des conseils de l’accès au droit de Polynésie Française ainsi que de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, qui n’ont jusqu’alors pu être constitués faute d’accord permettant la signature de la convention constitutive, devraient voir le jour en 2012 : avec la création de ces CDAD et CAD la totalité du territoire national sera ainsi couvert. Le coût total de ces créations est estimé à 120 000 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, soit une moyenne de 20 000 euros par CDAD et CAD.

Le budget de l’action 02 s'élève en 2011 à 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement contre 6,36 millions d’euros en crédits de paiement en 2010. La diminution de l’enveloppe concerne exclusivement les crédits à destination des maisons de la justice et du droit dont les crédits sont ramenés à un niveau équivalent à la consommation prévue en 2010.

Au 1er juillet 2010, 94 départements sont dotés d’un conseil départemental d’accès au droit. Les six CDAD qui n’ont jusqu’alors pu être constitués faute d’accord permettant la signature de la convention constitutive devraient voir le jour en 2011 : avec la création de ces six conseils la totalité du territoire national sera couverte. Le coût total de ces créations est estimé à 120 000 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, soit une moyenne de 20 000 euros par conseil.

Les dépenses de soutien à l’activité des 94 conseils existants, d’un montant total de 4,4 millions d’euros, sont calculées sur la base d’un coût moyen de 47 000 euros par conseil.

La gestion tendue du personnel dans les juridictions est telle qu’il n’est pas toujours possible d’affecter des greffiers dans les MJD. Les postes sont dans certains cas pourvus grâce à la mise à disposition de contrats aidés par les conseils départementaux d’accès au droit et l’affectation d’agents de catégorie C des services judiciaires. C’est ainsi que 31 maisons fonctionnent sans greffier, 12 avec un personnel de catégorie C, et 19 structures fonctionnent à l’heure actuelle avec des personnels mis à disposition par les collectivités territoriales.

3.– L’aide aux victimes

Le budget de l’action Aide aux victimes pour 2012 s’élève à 10,19 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 10,475 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011. Ce financement concerne :

– pour 8,49 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, le réseau des associations locales d’aide aux victimes sur le territoire national, contre 8,67 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011 ;

– pour 1,6 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, les actions nationales et associations ou fédérations intervenant au niveau national, contre 1,69 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011 ;

– pour 0,1 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, le fonds de réserve pour les accidents collectifs et les procès exceptionnels, contre 0,09 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011.

4.– La médiation familiale et les espaces de rencontre

Les crédits d’intervention relatifs à ce domaine s'élèvent en 2012 à 2,40 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, contre 2,56 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011 :

– 2,325 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 2,48 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011, pour le financement du réseau des associations de médiation familiale financées par les comités départementaux des financeurs et d’espaces de rencontre sur le territoire national ;

– 0,075 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement contre 0,08 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2011 pour le développement du partenariat avec les fédérations et les associations nationales de médiation familiale et d’espaces de rencontre.

Les crédits d’intervention s'élèveront à 2,65 millions d’euros en crédits de paiement. Ils financeront principalement le réseau des associations de médiation familiale et d’espaces de rencontre : la dotation pour le fonctionnement des espaces de rencontre et le recrutement de médiateurs est complétée par les financements mis en place par les caisses d’allocations familiales (CAF) dans le cadre du protocole national de développement de la médiation familiale.

On soulignera qu’un partenariat se développe avec les fédérations et les associations nationales de médiation familiale et d’espaces de rencontre, avec lesquelles le ministère a signé en 2009 des conventions pluriannuelles d’objectifs pour deux ans.

D.– LA RÉFORME DE LA GARDE À VUE ET SON IMPACT BUDGÉTAIRE

La loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue a renforcé les droits de la défense des personnes placées en garde à vue ou en retenue douanière.

Comme précédemment, dès le début de la garde à vue, la personne peut demander un entretien confidentiel d’une durée maximale de trente minutes avec un avocat. Si elle n’est pas en mesure d’en désigner un ou si l’avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu’il lui en soit commis un d’office par le bâtonnier. Lorsque la garde à vue fait l’objet d’une prolongation, la personne peut également demander à s’entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation selon les mêmes modalités. (CPP., art. 63-4 et 63-3-1).

La personne gardée à vue peut désormais demander également que l’avocat assiste à ses auditions et confrontations (article 63-4-2).

L’avocat peut désormais consulter les pièces suivantes de la procédure : PV de placement en garde à vue et des droits y étant attachés, certificat médical et PV d’audition et de confrontation de la personne qu’il assiste. Il peut également prendre des notes (article 63-4-1). À l’issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste, l’avocat peut poser des questions. Il peut également présenter des observations écrites qui sont jointes à la procédure (63-4-3).

Si la victime est confrontée avec une personne gardée à vue, elle peut demander à être aussi assistée par un avocat choisi par elle ou désigné par le bâtonnier à sa demande (article 63-4-5).

L’article 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique a été modifié et complété afin de permettre la rétribution, au titre de l’aide à l’intervention de l’avocat, des avocats désignés d’office qui interviennent au cours d’une mesure de garde à vue ou de retenue douanière.

Le décret n° 2011-810 du 6 juillet 2011 relatif à l’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue et de la retenue douanière a modifié en conséquence le barème de la contribution de l’État à la rétribution de l’avocat et introduit les adaptations nécessaires de l’attestation d’intervention et des règles de gestion financière et comptable des caisses des règlements pécuniaires des avocats (CARPA). S’il exclut par ailleurs du champ des protocoles de défense pénale les missions d’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue, il prévoit l’attribution d’une subvention aux barreaux pour couvrir tout ou partie des frais d’organisation matérielle des permanences.

Le barème de la contribution de l’État varie selon la nature de l’intervention de l’avocat :

– lorsque l’avocat intervient uniquement pour un entretien avec la personne gardée à vue au début de la garde à vue ou de la prolongation de cette mesure, la contribution de l’État est forfaitairement fixée à 61 euros hors taxes ;

– lorsqu’il intervient pour s’entretenir avec la personne gardée à vue, puis pour assister cette dernière lors de ses auditions et confrontations au cours des 24 premières heures, la contribution de l’État est forfaitairement arrêtée à 300 euros hors taxes. En cas de prolongation, la rétribution complémentaire est de 150 euros hors taxes ;

– lorsqu’il assiste la victime lors de confrontations avec la ou les personnes gardées à vue, le forfait est de 150 euros hors taxes.

Ce barème est applicable à toutes les demandes de règlement présentées au titre des missions d’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue, de la retenue douanière ou de la retenue pour mineurs de moins de 13 ans accomplies à compter du 15 avril 2011.

Par ailleurs, la contribution de l’État à la rétribution de l’avocat ayant accompli plusieurs interventions par période de 24 heures est, quel que soit le nombre d’interventions réalisées, plafonnée à 1 200 euros hors taxes.

Enfin, comme en matière d’aide juridictionnelle (5) en cas de changement d’avocat désigné d’office pendant une mission d’assistance, il n’est dû qu’une contribution de l’État, qui est allouée au dernier avocat à charge pour lui de la partager avec le ou les avocat(s) qui sont également intervenus. L’attestation d’intervention est délivrée au dernier avocat. Les difficultés liées au partage sont tranchées par le bâtonnier.

Ces dispositions sont applicables à la rétribution de l’avocat désigné d’office intervenant au cours d’une mesure de retenue douanière ou au cours d’une mesure de retenue pour les mineurs de moins de 13 ans. La circulaire du ministère de la justice du 12 juillet 2011 est venue présenter ces nouvelles dispositions ainsi que le nouveau formulaire rendu nécessaire par la réforme.

Les crédits nécessaires à la rétribution des avocats au cours de la garde à vue en année pleine sont estimés à 103,8 millions d’euros permettant de rétribuer 264 000 entretiens et auditions et/ou confrontations au cours des 24 premières heures (52 800 entretiens seuls et 211 200 entretiens suivis d’une assistance aux auditions), 66 000 au cours de prolongations ainsi que 59 000 confrontations entre le gardé à vue et la victime.

VII.– LE PROGRAMME DE CONDUITE ET PILOTAGE

Le programme Conduite et pilotage de la politique de la justice est placé sous la responsabilité du secrétaire général du ministère de la justice et des libertés publiques et regroupe l’ensemble de ses activités :

– une fonction d’état-major du ministère de la justice et des libertés ;

– une fonction de conception et d’élaboration de la norme de droit ;

– une fonction transversale de coordination et de synthèse pour l’ensemble des programmes rattachés à la mission Justice ;

– une fonction de prestation de services pour le compte des autres programmes de la mission Justice.

A.– UNE MESURE DE LA PERFORMANCE REMANIÉE

La mesure de la performance est modifiée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012. Conformément aux orientations arrêtées au niveau gouvernemental, le programme 310 présente des indicateurs de performance ministériels sur les ratios d’efficience bureautique, ressources humaines et sur le respect de l’obligation d’emploi des personnes handicapées. Les indicateurs reflètent la performance de l’ensemble des programmes et, non à strictement parler, celle du secrétariat général en charge du programme 310.

Le programme a également revu les indicateurs de performance en matière informatique en mettant en place un nouvel indicateur sur l’efficience des applications nationales qui assurent notamment le bon fonctionnement de la chaîne pénale.

L’architecture des budgets opérationnels de programme ne connaît pas d’évolution.

Le programme 310 comprend désormais six actions qui prennent en compte les principales missions des services du secrétariat général et permettent une analyse de la performance :

– action 01 État-major ;

– action 02 Activité normative ;

– action 03 Évaluation, contrôle, études et recherche ;

– action 04 Gestion de l’administration centrale ;

– action 09 Action informatique ministérielle ;

– action 10 Action sociale ministérielle.

Ce programme présente la particularité de disposer d’unités opérationnelles délocalisées : antennes régionales de l’équipement, antennes régionales du système d’information et des télécommunications, et antennes régionales d’action sociale. Conformément aux préconisations de la révision générale des politiques publiques, ces antennes en 2012 vont se regrouper au sein de plateformes interégionales de mutualisation des fonctions support. Ce déploiement va se faire au bénéfice des juridictions et des services déconcentrés du ministère et constitue un enjeu central pour ce programme.

Les priorités et lignes directrices retenues par le projet de budget pour 2012 pour le programme 310 s’inscrivent dans le prolongement de celles arrêtées en 2011 ; elles visent en particulier à améliorer la qualité des prestations de soutien aux services et directions du ministère, à prendre une part active à la modernisation de l’organisation et du fonctionnement du ministère.

B.– LES CRÉDITS DU PROGRAMME EN HAUSSE DE 5 % EN CRÉDITS DE PAIEMENT

Les crédits du programme augmentent de 6 % en autorisations d’engagement et progressent de 5 % en crédits de paiement.

PROGRAMME CONDUITE ET PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE

(en millions d’euros)

Intitulé du programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
2012/2011

(%)

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
2012/2011

(%)

1 – État-major

9,4

10,6

13%

9,4

10,6

13%

2 – Activité normative

20,6

21,6

5%

20,6

21,6

5%

3 – Évaluation, contrôle, études et recherche

11

11,7

6%

11

11,7

6%

4 – Gestion de l’administration centrale

70 ,4

86,6

23%

90,6

101,2

12%

9 – Action informatique ministérielle

102,7

97,7

-5%

101,5

100,6

-1%

10 – Action sociale ministérielle

33,9

35

3%

33,9

35

3%

Total

248

263,2

6%

267

280,7

5%

Source : projet annuel de performances pour 2012.

Le plafond d’emplois du programme s’élève à 1 822 ETPT, en baisse de 30 ETPT.

Le plafond d’autorisation d’emplois du programme tient compte des mouvements suivants :

– l’extension en année pleine des départs prévus en 2011, soit – 7 ETPT ;

– le non-remplacement des 16 départs en retraite prévus en 2012 ;
soit – 8 ETPT ;

– les transferts importants en 2012 du fait de la mise en place des plates-formes interrégionales.

Sont prévus 3 ETPT en transferts sortants et 391 en transferts entrants répartis comme suit :

– 148 transferts venant du programme Administration judiciaire ;

– 167 transferts venant du programme Justice judiciaire ;

– 76 venant du programme Protection judiciaire de la jeunesse.

L’administration centrale appliquera en 2012 comme en 2011 le principe de non-remplacement d’un agent sur deux partant à la retraite dans l’ensemble des services à l’exception du service informatique.

Il est prévu une nouvelle mesure indemnitaire de 300 000 euros, contre 200 000 l’an dernier. Cette mesure permettra de financer :

– la part « résultats » de la PFR des attachés de l’administration centrale mise en place en 2011. Cette ligne a été « gelée » tout au long de l’année 2011 en attendant le retour des entretiens d’évaluation supposant une réévaluation de cette part modulable pour un certain nombre d’agents.

– la prime de fonction et de résultats des secrétaires administratifs mise en place à partir de janvier 2012 ;

– la réforme statutaire des catégories B (nouvel espace statutaire) mise en place en octobre 2011, d’une part, la mise en place de la prime de fonction et de résultats pour les attachés de l’administration centrale et, d’autre part, de financer le projet de réforme de la reconstruction des grilles des corps de catégorie B.

Le budget du programme 310 pour 2012 est également marqué par une volonté de poursuivre la maîtrise des dépenses de fonctionnement courant. Les dotations accusent une baisse de 5 % en moyenne.

C.– DES CHANGEMENTS IMMOBILIERS ET LOGISTIQUES TRÈS IMPORTANTS

L’action 4 Gestion de l’administration centrale se rapporte à la politique immobilière et logistique du ministère.

Les crédits de cette action sont en nette progression 86 millions d’euros prévus en 2012 au lieu de 70 millions en 2011en autorisations d’engagement et 101 millions d’euros en 2012 au lieu de 86 millions d’euros en crédits de paiement.

Cette progression viendra financer notamment la création de plateformes interrégionales de services. Les crédits de fonctionnement inscrits sur l’action 04 Gestion de l’administration centrale intègrent une mesure de transferts entrants en provenance des programmes 166 Justice judiciaire, 107 Administration pénitentiaire et 182 Protection judiciaire de la jeunesse dans le cadre de la création programmée de plateformes interrégionales de services, à hauteur de 2,16 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

Cette réforme qui doit permettre de mutualiser les moyens regroupés autour de neuf ensembles interrégionaux, impacte toutes les directions du ministère, au-delà du seul secrétariat général. La recherche des nouvelles implantations, et la négociation des baux qui en résulte sont menées en lien étroit avec les services de France Domaine.

La réduction du nombre des sites parisiens de l’administration centrale est l’axe principal de la stratégie immobilière de la chancellerie, définie en 2008 dans le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) présenté au Conseil de l’immobilier de l’État. Le ministère a déjà quitté une implantation en 2008, rue de l’Université, pour densifier un site. Elle a quitté des locaux situés place Vendôme pour des locaux moins onéreux situés rue Thoreton dans le XVème arrondissement.

Le ministère de la Justice et des libertés souhaite réunir les 1 570 agents occupant 4 de ces 7 implantations sur un site disposant d’une surface utile brute d’environ 30 000 m². À terme, les quelques services qui ne rejoindront pas ce site seront répartis entre le site historique de la place Vendôme et les locaux pris à bail à Thoreton.

Un tel regroupement, offrant des perspectives de mutualisation et de rationalisation du fonctionnement des services, permettra en outre, de réduire le coût annuel des charges immobilières ainsi que certaines dépenses de fonctionnement par effet d’échelle et suppression de tâches doublonnées jusqu’alors (accueil – sûreté – sécurité – maintenance – parc auto – etc.). À cet effet, un cahier des charges relatif au besoin a été publié en début 2011 et cette consultation a donné lieu en retour (avant la date limite du 20 juillet 2011) à plus de 50 propositions différentes qui sont toutes actuellement en cours d’étude par les services respectifs du secrétariat général du MJL et de France domaine, assistés du bureau d’études AOS Studley, missionné à cet effet au terme d’une procédure de mise en concurrence.

Le choix final du site de regroupement devrait intervenir avant fin 2011 et sa mise en service pourrait avoir lieu en 2013 (hypothèse d’occupation d’une construction existante) ou en 2015 (hypothèse d’un bâtiment à construire).

Ce délai entraîne des dépenses liées à la poursuite de l’occupation des sites, pour certains aux termes d’une convention d’occupation précaire (5 bd de la Madeleine et 21 rue Saint Fiacre).

Les locations et charges immobilières sont évaluées 25,3 millions d’euros, les loyers budgétaires de 7,6 millions d’euros et le fonctionnement courant va connaître comme l’an dernier une forte baisse passant de 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement à 3,9 millions d’euros.

Une centaine de projets en cours d’étude ou de réalisation sont gérés par l'Agence publique pour l'immobilier de la justice (APIJ), établissement public administratif sous tutelle du ministère de la Justice.

Depuis 2010, en application du décret n° 2010-43 du 12 janvier 2010, l’APIJ gère directement les personnels et moyens de fonctionnement de l’Établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP), qui lui rembourse les crédits correspondants dans les conditions prévues par une convention de gestion passée entre les deux établissements. En vertu de cette convention, l'EPPJP n'a plus de personnels en gestion directe (absence de comptes de personnels) lesquels figurent dans les emplois budgétaires de l'APIJ.

En 2011, les effectifs budgétaires de l’Agence exprimés en équivalents temps plein travaillés (ETPT) ont été fixés à 110 (95 pour l’APIJ et 15 pour l’EPPJP). L’effectif moyen prévu est de 110 ETPT (exécution 2010 au global : 108,8).

Le montant de la subvention pour charge de service public inscrite au PAP 2012 est de 9 351 440 euros hors taxes. La subvention à l’APIJ apparaît faussement en baisse par rapport à la subvention inscrite au budget 2011. Or, cette baisse est liée au fait que la subvention ne sera pas soumise à la TVA en 2012, contrairement aux règles de calcul retenues jusque-là.

Compte tenu du plan de charge exceptionnel de l’Agence, qui comporte simultanément le programme d’adaptation immobilière des palais de justice à la nouvelle carte judiciaire et le lancement d’un nouveau programme pénitentiaire d’ampleur, les effectifs seront portés de 110 ETPT à 113 ETPT, par redéploiement au sein du tableau des emplois des opérateurs sous tutelle du ministère de la justice et des libertés.

L’agence gère les moyens de l’établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP), ce qui représentait en 2010 une gestion de crédits supplémentaires de 2,2 millions d’euros et 15 ETP.

L’établissement public du Palais de justice de Paris, créé en 2004, recevra une subvention pour charges de service public de 2,44 millions d’euros pour 2012.

D.– LA « RÉVOLUTION INFORMATIQUE » DU MINISTÈRE

Le ministère de la justice et des libertés s’est engagé dans un vaste programme de modernisation au sein duquel les systèmes d’information et de télécommunications constituent un levier majeur, destiné à la fois à améliorer l’efficacité de l’action de la justice et les conditions de travail des agents du ministère.

Le budget de l’action informatique ministérielle s’est élevé à 102 millions d’euros en 2011 dont 57 millions de fonctionnement courant. Le budget 2012 est prévu à hauteur de 97,70 millions d’euros en autorisations d’engagement et 100,57 millions d’euros en crédits de paiement, dont 20,56 millions d’euros pour le titre 2 (AE=CP).

Ainsi, la revue des projets menée par le ministère a répondu d’une part, aux exigences de l’amélioration de la gestion interne : développement de la dématérialisation, transversalité entre les différentes directions du ministère, amélioration de l’urbanisation des systèmes d’information et d’autre part, à la mise en œuvre des réformes entreprises dans le cadre de la RGPP : dématérialisation de la chaîne pénale, développement de la visioconférence.

Les effectifs de la sous-direction de l’informatique et des télécommunications sont renforcés en réponse à la recommandation formulée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques relative au recours trop fréquent à l’externalisation faute de certaines compétences critiques en interne.

En 2012, la mise en œuvre des départements de l’informatique et des télécommunications (DIT) s’accompagne du transfert de 89 emplois de contractuels en provenance des programmes 107, 166 et 182.

Cinq grands projets informatiques structurants font l’objet d’un effort particulier :

– 5,28 millions d’euros pour l’amélioration des infrastructures ;

– 9,25 millions d’euros pour la plateforme des interceptions judiciaires ;

– 3,37 millions d’euros pour Cassiopee (chaîne applicative supportant le système d’information opérationnel pour le pénal et les enfants) ;

– 3,62 millions d’euros pour Genesis (réécriture de GIDE – Gestion Informatisée des Détenus en Établissement) ;

– 1,22 million d’euros pour le Casier judiciaire national.

1.– La nouvelle chaîne civile « Portalis »

Cette nouvelle chaîne civile doit remplacer les applications civiles utilisées au sein des tribunaux d’instance et de grande instance, mais son périmètre correspondra en fait aux compétences civiles des cours d’appel, des tribunaux de grande instance, des tribunaux d’instance et des conseils des prud’hommes.

La chaîne civile unique permettra des échanges de données entre les différents degrés de juridictions ayant à connaître d'une même affaire. Elle devra assurer la communication électronique avec les auxiliaires de justice, avocats et huissiers. L’étude de réalisation de la chaîne est en cours de lancement.

En matière civile, le ministère de la Justice et des libertés est résolument engagé sur le terrain des nouvelles technologies, gage d’une justice plus rapide et plus efficace. Néanmoins, l’obsolescence annoncée des applications informatiques civiles utilisées en juridiction rend nécessaire le lancement du projet de création d’une nouvelle chaîne civile informatique.

Cette nouvelle chaîne civile, dénommée « Portalis », remplacera les applications civiles utilisées au sein des tribunaux d’instance, pour la plupart développées il y a une quinzaine d'années, mais également celles des tribunaux de grande instance mises en service à partir de 1996. Cette nouvelle application civile aura un périmètre assez vaste correspondant aux compétences civiles des cours d’appel, des tribunaux de grande instance, des tribunaux d’instance et des conseils des prud’hommes.

Cette chaîne civile unique permettra des échanges de données entre les différents degrés de juridictions ayant à connaître d'une même affaire. Elle devra de la même manière poursuivre l’essor de la communication électronique avec les auxiliaires de justice (avocats, huissiers...). Elle nécessitera donc une conception ouverte sur les autres applicatifs susceptibles d'interagir avec elle.

Portalis s'appuiera d'une part sur les technologies les plus modernes permettant une administration simplifiée, un accès délocalisé et une garantie de sécurité et d'autre part sur des cycles de développement courts imposés par l'évolution fréquente des normes législatives et réglementaires. Seront en particulier étudiés les points sur lesquels une dématérialisation serait susceptible d’apporter des améliorations dans le travail des juridictions (gain de temps, de productivité, baisse des coûts de fonctionnement, simplification du travail des greffiers et des magistrats, etc.).

Cette application ne pourra être lancée qu’une fois le déploiement de Cassiopée achevé. Le lancement de l'étude de cadrage relative à cette application devrait avoir lieu prochainement.

2.– La mise en œuvre de la chaîne pénale « Cassiopée »

Le projet essentiel en matière informatique est l’installation de l’application centralisée Cassiopée, qui doit couvrir l’ensemble des services de la chaîne pénale, y compris les applications informatiques destinés aux juges d’instruction et aux juges des enfants.

Au sein des services pénaux d’un tribunal de grande instance, seul le service de l’application des peines continuera à disposer de son propre système (dit « APPI »), partagé avec l’administration pénitentiaire, qui fera l’objet d’une interface avec Cassiopée.

L’application Cassiopée constitue le support technologique du Bureau d’ordre national instauré par l’article 48-1 du code pénal qui permet le partage entre les différentes juridictions d’informations essentielles à la conduite de l’action publique. Elle a été instituée par un décret en Conseil d’État du 11 mai 2009 (n° 2009-528), en application des dispositions précitées.

Cette application est conçue pour échanger des données structurées avec les systèmes d’informations de la même génération des autres ministères, afin d'éviter les ressaisies d'une application à l'autre, qui sont sources d'erreur et de perte de temps.

Les échanges avec les services enquêteurs constituent à cet égard une priorité du projet Cassiopée, non seulement au regard des enjeux stratégiques (mise à jour des fichiers de police, RGPP, réforme de la procédure pénale) mais aussi parce qu’ils sont le « retour sur investissement » le plus significatif pour les juridictions.

L’objectif consiste en l'occurrence à récolter en « entrée » les données structurées des procédures pénales transmises par les services enquêteurs à la justice (notamment noms et prénoms des auteurs, des victimes, codification de l’infraction à la norme NATINF, liens entre ces données), afin d’éviter une nouvelle saisie dans Cassiopée des informations enregistrées informatiquement par les enquêteurs dans leurs outils en amont de la chaîne. En sortie, ce dispositif doit permettre d’automatiser la mise à jour des fichiers d’antécédents, plus précisément le fichier TPJ. Il s'agit donc d'un complément majeur aux simples échanges d'équivalents électroniques de procédure évoqués ci-dessus.

150 TGI sur un total de 159 (après réforme de la carte judiciaire) en sont désormais dotés. Il reste à implanter les TGI de Versailles, Pontoise, Nanterre, Bobigny, Créteil, Paris, Pointe-À-Pitre, Basse-terre, Fort-de-France et Cayenne. L'objectif est désormais de terminer le déploiement fin 2012.

Les premiers échanges expérimentaux avec les services de gendarmerie sont en cours d’expérimentation dans les TGI de Poitiers, Angoulême et Evreux depuis mi-2011. L’objectif est de procéder à une généralisation à compter de décembre. Les travaux avec la police permettent d’envisager une expérimentation en mars 2012.

Le projet Cassiopee a été engagé fin 2001. La société ATOS ORIGIN a développé le logiciel dans le cadre d'un marché qui s'est terminé en décembre 2009. À la suite d'un appel d'offres lancé fin 2009, la société GFI est devenue attributaire du marché de maintenance, et ce depuis avril 2010.

L'application, système centralisé accessible par le RPVJ (intranet justice), est aujourd'hui opérationnelle. Elle permet le traitement de l'ensemble des procédures pénales des tribunaux de grande instance, incluant les procédures des cabinets d'instruction et des enfants. Elle offre un INFOCENTRE (statistiques) dont la première version permet l'extraction des cadres de base. Elle est conçue pour être inter-opérable avec des applications internes au ministère (application des peines et casier judiciaire) mais également externes (échanges Justice / police gendarmerie).

Des difficultés ont été rencontrées dans le cadre du déploiement de CASSIOPEE, et particulièrement dans les cabinets des juges d'instruction et des juges des enfants. Elles ont notamment pour origine la reprise des données des anciennes applications, indispensable au fonctionnement du Bureau d'ordre national instauré par l'article 48-1 du code de procédure pénale. Cette reprise génère pour les juridictions une charge de remise à niveau de certains dossiers. C'est pourquoi, des crédits vacataires fléchés CASSIOPEE ont été spécialement délégués en 2009, 2010 et 2011. Le fléchage 2012 est en cours d’évaluation.

Parallèlement le logiciel doit encore faire l'objet d'évolutions et d'améliorations fonctionnelles. Les travaux prioritaires concernent l'exécution des peines, le système d'édition (actuellement très critiqué par les juridictions) et la gestion des affaires dites complexes (considérée comme trop lourdes par les juridictions). Une nouvelle méthode de conception a été mise en place avec les juridictions pour les nouvelles versions évolutives.

Compte tenu de la montée en charge très dynamique du déploiement, certains incidents techniques ont pu survenir. La sous-direction de l'informatique et des télécommunications (SDIT) a engagé un plan d'actions global afin de sécuriser le déploiement et d'adapter le système aux contraintes techniques liées aux implantations parisiennes.

Le système CASSIOPEE induit des impacts organisationnels significatifs dans les services des juridictions. Un référentiel, réalisé par la direction de projet, diffusé en février 2010, à la demande du ministre, propose des scénarios de réorganisation. L'implantation du système peut donc créer des « tensions » dans les services qui supposent la mise en oeuvre d'un véritable projet de service porté par les chefs de juridiction et directeurs de greffe. L'implication de la hiérarchie, à commencer par les chefs de cour, est donc primordiale dans la réussite de l'implantation qui ne doit en aucun cas être considérée comme un « sujet purement technique ».

Cassiopée a engagé plusieurs actions du ministère :

– le déploiement de l'application Cassiopee dans les TGI concernés par la réforme de la carte judiciaire a constitué un pré requis à la mise en oeuvre de cette réforme. Les opérations de transfert se sont bien déroulées ;

– la formation initiale et continue des magistrats et fonctionnaires est un enjeu essentiel. Le rôle des écoles (ENM et ENG) a ainsi été renforcé ainsi que celui des cours d'appel à travers le réseau des SAR ;

– la coordination avec l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) a été renforcée par la désignation d'un inspecteur référent et la participation de l'inspecteur général aux instances de gouvernance du projet ;

– un observatoire du déploiement constitué des organisations syndicales (magistrats et fonctionnaires) et de représentants des juridictions pilotes a été constitué en mars 2009 à la suite d'un mouvement social au TGI de Bordeaux. Il est réuni au ministère tous les 2 à 3 mois pour faire un point sur l'avancée du projet. Les organisations syndicales sont régulièrement invitées à se rendre dans des TGI implantés et sont systématiquement rencontrées au niveau des cours d'appel par la direction du projet ;

– la sécurité fait l'objet d'une attention très forte. Une étude globale de sécurité est engagée pour répondre aux obligations réglementaires issues du nouveau référentiel de sécurité, et ce à la suite d'une inspection de l'ANSSI. Le traçage des consultations est désormais opérationnel conformément aux exigences de la CNIL

– un comité de liaison interne regroupant l'ensemble des services concernés par l'impact du déploiement de CASSIOPEE (ressources humaines, organisation judiciaire, performances et méthodes, direction du projet) est réuni à la direction des services judiciaires tous les mois et demi. 

Le total des sommes engagées au titre de la réalisation, de la maintenance et de l’assistance à maîtrise d’ouvrage de CASSIOPEE, au-delà des seuls échanges inter-applicatifs, représente la somme de 44 404 351 euros répartie comme suit (état au 30 juin 2011) :

CRÉDITS ENGAGÉS POUR CASSIOPÉE

(en euros)

 

Année d'attribution

Titulaire

Montant commandé

Montant maximum

Marché de réalisation

2003

Atos Origin

24 935 059

30 872 489,13

Marché relais

2009

Atos Origin

5 715 423

6 262 803,19

Sous total réalisation et déploiement

30 650 482

37 135 292,32

Marché de TMA

2010

GFI

3 163 271

11 576 932,86

Sous total tierce maintenance applicative

3 163 271

11 576 932,86

Marché d'AMOA

2005

Sopra Group

103 733

1 053 442,97

Marché d'AMOA

2006

Sopra Group

901 705

898 375,40

Marché d'AMOA

2007

Sopra Group

9 585 160

9 595 515,00

Sous total assistance à maîtrise d’ouvrage

10 590 598

11 547 333,37

TOTAL

44 404 351

60 259 558,55

Source : Sous-direction de l'informatique et des télécommunications, secrétariat général, ministère de la Justice et des libertés.

Les prévisions pour le second semestre 2011 sont au titre du marché de TMA, 860 000 euros et au titre du marché d’AMOA, 1 137 042 euros sur le fondement d’un marché complémentaire notifié en juillet 2011.

Pour l’année 2012, le montant prévisionnel des dépenses s’élèverait à 3 900 000 euros, se répartissant entre les dépenses de maintenance pour 900 000 euros et les dépenses nouvelles pour 3 000 000 euros (AMOA et TMA).

3.– La progression des échanges dématérialisés entre les professions de justice

a) Les échanges dématérialisés avec les avoués et les avocats

Une convention nationale a été signée le 16 juin 2010 avec le Conseil National des Barreaux qui étend la convention de 2007 limitée aux échanges dématérialisés avec les tribunaux de grande instance aux cours d’appel et aux tribunaux d’instance.

La convention nationale « communication électronique » signée avec la chambre nationale des avoués, reconduite fin 2009 jusqu’au 31 décembre 2010 puis, l'arrêté du 23 décembre 2010 relatif à la communication électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel ont fixé le cadre des échanges entre les avoués et les cours.

La perspective de l’intégration prochaine des avoués au sein de la profession d’avocats et la difficulté à faire évoluer leur dispositif de communication électronique, a conduit à inciter les avoués qui le souhaitaient à rejoindre le dispositif de communication utilisé par les avocats, E-barreau.

Ainsi, entre les auxiliaires et les cours, la communication est désormais effectuée via des réseaux sécurisés (RPVJ pour les juridictions, RPVA pour les avocats et avoués).

Les auxiliaires peuvent échanger des messages avec le greffe et consulter toutes les informations nécessaires sur l’état d’une procédure en cours devant le tribunal (calendrier, événements, décisions prises…) en temps réel, ces données provenant de la chaîne civile informatique des juridictions civiles devant les tribunaux de grande instance et les cours d'appel.

Ainsi les audiences physiques de mise en état sont réservées aux dossiers d'incidents ou aux contentieux complexes, les autres audiences devenant « virtuelles ». Une réduction de 80% du nombre des dossiers évoqués en audiences « réelles » de mise en état a pu être constatée dans les TGI les plus avancés en matière de communication électronique civile. De même, les postulants peuvent suivre en ligne la progression de leur affaire dès que les données sont saisies par le greffe ; ils limitent ainsi leurs déplacements aux audiences et au greffe, et ce dernier passe lui-même moins de temps à renseigner les postulants.

De plus, grâce aux échanges de « données structurées », c'est-à-dire venant impacter directement l’application des greffes, sans ressaisie manuelle, le greffe ne saisit plus certaines des données dans la chaîne civile de la juridiction mais en contrôle la qualité.

L’ensemble des tribunaux de grande instance et des cours d'appel sont équipés du module COMCI, version TGI ou CA, adjoint à l'application chaîne civile utilisée par la juridiction. Ce module permet l’échange sécurisé d’un certain nombre de données et de documents entre ces juridictions et les auxiliaires.

Sont actuellement échangées sous forme de « données structurées », l'inscription des avocats aux services de la communication électronique civile et l’inscription aux audiences de référés. Les autres messages sont relatifs à la mise en état : demande de renvoi, envoi des conclusions, bordereau de pièces, etc.

Les auxiliaires de justice se connectent quant à eux au portail « e-barreau » développé par le conseil national du barreau (CNB) après s’être authentifiés grâce à une clef électronique sécurisée personnelle.

Cette authentification permet la signature requise notamment sur les conclusions ou les déclarations d’appel. En effet, le décret n° 2010-434 du 29 avril 2010 relatif à la communication par voie électronique en matière de procédure civile prévoit que vaut signature, pour l’application des dispositions du code de procédure civile aux actes que les auxiliaires de justice assistant ou représentant les parties notifient ou remettent à l’occasion des procédures suivies devant les juridictions des premier et second degrés, l’identification réalisée lors de la transmission par voie électronique, selon les modalités prévues par les arrêtés ministériels pris en application de l’article 748-6 du CPC (code de procédure civile).

Les fonctionnalités du module de communication COMCI s’enrichissent régulièrement pour améliorer les échanges et poursuivre la dématérialisation des procédures civiles, par échanges de données structurées, saisies en amont par les auxiliaires et intégrées directement dans les applications des greffes, sans charge de re-saisie.

Plus modestement, les échanges entre avocats et tribunaux d’instance sont envisagés actuellement sous la forme d’échange de messages via la connexion entre les réseaux privés de chacune des parties.

b) Les échanges dématérialisés avec les huissiers de justice

L’outil « IP-WEB » est l'un des trois projets réalisés en partenariat avec la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre du partenariat conclu le 10 juillet 2007 et ayant abouti à la constitution d'un Groupement d'intérêt public.

IPWEB permettre la communication électronique entre les huissiers de justice et les tribunaux d’instance des requêtes en injonctions de payer (environ 300 000 procédures par an sont concernées).

Après avoir testé sur six tribunaux d'instance pilotes, l'application est aujourd'hui en cours de déploiement sur l'ensemble des tribunaux d'instance. Afin de couvrir l'ensemble des 300 tribunaux d'instance concernés, un plan de déploiement en deux vagues a été organisé, une première vague au cours du printemps 2011, la seconde vague reprendra en septembre 2011 jusqu'au printemps 2012. Des réunions de présentation de l'application et de sensibilisation, ainsi que les formations des utilisateurs sont organisées préalablement au déploiement de l'application dans une juridiction. À l’issue de cette première vague de déploiement, au 30 août 2011, l'application est déjà déployée dans 66 tribunaux d'instance.

Des tests sont également en cours concernant la dématérialisation avec les huissiers afin que ces derniers envoient leurs requêtes sous forme dématérialisées aux juridictions. Les avancées en ce domaine restent toutefois assez difficiles puisque soumises à l'implication des sociétés éditeurs de logiciel d'huissiers.

Les échanges dématérialisés progressent avec les avocats et les avoués par la convention nationale signée le 16 juin 2010 avec le Conseil national des barreaux qui étend la convention de 2007 limitée aux échanges dématérialisés avec les tribunaux de grande instance aux cours d’appel et aux tribunaux d’instance.

Les postulants peuvent échanger des messages avec le greffe et consulter toutes les informations nécessaires sur l’état d’une procédure en cours devant le tribunal (calendrier, événements, décisions prises) en temps réel, ces données provenant de la chaîne civile informatique de la juridiction.

De ce fait, les audiences physiques de mise en état sont réservées aux dossiers d'incidents ou aux contentieux complexes, les autres audiences devenant « virtuelles ». Une réduction de 80 % du nombre des dossiers évoqués en audiences « réelles » de mise en état a été ainsi obtenue dans les TGI les plus avancés en matière de communication électronique civile.

Les postulants peuvent également suivre en ligne la progression de leur affaire dès que les données sont saisies par le greffe ; ils limitent ainsi leurs déplacements aux audiences et au greffe, et ce dernier passe lui-même moins de temps à les renseigner.

De même, des progrès importants ont pu être constatés dans les échanges dématérialisés avec les huissiers de justice, avec les personnes en charge d’un majeur protégé ou avec les usagers pour les demandes de formulaires pour les particuliers comme les professionnels.

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COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE
DU 26 OCTOBRE 2011 À 16 HEURES 15

(Application de l’article 120, alinéa 2, du Règlement)

M. Yves Censi, président. Monsieur le garde des sceaux, M. Sébastien Huyghe, vice-président de la Commission des lois et moi-même sommes heureux de vous accueillir. Le président de la Commission des finances, M. Jérôme Cahuzac, retenu ailleurs, vous prie d’excuser son absence.

Nous sommes réunis en commission élargie afin d’examiner les crédits de la mission Justice pour 2012. Cette année, les débats seront chronométrés, ce qui nous incitera à respecter la durée prévue, qui, pour la mission « Justice », a été fixé à trois heures.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Pour la première année, j’ai l’honneur d’être rapporteur spécial sur la mission « Justice », laquelle constitue une prérogative régalienne et se trouve au cœur du quotidien des Français. En 2012, le budget de la justice, en hausse pour la huitième année consécutive, augmente de 4 % en crédits de paiement, les autorisations d’engagement s’élevant à 9,8 milliards, et les crédits de paiement à 7,42 milliards.

Je me félicite que le Gouvernement continue à en faire une priorité, alors que la dépense publique est plus que jamais contenue. Depuis 2002, les gouvernements successifs ont eu à cœur de rattraper le retard français de la justice, dont le budget passera de 1,6 % du PIB en 2002 à 2,6 % pour 2012, ce qui nous rapproche de la moyenne de l’OCDE.

En 2010 et 2011, les réformes ont été nombreuses : loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, du 5 juillet 2011 relative au droit et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, et du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

Le budget proposé se caractérise par un vaste programme d’investissements pour le parc judiciaire, surtout pénitentiaire, qui fait appel au partenariat public-privé, et par une politique d’emploi ambitieuse, particulièrement saillante dans un contexte général de diminution des effectifs publics.

Pour l’immobilier judiciaire, le rythme est plus soutenu que l’an dernier. Aux investissements de 175 millions qui permettront d’achever les regroupements décidés dans le cadre de la réforme judiciaire, s’ajoute une enveloppe complémentaire de 190 millions, qui financera de nouvelles opérations de rénovation. Pour l’immobilier pénitentiaire, l’État consent un effort considérable, en vue d’accroître le nombre de places de prison – le Président de la République a fixé l’objectif de 80 000 places – et de mettre le parc carcéral aux normes prévues par la loi pénitentiaire, notamment en matière d’encellulement individuel. Ces investissements sont inscrits à hauteur de 1,85 milliard dans le nouveau programme immobilier. En trente-cinq ans, le nombre de détenus a été multiplié par deux et demi, passant de 26 300 à 64 900.

La mission « Justice » est la seule à connaître des créations de postes, qui se montent à 515 équivalents temps plein ; 285 postes de greffier sont créés, ce qui est considérable. En tout, le ministère compte 6 625 emplois de plus qu’en 2002.

Si le budget de 2012 est à la fois généreux et ambitieux, quelques questions se posent. Sur le programme « Justice » judiciaire, la gestion des ressources humaines semble complexe. La charge de travail varie fortement d’une juridiction à l’autre. Le nombre d’affaires par magistrat ou par fonctionnaire peut aller du simple au double, voire au triple. Les redéploiements d’effectifs ne sont peut-être pas assez nombreux. Le ministère profitera-t-il du grand nombre de départs à la retraite pour mener une politique volontariste ? Si l’on veut rendre des postes plus attractifs, pourquoi ne pas utiliser le levier indemnitaire ou l’attribution de bonifications d’ancienneté, comme on le fait pour l’outre-mer ?

Le 1er juin 2011, la France disposait de 56 358 places opérationnelles pour 64 971 détenus, soit un taux d’occupation moyen des établissements de 115,3. La construction de nouvelles places de prison est donc une nécessité, même si, depuis vingt-cinq ans, les plans de construction se sont enchaînés. L’administration s’est appuyée sur la gestion privée. Le nouveau programme immobilier sera réalisé uniquement via des partenariats public-privé. La Cour des comptes estime que les dépenses de loyers correspondant aux investissements passeraient en 2017 de 25 à plus de 263 millions. La question de la soutenabilité budgétaire se pose-t-elle pour les PPP ? La hausse significative des dépenses obligatoires de l’administration sous forme de loyers ne va-t-elle pas provoquer l’éviction d’autres dépenses du programme ?

L’administration pénitentiaire devra assumer, à compter de 2012, l’extraction de détenus entre les palais de justice et les centres de détention, mission coûteuse en personnel jusque-là assurée par les forces de police et de gendarmerie. L’enveloppe de 250 emplois supplémentaires prévue à cet effet est-elle suffisante ? Ne faut-il pas changer les méthodes de travail des magistrats, en recourant par exemple à la visioconférence pour limiter le nombre d’extractions judiciaires ?

Depuis 2009, la Direction de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a recentré son intervention auprès des mineurs délinquants. Dans le cadre de la RGPP, son organisation connaît une modernisation profonde, qui l’oriente davantage vers les mineurs ayant commis des actes de délinquance. Cette année, après avoir diminué pendant trois années consécutives, les crédits de paiement du programme augmentent de 4,6 %, comme le reste de la mission, mais une réforme aussi importante ne se fait pas sans quelques grincements de dents des personnels, particulièrement de ceux qui sont chargés de la fonction éducative. La création de 60 postes d’éducateur est-elle suffisante au regard de la mise en route de nouveaux centres éducatifs fermés ? Comment la PJJ initiera-t-elle la généralisation des mesures judiciaires d’investigation éducative ?

M. Sébastien Huyghe, président et rapporteur pour avis de la Commission des lois, pour l’administration pénitentiaire et la protection judicaire de la jeunesse. Je vous prie d’excuser l’absence du président de la Commission des lois, qui ne peut être présent.

Je ne peux que me féliciter de l’évolution des crédits ouverts pour l’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse dans le projet de loi de finances pour 2012. L’évolution des crédits amorcée depuis le début de la législature prouve que l’exécution des décisions de justice pénale est une priorité du Gouvernement et de la majorité parlementaire.

Les crédits de l’administration pénitentiaire augmentent de 44 % en autorisations d’engagement et de 7,4 % en crédits de paiement, afin de poursuivre l’agrandissement et la rénovation du parc immobilier, ainsi que la mise en œuvre de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009. De même, les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse augmentent de 4,6 % en autorisations d’engagement et de 2 % en crédits de paiement, ce qui permettra non seulement d’achever la reconcentration des moyens de la PJJ sur la prise en charge des mineurs faisant l’objet d’une mesure pénale, mais aussi d’ouvrir vingt centres éducatifs, afin d’appliquer la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

Le Gouvernement a déposé un amendement visant à réduire les crédits de la mission « Justice » de 20 millions d’euros, imputés à parts égales entre les programmes « Justice judiciaire » et « Administration pénitentiaire ». La mesure s’inscrit dans le plan d’économies de 1 milliard annoncé fin août par le Premier ministre et dicté par la situation de nos finances publiques.

Pour ce qui concerne l’administration pénitentiaire, la baisse de 10 millions d’euros représente une diminution globale des crédits de 0,2 %. Si l’amendement est voté, la hausse des crédits passera de 44,1 % à 43,8 % en autorisations d’engagement et de 7,4 % à 7 % en crédits de paiement. La hausse restant importante, je ne suis pas défavorable à l’amendement.

J’émets cependant une réserve sur l’imputation de la réduction des crédits au sein du programme « Administration pénitentiaire ». La baisse s’imputerait à hauteur de 9,5 millions pour le programme immobilier et de 0,5 million pour l’École nationale d’administration pénitentiaire (ENAP). Il serait problématique que celle-ci voie diminuer de 1,8 % les crédits prévus pour 2012, alors que la formation tant initiale que continue revêt une importance particulière. Peut-on répartir la réduction des crédits d’une manière moins défavorable à l’ENAP ?

À cette réserve près, les crédits de l’administration pénitentiaire et de la PJJ prévus dans le PLF pour 2012 ne pouvant qu’être pleinement approuvés, je me contenterai de poser cinq questions sur les évolutions liées au fonctionnement et aux missions de ces deux acteurs essentiels du service public de la justice.

Commençons par l’administration pénitentiaire.

Depuis la fin de l’année 2010, un nouveau programme immobilier a été engagé pour prendre la suite du programme « 13 200 », dont les derniers établissements doivent être livrés en 2014 ou en 2015. L’objectif du nouveau programme, qui prévoit l’ouverture de vingt-sept établissements et la fermeture de trente-six autres devenus inadaptés, est de porter la capacité d’hébergement de nos établissements pénitentiaires à 70 000 places en 2017. Depuis, le chef de l’État a annoncé que le projet de loi de programmation pour l’exécution des peines, que nous examinerons sous peu, porterait la capacité du parc pénitentiaire à 80 000 places. Comment ce nouvel objectif se traduira-t-il sur le plan budgétaire ? Quel est le calendrier prévu ?

Fin 2010, il a été décidé de transférer progressivement la compétence des extractions judiciaires à l’administration pénitentiaire, ce qui doit s’accompagner du transfert de 800 emplois en trois ans de la mission « Sécurité » vers la mission « Justice ». Depuis le 1er septembre, c’est-à-dire depuis presque deux mois, l’administration pénitentiaire assure les extractions judiciaires dans deux régions, l’Auvergne et la Lorraine. Pouvez-vous dresser un premier bilan ? Comment se passent sur le terrain les relations avec les forces de police et de gendarmerie lorsque l’administration pénitentiaire ne peut assurer des extractions par manque de moyens ou en raison du profil du détenu ? Enfin, le nombre de 800 emplois devant être transférés de l’administration pénitentiaire vers la mission « Sécurité », fixé par un arbitrage interministériel fin 2010, suffira-t-il pour que l’administration pénitentiaire assume sa charge dans de bonnes conditions sur l’ensemble du territoire ?

Troisièmement, début 2011, l’affaire de Pornic a révélé des difficultés concernant la continuité du suivi des personnes placées sous main de justice, notamment lors de la transition entre milieu fermé et milieu ouvert. Les travaux et déplacements que j’ai effectués pour préparer la discussion budgétaire m’ont permis de constater que, si des efforts réels ont été accomplis dans ce domaine, il faut encore résoudre des difficultés, notamment de communication entre les services de l’application des peines des tribunaux et les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP). Quelles orientations le ministère a-t-il retenues pour améliorer la continuité du suivi des personnes placées sous main de justice ?

Les effectifs des SPIP, qui ont pourtant augmenté de 75 % depuis 2002, sont fréquemment invoqués pour expliquer qu’ils peinent à assurer le suivi des condamnés. Récemment, un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des services judiciaires vous a été remis sur leur organisation et leurs éventuels besoins en personnels. Quelles en sont les conclusions et quelles suites envisagez-vous de lui donner ?

J’en viens à la protection judiciaire de la jeunesse. La loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et la justice des mineurs a élargi les cas de placement sous contrôle judiciaire, donc les possibilités de placement en centre éducatif fermé (CEF) pour les mineurs de treize à seize ans. Afin de mettre ces dispositions en application, le Gouvernement prévoit de créer vingt CEF. Quel est l’impact budgétaire de cette mesure et quel est l’état d’avancement des travaux ?

Si tout le monde ou presque reconnaît le bien-fondé des principes qui fondent l’action éducative dans les CEF, on manque de données objectives sur leur efficacité en termes de prévention de la récidive et de réinsertion. Le ministère va-t-il effectuer un suivi régulier du devenir des jeunes qui sont passés par ces centres, ce qui permettrait de mesurer leur efficacité ?

Les personnels des CEF que j’ai rencontrés posent la question de l’« après-CEF ». Souvent, les professionnels de la PJJ, qui peinent à trouver pour les mineurs une solution adaptée, formulent des propositions dans l’urgence et par défaut. Pour remédier à cette difficulté, il serait souhaitable de construire pour les mineurs délinquants un parcours de prise en charge par la justice, fondé sur la progressivité, et élaboré conjointement par le juge des enfants et par les services de la PJJ. Dès l’audience, un mineur placé en CEF sous contrôle judiciaire serait informé par le magistrat que, si le placement se passe bien, on envisagera une mesure éducative comme un placement en foyer, suivi d’un retour dans la famille accompagné d’une mesure d’activité de jour. Un tel parcours – qui nécessiterait, non une mesure législative, mais seulement une volonté commune des magistrats et des services de la PJJ – améliorerait la lisibilité des mesures et anticiperait les transitions, souvent difficiles et insuffisamment préparées, entre les différentes structures. Que pensez-vous de cette proposition ?

M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis de la Commission des lois, pour la justice et l’accès au droit. Je suis heureux d’assurer, cette année encore, la fonction de rapporteur pour avis du budget de la mission « Justice ». Continuellement en hausse depuis 2002, il progresse cette année de 4 % en crédits de paiement, le programme « Justice judiciaire » augmentant de 0,7 % et le programme « Accès au droit et à la justice » de 7,7 %.

Le budget intègre la réforme de la garde à vue, de l’hospitalisation sous contrainte, de la carte judiciaire et du rôle des citoyens assesseurs dans les tribunaux correctionnels. Au cours de mes déplacements dans les juridictions – j’ai rédigé un rapport d’information budgétaire sur leur fonctionnement –, j’ai mesuré, outre le dévouement des personnels de justice, notamment des magistrats, les difficultés qu’ils rencontrent.

Les premières portent sur les effectifs des fonctionnaires des services judiciaires et sur leur régime indemnitaire. Je me réjouis que vous ayez prévu de recruter 90 magistrats par concours exceptionnel et de porter de 105 à 180 le nombre de postes d’auditeur de justice offerts au concours. Il faut croire que j’ai été entendu sur ce point.

Je me félicite aussi que l’on compte désormais par magistrat 0,92 greffier et, toutes professions réunies, 2,5 fonctionnaires, preuve que l’équipe qui les entoure a été étoffée. Cependant, est-il opportun d’améliorer à nouveau le régime indemnitaire des magistrats sans rien prévoir pour les greffiers ? Plus généralement, quelles sont les perspectives indemnitaires des fonctionnaires du ministère de la justice, qui souffrent d’un manque de reconnaissance ? Quelles sont les perspectives d’intégration des greffiers, qui se sentent parfois déclassés, dans le nouvel espace statutaire ?

Depuis 2006, l’effectif des fonctionnaires de catégorie C diminue, ce qui est préjudiciable au fonctionnement des juridictions. L’exécution, la gestion des archives, la numérisation et le rangement des scellés nécessitent du personnel technique. J’entends dire qu’à Nanterre plus personne n’assure la distribution du courrier ou le transfert des dossiers entre le parquet et les services de l’instruction.

Venons-en à la situation des juridictions et à certaines fonctions spécifiques.

Comment les juges d’instance feront-ils face au surcroît d’activité induit par la révision systématique des mesures de protection des majeurs d’ici à 2014, et à la suppression des juridictions de proximité, qui ramènera vers eux le petit contentieux civil au-dessous de 4 000 euros ?

Certaines des personnes que j’ai auditionnées s’interrogent sur la répartition des tribunaux d’instance spécialisés par le décret du 23 août 2011 dans le contentieux du surendettement. Est-il exact que le tribunal d’instance de Villejuif a été choisi pour traiter, dès le 1er septembre 2011, l’ensemble des procédures de surendettement et de rétablissement personnel de tout le département de Val-de-Marne sans recevoir de moyens supplémentaires ?

Qu’en est-il du recrutement de cent nouveaux juges de l’application des peines, prévu par la loi pénitentiaire dont j’ai été le rapporteur ?

Dans la suite logique de la réforme de la garde à vue, les crédits de l’aide juridictionnelle augmentent fortement. Dans le même temps, une contribution de 35 euros est exigée du demandeur en justice à compter du 1er octobre 2011, dont le montant global attendu se monte à 84 millions. Les avocats ont dénoncé l’impréparation de la mesure. Les timbres n’ont pas toujours été faciles à trouver, et la question des timbres électronique est posée. Pouvez-vous faire le point sur ce dossier ? Par ailleurs, l’institution de la taxe a un effet pervers : l’exemption que procure toute demande d’aide juridictionnelle a fait sensiblement augmenter le nombre de dossiers.

La maîtrise des frais de justice, qui représentent encore 470 millions, est essentielle.

Les associations d’aide aux victimes voient diminuer leurs crédits. J’ai déposé en septembre 2011 une proposition de loi visant à pérenniser leur financement, en instituant un prélèvement en cas de condamnation. Peut-on explorer cette piste ?

Compte tenu des efforts imposés à tous les ministères, on peut comprendre que le Gouvernement dépose un amendement portant un coup de rabot de 20 millions, mais j’ai moins de mal à admettre les restrictions imposées à la justice pénitentiaire qu’à la justice judiciaire, car le fonctionnement courant des juridictions pose nombre de difficultés. Faut-il vraiment réduire de 500 000 euros les crédits pour charge de service public de l’École nationale de la magistrature, qui doit effectuer des recrutements complémentaires, compte tenu de l’augmentation du nombre d’auditeurs ?

M. Yves Censi, président. Monsieur le garde des sceaux, selon une étude de la direction de l’administration pénitentiaire, parue cet été, 60 % des détenus sortants sont condamnés dans les cinq ans qui suivent leur libération, et, dans les mêmes délais, 78 % des mineurs ont de nouveaux ennuis avec la justice. L’absence d’aménagement de peine semble aggraver le risque de récidive, qui augmente également avec la durée d’enfermement. Quelles actions comptez-vous mener pour développer les aménagements de peine ?

Les centres éducatifs fermés constituent une réponse à la lutte contre la délinquance des jeunes. La loi du 10 août 2011 sur le jugement des mineurs élargit les conditions de placement en CEF. Le projet de budget de la justice pour 2012 prévoit l’ouverture de vingt centres, en plus des quarante-quatre qui existent aujourd’hui. Sans remettre en cause leur existence, je m’interroge sur leur coût, qui se monte à 120 000 euros par an. Compte tenu du taux d’encadrement des mineurs délinquants, une journée coûte 663 euros dans ces centres contre 111,5 euros dans les établissements publics d’insertion de la défense (EPIDe). Comment justifier que les premiers soient cinq fois plus chers que les seconds ? Sont-ils réellement efficients ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Le budget de 2012, comme ceux qui l’ont précédé depuis 2002, et plus particulièrement depuis 2007, vise à donner plus de moyens à la justice, afin de rattraper un retard historique. Cela dit, un amendement du Gouvernement, qui ne peut s’affranchir de la crise financière actuelle, prévoit de réduire l’augmentation de 4 % prévue pour les crédits de la justice car, si les missions de mon ministère constituent une priorité, il doit, comme les autres, lutter contre la crise.

Le ministère de la justice affichera des créations nettes d’emplois en 2012, comme c’est le cas depuis 2007. Le budget triennal pour 2011-2013 prévoyait que le ministère serait autorisé à créer 200 emplois en 2012 ; ce sont finalement 515 emplois qui seront créés, sans compter les 250 emplois transférés du ministère de l’intérieur au titre de la reprise progressive des missions d’extraction judiciaire. Ces moyens supplémentaires doivent être mis au service d’un effort de modernisation des méthodes et de l’organisation du ministère, afin d’assurer une plus grande efficacité collective au service des justiciables.

Le budget de la mission « Justice » donnera au ministère les moyens de mettre en œuvre les réformes adoptées cette année, qu’il s’agisse de l’introduction des citoyens assesseurs dans les juridictions correctionnelles et les juridictions d’application des peines, de la réforme de l’hospitalisation sans consentement ou de celle de la garde à vue. Pour chaque réforme, le Gouvernement s’est efforcé de mobiliser les moyens nécessaires à une exécution effective et rapide des peines prononcées par les juridictions. Ainsi, les crédits relatifs au bracelet électronique augmenteront de 20 %, afin de permettre à l’administration pénitentiaire d’atteindre l’objectif de 12 000 bracelets.

Ce budget ouvre aussi des autorisations d’engagement à hauteur de plus de 1,8 milliard d’euros au titre des investissements prévus dans le cadre du nouveau programme immobilier, et pour renforcer la prise en charge des mineurs délinquants : 60 emplois d’éducateur seront ainsi créés au profit des vingt nouveaux centres éducatifs fermés. Sur ces points, le budget de 2012 annonce le projet de loi de programmation relatif à l’exécution des peines que le Président de la République m’a demandé de soumettre au conseil des ministres, puis au Parlement, dans les prochaines semaines.

Je remercie le rapporteur spécial, M. Alain Joyandet, pour sa présentation rapide mais exhaustive. Sa nouveauté dans la fonction lui a permis de faire litière des considérations historiques, et d’être ainsi plus bref que ses collègues, que M. le vice-président Yves Censi a laissé s’exprimer plus longtemps.

Dans son rapport, M. Joyandet pose plusieurs questions fondamentales au sujet de l’organisation du service public de la justice. La première d’entre elles concerne les différences entre les juridictions quant à la charge de travail, différences qui, selon le référé adressé à la chancellerie par le premier président de la Cour des comptes, peuvent aller du simple au double ou au triple. Si l’activité d’une juridiction n’est pas forcément quantifiable, les différences restent indéniables.

Depuis 2009 au moins, le Gouvernement s’efforce, à l’issue des dialogues de gestion avec les cours d’appel, de mieux localiser les emplois de magistrat et de fonctionnaire, en tenant compte des postes disponibles et, surtout, des règles statutaires. Mais le caractère inamovible des magistrats du siège, par exemple, gêne la mobilité des personnels. Néanmoins, 223 redéploiements – dont 190 au sein d’une même cour d’appel – ont été réalisés en 2010, et 49 – dont 32 à l’intérieur d’une même cour d’appel – en 2011. La localisation est encore loin d’être idéale. Aussi un groupe de travail, composé de magistrats et de représentants d’organisations syndicales, a-t-il été créé pour y réfléchir. Il fonctionne très bien, mais la question qu’il traite se heurtera toujours aux contraintes statutaires de la magistrature et aux effets des nominations décalées, pour les magistrats comme pour les fonctionnaires : compte tenu de la procédure de validation par le Conseil supérieur de la magistrature, une nomination proposée en février, et annoncée plusieurs mois plus tôt pour respecter la transparence, ne devient effective qu’en juillet ou septembre, si bien qu’au total elle prend pratiquement un an. De surcroît, on ne peut muter les gens contre leur gré. Néanmoins, la localisation s’améliore.

Les extractions judiciaires concernent, pour l’essentiel, le transfert des détenus devant les juges ou les tribunaux. Il a été décidé en 2010 que ces missions, nombreuses et difficiles, seraient désormais assurées par l’administration pénitentiaire, après l’avoir été par la police et la gendarmerie. À cette fin, 800 emplois seront transférés du ministère de l’intérieur à l’administration pénitentiaire d’ici à 2014. Ce chiffre me semble toutefois insuffisant, pour une raison simple : utiliser des policiers ou des gendarmes pour extraire des détenus peut désorganiser une brigade ou un commissariat, mais cela reste possible ; en revanche, on ne peut demander aux personnels qui surveillent les prisonniers de quitter leur poste. Cette difficulté s’est constatée dès la mise en œuvre de l’expérimentation dans les deux régions concernées, d’autant que la prison d’Aurillac et le palais de justice de Riom, par exemple, sont si éloignés l’un de l’autre que toute opération d’extraction prend une journée entière. Les agents de l’administration pénitentiaire qui assureront cette tâche ne feront donc pratiquement rien d’autre : il faudra une tout autre organisation, y compris dans les méthodes de travail des magistrats. Les extractions doivent être regroupées quand c’est possible, et n’être utilisées qu’en l’absence de tout autre moyen technique ; ainsi les visioconférences, qui ont augmenté de 35 % en un an, avaient permis de réduire le nombre d’extractions de 10 % en 2008.

Les expérimentations ont vite révélé que la méthode à suivre n’était pas de proratiser les effectifs en fonction du nombre de transferts réalisés dans chaque région. L’ensemble des postes transférés ont donc été utilisés pour les deux régions concernées ; mais le problème est que les personnels correspondants ne sortiront de l’École nationale d’administration pénitentiaire, à Agen, qu’en mars prochain. Jusqu’à cette date, et à titre d’expérimentation, l’administration pénitentiaire continuera d’affecter tous les personnels disponibles – équipes régionales d’intervention et de sécurité ou réservistes – sans toucher aux effectifs des personnels pénitentiaires. C’est sur cette base, et non sur celle de l’arbitrage initial, que seront évalués les besoins réels.

Des réunions ont eu lieu, tant au niveau national qu’au niveau régional. Les préfets de région ont ainsi rappelé les principes de la nouvelle organisation aux directeurs départementaux de la sécurité publique et aux colonels commandant les groupements de gendarmerie. Je rappelle que le code de procédure pénale, qui n’a pas été modifié, permet aux tribunaux de procéder à des réquisitions en cas de besoin. En attendant la mise en place de la nouvelle organisation, les tribunaux s’efforcent d’anticiper les dates des extractions en informant la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP), laquelle, en cas de manque d’effectifs, fait appel aux forces de police et de gendarmerie. L’expérimentation est en ce sens utile pour évaluer les besoins.

S’agissant du programme immobilier, l’objectif est de créer 80 000 places supplémentaires dans les prisons d’ici à 2017, conformément aux annonces du Président de la République et aux orientations du futur projet de loi de programmation. Ces places ne sont pas toutes identiques : les prisons destinées aux peines courtes, par exemple, seront plus simples à construire que d’autres.

L’objectif sera atteint grâce à l’achèvement de programmes antérieurs – notamment le programme « 13 200 », qui touche à son terme –, au maintien en activité d’établissements dont la fermeture était prévue et à la création de nouveaux établissements. Le ministère prendra directement en charge la transformation des anciens établissements, et les nouvelles constructions seront réalisées via des partenariats public-privé. L’avantage de ces derniers est qu’ils permettent de mener rapidement à bien plusieurs projets à la fois ; leur inconvénient est qu’ils mobilisent, pendant toute leur durée, l’essentiel des ressources publiques – il faut bien payer ceux qui ont investi. Reste que, sur le nombre de places de prison, notre pays doit combler son retard par rapport à ses voisins. À cet égard, s’ils ne constituent peut-être pas en eux-mêmes la formule idéale, les PPP permettent des réalisations plus rapides.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Merci pour vos réponses, monsieur le garde des sceaux. Je veux revenir sur un point que je n’ai pas abordé tout à l’heure, ayant strictement respecté mon temps de parole.

S’agissant des affectations de personnels, est-il possible d’utiliser des moyens indemnitaires ou d’attribuer des bonifications d’ancienneté pour favoriser le volontariat dans les régions où celui-ci demeure insuffisant ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Le régime indemnitaire est déjà utilisé à cette fin. Le problème est que les régimes indemnitaires des fonctionnaires et des greffiers font actuellement l’objet d’une refonte. Si les greffiers sont gagnants au départ, ils le sont moins à l’arrivée. Les discussions portent davantage sur le régime indemnitaire commun que sur les éventuelles différenciations entre les juridictions. Je demanderai cependant à mes services d’engager des négociations avec les syndicats sur les moyens d’intéressement des personnels.

Certains postes sont difficiles à pourvoir, pour des raisons qui tiennent, par exemple, au prix des logements. C’est par exemple le cas à Compiègne, où nul ne s’est porté candidat, ou à Montargis, où il a fallu un an pour trouver un candidat au poste de procureur.

M. Yves Censi, président. Je vous rappelle, chers collègues, que vous ne disposez chacun que de deux minutes pour poser vos questions.

M. Patrice Verchère. Le budget que vous nous présentez, monsieur le garde des sceaux, illustre la priorité donnée à la justice, et répond ainsi aux préoccupations légitimes des Français.

Alors que des efforts substantiels sont demandés aux autres ministères, celui de la justice est l’un des rares à voir ses crédits augmenter, et ce à hauteur de 4 %. Il atteindra ainsi 7,42 milliards d’euros en 2012, soit une hausse de 19 % depuis 2007.

Cette progression continue traduit la volonté du Président de la République, du Gouvernement et de la majorité de replacer les missions de la justice au cœur de notre société, et vise à combler les retards accumulés dans le passé. Nous devons nous en féliciter.

Des difficultés sont apparues cette année quant à l’exécution des peines. Quelles sont les avancées prévues par le budget de 2012 en ce domaine ?

Les nombreuses réformes engagées nécessitent des moyens humains supplémentaires ; or plusieurs rapports ont fait état d’un manque de personnels, notamment de greffiers. Des créations de postes sont-elles prévues ?

Enfin, la délinquance des mineurs augmente, tant par sa fréquence que par la violence des actes commis. Quelles sont les réponses envisagées par le ministère ?

M. Dominique Raimbourg. N’ayant que deux minutes pour poser sept questions, j’irai vite.

Je me félicite de l’augmentation du budget de la justice, mais mon satisfecit s’arrêtera là, puisque les retards historiques dont vous avez parlé tiennent aux demandes croissantes dont la justice fait l’objet. M. le rapporteur spécial a ainsi souligné que le nombre de détenus avait été multiplié par 3,5. À quand un véritable plan de rattrapage ?

Pour le coup, vous annoncez un plan de rattrapage en matière d’exécution des peines. Pourquoi vous cantonner à ce domaine, et ce, semble-t-il, à la demande du Président de la République, dont les initiatives en matière de justice n’ont pas été des plus heureuses jusqu’à ce jour ?

On se plaint de la délinquance des mineurs, mais le nombre de postes dédiés à la protection judiciaire de la jeunesse est en diminution de 106 équivalents temps plein travaillé, alors que l’on annonce l’ouverture de vingt nouveaux centres éducatifs fermés. En d’autres termes, selon mes informations, le nombre d’encadrants par centre passera de 27 à 24, quand le nombre de mineurs, lui, augmentera quant à lui de 10 à 12. Dans ces conditions, l’efficacité des CEF est-elle garantie ?

Par ailleurs, vous dites attendre 215 emplois de la simplification des procédures, mais le projet de loi en la matière n’est toujours pas voté. Votre optimisme n’est-il pas excessif ?

Quand disposerons-nous d’une évaluation du coût des PPP sur l’ensemble de leur durée ?

Quant aux services pénitentiaires d’insertion et de probation, cette année a été marquée par d’importantes difficultés. Quel est le ratio ?

Enfin, pourquoi la mesure de l’activité de l’administration pénitentiaire n’inclut-elle pas un ratio de la surpopulation pénale ?

M. Michel Hunault. Je n’ai pas de question à vous poser à ce stade, monsieur le garde des sceaux : nous débattrons du présent budget dans l’hémicycle.

L’exercice est convenu : la majorité se félicite, comme je le fais moi-même, de l’augmentation du présent budget dans une période difficile, et l’opposition juge que l’on n’en fait jamais assez.

Tout au long de la législature, le groupe Nouveau Centre a apporté son soutien et sa contribution à un certain nombre de réformes. Je souhaite que celles-ci soient appliquées. Qu’il s’agisse de la carte judiciaire, des avoués ou des magistrats, des besoins existent, qui justifient les créations de postes annoncées. L’accès au droit est en effet une question importante.

Vous vous êtes rendu vendredi dernier à Nantes pour la Convention nationale des avocats. Répondre aux besoins croissants de l’aide juridictionnelle est un défi.

Nous avons voté des réformes, qui concernent par exemple la protection des droits – en application de la Convention européenne des droits de l’homme – ou la garde à vue, réformes dont l’application suppose des moyens, notamment budgétaires. Je vous demande donc d’y veiller, main dans la main avec les magistrats et les professionnels du droit, notamment avec les avoués.

Enfin, je le répète, l’accès de nos concitoyens à la justice doit être amélioré.

M. Marc Dolez. Limiter l’intervention des porte-parole des groupes à deux minutes sur un sujet de cette importance est à mes yeux inacceptable : nous ne manquerons pas de le signaler à la Conférence des présidents.

Les chiffres tels qu’ils sont présentés masquent mal le fossé qui sépare les discours de la réalité. On nous parle ainsi de crédits en augmentation, mais jamais les juridictions, les établissements pénitentiaires et les services de la protection judiciaire de la jeunesse n’ont été dans une situation aussi difficile. Quant à la prétendue augmentation des effectifs, il s’agit d’un trompe-l’œil puisque, si tant est qu’elle soit avérée, elle ne rattrape pas les retards accumulés au cours des années précédentes, et ne permet pas davantage d’appliquer les réformes que vous avez fait voter. Enfin, il y a un manque criant de fonctionnaires dans les juridictions.

Ma première question portera sur l’immobilier. En ce domaine, l’essentiel du budget est consacré à la création de nouvelles places de prison, mais les investissements pour 2012 ne concerneront qu’un nombre restreint de tribunaux. Combien d’entre eux sont concernés, et quels sont les crédits prévus pour l’entretien des bâtiments ?

La protection judiciaire de la jeunesse étant le secteur sacrifié du ministère, avec 632 éducateurs en moins depuis 2008, comment celle-ci peut-elle assumer sa mission ?

Enfin, les 336 millions d’euros de crédits de paiement prévus pour l’aide juridictionnelle incluent-ils les 85 millions d’euros attendus de la taxe de procédure de 35 euros, que combattent l’ensemble des syndicats d’avocats et de magistrats ?

M. Yves Censi, président. Je rappelle que c’est la Conférence des présidents qui a fixé la nouvelle procédure, cher collègue : je crains donc que vos protestations ne soient vaines.

M. Marc Dolez. Nous ferons valoir à la Conférence des présidents qu’il vaut mieux revenir à l’ancienne formule.

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. M. Huyghe m’a interrogé à propos des centres éducatifs fermés. Les vingt centres supplémentaires seront créés en transformant des unités éducatives d’hébergement collectif : la PJJ a organisé dès cet été, avec les directeurs interrégionaux, une étude de faisabilité pour sélectionner les établissements susceptibles de devenir des CEF. L’opération est en cours de lancement à Bures-sur-Yvette, Laon, Épinay-sur-Seine, Aix-en-Provence, Angoulême, Villeneuve-d’Ascq, Épernay, Marseille Chutes-Lavie, Saint-Genis-les-Ollières et Pluguffan. Ce choix répond en particulier aux besoins importants en matière de placement dans la direction interrégionale d’Île-de-France et d’outre-mer et dans celle du Sud-Est. Une seconde liste de douze établissements est actuellement à l’étude.

Le coût d’investissement est évalué à 30 millions d’euros, et les autorisations d’engagement sont d’ores et déjà ouvertes dans le projet de loi de finances pour 2012. Outre les opérations immobilières, la mise en place de ces nouveaux centres nécessite la création de 60 postes d’éducateurs.

Je précise, monsieur Dolez, qu’aucun poste d’éducateur n’a été supprimé à la protection judiciaire de la jeunesse depuis 2008. Au contraire, leur nombre s’est accru de 17 %. En revanche, d’autres postes ont pu être supprimés, notamment dans les fonctions support.

M. Jean-Jacques Urvoas. C’est du jésuitisme !

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Vous pouvez critiquer, mais vous ne pouvez nier la vérité ! Il est facile de vérifier que le nombre d’éducateurs de la PJJ a augmenté : ils sont payés tous les mois, et s’ils ne l’étaient pas, vous le feriez savoir !

S’agissant du prix de journée en centre éducatif fermé, il est vrai qu’il est relativement élevé : plus de 600 euros par personne. Cela tient au fort taux d’encadrement.

Bien que nous ayons affaire à un public très difficile, nous avons choisi de lui éviter la prison « sèche », afin de rester fidèle à la conception française de la justice pour les mineurs – une justice qui donne la primauté à l’éducatif sur le répressif. Des moyens importants sont donc consacrés à la formation dans les CEF.

Mais il faut aussi des gardiens, car il s’agit tout de même d’établissements pénitentiaires : en cas d’échec, l’étape suivante est l’établissement pour mineur, puis la prison. Nous avons en effet essayé de diversifier les modes de placement des mineurs afin d’offrir au juge la palette la plus large possible.

Ce public difficile nécessite donc un encadrement important : éducateurs, psychologues et enseignants à plein temps, directeurs, chefs de service, personnel doublé la nuit. Les frais d’équipement sont également importants. Tout cela explique l’ampleur du coût de fonctionnement de ces centres.

L’expérience en est encore à ses débuts, et nous essayons d’en évaluer les résultats. Une enquête a ainsi été réalisée dans sept centres éducatifs fermés, ce qui a permis d’en améliorer notablement le fonctionnement. Une autre, en cours de finalisation, est destinée à mesurer l’impact du séjour en CEF dès la sortie du mineur, et six mois après celle-ci. Enfin, une troisième étude est en projet, afin de procéder à l’évaluation comparée de l’impact sur la réitération des différentes décisions de justice concernant les mineurs délinquants.

La continuité du parcours éducatif des mineurs sortant de CEF est une préoccupation majeure. Des travaux permettant de prévenir toute rupture dans le suivi éducatif ont donc été initiés. Une circulaire du 13 novembre 2008 définit les modalités précises d’audiences et d’échanges pendant la durée du placement afin de préparer au mieux la sortie de chaque mineur. L’ordonnance du 2 février 1945 prévoit d’ailleurs qu’à l’issue du placement « le juge des enfants prend toute mesure permettant d’assurer la continuité de la prise en charge éducative du mineur en vue de sa réinsertion durable dans la société ».

Les mineurs sortant de CEF peuvent aussi faire l’objet d’un suivi renforcé par le trinôme judiciaire réunissant le parquet, le juge des enfants et le service éducatif. Les services de la PJJ se sont récemment réorganisés afin de garantir à la fois la mise en œuvre sans délai des décisions du magistrat, la qualité de la prise en charge, le caractère pluridisciplinaire des équipes et la continuité de l’action éducative, au sein de chaque unité éducative mais aussi entre les unités de plusieurs établissements.

La continuité de la prise en charge éducative à la sortie d’un CEF ne peut s’envisager uniquement en termes de placement. Les modalités d’un accompagnement renforcé en milieu ouvert font donc actuellement l’objet d’une réflexion. À cet égard, l’affaire de Pornic a marqué les esprits, car elle touchait aussi bien à la question du suivi des personnes incarcérées qu’à celle de l’agrément donné aux familles d’accueil.

J’ai rappelé à l’administration pénitentiaire la nécessité d’une affectation nominative des dossiers de prise en charge par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, sous la responsabilité d’un cadre de ce service. Un choix a été fait il y a quelques années, celui de placer les SPIP dans le cadre de l’administration pénitentiaire plutôt que dans celui de la pure administration judiciaire. Il faut donc donner une nouvelle orientation à l’administration pénitentiaire, qui va devoir modifier ses métiers et se tourner vers le milieu ouvert, ce qui ne correspond pas à sa tradition. J’ai demandé au nouveau directeur de veiller à doter les SPIP des moyens dont ils ont besoin. L’utilisation de l’informatique, notamment le système « APPI », devra être automatique et vérifiée régulièrement.

J’en viens aux questions de M. Garraud.

Est-il opportun d’améliorer à nouveau le régime indemnitaire ? J’observe tout d’abord que, sur les 90 postes de magistrat mis au concours, tous ne sont pas pourvus. Ensuite, les magistrats ont toute liberté pour fixer la date de leur départ à la retraite, si bien que l’on ne sait pas combien vont partir chaque année. L’estimation effectuée lors du recrutement des auditeurs de justice peut être juste ou non et, souvent, elle ne l’est pas. Cela explique que l’on puisse manquer de magistrats même lorsque l’on crée de nombreux postes. Le mode de fonctionnement des carrières dans la magistrature est donc peu compatible avec une bonne gestion des ressources humaines.

Nous avons essayé, dans le cadre du budget qui nous est alloué, d’améliorer le régime indemnitaire. Ainsi, la prime modulable versée aux magistrats va passer de 9 à 12 %, ce qui représente un effort relativement important. Les greffiers ne sont pas oubliés, puisqu’une enveloppe de 3,4 millions d’euros leur a été spécialement dévolue en 2011 et qu’une autre enveloppe de 1,05 million est prévue en 2012, afin d’augmenter leurs primes à l’occasion de la mise en place dans leur corps du nouvel espace statutaire.

Nous menons depuis plusieurs années une politique de promotion sociale qui permet aux personnels de catégorie C de passer le concours pour devenir greffiers. Le problème est que l’on commence à manquer d’agents dans cette catégorie. En outre, nous devons veiller à éviter tout déclassement de la fonction de greffier, faute de voir ce dernier accomplir un travail relevant de la catégorie C. Il faut non seulement que l’équipe formée par le magistrat et le greffier puisse bien fonctionner, mais aussi qu’elle bénéficie du soutien des fonctionnaires de catégorie C pour la réalisation de travaux simples, ne nécessitant pas des connaissances juridiques poussées. Nous n’allons pas payer des gens titulaires d’un master 2 pour faire des photocopies ou classer des dossiers !

D’ailleurs, pourquoi n’a-t-on plus recours, pour effectuer ces tâches, aux personnes condamnées à un travail d’intérêt général ? Il est pour le moins paradoxal que la justice soit la seule administration à ne pas en accueillir, ni, d’ailleurs, à recourir à des emplois aidés.

L’important est de permettre aux greffiers de faire leur métier. Ils n’ont jamais été aussi nombreux à s’y préparer, puisque l’école de Dijon accueille 800 élèves. Les candidats sont de très haut niveau : la plupart sont titulaires d’un master 2, alors qu’il y a encore quelques années, on passait le concours après avoir obtenu le DEUG. Ainsi, de nombreux greffiers sont plus diplômés en droit que les magistrats qu’ils assistent…

M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis. Cela dépend !

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Bien entendu, je ne parle pas du premier président de la Cour de cassation, ni de certains juges d’instruction…

Vous avez par ailleurs évoqué l’augmentation de la charge de travail du juge d’instance. Lors de l’examen du projet de loi relatif à la répartition des contentieux, j’ai confirmé que la situation des juridictions d’instance ferait l’objet d’un examen attentif en lien avec les chefs de cour et de juridiction, dans le cadre des dialogues de gestion actuellement en cours. Nous en tirerons toutes les conséquences en termes de localisation des emplois et donc d’augmentation des effectifs dans les tribunaux d’instance où cela sera justifié. Des transferts depuis les TGI vers les tribunaux d’instance sont en effet envisageables puisque les juges de proximité siégeront désormais dans les formations collégiales civiles des TGI, libérant ainsi des emplois de magistrat. Il pourra également être mis fin aux tâches annexes qui étaient jusqu’à présent confiées aux juges d’instance, comme la participation aux sessions d’assises ou aux audiences correctionnelles.

La prochaine législature devra par ailleurs être l’occasion d’examiner l’hypothèse d’une fusion des juridictions de première instance, car la coexistence de juridictions d’instance et de grande instance pose des problèmes d’organisation et manque de souplesse.

En ce qui concerne la répartition des tribunaux spécialisés dans le contentieux du surendettement, prévus par le décret du 23 août 2011, vous avez affirmé que le tribunal de Villejuif était, dans le département du Val-de-Marne, le seul qui n’ait pas bénéficié dans ce cadre de moyens supplémentaires. Le choix des tribunaux d’instance concernés a été effectué à partir des propositions des chefs de cour et de juridiction. Dans le Val-de-Marne, le président du TGI de Créteil a désigné le tribunal d’instance de Villejuif et prévu le redéploiement d’effectifs depuis le tribunal de grande instance. Un magistrat du siège, deux greffiers et un adjoint administratif de la deuxième chambre civile seront ainsi attribués au tribunal de Villejuif, qui bénéficie donc bien de moyens supplémentaires.

Le groupe de travail sur l’exécution des peines a élaboré trente et une recommandations autour de deux grands axes : évaluation de la charge de travail des services d’application des peines et pilotage de ces services. Nombre de ces mesures pouvaient être mises en œuvre immédiatement : elles ont fait l’objet de la circulaire ministérielle du 7 octobre 2011, qui a notamment diffusé les tableaux de bord destinés à la modélisation du rapport d’activité des juges d’application des peines afin de mesurer l’activité du service dans chaque tribunal. Cette circulaire a également repris les préconisations destinées à améliorer la communication entre les différents acteurs de la chaîne pénale : promotion de l’ensemble des instances de dialogue déjà existantes, organisation de réunions thématiques entre le parquet et le service de l’application des peines ou entre ce dernier et les services du tribunal pour enfants.

Le groupe de travail a par ailleurs estimé que la charge d’activité des magistrats compatible avec la nécessité de rendre des décisions de qualité dans des délais raisonnables était de 700 à 800 dossiers par juge de l’application des peines. Nous en avons tenu compte lors des travaux préparatoires au projet de loi de programmation sur l’exécution des peines, qui sera présenté dans quelques semaines au Parlement.

Plusieurs questions ont été posées sur l’aide juridique.

Du point de vue pratique, tout d’abord, il est exact que l’on ne trouve pas partout des timbres à 35 euros, mais à partir du 1er janvier 2012, la contribution pourra être réglée par voie électronique. En attendant, il est nécessaire de recourir à des timbres en papier.

Il manquait 85 millions d’euros, sur un coût total de 103 millions, pour financer l’intervention des avocats consécutive à la réforme de la garde à vue. Après avoir examiné différentes voies possibles, le Gouvernement a tranché en faveur d’une contribution reposant sur la solidarité entre justiciables. Certains proposaient de taxer tous les actes, y compris les actes notariés, mais il nous a semblé qu’il y avait eu suffisamment de discussions entre avocats et notaires cette année, et qu’il était préférable de ne pas lancer un nouveau chantier de cet ordre. De son côté, le rapport de Mme Pau-Langevin et de M. Gosselin sur l’aide juridique et l’accès au droit a présenté plusieurs pistes, dont celle d’une taxe sur les actes juridiques – notamment sur ceux soumis à la procédure d’enregistrement ou d’immatriculation au registre du commerce – et d’une contribution à la charge des assureurs.

S’agissant de la première hypothèse, la question était de savoir s’il était légitime de taxer l’activité économique – celle des entreprises, mais aussi celle des particuliers, notamment quand ils vendent ou achètent un bien immobilier – pour financer l’intervention de l’avocat en garde à vue. Techniquement, les droits d’enregistrement sont actuellement partagés entre communes, départements et État. Ajouter une tranche d’imposition additionnelle affectée au Conseil national des barreaux aurait inutilement accru la complexité de ce prélèvement et réduit sa lisibilité.

Quant à taxer les assureurs, cela serait indirectement revenu à taxer les contrats d’assurance, et donc les assurés, ce qui aurait posé à peu près les mêmes questions que le droit finalement créé.

Dès lors qu’il avait été décidé de financer la réforme de la garde à vue par une taxe affectée, il était sain que cette taxe ait un rapport avec la dépense considérée. De ce point de vue, le droit de timbre était la moins mauvaise des solutions.

La justice a un coût, il faut l’assumer et l’organiser pour prendre en compte les facultés contributives de chacun !

En termes d’organisation, la contribution pour l’aide juridique – qui ne doit pas être confondue avec le droit de timbre sur appel – sera affectée au Conseil national des barreaux et gérée par la profession. Le produit attendu est estimé à 86 millions d’euros compte tenu du nombre de procédures annuelles enregistrées, déduction faite du nombre de bénéficiaires exonérés – notamment les attributaires de l’aide juridictionnelle.

Sur les premiers mois d’application de la réforme de la garde à vue, la dépense liée à l’intervention de l’avocat reste dans les limites de ce qui avait été prévu : il n’y a pas lieu de craindre, à ce stade, une insuffisance de financement. Par ailleurs, rien ne permet d’affirmer que la mise en place de la contribution aura pour effet d’augmenter de façon significative le nombre de demandes d’aide juridictionnelle. Le cas échéant, les bureaux d’aide aux victimes seraient à même de traiter ces demandes supplémentaires. Le nombre de bureaux d’aide juridictionnelle dans lequel le délai de traitement moyen est supérieur à deux mois est d’ailleurs redescendu à cinq ; il devrait être de douze en 2012.

Répondant à M. Verchère, je préciserai que nous allons créer cette année 370 nouveaux emplois de greffier, après en avoir créé 399 en 2011. L’École nationale des greffes n’avait d’ailleurs jamais connu de recrutements aussi importants : cette année, 774 greffiers stagiaires y sont entrés, et ils seront autant l’année prochaine.

Ces recrutements massifs vont permettre d’augmenter le ratio entre nombre de magistrats et nombre de greffiers, de façon à parvenir à une proportion de 1 pour 1. Aujourd’hui, ce taux est d’environ 0,92 : nous avons donc déjà notablement progressé.

La délinquance des mineurs, qui marque beaucoup les gens, connaît une aggravation en termes tant de fréquence que de violence des actes. Lorsque l’on visite des établissements pénitentiaires, on rencontre de nombreux jeunes, mais peu de mineurs. Nous avons en effet, et c’est une bonne chose, réduit le nombre de mineurs incarcérés en prison : alors qu’ils étaient plus de 1 000, ils sont désormais moins de 800, notamment grâce à la création des CEF. Je précise, monsieur Dolez, que les crédits attribués à la PJJ augmenteront de 1,98 % en 2012 pour atteindre 773 millions d’euros. Cela devrait permettre d’assurer une meilleure prise en charge des délinquants et surtout d’éviter la récidive. C’est en effet le vrai problème s’agissant des mineurs : il ne suffit pas de les suivre au moment de leur placement, mais aussi après. Le placement est destiné à rompre avec l’état de délinquance ; par la suite, le suivi permet de maintenir cette rupture.

Je rappelle que la loi du 10 août 2011 a permis d’apporter un certain nombre de réponses pénales plus efficaces et plus visibles, notamment avec le tribunal correctionnel pour mineurs. De son côté, le Conseil constitutionnel, à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité, a eu l’occasion de préciser le contenu du principe fondamental reconnu par les lois de la République relatif à la justice des mineurs, en s’appuyant sur les lois de 1906 et de 1912 ainsi que sur l’ordonnance de 1945. Cette décision est capitale en ce qu’elle permettra à la prochaine législature de rédiger un code pénal des mineurs, dont nous avons le plus grand besoin.

Je répondrai maintenant à M. Raimbourg.

Je suis d’accord avec lui : nous avons lancé un véritable plan de rattrapage…

M. Dominique Raimbourg. Ce n’est pas tout à fait ce que j’ai dit !

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Les crédits ont en effet augmenté de 19 % depuis 2007, et de 63 % depuis 2002.

En ce qui concerne l’évaluation des partenariats public-privé, je crois avoir déjà répondu. Les établissements construits selon cette procédure sont récents, et la direction de l’administration pénitentiaire travaille sur la comptabilité analytique afin de comparer les coûts. J’y suis très favorable, car nous devons savoir qui paye quoi. Si des services entiers sont transférés au contractant privé, cela doit se traduire sur les effectifs, au moins dans l’établissement concerné – quitte à les redéployer.

Les SPIP ont eu recours aux moyens existants lors de leur création, ce qui explique la forte présence des travailleurs sociaux. Ces derniers sont nécessaires, mais nous avons aussi besoin d’équipes pluridisciplinaires, entre autres de personnes ayant des connaissances en criminologie.

Le nombre de conseillers d’insertion et de probation a fortement augmenté : il est passé de 1 300 à 2 671 entre 2002 et 2011. Un rapport conjoint de l’inspection générale des services judiciaires et de l’inspection générale des finances a d’ailleurs jugé le niveau des effectifs globalement satisfaisant. Il préconise toutefois de mettre en place des équipes mobiles afin de faire face à des pics d’activité. Naturellement, nous en tiendrons compte.

M. Raimbourg a réclamé des indicateurs pour mesurer la surpopulation carcérale. Le phénomène est réel – il existe environ 58 000 places en prison pour 65 000 personnes incarcérées –, mais il se manifeste très inégalement sur le territoire. En Loire-Atlantique, la surpopulation est très forte – nous allons d’ailleurs construire un nouveau centre à Nantes –, mais à Marseille, par exemple, il y a des places libres.

Nous devons trouver les moyens de réduire cette surpopulation. C’est le premier objectif de la loi pénitentiaire. Si nous y parvenons, nous pourrons alors appliquer les autres dispositions de la loi – ce qui est impossible si des détenus doivent dormir par terre, comme cela a pu arriver à Nantes.

Mme George Pau-Langevin. Ou en Guyane !

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Monsieur Dolez, les opérations immobilières du ministère de la justice concernent tout d’abord, c’est vrai, le pénitentiaire, mais plus de 1 300 visent les palais de justice – la plus grosse opération, qui est nécessaire compte tenu de l’évolution du fonctionnement de la justice judiciaire, concernera le palais de justice de Paris. Ce sont 135 millions d’euros de crédits qui seront consacrés à ces opérations. De 2009 à 2011, l’investissement de la carte judiciaire s’est élevé à 330 millions d’euros.

M. Jacques Alain Bénisti. Monsieur le garde des sceaux, vous avez déclaré dans la presse que l’année prochaine serait la première de la mise en œuvre du projet stratégique national (PSN) 2012-2014, visant notamment à optimiser l’emploi des moyens humains dans la magistrature. Dans ces conditions, pourquoi le nombre de personnels de la PJJ diminuera en 2012 par rapport à 2011, passant de 8 837 personnes à 8 395 ? Il est vrai que cette baisse ne concerne pas les éducateurs spécialisés, et c’est fort heureux. Mais pouvez-vous nous assurer qu’elle n’aura aucune incidence sur les actions éducatives menées par la PJJ, notamment dans les établissements publics d’insertion de la défense – EPIDe – dont nous avons voté la semaine dernière l’extension aux jeunes de seize à dix-huit ans ?

Je me réjouis par ailleurs que des moyens supplémentaires – 30 millions d’euros – soient alloués aux centres éducatifs fermés, ce qui permettra d’en créer vingt supplémentaires. Toutefois, où en est ma proposition de les transformer en plateformes de réinsertion des multirécidivistes, prolongeant de six mois la période de reconstruction sociopsychologique par une seconde période vouée à la formation et à l’apprentissage d’un métier ?

Je vous enverrai mon rapport sur les CEF, monsieur le garde des sceaux, où chacun s’accorde à reconnaître que six mois, c’est trop court pour remettre sur le droit chemin un délinquant désocialisé, désœuvré et en perte d’identité.

M. Bernard Gérard. Au cours de l’examen du texte sur la participation des citoyens à la justice pénale, nous avons voté le renforcement des évaluations de dangerosité : vous avez alors annoncé la création d’un centre national d’évaluation à Lille – sujet qui me tient à cœur compte tenu du drame qui s’est déroulé dans cette ville. Où en est ce dossier ?

Par ailleurs, quels moyens seront affectés au renforcement, qui a été adopté, de l’usage du bracelet électronique ?

M. Yves Nicolin. Monsieur le garde des sceaux, pourriez-vous faire un point sur la situation du centre pénitentiaire de Roanne qui, ouvert en décembre 2008, a fait récemment l’objet de manifestations de la part de personnels ?

Le tribunal de Roanne manque également de psychiatres, ce qui allonge les délais des demandes d’aménagement de peine.

Enfin, quelles actions avez-vous développées ou allez-vous développer pour rattraper les pays anglo-saxons qui règlent l’immense majorité de leurs conflits par le biais de la médiation, laquelle est une alternative à l’action en justice ?

M. Serge Blisko. En dépit des efforts déjà accomplis en matière de modernisation des places de prison, il en reste encore beaucoup à réaliser pour que les règles pénitentiaires européennes soient appliquées dans leur totalité et que l’objectif raisonnable de 95 % d’encellulement individuel, inscrit dans la loi pénitentiaire de 2009, soit atteint. Or nous sommes encore loin du compte – on a évoqué le chiffre de 400 matelas par terre !

C’est pourquoi nous sommes opposés au programme immobilier visant à atteindre les 80 000 places. Compte tenu de la loi pénitentiaire, des alternatives à l’incarcération et du programme très justifié d’augmentation de la présence des SPIP auprès des personnes en sursis avec mise à l’épreuve (SME), il n’est pas utile de prévoir plus de 60 000 à 62 000 places de bonne qualité, telles qu’elles ont été définies. Il faut rappeler qu’une place de prison coûte aujourd'hui entre 80 000 et 100 000 euros, ce qui surenchérit le programme. Alors que, comme vous l’avez noté, monsieur le garde des sceaux, Paris aura bientôt un beau palais de justice, qui coûtera 250 millions d’euros, est-il besoin de dépenser autant d’argent pour l’enfermement ?

De plus, la volonté du Président de la République de multiplier les places de prison va à l’encontre du développement du bracelet et des actions que la PJJ, notamment, peut mener en matière d’alternative à la prison, laquelle doit prendre le pas sur la construction de 15 000 places supplémentaires.

Mme George Pau-Langevin. Monsieur le garde des sceaux, ce débat laisse les parlementaires sur leur faim car nous devons nous contenter de la portion congrue.

La hausse du budget de la justice profite en grande partie à la pénitentiaire. Or l’augmentation du nombre de places de prison a un impact évident sur l’accès au droit, dont le budget ne prévoit aucun crédit en relation avec les nouvelles missions que nous avons votées.

Le budget de l’accès au droit, nous dit-on, permettrait de pallier les nouvelles sujétions liées à la garde à vue, alors même que vous n’avez pas retenu les préconisations que M. Gosselin et moi-même avions faites pour élargir l’assiette finançant l’aide juridictionnelle. Vous avez déclaré que ces préconisations ne vous semblaient pas justes, mais est-il juste que ce soient des justiciables entamant des procédures de divorce ou faisant des réclamations pour leur loyer ou l’obtention d’une allocation handicapée qui financent la garde à vue ? Il aurait été plus juste de faire payer les compagnies d’assurances !

Par ailleurs, s’il est vrai qu’on ouvre des maisons de justice et du droit (MJD), c’est également une manière de faire reposer l’accès au droit en partie sur les collectivités territoriales, qui sont déjà taxées en matière de politique de la ville puisque les crédits dédiés à celle-ci sont asséchés.

Si vous avez créé des postes de greffiers, vous avez supprimé des agents de catégorie C, si bien que les greffiers se trouvent obligés de faire eux-mêmes des photocopies, ce qui, comme vous l’avez vous-même observé, est une anomalie.

M. Yves Censi, président. Je tiens à rappeler que, en vertu de la Constitution, le Gouvernement prend la parole lorsqu’il le souhaite.

De plus, l’objet des commissions élargies est d’obtenir des réponses du Gouvernement.

Enfin, la procédure actuelle a été proposée par tous les groupes, y compris le vôtre, madame Pau-Langevin : vous n’avez pas à la remettre en cause à chaque prise de parole.

Mme Sylvia Pinel. Alors que ce budget devrait être une priorité, la justice connaît de graves difficultés de fonctionnement.

Quels moyens prévoyez-vous pour accélérer l’activité judiciaire, raccourcir les délais de jugement ou éviter l’inexécution des peines – 80 000 peines n’ont pas été appliquées cette année ? Que répondez-vous aux forces de l’ordre exaspérées par le décalage entre l’action qu’elles mènent pour lutter contre une délinquance croissante et l’absence de sanctions dont peuvent bénéficier des délinquants parfois dangereux, qui commettent des délits à la chaîne, puisque les sanctions ne sont ni systématiques ni suffisamment rapides ?

De même, plutôt que de se fixer comme principale priorité budgétaire le programme immobilier pénitentiaire pour satisfaire les dernières annonces du Président de la République, ne serait-il pas plus judicieux de développer les peines alternatives à la prison pour désengorger les centres de détention ? Le système judiciaire prévoit pourtant de nombreuses dispositions alternatives qui permettraient d’y parvenir, dispositions insuffisamment utilisées par manque de moyens. Que comptez-vous faire pour les développer ? Je pense notamment, pour la justice des mineurs, aux centres éducatifs renforcés, aux centres éducatifs fermés et aux foyers ouverts, dont plus de la moitié a fait l’objet d’une fermeture depuis 2008, ce qui a pour triste conséquence le placement en détention d’un trop grand nombre de mineurs, avec tous les effets contre-productifs qu’un tel placement peut engendrer.

Pourquoi ne pas pérenniser ce qui fonctionne ? Il faut, pour éviter de porter atteinte régulièrement à la justice des mineurs, la doter des moyens nécessaires. Or la PJJ est depuis dix ans une grande sacrifiée des arbitrages budgétaires et elle devra encore supporter l’année prochaine une diminution de ses effectifs – moins 106 ETP –, alors même qu’elle manque déjà de magistrats, de personnels de greffe et d’éducateurs, si bien qu’à l’heure actuelle une décision d’assistance éducative attend entre trois et cinq mois avant d’être appliquée et une peine prononcée près de dix mois pour être exécutée. Comment la baisse considérable du budget des services judiciaires pourrait-elle permettre de remédier à cette situation ?

Enfin, monsieur le garde des sceaux, pensez-vous que ce budget permettra à la France de ne plus être classée au trente-septième rang des pays du Conseil de l’Europe pour la part de PIB consacrée à la justice ?

M. François Rochebloine. Monsieur le garde des sceaux, permettez-moi d’appeler votre attention sur la situation de la maison d’arrêt départementale de La Talaudière, dans le département de Loire, dont nous espérons la prochaine réhabilitation ou reconstruction.

Je tiens tout d’abord à vous remercier d’avoir répondu favorablement à mon invitation et effectué une visite complète de cet établissement l’été dernier. Vous avez ainsi pu constater directement l’état des locaux qui, sans être très anciens, posent de vrais problèmes quant à la sécurité, aux conditions de travail des personnels pénitentiaires et aux conditions de détention des personnes incarcérées, non conformes au principe de dignité.

Cette maison d’arrêt n’étant plus aux normes, il convient ou de la moderniser ou de la reconstruire.

De plus, les riverains immédiats de l’établissement subissent depuis de très longues années d’importantes nuisances en raison des parloirs sauvages.

Monsieur le garde des sceaux, la décision de réhabilitation ou de reconstruction sur un autre site a-t-elle été prise ? Si oui, quels en seraient les coûts respectifs et à quelle date débuteraient les travaux ?

Votre visite a été appréciée de tous : elle a permis des échanges de qualité. À ce titre, elle a suscité beaucoup d’espoir du côté des personnels.

M. Marcel Bonnot. Le budget de la justice, qui s’élève à 7,42 milliards d’euros, a des objectifs ambitieux.

S’agissant de l’aide juridictionnelle, quelle jauge vous a permis de fixer le montant des crédits à 422 millions d’euros, d’autant que la prestation des avocats se trouve accrue dès la première heure de garde à vue et pendant toute la durée de celle-ci ?

Il ne faudrait pas que l’accès au droit, désormais garanti pour chacun, entraîne la création d’une sorte de sécurité sociale sur le dos de la corporation des avocats.

En outre, une contribution pour l’aide juridique a été instaurée pour tous les justiciables, donnant lieu à l’acquittement d’un timbre de 35 euros, payé, suivant ses ressources, par celui qui appréhende une procédure devant le tribunal de grande instance. À combien les ressources dégagées par cette contribution sont-elles estimées ? Sera-t-elle affectée en partie à l’indemnisation des avoués ? Quelle est la part de l’État ? Est-elle suffisante pour faire face à l’exigence financière engendrée par la loi du 14 avril 2011 sur la réforme de l’aide juridictionnelle ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Monsieur le garde des sceaux, quel est le montant des crédits prévus pour la rénovation du parc immobilier pénitentiaire, notamment pour le centre de Mende ? Mme Alliot-Marie avait conservé cette prison pour des raisons d’aménagement du territoire mais, faute d’entretien, elle risque de disparaître.

Par ailleurs, les prisons ouvertes concernent en France moins de 1 % des détenus, contre 34 % au Danemark, 32 % en Finlande et 24 % en Suède. La moyenne de l’Union européenne s’élève à 6 %. Jean-Marie Bockel avait beaucoup œuvré sur le sujet. Quelles sont les réflexions engagées à ce sujet ?

La France, enfin, est régulièrement condamnée en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’homme pour délai non raisonnable par la CEDH. Quel montant atteint la totalité de ces condamnations ? Quelles réponses envisagez-vous d’apporter à cette situation ?

Mme Chantal Berthelot. Monsieur le garde des sceaux, vous m’avez tenu informée, le 30 août dernier, de la répartition des effectifs dans les juridictions de la Guyane et des créations de postes à Cayenne et à Saint-Laurent-du-Maroni. Je tiens à saluer ici cette avancée.

Vos avez précisé que le nombre de fonctionnaires prévus s’élevait à 81 : 69 postes étant actuellement pourvus, je présume que le rattrapage sera réalisé en 2012.

La création de la cour d’appel de Cayenne a été actée pour le 1er janvier 2012. Quand entrera-t-elle effectivement en fonctions pour répondre aux besoins des justiciables et des professionnels de la justice ?

Prévoyez-vous un effort pour l’aide juridictionnelle en Guyane, compte tenu du taux élevé d’affaires dans lesquelles les justiciables y ont recours ?

Le centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly a été épinglé par l’Observatoire international des prisons : il n’y a que 532 places pour 665 détenus. De plus, les syndicats dénoncent régulièrement le manque de surveillants. Quand annoncerez-vous la création d’un centre de rétention à Saint-Laurent-du-Maroni ? Surtout, quand mettrez-vous en place les services de justice dans l’ouest de la Guyane, à Saint-Laurent précisément, services qui font à l’heure actuelle cruellement défaut ?

M. Jean-Jacques Urvoas. Je souhaite revenir sur la protection judiciaire de la jeunesse. Vous avez affirmé que son budget augmentait de 1,2 % : l’honnêteté devrait vous conduire à rappeler que, de 2008 à 2011, il a baissé continûment de 6 %. De plus, cette augmentation ne compense pas l’inflation, qui s’élève à 2 %. Enfin, vous transformez plusieurs établissements de placement éducatifs actuellement gérés par la PJJ en CEF – vous consacrez à cet objectif 30 millions d’euros. L’augmentation que vous avez évoquée ne se traduit donc pas en moyens supplémentaires pour la PJJ.

S’agissant des personnels, vous ne cessez de confier, à longueur de textes, des missions supplémentaires à la PJJ – c’est une marque de reconnaissance – et vous souhaitez toujours plus d’éducateurs dans les établissements de réinsertion scolaire. Or, dans le même temps, vous supprimez 130 équivalents temps plein travaillé. Ainsi, sur la période 2007-2012, vous aurez supprimé 7 % des 9 000 agents de cette administration, soit quelque 650 postes. Alors que vous affirmez vouloir améliorer la qualité du traitement de la délinquance des mineurs, comment réussirez-vous à réduire les délais de prise en charge et à renforcer la réinsertion des mineurs – tel est l’objectif – tout en supprimant des agents – je n’ai pas dit : « éducateurs » – dont c’est précisément la compétence ? Comment ferez-vous mieux avec, au total, moins de personnels ?

M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le garde des sceaux, j’ai déjà posé, il y a un an et demi, à M. Jean-Marie Bockel la question de l’inadaptation des moyens, en nombre de magistrats, dans les tribunaux administratifs pour traiter rapidement des recours relatifs à des projets publics importants en termes de création d’activités et d’emplois.

Le département du Loir-et-Cher offre trois exemples.

Le premier concerne l’ancien site Giat Industries de Salbris, où 600 emplois se sont évaporés du fait des procédures qui ont traîné en longueur durant cinq ans, aboutissant au retrait de l’investisseur. À Dhuizon, Pierre et Vacances attend depuis quatre ans et demi de pouvoir créer un village de vacances. Enfin, à Romorantin, Unibail s’est désengagé après avoir attendu quatre ans, de recours en recours, une décision lui permettant de réaliser le projet de Carré des Marques.

Monsieur le garde des sceaux, l’État doit assurément faire des économies : nous en sommes tous persuadés. Toutefois, les économies que l’État réalise, d’un côté, en nombre de magistrats, économies qui retardent le traitement des dossiers, ne les perd-il pas, de l’autre, en même temps que les collectivités locales, en termes d’emplois, de chômage et d’assistance ? Les pertes engendrées par la disparition de projets créateurs d’activités et d’emplois sont bien plus lourdes pour la collectivité nationale que ne sont importantes les économies réalisées par le ministère de la justice.

M. Jacques Valax. Première observation : nous sommes passés du trente-cinquième au trente-septième rang des pays du Conseil de l’Europe pour la part de PIB consacrée à la justice.

Ma deuxième observation est tirée du rapport sur le budget de la justice de M. Jean-Paul Garraud, rapporteur spécial, qui note la persistance, l’aggravation parfois, des difficultés quotidiennes rencontrées par les magistrats et les fonctionnaires des services judiciaires.

Troisième observation : l’USM « dénonce un budget de la justice en trompe-l’œil, en réalité en baisse en ce qui concerne les services judiciaires et la protection judiciaire de la jeunesse, malgré quelques recrutements qui demeurent insuffisants pour faire face aux nouvelles charges nées de lois adoptées en cours d’année 2011 ».

Enfin – quatrième observation –, s’agissant de l’accès au droit et à la justice, si le budget de l’aide juridictionnelle, après des années de baisse, est de nouveau en hausse, c’est au détriment des budgets du développement de l’accès au droit, de l’aide aux victimes et de la médiation – médiation dont on parle beaucoup mais qui demeure le parent pauvre de la justice : depuis dix ans, rien n’a été fait pour son développement.

Quant à la contribution complémentaire de 35 euros, que je dénonce et dont je prétends qu’elle est contraire au principe du libre accès à la justice, je suis certain qu’elle servira à abonder les fonds de l’aide juridictionnelle. Et ce ne sont pas les quelques explications que vous nous avez données qui ont pu me rassurer.

En ce qui concerne le transfert des charges d’escorte et de garde des palais de justice, le rapport de l’USM évalue à 1 000 le nombre d’agents nécessaires – il y est même question de 2 000 à 3 000 ETPT. Or vous avez affirmé que 250 agents suffiraient. Qu’en est-il exactement ? Peut-être vos services pourront-ils me répondre sur le sujet.

Quel sera le nombre de greffiers en 2011 et 2012 ?

M. Jean-Michel Clément. Je partage la préoccupation de M. Michel Hunault relative à l’application des lois que nous votons, et ce ne sont pas les chiffres dont nous débattons aujourd'hui qui nous rassureront en la matière.

L’augmentation du budget de la justice traduit son recentrage général sur la justice pénale au détriment implicite de la justice civile et de la justice judiciaire.

Les parents pauvres du budget sont les procédures autres que les procédures pénales. Or les indices des documents budgétaires ne nous permettent pas d’apprécier la qualité de cette justice autrement qu’en en ressentant, au quotidien, les méfaits sur la vie de nos concitoyens. Je pense notamment à la justice familiale et aux procédures de tutelle, qui ne peuvent pas être appliquées conformément aux lois et aux décrets existants.

Vous avez évoqué le juge de proximité, monsieur le garde des sceaux. Mais ce n’est pas lui qui réglera la situation. Nous sommes face à un dysfonctionnement majeur. Par-delà les chiffres, je le répète, il y va de la qualité de la justice !

M. Pierre Morel-A-L’Huissier a évoqué le coût de cette lenteur pour le budget de l’État, remarquant qu’il nous manque un indicateur en la matière.

Il faut savoir en effet que, trop souvent, parce que la justice ne peut pas rendre ses décisions en temps utile, nos concitoyens sont victimes de cette lenteur sur le plan économique, notamment lorsque la vie des entreprises est en jeu, si bien qu’ils demandent réparation financière à l’État. Cette lenteur fait donc deux victimes : l’entreprise et l’État. Les documents budgétaires nous masquent ce coût, qu’il conviendrait à l’avenir d’identifier.

M. Philippe Goujon. Où en est le regroupement des services centraux du ministère – je fais allusion à différents projets, notamment dans le 5e arrondissement de Paris et à Bagnolet ?

Par ailleurs, nous avons voté des lois en vue de lutter contre des désordres préoccupants pour nos concitoyens – attroupements dans les halls d’immeubles, racolage passif, vente à la sauvette –, ce qui conduit à de nombreuses interpellations. Or les jugements rendus montrent que la justice a des difficultés à appréhender ces contentieux. Qu’en est-il exactement ?

M. Laurent Hénart. Monsieur le garde des sceaux, disposez-vous d’éléments d’appréciation des juridictions interrégionales spécialisées (JIRS), qui ont été installées dans plusieurs villes afin de permettre une concentration des compétences sur certaines affaires particulièrement techniques et complexes ?

Puisqu’il s’agit de petites unités, la défaillance d’un poste de magistrat ou d’agent administratif suffit pour nuire au bon fonctionnement de l’ensemble de la structure. Une attention particulière pourrait-elle être portée à ces nouvelles unités, notamment en termes de moyens humains ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Monsieur Martin-Lalande, je ne peux vous répondre, pour la simple raison que le budget des juridictions administratives relève, non du ministère de la justice, mais du vice-président du Conseil d’État. Soyez toutefois assuré que je transmettrai à ce dernier les questions que vous avez posées.

Au total, quelque 250 000 personnes sont placées sous main de justice en France, parmi lesquelles 175 000 exécutent leur peine en milieu ouvert. Il est donc erroné de prétendre que l’on ne fait que du carcéral ! La population écrouée est de 64 000 personnes. Il est vrai que l’on compte 85 000 personnes qui ont été condamnées, mais dont la peine n’a pas été exécutée ; encore faut-il préciser qu’il s’agit de condamnations à de courtes peines.

Il convient d’adapter le système pénitentiaire à ces courtes peines : les besoins ne sont pas les mêmes suivant que les gens sont condamnés à trois mois ou à trois ans de prison. L’une des ambitions du programme de 80 000 nouvelles places est de différencier les établissements pénitentiaires, afin de répondre aux particularités individuelles. L’exécution des peines a été diversifiée grâce au placement sous bracelet électronique, qui concerne aujourd’hui 12 000 personnes ; cela impose toutefois une surveillance spécifique, qui peut être compliquée à mettre en œuvre, notamment pour les délinquants sexuels.

La protection judiciaire de la jeunesse est-elle, comme vous l’affirmez, le parent pauvre de la justice ? J’admets que vos critiques soient recevables, même s’il convient de noter, premièrement, que l’on essaie cette année de mettre un terme à des coupes certes nombreuses et, deuxièmement, que l’on n’a jamais touché au cœur du métier, notamment aux effectifs des éducateurs. Il reste que des suppressions de postes ont touché les fonctions de support, ce qui a imposé une réorganisation territoriale des services. En 2012, cent quarante emplois de soutien seront supprimés, tandis que cent dix postes d’éducateur seront créés, dont soixante pour les centres éducatifs fermés – soit un solde négatif de trente emplois.

Monsieur Gérard, outre le Centre national d’évaluation de Fresnes, un deuxième centre vient d’être créé au sein du nouvel établissement pénitentiaire de Réau, et la décision d’en ouvrir un troisième dans le Nord a été prise. La direction de l’administration pénitentiaire travaille sur plusieurs scénarios : celui qui semble actuellement privilégié consisterait à transformer le quartier maison centrale du centre pénitentiaire de Lille-Sequedin en centre national d’évaluation à l’occasion de l’ouverture de la maison centrale de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, prévue pour 2013.

Monsieur Nicolin, vous avez raison, il convient de développer la médiation. Mais quand on le propose dans un texte, il serait bon de voter celui-ci ! Il faut savoir que 60 % du temps des juridictions est occupé par le traitement du contentieux familial, dont une part importante pourrait être réglée par la médiation : ce n’est pas nécessairement au juge d’intervenir dans la vie d’un couple.

M. Yves Nicolin. Il faudrait aussi développer la médiation économique…

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Commençons déjà par la médiation sociale !

Le centre de détention de Roanne semble effectivement aller mal. J’irai le visiter après les élections professionnelles.

Il est également vrai que cette région manque de psychiatres. Il s’agit toutefois d’un problème national, que le ministère de la justice ne pourra régler seul.

L’objectif de 80 000 places est-il nécessaire ? M. Blisko et Mme Pinel ont tenu à ce sujet des propos contradictoires. Il est vrai que l’on n’a pas besoin de 80 000 places identiques, dans des maisons d’arrêt, mais il convient de différencier les places suivant les peines à accomplir. Il est également vrai que, même si l’on mène ce programme à bien, on restera à un niveau inférieur à celui de l’Espagne ou de l’Angleterre. Il est tout aussi vrai que des peines ne sont pas exécutées et que l’on doit y remédier. Mais, pour ce faire, il existe d’autres solutions que la prison : on peut notamment augmenter le nombre de placements sous bracelets électroniques – même si l’on atteindra bientôt, pour des raisons techniques, le maximum. Il reste que Mme Pinel a raison : il faut davantage de places.

Madame Pau-Langevin, le budget consacré à l’accès au droit et à la justice augmentera de 7,1 % en 2012, ce qu est bien. Néanmoins, on constate que le recours à un avocat lors de la garde à vue est, pour l’instant, plus modeste que prévu. Il faut voir comment les choses évolueront et attendre la décision du Conseil constitutionnel sur les deux questions prioritaires de constitutionnalité concernant la garde à vue dont il a été saisi. Je pense toutefois que les mesures qui ont été prises permettront d’assurer le bon fonctionnement du service.

On a en effet supprimé de nombreux emplois de catégorie C dans les services judiciaires. Je pense que l’on peut difficilement aller plus loin. Je tiens, comme vous, à préserver la spécificité des missions des greffiers. Je suis persuadé qu’il faudra demain repenser leur rôle dans les juridictions et, pour les affaires de première instance, comme la vérification de la gestion des comptes de tutelle ou les injonctions de payer, peut-être modifier la répartition des compétences entre magistrats d’instance et greffiers, comme cela se fait en Allemagne. En tout cas, laissons-nous la possibilité de le décider, et faisons en sorte que les autres tâches puissent être remplies par d’autres fonctionnaires.

Madame Berthelot, la situation en Guyane est bien délicate. Nous essayons de l’améliorer. Je viens de proposer la nomination d’un nouveau procureur à Cayenne. L’installation d’une cour d’appel à Cayenne – demande ancienne – sera effective au début du mois de janvier ; j’y assisterai. Je proposerai au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) un candidat pour le poste de procureur général. Je sais que la formation du siège du CSM est en train de procéder à la sélection du candidat au poste de premier président de la cour d’appel de Cayenne.

S’agissant de la délicate affaire de Saint-Laurent-du-Maroni, je ne vous promettrai pas la création d’un tribunal de grande instance. En revanche, nous essayons d’établir une présence constante de la justice ; on dispose d’ores et déjà d’un greffe détaché renforcé, comprenant deux fonctionnaires et deux magistrats, un vice-président et un vice-procureur.

Mme Chantal Berthelot. Ils ont quitté les lieux !

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. De nouvelles personnalités viennent d’être nommées, qui arriveront sous peu. Je vous promets que, lorsque j’irai à Cayenne pour l’installation de la cour d’appel, je me rendrai aussi à Saint-Laurent-du-Maroni.

Monsieur Morel-A-L’Huissier, la maison d’arrêt de Mende doit recevoir 57 prisonniers ; 357 970 euros ont été prévus pour la sauvegarde du bâtiment, 53 000 euros pour la sécurité incendie et 51 000 euros pour le système d’interphonie.

Monsieur Rochebloine, on ne réhabilitera pas l’établissement de La Talaudière : on construira une nouvelle prison sur un terrain disponible. Si vous ne parvenez pas à trouver un terrain disponible, je pourrai vous en montrer un.

Monsieur Valax, vous savez fort bien que le budget de la justice est en hausse ! Il est en outre erroné de prétendre que tout est destiné au pénal. Sur ce point, l’USM s’est trompée – j’en ai d’ailleurs discuté avec M. Régnard.

Monsieur Goujon, deux sites seront en réalité conservés : la place Vendôme et un autre. On parle de ce projet depuis des années. L’objectif est de réaliser des économies, le ministère de la justice utilisant des locaux dont les loyers sont extrêmement élevés. Parmi les nombreuses propositions qui ont été faites, j’étais pour ma part favorable à celle du président Giscard d’Estaing d’installer nos services dans l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde. Cet avis n’a pas été partagé. Une mission a donc été confiée par le ministère et par France Domaine à un cabinet, qui a sélectionné cinquante-deux sites, parmi lesquels nous en avons retenus quatre : deux à La Défense, un dans le 15e arrondissement de Paris et un autre vers la porte de la Chapelle. Les négociations sont en cours.

Mme George Pau-Langevin. Et le projet d’une installation à la porte de Bagnolet ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la Justice et des libertés. Personne ne voulant y aller, je ne l’ai pas retenu. Quoique je ne sois pas spécialiste des questions immobilières, je trouve fort curieux que ces locaux n’aient pas trouvé preneur depuis trente ans. Je me dis qu’il doit bien y avoir une raison…

Monsieur Hénart, les juridictions interrégionales spécialisées font du très bon travail. Si certaines ont démarré tardivement, comme à Lyon, toutes fonctionnent correctement aujourd’hui. À Marseille, la JIRS est même devenue indispensable.

J’entends veiller à ce que ces juridictions disposent des outils nécessaires à leur bon fonctionnement, notamment en termes de profils de postes pour les magistrats, d’assistants spécialisés et de fonctionnaires détachés d’autres ministères, ainsi que de moyens techniques spécifiques, qui seront financés notamment grâce au fonds de concours géré par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT). À ce jour, les JIRS ont traité 1 843 procédures.

M. Yves Censi, président. Monsieur le garde des sceaux, nous vous remercions pour la précision de vos réponses.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Monsieur Michel Mercier, Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés, lors de la commission élargie (voir le compte rendu de la réunion du 26 octobre 2011 à 16 heures 15), sur la mission Justice, la commission des Finances examine les crédits de cette mission.

Article 32 : Crédits du budget généralÉtat B

Sur les crédits de la mission Justice, la Commission est saisie de l’amendement II–9 du Gouvernement.

Suivant l’avis favorable du Rapporteur spécial, la Commission adopte l’amendement II–9, puis les crédits de la mission Justice ainsi modifiés.

Article 52, rattaché : Prorogation de deux années de la taxe finançant le fonds d’indemnisation des avoués

La Commission examine l’article 52 rattaché à la mission Justice.

Suivant l’avis favorable de M. Alain Joyandet, Rapporteur spécial, la Commission adopte l’article 52 sans modification.

Article 52

Prorogation de deux années de la taxe finançant le fonds d’indemnisation des avoués

Texte du projet de loi :

Au II de l’article 54 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009, l’année : « 2018 » est remplacée par l’année : « 2020 ».

Exposé des motifs du projet de loi :

Le présent article a pour objet de proroger jusqu’en 2020, au lieu de 2018, la perception du droit de 150 euros dû par les parties à l’instance d’appel, institué par l’article 54 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009.

Le produit de ce droit est affecté au fonds d’indemnisation de la profession d’avoués près les cours d’appel, chargé du paiement des sommes dues aux avoués près les cours d’appel et à leurs salariés dans le cadre de la réforme de la représentation devant les cours d’appel. Ce fonds a été créé par la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel. Ses modalités de fonctionnement ont été déterminées par le décret n° 2011-419 du 18 avril 2011.

Les simulations effectuées ayant fait apparaître que le montant des ressources du fonds devait être augmenté pour tenir compte des charges finalement induites par la réforme de la représentation devant les cours d’appel, il est proposé que le droit fixe soit prorogé de deux années.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article a pour objet de proroger de deux ans la durée de perception du droit de 150 euros du par les parties à l’instance d’appel.

I.– LA RÉFORME DE LA REPRÉSENTATION DEVANT LES COURS D’APPEL

L’objectif de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel avait un objectif double : d’une part, simplifier l'accès à la justice en appel, et d’autre part, assurer le respect de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.

1.– La fonction d’avoué

Apparue en 1791, la fonction d’avoué a été réformée à de nombreuses reprises. Ses caractéristiques actuelles sont héritées de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. Celle-ci modifie notamment le champ de compétence des avoués et des avocats : pour les procédures avec représentation obligatoire, les avoués ont le monopole de la postulation et de la plaidoirie en appel, tandis que les avocats exercent ce monopole en première instance. En vertu de l’article 1er de l’ordonnance n° 45-2591 du 2 novembre 1945 relative au statut des avoués, ceux-ci représentent les parties devant les cours d’appel auprès desquelles ils sont établis. Ils perçoivent à ce titre des émoluments tarifés. Au 1er janvier 2009, les vingt-huit cours d’appel concernées par la réforme comptaient 231 offices d’avoués au sein desquels exerçaient 433 avoués et 1 862 salariés.

Pour rappel, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, ainsi que dans les départements et les collectivités d’outre-mer, la postulation devant les cours d’appel est d’ores et déjà assurée par les avocats.

2.– Le double objectif de la réforme

a) La transposition de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur

La fusion des professions d’avocats et d’avoués répond à la nécessité de se conformer à la directive européenne du 12 décembre 2006 (dont la transposition doit intervenir au plus tard le 27 décembre 2009). En effet, comme l’explique l’exposé des motifs du projet de loi, cette obligation communautaire « ne permet pas de maintenir en l’état le statut des avoués, titulaires d’un office, nommés par le garde des Sceaux et soumis à un tarif, les entraves de la libre circulation des services ne pouvant être justifiées que pour les activités participant à l’exercice de l’autorité publique ».

b) La simplification de l’accès au droit en appel

La réforme simplifie les démarches du justiciable en permettant à l’avocat qui a plaidé en première instance de plaider à nouveau en appel. De plus, selon le Gouvernement, « la suppression de la dualité d’intervention de l’avoué et de l’avocat favorisera la baisse du coût du procès » (1). Cette baisse potentielle ne concernera que le justiciable qui aurait souhaité conserver son avocat, malgré l’obligation de recourir à un avoué. En effet, aux honoraires fixés librement entre l’avocat et son client, s’ajoute dans ce cas la rémunération de l’avoué fixée par un tarif (le montant de l’émolument moyen alloué aux avoués est de 931 euros en moyenne). Cependant, le justiciable aurait pu choisir de n’être représenté que par l’avoué et, par conséquent, ne s’acquitter que de l’émolument. Dans ce cas, le cumul des honoraires de l’avocat et du droit fixé à 330 euros ne se traduira pas nécessairement par une réduction du coût du procès.

L’étude d’impact jointe au projet de loi prévoit une augmentation de 15 % du nombre des procédures en appel du fait de la disparition des avoués qui, fort de leur expérience, peuvent dissuader les parties d’interjeter appel si le dossier ne contient pas d’éléments susceptibles d’entraîner une décision favorable de la juridiction.

3.– Les dispositions de la réforme

● La fin du droit de présentation des avoués

La réforme a pour effet de priver les avoués de leur droit de présentation, ce qui constitue un préjudice et légitime une indemnisation corrélée à la valeur économique de l’office. Par ailleurs, la suppression du monopole de la postulation qui leur était accordé les conduit, sauf renonciation de leur part, à exercer à l’avenir leur activité en concurrence avec les avocats devant l’ensemble des juridictions. Or, cette modification des conditions d’exercice conduira de nombreuses études d’avoués à licencier une partie de leurs 1 862 salariés. En effet, un avocat emploie en moyenne 0,8 salarié contre 4,5 pour un avoué. Cette conséquence directe de la réforme a justifié l’instauration des indemnités de licenciement supra-légales et des dispositions de reclassement présentées ci-dessous.

Par ailleurs, la date d’entrée en vigueur de la fusion des professions d’avoués et d’avocat est fixée au 1er janvier 2011, l’année 2010 constituant une année transitoire nécessaire à la mise en oeuvre de la réforme.

● L’intégration des avoués dans la profession d’avocat et leur inscription au tableau de l'ordre du barreau près le tribunal de grande instance (TGI) dans le ressort duquel leur office est situé.

L’article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques est modifié afin de substituer à la profession d’avoué près les cours d’appel la profession d’avocat. Il est précisé que, dès lors, les avoués peuvent exercer l’ensemble des fonctions antérieurement dévolues aux avocats et de conseil juridique. Les avoués bénéficient également de la possibilité de renoncer à entrer dans la profession d'avocat ou de choisir un autre barreau. En outre, comme cela avait été prévu pour les avocats et avoués qui ne feraient pas partie de la nouvelle profession d’avocat définie par la loi du 31 décembre 1971 précitée, les avoués en exercice depuis plus de quinze ans seront autorisés à solliciter l'honorariat lors de la cessation de leurs fonctions.

En parallèle, les avocats exerceront les activités auparavant réservées aux avoués devant les cours d’appel. L’encadrement spatial de l’exercice de la profession d’avocat reste inchangé : un avocat, dont la résidence professionnelle est établie dans le ressort d’un tribunal de grande instance, ne pourra postuler et plaider que devant la cour d’appel dont ce tribunal dépend. La postulation en appel fera l’objet d’honoraires, fixés entre l’avocat et son client (1). Par ailleurs, il sera désigné, au sein de chaque cour d’appel, un représentant des barreaux (en la personne de l'un des bâtonniers du ressort de la cour), susceptible de traiter de l’ensemble des questions intéressant la profession à cet échelon.

Dans le cas où les avoués et les collaborateurs titulaires du diplôme d’avoués renonceraient à devenir avocats, ils pourront accéder à l’ensemble des professions juridiques et judiciaires libérales réglementées (avocats au Conseil d’État ou à la Cour de cassation, notaire, administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, huissier de justice, commissaire priseur judiciaire, greffier de tribunal de commerce). La demande devra en être faite dans un délai de cinq ans. Un décret en Conseil d'État précisera les conditions d’application de cette disposition.

De plus, les collaborateurs titulaires du diplôme d'avoué bénéficieront d’un accès direct à la profession d'avocat. Dans le cas des collaborateurs juristes, non titulaires du diplôme d'avoué, un second décret en Conseil d’État prévoira les dispenses à certaines conditions d’accès à ces professions. Les collaborateurs en cours de stage accéderont directement à la formation d'avocat, sans examen.

Ces mesures s’accompagnent de dispositions transitoires permettant aux avoués d’exercer de façon simultanée leur profession et celle d’avocat dès le 1er janvier 2010.

Par ailleurs, la fusion des deux professions conduira à modifier de fait l’objet social des sociétés d’avoués qui n’auront pas été dissoutes à la date d’entrée en vigueur de la loi : elles seront réputées avoir pour objet social l’exercice de la profession d’avocat .

● La suppression des offices d’avoués près les cours d’appel et le principe de l’indemnisation pour la perte du droit de présentation

Une indemnité est versée aux avoués pour la perte du droit qui leur est reconnu par l’article 91 de la loi du 2 avril 1816 de présenter un successeur à l’agrément du garde des Sceaux. En effet, lorsque la suppression du droit de présentation de l'ensemble d'une catégorie d'officiers ministériels a été décidée, le principe d'une indemnisation de cette perte, correspondant à la valeur de l'office, est reconnu et pris en charge par l’État (6). L’indemnisation a été fixée à 100% par voie d’amendement à l’Assemblée nationale.

● L’indemnisation des salariés des avoués

Le texte proposé pose le principe selon lequel tout licenciement survenant en conséquence de la réforme, soit entre la date de publication de la loi et le 31 décembre 2012, est réputé licenciement économique (au sens de l’article L. 1233-3 du code du travail). Les salariés licenciés comptant un an d'ancienneté perçoivent des indemnités de licenciement calculées par application, au nombre d'années d'ancienneté dans la profession, du double du taux légal, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année d'ancienneté comprise entre quinze et vingt, quatre quinzièmes par année d'ancienneté comprise entre vingt et vingt-cinq, six quinzièmes par année d'ancienneté comprise entre vingt-cinq et trente ans,
– huit quinzièmes par année d'ancienneté comprise entre trente et trente-cinq ans, dix quinzièmes par année d'ancienneté comprise entre trente-cinq, quarante ans et douze quinzièmes par année d'ancienneté au-delà de quarante ans.

● Le versement aux avoués d’un acompte sur leurs indemnités afin de financer les indemnités de licenciement de leurs salariés et de restructurer leur office.

Les avoués pourront demander un acompte sur les indemnités qui leur sont dues au titre de leur office dans la limite de 50 % de la recette nette réalisée telle qu’elle résulte de la déclaration fiscale connue à la date de publication de la loi. Le délai de versement de l’acompte sera de trois mois après le dépôt de la demande.

II.– LE VOLET FISCAL DE CETTE RÉFORME

1.– L’instauration d’un droit de 150 euros perçu par voie de timbre

Le droit de 150 euros dû par les parties à l’instance d’appel a été institué par l’article 54 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009, codifié à l’article 1635 bis P du code général des impôts.

Ce droit est acquitté par l’avocat postulant pour le compte de son client, soit par voie de timbres mobiles, soit par voie électronique. Malgré les coûts de fabrication, d’acheminement des valeurs et de remise aux débitants de tabacs, chargés d’en assurer la distribution, cette solution simplifie le contrôle du respect de l’obligation fiscale. Le greffe, au moment du dépôt, peut aisément s’assurer de l’acquittement du droit. Ce paiement conditionnera la recevabilité et l’effectivité de la requête.

Ce droit s’applique aux appels interjetés entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2018 à la condition que le fonds d’indemnisation de la profession d’avoués près les cours d’appel ait été créé. À la condition que le fonds d’indemnisation ait été créé, ce droit sera perçu du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2018 afin que le justiciable n’ait pas à s’acquitter pendant la période transitoire d’une double charge constituée des émoluments des avoués et du droit ainsi créé. Cette période de huit années doit permettre de couvrir le montant total des dépenses du fonds d’indemnisation des avoués. La prévision de recettes a été calculée sur une base moyenne annuelle de 130 000 affaires jugées en appel (hors aide juridictionnelle).

L’indemnisation à 100 % de la valeur des offices, majorée le cas échéant à hauteur de l’apport personnel consenti et du montant du capital restant dû au titre des emprunts contractés aux fins d’acquisition de l’office, représente un coût de 252 millions d’euros. Par ailleurs, le montant total du remboursement des indemnités de licenciement et des sommes dues au titre du reclassement des salariés licenciés est de 27 millions d’euros. Au total, les indemnisations versées aux avoués et à leurs salariés représentent donc 279 millions d’euros.

Le coût de la réforme (indemnisation de la valeur des études et indemnités de licenciement des salariés des avoués) est estimé à 304 millions d’euros.

2.– La création d’un fonds d’indemnisation

Le fonds a été créé par l’article 19 de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel. Le droit de 150 euros s’appliquera ainsi à compter du 1er janvier 2012.

Les modalités de fonctionnement du fonds ont été déterminées par le décret n° 2011-419 du 18 avril 2011. Celui-ci prévoit que :

– les recettes du fonds sont constituées du droit dû par les parties et des emprunts ou avances contractés auprès de la Caisse des dépôts et consignations ;

– les dépenses sont constituées par les indemnités à verser aux avoués et à leurs salariés, par les frais financiers et de gestion dus à la caisse et par le remboursement des emprunts et avances contractés auprès de la caisse.

III.– DES MOYENS INSUFFISANTS QUI NÉCESSITENT UNE AUGMENTATION DE LA DURÉE DE PERCEPTION DU DROIT

Les simulations effectuées ont fait apparaître que le montant des ressources du fonds sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2018 (41,5 millions d’euros sur 7 années, soit 290,5 millions d’euros) ne permettent pas de couvrir les dépenses prévisionnelles induites par la réforme de la représentation devant les cours d’appel : 351,5 millions d’euros.

Les dépenses prévisionnelles du fonds d’indemnisation, se décomposent ainsi :

DÉPENSES PRÉVISIONNELLES DU FONDS

Indemnisations des avoués

251 609 000 euros

 

Indemnisation des salariés

51 900 000 euros

Frais perçus par la Caisse des dépôts et consignations

48 000 000 euros

TOTAL

351 509 000 euros

Le présent article prévoit donc une augmentation de deux années de la durée de perception du droit de 150 euros qui permet d’équilibrer les dépenses prévisionnelles d’ici au 31 décembre 2020. Le choix de l’allongement de la durée de perception permet de ne pas alourdir le coût du recours à la procédure d’appel.

Le besoin de financement estimé (61 millions d’euros) sera inférieur au produit de deux années de recouvrement supplémentaires (83 millions d’euros). Le solde sera donc reversé au budget de l’État au moment de la clôture du fonds d’indemnisation.

Suivant l’avis favorable de M. Alain Joyandet, Rapporteur spécial, la Commission adopte l’article 52 sans modification.

ANNEXE 1 : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 M. Patrice Vermeulen, président de section de la 4ème chambre de la Cour des comptes et M. Jean-Pierre Lafaure, conseiller-maitre.

– M. Benoît Guérin conseiller budgétaire de M.Michel Mercier, ministre de la justice et des libertés.

– Mme Véronique Malbec, directrice des services judiciaires

– M. de Laurent de Galard, adjoint au directeur de l’administration pénitentiaire et Paul-Marie Claudon, adjoint au sous-directeur de l’organisation et du fonctionnement des services déconcentrés

ANNEXE 2 :

RAPPORT D’ENQUÊTE DE LA COUR DES COMPTES
SUR LES PARTENARIATS PUBLICS-PRIVÉS PÉNITENTIAIRES

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1 () Garde et insertion : la gestion des prisons, janvier 2006 et Le service public pénitentiaire : prévenir la récidive, gérer la vie carcérale, juillet 2010.

2 () Source : Cahiers d’études pénitentiaires et criminologiques, fév. 2010, n° 33 – DAP

3 () Rapport ISPJJ d’octobre 2008 : « les centres éducatifs fermés […] : état des lieux, évolution depuis 3 ans, perspectives ».

4 () Ce terme est utilisé par la protection judiciaire de la jeunesse pour qualifier notamment le fonctionnement des centres éducatifs fermés. Il désigne une structure caractérisée par un encadrement et une discipline stricts, permettant de contrôler le comportement et le risque d’attitude violente des jeunes.

5 () Cf. article 103 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991.

6 () Ce fut le cas pour les greffiers des juridictions civiles et pénales, puis pour les avoués près les tribunaux de grande instance, qui ont été respectivement indemnisés en application des lois n° 65-1002 du 30 novembre 1965 et n°71-1130 du 31 décembre 1971.