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Commission des affaires étrangères

Mercredi 13 mai 2009

Séance de 10 h 30

Compte rendu n° 56

Présidence de M. Axel Poniatowski, Président

– Accord France-Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements (n° 1489) – Mme Martine Aurillac, rapporteure

– Examen du rapport d’information de M. Jean-Jacques Guillet sur la défense de l’environnement comme outil de la diplomatie française

– Accord-cadre France-Espagne sur les dispositifs éducatifs, linguistiques et culturels dans les établissements de l’enseignement scolaire des deux Etats (n° 1590) – M. Jacques Bascou, rapporteur

– Traité sur le droit des brevets (n° 1594) – M. Jean-Claude Guibal, rapporteur

Accord France-Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements (n° 1489)

La séance est ouverte à dix heures trente.

La commission examine, sur le rapport de Mme Martine Aurillac, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements (n° 1489).

Mme Martine Aurillac, rapporteure. Monsieur le Président, mes chers collègues, comme vous le savez, hormis les États appartenant à l’OCDE, les investisseurs ne sont pas protégés contre les risques politiques qu’ils encourent dans les pays d’accueil. La France a donc conclu toute une série d’accords bilatéraux et l’accord de promotion et de protection des investissements qui nous est soumis, conclu entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, en est l’illustration. Il a été signé à Dakar le 26 juillet 2007 en marge de la visite de M. Nicolas Sarkozy lors de son premier déplacement en Afrique subsaharienne et sa ratification par le Sénégal est intervenue le 19 janvier 2009.

Il a pour but de garantir un traitement juste et équitable des investissements réciproques, de les sécuriser contre les risques politiques, notamment d’expropriation et de nationalisation, d’assurer le libre transfert des revenus tirés de ces investissements et d’organiser le règlement des différends par le recours à l’arbitrage. L’ensemble de ces mesures permettra d’inciter les investisseurs français à développer des projets au Sénégal, dans une dynamique « gagnant-gagnant ». Ce sont plus de 250 entreprises françaises, sous forme de filiales, participations minoritaires ou entreprises individuelles qui sont présentes au Sénégal. Je voudrais rappeler que les investisseurs, plus encore que l’aide qui peut lui être apportée, sont un facteur essentiel pour le développement d’un pays.

Le cadre de liberté et de sécurité qu’offre l’accord de 2007, tant pour les investissements effectués après qu’avant son entrée en vigueur, s’inscrit dans une politique plus large de promotion des investissements mise en œuvre depuis plusieurs années par le Sénégal. A ce titre, il faut souligner que le pouvoir politique sénégalais, qui souhaite davantage être accompagné qu’être aidé, n’a pas hésité à faire appel à l’expertise du FMI par le biais de son adhésion volontaire à l’Instrument de soutien à la politique économique dit ISPE, cadre contraignant de suivi et d’évaluation des politiques économiques des pays demandeurs comprenant notamment une révision semestrielle de leur performance. L’amélioration de l’environnement des affaires est une partie importante du cadre de politique économique et financière pour les années 2007 à 2010 qui a été bâti avec les équipes du FMI.

Ceci devrait permettre au Sénégal de mener à bien sa stratégie de croissance accélérée, lancée en janvier 2005, qui vise à en faire un pays émergent grâce à un environnement des affaires de classe internationale.

Avant de vous présenter les principaux points de l’accord, qui reste un accord classique de promotion et de protection des investissements, proche des quatre-vingt dix autres que notre pays a déjà signés, je voudrais décrire rapidement le contexte actuel dans lequel les investisseurs sont accueillis au Sénégal, pays avec lequel nous avons des relations très fortes et très anciennes. N’oublions pas que Saint Louis fut française avant l’Alsace et envoya des Cahiers de doléances aux États généraux de 1789 et un représentant au Tiers État.

Pour attirer les investisseurs étrangers, comme alliés de son développement, le Sénégal a pris plusieurs mesures, comme la création d’agences autonomes pour les grands travaux. Parmi celles-ci, l’APIX (agence nationale pour la promotion des investissements et des grands travaux), rattachée à la Présidence de la république du Sénégal, a été chargée de piloter de grands projets tels que l’autoroute à péage Dakar-Diamniado, le nouvel aéroport international, le chemin de fer à écartement standard ou encore la Cité des affaires de l’Afrique de l’Ouest, qui sera située sur le site de l’aéroport actuel.

Ces grands chantiers, pour lesquels l’APIX procède par appel d’offre international, sont négociés sous forme de concessions dans le cadre de partenariats public-privé (PPP). Par exemple, le premier tronçon de l’autoroute Dakar-Diamniado a par exemple été confié à deux entreprises, l’une sénégalaise et l’autre chinoise tandis que le second l’a été à une entreprise portugaise. Quant à l’exploitation de la plateforme du nouvel aéroport, pour laquelle la France a également concouru, elle a été confiée à une entreprise allemande. C’est vous dire que, même si la France reste le partenaire privilégié du Sénégal, d’autres acteurs sont ici présents.

L’APIX intervient également comme guichet unique pour les investissements en centralisant les procédures administratives d’agrément Elle a d’ailleurs mis en place, en juillet 2007, le Bureau d’appui à la création d’entreprise (BCE) permettant la création d’une entreprise en 48 heures.

Autre élément d’incitation : la mise en place du nouveau Code des investissements de 2004 qui définit des secteurs d’activités éligibles (agriculture, pêche, élevage, tourisme, santé, infrastructures portuaire, aéroportuaire et ferroviaire, etc.) et un montant minimum d’investissement projeté pour bénéficier d’avantages douaniers et fiscaux (exonérations douanières, suspension de TVA crédits d’impôts) et d’importantes garanties (protection contre la nationalisation, transfert des capitaux, égalité de traitement).

Mais c’est aussi l’appartenance du Sénégal à des instances régionales qui participe à l’amélioration souhaitée de l’environnement des affaires. J’en citerai trois :

1. l’Union économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), qui offre un gage de stabilité monétaire et dont le Sénégal est actuellement le pays le plus performant.

2. l’OHADA, traité relatif à l’harmonisation du droit des Affaires en Afrique,

3. l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI), dont le titre IX traite essentiellement de la contrefaçon. En novembre dernier à Dakar, le Président Wade n’a pas manqué de rappeler combien la sécurité de la création et de l’innovation joue un rôle fondamental pour attirer ou au contraire freiner les investissements étrangers.

Enfin, l’État sénégalais a également signé plusieurs conventions internationales. Parmi celles-ci, on peut relever son adhésion à l'Agence multilatérale de garantie des investissements (Multilateral Investment Guarantee Agency -MIGA), filiale de la Banque mondiale et au CIRDI, Centre international de règlement des différends, pour les contentieux intervenants entre gouvernements et investisseurs étrangers.

C’est dans ce contexte qu’intervient l’accord de 2007 dont la ratification donne aux investisseurs privés la garantie d’un traité bilatéral. Il ne couvre pas les questions fiscales, traitées par une convention fiscale signée en 1974. Tous les investissements effectués avant ou après l’entrée en vigueur de l’accord de juillet 2007 sont concernés par ses dispositions. Cependant, seuls les différends nés après son entrée en vigueur doivent se conformer aux modalités de règlement prévues à l’article 8 portant sur l’arbitrage. Les investissements français bénéficiaient avant cet accord des protections éventuelles prévues par le Code de l’investissement sénégalais de 2004 ainsi que de ce qui est prévu tant par l’OHADA que par l’UEMOA.

L’article 1 pose la clause d’exception culturelle et linguistique classique dans plusieurs accords bilatéraux. L’article 3 pose le principe de l’encouragement et de l’admission par chaque partie des investissements effectués par les investisseurs de l’autre partie, auxquels un traitement juste et équitable doit être réservé ainsi que le prévoit l’article suivant. Ce traitement juste et équitable repose sur deux points essentiels : l’engagement des parties de faciliter les demandes de séjour, de travail et de circulation des entrepreneurs et la libre circulation des marchandises ainsi que la non entrave du transport et de la vente des produits de l’entreprise accueillie.

La protection des investissements contre la dépossession arbitraire est réglée par l’article 6. Aucune mesure d’expropriation, de nationalisation ou plus largement de dépossession ne saurait être prise si ce n’est pour cause d’utilité publique. Elle doit donner lieu à une indemnité.

Le libre transfert, au taux de change normal officiellement applicable à la date du transfert, est garanti par l’article 7, aussi bien pour les différentes catégories de produits de l’entreprise que pour une quotité appropriée de la rémunération des expatriés. Des mesures de sauvegarde relative aux transferts, d’une durée maximale de six mois, restent possibles lorsque les mouvements de capitaux menacent de causer un déséquilibre grave de la balance des paiements.

L’article 8 traite du règlement des différends. Si un accord amiable n’est pas trouvé au bout de six mois, le recours à l’arbitrage est de rigueur. Trois voies sont ouvertes selon le contexte : arbitrage par un tribunal arbitral ad hoc, arbitrage du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements, arbitrage par la Cour commune de Justice et d’arbitrage de l’OHADA.

Si cet accord, comme je l’ai souligné, reste un accord classique, il convient de mentionner un point de différence qui a d’ailleurs été un point de blocage partiel de sa signature jusqu’à l’obtention d’une rédaction consensuelle. L’article 12 introduit des dispositions relatives à l’environnement. Il stipule que « les Parties contractantes peuvent, lorsqu’elles élaborent ou modifient leurs lois et réglementations, adopter les mesures nécessaires pour protéger l’environnement, à condition que ces mesures n’entravent pas l’application des dispositions du présent accord ». Le Sénégal ne souhaitait pas inclure dans l’accord les conséquences éventuelles de mesures de régulation liées à l’environnement, alors même que des investisseurs français auraient pu en subir le préjudice. La position constante de la France sur ce point est qu’il n’est pas souhaitable d’exclure d’un accord de protection des investissements les différends résultant de dispositions environnementales, dispositions qui ont vocation à devenir de plus en plus fréquentes et qui, de ce fait, sont susceptibles de constituer un champ potentiel de préjudices et de contentieux. La rédaction de l’article 12 rappelle ainsi le droit de chaque partie à légiférer dans ce domaine, sans que ce droit puisse nier celui des investisseurs à être justement indemnisés des conséquences de nouvelles mesures environnementales. Dispositions hélas nécessaires, ne serait-ce que s’agissant de la pollution de la baie de Han, qui risque à terme de polluer toute la petite côte malgré l’aide, pendant trois ans, des Néerlandais.

Monsieur le Président, mes chers collègues, il faut saluer les efforts faits depuis des années par le Sénégal et noter, avec les instances internationales, la réelle amélioration de l’environnement des affaires sénégalais, même si beaucoup reste encore à faire, comme le soulignait un rapport récent du Conseil français des investisseurs en Afrique.

Le présent accord va dans le bon sens en offrant aux investisseurs de notre pays des garanties solides sur des points essentiels.

Sa ratification est d’autant plus importante que de grands projets lancés par l’État sénégalais sont en cours et qu’il convient d’accompagner nos entreprises en leur offrant un cadre de sécurité pour les investissements qu’elles pourraient y opérer.

Je vous recommande donc l’adoption du présent projet de loi.

M. Jean-Claude Guibal. Ce type d’accord est nécessaire pour inciter les investisseurs français à accroître leur présence au Sénégal. Est-il pour autant suffisant pour inverser la tendance actuelle de forte baisse des investissements français dans ce pays ? Vous avez cité la concurrence exercée par les Chinois ou les Allemands : ne sommes-nous pas, avec cet accord, face à une simple avancée en matière de formalisme administratif, très insuffisante par rapport aux enjeux ?

De plus, quels liens existent entre l’accord signé avec le Sénégal pour réguler les flux migratoires et assurer le co-développement, et le présent accord ?

Mme Aurillac, rapporteure. L’accord relatif à la maîtrise des flux migratoires et au co-développement, quoique relatif à des domaines de grande importance, n’a aucun rapport avec le présent accord, car il n’a pas d’effet juridique sur les investissements de ces deux pays.

Le présent accord n’est sans doute pas suffisant pour relancer les investissements français et les rétablir à leurs niveaux antérieurs. Toutefois, il répond à l’une des deux préoccupations majeures des investisseurs français concernant le Sénégal, qui se plaignaient traditionnellement de problèmes relatifs aux visas et de la sécurité de leurs investissements dans ce pays.

A court terme, un risque de réduction plus marquée des investissements français est probable, du fait de la baisse du prix des matières premières dans le contexte de crise économique mondiale. Pour autant, les stipulations du présent accord conservent toute leur utilité, puisqu’elles réduisent le risque des investissements.

M. Philippe Cochet. Quel type d’investissements sénégalais sont effectués en France ?

Mme Aurillac, rapporteure. Il n’y a pratiquement aucun investissement sénégalais en France.

M. Michel Terrot. Quels sont les effets de la crise financière au Sénégal ? La presse relaie des informations relatives à un effondrement des transferts financiers des Sénégalais émigrés vers leur pays d’origine. Or, cette manne, évaluée à environ 1 milliard de francs CFA par jour, est essentielle pour le pays.

De plus, l’instabilité chronique de la région de Casamance, encore accrue récemment par une vague d’attentats, rend encore plus problématique la relance économique du pays. Nos intérêts dans la zone, notamment hôteliers, sont d’ailleurs touchés.

Mme Aurillac, rapporteure. La crise est en train d’affecter assez gravement le pays, qui rencontre également des problèmes politiques du fait de la lourde défaite du parti au pouvoir lors d’élections locales récentes, qui ont notamment vu l’échec électoral du fils du président de la République du Sénégal à Dakar.

En Casamance, la paix, obtenue grâce à l’action des femmes qui ne supportaient plus la situation de guerre permanente, restait précaire. Peu après l’arrêt des combats les plus violents, des escarmouches ont continué d’avoir lieu, et sont devenues depuis quelques temps plus graves et plus fréquentes. Cette région ne restera jamais en paix.

Conformément aux conclusions de la rapporteure, la commission adopte le projet de loi (no 1489).

*

Examen du rapport d’information sur la défense de l'environnement comme outil de la diplomatie française.

La commission examine le rapport d’information sur la défense de l'environnement comme outil de la diplomatie française, présenté par M. Jean-Jacques Guillet.

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur. La commission des affaires étrangères s’est saisie des questions d’environnement depuis 2002, abordées notamment par le biais d’un avis budgétaire. Il a été décidé en 2008 de lui substituer un rapport d’information sur le lien entre diplomatie et environnement. Ce lien n’est pas nouveau, car il existe de nombreuses conventions internationales portant sur l’environnement, certaines étant fort anciennes.

Le rapport qui est présenté aujourd’hui concerne un thème rarement évoqué, à savoir l’action de la diplomatie française sur les questions environnementales. Car si notre pays agit de longue date en ce domaine, il a, comme beaucoup d’acteurs sur la scène internationale, pris la mesure de leur importance depuis les grands sommets des années 90. La France a pris conscience que l’environnement pouvait constituer un levier pour sa vision multilatérale des affaires internationales, ce qui la conduit parfois à prendre des positions contraires à celles des Etats-Unis, plus réticents que nous à certains concepts comme celui de la gouvernance mondiale.

L’environnement est le domaine dans lequel le traditionnel concept de souveraineté des Etats se heurte à une incontournable réalité : la globalité des phénomènes naturels. Les écosystèmes ignorent les Etats et leurs frontières. Pour lutter contre les atteintes à l’environnement, qui mettent en cause à terme la survie même de l’humanité, les Etats ne peuvent plus limiter leur action au cadre national. L’environnement a ainsi élargi le champ traditionnel de la diplomatie. Considérées comme marginales au début des années 80, les questions environnementales ont pris une importance croissante, avec la prise de conscience que des problèmes globaux exigeaient des réponses globales. Le réchauffement climatique, les cours volatils de l’énergie et des matières premières agricoles et minières, les atteintes à la biomasse comme à la biodiversité font de la protection de l’environnement une question qui relève désormais des rapports entre Etats, car la manière dont un Etat gère ses ressources ou dont ses citoyens se comportent altère le plus souvent l’écosystème d’autres Etats.

Le champ de la nouvelle diplomatie s’est donc élargi à une nouvelle matière, très complexe, aux aspects multiples, mais dont l’enjeu central est bien la conservation de la vie sur terre, qu’il s’agisse de l’humanité, des espèces animales et végétales et des écosystèmes dans lesquels nous vivons. Face à cette question fondamentale, il s’agit pour notre commission de savoir si notre outil diplomatique comme notre doctrine répondent de manière adéquate à l’ensemble de ces questions. En 2002, la mission interministérielle sur la lutte contre l’effet de serre ne réunissait que 6 agents… La situation a heureusement évolué depuis cette période.

La principale spécificité de la diplomatie sur les questions d’environnement réside en ce qu’elle s’exerce dans un cadre essentiellement multilatéral, compte tenu à la fois de la globalité et de la diversité des thèmes sur lesquelles portent les discussions. Du sommet de Rio en passant par celui de Kyoto (1997) ou de Johannesbourg (2002) – pour n’en évoquer que quelques-uns – les négociateurs ont discuté des grands principes du développement durable, de la protection des biotopes, de la diversité biologique, du changement climatique, de la gestion des océans, des ressources en eau, de la santé, du logement, de la condition des femmes, des populations autochtones, du rôle des acteurs politiques et sociaux, de l’agriculture et des forêts, démontrant l’impact réciproque qu’exercent l’un sur l’autre l’environnement et les activités humaines. Ces thèmes sont loin d’être de la compétence traditionnelle du ministère des affaires étrangères, même si les diplomates ont la capacité d’appréhender dans leur travail des sujets très variés.

Les négociations avec nos partenaires de l’Union européenne sont également très denses, l’environnement étant une politique communautaire. C’est ainsi la présidence française qui a obtenu un résultat non négligeable sur le paquet énergie – climat.

Outre le multilatéralisme, l’implication très forte des ONG caractérise la diplomatie sur l’environnement. Le Sommet de Rio réunissait déjà 2400 ONG, tandis que 17 000 personnes participaient à un forum parallèle. Ces chiffres se sont amplifiés à chaque grande conférence. Il ne faut en rien s’en étonner car ce sont ces ONG qui ont alerté l’opinion depuis des décennies sur les dégradations subies par notre environnement et qui ont développé des capacités d’expertises parfois supérieures aux organismes d’Etat. Certains de leurs militants ont parfois payé de leur vie leurs dénonciations.

Les ONG n’ont certes pas la légitimité politique que confère une élection au suffrage universel, mais la qualité de leurs travaux en fait des interlocuteurs précieux pour les pouvoirs publics. Ces derniers les associent souvent aux négociations multilatérales par des consultations préalables ou en les incorporant dans les délégations. L’originalité de la diplomatie sur l’environnement est de rassembler de multiples acteurs et non les seuls diplomates et experts gouvernementaux.

L’objet du rapport d’information est d’analyser :

• si l’outil diplomatique de la France a su s’adapter aux nouveaux enjeux et aux nouvelles méthodes exigés par les négociations internationales sur l’environnement ;

• si cet outil répond à nos ambitions : en effet, l’outil doit être au service de la doctrine et de la politique de l’environnement que nous souhaitons défendre sur la scène internationale ;

• enfin le rapport fait le point sur l’action de notre pays sur quelques uns des dossiers majeurs dans les négociations internationales : le climat et l’énergie, la biodiversité, la biomasse et les ressources halieutiques.

S’agissant de notre outil diplomatique, je rappelle que le gouvernement a entrepris une réforme du ministère des affaires étrangères pour prendre en compte tous les aspects de la mondialisation, et assurer la coordination des travaux du Quai d’Orsay avec le ministère en charge de l’Ecologie et du Développement durable. Par un décret du 16 mars 2009, a été institué au sein du MAE une direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, dont relèvent une sous-direction des biens publics mondiaux, une sous-direction énergie-climat et une sous-direction de la gestion des ressources naturelles.

L’objectif de cette direction générale est de travailler sur les problèmes environnementaux selon une approche transversale. La plupart des activités humaines dans les domaines économiques et sociaux comprennent en effet des volets liés à l’écologie ou au développement durable. La nouvelle organisation retenue par le Gouvernement s’inspire d’exemples étrangers, comme le Global Affairs Department du Département d’Etat américain ou de l’organisation de la Commission européenne, qui dans les deux cas associent la gestion du climat et de l’énergie.

L’effectif des agents qui se consacrent à cette mission est établi à une vingtaine en administration centrale, dans le cadre de cette nouvelle organisation. A ces agents, il convient d'ajouter les correspondants environnement des postes diplomatiques (96 actuellement) qui se consacrent entre autres fonctions au suivi de ces questions.

L’un des objectifs du rapport est d’évaluer si notre pays dispose des moyens humains adaptés pour défendre sa politique environnementale sur la scène internationale. Rien ne serait pire, dans un domaine qui met en jeu la survie de l’humanité, qu’un décalage entre les moyens et les enjeux. Un effectif d’une vingtaine d’agents à temps plein est un progrès indéniable, mais compte tenu de la multiplication des réunions internationales, il leur est impossible d'être physiquement présents à l’ensemble de ces rencontres. En revanche, le MAE peut utiliser son réseau diplomatique, très étendu, et demander à des agents des postes de le représenter à des réunions auxquelles il est impossible aux agents de l’administration centrale de se rendre. Il a donc développé, en liaison avec le ministère chargé de l’Ecologie, un réseau de correspondants environnement, présents dans 96 postes, y compris dans ses représentations permanentes auprès des organisations intergouvernementales.

Les correspondants environnement sont désignés par les ambassadeurs, en fonction de leurs compétences comme de leurs appétences. Ils peuvent être issus de l’ensemble des services des ambassades : chancelleries diplomatiques, services de coopération et d'action culturelle ou missions économiques... Le ministère entretient avec eux des relations régulières, sous la forme d'échange d'informations ou d'actions de formation. Chaque correspondant est tenu d’adresser annuellement à l'administration centrale un rapport détaillé sur l'état de l'environnement dans le pays où il est en poste. Les rapports sont réunis et font l'objet d'une synthèse publiée par le MAE.

L’ensemble de ce dispositif, que l’on peut qualifier de prometteur, optimise au maximum les ressources humaines d’un ministère qui a dû faire face à une réduction constante de ses effectifs depuis plusieurs années. Le Gouvernement s’efforce de doter notre diplomatie d’un réseau et d’un système capable de préparer nos positions et de les porter dans les négociations internationales, d’autant que les effectifs du Quai d’Orsay sont renforcés par ceux du ministère en charge de l’Ecologie, qui a opéré avant le MAE une réforme interne, pour regrouper l’ensemble des moyens consacrés à ses activités internationales. Le pôle international du ministère est au sein de la direction des affaires européennes et internationales et regroupe les moyens auparavant dispersés entre l’ancien ministère de l’Environnement, la direction des affaires économiques internationales du ministère des Transports et le bureau des affaires internationales qui, au ministère chargé de l’Economie, avait compétence sur l’énergie. La direction rassemble une centaine d’agents à plein temps, principalement répartis entre la sous-direction des questions multilatérales, la sous-direction des questions européennes et la sous-direction des affaires bilatérales.

Au total, un peu de plus de 200 agents se consacrent entièrement ou partiellement aux questions environnementales internationales, répartis entre les deux administrations centrales et les postes diplomatiques. La coordination entre le MAE et le ministère de l’Ecologie est à l’évidence la clé d’un bon fonctionnement du système mis en place par le Gouvernement, et il semble que celle-ci se déroule sans heurts.

S’agissant de la doctrine de la France en matière d’environnement, je rappelle que celle-ci est plus ou moins bien établie selon les domaines.

• Paquet énergie climat : La France est en pointe sur ce dossier en souscrivant aux objectifs européens de réduction de gaz à effet de serre et de recours croissant aux énergies renouvelables. Sa stratégie consiste à convaincre ses partenaires européens de la justesse de ses vues, car l’Union européenne a choisi de parler d’une seule voix sur la scène internationale dans la perspective du Sommet de Copenhague qui doit fixer de nouveaux objectifs sur le climat en décembre 2009.

• Biodiversité terrestre : La France, qui dispose d’une riche biodiversité terrestre et marine, tant en métropole qu’en outre-mer, a adopté une stratégie nationale en 2005, qu’elle décline à l’échelle internationale. Les outils de mise en œuvre de sa politique sont, outre l’administration centrale, le comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Notre pays est partie à plus de 40 conventions internationales sur ce sujet.

• Biomasse terrestre: La situation est différente. Alors que les menaces sur la biomasse sont aussi importantes que sur la biodiversité, ni notre pays, ni la communauté internationale ne semblent s’en préoccuper. La protection de la biomasse se limite juridiquement à la forêt, au travers de quelques textes. Il conviendrait que notre pays prenne des initiatives surtout au moment où il débat des mesures prises par le Grenelle de l’environnement.

• Biodiversité et biomasse marines : Là encore, la doctrine de notre pays doit être plus clairement établie. En raison de son domaine maritime, le deuxième du monde, la France abrite 10 % des récifs coralliens et 20 % des atolls de la planète, plus une superficie considérable de zone économique exclusive. A l’exception de quelques actions ponctuelles sur la lutte contre les pollutions, notre pays demeure dans une logique d’exploitation des océans, même s’il cherche à introduire des notions de développement durable dans la politique européenne de la pêche. Mais il n’existe aucun document de travail, aucune doctrine, qui appréhende l’environnement marin dans sa globalité et en tenant compte des liens entre littoral et grand large, ou entre espèces animales. La communauté internationale agit ponctuellement et il faut espérer que le Grenelle de la mer, qui a commencé ses travaux, aborde de nouvelles logiques.

Cette hétérogénéité doctrinale démontre que notre pays n’a pas encore pris pleinement la mesure de l’ensemble des problèmes environnementaux. Si le gouvernement veut bâtir une économie, et plus largement, une société respectueuse de la nature, il doit clarifier ses objectifs avant de les défendre sur la scène internationale. Il faut insister sur la nécessité d’un corps de doctrine, car il y a parallèlement nécessité d’agir rapidement et différemment. En effet, quel que soit le prisme par lequel nous prenons les problèmes, un seul constat s’impose : la dégradation de l’ensemble des milieux vivants.

• Energie – climat : Nous ne sommes qu’au début de notre action, bien que le Protocole de Kyoto date de 12 ans. Nous assistons à un réchauffement climatique dont les effets sont des cyclones en plus grand nombre, la salinisation d’espaces littoraux et l’acidification des océans, qui met en péril l’ensemble de la chaîne alimentaire.

• Biomasse et biodiversité terrestres : Les Nations Unies ont établi en 2005 une évaluation des écosystèmes qui a livré les résultats suivants : Au cours des cinquante dernières années, l’être humain a plus modifié les écosystèmes qu’au cours de toute l’histoire et a provoqué des pertes sans doute irréversibles pour la diversité biologique.  30 % des mangroves ont été détruites, ainsi que 20 % des récifs coralliens et 50 % des zones humides.  Le rythme d’extinction des espèces vivantes est 1000 fois plus rapide qu’aux époques antérieures de l’histoire. Enfin, le déboisement touche 6 millions d’hectares de forêts primaires chaque année.

L’atteinte à la biodiversité est souvent qualifiée de crise silencieuse. En effet, elle est le corollaire de l’amélioration du niveau de vie (demande de bois exotiques pour des parquets, assèchement de marais pour des logements, destruction des mangroves pour construire des complexes touristiques). Les statistiques sur le PIB par habitant ne mesurent pas la dégradation des écosystèmes, l’accentuation de la pauvreté à laquelle elle conduit pour des populations vivant au contact de la nature, et ne prennent pas en compte la valeur à long terme de la biodiversité. Il s’agit bien d’une crise silencieuse au sens où l’humanité n’a pas conscience de la destruction de la biodiversité et ne prend pas conscience que sa propre existence est en jeu.

• Biomasse et biodiversité marines : Le constat est analogue. L’état de la biomasse comme celle de la biodiversité des océans peut être qualifiée de catastrophique et met autant en péril les écosystèmes que les activités humaines, principalement la pêche. 80% des espèces dans l’océan Atlantique sont ainsi surexploitées. Des zones entières de pêches connaissent un effondrement de leurs stocks. Le problème est d’importance si l’on se souvient que la pêche représente 20 % des protéines de l’alimentation humaine et qu’un milliard d’hommes, essentiellement dans les pays de l’hémisphère Sud, dépendent directement ou indirectement de cette activité. La politique commune de la pêche n’a pas su concilier économie et environnement et, actuellement, rares sont les Etats qui prennent clairement position en faveur d’une gestion raisonnée des espaces marins du large, qui risquent eux aussi une surexploitation.

Enfin, j’évoquerai le lien entre formation des prix de l’énergie et environnement. Le rapport traite en effet cette question. Lorsque l’énergie est évoquée à l’échelle internationale, c’est le plus souvent sous l’angle de l’accès aux ressources et de leur acheminement vers les zones de consommation, et plus rarement sous l’angle environnemental. Les politiques étrangères des Etats-Unis, de la Russie et de la Chine sont ainsi analysées sous ce prisme. Le paquet énergie – climat  de l’Union européenne constitue l’une des rares exceptions à cette approche, même si la maîtrise de la consommation des entreprises et des ménages constitue également un moyen d’atténuer la pression politique que peuvent exercer les Etats fournisseurs.

Comme la quantité d’énergies fossiles consommée à travers le monde détermine le taux de pollution et la quantité de CO2 dissoute dans les océans, il pourrait être envisageable que les Etats s’entendent sur des prix qui préservent les intérêts des pays fournisseurs comme ceux des pays consommateurs tout en ayant un effet modérateur sur la consommation. Un simple constat permet d’affirme que nous sommes loin de ce schéma. Nous constatons au contraire une faible influence des Etats sur la formation des prix des énergies fossiles, ce qui limite leur action au niveau international. C’est toujours la loi de l’offre et de la demande qui prévaut. De ce fait, les politiques internes visant à orienter la demande retrouvent toute leur utilité, notamment la fiscalité.

En conclusion, j’estime qu’incontestablement, la France a pris la mesure du défi environnemental en mettant en place l’outil d’une politique transversale, qui assure la coordination du ministère des Affaires étrangères et de celui chargé de l’Ecologie.

En revanche, le dispositif nécessite d’être complété par un socle doctrinal plus clair, perceptible par l’ensemble des acteurs politiques comme par nos concitoyens, auxquels cette politique est destinée. Si notre pays a su dégager une stratégie sur le climat et l’énergie, il lui faut opérer la même démarche s’agissant de la biodiversité et de la biomasse, tant terrestres que marines. Notre pays a certes signé la plupart des conventions internationales dans ces domaines, mais compte tenu de leur caractère parcellaire, il pourrait prendre l’initiative d’une doctrine cohérente, dont l’objectif serait d’arrêter la diminution de la biomasse comme de la biodiversité. De la même manière qu’elle a su convaincre ses partenaires européens de relayer ses idées sur le climat, la France pourrait user de la même démarche sur ces deux questions.

La France pourrait également proposer à ses partenaires de l’OCDE de mieux intégrer les grands pays émergents (Inde, Chine, Brésil) au processus de conciliation de l’économie et de l’environnement. Jusqu’à présent, ces pays, qui émettent de fortes quantités de CO2, sont réticents à tout mécanisme qui entraverait leur développement économique, et sont peu éligibles aux mécanismes d’échanges de quotas, qui ont fait la preuve de leur utilité. La France a su convaincre ses partenaires, à l’occasion de la crise financière, que la réforme du système monétaire et bancaire international ne pouvait aboutir sans la participation de ces pays. Il lui faut prendre l’initiative d’une démarche analogue pour l’environnement, qui prenne en compte la réalité d’un monde multipolaire.

Le Président Axel Poniatowski. La France est très en pointe en matière de lutte contre le réchauffement climatique et a su exercer une influence importante dans les négociations internationales, ce qui n’est pas le cas en matière de protection de la biodiversité et de la biomasse. Dans ces deux domaines, nos principaux partenaires sont-ils plus avancés ? Ont-ils pris des initiatives ?

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur. Ils n’ont pas jusqu’ici véritablement eu de comportements différents de celui de la France. Au niveau fédéral, les Etats-Unis par exemple développement une approche centrée sur les enjeux de sécurité nationale, mais de nombreux organismes privés sont sensibles à ces différentes problématiques. Comme en matière de lutte contre le réchauffement climatique, certains Etats fédérés ont une approche dynamique en matière de biodiversité et de biomasse. Alors que la France possède le deuxième domaine maritime mondial, on pourrait s’attendre à ce qu’elle joue un rôle plus moteur dans ces domaines.

Mme Nicole Ameline. Je vous remercie, M. le Rapporteur, d’avoir mis l’accent non seulement sur la place que l’environnement devrait avoir dans notre diplomatie, mais aussi sur son importance dans le champ politique en général. Avez-vous le sentiment qu’il existe une volonté politique en France en faveur du redéploiement de moyens plus importants au service de la défense des dossiers environnementaux ? S’il est vrai que notre pays a besoin d’une véritable doctrine sur ces questions, il est également urgent de parvenir à une cohérence européenne. Il me semble que la défense de l’environnement pourrait constituer un thème sur lequel l’Europe est en mesure d’apporter une vraie valeur ajoutée au niveau international.

M. Jean-Louis Borloo a lancé l’idée d’un partenariat stratégique environnemental avec l’Afrique : pouvez-vous nous indiquer où en est ce projet ? Pourrait-il conduire à l’adoption par la France d’une approche plus régionale dans ses relations avec ce continent dans la mesure où c’est à cette échelle que les questions environnementales peuvent être traitées ?

Il me semble que la question des transferts de technologie vers les pays en développement devrait être au cœur des négociations de Doha. Ils sont en effet indispensables pour permettre à ces pays d’avoir une croissance économique respectueuse de l’environnement. Que peut-on attendre des négociations en cours sur ce point ? Qu’en est-il du Sommet de Copenhague ?

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur. Dans la mesure où c’est l’Union européenne qui mène la négociation à Doha pour les Etats membres, il est en effet nécessaire que soit élaborée une doctrine commune. Les transferts de technologie constituent un point clef. La préoccupation environnementale commence à être davantage prise en compte en Afrique, comme en Asie. Les interventions françaises par l’intermédiaire de l’Agence française de développement tiennent de plus en plus compte des enjeux environnementaux, privilégiant encore, il est vrai, la lutte contre le réchauffement climatique. Le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) intervient désormais plutôt en faveur de la protection de la biodiversité. La prise en considération de ces enjeux dans l’aide publique au développement doit absolument être accentuée dans l’avenir.

En ce qui concerne d’éventuels redéploiements de crédits, il faut souligner que, pour ce qui est du champ des négociations internationales, nous avons moins besoin de crédits supplémentaires que de davantage d’expertise. Notre pays est actuellement en train de se donner les moyens d’être représenté au sein de toutes les conférences internationales traitant de questions environnementales, alors que jusqu’ici nos moyens humains ne nous permettaient pas d’envoyer un représentant français dans toutes les instances internationales, ce qui avait souvent des conséquences dommageables. En revanche, il faut renforcer les moyens de mener des politiques internes en matière environnementale. Il est toujours plus facile de défendre des objectifs au niveau international, lorsque l’on s’efforce effectivement de les atteindre au niveau national.

M. Philippe Cochet. J’ai l’impression que notre rapporteur est relativement pessimiste quant à la prise en compte des enjeux environnementaux par les grands pays en développement rapide que sont l’Inde, la Chine ou le Brésil. Je serai plus positif en ce qui les concerne. En revanche, le renforcement de la prise en compte des enjeux environnementaux ne risque-t-il pas de nuire à la défense de nos intérêts commerciaux ?

M. Jean-Jacques Guillet, Rapporteur. Les problématiques environnementales ne présentent pas toutes le même degré d’urgence. Il est évident que la protection de la biodiversité et de la biomasse marines présente un degré d’urgence absolu. Nous ne devons pas oublier que la politique de l’environnement vise à modifier des comportements, et qu’in fine, cette modification pourrait avoir des conséquences commerciales à court terme. Il a toujours été nécessaire de parvenir à un équilibre entre les différents intérêts. Le Président Chirac avait lancé l’idée d’une organisation mondiale de l’environnement, destinée à faire contrepoids à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Ce projet n’a pas abouti mais il a conduit à envisager une transformation du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) en une organisation des Nations unies pour l’environnement (ONUE), idée qui n’a pas beaucoup progressé non plus. Pourtant, il est certain que la conciliation entre les différents enjeux serait facilitée s’il existait une véritable agence internationale en mesure de travailler avec l’OMC.

Je ne suis pas pessimiste en ce qui concerne les grands pays émergents, même si leur prise de conscience ne suit pas partout le même rythme. La Chine évolue rapidement sur ces questions, car elle rencontre de nombreux problèmes dont les causes sont environnementales. Le parti communiste chinois a même entrepris de mesurer l’efficacité de ses responsables à l’aulne de critères environnementaux. Un projet d’échange de quotas d’émission de CO2 au niveau chinois est même en cours d’élaboration. Le pays enregistre de rapides progrès sur le charbon propre, domaine dans lequel il sera bientôt en avance sur les pays occidentaux. L’Inde apparaît moins préoccupée par les questions de réchauffement climatique, mais plus sensible à la défense de la biodiversité, tandis que le Brésil commence à se préoccuper sérieusement de la préservation de ses forêts.

La commission autorise la publication du rapport d’information.

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Accord-cadre France-Espagne sur les dispositifs éducatifs, linguistiques et culturels dans les établissements de l’enseignement scolaire des deux Etats (n° 1590)

La commission examine, sur le rapport de M. Jacques Bascou, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne sur les dispositifs éducatifs, linguistiques et culturels dans les établissements de l'enseignement scolaire des deux États (n° 1590).

M. Jacques Bascou, rapporteur. Le Sénat a adopté en première lecture, le 7 avril dernier, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord-cadre entre la France et l’Espagne sur les dispositifs éducatifs, linguistiques et culturels dans les établissements de l’enseignement scolaire des deux États, signé à Madrid le 16 mai 2005.

À première vue, il s’agit d’un accord classique manifestant la bonne volonté réciproque des deux Parties, qui ne devrait pas appeler de longs commentaires. En réalité, cet accord-cadre mérite examen à plus d’un titre :

− il révèle les trajectoires divergentes du français et de l’espagnol en tant que langues dont les ambitions de rayonnement sont mondiales ;

− il illustre l’organisation administrative foncièrement différente qui prévaut de part et d’autres des Pyrénées ;

− il pose la question des moyens réellement consacrés à notre diplomatie d’influence ;

− enfin, il n’aborde pas la question des langues régionales, qui bénéficient d’un statut en Espagne.

Autant de thèmes que j’ai souhaité, dans mon rapport, aborder sans complaisance.

Présente sur les cinq continents, la langue française est la langue maternelle ou seconde de 181 millions de personnes à travers le monde et elle est en outre apprise par 82,5 millions de personnes. Notre pays mène, de façon ciblée par ensemble géographique, une politique de promotion du français qui s’apparente souvent à une lutte contre le déclin.

En revanche, la langue espagnole vit sans doute un développement sans précédent dans son histoire. D’après le classement établi par l’UNESCO, l’espagnol est aujourd’hui la quatrième langue la plus parlée après le mandarin, l’anglais et l’hindi. On estime à 400 millions le nombre de locuteurs espagnols dans le monde, dont 32 millions aux États-Unis, et ces chiffres ne cessent de croître.

Le contexte de l’accord-cadre que nous examinons est donc fort différent de part et d’autre des Pyrénées.

J’ajouterai un autre élément de contexte qui est aussi une divergence entre la France et l’Espagne : l’attitude de nos deux pays à l’égard des langues régionales. Attitude française de méfiance et de frilosité, alors que notre pays n’a toujours pas ratifié la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, pour cause d’inconstitutionnalité. Attitude décomplexée de l’Espagne en revanche, pays qui a ratifié la Charte, et où les langues régionales sont souvent « co-officielles ».

J’en viens maintenant à l’objet direct de l’accord-cadre : la promotion, dans les écoles, collèges et lycées français et espagnols, de la langue du voisin, au moyen de dispositifs spécialisés.

Dans l’enseignement primaire et secondaire espagnol, environ 9 500 professeurs enseignent le français à 1,2 million d’élèves, ce qui représente 16,2 % d’élèves apprenant le français au plan national, tous niveaux confondus. Dans l’enseignement secondaire, 98,5 % des élèves apprennent l’anglais, 38,4 % le français et 2,4 % l’allemand.

Autant dire que la diffusion de notre langue dans le système éducatif espagnol demeure préoccupante. Cela est dû notamment à l’abandon, au niveau national, dans la Ley Organica de Educacion de 2006, de l’obligation d’étudier une deuxième langue vivante. Cette situation est particulièrement visible aux Baléares (3,9 % d’élèves apprenant le français), au Pays basque (6,6 %), dans la Communauté de Valence (7,5 %) et en Catalogne (8,7 %). La proximité géographique n’est donc manifestement pas un critère de choix du français. D’une manière générale, le français est implanté de manière plus forte dans les communautés qui ne possèdent pas de langue co-officielle.

À ce déclin dans l’enseignement primaire et secondaire succède mécaniquement un déclin dans le supérieur, même si la réforme universitaire en cours vient également modifier la donne.

Quelque espoir subsiste néanmoins, par exemple avec le développement des sections bilingues de français dans le secondaire. Elles sont 261 en 2009, contre 99 en 2004-2005, et scolarisent plus de 20 000 élèves. Ces sections sont tout à fait le type de structures encouragées par l’accord-cadre franco-espagnol que nous examinons.

Côté français, la langue espagnole se porte beaucoup mieux dans les établissements scolaires. En particulier, dans le primaire et le secondaire, environ 14 000 professeurs enseignent l’espagnol à 2,25 millions d’élèves. Ces chiffres sont relativement stables. 40 % des élèves français des collèges et lycées apprennent l’espagnol, qui est la deuxième langue étrangère enseignée en France derrière l’anglais et devant l’allemand (avec 16 %) et l’italien (avec 7 %). 69 % des élèves français choisissent l’espagnol comme deuxième langue vivante.

Par ailleurs, les sections européennes et les sections internationales d’espagnol connaissent un succès croissant, qui témoigne là aussi de la pertinence de l’accord-cadre de 2005.

Enfin, j’évoque dans mon rapport les autres formes de coopération linguistique et culturelle existantes :

− les établissements scolaires dont chaque pays dispose chez son voisin ;

− la coopération linguistique et culturelle nouée directement entre les Communautés autonomes espagnoles et les rectorats d’académie en France ;

− le rôle des alliances françaises et des Instituts Cervantès pour la diffusion de la langue dans l’autre État.

Je vais vous présenter en quelques mots les stipulations de l’accord.

Les « dispositions générales » du chapitre I de l’accord-cadre prévoient l’implication de chaque Partie dans l’organisation du système scolaire de l’autre État aux fins de la coopération envisagée.

Le chapitre II définit la signification et la portée de la notion d’accord-cadre. En particulier, l’article 4 reconnaît la large compétence des Communautés autonomes espagnoles en matière d’éducation et vise à permettre un suivi des développements de leurs actions de coopération linguistique et culturelle par la mise en place d’une « commission bilatérale de suivi ». Par ailleurs, est affirmée la compétence de l’État central espagnol lorsqu’il s’agit de promouvoir l’espagnol en France ; trois domaines d’approfondissement de la coopération sont mentionnés à l’article 5, à savoir la formation continue des professeurs, le matériel pédagogique et les échanges entre élèves et entre enseignants des deux pays.

Le chapitre III solennise l’existence des sections internationales de langue espagnole dans les établissements français. Le chapitre V institue une commission bilatérale de suivi de l’accord-cadre. Le chapitre VII prévoit que l’accord « s’applique provisoirement à compter de sa signature », ce qui constitue l’une des originalités de cet accord : il s’applique depuis 2005.

Son objectif n’est en effet pas uniquement le développement futur d’une coopération technique déjà bien établie. Pour le gouvernement espagnol, ce texte a aussi pour but, politique, de « reprendre la main », en quelque sorte, face à l’action en ordre dispersé des Communautés autonomes ayant signé des accords administratifs sans grande considération pour les compétences de l’État central. De ce point de vue, l’accord-cadre prend des allures de « reconquête » gouvernementale.

Pour la Partie française, la reconquête est plus évidente : il s’agit d’enrayer le déclin de l’enseignement du français à l’étranger et de poursuivre la politique de développement de mécanismes innovants comme les sections bilingues, européennes ou internationales. À terme, comme le prévoit l’accord, il s’agit de développer les doubles diplômes, en particulier celui qui permettra prochainement de cumuler le baccalauréat français et le bachiller espagnol.

L’accord-cadre institue une commission bilatérale de suivi, composée de représentants des ministères des deux États chargés des affaires étrangères, de l’éducation et de l’enseignement supérieur. Réunie une première fois dès octobre 2005, cette commission a depuis lors été supplantée par la commission chargée de préparer la mise en œuvre du double diplôme ; on peut se demander si cette commission va être réactivée. Il me semble en tout cas essentiel que soit assuré un suivi attentif de la mise en œuvre de l’accord.

Le second élément, c’est la question des moyens concrètement déployés pour faire fructifier cet accord. Je me contenterai de citer les chiffres qui m’ont été fournis : en complément de l’apport des Communautés autonomes espagnoles, le budget français consacré en 2009 à la coopération éducative et linguistique en Espagne s’élève à 114 000 euros, dont 37 000 euros d’appui aux sections bilingues et à la coopération éducative, et 68 000 euros pour la promotion et la diffusion de la langue française et du plurilinguisme. Je vous laisse juges de l’adéquation de ces moyens aux ambitions poursuivies.

À l’heure où l’on ne peut que déplorer le recul des moyens d’intervention de la France en matière de diplomatie culturelle, cet accord-cadre en dégage quelques-uns, pour le renforcement de la coopération linguistique et culturelle franco-espagnole en milieu scolaire ; il mérite par conséquent d’être approuvé.

Au-delà, on aurait pu souhaiter qu’en intervenant dans le champ linguistique et scolaire entre la France et l’Espagne, un tel accord évoque la place des langues régionales qui ne sont pas, l’exemple de l’Espagne le montre, contradictoires avec la promotion des langues nationales.

Mme Nicole Ameline. Je m’interrogeais sur le fait que ce serait le trilinguisme, s’il était imposé en Europe, qui serait seul à même d’assurer la survie de langues nationales comme le français au niveau international. On voit en effet que la part des Etats où on apprend majoritairement l’anglais en deuxième langue, et qui suppriment l’obligation d’apprendre une troisième langue vivante, est croissante.

A-t-on des données sur le succès des démarches de coopération entreprises avec l’Allemagne sur ces sujets ? Si l’on veut défendre le français dans le monde, il faut en effet commencer par le défendre en Europe !

M. Jean-Paul Bacquet. Le taux d’élèves espagnols apprenant le français me paraît très faible, ce qui est surprenant et effrayant. Quelle proportion d’Espagnols parlent le français, et réciproquement ? La fin de l’immigration espagnole massive dans notre pays a probablement fait chuter le premier de ces deux chiffres. Or, ce sujet est important, car l’Espagne reste notre deuxième partenaire commercial. Au-delà de ces enjeux, M. Dominique Wolton, linguiste et philosophe reçu par notre Commission il y a deux ans, affirmait que le fait de parler plusieurs langues contribuait à défendre au mieux la langue française.

M. Jacques Bascou, rapporteur. Le chiffre de francophones en Espagne est effectivement passé de 2 millions à 300 000 en quelques décennies. En revanche, l’espagnol reste la deuxième langue la plus fréquemment apprise en France après l’anglais.

La partie espagnole ne comprend pas que l’Union européenne n’ait pas reconnu sa deuxième langue officielle, le catalan, qui est pourtant plus parlée que le danois ou le maltais. Je considère qu’il vaut mieux, pour le bien de la francophonie, être pragmatique qu’idéologue. En réalité, derrière le présent accord, on trouve les relations de notre pays avec les provinces espagnoles, et il est vrai que le fait qu’il y ait des langues co-officielles dans une province ne nuit pas à l’enseignement de langues étrangères.

M. Jean-Paul Bacquet. Dominique Wolton rappelait que l’espagnol pourrait devenir la première langue des Etats-Unis dans quelques années.

M. Michel Terrot. Pourquoi cet accord a-t-il été ratifié cinq ans après sa signature ? Comment expliquer ce retard ?

M. Jacques Bascou, rapporteur. Il n’y a pas d’explication particulière si ce n’est la lenteur traditionnelle de la procédure préalable à l’examen des projets de loi de ratification. La ratification du présent accord a d’ailleurs une valeur relativement symbolique, puisque ses principales dispositions sont déjà en vigueur.

Les sommets franco-espagnols de janvier 2008 à Paris et d’avril 2009 à Madrid ont sans doute permis de relancer les procédures internes, à la demande instante de nos partenaires. Le Gouvernement espagnol entend en effet reprendre la main, dans le domaine des langues, face à la multiplication d’accords passés dans ce domaine par les provinces, faisant usage de leurs compétences en matière de coopération décentralisée.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission adopte le projet de loi (no 1590).

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Traité sur le droit des brevets (n° 1594)

La commission examine, sur le rapport de M. Jean-Claude Guibal, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du traité sur le droit des brevets (n° 1594).

M. Jean-Claude Guibal, rapporteur. La propriété intellectuelle revêt une importance toute particulière dans une économie moderne. En permettant au créateur ou à l’inventeur de disposer d’un monopole sur sa création ou son innovation grâce au dépôt de titres de propriété intellectuelle, elle soutient le développement des entreprises innovantes et encourage l’emploi dans tous les secteurs de l’économie. Le brevet est ainsi le moyen de protéger, pendant vingt ans, une invention technique.

Dans une économie ouverte, il est souvent nécessaire de protéger une invention dans plusieurs pays, ce qui suppose l’obtention d’autant de brevets, en général à l’issue d’autant de procédures différentes. C’est principalement pour limiter les difficultés liées à ces différences qu’a été adopté à Genève, le 1er juin 2000, par cinquante-huit Etats membres de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) le traité sur le droit des brevets, dont la portée est en fait limitée aux formalités liées à l’obtention des brevets.

Notre commission a examiné, en septembre 2007, la révision de la convention sur la délivrance des brevets européens : nous avons pu, à cette occasion, nous familiariser avec le droit des brevets au niveau international. Je rappellerai donc seulement que les effets d’un brevet sont circonscrits au territoire de l’Etat pour lequel la protection a été demandée et accordée et que, pour obtenir la protection d’une invention sur le territoire de plusieurs Etats, il faut en principe déposer un brevet dans chacun d’entre eux. Le système du brevet européen permet néanmoins d’obtenir la protection d’une invention par brevet dans tous les Etats qui y sont parties (ou dans certains d’entre eux) sur la base d’une seule demande et suivant une procédure unique de délivrance, gérée par l’Office européen des brevets (OEB). Le brevet européen se scinde en fait ensuite en autant de brevets nationaux que de pays désignés.

En outre, depuis la signature, le 19 juin 1970, du traité de coopération en matière de brevets (patent cooperation treaty – PCT –), l’OMPI gère aussi les demandes internationales de brevets : une seule demande peut être déposée, l’OMPI se chargeant de la transmettre aux autorités compétentes de chacun des pays parties au traité (ou à un office régional, tel que l’OEB) qui sont désignés dans la demande ; chaque organe compétent la traite alors selon ses règles propres.

La négociation du traité de coopération en matière de brevets comme la mise en place du brevet européen répondaient d’ores et déjà, il y a une quarantaine d’années, au souci de faciliter le dépôt des demandes de brevets dans plusieurs pays en constituant une forme de guichet unique.

Au cours des vingt dernières années, d’importants efforts ont été réalisés pour simplifier le droit des brevets, d’abord au niveau de l’OMPI – ce qui est l’objet du traité sur le droit des brevets, qui nous intéresse aujourd’hui –, puis, en partie en conséquence, au niveau européen, les Etats parties à ces différents mécanismes devant ensuite mettre leurs normes nationales en conformité avec les stipulations internationales.

Au départ, l’OMPI avait pour ambition d’élaborer un traité couvrant un champ d’harmonisation large : formalités liées à l’obtention des brevets, mais aussi dispositions relatives au droit substantiel des brevets, c’est-à-dire aux conditions de validité d’un brevet. Comme, dès 1991, des divergences de vues sont apparues sur des questions essentielles, il a été décidé, en 1995, de promouvoir dans un premier temps un traité visant à harmoniser les exigences de forme prévues par les procédures nationales et régionales en matière de brevet. Le traité sur le droit des brevets (patent law treaty – PLT –), adopté le 1er juin 2000 par une conférence diplomatique, est le résultat de ces efforts. Il est entré en vigueur le 28 avril 2005, trois mois après le dépôt du dixième instrument de ratification ou d’adhésion.

Ses principales dispositions portent sur :

– la simplification des formalités, en particulier celles devant être accomplies pour obtenir une date de dépôt de la demande de brevet ;

– des mécanismes de sauvegarde permettant d’éviter la perte de droits du fait de l’inobservation d’un délai ou d’autres conditions de forme ;

– des dispositions institutionnelles qui permettent de créer une assemblée composée des Etats contractants, chargée de traiter des questions de mise en œuvre pratique du traité (établissement des formulaires de dépôt par exemple).

Sur le premier point, le traité impose aux offices de propriété intellectuelle d’attribuer une date de dépôt à une demande de brevet dès lors que le déposant a fourni l’indication explicite ou implicite selon laquelle les éléments sont censés constituer une demande de brevet, des indications permettant de l’identifier ou d’entrer en relation avec lui, et une description de l’invention. Si l’office peut exiger que les deux premiers éléments soient donnés dans une langue qu’il accepte, il ne peut refuser une demande dont la description n’est pas donnée dans une telle langue, dès lors qu’une traduction lui est fournie dans un délai de deux mois. Le déposant dispose d’un délai de la même durée pour transmettre tout autre élément manquant.

Un office ne peut exiger davantage, en termes de forme et de contenu de la demande de brevet, que ne le font les normes internationales en vigueur. Les cas dans lesquels le recours à un mandataire peut être exigé sont précisés.

Enfin, aucune Partie contractante n’est tenue ni d’accepter le dépôt des communications sous forme électronique ou par des moyens de transmission électronique, ni d’exclure le dépôt des communications sur papier.

Pour ce qui est des mécanismes de sauvegarde, plusieurs articles du traité visent à éviter que le titulaire d’un brevet ne se trouve privé de la validité de celui-ci sans un motif sérieux.

Ainsi, en l’absence d’intention frauduleuse, un brevet ne peut être révoqué ou annulé pour le manquement à n’importe quelle condition de forme (mais seulement pour le manquement aux plus importantes de ces conditions), et, en tout état de cause, sans que le titulaire ait pu auparavant présenter ses observations.

Les offices sont contraints à accorder un sursis en matière de délais : il peut prendre la forme d’une prorogation de délais ou de la poursuite de la procédure.

Dans le cas où un délai n’a pas été respecté, doit aussi être prévu le rétablissement des droits du titulaire ou du déposant lorsque leur perte est la conséquence directe de l’inobservation du délai. Ce rétablissement est de droit quand l’office a constaté que la diligence requise a été exercée ou que le retard n’était pas intentionnel.

De même, une revendication de priorité peut être corrigée ou ajoutée ou un droit de propriété restauré si la requête en est faite sous certaines conditions de délai.

Le droit français a été mis en conformité avec les stipulations du traité par l’ordonnance du 11 décembre 2008 relative aux brevets d’invention et aux marques, prise sur le fondement d’une habilitation figurant à l’article 134 de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008. Les modifications apportées par l’ordonnance concernent les règles afférentes à l’attribution d’une date de dépôt pour les brevets et à la procédure de recours en restauration en matière de brevet.

Etant donné les avantages que l’harmonisation des formalités liées à l’obtention d’un brevet procure en termes de coût et de fonctionnement pour toutes les parties contractantes, je vous recommande l’adoption du présent projet de loi.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission adopte le projet de loi (no 1594).

La séance est levée à douze heures quinze.

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