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Commission des affaires étrangères

Mardi 18 septembre 2007

Séance de 16 h 30

Compte rendu n° 13

Présidence de M. Axel Poniatowski, président

– Accord France-Algérie sur les transports routiers internationaux (n° 121) – M. Jean-Claude Guibal, rapporteur

– Septième protocole Union postale universelle (n° 116) – M. Jean-Paul Dupré, rapporteur

– Ratification de l’acte constitutif de l’ONU pour l’alimentation (n° 120) – M. Jacques Remiller, rapporteur.

– Allemagne implantations communes de missions diplomatiques (n° 119) – M. Jacques Myard, rapporteur

– Brevets européens (n° 64) – M. Claude Birraux, rapporteur

– Informations relatives à la commission

Accord France-Algérie sur les transports routiers internationaux

La commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Claude Guibal, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif aux transports routiers internationaux et au transit des voyageurs et des marchandises (n° 121).

M. Jean-Claude Guibal, rapporteur, a précisé que le Sénat avait adopté, le 1er août dernier, ce projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre la France et l’Algérie relatif aux transports routiers internationaux et au transit des voyageurs et des marchandises. Cet accord, signé le 27 janvier 2004, vise à favoriser le développement des transports routiers de voyageurs et de marchandises entre les deux États signataires, dans un contexte économique particulièrement favorable. Il s’agit du premier accord bilatéral sur le transport routier, signé avec l’Algérie.

Il a indiqué que la conclusion de cet accord s’était accompagnée de la signature, le même jour, d’un accord sur le transport maritime, dont la finalité est identique. Le 16 février 2006, un accord relatif au transport aérien a, par ailleurs, été conclu entre les deux pays. Ces initiatives s’inscrivent dans le cadre du renforcement du dialogue entre la France et l’Algérie, souhaité par les deux chefs d’Etat en mars 2003 ; elles témoignent d’une volonté commune de faciliter les échanges et d’approfondir les relations économiques entre les deux pays.

Il a estimé que cet accord bilatéral visait à simplifier le cadre juridique applicable, en l’alignant sur les règles en vigueur pour une quinzaine d’autres Etats non membres de l’Union européenne, dont le Maroc et la Tunisie. En l’absence d’un tel accord bilatéral, le régime juridique applicable aux liaisons routières résulte, en effet, des législations nationales.

M. Jean-Claude Guibal a ensuite apporté les précisions suivantes sur le régime qui s’applique actuellement aux échanges routiers entre la France et l’Algérie :

• Dans le cas du transport routier de marchandises, la situation actuelle impose aux transporteurs ne résidant pas en France de solliciter une autorisation préalable de transport, valable un mois, au ministère chargé des transports. Cette procédure impose aux transporteurs de préciser, à chaque fois, la nature du voyage, le volume de la cargaison, les lieux de chargement et de déchargement, etc. Ces dispositions, qui résultent d’un arrêté de juin 1990,  permettent de délivrer des autorisations de transport sans restriction, mais elles imposent aux transporteurs algériens qui souhaiteraient desservir la France d’effectuer des demandes récurrentes, sous peine de sanction pour défaut d’autorisation.

• Le transport de voyageurs est, pour sa part, réglementé par un décret du 6 mars 1979 et l’arrêté du 25 mars 1997. Aux termes de ces dispositions, les transporteurs ne peuvent effectuer un transport routier par autocar entre un point situé en France et un point situé en Algérie avec le même véhicule. Les passagers sont donc contraints d’utiliser différents modes de transports et de multiplier les formalités.

Dans ces conditions, le rapporteur a indiqué que l’entrée en vigueur de l’accord était de nature à simplifier les conditions de circulation par la route entre la France et l’Algérie et faciliter le transport combiné mer-route entre les deux pays. Cet accord définit, en effet, un régime commun pour l’autorisation des différents services de voyageurs, à savoir les services réguliers, les services de navette et les services occasionnels. Ces différents services sont soumis à autorisation préalable, selon des procédures arrêtées conjointement par les autorités compétentes des deux pays. Ils reposent sur le principe de réciprocité, qui implique un partenariat entre une entreprise française et son homologue algérien. En ce qui concerne le transport routier de marchandises, l’accord instaure également un régime d’autorisation préalable. Délivrées gratuitement, ces autorisations personnelles, qui doivent être conservées à bord des véhicules, sont délivrées dans la limite de contingents fixés annuellement, d’un commun accord entre les deux parties. Deux types d’autorisation sont prévus : d’une part, les autorisations valables pour un seul voyage aller-retour et dont la durée de validité est fixée à trois mois ; d’autre part, les autorisations annuelles, valables pour un nombre illimité de voyages. En matière fiscale, l’accord dispose que les entreprises de transport sont soumises aux impôts et taxes applicables sur le territoire où elles opèrent. Les parties ont cependant la possibilité d'accorder des réductions ou des exonérations dans les conditions fixées par un protocole additionnel, qui est annexé à l'accord. En l’espèce, le protocole additionnel prévoit une exonération de la taxe spéciale pour certains véhicules routiers (dite « taxe à l'essieu ») pour les transporteurs algériens, dans la mesure où les transporteurs français ne sont pas soumis au paiement de redevance d'utilisation d'infrastructure routière. En cas de non respect de ces dispositions, l’accord prévoit, par ailleurs, des sanctions qui vont de l'avertissement à la suppression, à titre temporaire ou définitif, partiel ou total, de la possibilité d'effectuer des transports internationaux. Enfin, l’accord instaure un comité mixte, composé de représentants des autorités compétentes des parties, qui est chargé d'assurer la bonne exécution de l'accord.

Le rapporteur a jugé utile de rappeler que cet accord s’inscrivait dans un contexte économique porteur. L’Algérie connaît, en effet, une situation économique extrêmement favorable, grâce à une conjoncture pétrolière très avantageuse. En 2006, le pays a exporté pour 53,3 milliards de dollars de pétrole et de gaz. Les exportations constituent plus de 95% des ressources en devises de l’Algérie, la vente de gaz représentant plus de 60% de ces revenus. Au total, le secteur des hydrocarbures contribue, en moyenne, pour 50% au produit intérieur brut algérien. L’économie algérienne a largement bénéficié de l’envolée des cours du pétrole : en 2007, ses exportations devraient atteindre les 55 milliards de dollars, avec un excédent commercial supérieur à 20 milliards de dollars. Cette aisance financière a permis de réduire considérablement la dette publique extérieure, dont le montant a quasiment été divisé par quatre entre 2002 et 2005. Dans ce contexte, les autorités se sont engagées dans un processus de rationalisation des choix budgétaires, en définissant un programme pluriannuel de dépenses d’infrastructures de base sur 2005-2009. Ce programme prévoit notamment la construction d’une autoroute traversant le pays d’est en ouest, la modernisation du réseau ferroviaire, la construction d’un tramway à Alger – en complément du métro – ainsi que celle de ports et d’aéroports, etc. La demande publique permet ainsi de tirer vers le haut la contribution à la croissance des secteurs hors hydrocarbures. L’Algérie s’est, par ailleurs, engagée dans la voie d’une ouverture croissante sur le plan commercial avec la signature de l’accord d’association avec l’Union Européenne, dans le cadre du processus de Barcelone. Cet accord est entré en vigueur le 1er septembre 2005. Le pays est, en outre, en train de conclure les négociations sur son adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

M. Jean-Claude Guibal a, ensuite, évoqué les relations économiques et commerciales franco-algériennes. Ces relations sont étroites comme en témoigne le quasi-doublement des échanges entre les deux pays en dix ans. L’Algérie est le premier partenaire de la France en Afrique et la France demeure très largement le premier partenaire commercial de l’Algérie. Les exportations françaises vers l’Algérie – environ 4 milliards d’euros – représentent ainsi le tiers de celles expédiées vers l’ensemble du Maghreb et de l’Egypte. Mais, si la France reste le premier fournisseur de l’Algérie, elle résiste mal à la montée en puissance de nouveaux acteurs comme la Chine. Ainsi, notre pays, traditionnellement excédentaire avec l’Algérie, est devenu déficitaire, pour la première fois, en 2006. Au cours du premier semestre 2007, notre solde commercial est redevenu positif (510 millions d’euros), du fait notamment du fort recul de nos importations d’hydrocarbures en provenance d’Algérie (− 34 %). En revanche, les exportations françaises ont baissé de 1,6 % alors que, dans le même temps, les importations algériennes progressaient de 20 %. Au cours des six premiers mois de l’année, la France a ainsi perdu 2 points pour tomber, pour la première fois, sous la barre des 20 % à 18,6 % (contre 20,6 % en 2006 et 24 % en 2003). Cette érosion de la part de marché française s’explique par une concurrence de plus en plus forte d’autres pays sur le marché algérien. Ainsi, en 2006, les importations en provenance de la Chine ont progressé de 28 % et celles en provenance d’Italie de 22 %.

Le rapporteur a donc jugé indispensable une consolidation des relations économiques et commerciales entre les deux pays. Dans cette perspective, l’accord bilatéral sur les transports routiers internationaux présente un intérêt certain. En établissant un régime commun pour l’autorisation des différents services de voyageurs ou des différentes catégories de transports de marchandises entre la France et l’Algérie, il devrait, en effet, contribuer à favoriser le développement du trafic entre les deux pays. Au regard de ces éléments, M. Jean-Claude Guibal a donc recommandé l’adoption du projet de loi.

Faisant référence aux échanges mentionnés par le Rapporteur entre la France et l’Algérie, M. Jacques Myard s’est interrogé sur l’évolution de la balance des invisibles retraçant les échanges de services entre les deux pays.

M. Jean-Claude Guibal a indiqué qu’il n’était pas en mesure de répondre dans l’immédiat de façon chiffrée sur ce point précis, mais a souligné que la tendance récente faisait apparaître un solde commercial positif au profit de l’Algérie.

M. Michel Vauzelle a souhaité obtenir des précisions sur les principaux secteurs affectés par la baisse de leurs exportations sur le marché algérien.

M. Jean-Claude Guibal a répondu que les principaux secteurs touchés par cette baisse sont l’agroalimentaire (-23 %), l’automobile (-14 %), les équipements électriques et électroniques (-11 %), l’équipement du foyer (-30 %), les métaux et produits métalliques (-13 %). Pour leur part, les exportations de produits pharmaceutiques, de parfumerie et d’entretien sont quasiment stables (-0,7 %). Les produits agricoles (+37  %), les équipements mécaniques (+13 %) et les produits chimiques (+5  %) s’inscrivent en revanche en hausse. Ces trois catégories représentent 37 % des exportations françaises. On peut donc déplorer que la moitié des exportations françaises en Algérie s’inscrit dans une tendance de déclin.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 121).

Septième protocole Union postale universelle

La commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Paul Dupré, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation du septième protocole additionnel à la Constitution de l'Union postale universelle (n° 116).

M. Jean-Paul Dupré, rapporteur, a rappelé que l’Union postale universelle (UPU) est une organisation internationale, méconnue, créée en 1874, visant à développer la communication sociale, culturelle et commerciale entre les peuples grâce à un fonctionnement efficace des services postaux.

Les 191 pays membres de cette organisation spécialisée des Nations Unies constituent un territoire postal unique au sein duquel la circulation du courrier est libre et le service postal universel encouragé.

Le Congrès de Bucarest a donné lieu à la septième révision de la Constitution dont l’UPU s’est dotée en 1964. Ces modifications modestes sont aujourd’hui soumises à l’approbation du Parlement.

Après l’échec des premières discussions en 1863 visant à substituer à la multitude des accords bilatéraux, alors en vigueur, un accord multilatéral uniformisant les règles de l’acheminement du courrier international, le traité de Berne instaurant l’Union générale des postes est signé le 9 octobre 1874. Trois ans plus tard, l'organisation est rebaptisée Union postale universelle, en raison du nombre grandissant d'États membres.

L'objectif premier de l'Union postale universelle est de favoriser un service postal de qualité et accessible partout dans le monde. L'UPU veille également au bon fonctionnement des services postaux et à la libre circulation des envois entre les différents États membres.

Elle constitue le principal forum de coopération entre les acteurs du secteur postal, permettant d'entretenir un véritable réseau universel offrant des produits et des services modernes. Ainsi, l'organisation remplit un rôle de conseil, de médiation et de liaison et fournit éventuellement une assistance technique. Elle fixe des règles pour les échanges de courrier international et formule des recommandations pour stimuler la croissance des volumes de courrier et améliorer la qualité du service offert aux clients.

Le fonctionnement de l’UPU s’articule autour de cinq organes, auxquels s’ajoutent les unions restreintes qui réunissent des pays géographiquement ou culturellement proches pour traiter des questions de coopération en matière postale :

– Autorité suprême de l’Union, le congrès postal universel se réunit tous les quatre ans. Composé des représentants de tous les États membres, il détermine les orientations de l’institution et en approuve le budget.

– Réunissant 41 États membres tous les ans à Berne, le conseil d’administration supervise les activités de l’Union et assure la continuité des travaux de l'UPU entre les Congrès. Il traite les questions administratives, juridiques et législatives.

– Le conseil d'exploitation postale est composé des représentants de 40 États membres élus par le Congrès. Il examine les questions techniques et d’exploitation intéressant le service postal international.

– Créé en septembre 2004, le comité consultatif réunit des organisations non gouvernementales intéressées par les services postaux internationaux

– Le bureau international apporte un soutien logistique aux différents organes de l'UPU. Employant 150 permanents provenant de 40 pays, il fournit également des conseils aux différents États membres.

Le français demeure la langue officielle, en dépit de l’adoption en 1994 de l'anglais comme langue de travail au bureau international. Le financement de l'UPU est indépendant de l'organisation des Nations Unies. Ce sont les États membres qui financent l'organisation selon un système de classes de contribution.

Lors du 23ème Congrès qui s’est tenu à Bucarest du 15 septembre au 5 octobre 2004, les pays membres ont adopté le septième protocole additionnel à la Constitution de l’UPU. Cette révision constitutionnelle de portée limitée concerne principalement les actes de l’UPU.

Acte fondamental contenant les règles organiques de l'Union, la Constitution ne peut être modifiée que par un protocole additionnel, soumis à la ratification des États membres. Les dispositions relatives à l'application de la Constitution et au fonctionnement de l'Union font l'objet du règlement général, révisé à chaque congrès.

Le Congrès de Bucarest a modifié cinq dispositions de la Constitution :

L’article 1er du protocole complète le préambule de la Constitution en définissant les missions de l’Union. Cette modification vise à consacrer la notion de « service postal universel » que le conseil d’administration de l’UPU avait décidé de promouvoir dans une résolution de 1998.

L’Union se voit donc confier l’ambitieux objectif de « stimuler le développement durable des services postaux universels de qualité, efficaces et accessibles ».

Celui-ci se traduit dans les missions suivantes : garantir la libre circulation des envois postaux sur un territoire postal unique composé de réseaux interconnectés ; encourager l'adoption de normes communes équitables et l'utilisation de la technologie ; assurer la coopération et l'interaction entre les parties intéressées ; favoriser une coopération technique efficace ; veiller à la satisfaction des besoins évolutifs des clients.

L’article 2 du protocole introduit dans la Constitution un article 1er bis rassemblant les définitions des principaux termes employés dans les actes de l’UPU afin de conférer à ces derniers une valeur juridique. Sont ainsi explicitées les expressions suivantes : service postal, pays membre, territoire postal unique, liberté de transit, envoi de la poste aux lettres, service postal international.

Le protocole (art. 3) modifie l’article 22 de la Constitution, relatif aux actes de l’UPU afin de renforcer la valeur juridique de certains d’entre eux.

Il prévoit donc que les dispositions de la Constitution, comme du règlement général, ne peuvent faire l’objet d’aucune réserve de la part des États.

L’article 4 restreint les modalités de vote concernant les modifications de la Constitution lors du Congrès. L’article 30 de la Constitution prévoit désormais que seuls les États dont le droit de vote n’a pas été suspendu pour non-paiement des contributions participent au vote à la majorité des deux tiers nécessaires pour approuver les propositions constitutionnelles.

Le protocole (art. 5) modifie l’article 31 afin de préciser les règles relatives à la mise à exécution de la convention et des arrangements. Ils devront être mis à exécution simultanément et avoir la même durée.

Enfin, l’article 6 détermine les modalités d’adhésion au protocole tandis que l’article 7 fixe son entrée en vigueur au 1er janvier 2006 pour une durée indéterminée.

Le rapporteur a estimé que les modifications constitutionnelles proposées par le septième protocole, au premier rang desquelles l’introduction de la notion de « service postal universel » dans la constitution, ne peuvent que recueillir un avis favorable. C’est pourquoi il a recommandé donc l’adoption du présent projet de loi.

M. Jacques Myard s’est félicité que la langue française continue de s’imposer à l’UPU en dépit des offensives anglo-saxonnes, citant en exemple la Constitution de l’Union rédigée en français.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 116).

Ratification de l’acte constitutif de l’ONU pour l’alimentation

La commission a examiné, sur le rapport de M. Jacques Remiller, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'acte constitutif de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (ensemble une annexe) (n° 120).

M. Jacques Remiller, rapporteur, a précisé que le 1er août dernier, le Sénat avait adopté un projet de loi autorisant la ratification de l'acte constitutif de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (ONUAA). Plus connue sous son acronyme anglais « FAO » (Food and Agriculture Organisation), cette organisation a été créée en 1945, alors que la communauté internationale tentait de mettre en place un mécanisme de préservation de la paix et de la sécurité collective, en instituant le système des Nations unies. L’accord portant création de cette institution spécialisée des Nations unies a été signé par la France à Québec, le 16 octobre 1945. Mais, alors même que notre pays figure parmi les membres fondateurs de cette organisation, l’acte constitutif qui l’institue n’a jamais été soumis au Parlement. Le présent projet de loi vise à réparer cet oubli.

Le Rapporteur a considéré qu’à l’heure où une refonte de l’architecture globale des Nations unies était en cours et où le contexte des interventions de l’ONUAA avait radicalement changé, l’examen de ce projet de loi offrait l’occasion d’évoquer le rôle de cette organisation et, en particulier, ses perspectives d’évolution. L’ONUAA a été créée dans un contexte d’après guerre, marqué par une pénurie agricole généralisée. Le mandat confié à l’organisation est donc d’atteindre la sécurité alimentaire pour tous. Concrètement, l’ONUAA est chargée de lancer ou de soutenir toutes initiatives visant à améliorer les niveaux de nutrition, la productivité agricole ainsi que la qualité de vie des populations rurales. Malheureusement, ce mandat reste plus que jamais d’actualité puisqu’on estime aujourd’hui à 854 millions le nombre de personnes qui souffrent de sous-alimentation dans le monde. L’Acte constitutif de l’ONUAA précise les cinq fonctions principales qui incombent à l’organisation, à savoir : la collecte, l'analyse et la diffusion d'informations relatives à l'agriculture, l'alimentation et la nutrition dans le monde ; l’organisation de la concertation entre les membres et la négociation de conventions relatives à l'alimentation ; l’appui à la décision nationale ou multilatérale, en matière agricole ; l’assistance technique pour la mise en oeuvre de programmes de coopération visant à éradiquer durablement la faim ; et, enfin, l’encouragement à la recherche ainsi que l'amélioration de l'enseignement et la vulgarisation des connaissances en matière de nutrition, d'alimentation et d'agriculture.

M. Jacques Remiller a souligné que l’ONUAA avait notamment pour rôle d’aider les pays en développement et les pays en transition à moderniser et à améliorer leurs pratiques agricoles, forestières et halieutiques. Elle met au service de ses pays membres son expérience pour l’élaboration de politiques agricoles, le soutien à la planification, la mise au point de législations adaptées ainsi que la création de stratégies nationales de développement rural. Dans le cadre de son mandat, l’ONUAA a développé un certain nombre d’initiatives d’ordre normatif, mais également opérationnel, en mettant en œuvre des actions de terrain en faveur du développement durable :

• L’activité normative de l’organisation est particulièrement importante, notamment par le biais des accords internationaux qui y sont négociés. Parmi les initiatives marquantes, figure la création du « Codex Alimentarius » qui, conjointement avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS), définit des normes alimentaires internationales. Par ailleurs, l’organisation a accueilli, en 1996, 186 chefs d’Etat et de Gouvernement au Sommet mondial de l’alimentation, afin d’évoquer les moyens permettant d’éliminer la faim dans le monde. Au cours de cette rencontre, les participants se sont engagés à réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici 2015, démarche qui participe aujourd’hui à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (ODM).

• L’ONUAA dispose, par ailleurs, d’un dispositif d’intervention de terrain, qui s’appuie sur des représentations locales et régionales, et met en œuvre des projets de coopération technique. Dans le cadre de ces interventions, l’organisation a notamment lancé le Programme spécial pour la sécurité alimentaire, qui concerne les pays à faible revenu et à déficit vivrier.

Le rapporteur a, en outre, précisé que l’ONUAA employait près de 3.600 personnes, dont 2.200 au siège et 1.400 sur le terrain. Depuis 1990, la FAO a diminué son effectif total de plus de 40%. S’agissant du budget de l’organisation, il est fixé pour deux ans et alimenté par les contributions obligatoires des pays membres. Pour l’exercice 2006-2007, il s’élève à 765,7 millions de dollars (environ 560 millions d’euros) et couvre les principales opérations techniques, la coopération et les partenariats. Les activités de l’organisation sont également financées par des contributions volontaires des Etats membres, qui alimentent des fonds fiduciaires affectés à des programmes spécifiques. La France se situe au 5ème rang des contributions obligatoires de l’ONUAA. La contribution volontaire de notre pays au budget de l’organisation a, par ailleurs, fait l’objet d’un rattrapage important au cours de ces dernières années, pour atteindre 5,8 millions d’euros en 2006. Cet effort témoigne du soutien qu’apporte la France au fonctionnement de l’ONUAA, dont la contribution à l’éradication de la faim et au développement rural dans le monde est jugée essentielle.

Enfin, le rapporteur a mis l’accent sur la crise grave que traverse actuellement l’organisation. Une évaluation externe de l’ONUAA – dont les premiers résultats viennent d’être publiés pour consultation – souligne un certain nombre d’évolutions que l’organisation a tardé à prendre en compte et qui remettent actuellement en cause la pertinence de ses interventions. En premier lieu, le secteur privé s’est imposé comme un intervenant majeur sur la scène agricole mondiale. Or, les liens que l’ONUAA entretient avec ce secteur ne sont guère développés. En second lieu, l’organisation n’est désormais plus qu’« une organisation parmi les autres ». D’autres acteurs, comme les organisations non gouvernementales, se sont mobilisés pour garantir la sécurité alimentaire dans les situations d’urgence tandis que certains organismes, comme le Programme alimentaire mondial (PAM), sont de plus en plus sollicités dans des contextes de crise. Enfin, comme le soulignent les premières conclusions de l’évaluation externe indépendante : « la FAO a beaucoup de fonctionnaires compétents, profondément dévoués à l’organisation et à sa mission, mais ils sont gênés dans leur travail par sa structure fragmentée et ses systèmes des gestion centralisés et rigides ». En outre, l’ONUAA est confrontée, depuis le début des années 90, à une diminution régulière de ses ressources financières : « sur la base des prix de 1994, les ressources totales pour un exercice biennal ont chuté de 1,282 milliard de dollars en 1994-1995 à 841 millions de dollars en 2004-2005, soit une réduction de 34%. Le budget ordinaire de l’organisation a baissé de 22% ». Ces difficultés, auxquelles s’ajoute une réflexion plus globale sur la cohérence d’ensemble du système des Nations unies, rendent aujourd’hui nécessaire une réforme de l’ONUAA. Dès 1994, des efforts ont été engagés dans ce sens, qu’il importe aujourd’hui de poursuivre et d’approfondir. L’objectif est de recentrer l’organisation sur son mandat. Dans cette perspective, son rôle en tant que centre d’excellence scientifique et technique en matière d’information et d’expertise agricoles doit être valorisé et consolidé. Dans le même temps, l’organisation devrait transférer progressivement la mise en œuvre de projets de développement à d’autres opérateurs publics ou privés, dont l’efficacité et la compétence sont avérées, et limiter son intervention aux secteurs où elle peut démontrer un avantage comparatif. La réforme du système des Nations unies offre un cadre favorable à cette évolution que la FAO a amorcée.

C’est au regard de ces efforts et du rôle essentiel de cette organisation que le Rapporteur a recommandé aux membres de la Commission l’adoption du présent projet de loi.

M. François Rochebloine a souhaité connaître la part du budget de l’organisation consacrée à son fonctionnement et, notamment, aux salaires de ses agents.

M. Jacques Remiller a précisé que cette part représentait environ 60% et qu’environ 40% du budget étaient consacrés au développement. Il a insisté sur le fait que de réels efforts de réforme avaient été engagés en vue d’accroître l’efficacité des interventions de l’ONUAA. L’objectif principal est de recentrer l’organisation sur ses missions d’expertise agricole et de soutien au développement rural.

Soulignant son attachement pour l’utilisation de la dénomination française de l’organisation et non de son acronyme anglais, M. Jacques Myard a estimé que la ratification de l’acte constitutif de l’ONUAA, après tant d’années, ne présentait guère d’intérêt : d’une part, l’existence de l’organisation fait l’objet d’un large consensus ; d’autre part, la Charte des Nations unies elle-même n’a pas été soumise à l’approbation du Parlement français.

M. Jean-Paul Lecoq a considéré que, sans remettre en cause les conclusions du Rapporteur, une autre lecture de l’évolution de l’organisation pouvait être faite. L’ONUAA a, en effet, souffert d’un contexte marqué par les excès de la libéralisation à l’échelle mondiale et du rôle croissant d’organisations financières internationales comme le Fonds monétaire international et la Banque mondiale.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 120).

Allemagne implantations communes de missions diplomatiques

La commission a examiné, sur le rapport de M. Jacques Myard, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif aux implantations communes de missions diplomatiques et de postes consulaires (n° 119).

M. Jacques Myard, rapporteur, a annoncé qu’il demanderait à la commission de se prononcer contre l’approbation de cet accord-cadre.

Celui-ci fait suite à un arrangement administratif, terme qui désigne un accord passé entre des ministres des Affaires étrangères agissant dans le cadre de leurs compétences de chefs des services diplomatiques et pas comme représentants de leurs Etats.

Un arrangement administratif de 1997 conclu entre la France et l’Allemagne a permis à des implantations communes de voir le jour sur le terrain : en Bosnie-Herzégovine, au Kazakhstan, au Malawi et au Liberia.

L’économie générale de l’accord-cadre peut être présentée de manière très concrète. Les stipulations de celui-ci conduisent, au sein d’un seul et même immeuble, à répartir les espaces entre deux catégories : les parties communes et les zones exclusives. L’ensemble s’appellerait consulat franco-allemand.

Le rapporteur a rappelé l’importance qu’il accordait aux relations franco-allemandes. Il a cependant exprimé ses doutes sur l’intérêt de l’accord puisque la Convention de Vienne de 1963 sur les relations consulaires permet déjà à un Etat d’assurer la représentation des intérêts d’un autre Etat auprès d’un Etat tiers.

Dès lors, l’accord-cadre du 12 octobre 2006 permet-il de réaliser des économies ? Il est permis d’en douter : il rend obligatoire la création d’une partie commune et de deux zones exclusives, et risque donc de compliquer la gestion immobilière. Par ailleurs, la gestion quotidienne au sein d’une même implantation commune pourrait s’avérer délicate ; ainsi par exemple les deux chefs de missions diplomatiques ou de postes consulaires cohabitant peuvent demander aux forces de l’ordre de l’Etat hôte d’intervenir. Il est difficile de garantir que ces demandes d’intervention se feront avec l’accord des deux services diplomatiques, ce qui pourrait poser des difficultés importantes par exemple en cas de présence d’un demandeur d’asile dans la partie commune.

Mais, au-delà de ces difficultés, l’accord-cadre du 12 octobre 2006 soulève une question majeure, celle de sa pertinence politique.

Les fonctions des consuls sont souvent vues à travers le prisme traditionnel des activités d’état civil : délivrance de visas, service auprès des Français résidant dans l’Etat hôte. En réalité, les fonctions modernes d’un consul sont toutes autres, et participent d’une stratégie économique, commerciale et d’influence. Celui-ci participe activement à la politique commerciale de la France, comme le savent très bien les chefs d’entreprises.

Or, les parties communes dans les implantations communes au sens de l’accord-cadre de 2006 seraient précisément des salles dans lesquelles pourraient se tenir des réunions d’une grande importance commerciale, dont il importe de préserver la confidentialité. L’accord-cadre n’est donc pas une solution idoine pour nos services diplomatiques sur le terrain.

La deuxième interrogation porte sur la portée symbolique de l’accord-cadre. Est-il souhaitable, malgré l’importance de la relation avec l’Allemagne, de privilégier systématiquement les partenariats franco-allemands ? Pourquoi des projets de co-localisations n’existent-ils pas avec d’autres pays européens ?

La pertinence tant commerciale que politique de l’accord-cadre du 12 octobre 2006 n’étant pas assurée, ne serait-il pas souhaitable de ne prévoir pour les futures implantations communes que des solutions adaptées à chaque projet ?

M. Jacques Myard, rapporteur, a donc indiqué qu’il se prononçait à titre personnel contre l’adoption du projet de loi.

Le Président Axel Poniatowski a indiqué que l’accord-cadre avait un caractère principalement logistique et ne faisait qu’étendre un arrangement administratif en date de 1997 pour en préciser les règles juridiques et financières et donner la possibilité de créer une implantation commune sous la forme d’une co-propriété.

M. François Loncle a indiqué que la question des implantations communes lui paraissait nouvelle et intéressante. Il est en revanche indispensable qu’une évaluation ait lieu, dans un délai suffisamment rapproché, pour permettre aux parlementaires de savoir si les co-localisations fonctionnent de manière satisfaisante. Sous cette réserve, il s’est prononcé pour la ratification de l’accord-cadre.

M. Jacques Myard, rapporteur, a indiqué que l’article 7 de l’accord-cadre, qui permet de créer des implantations communes dans le cadre de co-propriétés, allait sans doute créer plus de dysfonctionnements qu’il n’allait régler de problèmes.

Mais il a avant tout tenu à rappeler que le consul de France dans un pays étranger n’est pas qu’un simple officier d’état civil, il exerce également des fonctions de veille économique, commerciale, industrielle. L’existence de zones exclusives prouve enfin que cet accord est contradictoire avec les objectifs qu’il entend poursuivre.

M. Jean-Claude Guibal a souhaité recevoir quelques précisions sur la réelle portée de l’accord-cadre : s’agit-il d’un symbole de la coopération franco-allemande ou bien ne vise-t-il qu’à économiser les moyens de la puissance publique ? Si la préoccupation est uniquement gestionnaire, ces économies sont sans doute loin d’être prioritaires et peuvent même s’avérer contre-productives. Ainsi, dans le cas de l’ambassade de France à Monaco, la vente accélérée d’un immeuble a sans doute fortement réduit la plus value envisageable dans une telle opération.

M. Jean-Paul Dupré a demandé si le nombre d’implantations communes à venir était important, ou si ce type d’opérations devait rester exceptionnel.

M. Jacques Myard, rapporteur, a précisé que l’accord-cadre ne faisait qu’ouvrir des possibilités. Toutefois, des projets dans des pays d’une importance stratégiques ont été évoqués, notamment au Kazakhstan dont les ressources minières sont abondantes.

De plus, l’aménagement des implantations communes coûtera forcément plus cher.

Le Président Axel Poniatowski s’est dit au contraire convaincu que des économies pourront être réalisées grâce aux implantations communes. L’accord-cadre a une dimension essentiellement technique, et les projets envisagés ne concernent que des pays avec lesquels nous n’avons pas de relations très développées. Il a toutefois émis les plus fortes réserves si des projets d’implantations communes devaient concerner des pays d’une importance stratégique.

M. Patrick Balkany a insisté sur le risque existant en cas de co-localisations dans des grands pays. Pourquoi n’existerait-il pas des maisons de l’Union européenne réunissant tous les services diplomatiques, plutôt que des bâtiments franco-allemands ?

Par ailleurs, l’existence d’un consulat français dans un pays étranger reste très importante pour les citoyens français y séjournant temporairement ou y résidant.

M. François Rochebloine a insisté sur le caractère technique de l’accord. Le projet d’accroître le nombre d’implantations communes et d’en stabiliser le cadre juridique a été défendu par plusieurs Ministres des Affaires étrangères successifs car la gestion rigoureuse des deniers publics est un impératif qu’il faut mettre en oeuvre.

Enfin, il a considéré que la volonté de conserver son drapeau de façon exclusive n’était pas en phase avec le processus de construction européenne.

M. Jean-Paul Bacquet a rappelé le rôle crucial des consuls en matière de commerce extérieur. Ce rôle est particulièrement important concernant ceux que l’on nomme un peu hâtivement les « petits pays ». En se focalisant uniquement sur les zones d’importance stratégique, la position de la France dans les pays de taille moyenne, comme en Afrique ou au Maghreb, risque d’être fortement concurrencée.

Par ailleurs, il s’est demandé s’il n’existait pas un risque de démotivation des fonctionnaires obligés de cohabiter avec des concurrents directs ?

Le Président Axel Poniatowski a déclaré que l’accord cadre du 12 octobre 2006 était un texte essentiellement technique. Après avoir rappelé que les projets de co-localisations envisagés lors du Conseil des ministres franco-allemand de 2004 ne concernaient pas des pays clés, il a indiqué qu’il était sensible aux arguments développés par le rapporteur. Faisant référence à sa propre expérience du commerce extérieur, il s’est dit conscient de l’importance des postes diplomatiques dans ce domaine, ainsi que de la puissance des compétiteurs allemands dans de nombreux secteurs.

Il a souhaité que la Commission adopte le projet de loi tout en émettant une observation.

Aussi, en accord avec le Président, la Commission a-t-elle considéré que les implantations communes que l’accord-cadre permettra de réaliser ne doivent pas aboutir à faire cohabiter des ambassades ou des missions économiques dans des Etats qui ont une importance stratégique pour le commerce extérieur de la France.

La commission a demandé au ministère des Affaires étrangères de prendre en compte cette réalité et de faire preuve de la plus grande vigilance Elle a par ailleurs souhaité qu’une évaluation précise du dispositif des implantations communes soit prévue de manière périodique.

M. Jean-Paul Lecoq a indiqué qu’il trouvait plus souhaitable de s’inspirer des méthodes allemandes en matière de commerce extérieur, dont l’efficacité est reconnue par tous, plutôt que de craindre un quelconque espionnage de leur part de la stratégie commerciale de la France.

Alors que M. François Rochebloine s’interrogeait sur l’examen de ce projet en procédure simplifiée en séance publique, M. François Loncle a fait part de l’intérêt qu’il y avait à organiser un débat sur des projets autorisant la ratification d’accords aux conséquences très concrètes. Il a souhaité que la Commission puisse se prononcer en amont sur les procédures d’examen en séance.

Contrairement aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 119).

Brevets européens

La commission a examiné, sur le rapport de M. Claude Birraux, projet de loi autorisant la ratification de l’acte portant révision de la convention sur la délivrance de brevets européens (n° 64).

M. Claude Birraux, rapporteur, a déclaré que la Convention de Munich, qui a créé en 1973 un nouveau titre de propriété industrielle – le brevet européen – faisait l’objet d’une révision visant à renforcer l’attractivité du brevet européen et à l’adapter aux évolutions technologiques et aux exigences du droit international et européen.

Il a rappelé que le processus de révision de cette convention avait été lancé à l’initiative de la France lors d’une conférence intergouvernementale qui s’est tenue à Paris en juin 1999. L’Acte de révision a été adopté à l’unanimité en novembre 2000 à l’issue de la conférence diplomatique de Munich.

Les modifications apportées au texte initial concernent à la fois des dispositions institutionnelles et organisationnelles, ainsi que des dispositions sur le droit matériel des brevets européens et sur les procédures devant l’Office européen des brevets.

M. Claude Birraux a indiqué que la révision de cette convention s’inscrivait dans le cadre plus large d’une réflexion globale sur l’avenir du brevet en Europe. En effet, après 30 ans de pratique du dispositif de la Convention de Munich, l’Office européen des brevets (OEB) s’est imposé comme l’une des principales références en matière de propriété industrielle. Le premier brevet européen a été délivré en 1980 et ce sont, depuis cette date, plusieurs centaines de milliers de demandes qui ont été publiées.

Rappelant les avantages du brevet européen, il a souligné que le succès avait dépassé toutes les prévisions. Plusieurs facteurs expliquent le dynamisme du système du brevet européen, à commencer par l’extension géographique de l’Organisation européenne des brevets : de moins d’une dizaine à l’origine, la convention rassemble aujourd’hui 32 Etats parties.

Le nombre des demandes reflète la forte croissance de l'OEB. Pour la seule année 2006, l’office de Munich a reçu plus de 208 000 demandes de brevet, confirmant ainsi la tendance d’une augmentation de plus de 5 % chaque année. L’Office européen des brevets a vu croître ses effectifs en conséquence puisqu’il emploie actuellement près de 6 300 agents (dont 1 116 Français) contre 940 en 1978.

Pour autant, une révision de la Convention s’impose pour adapter le brevet européen aux évolutions juridiques et technologiques Au vu de la place importante qu’occupe en Europe le droit des brevets en matière d’innovation, de croissance économique et d’emploi, il faut en effet veiller à ce que le système du brevet européen demeure attractif, en particulier par rapport aux systèmes américain et japonais. En 1973, le monde du brevet était en avance sur la construction européenne. Or aujourd’hui, la situation est inverse. En effet, malgré son succès, le système européen des brevets est resté immobile – à l’exception notable de l’augmentation du nombre des dépôts – alors que des titres communautaires ont été créés, comme la marque, les dessins et les modèles.

M. Claude Birraux a alors présenté les changements apportés à la Convention de Munich, précisant qu’aucun d’entre eux ne nécessitait de modification du code français de la propriété intellectuelle.

Il a indiqué qu’afin de conférer une légitimité politique plus forte à l’OEB, la convention révisée prévoyait la convocation d’une réunion des ministres concernés des Etats membres, au moins tous les cinq ans, pour examiner les questions relatives à l’organisation européenne des brevets et au système des brevets européens. Il s’agit ainsi d’exprimer clairement la revendication d’un pilotage politique de l’Organisation européenne des brevets.

Il a alors suggéré de prévoir, dans le cadre d’une prochaine révision de la Convention sur le brevet européen, que cette conférence ministérielle se double d’une conférence parlementaire. Il a en effet estimé que la portée des enjeux (politiques, éthiques, économiques et scientifiques) justifiait pleinement que les parlementaires des Etats parties à la Convention soient associés le plus en amont possible à la définition du droit européen des brevets. Se qualifiant lui-même de « parlementaire dans l’âme », il a rappelé avoir participé, lorsqu’il était membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, à des auditions sur les activités d’organisations internationales telles que l’OCDE et l’UNESCO. Le contrôle parlementaire permet la transparence et a un effet stimulant sur ces structures qui doivent pouvoir rendre des comptes devant la représentation parlementaire.

Un autre volet de la révision de la convention consiste à simplifier la procédure d’adaptation de la CBE aux textes internationaux. A cet effet, le Conseil d’administration de l’Organisation européenne des brevets se verra doté de nouveaux pouvoirs l’autorisant à adapter la CBE au droit international et communautaire, sans avoir à passer par la convocation – longue et coûteuse – d’une conférence des Etats contractants.

Puis il a mentionné deux modifications importantes s’agissant des procédures devant l’OEB. La première est relative à la création d’une procédure centralisée de limitation qui permettra au titulaire du brevet de limiter ou de révoquer son brevet dans le cadre d’une procédure administrative produisant des effets pour tous les Etats désignés. La seconde modification concerne la possibilité de déposer une requête des décisions d’une des chambres de recours de l’Office. Ces requêtes seront examinées par la Grande chambre de recours.

Dans une large mesure, la révision de la Convention laisse inchangé le droit matériel des brevets. Au-delà de quelques précisions ou confirmations de la jurisprudence actuelle, la principale innovation concerne la protection des applications thérapeutiques ultérieures visant à compenser l’exclusion de la brevetabilité des méthodes de traitement thérapeutique. Quant aux programmes d’ordinateurs, ils demeurent exclus du champ de la brevetabilité sans pour autant remettre en cause la pratique de l’Office européen des brevets qui, pour juger si l’on se trouve ou non en présence d’une invention, applique à chaque cas particulier les critères généraux de la brevetabilité.

Puis M. Claude Birraux a souligné que la révision de cette convention s’inscrivait dans le cadre plus large d’une réflexion globale sur l’avenir du brevet en Europe qui renvoie notamment à l’Accord de Londres sur le régime linguistique du brevet européen, au projet d’accord sur le règlement des litiges en matière de brevets européens (EPLA) et à la poursuite des négociations sur le brevet communautaire. Il a également indiqué que plusieurs questions n’avaient pas été tranchées par les Etats parties lors de la conférence diplomatique de 2000 ; certaines en raison de leur caractère controversé, d’autres parce que leur examen reste prématuré. Il est ainsi probable que la CBE fera prochainement l’objet d’une nouvelle révision pour tenir compte du résultat des négociations sur le brevet communautaire, d’une part, et sur le système juridictionnel du brevet européen, d’autre part.

En conclusion, M. Claude Birraux a indiqué que 24 Etats sur 32 avaient déjà déposé leurs instruments de ratification (ou d’adhésion) à la révision de la Convention. En application de l'article 8 de l'Acte de révision, la convention révisée entrera en vigueur deux ans après le dépôt du dernier des instruments de ratification ou d'adhésion de quinze Etats contractants. Le 13 décembre 2005, la Grèce a été ce quinzième Etat à déposer son instrument de ratification, ce qui signifie que la convention entrera en vigueur au plus tard le 13 décembre 2007. Or il est prévu que tout Etat contractant qui, à la date d'entrée en vigueur de la convention révisée, ne l’aurait pas encore ratifié cesserait automatiquement d’être membre de l’Organisation européenne des brevets. Il y a donc désormais urgence à ce que la France ratifie cette convention pour rester membre de l’OEB. A l’heure où chacun s’accorde à reconnaître la contribution décisive de l’innovation à la croissance et à l’emploi, M. Claude Birraux a estimé que la France devait prendre toute sa part à la promotion d’un brevet européen attractif et adapté aux exigences d’une économie moderne. C’est pourquoi il a recommandé l’adoption du présent projet de loi.

M. Jean-Paul Lecoq a fait observer que cette convention faisait référence à l’accord de Londres qui sera très prochainement examiné par la commission. Or il a déclaré refuser que le nombre de langues officielles dans lesquelles il est possible de déposer un brevet européen soit limité à trois (l’allemand, l’anglais et le français). Il a par ailleurs estimé qu’un brevet déposé en France devrait obligatoirement l’être en langue française.

En réponse, le rapporteur a précisé qu’il avait mentionné que la révision de cette convention s’inscrivait dans le cadre d’une réflexion plus large sur l’avenir du brevet en Europe, ce qui l’avait conduit à mentionner l’Accord de Londres. Mails il a insisté sur la dimension essentiellement technique et procédurale de la révision de cette convention, distincte de l’accord de Londres que la Commission des affaires étrangères examinera séparément.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 64).

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Informations relatives à la commission

Au cours de sa séance du mardi 18 septembre 2007, la commission a nommé :

– M. Jean-Marc Roubaud, rapporteur sur le projet de loi autorisant la ratification du protocole portant amendement à la convention européenne pour la répression du terrorisme (n° 178 Sénat) ;

– M. Tony Dreyfus, rapporteur sur le projet de loi autorisant l'approbation du protocole sur la modification de l'accord instituant une Commission internationale pour le Service international de recherches (n° 434 Sénat) ;

– M. Jean-Paul Dupré, rapporteur sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Japon en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d impôts (n° 435 Sénat) ;

– M. Patrick Balkany, rapporteur sur le projet de loi autorisant l'approbation d'accords entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Émirats Arabes Unis relatifs au musée universel d'Abou Dabi (n° 436 Sénat) ;

– M. Jean-Claude Guibal, rapporteur sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne relatif à la mise en place d'une gestion unifiée du tunnel de Tende et la construction d'un nouveau tunnel, signé à Paris le 12 mars 2007 (n° 442 Sénat) ;

– M. Roland Blum, rapporteur sur la proposition de résolution de M. Jean-Marc Ayrault et plusieurs de ses collègues tendant à la création d’une commission d’enquête sur les conditions de la libération des infirmières bulgares en Libye et sur les accords franco-libyens (n° 150) et sur la proposition de résolution de M. Alain Bocquet tendant à la création d’une commission d’enquête parlementaire sur le rôle joué par la France dans la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien détenus en Libye, sur le véritable contenu des accords ayant accompagné cette issue, et sur les conséquences susceptibles d’en résulter (n° 152).

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