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Commission des affaires étrangères

Mardi 5 février 2008

Séance de 16 h 15

Compte rendu n° 36

Présidence de M. Axel Poniatowski, président

– ITER : accord relatif au siège de l'Organisation ITER et à ses privilèges et immunités sur le territoire français
(n° 674) – M. Claude Birraux, rapporteur

– Union européenne : adhésion des nouveaux Etats membres à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles (n° 170) – M. Gérard Voisin, rapporteur

– accord Communauté européenne-Etats-Unis d’Amérique de transport aérien (n° 668) – M. Eric Raoult, rapporteur

– Maroc : convention de partenariat pour la coopération culturelle et le développement (n° 300) – Jean Roatta, rapporteur

– règlement de la Commission intergouvernementale concernant la sécurité de la liaison trans-Manche (n° 500) – M. Marc Dolez, rapporteur

– Australie : coopération en matière d'application de la législation relative à la pêche (n° 443) – M. Louis Guédon, rapporteur

– Corée : convention d'extradition (n° 519) – M. André Schneider, rapporteur

ITER : accord relatif au siège de l'Organisation ITER et à ses privilèges et immunités sur le territoire français

La commission a examiné, sur le rapport de M. Claude Birraux, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale ITER pour l’énergie de fusion relatif au siège de l’Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l’Organisation ITER sur le territoire français (n° 674).

M. Claude Birraux, rapporteur, a rappelé que l’accord, signé le 7 novembre dernier, visait à permettre l’installation du siège de l’organisation internationale pour l’énergie de fusion sur le territoire français. En effet, après de longues et difficiles négociations, la France a obtenu l’implantation, sur le site de Cadarache, du réacteur thermonucléaire expérimental international, ITER.

L’énergie de fusion, appelée « énergie des étoiles », présente de nombreux avantages par rapport à celle issue de la fission nucléaire, utilisée dans les centrales classiques. Le processus de fusion produit beaucoup moins de déchets radioactifs, puisque le tritium est le seul élément radioactif utilisé dans le cadre de la fusion et qu’il disparaît au cours du processus pour aboutir à la constitution d’un atome d’hélium, gaz neutre. Le tritium est obtenu sur place à partir du lithium, par décomposition, ce qui évite tout transport de matières dangereuses.

Par ailleurs, la fusion utilise des combustibles présents en abondance sur la planète. ITER, comme la plupart des dispositifs expérimentaux visant à maîtriser l’énergie de fusion, combinera du deutérium, que l’on trouve dans l’eau de mer, et du tritium, extrait du lithium, facile à extraire de la croûte terrestre ou des océans.

Enfin, la fusion permet d’obtenir quatre fois plus d’énergie par élément de base, appelé nucléon, que la fission nucléaire.

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les efforts internationaux portent sur la réalisation d’un processus maîtrisé de fusion nucléaire afin d’obtenir une production d’énergie continue à des fins civiles. Les premières coopérations internationales ont été lancées par la conférence de Genève en 1958, et la première associait, en 1959, la communauté européenne de l’énergie atomique, Euratom, et le commissariat à l’énergie atomique.

La difficulté principale concernant la maîtrise de l’énergie de fusion résulte du fait qu’une telle réaction atomique nécessite des conditions très particulières. Il faut réussir à chauffer le combustible pour obtenir des températures de plusieurs dizaines de millions de degrés. La matière prend alors la forme d’un plasma, qu’il faut contenir dans un espace confiné. La solution du confinement magnétique, dont ITER constitue la mise en œuvre la plus aboutie, résulte des recherches et des travaux engagés il y a une quarantaine d’années par les Russes. Ces derniers ont mis au point une structure particulière, dite « tokamak », qui permet d’enfermer la matière dans une enceinte particulière, en forme d’anneau.

Les années 1970 et 1980 ont été la période de construction de tokamaks géants au Japon, aux Etats-Unis et en Europe, notamment en France. Certains d’entre eux sont, en quelque sorte, les ancêtres d’ITER.

Pionnière, la France a su imposer la qualité de ses équipes scientifiques pour occuper une place majeure dans le développement de l’énergie de fusion. Elle a franchi un pas important en s’équipant d’une installation permettant d’obtenir des réactions de fusion sur des durées assez longues. Construit en 1988, le Tore Supra sera considéré comme le prédécesseur immédiat d’ITER.

Lancée par Mikhaïl Gorbatchev lors de sa rencontre avec Ronald Reagan en 1985, la proposition de mise au point d’un réacteur expérimental international de nouvelle génération suscita l’adhésion des Etats-Unis, du Japon et de l’Europe, représentée par Euratom. Les quatre parties placèrent le projet sous l’égide de l’Agence internationale pour l’énergie atomique. Des scientifiques ont ainsi coopéré pendant plus de dix ans, au sein d’un réseau associant des équipes basées en Europe, aux Etats-Unis et au Japon. Suite aux adhésions successives de la Chine, de la Corée du Sud et de l’Inde, le nombre final de partenaires sera porté à sept.

La poursuite du projet ITER a souffert d’un blocage persistant lié à la difficulté de choisir un site pour la construction du réacteur expérimental. La France avait offert très tôt de l’accueillir sur le site de Cadarache, solution finalement retenue par Euratom.

Seules deux possibilités restaient finalement en lice dans les négociations menées au Conseil des Etats parties à ITER : le site français ou celui de Rokkasho-Mura, au Japon. Chaque proposition recevant le même nombre de soutiens, il devenait nécessaire d’élaborer un compromis. L’Union européenne a finalement accepté de prendre 50 % du coût du projet à sa charge, de laisser un cinquième de l’équipe au choix de la partie japonaise et de co-financer avec celle-ci des projets de recherche annexes, également en lien avec la fusion. L’Union européenne a joué un rôle considérable. Après avoir préféré le site français à une proposition espagnole, elle s’est totalement investie en faveur de la solution ainsi retenue, et a grandement contribué au succès final.

Pour la France, ITER représente un investissement de plus d’un milliard d’euros, et près de 3500 emplois, directs ou induits. En plus de la participation aux frais de fonctionnement, l’installation des personnels et des infrastructures associés au projet nécessite l’aménagement du site, la construction d’une école internationale et l’adaptation des voies de transport pour acheminer des matériaux de construction très particuliers.

Les parties s’étant toutes prononcées en faveur du compromis finalement obtenu, un accord général pouvait être signé, ce qui fut fait le 20 novembre 2006. Entré en vigueur le 24 octobre 2007, celui-ci confie la mise en œuvre du projet ITER à une organisation internationale créée pour l’occasion, appelée « organisation internationale ITER pour l’énergie de fusion ». Son siège est situé à Saint-Paul-lez-Durance, à proximité du site de Cadarache sur lequel sera construit le réacteur expérimental.

L’accord du 7 novembre 2007, qui nous est soumis aujourd’hui, a été signé entre cette organisation et la France. Exigé par l’accord de 2006, il permet d’en préciser certains points.

D’abord, il fixe le régime de privilèges et d’immunités offerts à l’organisation ITER et à son personnel. Comme à toutes les organisations internationales, la France accorde aux personnels et aux biens de l’organisation ITER un certain nombre de facilités, notamment en matière de circulation dans et hors du territoire, mais également dans le domaine de la fiscalité. Ainsi, les personnels d’ITER et les représentants des Etats membres bénéficient de l’immunité de juridiction, pour leurs personnes et leurs biens. Un tel principe ne trouve toutefois pas à s’appliquer en cas d’accident de la route, ou bien lorsque sa levée est nécessaire à la mise en œuvre d’une décision de justice. De la même manière, les biens d’ITER sont en principe inviolables.

En contrepartie des facilités dont elle bénéficie, l’organisation ITER se voit imposer une obligation générale de coopération avec les autorités françaises. Au-delà de ce principe, des stipulations de l’accord du 7 novembre 2007 insistent plus particulièrement sur les obligations de l’organisation ITER en matière de protection des personnes et de l’environnement, ainsi que dans le domaine de la sûreté et de la sécurité nucléaire.

L’Autorité de sûreté nucléaire française a d’ailleurs entamé depuis longtemps des discussions avec le Commissariat à l’énergie atomique au sujet de l’implantation d’un réacteur expérimental à fusion. Des contacts ont également été pris avec l’organisation ITER, conformément aux stipulations de l’accord de siège qui indiquent que des inspections relatives à la sûreté nucléaire devront être réalisées entre cinq et dix fois par an.

Afin d’éviter tout conflit d’interprétation entre les institutions participant à l’accueil d’ITER en France, une annexe a été ajoutée à l’accord du 7 novembre 2007 qui détaille un peu plus avant les différents aspects de sécurité, de sûreté et de gestions des déchets radioactifs. L’essentiel des déchets radioactifs ne provient pas de la réaction utilisée dans le réacteur, mais résulte de l’irradiation des matériaux de construction au cours de la fusion.

L’intérêt de la France pour ce projet s’est manifesté très tôt. Il n’a jamais été démenti.

Pour l’Europe, ITER est un moyen de renforcer encore sa position dans le domaine des technologies nucléaires du futur. En disposant, sur son territoire, du projet le plus innovant en la matière, Euratom peut se targuer d’une position particulièrement favorable s’agissant de la maîtrise de la fusion.

ITER est une étape importante pour le développement éventuel d’une énergie, plus propre, plus sûre et plus abondante que celle produite par les centrales nucléaires actuelles. Dans un monde où l’accès aux ressources énergétiques donne le plus souvent lieu à des confrontations et des conflits, la réalisation d’une telle ambition n’est pas qu’un simple progrès industriel. Elle constitue l’une des réponses à la crise énergétique.

L’accord de siège du 7 novembre 2007 complète l’accord du 20 novembre 2006 définissant les conditions de réalisation du réacteur à Cadarache. Semblable à de nombreux accords de siège s’agissant du statut juridique des biens et des personnels de l’organisation ITER, cet accord est néanmoins assorti d’obligations spécifiques relatives à la sécurité des personnes et à la protection de l’environnement.

Le Président Axel Poniatowski a demandé quel était le rapport entre la quantité de déchets radioactifs produits et la quantité d’énergie produite dans le processus de fusion en comparaison du procédé de fission. Il s’est également interrogé sur le nombre d’emplois
– en France et à l’étranger– créés par ITER.

M. Claude Birraux, rapporteur, a indiqué que l’opération de fusion à partir du tritium et du deutérium produisait de l’hélium, un gaz rare inerte, présent dans l’air et qui ne comporte pas de radioactivité. S’agissant des retombées économiques du projet ITER, environ 3 500 emplois directs et induits sont attendus.

La volonté politique française en faveur de ce projet a été remarquable. Relayée par une volonté politique européenne, elle est soutenue par les élus locaux, quelle que soit leur appartenance politique. Un groupement d’élus a ainsi été constitué, qui vise à faciliter la création d’infrastructures rendues nécessaires par le projet ITER, telles que l’élargissement des routes ou la construction de logements.

M. Jean-Paul Lecoq s’est interrogé, à la lecture du projet de loi autorisant la ratification de la convention, sur les privilèges et immunités dont bénéficie l’organisation internationale ITER, implantée sur le sol français mais néanmoins soustraite aux obligations que comporte les droits français et communautaire.

M. Claude Birraux, rapporteur a rappelé que les organisations internationales, comme les représentations diplomatiques, bénéficient d’un régime d’immunité qui les soustrait au droit de l’État où elles sont implantées. L’accord de siège de l’organisation ITER reprend les dispositions générales liées aux accords que la France a déjà pu signer avec les organisations internationales implantées sur notre territoire telles que l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, les sciences et la culture, l’Agence spatiale européenne ou l’Organisation pour la coopération et le développement économique.

Toutefois, ces privilèges et immunités ne sont accordés à l’Organisation ITER qu’en contrepartie d’obligations strictes. Les articles 16 et 17 de l’accord du 7 novembre 2007 rappellent que l’organisation ainsi que les membres de son personnel sont tenus de respecter les dispositions du droit français, et de coopérer avec les autorités françaises, en matière de santé publique, d’hygiène et de sécurité du travail, de sûreté nucléaire, de protection de l’environnement et de sécurité.

Deux points particuliers, liés à la mise en œuvre d’une collaboration internationale en recherche expérimentale et impliquant des dispositions relatives à la sécurité et à la sûreté nucléaire ont d’ailleurs été développés afin de se conformer à la législation et la réglementation françaises dans ces domaines.

D’abord, l’article 3 fixe les restrictions de privilèges et d’immunité du site pour permettre les inspections que l’Autorité de sûreté nucléaire française sera amenée à diligenter sur le site de l’Organisation ITER dans les périodes de construction, d’exploitation, de mise à l’arrêt définitif et de démantèlement.

De plus, l’article 16 définit les exceptions aux privilèges et immunités de l’Organisation et de son personnel ainsi que les conditions de leur levée, notamment dans le cas où leur maintien est de nature à entraver le cours de la justice.

Par ailleurs, en regard de l’article 3 susmentionné, l’annexe à l’accord de siège fixe les responsabilités de l’Organisation ITER et les modalités de coopération entre l’Organisation et les autorités françaises, notamment dans le domaine de la protection des personnes et de l’environnement, de la protection et du contrôle des matières, de la gestion des déchets radioactifs et des mesures pour le démantèlement de ses installations. L’annexe mentionne également deux protocoles additionnels entre l’Organisation ITER et les autorités françaises relatifs à la protection des informations classifiées, qui devrait être signé pour l’entrée en vigueur de l’accord de novembre 2007, et un second relatif au rôle de l’inspection du travail sur le site de l’Organisation internationale ITER en cours de rédaction.

M. Christian Bataille a salué le courage politique dont les autorités françaises font preuve en s’engageant, avec le projet ITER, sur un horizon de très long terme. En effet, la mise au point de structures permettant un usage industriel du processus de fusion nucléaire n’est pas envisagée avant la seconde moitié du 21e siècle. Mais c’est l’un des moyens les plus sûrs de production d’énergie de masse. On ne peut que se féliciter des perspectives ouvertes par ce traité.

M. Jean-Marc Roubaud a souhaité savoir si d’autres projets du même type que celui d’ITER à Cadarache étaient actuellement à l’étude, sur le territoire français, s’agissant de réacteurs de nouvelle génération.

M. Claude Birraux, rapporteur, a indiqué que la construction d’ITER devrait durer jusqu’en 2013-2014. Parmi les autres projets à l’étude existe notamment celui du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), localisé en Suisse mais également en grande partie sur le sol français.

Par ailleurs, des recherches sont en cours sur les réacteurs nucléaires de quatrième génération. Les Etats-Unis se sont fixés l’objectif de réaliser un réacteur pilote de quatrième génération à l’horizon 2020, et la France participe à cette ambition au sein du Forum international « Génération IV ».

M. François Loncle s’est ému du peu de temps que les gouvernements successifs laissent au Parlement pour examiner des conventions internationales sur des sujets aussi importants qui justifieraient un travail préparatoire approfondi. Regrettant cette précipitation qui se traduit cette semaine par l’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale d’une quinzaine de conventions dont seulement trois feront l’objet d’un débat en séance publique, il a demandé au Président Axel Poniatowski de relayer ce mécontentement auprès du Gouvernement.

M. François Rochebloine a déclaré partager l’observation formulée par son collègue M. François Loncle. Il a d’ailleurs rappelé que la commission des affaires étrangères était, après la commission des finances mais devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, celle qui avait tenu le plus de réunions depuis le début de la législature.

Le Président Axel Poniatowski a pris acte de ces remarques. Rappelant que la commission des affaires étrangères avait en effet examiné près d’une cinquantaine de conventions internationales depuis le début de la législature, il a par ailleurs fait observer que les débats en séance publique faisaient l’objet d’une assiduité aléatoire dans l’hémicycle.

A l’issue de ce débat, conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 674).

*

Union européenne : adhésion des nouveaux Etats membres à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles

La commission a examiné, sur le rapport de M. Gérard Voisin, le projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion des nouveaux États membres de l'Union européenne à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles, ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980, ainsi qu'aux premier et deuxième protocoles concernant son interprétation par la Cour de justice des Communautés européennes (n° 170).

M. Gérard Voisin, rapporteur, a indiqué que la Convention de Luxembourg du 14 avril 2005 visait à permettre l’adhésion des dix nouveaux Etats membres ayant rejoint l’Union européenne le 1er mai 2004 à la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.

La Convention de Rome, entrée en vigueur le 1er avril 1991, a pour objet d’instaurer, entre les États parties, des règles leur permettant de déterminer de manière uniforme la loi applicable aux obligations contractuelles dans les situations comportant un conflit de lois. Les règles prévues par la Convention sont applicables dans les situations transfrontalières, c'est-à-dire lorsque les parties au contrat sont de nationalités différentes ou sont domiciliées dans des Etats différents, ou encore lorsque le contrat est conclu ou exécuté dans plusieurs pays. La convention ne s’applique cependant pas aux contrats relatifs à l’état des personnes tel que notamment, les testaments, les successions et les contrats de mariage.

Le rapporteur a rappelé que la clé de voûte du système mis en place par la Convention de Rome reposait sur l'autonomie de la volonté des Parties. En application de ce principe, celles-ci sont libres de choisir la loi applicable à leur contrat. Leur liberté de choix peut toutefois être limitée pour des raisons liées à l'ordre public.

À défaut de choix de loi par les Parties, la Convention de Rome prévoit que le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits, selon le principe de proximité. La Convention de Rome comporte toutefois des règles spécifiques en faveur des Parties dites faibles, tels que les consommateurs ou les travailleurs, qui conduisent à déroger au principe d’autonomie des Parties.Dans ces cas, la loi choisie ne peut désavantager le consommateur et le priver de la protection fournie par la loi de son pays de résidence si elle lui est plus favorable.

Le rapporteur a souligné que la Convention de Rome ne concernait initialement que les neuf États qui étaient membres de la Communauté européenne à la date de la signature de la Convention. Par la suite, celle-ci a été progressivement étendue aux autres États membres de l’Union au fur et à mesure de leur accession. Les règles de droit international privé concernant la détermination de la loi applicable en matière contractuelle, fixées par la convention, sont en effet considérées comme partie intégrante de l’acquis communautaire et à ce titre, l’adhésion des nouveaux entrants à cette convention relève pour eux des engagements découlant de leur entrée dans l’Union européenne.

Il a toutefois précisé que l'acte de 2005 relatif à l'adhésion à l’Union de la Bulgarie et de la Roumanie a introduit une procédure simplifiée pour leur adhésion aux conventions conclues par les États membres de l’Union. En conséquence, il n'est désormais plus nécessaire de négocier et de conclure des protocoles spécifiques d'adhésion à ces conventions (qui auraient requis une ratification par les 27 États). Pour simplifier, leur adhésion à l’Union européenne les fait adhérer automatiquement – sous réserve de certaines adaptations – aux conventions en question.

Le rapporteur a ensuite évoqué le processus de communautarisation de la Convention de Rome du 19 juin 1980. Cette communautarisation s’inscrit dans la perspective de la création d’un véritable espace judiciaire européen. L’une des conséquences de l’accroissement des échanges et des déplacements à l’intérieur des frontières de l’Union européenne est en effet l’éventualité accrue qu’un citoyen européen ou une entreprise établie dans un État membre soient impliqués dans un litige dont tous les éléments ne soient pas cantonnés à l’intérieur de l’État où il ou elle a sa résidence habituelle. Or les parties sont souvent découragées de faire valoir leurs droits dans un pays étranger en raison de l’incompatibilité ou de la complexité des systèmes juridiques et administratifs nationaux. Ceci vaut tout particulièrement pour les citoyens ou les PME, qui ne disposent pas en général des moyens financiers pour s’assurer les services d’un réseau international de juristes.

La proposition de règlement dit « Rome I » actuellement en discussion doit notamment permettre de parfaire la construction du marché intérieur en évitant les distorsions de concurrence qui pourraient survenir entre les justiciables, mais aussi en assurant la sécurité juridique nécessaire au développement des échanges commerciaux transfrontières. Le nouvel instrument ne sera toutefois pas applicable à un, voire à deux États membres, qui resteront néanmoins liés par les dispositions de la Convention de Rome : il s’agit d'une part du Danemark, qui ne participe pas aux mesures prises dans le cadre de l'espace de liberté, de sécurité et de justice et d'autre part, du Royaume-Uni, qui n'a pas encore notifié son souhait de participer à l'adoption du futur règlement.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 170).

*

Accord Communauté européenne-Etats-Unis d’Amérique de transport aérien

La commission a examiné, sur le rapport de M. Eric Raoult, le projet de loi autorisant la ratification de l’accord de transport aérien entre la communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et les Etats-Unis d'Amérique d'autre part (n° 668).

Mme Nicole Ameline, suppléant le rapporteur, a déclaré qu’après plus de quatre ans de négociations, l’Union européenne et les Etats-Unis étaient parvenus à un accord « ciel ouvert » qui ouvrait les couloirs aériens transatlantiques à davantage de concurrence. Avant d’aborder le contenu de l’accord, elle a souhaité évoquer le contexte de profondes mutations du transport aérien dans lequel il s’inscrivait.

S’agissant du trafic aérien mondial, elle a tout d’abord précisé qu’il connaissait une croissance soutenue. D’après l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), le trafic de passagers des compagnies aériennes mondiales a, en effet, enregistré, en 2007, une hausse de 6,6 % par rapport à 2006. En Europe – dont le trafic représente près de 40 % du trafic international – la hausse a été de 6,4 %. Les autres régions du monde ont également enregistré une hausse sensible de leur trafic aérien. Au-delà de ces chiffres, elle a insisté sur les profondes mutations qu’avait connues l’espace aérien européen, depuis la fin des années 80. L’adoption d’une série d’actes législatifs a permis de créer, en moins de 10 ans, un marché unique du transport aérien. Au sein de ce marché, les transporteurs aériens de l’Union européenne sont libres de proposer leurs services à l’intérieur de l’Union, de fixer leurs prix et, depuis 1997, d’offrir des services de cabotage. La libéralisation du marché intérieur de l’aviation s’est accompagnée de mesures visant à réorganiser l’espace aérien européen, dans le cadre de l’initiative « ciel unique européen », lancée en 2004. Parallèlement à ces avancées, l’Union européenne a affirmé sa compétence dans le domaine des relations aériennes avec les pays tiers. C’est ainsi qu’ont été conclus, en juin 2006, l’accord sur la création d’un espace aérien commun européen (EACE) avec les pays partenaires du sud-est de l’Europe et, en décembre 2006, un accord sur le transport aérien avec le Maroc. C’est dans ce contexte global que s’inscrit la négociation du présent accord entre l’Union européenne et les Etats-Unis.

Mme Nicole Ameline a fait observer que jusqu’à présent, le transport aérien avec les Etats-Unis était régi par des accords bilatéraux que certains Etats membres avaient conclus avec les autorités américaines. En contribuant à la fragmentation du ciel européen, ces accords représentaient un frein à la réalisation du marché unique de l’aviation. Saisie par la Commission européenne, la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a confirmé l’incompatibilité de ces accords avec la législation communautaire et recommandé la conclusion d’un accord global entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Mandat a donc été confié à la Commission européenne et les négociations ont débuté en juin 2003. Fin 2005, un premier projet était élaboré, pour lequel les Européens exigeaient des progrès dans la levée des restrictions à la propriété et au contrôle des transporteurs aériens américains. Ce projet ayant finalement été retiré, les négociations ont repris, qui ont abouti à un nouveau projet d’accord, le 2 mars 2007. Cet accord a été signé, le 30 avril 2007, à l’occasion du sommet Union européenne – Etats-Unis.

Puis, elle a abordé le contenu même de l’accord en rappelant qu’à l’heure actuelle, se rendre aux Etats-Unis de France n’était possible qu’en empruntant une compagnie française ou une compagnie américaine. En outre, tous les Etats membres n’ont pas conclu un accord « ciel ouvert » avec les Etats-Unis, ce qui a pour conséquence de limiter sérieusement le nombre de routes vers les Etats-Unis depuis l’Espagne, l’Irlande ou la Grèce, par exemple. L’accord « ciel ouvert » entre l’Union européenne et les Etats-Unis vient lever ces restrictions en permettant aux compagnies aériennes européennes, quelle que soit leur nationalité, de desservir n’importe quelle ville des Etats-Unis, à partir de n’importe quelle ville d’Europe. En vertu d’une clause de réciprocité, n’importe quelle compagnie aérienne américaine sera autorisée à opérer vers n’importe quelle destination européenne, puis à se diriger vers d’autres destinations. Elle a ajouté que cette libéralisation du trafic aérien concernait principalement l’aéroport londonien de Heathrow, qui représentait plus de 40 % de l’ensemble des vols d’Europe à destination des Etats-Unis. L’accord permet également aux compagnies aériennes européennes d’opérer sans restriction sur le nombre de vols, d’appareils et de routes ; de fixer les prix en fonction du marché et de signer des accords de coopération. Cet accord vise, en outre, à renforcer la coopération entre les deux Parties dans le domaine de la sûreté, de la sécurité, de la politique de la concurrence, des aides d’Etats ainsi que de la protection des consommateurs et de l’environnement. Enfin, il établit un « comité mixte » dans le but de favoriser la concertation et les échanges entre les Parties.

Elle a estimé que l’accord « ciel ouvert » entre l’Union européenne et les Etats-Unis constituait donc une étape décisive pour la réalisation d’un espace transatlantique ouvert de l’aviation. Il reste cependant incomplet sur un certain nombre de points, ce qui explique l’engagement de nouvelles négociations, prévues dans les deux mois suivant son entrée en vigueur, afin de parvenir à un accord dit « de seconde phase ». Son contenu doit notamment évoluer sur la question du cabotage. Dans sa version actuelle, l’accord ne permet pas aux compagnies aériennes européennes d’effectuer des vols intérieurs aux Etats-Unis. En revanche, les compagnies américaines pourront assurer des liaisons entre pays européens, à condition de ne pas opérer entre deux points à l’intérieur d’un seul Etat membre. Cette exclusion du cabotage du champ de l’accord vient donc limiter la portée de la libéralisation des droits de trafic aérien. Une deuxième difficulté réside au niveau de la propriété des compagnies aériennes. La législation américaine dispose, en effet, qu’un étranger ne peut pas détenir 25 % des actions à droit de vote d’une compagnie américaine et qu’il ne peut la contrôler. Compte tenu de cette double contrainte, l’accord prévoit qu’une compagnie européenne a le droit de détenir 50 % ou plus du capital d’un transporteur américain, sans que cette détention ne soit considérée comme constitutive d’un contrôle dudit transporteur, à condition qu’il s’agisse d’actions sans droit de vote. Malgré cet assouplissement, le droit reconnu aux transporteurs européens d’exercer une influence effective sur une compagnie américaine reste limité. C’est pourquoi, l’accord rend désormais les investissements des compagnies américaines au sein de leurs homologues européennes plus difficiles, en introduisant une limite équivalente de 25 % qui, jusqu’alors, n’existait pas.

Mme Nicole Ameline a indiqué que, compte tenu de ces difficultés, l’accord du 30 avril 2007 appelait à la poursuite des négociations afin de supprimer les limitations à la libéralisation des droits du trafic aérien qui subsistent. Il fixe notamment un échéancier selon lequel, l’accord entrant provisoirement en vigueur le 30 mars 2008, la seconde phase de négociations doit commencer avant le 30 mai 2008. Un bilan des progrès accomplis sera effectué au plus tard 18 mois à compter du début de cette seconde phase. Cette seconde phase de négociations doit, en principe, s’achever fin 2010. Enfin, l’Union européenne s’est réservée le droit de suspendre certaines parties de l’accord, si le dialogue ne permet pas son approfondissement dans les trois années suivantes.

Au-delà de ces difficultés, elle a souligné les bénéfices attendus de l’accord entre l’Union européenne et les Etats-Unis. En premier lieu, l’accord « ciel ouvert » met fin à la fragmentation qui prévalait jusqu’alors. En second lieu, cet accord couvrira plus de 60 % du trafic aérien mondial, grâce au rapprochement des deux plus grands marchés du transport aérien. D’après la Commission européenne, l’ouverture des couloirs aériens transatlantiques à plus de concurrence pourrait se traduire par une augmentation du nombre de passagers entre l’Europe et les Etats-Unis d’environ 26 millions de personnes en cinq ans, ainsi que par la création de 80.000 emplois. Enfin, cet accord pourrait servir de modèle à de futurs accords de même nature avec d’autres pays, contribuant ainsi à la libéralisation progressive du transport aérien international. C’est pourquoi, elle a recommandé l’adoption du projet de loi n°668 qui autorise la ratification de cet accord.

Le Président, Axel Poniatowski, a estimé que les conditions d’un tel accord rappelaient à quel point les Etats-Unis pouvaient adopter un comportement protectionniste dans certains domaines. La législation concernant la détention par un étranger de titres de propriété d’une compagnie aérienne américaine en est-elle une manifestation, ou est-elle liée aux attentats de 2001 ?

Mme Nicole Ameline, suppléant le rapporteur, a précisé que cette législation en était effectivement la manifestation et que ces aspects de l’accord avaient suscité des discussions très vives lors des négociations. C’est la raison pour laquelle une règle de réciprocité a été introduite par les Européens, qui ont également prévu la possibilité de suspendre certaines dispositions de l’accord si les négociations à venir ne permettaient pas de progresser vers davantage d’ouverture.

M. Jean-Paul Lecoq a affirmé que l’accord n’était pas équilibré, comme l’illustrait l’exemple du cabotage. Si les compagnies américaines peuvent assurer des liaisons entre pays européens, tel n’est en revanche pas le cas pour les compagnies européennes sur les lignes intérieures américaines. En outre, l’article 2 de l’accord, en prévoyant « la possibilité d’une concurrence loyale et équitable » risque d’avoir pour conséquence une remise en cause de la situation des compagnies nationales, comme Air France par exemple. De telles dispositions sont, en effet, de nature à empêcher la puissance publique d’intervenir en leur faveur en cas de nécessité.

En ce qui concerne le cabotage, Mme Nicole Ameline, suppléant le rapporteur, a indiqué, selon les transporteurs aériens européens eux-mêmes, le fait de disposer de points d’entrée sur le marché aérien des Etats-Unis était un aspect essentiel de l’accord. Ce n’est que dans un second temps que la desserte des liaisons intérieures américaines pouvait éventuellement s’avérer intéressante pour certaines compagnies. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle cette question fera partie des thèmes de la deuxième phase de négociations, prévue par l’accord lui-même. S’agissant des autres obstacles posés à la mise en place d’un « ciel ouvert » entre l’Europe et les Etats-Unis, les compagnies européennes ont insisté sur l’avancée que représentait le présent accord par rapport à la situation actuelle du trafic aérien, extrêmement fragmenté. Elles ont notamment mis l’accent sur les perspectives offertes par l’accès à l’aéroport d’Heathrow en termes de développement des liaisons transatlantiques.

Le Président, Axel Poniatowski, a fait remarquer que le problème lié à la réciprocité en matière de cabotage n’aurait pas été posé si l’Europe était une fédération, et non pas une union d’Etats-Nations, comme l’était l’Union européenne.

M. Jean-Marc Roubaud a exprimé le souhait que soit apportée une solution à la situation actuelle, inéquitable, qui voit les pilotes français soumis à une interdiction de voler à partir de 60 ans, contre 65 ans pour leurs homologues américains.

Mme Nicole Ameline, suppléant le rapporteur, a indiqué qu’il était prévu que cet aspect, et plus généralement les conséquences sociales de l’accord, soient examinés par le comité mixte institué par l’accord. Plus généralement, cet accord a valeur d’exemplarité, en ce qu’il souligne l’affirmation, dans certains domaines, d’une politique extérieure européenne autonome.

Mme Martine Aurillac a demandé si la procédure de double ratification, par la Communauté européenne et les Etats membres, sera également exigée pour l’accord de deuxième phase, prévu par l’accord du 30 avril 2007.

Mme Nicole Ameline, suppléant le rapporteur, a répondu qu’une telle double ratification s’imposerait à nouveau.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 668).

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Maroc : convention de partenariat pour la coopération culturelle et le développement

La commission a examiné, sur le rapport de M. Jean Roatta, le projet de loi autorisant l’approbation de la convention de partenariat pour la coopération culturelle et le développement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc (n° 300).

M. Jean Roatta a rappelé que la France et le Maroc étaient liés par des relations anciennes et fortes d’amitié et de coopération. La récente visite d’Etat du Président de la République au Maroc, en octobre dernier, est venue confirmer l’étroitesse de ces relations. Au cours de cette visite, M. Nicolas Sarkozy a, en effet, mis l’accent sur la qualité des relations bilatérales entre les deux pays ainsi que sur leur importance en matière de lutte contre la pauvreté et le terrorisme, de politique migratoire ainsi que pour la construction d’une Union méditerranéenne.

Avant d’aborder le contenu de la présente convention de partenariat, il a souhaité évoquer la situation du Maroc ainsi que nos relations avec ce pays. A cet égard, il a souligné que le Maroc ne disposait pas de ressources minières exportables à la hauteur de ses besoins de développement tandis que l’importance du secteur agricole soumettait la croissance de son économie aux aléas des récoltes. Le pays doit également faire face à de fortes inégalités sociales ainsi qu’à des disparités importantes de développement entre les régions. Enfin, sa situation démographique – avec 52 % de la population de moins de 25 ans – aggrave encore les contraintes qu’il subit en matière d’éducation et d’emploi. En dépit de ces contraintes fortes – mais aussi pour les surmonter –, le Maroc s’est engagé dans une politique ambitieuse de réformes. Dans le domaine économique, le Gouvernement conduit une politique de réformes structurelles visant à libéraliser l’économie, à améliorer le cadre des affaires et de l’investissement, à diversifier les activités productives et, enfin, à moderniser les infrastructures. En matière sociale, le Roi Mohammed VI a annoncé, en mai 2005, le lancement d’une « initiative nationale pour le développement humain » (INDH). Il s’agit d’une stratégie globale de lutte contre la pauvreté intégrant l’habitat, les infrastructures de base, la santé, l’éducation et l’emploi. A cet égard, il a indiqué que des progrès importants avaient été réalisés, au cours de ces dernières années. A titre d’exemple, le taux d’électrification atteint aujourd’hui 97 % en milieu urbain et 88 % en milieu rural tandis que la mise à disposition d’eau potable concerne désormais plus de 70 % des Marocains ruraux, les réseaux de distribution étant pratiquement achevés dans les villes. Le pays reste toutefois confronté à d’importants défis : en 2006, le chômage des jeunes urbains de 25-34 ans dépassait 21 % tandis que la pauvreté concernait près de 15 % de la population. Sur le plan politique, enfin, d’importantes réformes de société ont été engagées. L’adoption d’un nouveau statut juridique de la femme marocaine a été la mesure phare d’une série de nouvelles dispositions modernisant le droit de la famille. Des avancées sont également à relever en matière de droits de l’homme avec la création d’un Conseil consultatif des droits de l’homme et la mise en place de l’instance « équité et réconciliation ». Enfin, des efforts ont été réalisés en matière de lutte contre la corruption et de moralisation de la vie publique. M. Jean Rotta a ensuite mis l’accent sur le choix stratégique des autorités marocaines de l’arrimage à l’Europe. En février 1996, un accord d’association Union européenne – Maroc a été signé, qui est entré en vigueur le 1er mars 2000. Suite à la conférence de Barcelone de novembre 1995, cet accord s’inscrit dans le cadre du partenariat euro méditerranéen, qui fixe notamment comme objectif la création d’une zone de libre-échange en 2012.

Puis, il a évoqué les relations étroites et denses entre les deux pays. Ces relations reposent, avant tout, sur des liens humains : plus de 800.000 Marocains vivent et travaillent en France tandis la présence française permanente au Maroc se situe entre 50.000 et 70.000 personnes. En outre, près de 1,5 million de touristes français visitent chaque année le Maroc. Sur le plan culturel, les relations entre les deux pays sont très denses avec près de 30.000 jeunes Marocains qui étudient en France. Au Maroc, environ 25.000 élèves fréquentent le réseau scolaire français et plus de 50.000 personnes apprennent notre langue dans les instituts et alliances français. Sur le plan économique, avec une part de 21% des échanges extérieurs marocains, la France est le premier partenaire commercial du Maroc. Notre pays est le premier fournisseur du Maroc. Toutefois, alors que notre part de marché a été relativement stable (entre 24 et 26 %) sur la période 1993 – 1999, elle est passée de 24 % en 2000 à 16,5 % en 2006. Cette perte de part de marché s’est faite au profit des pays émergents, des pays producteurs de pétrole et, enfin, de certains concurrents européens (Italie, Espagne). La France est également le premier client du Maroc dont elle absorbe 28 % des exportations. Enfin, sur la période 2001 – 2006, les flux d’IDE d’origine française se sont élevés en moyenne annuelle à 1,16 milliard d’euros, soit 60 % du total des IDE reçus par le Maroc. En matière de coopération, enfin, la France est le premier bailleur de fonds bilatéral. En 2005, la contribution totale de la France, y compris par le biais d’organisations multilatérales dont la Commission européenne, s’élevait à 259 millions de dollars, soit 40 % de l’aide globale reçue par le Maroc.

S’agissant de la convention de partenariat, M. Jean Roatta a estimé qu’elle venait rénover la convention de coopération culturelle, scientifique et technique conclue entre la France et le Maroc, en 1984. L’objectif est d’adapter le cadre des relations entre les deux pays à certaines évolutions, dont la conclusion de l’accord d’association entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc. Il s’agit également d’intégrer davantage les questions de développement, aujourd’hui prioritaires pour les autorités marocaines. Enfin, la convention prend en compte le rôle des acteurs non institutionnels – tels que les acteurs économiques et sociaux et les ONG, par exemple – dont la contribution au partenariat entre les deux pays est jugée utile. Conclue en juillet 2003, cette convention allège les structures existantes et met en place un dispositif opérationnel qui repose sur un Conseil d’orientation et de pilotage du partenariat (COPP), cinq comités sectoriels et thématiques, un Forum du partenariat et un Fonds incitatif de coopération. Au-delà de la description de la composition et du rôle de ces instances, la convention précise les modalités et les moyens de la coopération qu’elle encourage, en définissant une méthode et en posant le principe de partage des charges entre les Parties. Elle est, par ailleurs, complétée par deux protocoles administratifs et financiers, l’un sur les personnels, l’autre sur les outils et opérateurs de la coopération. Le premier protocole fixe les dispositions relatives aux différentes catégories de personnels sollicités dans le cadre de la convention de partenariat, que ces personnels soient mis à disposition pour le gouvernement français ou chargés de mission du gouvernement marocain. Il concerne aussi bien les enseignants que les assistants techniques, les volontaires internationaux et les experts pour des missions de courte durée. Le second protocole porte sur les outils de la coopération, en précisant notamment la répartition des charges pour les frais liés à des séjours d’étude et des stages ainsi qu’aux bourses. Il prévoit également la gratuité des frais de dossier correspondant au visa demandé pour la France, en faveur des participants marocains à une action de coopération. En ce qui concerne les opérateurs de la coopération, le second protocole précise les activités des différents établissements en fonction de leur statut juridique.

Considérant que cette rénovation du cadre de la coopération franco-marocaine contribuait à l’établissement d’un partenariat stratégique entre la France et le Maroc, le rapporteur a recommandé l’adoption du projet de loi n°300.

Le Président Axel Poniatowski s’est déclaré convaincu de la nécessité d’améliorer les performances commerciales françaises au Maroc.

M. Jean-Paul Lecoq a rappelé qu’un récent rapport du Fonds monétaire international estimait que le nombre de pauvres au Maroc avait augmenté de deux millions, pour atteindre près de 7,3 millions de personnes. Par ailleurs, des questions majeures restent sans réponse, comme l’exploitation intensive du phosphate présent dans le Sahara occidental, qui conduit le royaume marocain à ne pas respecter des dispositions de droit international public. Il serait de la responsabilité de la France, en tant qu’Etat de droit, d’exiger de la part de l’un de ses partenaires commerciaux de se comporter également en Etat de droit. Un tel changement de comportement s’impose avec d’autant plus de force que l’amélioration des relations commerciales n’est pas exclusive d’un renforcement des exigences vis-à-vis de nos partenaires. L’Italie a ainsi connu une augmentation notable de sa balance commerciale avec le Maroc, alors même que des villes et villages italiens ont noué un grand nombre de jumelages avec des communes du Sahara occidental. La convention de partenariat, bien que légitime dans ses intentions, ne répond donc pas à la question essentielle : la France n’est-elle pas trop soumise dans sa relation avec le Maroc ?

M. Jean Roatta, rapporteur, a affirmé qu’une partie des difficultés provenaient du fait que la France considérait sa position au Maroc comme éternellement acquise, sans questionner la nature de sa présence dans le pays.

Le Président, Axel Poniatowski, a précisé que la commission avait convié M. Van Walsum, envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies pour le Sahara occidental, à venir s’exprimer. La date de cette réunion n’a pas pu encore être fixée.

M. André Schneider a indiqué qu’au cours d’un déplacement au Maroc, la mission d’information sur la langue française dans le monde, créée lors de la précédente législature, avait pu constater à quel point le Maroc était actif dans le domaine de la francophonie. La France dispose donc dans ce pays de cartes maîtresses pour que le partenariat culturel qu’instaure la présente convention ait les meilleurs résultats possibles. Il n’est nul besoin de revenir sur l’importance de ces relations, notamment à une période où une grande attention est portée au bassin méditerranéen.

M. Jean-Paul Bacquet a rappelé que, dans le cadre d’un rapport pour avis de la commission des affaires étrangères sur le commerce extérieur, il avait pu constater sur place que, dans le secteur de l’industrie textile, la perte d’influence de la France était la conséquence de notre choix d’importer le textile depuis la Chine. Dans le même temps, le Maroc s’est rapproché de donneurs d’ordre italiens et espagnols, dont les marques vestimentaires, commercialement très agressives, avaient poussé les industriels marocains à s’adapter, avec succès, à leurs méthodes. Enfin, il a déploré qu’une des plus anciennes chambres de commerce française dans le pays, située à Casablanca, ait été complètement délaissée.

M. Jean Roatta, rapporteur, a confirmé la responsabilité de notre pays dans la perte de ses parts de marché au Maroc. Afin d’inverser cette tendance, il importe de s’appuyer sur le réseau des chambres de commerce auquel 3.500 entreprises sont affiliées à l’heure actuelle.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 300).

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Règlement de la Commission intergouvernementale concernant la sécurité de la liaison trans-Manche

La commission a examiné, sur le rapport de M. Marc Dolez, le projet de loi autorisant l’approbation du règlement de la Commission intergouvernementale concernant la sécurité de la liaison trans-Manche (n° 500).

M. Marc Dolez, rapporteur, a précisé que le tunnel sous la Manche, long de plus de 50 kilomètres, était creusé à 40 mètres sous le niveau de la mer. Il a été construit entre décembre 1987 et décembre 1993 et est ouvert à la circulation depuis mai 1994. Depuis lors, 195 millions de personnes l’ont emprunté : 118 millions de personnes par l’intermédiaire des navettes ferroviaires qui transportent les véhicules de tourisme, les autocars et les camions, 77 millions de personnes à bord de l’Eurostar. 176 millions de tonnes de marchandises ont aussi franchi la Manche par ce moyen.

L’utilisation du tunnel pour traverser la Manche est donc devenue presque banale, et ce d’autant plus qu’elle est considérée comme très sûre. Seuls deux accidents importants – qui n’ont cependant fait aucun blessé grave – ont en effet eu lieu dans le tunnel : le 18 novembre 1996, un incendie à bord d’un poids lourd a endommagé le tunnel sur 500 mètres, rendant nécessaires des travaux de reconstruction qui ont duré cinq mois ; un accident du même type a eu lieu le 21 août 2006, mais il a fait peu de dégâts et n’a entraîné qu’une très brève interruption de la circulation. Les règles de sécurité sont naturellement très rigoureuses et leur respect est scrupuleusement vérifié.

Elles vont encore être améliorées par le règlement de la Commission intergouvernementale concernant la sécurité de la liaison trans-Manche, signé le 24 janvier 2007, dont le présent projet de loi vise à autoriser l’approbation.

Le cadre juridique de l’exploitation du tunnel sous la Manche est à la fois bilatéral et communautaire. Il s’agit au premier chef du traité franco-britannique de Cantorbéry du 12 février 1986 concernant la construction et l’exploitation de la liaison fixe. Doivent aussi être respectées les normes communautaires applicables au transport ferroviaire, puisque le trafic sous le tunnel est exclusivement ferroviaire.

Les règles de sécurité qui régissent actuellement l’exploitation du tunnel sous la Manche ont quant à elles trois sources :

– le traité de Cantorbéry, dont l’article 10 crée la commission intergouvernementale du tunnel sous la Manche (CIG) : composée à parité par des Français et des Anglais, elle est chargée de suivre, au nom des deux gouvernements, toutes les questions liées à la construction et à l’exploitation du tunnel, alors que les voies ferrées qui le traversent ne relèvent pas de la compétence des autorités de sécurité nationales que sont l’établissement public de sécurité ferroviaire en France et l’Office of Rail Regulation au Royaume-Uni ;

– le règlement du 25 octobre 2005, élaboré par cette commission afin de transposer les trois directives européennes qui constituent le « premier paquet ferroviaire » ;

– des instruments juridiques élaborés par les concessionnaires et approuvés par la CIG qui sont appelés « volumes A à G » et que tout opérateur ferroviaire doit respecter pour avoir le droit d’utiliser le tunnel.

Le règlement dont le présent projet de loi vise à autoriser l’approbation viendra compléter ce corpus normatif. Il est très directement inspiré de la directive du 29 avril 2004, qui fait partie du « deuxième paquet ferroviaire ». Il la transpose et reprend un grand nombre de ses stipulations. Certaines d’entre elles sont reproduites à l’identique, d’autres sont adaptées aux spécificités de la liaison fixe trans-Manche, parmi lesquelles figurent son caractère binational et le fait qu’il est utilisé à la fois par des trains de voyageurs et par des navettes porteuses de véhicules de tourisme, d’autocars ou de poids lourds.

Le règlement organise un partage clair des responsabilités entre la CIG, qui sera l’autorité de sécurité pour la liaison fixe et remplira à ce titre des tâches d’autorisations et de vérifications, ainsi que des compétences en matière des « règles de sécurité unifiées » spécifiques à cette liaison, les concessionnaires – France Manche SA et the Channel Tunnel Group Limited, qui sont rattachés au Groupe Eurotunnel SA –, qui seront responsables de la sécurité de l’exploitation du système ferroviaire vis-à-vis des usagers, des clients, des personnels concernés et des tiers, et les entreprises ferroviaires – côté français, il s’agit de la SNCF et d’Europorte 2, une filiale d’Eurotunnel spécialisée dans la traction de train de marchandises sous le tunnel –, qui seront responsables de leurs activités de transport et devront notamment veiller à la formation des personnels affectés à des tâches de sécurité et s’assurer que les matériels roulants utilisés sont autorisés à emprunter le tunnel et sont en bon état.

Le système de sécurité organisé par le règlement en application de la directive repose sur trois types d’autorisations préalables : un agrément de sécurité des concessionnaires, valable pour cinq ans au plus, une certification de sécurité particulière (appelée « certification partie B ») pour les entreprises ferroviaires et une autorisation du matériel roulant utilisé par les entreprises ferroviaires. Les deux dernières autorisations reposent sur le principe de doubles exigences, les titulaires devant détenir une autorisation délivrée par leur autorité nationale et une autorisation spécifique. Il revient à la Commission intergouvernementale d’accorder chacune de ces autorisations, après s’être assurée que les demandeurs remplissent une série d’obligations de sécurité. En cas de besoin, la CIG pourra demander la révision de l’autorisation accordée, voire la suspendre ou la retirer.

Afin de compléter le dispositif de sécurité, le règlement comprend aussi des stipulations spécifiques pour l’accès à la formation des personnels remplissant des tâches de sécurité et pose des exigences en matière d’enquête sur les accidents. Le règlement crée une obligation d’enquête après « les accidents graves survenus sur le système ferroviaire » et prévoit la possibilité que l’organisme d’enquêtes s’intéresse aussi aux « accidents et incidents qui, dans des circonstances légèrement différentes, auraient pu conduire à des accidents graves ». Les organismes d’enquêtes sont le Rail Accident Investigation Branch britannique et le bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre français, qui coopèrent entre eux.

En transposant la directive sur la sécurité ferroviaire, le nouveau règlement va ainsi entraîner le passage d’un système d’études de sécurité à un système de gestion de la sécurité, nécessaire pour atteindre un niveau de sécurité maximal. Cela va exiger des investissements supplémentaires de la part des concessionnaires.

Le règlement n’aborde en revanche pas les questions essentielles de sûreté du tunnel sous la Manche, qui restent du ressort direct des deux gouvernements. Ceux-ci sont seulement liés par un accord particulier de sûreté signé à Londres le 15 décembre 1993. Il a créé un comité binational de sûreté, dont la délégation française constitue un comité interministériel en application d’un arbitrage interministériel du Premier ministre de 1994, qui n’a jamais formalisé. Un arrêté interministériel est en cours d’élaboration pour officialiser son existence et on ne peut que souhaiter qu’il soit rapidement publié. Si aucune tentative d’acte terroriste contre le tunnel n’a été observée, le rapporteur a déploré le nombre non négligeable d’intrusions de migrants illégaux dans le tunnel, la dernière en date ayant eu lieu au tout début de cette année. Elles témoignent de failles regrettables dans le système de surveillance de son accès.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 500).

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Australie : coopération en matière d'application de la législation relative à la pêche

La commission a examiné, sur le rapport de M. Louis Guédon, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’Australie relatif à la coopération en matière d’application de la législation relative à la pêche dans les zones maritimes adjacentes aux Terres australes et antarctiques françaises, à l’île Heard et aux îles McDonald (n° 443).

M. Louis Guédon, rapporteur, a indiqué que l’accord faisait suite au traité du 24 novembre 2003 qui avait posé les principes d’une coopération en matière d’application de la législation relative à la pêche entre la France et l’Australie dans les zones maritimes adjacentes aux Terres australes et antarctiques françaises, à l’île Heard et aux îles McDonald.

Signé à Paris, le 8 janvier 2007, cet accord détermine les conditions d’exercice d’une police des pêches dans les zones maritimes australes sur lesquelles la France et l’Australie exercent leur souveraineté.

Les îles Heard et McDonald, les archipels de Crozet et de Kerguelen ainsi que les îles Saint-Paul et Amsterdam offrent à l’Australie et à la France d’immenses espaces maritimes, protégés par la Convention sur la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique. Ils recèlent des ressources halieutiques qui ont longtemps permis le développement des pêcheries. En raison de l’épuisement des stocks et de la raréfaction des espèces, la pêche est aujourd’hui sévèrement réglementée dans les zones économiques exclusives (ZEE) des deux pays. Ces derniers sont néanmoins confrontés à la pêche illicite contre laquelle ils luttent conjointement.

L’île Heard et les îles McDonald sont des îles inhabitées situées dans l’océan indien, aux deux tiers de la distance entre Madagascar et l’Antarctique et à 4 100 kilomètres à l’ouest de l’Australie à laquelle elles appartiennent depuis 1947.

Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) se composent de l’archipel de Crozet, l’archipel des Kerguelen, des îles Saint-Paul et Amsterdam, de la terre Adélie et des îles Éparses ; les districts de Kerguelen, Crozet et Saint-Paul et Amsterdam forment les terres australes.

La politique de gestion des ressources marines australes est contrariée par la pêche illicite qui fait l’objet d’une surveillance et d’une répression concertées de la part des autorités françaises et australiennes.

De 1997 à 2000, vingt navires de pêche illicites ont été arraisonnés par les bâtiments de la marine nationale puis confisqués par décision de justice.

Depuis 2001, les autorités en charge de la lutte contre la pêche illicite à la Réunion ont développé le projet intitulé « Radarsat » qui permet la détection par radar des navires situés dans les ZEE de Kerguelen et de Crozet à partir d’un satellite.

L’Osiris, navire confisqué par la marine et transformé pour être affecté à des missions de surveillance, effectue chaque année environ 150 jours de patrouille, qui viennent s’ajouter aux patrouilles effectuées par les bâtiments de la marine nationale.

Cette multiplication des moyens de lutte porte ses fruits ; la pêche illicite n’est pas cependant pas éradiquée, des navires étant régulièrement observés en pêche dans les eaux internationales de la zone de compétence de la Commission précitée.

Afin de poursuivre la lutte efficace contre les activités de pêche illégale, l’insuffisance des moyens français dans la ZEE française (et australiens dans la ZEE australienne) rend nécessaire la conclusion d’accords bilatéraux de coopération en matière de surveillance et de police des pêches.

L’accord entre la France et l’Australie, signé à Paris, le 8 janvier 2007, détermine les conditions d’exercice d’une police des pêches dans les zones maritimes précitées. L’accord renforce l’efficacité de la coopération entre les deux pays formalisée par le traité du 24 novembre 2003, signé à Canberra. Pour la première fois, il permet, sous certaines conditions, à une partie de recourir à la coercition dans les eaux sous souveraineté de l’autre partie.

Le traité de 2003 s’applique aux activités menées en rapport avec les mers territoriales et les zones économiques exclusives des territoires australien et français. Il détermine les modalités de la coopération franco-australienne en matière de surveillance. L’article 2 de son annexe III stipule que « les Parties peuvent conclure des accords ou arrangements qui pourront également prévoir des opérations de police éventuellement accompagnées de mesures coercitives. »

C’est à cette invitation que répond le présent accord en précisant les conditions d’exercice en coopération des pouvoirs de police. L’objet de l’accord, tel que défini par l’article 2, est le renforcement de la coopération franco-australienne en matière d’application de la législation relative à la pêche dans leurs ZEE respectives.

L’article 3 détermine ainsi les modalités de l’exercice en coopération des pouvoirs de police par les officiers français sur un navire australien et inversement. Les opérations de police des pêches entreprises doivent respecter la législation applicable dans la ZEE dans laquelle ils interviennent. Les officiers ne peuvent agir ou être contraints d’agir à l’encontre de leur droit national et des pratiques nationales applicables. À cet effet, un échange d’informations entre les parties sur leurs législations et pratiques respectives est prévu.

Le présent accord permet d’envisager l’éradication de la pêche illicite dans les eaux australes et confirme l’exemplarité de l’action conjointe de la France et de l’Australie dans la zone du traité sur l’Antarctique.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 443).

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Corée : convention d'extradition

La commission a examiné, sur le rapport de M. André Schneider, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Corée (n° 519).

M. André Schneider, rapporteur, a d’abord rappelé que la France entretenait de très bonnes relations avec la République de Corée. La Corée du Sud n’est pas qu’un partenaire économique : elle est également un allié diplomatique de premier plan, un allié sur qui la communauté internationale peut compter, et qui s’engage pour assurer la stabilité du Nord-Est asiatique. Ces bonnes relations constituent un socle solide sur lequel se sont construits un véritable dialogue politique et un ambitieux programme de coopération judiciaire.

Une convention d’entraide judiciaire en matière pénale lie la France et la Corée depuis 1997. Elle a déjà permis un renforcement de la lutte commune contre la criminalité. Depuis son entrée en vigueur, des évolutions importantes ont eu lieu : la Corée a réformé en profondeur son système judiciaire ; elle a adhéré à de nouvelles conventions internationales en matière d’extradition et de transfèrement. Cependant, l’actualité récente, dont l’affaire Courjaut, a souligné la persistance de quelques lacunes dans notre système de coopération judiciaire.

La présente convention, signée à Paris le 6 juin 2006, a précisément pour objectif de prendre en compte ces évolutions en instituant de nouvelles modalités de coopération judiciaire en matière pénale. Son but principal est de rendre plus facile l’extradition de personnes entre nos deux pays.

Grâce à la présente convention, les demandes d’extradition faites par la France auprès de la Corée seront facilitées, et inversement. Ce système de coopération permettrait notamment aux Français se trouvant en Corée d’être plus rapidement extradés vers la France, et d’être jugés,  voire détenus, dans un environnement familier, où leurs proches pourront leur rendre visite, bref, dans un environnement qui favorisera leur réinsertion future.

La présente convention énumère donc les différentes mesures techniques et juridiques facilitant ces procédures d’extradition. Les stipulations sont assez classiques, et sont directement inspirées des différentes conventions européennes en la matière.

La convention pose d’abord les conditions sous lesquelles la France et la Corée s’engagent à extrader toute personne réclamée. Pour être recevable, une demande d’extradition doit satisfaire des exigences de fond : elle doit s’appuyer sur une infraction grave ayant fait l’objet d’une double incrimination, et être punie, dans chacun des pays, d’une peine de prison d’une durée minimale de deux ans. La demande d’extradition doit également satisfaire des exigences formelles : toute demande doit être écrite et notifiée par voie diplomatique. Elle doit être accompagnée de nombreuses informations, fournies par l’Etat requérant, concernant l’identité de la personne recherchée, les circonstances de l’affaire, la sanction encourue, etc.

Une procédure exceptionnelle permet, en cas d’urgence, de procéder à une arrestation provisoire jusqu’à ce que l’Etat requérant puisse rassembler toutes les informations nécessaires à l’établissement d’une demande d’extradition classique.

Une fois la demande d’extradition acceptée, l’Etat requis doit remettre la personne recherchée aux autorités de l’Etat requérant, ce dernier se chargeant d’organiser son transit. Les autorités de l’Etat requérant pourront alors entamer des poursuites contre la personne extradée. Afin de garantir l’équité des jugements, elles ne pourront poursuivre la personne que pour l’infraction ayant donné lieu à extradition, et non pour les autres infractions qu’elle aurait éventuellement commises.

Toutefois, il convient de souligner que l’Etat requis n’est jamais tenu d’accéder à une demande d’extradition. Il peut refuser d’extrader une personne recherchée, son refus devant alors être dûment motivé.

Les motifs obligatoires de refus d’extradition interdisent à l’Etat requis de procéder à l’extradition. Un Etat a, par exemple, obligation de refuser l’extradition si cette dernière est demandée en raison d’une activité politique, ou de critères ethniques et religieux.

Les motifs facultatifs de refus d’extradition permettent à l’Etat requis de refuser une demande dans certaines situations bien précises, notamment lorsque ses autorités ont déjà entamé des poursuites, ou lorsque l’infraction a été commise sur son territoire.

Enfin, la convention distingue deux motifs particuliers de refus d’extradition : l’Etat requis a la possibilité de refuser la demande d’extradition si la personne concernée est un de ses ressortissants ; il peut également refuser l’extradition d’une personne si cette dernière risque d’être punie de la peine capitale par l’Etat requérant.

La République de Corée a déjà effectué les procédures de ratification interne permettant l’entrée en vigueur de la présente convention. Du côté français, le Sénat a approuvé, le 12 décembre dernier, le présent projet de loi.

M. François Loncle a souhaité savoir si la Corée continuait à appliquer la peine de mort.

M. André Schneider, rapporteur, a indiqué que si la peine de mort faisait toujours partie des peines applicables dans la République de Corée, celle-ci respectait un moratoire des exécutions depuis 1998.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 519).

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