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Commission des affaires étrangères

Mercredi 16 juillet 2008

Séance de 11 h 30

Compte rendu n° 62

Présidence de M. Axel Poniatowski, président

– Compte rendu du déplacement effectué en Afghanistan par le Président Axel Poniatowski et M. François Loncle

– Présentation par le Président Axel Poniatowski du bilan des travaux de la commission des affaires étrangères (juillet 2007-juillet 2008)

Compte rendu du déplacement effectué en Afghanistan par le Président Axel Poniatowski et M. François Loncle

Le président Axel Poniatowski a tout d’abord présenté les conclusions d’un récent déplacement en Afghanistan, effectué en compagnie de M. François Loncle, du 2 au 5 juillet dernier. Ce déplacement, qui s’est limité à Kaboul, devait initialement comprendre une visite à Kandahar – où est implantée une importante base militaire américaine avec un contingent aérien français – qui a finalement été annulée pour des raisons logistiques. Il a néanmoins été riche en rencontres avec différents membres du gouvernement – dont le Dr Spanta, ministre des Affaires étrangères, M. Azzizi, vice-ministre de l’Agriculture, M. Hedayatullah Arsalla, ministre d’Etat et M. Zalmaï Rassoul, conseiller du président Karzaï pour la sécurité nationale – ainsi qu’avec des membres du Parlement, des militaires – dont le général Riley – et des représentants de différentes ONG françaises et étrangères présentes dans le pays. Il a précisé que l’intérêt des rencontres effectuées devait beaucoup à la préparation de cette visite par le nouvel ambassadeur de France en Afghanistan, M. Jean de Ponton d’Amecourt.

Le président a ensuite fait part de ses impressions sur la situation du pays en dressant un constat à plusieurs niveaux. En premier lieu, la vie civile à Kaboul apparaît relativement sereine, comme en témoignent le fonctionnement régulier des écoles et des hôpitaux ainsi que l’approvisionnement des marchés. A titre d’exemple, les lycées français et allemand de Kaboul enregistrent un taux élevé de fréquentation avec l’organisation de deux « équipes » par jour, permettant d’accueillir un plus grand nombre d’élèves. De même, l’hôpital pour enfants co-géré par la France et l’association la Chaîne de l’Espoir et la fondation Agha Khan fonctionne de façon satisfaisante, avec une équipe médicale qualifiée et des équipements techniques performants, permettant d’assumer 800 à 900 consultations par jour. Enfin, les marchés de la capitale sont correctement approvisionnés, ce qui donne à la vie civile toutes les apparences de la normalité. Dans le même temps, on assiste paradoxalement à une aggravation de l’insécurité, avec une multiplication par trois du nombre d’incidents au cours du 2ème trimestre 2008 par rapport au même trimestre de l’année précédente. Cette dégradation de la situation sécuritaire s’accompagne de l’apparition de nouvelles méthodes et formes de violences avec moins de situations de confrontation frontale et davantage d’actes de rébellion et d’attentats terroristes. Le nombre de victimes des forces alliées, en particulier américaines, a augmenté atteignant environ 10 soldats américains tués par mois au cours du dernier trimestre, soit une moyenne supérieure à celle constatée en Irak. En ce qui concerne les victimes du côté taliban, il apparaît que près de 80 % d’entre elles ne sont pas afghanes. Les forces alliées sont donc confrontées à une armée qui s’apparente fortement à une armée de djihad (« guerre sainte »). Enfin, on constate que l’insécurité gagne la capitale, jusqu’alors relativement préservée, comme l’a illustré l’attentat suicide très meurtrier, qui a frappé Kaboul le 7 juillet dernier, devant l’ambassade de l’Inde en Afghanistan. Cet attentat est à l’origine d’une quarantaine de morts et de plusieurs centaines de blessés ainsi que de très importants dégâts matériels (la moitié du bâtiment de l’ambassade indienne a été détruite). Il est malheureusement venu confirmer les craintes exprimées par le général Riley d’une extension des violences à la capitale où de plus en plus de caches d’armes sont découvertes. La situation sécuritaire en Afghanistan apparaît donc de plus en plus dégradée et suscite les plus vives inquiétudes.

En second lieu, le pays reste confronté au problème de la production de drogues, qui ne cesse de croître. Parallèlement à cette augmentation de la production, on assiste à un déplacement des cultures du Nord et l’Est du pays vers le Sud. Il semblerait que les gouverneurs des provinces jouent un rôle non négligeable dans cette évolution. On constate en effet que là où de nouveaux gouverneurs ont été nommés, comme dans l’Est de l’Afghanistan, la production de drogue a baissé. En revanche, dans d’autres provinces, cette production connaît un réel essor. Ainsi, la région du Helmand, située au Sud, représenterait 58 % de la production du pays. Au total, les flux liés à la production et au trafic de stupéfiants représenteraient environ 4 milliards de dollars par an, soit près du tiers du PNB de l’Afghanistan, ce qui est considérable. Ce fléau affecte gravement le pays avec une forte corruption qui concerne tous les échelons de l’Etat.

En troisième lieu, le régime actuel apparaît très affaibli. Si le président Hamid Karzaï a été confortablement réélu lors des dernières élections présidentielles, sa côte de popularité semble aujourd’hui en chute libre. Cette baisse de popularité est imputable au fort degré de corruption qui sévit dans le pays ainsi qu’au faible impact de l’aide humanitaire étrangère sur l’amélioration des conditions de vie des populations. Or, cette aide est très importante, comme l’attestent les 20 milliards de dollars annoncés lors de la dernière conférence des donateurs qui s’est tenue à Paris, en juin dernier. Alors que ces promesses d’aide sont largement médiatisées, la population s’interroge sur la destination effective de ces sommes.

Enfin, la situation actuelle de l’Afghanistan ne peut être appréhendée sans prendre en compte l’état de ses relations avec le Pakistan voisin. Le Pakistan – et notamment la zone tribale incontrôlée – apparaît en effet comme la base arrière des opérations menées par les insurgés en Afghanistan.

Le président a également rappelé les missions des forces françaises en Afghanistan, qui sont principalement au nombre de deux : d’une part, une mission de formation des officiers de l’armée afghane ; d’autre part, une fonction d’accompagnement des forces afghanes en opération. Par ailleurs, l’armée française offre un appui aérien à partir de la base militaire américaine, située à Kandahar. Au moment du déplacement effectué dans le pays avec M. François Loncle, le déploiement des contingents français supplémentaires venait tout juste de commencer dans la région de Kapisa, au Nord-Est de Kaboul. Deux bataillons vont être déployés dans deux camps de cette région, distants d’une cinquantaine de kilomètres.

Le président a enfin mis l’accent sur la montée en puissance des capacités de l’armée afghane qui comprend aujourd’hui entre 56.000 et 58.000 hommes et devrait atteindre l’objectif fixé de 80.000 hommes d’ici la fin de l’année (puis de 120.000 hommes l’année prochaine). Contrairement à la police afghane gravement corrompue, l’armée est constituée d’hommes compétents, qui savent se battre.

Sur le fondement de ce constat, le président a tiré les conclusions suivantes sur la situation en Afghanistan et ses perspectives d’évolution :

− Dans la mesure où la pacification du pays prendra encore du temps, l’accent doit être mis sur la lutte contre la drogue. Cette priorité doit être mise en œuvre en même temps que le développement de l’agriculture du pays. Pendant longtemps, les profits de la drogue ont été largement supérieurs à ceux tirés de l’agriculture – dans un rapport de 1 à 10 –, ce qui a eu un effet clairement désincitatif. A l’heure actuelle, la hausse des prix des denrées alimentaires contribue à changer la donne, avec un rapport qui ne serait plus que de 1 à 3. On constate, en outre, qu’il n’y a pas de corrélation directe entre production de drogues et pauvreté dans la mesure où les cultures ne sont pas systématiquement développées dans les régions les plus défavorisées. Dans ce contexte, il faut concentrer les efforts sur le développement agricole qui fait d’ailleurs l’objet, dans certaines provinces afghanes, d’investissements considérables de la part de certains pays du Golfe. La France aurait naturellement intérêt à participer à ce développement dans la mesure où elle dispose d’un savoir-faire reconnu dans le domaine agricole. Toutefois, les efforts de substitution ne peuvent suffire et doivent s’accompagner d’une stratégie d’éradication des cultures de pavot et de marijuana. Mais, la mise en œuvre de cette stratégie ne peut être le fait que des Afghans eux-mêmes et non des forces alliées. En revanche, on peut envisager l’élargissement de la mission de l’OTAN en Afghanistan à la lutte contre les narcotrafiquants ainsi qu’au démantèlement des laboratoires clandestins qui ont tendance à se multiplier dans le pays.

− Une priorité doit également être portée sur la montée en puissance des capacités de l’armée afghane et le transfert à l’armée afghane des compétences encore exercées par les troupes alliées, en particulier dans l’Est et le Sud du pays. Ce processus prendra du temps mais il est indispensable que les Afghans soient en mesure de prendre leur destin en main.

− Enfin, il importe de s’impliquer davantage dans la lutte contre les bases de repli des insurgés situés en territoire pakistanais, en particulier dans la zone tribale. Cette orientation n’est pas aisée à mettre en œuvre, en raison des intérêts contradictoires qui traversent le régime en place et, notamment les forces armées pakistanaises. Elle n’en reste pas moins nécessaire pour mettre fin aux entreprises de déstabilisation qui fragilisent l’Afghanistan. A cet égard, une implication plus forte des Nations unies dans le processus de pacification apparaît plus que jamais nécessaire.

M. François Loncle a déclaré partager les propos tenus par le Président Axel Poniatowski. Il a souligné des progrès notables dans la vie quotidienne des Afghans, en comparaison avec la situation observée lors du déplacement qu’il avait effectué en 2001 avec M. Charles Josselin, alors ministre délégué chargé de la coopération et de la francophonie, au moment même ou le Président Hamid Karzaï prenait ses fonctions. A Kaboul, la vie quotidienne semble en effet, autant que faire ce peut, reprendre ses droits, avec des commerces, des écoles et un hôpital. Les améliorations sont loin d’être anodines. En revanche, la situation sécuritaire se dégrade : les Talibans prospèrent dans un certain nombre de régions tandis que l’implication pakistanaise est une réalité. S’agissant de la lutte contre la drogue, M. François Loncle a soutenu la proposition du Président Axel Poniatowski visant à clarifier le mandat de la FIAS. Il a indiqué qu’au-delà des Talibans, nombreux étaient les notables locaux impliqués dans les trafics de drogue.

M. François Loncle s’est en revanche légèrement démarqué de l’analyse du Président Axel Poniatowski sur la popularité du Président Karzaï. Il a fait état de sondages contradictoires et souligné que si le Président Karzaï était certes en difficulté à Kaboul, il demeurait néanmoins populaire dans le reste du pays. Des sources américaines estiment même qu’il serait en position d’être réélu lors de l’élection présidentielle de 2009.

M. François Loncle a ensuite considéré qu’il était aujourd’hui très difficile d’estimer le temps nécessaire à la reconstruction et à la stabilisation du pays. Il faudra probablement dix à vingt ans, au cours desquels la population risque de plus en plus d’assimiler la présence militaire étrangère à une armée d’occupation, même si les forces françaises donnent moins que d’autres cette impression. Mais il faut bien admettre que ce sentiment se développe, quels que soient les mérites, les techniques et la valeur des militaires présents sur le terrain. Il a également témoigné de l’inquiétude des troupes françaises face à la nouvelle mission qui leur est confiée dans l’Est du pays, où il ne s’agit plus de former mais de combattre, ce qui veut dire qu’il y aura des pertes humaines. M. François Loncle a établi un parallèle avec le Canada, où l’Afghanistan fait régulièrement la une des journaux en raison des loures pertes subies par ce pays. Fragilisé, le Gouvernement canadien a dû réfléchir à une approche nouvelle.

En conclusion, il a salué l’accueil remarquable réservé par l’Ambassade de France, et en particulier par notre nouvel ambassadeur S. Exc. M. Jean de Ponton d’Amecourt. M. François Loncle s’est alors déclaré choqué par l’état de vétusté de l’Ambassade de France à Kaboul, ce qu’il avait déjà déploré en 2001 même si les choses étaient plus compréhensible à cette époque. Un effort de modernisation et de sécurisation est indispensable car la situation est aujourd’hui indigne de notre pays, surtout dans le contexte actuel. Il s’est en revanche félicité de l’existence d’un centre culturel français qui fonctionne très bien.

M. François Rochebloine a demandé où était vendue la drogue produite en Afghanistan et s’il ne fallait pas élargir la mission de l’OTAN à la lutte contre les narcotraficants. Il s’est par ailleurs interrogé sur les relations qu’entretient l’Afghanistan avec l’Iran.

Le Président Axel Poniatowski a répondu que la drogue transitait justement par l’Iran mais également, au Nord, par l’Ouzbékistan. Le combat commun contre la drogue a pour effet de rapprocher l’Iran et l’Afghanistan et de permettre une coopération satisfaisante, même si des réserves subsistent à l’égard du régime de Téhéran. Les relations sont en revanche très dégradées entre l’Afghanistan et le Pakistan.

M. Jean-Michel Boucheron a estimé que l’Occident se trouvait face à deux questions de fond, très difficiles. La première est liée au fait que les Talibans qui combattent sont entraînés et armés par les services secrets pakistanais. Ils se procurent leurs armes dans la région de Peshawar et si cette zone n’est pas contrôlée, c’est pour laisser fleurir le commerce de la drogue. Les plus grandes entreprises de fabrication de l’héroïne se situent sur une route où passent chaque jour les camions d’essence qui ravitaillent l’OTAN. Quel paradoxe ! Dans ces conditions, les forces occidentales vont-elles ou non se donner un droit de poursuite en territoire pakistanais pour atteindre le coeur du dispositif ?

La seconde question est relative à la réintégration possible d’un certain nombre de Talibans dans le système politique afin de redresser définitivement le pays. Car tous les Talibans ne sont pas en armes contre l’Occident et contre le Président Karzaï. Mais en réintégrant le système, ils importeront les modes de vie qu’ils imposent aux populations sous leur domination. Peut-on accepter que sur le plan sociétal, certains critères soient de nouveau dominants ? L’Occident combat-il seulement Al Qaïda ou également l’idéologie véhiculée par les Talibans ?

Le Président Axel Poniatowski a indiqué que sur place, nombreux sont les organisations non gouvernementales et les journalistes français qui considèrent que le temps est venu de redonner le pouvoir aux Talibans qui, ayant tiré les leçons du passé, ne commettraient plus les mêmes erreurs. Il s’est pour sa part démarqué de cette analyse qu’il a jugé extrêmement utopiste.

M. François Loncle a estimé que la question posée par son collègue Jean-Michel Boucheron était un vrai dilemme. Il s’est déclaré surpris par la position des ONG sur les Talibans, tout en reconnaissant que la question était posée. S’agissant de la situation des femmes, il a fait état d’un changement significatif par rapport à la situation qu’il avait observé en 2001 où 90 % des femmes portaient la burqa contre un peu plus d’un tiers aujourd’hui. Au regard de l’éducation et de la santé, le traitement des femmes s’est nettement amélioré ; mais les Talibans, eux, n’ont pas apporté la preuve qu’ils avaient complètement changé. Il ne faudrait pas revenir en arrière.

M. Jean Roatta a souhaité revenir sur les propos du Président Axel Poniatowski, et de M. François Loncle, qui affirmaient que la vie quotidienne à Kaboul pouvait être qualifiée de normale. Comment vit-on, économiquement et du point de vue sécuritaire, dans une grande ville comme Kaboul ? Quelles sont les impressions retirées du déplacement effectué ?

Le Président Axel Poniatowski a précisé que les remarques positives qu’il avait formulées sur le quotidien des kaboulis étaient principalement liées au décalage existant entre le constat présent et les images que l’on pouvait former a priori, de même que ses souvenirs de voyages précédents. Ainsi, la population de la ville est en nombre important, il existe un sentiment de vie non pas normale, mais, tout du moins, d’une surprenante intensité. Des femmes sont visibles dans la rue, certaines vêtues à l’européenne, bien que portant un voile. On ne peut pas, en somme, parler d’un simple « semblant » de vie normale.

Pourtant, dans le même temps, l’insécurité a progressé dans le pays, à l’Est et surtout au Sud. Le général Riley a, lors de son entretien, fait part de ses craintes concernant l’extension de ce climat d’insécurité jusque dans Kaboul. Celles-ci se sont avérées justifiées, dès le lendemain, puisque l’explosion d’une bombe devant l’ambassade indienne à Kaboul causait la mort de plusieurs dizaines de personnes.

Il est désormais très clair que les méthodes employées au Moyen Orient ont été importées en Afghanistan.

M. François Loncle a affirmé que le choix de l’ambassade indienne laissait planer des doutes sur l’identité des responsables de l’attentat. L’infiltration pakistanaise en Afghanistan semble avérée, et doit être combattue.

Le Président Axel Poniatowski a confirmé que l’influence pakistanaise en Afghanistan était apparente.

M. Lionnel Luca a demandé quel était, aujourd’hui, l’avenir du territoire afghan. Existe-t-il une solution uniquement militaire ? Par ailleurs, les raisons du maintien de la force internationale d’assistance à la sécurité sont-elles seulement celles habituellement avancées ?

Le Président Axel Poniatowski a indiqué qu’il lui paraissait difficile de trouver d’autres raisons au maintien de la force internationale. Les militaires présents sur place seraient, dans leur grande majorité, très heureux de pouvoir partir.

En revanche, il apparaît clairement que la solution au dossier afghan ne saurait être que militaire. Elle est liée, plus généralement, à la montée en puissance de l’Etat afghan, au travers, principalement, de son action dans le domaine de la sécurité. Des progrès ont été constatés à l’Est, mais la région Sud continue de poser des problèmes majeurs, qui concernent notamment l’action des gouverneurs qui gèrent ces provinces. La montée en puissance de l’Etat afghan est la meilleure des solutions, et passe par un renforcement des structures administratives centrales et décentralisées, ainsi que des structures militaires. Ces dernières ont une importance cruciale, tant les débuts de l’armée afghane sont prometteurs. Des membres de la force internationale d’assistance à la sécurité ont ainsi affirmé que la qualité au combat des soldats afghans était sans commune mesure avec celle, par exemple, des soldats irakiens.

M. François Loncle a rappelé que la montée en puissance de l’Etat afghan était une priorité absolue. Il faut donc lui donner les moyens de son ambition. L’armée afghane est ainsi capable de gérer 120 000 personnels, objectif de dotation qu’elle s’est aujourd’hui fixé.

En second lieu, il est clair que la solution ne peut être que militaire, et que celle-ci est nécessairement liée au développement économique du pays. Il y a déjà quatre réunions internationales sur ce thème, la première à Bonn et la plus récente à Paris. Au cours de cette dernière, des promesses de dons d’un montant inégalé ont été enregistrées. Le problème actuel est que ces sommes ne parviennent pas à leurs destinataires. La priorité, aujourd’hui, est donc d’améliorer ce système, qui est déjà largement alimenté par la générosité de la communauté internationale vis-à-vis de l’Afghanistan.

Enfin, M. François Loncle a affirmé que, pour lui, un départ de la force internationale serait une folie. La nouvelle administration américaine sera le principal élément de transformation de la situation sur le terrain, mais il est peu probable que les Américains quittent le pays.

Mme Nicole Ameline a rappelé que l’Afghanistan était un enjeu pour le monde, un test pour la paix. Perdre en Afghanistan reviendrait à perdre la face. La solution ne peut donc être que militaire. A ce titre, la non coopération sur le terrain est un problème majeur. Il faut toutefois avoir conscience du temps : sept années ne sont pas une durée considérable. Le rôle des Nations Unies doit, pour parfaire les accomplissements existant, être accru.

Mme Nicole Ameline a précisé qu’elle avait organisé, avec une Afghane, l’envoi de plusieurs milliers de radios à des femmes en Afghanistan, afin d’améliorer leur information. La personne qui l’a assistée dans cette tâche est morte, assassinée, il y a quelques mois. Par ailleurs, il ne reste plus une seule femme dans le gouvernement afghan. Ces éléments prouvent que les problèmes restent difficiles à régler sur le terrain.

Le Président Axel Poniatowski s’est interrogé sur le point de savoir si la cause des femmes ne constituait pas un élément qui, s’il est trop souvent mis en avant, ne risquait pas d’accroître la tension et favoriser les talibans.

M. Jacques Myard a souhaité revenir sur deux points. En premier lieu, la question de la drogue. Selon certaines informations, des avions de transport appartenant à des Etats étrangers ont été vus en train de charger, et de transporter, de la drogue. Il y a quelque chose de trouble dans ce trafic. La Commission des affaires étrangères devrait se pencher sur cette question.

En second lieu, on peut s’interroger sur le fait de savoir qui est, aujourd’hui, l’ennemi de la force internationale. Le discours officiel n’est pas clair à ce sujet. Sont évoquées, confusément, des questions relatives aux droits des femmes, à la gouvernance et au respect de l’Etat de droit, mais l’objectif global n’est pas évident. Il faut, en réalité, laisser les Afghans gouverner leur pays, et trouver un équilibre interne sans apport militaire externe, contrairement à ce qui est en cours aujourd’hui, où des étrangers participent à la formation de l’armée afghane. Les discours tenus, en ce moment, sur la situation en Afghanistan ressemblent beaucoup à ceux tenus par les gouvernements successifs, pendant la guerre d’Algérie.

Le Président Axel Poniatowski a indiqué qu’il était très probable que des autorités locales afghanes soient mêlées au trafic de drogue, ce qui expliquerait que la force internationale d’assistance à la sécurité veuille être associée à la lutte contre les narcotrafiquants et les laboratoires permettant la transformation des matières premières en drogue.

Concernant le rôle des forces internationales en Afghanistan, il a estimé que leur retrait provoquerait immédiatement le retour des talibans, ce qui aurait pour effet une nouvelle dégradation de la situation intérieure, notamment pour les femmes et, à n’en pas douter, le retour d’Al Qaïda en Afghanistan. Il est difficile de comparer les situations en Afghanistan et en Algérie, ce dernier cas ayant mis face à face un peuple colonisé et une puissance coloniale.

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Présentation par le Président Axel Poniatowski du bilan des travaux de la commission des affaires étrangères (juillet 2007-juillet 2008)

Le Président Axel Poniatowski a dressé un rapide bilan statistique des activités de la commission des affaires étrangères durant la session écoulée.

Il a notamment indiqué que la commission avait tenu un total de 79 réunions, au cours desquelles le ministre des affaires étrangères avait été auditionné 10 fois. Huit autres auditions de membres du gouvernement ont par ailleurs été organisées et de nombreuses réunions ont permis à la commission d’entendre des personnalités françaises ou étrangères : ministres, ambassadeurs ou hauts responsables.

Le président a indiqué que sur les quelque 115 lois approuvées depuis le début de la législature, 60, qui autorisent la ratification de traités ou de conventions, ont été étudiées par la commission. Bien que ces textes soient par nature plus rapides à instruire que les autres projets de lois, ces données traduisent une activité législative intense de la part de la commission.

Dans le cadre des activités d’information et de contrôle, le président Poniatowski a indiqué vouloir poursuivre les petits déjeuners de la commission, qui permettent des échanges informels. Il est revenu sur les missions d’information conduites par la commission, rappelant que quatre rapports avaient d’ores et déjà été publiés, qui ont porté sur la politique étrangère et de sécurité commune, sur les modifications apportées par le Traité de Lisbonne aux traités européens, sur la situation au Kosovo et sur le projet d’Union pour la Méditerranée.

Il a indiqué que la présentation du rapport de la mission sur la politique africaine de la France avait été reportée et il a souhaité que sa publication intervienne au plus tard devant la commission le 15 octobre.

Le président Poniatowski a rappelé que la commission des affaires étrangères avait rendu neuf avis budgétaires.

Le président a enfin présenté une liste de sujets possibles pour de nouvelles missions d’information, en précisant que l’étude des lycées français à l’étranger pourrait être le premier abordé.

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