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Commission des affaires étrangères

Mardi 15 juillet 2008

Séance de 16 h 00

Compte rendu n° 61

Présidence de M. Axel Poniatowski, président

– Convention sur la protection internationale des adultes (n° 1035) – M. Jacques Remiller, rapporteur.

– Bureau international des poids et mesures (n° 961 et n° 1041) – M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur

Convention sur la protection internationale des adultes

La commission des affaires étrangères a examiné, sur le rapport de M. Jacques Remiller, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention de La Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes (n° 1035).

M. Jacques Remiller, rapporteur, a d’emblée rappelé que le projet de loi de ratification de la convention de La Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes avait été adopté par le Sénat le 8 juillet dernier. Il a ensuite indiqué que cette convention était un texte qui visait essentiellement à résoudre un problème de droit civil au plan international. En raison de l’allongement de la durée de la vie, un nombre de plus en plus important d’adultes se trouve, progressivement, en état d’incapacité mentale : maladie d’Alzheimer, démence sénile, état végétatif… Cette situation se combine avec l’évolution des modes de vie qui conduit de très nombreuses personnes à vivre, pour diverses raisons, à l’étranger. Ces deux phénomènes aboutissent à ce que des adultes en état d’incapacité peuvent relever de plusieurs régimes juridiques nationaux, tant pour leurs personnes que pour leurs biens. Leur patrimoine, mobilier comme immobilier, peut être réparti sur plusieurs pays.

Ces phénomènes ne sont pas marginaux. En 2007, les personnes âgées de plus de 75 ans représentent 10,9% de la population. Elles représenteront 21,1% de la population en 2050. Il s’agit donc d’une évolution structurelle à laquelle sont confrontés tous les pays développés, mais également à terme, certains pays émergents.

La protection des adultes en état de vulnérabilité est un sujet de préoccupation ancien, qui a fait l’objet des travaux de la Conférence de La Haye, qui réunit des juristes et des experts gouvernementaux spécialistes de droit privé. La négociation de la convention du 13 janvier 2000 a commencé vers 1996. Les trente Etats qui étaient parties à cette négociation ont abouti à un texte qui se fonde sur les deux principes suivants :

– tenir compte, autant que possible, de la volonté des personnes placées sous un régime de protection juridique, à l’instar de ce qui est prévu par les législations nationales ;

– permettre aux Etats de répondre aux besoins de chaque personne, grâce à un dispositif souple et personnalisé.

L’objet de la convention est essentiellement de régler les deux cas suivants :

– protéger des incapables majeurs qui se trouvent dans une situation où les lois de plusieurs Etats s’appliquent à eux ;

– protéger des incapables majeurs vivant dans un pays étranger dont le droit interne ne prévoit que la protection de ses ressortissants.

La convention comprend 59 articles répartis en 7 chapitres. Le « cœur de la convention est au chapitre II, dans les articles 5 à 12, qui déterminent lesquelles des autorités administratives et judiciaires sont compétentes pour prendre les mesures de protection de la personne ou des biens de la personne majeure en état d’incapacité. Le principe retenu est celui de la compétence des autorités de l’Etat de la résidence habituelle de l’adulte, mais les autorités de l’Etat dont l’adulte a la nationalité conservent une compétence concurrente, si elles estiment que leur intervention assure une meilleure protection de leur ressortissant.

Le dispositif retenu pour la loi applicable à l’adulte faisant l’objet de mesures de protection est également souple : la loi applicable est celle de l’Etat qui a compétence à agir, sauf s’il estime lui-même, ou sur requête d’un autre Etat, qu’une autre législation protège mieux l’adulte ou ses biens.

Le rapporteur a estimé que la convention de La Haye ne posait aucun problème par rapport au droit civil français. Son dispositif s’harmonise avec celui de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, y compris pour le mandat de protection future institué par cette loi, qui constitue une novation dans le droit civil français.

En conclusion, le Rapporteur a jugé que la convention de La Haye apportait des solutions pragmatiques à des problèmes que nos sociétés rencontreront de manière croissante dans les années à venir. Il a proposé en conséquence à la commission d’adopter le projet de loi de ratification de cette convention.

Mme Martine Aurillac a demandé pourquoi tant de temps s’était écoulé entre la signature de la convention, en 2000, et sa présentation devant le Parlement, pour ratification.

Le rapporteur, a indiqué que seuls quatre Etats (Allemagne, France, Pays-Bas et Royaume-Uni) avaient à ce jour signé cette convention et que deux d’entre eux (Pays Bas et Royaume-Uni) l’avaient ratifiée. L’explication de ce retard tient peut-être au fait que de nombreux pays européens ont procédé à des modifications de leur régime juridique de protection des adultes à la fin des années 90 et au cours des années 2000.

M. Marc Dolez a souhaité savoir si la notion de résidence habituelle, telle que prévue par la convention de La Haye, avait la même signification qu’en droit français.

Le rapporteur, a répondu par l’affirmative.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a ensuite adopté à l’unanimité le projet de loi (n° 1035).

*

Bureau international des poids et mesures

La commission des affaires étrangères a examiné, sur le rapport de M. Jean-Jacques Guillet, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation d’un accord relatif au siège du Bureau international des poids et mesures et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n° 961) et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Comité international des poids et mesures portant amendement de l'accord du 25 avril 1969 relatif au siège du Bureau international des poids et mesures et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n° 1041).

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur, a introduit son exposé en soulignant qu’il s’agissait de deux projets de loi portant amendement de l'accord du 25 avril 1969 relatif au siège du Bureau international des poids et mesures et à ses privilèges et immunités sur le territoire français.

Il a rappelé que le Bureau international des poids et mesures (BIPM) était une organisation intergouvernementale chargée d’assurer l’uniformité des mesures. Créé par la Convention du Mètre, signée à Paris par 17 Etats le 20 mai 1875 et regroupant actuellement 51 Etats membres ainsi que 27 Etats et organisations associés, il est une des plus anciennes organisations internationales existantes. Le rapporteur a expliqué que depuis sa création, le siège du BIPM se situait dans le domaine du Pavillon de Breteuil à Sèvres, dans l’enceinte du Parc national de Saint-Cloud.

Il a ensuite détaillé la mission du BIPM qui est d'assurer l'unification mondiale des mesures en collaboration avec les laboratoires de métrologie des Etats membres. Le BIPM est chargé d'établir les étalons fondamentaux et les échelles pour la mesure des principales grandeurs physiques, ainsi que de conserver les prototypes internationaux et d'effectuer la comparaison des étalons nationaux et internationaux. Comme exemple, le rapporteur a expliqué comment le prototype international du kilogramme, un objet fabriqué spécialement en platine iridié, est conservé au siège du BIPM sous des conditions spécifiques.

Le rapporteur a indiqué que, à l’origine, les activités du BIPM étaient limitées aux mesures de longueur et de masse et aux études métrologiques en relation avec ces grandeurs. Ainsi, en 1889, la Première Conférence générale des poids et mesures (CGPM) approuva les nouveaux prototypes internationaux du mètre et du kilogramme fabriqués par le BIPM. Les deux prototypes sont d’ailleurs toujours conservés au siège du BIPM, dans le domaine du Pavillon de Breteuil, le prototype international du kilogramme étant toujours l’unité de masse.

Au cours du temps, les activités du BIPM ont été étendues aux étalons de mesure électriques (1927), photométriques et radiométriques (1937), des rayonnements ionisants (1960), aux échelles de temps (1988) et à la chimie (2000). Désormais, le BIPM a aussi pour mission de maintenir le Temps atomique international (TAI) et le Temps universel coordonné (UTC). Le rapporteur a souligné l’importance de ces activités pour des projets comme le système de positionnement par satellite européen GALILEO ou bien dans le domaine de la chimie ou de la médicine.

Aujourd’hui, le BIPM emploie plus de 70 personnes de différentes nationalités, dont environ 45 physiciens et techniciens. Son budget en 2008 est d’environ dix millions d'euros.

Le rapporteur a ensuite rappelé que la Convention du Mètre de 1875 prévoyait déjà que le siège du BIPM se trouverait à Paris, décision due au fait que c’était la France qui avait introduit le système métrique décimal au moment de la Révolution. Le Gouvernement français a mis le Pavillon de Breteuil, situé à Sèvres, dans l’enceinte du Parc de Saint-Cloud, à la disposition du Comité international des poids et mesures pour y établir le BIPM. Depuis, le développement des activités du BIPM a rendu nécessaire la construction de plusieurs nouveaux bâtiments sur le site qui, a indiqué le rapporteur, s’intégraient parfaitement dans le parc. L’entretien du domaine du Pavillon de Breteuil est assuré à frais communs par les États membres.

Bien que le siège du BIPM se situe donc sur le territoire français depuis sa création, ce n’est que le 25 avril 1969 que fut signé l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Comité international des poids et mesures (CIPM) relatif au siège du BIPM et à ses privilèges et immunités.

Cet accord a pour but de régler les questions relatives à l’établissement du siège permanent du BIPM et de définir ses privilèges et immunités en France. Il reconnaît la personnalité civile du BIPM, prévoit l’inviolabilité de son siège et exempte ses biens et avoirs de saisie, confiscation, réquisition et expropriation ou de toute autre forme de contrainte administrative ou judiciaire. Les membres du personnel du BIPM jouissent de l’immunité pour les actes accomplis par eux dans l’exercice de leurs fonctions, sauf dans le cas d’infractions à la réglementation de la circulation des véhicules automobiles. Par contre, une immunité de juridiction pour le BIPM lui-même n’était pas prévue.

Mais, au cours des dernières années, le BIPM a constaté que le risque potentiel pour lui d’être impliqué dans des contentieux où sa responsabilité pourrait être engagée a augmenté avec le développement de ses activités. C’est dans ce but qu’il a approché le Ministère des affaires étrangères en mai 2003 et demandé une modification de l’accord de siège de 1969 afin de bénéficier, en plus de l’immunité d’exécution, de l’immunité de juridiction, ainsi que de l’inviolabilité de ses archives.

Les négociations ont abouti à la signature, le 7 juin 2005, d’un accord entre le Gouvernement de la République française et le Comité international des poids et mesures portant amendement de l’accord du 25 avril 1969. Il ajoute le principe de l’inviolabilité des archives et de tous les documents du BIPM à l’inviolabilité de son siège, déjà prévu dans l’accord initial, et octroie au BIPM l’immunité de juridiction, mais en exclut deux types d’action:

– les actions civiles consécutives à un accident causé par un véhicule à moteur appartenant au BIPM ou utilisé pour son compte, ou consécutives à une infraction à la réglementation de la circulation mettant en cause un tel véhicule, et

– les actions reconventionnelles.

En outre, il introduit deux dérogations au principe de l’immunité d’exécution du BIPM, jusqu’alors absolue, en rapport avec l’insertion de deux nouveaux articles relatifs au règlement de litiges.

Ainsi le BIPM est désormais obligé d’insérer dans les contrats écrits une clause compromissoire prévoyant que tout différend soulevé au sujet de l’interprétation ou de l’exécution du contrat peut, à la demande de l’une ou l’autre partie, être soumis à l’arbitrage. La décision rendue à la suite de cet arbitrage s’impose aux parties, et le BIPM ne jouit pas de l’immunité en cas d’exécution d’une telle sentence arbitrale.

Il est aussi prévu que le BIPM prenne les dispositions appropriées en vue du règlement juridictionnel des différends avec les membres du personnel au sujet de leurs conditions de service. En cas d’exécution d’une décision rendue en application de cet article, le BIPM ne jouit pas non plus de l’immunité.

Le rapporteur a précisé que de telles dispositions figuraient d’ores et déjà dans d’autres accords de siège récemment conclus entre la France et des organisations internationales qui ont leur siège en France, comme par exemple la Commission internationale de l'Etat civil (CIEC) en 2000, l’Organisation européenne de télécommunication par satellite (EUTELSAT) en 2001, la Communauté du Pacifique en 2003 et l'Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion en 2007.

Il a ajouté que le Conseil d’Etat avait examiné l’accord signé le 7 juin 2005 et a proposé des amendements pour faire coïncider les exceptions à l’immunité d’exécution du siège du BIPM avec les exceptions à l’immunité de juridiction prévues. Pour suivre cette recommandation, le Gouvernement et le BIPM, le 6 et 27 juillet 2007, ont signé un second accord sous forme d’échange de lettres ajoutant trois alinéas à l’accord de siège tel que modifié par l’accord du 7 juin 2005.

Le rapporteur a terminé en soulignant de nouveau combien le BIPM remplissait des fonctions essentielles pour les échanges internationaux scientifiques et commerciaux en assurant l’uniformité mondiale des mesures. Il a indiqué que le développement de ses activités nécessitait l’ajustement de ses privilèges et immunités conformément aux dispositions les plus récentes en vigueur dans d’autres accords relatifs au siège et aux privilèges et immunités d’organisations internationales sur le territoire français et a recommandé l’adoption des deux projets de loi.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi n° 961 et le projet de loi n° 1041.

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