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Commission des affaires étrangères

Mercredi 15 septembre 2010

Séance de 10 h 15

Compte rendu n° 91

Présidence de Mme Martine Aurillac, vice-présidente

– Vanuatu : accord relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2586) – M. Eric Raoult, rapporteur

– Pays-Bas : ratification de la convention relative à l’assistance mutuelle et la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d’appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l’Île de Saint-Martin (n° 2708) – M. Eric Raoult, rapporteur

– Suisse : approbation de l’avenant en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (n° 2338) – M. Claude Birraux, rapporteur

– Uruguay : accord relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2585) – M. Alain Néri, rapporteur

– Petites Caraïbes : échange de renseignements en matière fiscale : accord avec Antigua-et-Barbuda (n° 2587), accord avec Grenade (n° 2588), accord avec Sainte-Lucie (n° 2589), accord avec Saint-Vincent-et-les-Grenadines (n° 2590) et accord avec Saint-Christophe-et-Niévès (n° 2591) – M. Loïc Bouvard, rapporteur

La séance est ouverte à dix heures quinze.

M. Jean-Paul Lecoq. Nous venons de siéger en séance publique pendant près de seize heures et la séance n’a été levée, dans des conditions de vive tension, qu’à 9 heures 40, il a donc environ une demie heure. Dans ces conditions, il me semble qu’il convient d’ajourner la réunion de la commission des affaires étrangères, comme c’est le cas des réunions de plusieurs autres commissions. J’observe d’ailleurs que seul un petit nombre des rapporteurs qui doivent intervenir dans cette réunion sont présents.

A la lecture du programme de travail de l’Assemblée, on pouvait s’attendre à ce que la séance d’hier soir s’achève à 1 heure 30 et que l’on reprenne ce matin à 9 heures 30. La Présidence a décidé qu’il en serait autrement, ce qui n’était pas prévisible ; c’est pourquoi nous ne pouvions pas demander dès hier après-midi le report de la réunion de ce matin. Vu la situation actuelle, ce report est nécessaire.

Comme vous le savez, le groupe GDR a demandé à ce que le projet de loi relatif à l’accord fiscal avec la Suisse fasse l’objet d’une discussion en séance publique, laquelle doit avoir lieu demain après-midi. Mon groupe a déposé un amendement de suppression de l’article unique de ce projet de loi, qui sera donc discuté dans l’hémicycle. Pour ma part, je n’assisterai pas à la présente réunion, si elle se tient en dépit des circonstances.

Mme Martine Aurillac, présidente. Même si la durée exceptionnellement longue de la séance d’hier soir ne peut être imputée à la majorité, elle était en effet imprévisible.

Il est vrai que tous nos rapporteurs ne sont pas encore présents, mais ils ont confirmé leur venue.

Surtout, deux des projets de loi que nous avons à examiner ce matin figurent à l’ordre du jour de la séance publique de demain ; il n’est donc pas possible de remettre leur examen à plus tard. Il aurait été intéressant d’entendre dès aujourd’hui en commission les arguments du groupe GDR sur le projet de loi relatif à l’accord fiscal avec la Suisse, mais le groupe est naturellement libre de ne pas participer à notre réunion.

*

Vanuatu : accord relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale

La commission examine, sur le rapport de M. Eric Raoult, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Vanuatu relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale – n° 2586.

M. Eric Raoult, rapporteur. L’accord avec le Vanuatu que nous examinons s’inscrit dans la liste des accords que la France a signés ces derniers mois et dont nous avons déjà eu l’occasion de débattre dans cette commission.

Le Vanuatu, lointain archipel mélanésien composé de 83 îles et d’une population de quelque 215 000 habitants dont 65 % vivent d’agriculture et de pêche de subsistance à l’échelle de petits villages. En 1904, le Vanuatu, alors encore les Nouvelles Hébrides, a fait l’objet d’un conflit d’intérêt entre la France et le Royaume-Uni qui décidèrent finalement de mettre en place une administration conjointe. Le Vanuatu sera d’ailleurs la seule colonie gérée par deux puissances coloniales, jusqu’à son indépendance le 30 juillet 1980.

Le Vanuatu est une petite économie puisqu’en 2009 le PIB s’élevait à seulement 554 millions de dollars. Le pays a relativement bien résisté au ralentissement économique mondial, en maintenant une croissance régulière grâce aux bons résultats du secteur touristique qui contribue à hauteur de 40 % du PIB et emploie près de 15 % de la population active.

Pour autant le Vanuatu demeure parmi les cinq Pays les Moins Avancés d’Océanie. L’assistance des bailleurs de fonds est donc essentielle. Le dixième FED prévoit de consacrer 21,6 millions d’euros pour des projets concernant la création d’emplois et le développement de ressources humaines. Le pays bénéficie aussi de l’instrument communautaire de régulation STABEX et de prêts de la Banque Européenne d’Investissement. L’ensemble de l’aide dont bénéficie le Vanuatu est principalement dirigé vers le secteur productif et le développement des infrastructures de santé.

Le secteur financier est de petite taille puisqu’il ne représente que 8 % du PIB, mais il est vital pour l’économie du pays. Comme on peut s’en douter, le secteur financier et bancaire du Vanuatu dépend très largement des investissements d’origine étrangère.

L’absence d’impôt sur le revenu, de retenue à la source, de droit de succession et de contrôle de change font du Vanuatu un pôle d’attractivité important pour l’évasion fiscale. Cette attractivité se traduit par d’importants transferts en devises étrangères ; au début de l’année 2010, les fonds de dépôts étaient estimés à 238 millions d’euros en devise nationale et presque autant en devises étrangères. Actuellement, on dénombre 2226 compagnies internationales enregistrées au Vanuatu mais qui ont vocation à n’opérer qu’à l’étranger. D’après les informations qui m’ont été transmises, la Direction générale des finances publiques estime à soixante le nombre de foyers fiscaux français résidents au Vanuatu qui déclarent des revenus imposables en France sur les quelque 1600 Français qui y sont recensés.

Malgré l’éloignement géographique et la petite taille du marché, il est à noter que la présence économique de la France au Vanuatu est importante. Les investissements directs étrangers français s’élevaient à environ deux millions d’euros en 2006, positionnant ainsi la France au troisième rang des investisseurs étrangers avec 14 % de la valeur totale des investissements, derrière l’Irlande et l’Australie. La présence d’entreprises françaises est notable, et les anciens monopoles dans l’électricité, l’eau et les télécommunications sont toujours, totalement ou partiellement, détenus par des intérêts français avec des entreprises comme Suez ou encore France Télécom. La France est aussi présente dans le secteur bancaire par l’intermédiaire de la BRED Banque Populaire, implantée depuis 2008. Cette présence a permis de faire fonctionner la concurrence puisque après seulement trois ans dans le pays la BRED Banque Populaire représente 20 % de part de marché.

L’accord signé entre nos pays est similaire à ce que nous avons déjà examiné lors des séances précédentes consacrées à ces questions de lutte contre les paradis fiscaux, puisqu’il est directement inspiré du modèle de l’OCDE. Cependant, comme les autres que la France a signés, il comporte quelques améliorations notoires par rapport à ce modèle. L’article 3 précise que ce sont les impôts existants qui sont concernés par l’accord, sans les énumérer. L’accord impose aux Parties d’adapter le cas échéant leur législation pour garantir l’effectivité de l’échange d’informations, lesquelles doivent être disponibles, l’administration requise devant y avoir accès et être en mesure de les transmettre. L’article 9 stipule que le remboursement à la partie requise des frais extraordinaires par la partie requérante ne constitue qu’une faculté. Enfin, la quatrième amélioration concerne les sociétés cotées puisque le présent accord ne fixe pas de limite dans l’échange d’informations relatives à ces structures.

A ce jour, le Vanuatu n’a pas notifié l’accomplissement de procédures internes requises pour l’entrée en vigueur de ce projet de loi. Le Vanuatu n’a pas non plus fait de véritables efforts pour participer à la régulation du système financier international et à la lutte contre les « paradis fiscaux » : selon les informations qui m’ont été communiquées, le Vanuatu ne signe pas très rapidement, à la différence d’autres juridictions. Sans doute faut-il aussi tenir compte, en partie, des faibles capacités administratives de l'Etat. En tout cas, comme nous l’avons tous souvent dit dans cette commission, la question de l’effectivité de ces dispositions se pose et on ne peut qu’appeler à la vigilance.

Malgré tout, compte tenu des dispositifs prévus, notamment de la revue par les pairs de l’OCDE, je considère que ce projet de loi est une avancée dans la lutte contre les « paradis fiscaux » et l’évasion fiscale. Néanmoins, compte tenu de l’importante présence française au Vanuatu, nous nous devons d’être particulièrement vigilants.

Je vous invite donc, malgré tout, à approuver ce projet de loi, cet accord contribuant à la cohérence du système international de lutte contre la fraude fiscale.

M. Jean-Paul Dupré. Monsieur le rapporteur, vous nous avez indiqué que quelques centaines de Français résidaient au Vanuatu. Pourriez-vous nous décrire les relations commerciales bilatérales et notamment préciser quels types de produits la France importe du Vanuatu ?

M. Jean-Claude Guibal. Vous nous avez décrit le Vanuatu comme un petit archipel sous-administré. Cet accord a-t-il un but purement préventif ou cet Etat constitue-t-il un paradis fiscal ? Quelles sont ses relations avec la Nouvelle-Calédonie ?

M. Michel Terrot. Hormis les entreprises bancaires françaises, dont vous nous avez parlé Monsieur le rapporteur, y a-t-il d’autres investisseurs français significatifs au Vanuatu ?

M. Jean-Paul Bacquet. Observe-t-on un phénomène migratoire depuis le Vanuatu vers la Nouvelle-Calédonie, comme il en existe un entre les Comores et Mayotte ? Si c’est le cas, observe-t-on des flux financiers en retour ?

M. Eric Raoult, rapporteur. On compte environ 1 600 Français ou bi-nationaux au Vanuatu. Lorsque l’indépendance a été proclamée, un certain nombre de familles ont quitté le nouvel Etat pour se réfugier en France. Le Vanuatu a connu des difficultés politiques jusqu’au début des années 2000.

Les exportations françaises vers le Vanuatu représentent 10,7 millions de dollars et les importations provenant du Vanuatu sont limitées à 2 millions de dollars. Elles consistent principalement en poissons, coquillages et objets artisanaux. Suez et France Télécom sont présentes dans l’archipel.

Celui-ci a des relations de proximité avec la Nouvelle-Calédonie qu’il faudrait développer. Il faut néanmoins avoir conscience du fait que les deux archipels sont en fait très éloignés et que leur civilisation et leur niveau de développement sont très différents. La Nouvelle-Calédonie est peu concernée par la question de l’immigration, les problèmes qui s’y sont posés pendant les périodes d’instabilité politique ayant concerné les flux de populations venues de métropole mais pas les flux migratoires régionaux.

M. François Asensi. Je fais part de l’abstention des députés communistes du groupe GDR sur ce projet.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (no 2586).

Pays-Bas : ratification de la convention relative à l’assistance mutuelle et la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d’appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l’Île de Saint-Martin

La commission examine, sur le rapport de M. Eric Raoult, le projet de loi autorisant la ratification de la convention entre la République française et le Royaume des Pays-Bas, relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d'appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l'Ile de Saint-Martin (n° 2708).

M. Eric Raoult, rapporteur. Face au développement et à la diversification des trafics illicites dans les Caraïbes, la France et les Pays-Bas se sont entendus pour renforcer leur coopération douanière sur l’île de Saint-Martin qui présente la particularité de partager sa souveraineté entre ces deux Etats. Alors que la coopération douanière franco-néerlandaise est régie par la réglementation européenne, une convention était cependant nécessaire en raison de la différence de statut juridique au regard du droit communautaire des parties française et néerlandaise de l’île. Celle-ci a été signée le 11 janvier 2002 et complétée par un échange de lettres des 4 et 18 novembre 2008 pour remédier à une difficulté constitutionnelle.

Saint-Martin est une île du nord-est des Antilles située à 250 kilomètres au nord de l’archipel de la Guadeloupe et 240 kilomètres à l’est de Puerto-Rico, relevant de la souveraineté de la France au nord de l’île et des Pays-Bas au sud. La convention de Concordia, signée le 23 mars 1648, a entériné le partage de l’île en deux zones de souveraineté.

Pour la partie française (56 km2), lors du référendum du 7 décembre 2003, l’évolution de la commune de Saint-Martin, qui faisait partie de la Guadeloupe, en collectivité d’outre-mer a été largement approuvée.

Depuis la loi organique n° 2007 223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre mer, Saint Martin constitue donc, sur le fondement de l’article 74 de la Constitution, une collectivité d’outre mer de la République. La collectivité d’outre-mer de Saint-Martin exerce les compétences actuellement dévolues aux communes, aux départements et aux régions.

Saint-Martin demeure soumise au statut de région ultra périphérique de l’Union européenne. Cette situation lui permet donc de bénéficier des fonds structurels communautaires, tandis que le droit communautaire primaire et dérivé s’y applique intégralement.

Pour la partie néerlandaise (34 km2), Sint-Maarten constitue un territoire faisant partie de l’Etat autonome des Antilles néerlandaises, ce dernier étant composé d’un ensemble de 5 îles principales situées dans la mer des Caraïbes : Bonaire, Curaçao, Saba, Saint-Eustache et Sint-Maarten.

Actuellement, le Royaume des Pays-Bas se compose de trois territoires possédant un statut équivalent, celui de pays, à savoir les Antilles néerlandaises, Aruba et les Pays-Bas. A l’heure actuelle, le Royaume des Pays-Bas est engagé dans un projet de réforme de sa structure étatique qui devrait être finalisé d’ici le 10 octobre 2010 et qui prévoit l’octroi du statut de pays aux deux plus grandes îles des Antilles néerlandaises, à savoir Curaçao et Sint-Maarten. Le Royaume comptera donc quatre pays autonomes : les Pays-Bas, Aruba, Curaçao et Sint-Maarten ; les îles de Bonaire, Saba et Saint-Eustache devenant quant à elles des îles du Royaume.

Contrairement à Saint-Martin, Sint-Maarten relève, à l’instar des autres îles des Antilles néerlandaises, du statut des pays et territoires d’outre mer (PTOM). Sint-Maarten n’appartient donc pas au territoire de l’Union. Il en résulte que ce territoire est exclu du champ d’application territorial des traités et du droit communautaires.

La convention, soumise à la commission des affaires étrangères, vise à renforcer l’efficacité des services des douanes dans la lutte contre les trafics illicites, en particulier de stupéfiants, dans les Caraïbes, région de transit important pour ces produits. Ainsi, la cocaïne élaborée en Amérique du Sud et destinée à l’Europe transite par cette zone. En 2009, les quantités de drogues saisies par la douane française aux Antilles s’élevaient à 1669,24kg contre 1576,40 kg en 2008 et 1189,02 en 2007. De plus, les Antilles néerlandaises sont particulièrement touchées par ce type de trafic illicite. Par ailleurs, d’autres types de trafics progressent dans cette région, comme les saisies de marchandises contrefaites.

Sur l’île de Saint-Martin, jusqu’au printemps 2010, la coopération opérationnelle internationale s’effectuait pour la France par la brigade de surveillance locale, composée de 9 agents, se limitant à des interrogations ponctuelles sur des objectifs opérationnels. Depuis avril 2010, un échelon de la direction des opérations douanières (DOD), composé de sept personnes, a été installé. La DOD est notamment chargée de mettre en oeuvre des modes d’enquêtes complexes, d’assurer les liaisons avec les services étrangers et d’assurer l’exécution d’opérations lourdes.

Côté néerlandais, la douane à Saint Martin est composée de 14 agents, dont 5 néerlandais en charge de l’assistance administrative mutuelle, et 9 agents locaux.

Si la France a substantiellement renforcé sa présence douanière à Saint-Martin, c’est notamment pour se donner les moyens de mettre en oeuvre la convention avec les Pays-Bas examinée par la Commission.

La convention relative à l’assistance mutuelle et à la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d’appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l’île de Saint-Martin a été signée à Philipsburg le 11 janvier 2002.

Afin de tenir compte de l’avis rendu par le Conseil d’Etat le 25 novembre 2004 dans lequel était relevée l’inconstitutionnalité de l’article 19 (paragraphe 3, lettre b) et paragraphe 5 lettre, f) de la convention, celle-ci a été modifiée par un échange de lettres des 4 et 18 novembre 2008.

La convention signée le 11 janvier 2002 reprend pour une large part les dispositions de la convention du 18 décembre 1997 relative à l’assistance mutuelle et à la coopération entre les administrations douanières (dite convention Naples II). Cette convention est cependant nécessaire pour que celles-ci soient applicables à Saint-Martin car la partie néerlandaise obéit au statut de PTOM qui ignore le droit communautaire.

Je ne mentionnerai que les principales dispositions de la convention :

Le titre Ier trace les grandes lignes de l’assistance et de la coopération mutuelles qui se traduisent par des échanges d’informations et par la possibilité de réaliser des enquêtes pour le compte de l’autre partie (articles 4 et 5) ou d’organiser une surveillance spéciale de personnes, biens, moyens de transport, locaux et valeurs contribuant à la réalisation d’infractions (articles 6 à 10).

Le titre II concerne la coopération transfrontalière sur l’île de Saint-Martin. Celle-ci porte sur la lutte contre les divers trafics (stupéfiants, précurseurs chimiques, armes, déchets, matières nucléaires, etc.), le commerce transfrontalier illégal et le blanchiment d’argent. La coopération peut être refusée lorsque le type d’enquête envisagé est contraire à la législation de la partie requise ou non prévue par cette dernière.

L’article 19 précise les règles de poursuite au-delà des frontières. Dans le cas d’un flagrant délit, les douaniers d’une partie sont autorisés, sans avoir à demander une autorisation spéciale, à poursuivre le délinquant au-delà de la frontière pendant une durée maximale de quatre heures. Les agents poursuivants sont autorisés à procéder eux-mêmes à une interpellation temporaire, uniquement pour laisser le temps aux agents de la partie, où la poursuite s’est déroulée, d’arriver sur les lieux et d’effectuer l’arrestation.

L’article 20 encadre strictement l’observation transfrontalière d’une personne. L’article 21 autorise l’organisation de livraisons surveillées dans le respect de la législation nationale. Les articles 22 et 23 prévoient la possibilité de créer des équipes communes spéciales d’enquête et de contrôle.

La plupart des dispositions de la convention pour Saint-Martin comme celles de la convention Naples II s’appliquent sans nécessiter de transposition en droit français. Celles relatives aux équipes communes d’enquête spéciale (article 22) exigent un texte d’application qui est l’objet de l’article 37 bis du projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI II), actuellement examiné par le Sénat.

Enfin, la possibilité d’interpellation sur le territoire d’une partie par les agents de l’autre, prévue par l’article 19, n’est pas à ce jour applicable. Elle contrevient à notre Constitution en vertu de laquelle cet acte relève de l’exercice des conditions essentielles de la souveraineté et ne saurait être exercé par un agent étranger.

Par ailleurs, il convient de noter que cette convention est assortie d’une réserve interprétative mentionnée par l’étude d’impact.

En conclusion, cette convention complète efficacement les outils à disposition des administrations douanières dans leur lutte contre les différents trafics que connaissent les Caraïbes.

Alors que les Pays-Bas ont approuvé dès 2002 cette convention, ils souhaitent aujourd’hui que les accords signés entrent en vigueur avant la réforme institutionnelle relative au statut des Antilles néerlandaises, dont fait actuellement partie le territoire néerlandais de Saint-Martin, qui doit être entérinée le 10 octobre 2010.

Votre rapporteur ne voit aucune raison de ne pas accéder à la demande néerlandaise tant la convention lui paraît faire œuvre utile pour le développement de la région des Caraïbes.

M. Jean-Paul Dupré. La convention a donc pour objet de permettre, par la coopération entre les administrations, une application effective de la législation existante. Quels sont donc les dysfonctionnements connus à ce jour ?

M. Philippe Cochet. On ne peut que se réjouir de la signature d’une telle convention. Il a été plusieurs fois mentionné que ce texte permettrait d’améliorer la lutte contre le trafic de cocaïne. Toutefois, il ne faudrait pas omettre le trafic de cannabis. Je pense qu’il est essentiel qu’il n’y ait pas deux traitements différents. Une drogue est une drogue.

M. François Rochebloine. Je partage l’inquiétude de Philippe Cochet sur le haschich, qui est en vente libre aux Pays-Bas. A-t-on une estimation du volume de drogues qui passent au travers des contrôles institués ?

M. Jacques Myard. Nous avions déjà signé une convention sur ce thème avec les Pays-Bas il y a sept ou huit ans, mais nos partenaires néerlandais n’avaient pas ratifié le texte. Où en est-on de cet accord ? Par ailleurs, on ne peut que se réjouir de cette convention car la frontière entre nos deux pays sur l’île de Saint-Martin est invisible, la création d’un droit de suite, sur le modèle de ce qui existe en matière maritime, est une bonne chose. A-t-on des certitudes sur l’efficacité de l’administration néerlandaise sur la partie sud de l’île ?

M. Jacques Remiller. Je remercie le rapporteur de ses précisions concernant les réfugiés d’Haïti. Ma question portait également sur le cannabis. On entend souvent dire que ces îles sont une plaque tournante mondiale du trafic de drogues. Constate-t-on aussi un engagement résolu contre ce trafic du côté néerlandais et du côté français ? Les moyens des douaniers français seront-ils suffisants pour lutter contre cette plaque tournante ?

M. François Asensi. Notre collègue Myard a raison d’émettre des doutes quant à l’efficacité des autorités néerlandaises, chacun sait que c’est la partie hollandaise de l’île qui sert de plaque tournante aux trafics. Pourquoi, dans ce cas, ne pas permettre aux forces de police de chaque pays d’aller jusqu’au bout de leurs intentions et de procéder aux interpellations nécessaires, au lieu de limiter à quatre heures le droit de poursuite dans l’autre partie de l’île ?

M. Robert Lecou. Le rapporteur a évoqué les problèmes d’immigration. Saint-Martin est, en effet, situé sur un emplacement sensible, et j’aurais souhaité plus de précisions. Par ailleurs, je partage l’inquiétude de mes collègues sur l’application du texte, mais il vaut mieux une convention que pas d’accord du tout.

M. Eric Raoult, rapporteur. Il faut savoir distinguer entre l’image et la réalité. Les « coffee shops » d’Amsterdam ne donnent pas une idée du fonctionnement de l’administration néerlandaise en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants. Quand celle-ci intervient à Saint-Martin, elle le fait très efficacement, du fait, notamment, de l’importance de cette île par rapport aux autres possessions néerlandaises dans les Antilles. La France, elle, souffrait traditionnellement du faible nombre de fonctionnaires présents à Saint-Martin, qui appartenait, autrefois, à la Guadeloupe. En réalité, les dysfonctionnements sont principalement liés au fait que la frontière n’est que faiblement matérialisée, par quelques drapeaux, et peut donc être très aisément franchie.

Concernant l’immigration illégale, celle-ci pose d’importants problèmes liés à la prostitution. Celle-ci se développe notamment dans la partie sud de l’île, et provoque de graves risques sanitaires. L’île de Saint-Martin n’est pas concernée seulement par la toxicomanie, mais également par le développement du virus HIV.

Le présent accord permettra une meilleure interprétation des équipes douanières. Côté hollandais, ces progrès ont déjà été réalisés. Reste à améliorer le fonctionnement côté français.

S’agissant des interrogations relatives au cannabis, et au risque de ne se focaliser que sur le trafic de cocaïne, il faut rappeler que la valeur marchande de la cocaïne est bien plus importante, et que les Antilles ne sont pas un point de départ du trafic de cannabis, qui est produit à ciel ouvert aux Pays-Bas, où il peut être consommé et vendu librement. Les néerlandais sont certes très tolérants sur leur territoire métropolitain, mais très efficaces sur leurs territoires ultramarins, d’après les informations que j’ai recueillies. L’insistance sur la cocaïne est liée au fait que la saisine d’un chargement de cette drogue prive les trafiquants de centaines de milliers d’euros, contre dix à vingt fois moins pour le trafic de cannabis. Malgré cela, il faudra bien sûr veiller à ce que le haschich ne transite pas entre les deux parties de l’île.

Je n’ai pas pour l’instant d’informations sur un précédent accord signé en 2003 ou 2004.

M. Jacques Myard. De mémoire, la France avait accompli toutes les procédures mais les Néerlandais n’avaient pas ratifié.

M. Eric Raoult, rapporteur. Parce que la coexistence de plusieurs trafics engendre des situations intenables, et du fait de l’évolution politique récente aux Pays-Bas, il y a une réelle volonté de renforcer l’efficacité de l’administration dans les îles néerlandaises. Les autorités locales, si elles ne tiennent pas toujours le même discours qu’au niveau national, sont très efficaces.

Concernant l’emplacement de Saint-Martin, celui-ci fait en effet de l’île une plaque tournante, sur laquelle les trafiquants accostent.

M. Jacques Myard. Ils avitaillent alors !

M. Eric Raoult. Les saisines ont lieu, en général, sur des bateaux de plaisance, voiliers ou yachts à moteur. Saint-Martin est donc, en effet, une plaque tournante du trafic de drogues bien plus importante que les autres îles. Certes, il reste beaucoup à faire dans ce contexte, mais on peut plus facilement qu’avant s’adresser aux autorités néerlandaises. Par ailleurs, le droit de suite de quatre heures, prévu par la convention, permet en réalité d’atteindre dans ce délai n’importe quel point de l’île. Il n’est donc pas nécessaire de l’allonger.

M. François Asensi. Nous nous abstenons également sur ce texte.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (no 2708).

Suisse : approbation de l’avenant en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune

La commission examine, sur le rapport de M. Claude Birraux, le projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et la Suisse en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (n°2338).

M. Claude Birraux, rapporteur. Je crois que vous partagerez mon sentiment : comme je le dis en introduction de ce rapport, la liste des conventions fiscales que notre pays a négociées ces derniers mois n’aurait pas été complète si le gouvernement n’avait pas réussi à conclure un accord avec la Suisse. S’il est un pays avec lequel il est essentiel de pouvoir collaborer dans le cadre de la lutte contre les paradis fiscaux et la fraude fiscale, et de parvenir à plus de transparence, c’est bien celui-là.

Ce texte a une portée symbolique forte : le fait que la Suisse renonce enfin à invoquer le secret bancaire pour ne pas échanger d’informations fiscales est une forme de révolution, que le contexte international et la pression du gouvernement ont permis de réaliser.

Il faut rappeler que la France et la Confédération helvétique sont liées depuis de nombreuses années, depuis 1966 exactement, par une convention des plus classiques en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune. Ce texte avait déjà été amendé deux fois, en 1969 et en 1997, sans que son économie générale soit profondément bouleversée. A partir de 2005, une troisième révision avait été engagée, sur laquelle les deux Parties s’étaient d’ailleurs accordées. Au terme de cette négociation, la Suisse n’avait toutefois dérogé en rien à sa pratique traditionnelle et l’échange de renseignements fiscaux restait circonscrit aux renseignements nécessaires à l’application de la convention et aux situations constitutives de comportements frauduleux, au sens de la législation interne suisse. Ce projet d’avenant restait donc en retrait par rapport aux nouveaux standards internationaux, qui permettent désormais aux Parties, comme vous le savez, un échange étendu d’informations fiscales, sans limitation quant à la nature des impôts, des personnes et des renseignements visés par la demande, ni sans pouvoir non plus opposer le secret bancaire.

C’est au début de la procédure de ratification de ce premier projet d’avenant que la pression internationale exercée sur les pays considérés comme non coopératifs est montée d’un cran. Lorsque le G20, en mars 2009, a annoncé son intention de publier la liste des pays n’ayant pas adopté les standards de l’OCDE, la Suisse a immédiatement indiqué sa volonté de se mettre en conformité et d’adapter les conventions auxquelles elle était partie. La France a saisi cette occasion pour demander la réouverture des négociations sur l’avenant précité afin d’y introduire des dispositions relatives à l’échange de renseignements conformes aux standards de l’OCDE.

Cette nouvelle attitude des autorités suisses démontre l’efficacité que peut avoir la pression internationale pour faire bouger les choses. Les propos qu’a tenus le gouvernement de la Confédération devant son parlement sont à cet égard sans ambiguïté : la Suisse craint plus que tout les mesures de rétorsion qui seraient prises par la communauté internationale et qu’elle considère comme pouvant être très dommageables pour son économie. Elle a donc décidé de tenir le plus grand compte des changements intervenus sur la scène internationale, et prend même parfois les devants.

La Suisse souhaite intégrer le G20 et revendique une meilleure place dans la gouvernance mondiale du système financier, à laquelle elle considère pouvoir prétendre eu égard à son rang de 7e place financière mondiale. C’est la raison pour laquelle elle se montre aussi fort active dans la mise en œuvre des décisions du G20. Nombre de réformes ont été adoptées ces derniers mois en ce sens, s’agissant notamment de l’encadrement des établissements bancaires, comme vous pourrez le voir plus en détail dans le rapport. En d’autres termes, la Suisse est aujourd’hui parfaitement consciente de son intérêt à coopérer avec les pays membres de l’OCDE, et le nôtre notamment. La preuve en est que dès 2009 elle avait, sans tarder, signé les douze accords nécessaires à son retrait de la liste grise. Elle continue sur sa lancée : elle vient de signer avec l’Inde une nouvelle convention. De leur côté, les partis politiques, pour ne pas risquer une crispation de la communauté internationale, se sont refusés à lancer la procédure de référendum qui aurait pourtant été possible, selon la constitution.

Les dispositions concrètes du texte de l’avenant reprennent largement le modèle de l’OCDE, sur lequel tout a déjà été dit, je n’y reviendrai donc pas. Ce qu’il est surtout important de relever, s’agissant de cet avenant, c’est le fait que, désormais, la Suisse ne pourra plus opposer le secret bancaire pour refuser de transmettre les renseignements demandés. L’article 7 de l’avenant consacre clairement la fin de l’opposabilité du secret bancaire suisse en précisant que : « En aucun cas les dispositions (du paragraphe 3) ne peuvent être interprétées comme permettant à un Etat contractant de refuser de communiquer des renseignements uniquement parce que ceux-ci sont détenus par une banque (…) »

Par ailleurs, l’échange de renseignements fiscaux n’est plus restreint à l’application de la convention. C’est un des points sur lesquels la France a particulièrement insisté et qui a représenté une phase décisive de la négociation qui aurait pu achopper si cette question n’avait pas été réglée à la satisfaction de notre pays.

Le second aspect important de cet avenant concerne le régime fiscal des retraites des travailleurs frontaliers : 100 000 Français se rendent en Suisse chaque jour pour travailler. La convention fiscale actuelle prévoit l’imposition des personnes bénéficiant du versement de pensions exclusivement dans l’Etat dans lequel elles résident. Le système de retraite suisse repose sur trois piliers : un régime de base obligatoire, le même pour tout le monde, du balayeur au PDG, et deux régimes complémentaires, l’un obligatoire, le « deuxième pilier », le troisième étant facultatif.

Les pensions du deuxième pilier peuvent être versées en Suisse sous forme de capital, option qui n’existe pas en droit français pour ce type de pension. Consécutivement, lorsque des résidents en France, notamment anciens travailleurs frontaliers, perçoivent de telles pensions, elles ne sont aujourd’hui imposées ni en Suisse, aux termes de la convention en vigueur, ni en France, puisque notre droit interne ne prévoit pas de mécanisme d’imposition pour les pensions versées en capital. Les autorités suisses ont souhaité mettre fin à cette situation de double exonération, contraire au principe d’égalité devant l’impôt, d’autant plus injuste que les retraités qui perçoivent leur pension sous forme de rente sont, eux, imposés.

Les dispositions qui ont été introduites permettent de mettre fin à cette situation et elles ont suscité de la part des représentants des frontaliers travaillant en Suisse de vives inquiétudes, craignant le risque d’une double imposition, au motif que l’impôt à la source prélevé en Suisse sur leur salaire est prélevé sur un revenu brut, les cotisations de retraite n’étant pas ou peu déductibles. Cela concerne d’un côté les travailleurs du canton de Genève et d’autre par, pour ce qui est du deuxième pilier, tout le monde.

En fait, selon les renseignements que j’ai pu obtenir, les cotisations afférentes aux pensions en capital sont déduites, de manière réelle ou forfaitaire, au cours de la période d’activité des salariés frontaliers, qu’ils relèvent ou non du régime prévu par l’accord frontalier franco-suisse de 1983. S’ils sont imposés en France, les cotisations à des régimes de retraite obligatoires suisses, correspondant aux régimes de base et complémentaire français, sont déductibles de l'impôt sur le revenu en France ; s’ils sont imposés en Suisse, ils sont assujettis à la retenue à la source sur leurs salaires bruts, mais le barème applicable prévoit à leur profit une déduction forfaitaire. L'égalité de traitement entre les différentes catégories est donc préservée et je crois qu’on ne peut que souscrire à la disposition qui a été introduite, dont je rappelle qu’elle met fin à une situation de double exonération des pensions en capital de source suisse perçues par des résidents français, et qu’elle préserve à la France le droit d’imposer les pensions en capital si notre droit interne venait à évoluer sur ce plan.

A cet égard, j’ajoute que les précisions que j’ai pu obtenir de la part du cabinet de Mme Lagarde montrent que le gouvernement est soucieux des effets sur la progressivité de l’impôt sur le revenu que pourrait représenter une imposition unique au versement de la prestation de retraite en capital. La réforme du Code général des impôts que le gouvernement prévoit d’introduire permettra aux intéressés de demander des modalités spécifiques d’imposition. Concrètement, pour l’établissement de l’impôt sur le revenu, le montant des prestations de retraite ainsi versées pourra, sur demande expresse de l’intéressé, être divisé par quinze, pour être ainsi étalé sur une durée correspondant à l’espérance moyenne de vie à l’âge du départ à la retraite. Ce dispositif replacera les intéressés dans la situation qui aurait été la leur s’ils avaient perçu leur retraite sous forme de rente et les effets sur la progressivité de leur impôt seront atténués.

Telles sont les principales dispositions de cet avenant à la convention fiscale franco-suisse de 1966 qu’il me paraît important de voir entrer rapidement en vigueur. Je vous recommande par conséquent d’approuver le projet de loi qui nous est soumis.

M. Alain Bocquet. La Suisse a signé cet avenant à la seule fin de ne plus figurer sur la liste des paradis fiscaux établie par l’OCDE. Les maigres avancées obtenues en matière d’échange d’informations bancaires ne peuvent pas être considérées comme une réelle transparence en la matière ni comme une levée du secret bancaire suisse. Il y a là beaucoup de faire semblant. Ainsi, à l’article 8 de l’avenant, relatif à l’assistance entre les États contractants pour la notification des actes et documents relatifs au recouvrement, quels sont les effets réellement attendus de la possibilité d’une notification par lettre recommandée ?

L’article 9 invite à établir un lien avec l’actuel débat en France sur la réforme des retraites : en réduisant le poids de la fiscalité sur les fonds de pension au profit des riches citoyens suisses résidant en France, ne risque-t-on pas de créer un précédent à l’égard des futurs fonds de pension français ?

L’amendement visant au rejet de ce texte de notre collègue Jean-Pierre Brard sera défendu par son auteur lors du débat en séance publique sur ce texte.

M. Jean-Paul Dupré. S’il est parfaitement compréhensible que l’on souhaite éviter les doubles impositions sur le revenu et la fortune, connaît-on l’impact de ces stipulations sur la transparence des dépôts bancaires en France et en Suisse, s’agissant en particulier de l’origine de ces fonds ?

M. Robert Lecou.  Pour la détermination de l’imposition des revenus, comment traite-t-on le cas d’un salarié qui serait employé par une entreprise sise en Suisse mais travaillerait dans un autre État ? La même question se pose d’ailleurs pour les personnes morales.

M. François Rochebloine. Monsieur le Rapporteur, vous avez cité le chiffre de 100 000 Français travaillant en Suisse. Quelle est la situation particulière de ceux qu’emploie l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire – le CERN –, dont les installations sont situées à cheval sur la frontière ?

Par ailleurs, comment lutter contre l’impunité dont jouissent les résidents de Suisse qui commettent en France des excès de vitesse ?

M. Alain Néri. Je vois mal l’intérêt que présente la partie de l’avenant consacrée aux retraites, et ce d’autant plus que le critère de l’espérance de vie dont le Rapporteur a fait état est tout relatif : cette espérance est plus longue de sept ans pour une femme que pour un homme, elle varie selon le type d’emploi occupé et elle fluctue aussi à raison de l’invalidité… J’estime par conséquent qu’il faudrait surseoir à l’examen de cette partie du texte.

M. Jacques Remiller. Je souhaite qu’il soit bien précisé que cette convention s’applique à l’échelon fédéral, sans particularisme pour aucun canton suisse, car cela existe dans d’autres cas.

M. Jacques Myard. Mais dans ces cas-là il ne s’agit pas de conventions internationales.

M. Claude Birraux, Rapporteur. À Monsieur Bocquet je répondrai que la confiance dans la bonne application d’une convention internationale s’apparente à un pari pascalien… Une convention doit être appliquée loyalement et il n’y a aucune raison de douter a priori de la bonne volonté des Parties. Je signale à ce propos que l’ambassadeur de France à Berne s’est vu demander l’état de la procédure de ratification de cet avenant par la France car la Suisse souhaite son entrée en vigueur rapide.

Monsieur Néri, les contribuables les plus riches résident plutôt en Suisse qu’en France. L’avenant concerne les travailleurs frontaliers. S’agissant des retraites, je précise qu’une pension à taux plein est acquise en Suisse à 65 ans pour un homme et à 64 ans pour une femme ; à toute pension liquidée avant cet âge s’applique pour toute la durée de son versement une décote de 7 % par an.

Monsieur Dupré, je ne pense pas qu’une banque française quelle qu’elle soit divulgue à tout un chacun l’origine des fonds qu’elle a en dépôt.

Monsieur Lecou, concernant le régime fiscal des travailleurs frontaliers, le canton de Genève n’a pas ratifié la convention, car il existe des possibilités de recours référendaire. Ce canton perçoit donc une retenue à la source et reverse de ce fait l’équivalent de 3,5 % de masse salariale. Pour les travailleurs frontaliers dans les huit autres cantons, l’impôt sur le revenu est acquitté en France et en contrepartie, depuis un accord de 1983, la France reverse à la Suisse l’équivalent de 4,5 % de masse salariale. Quant aux personnes morales, elles sont imposées là où elles ont leur siège.

Monsieur Rochebloine, la situation du CERN est très particulière. Vingt-cinq pays au moins sont contributeurs et la frontière franco-suisse traverse l’emprise du site, de sorte que le droit applicable, par exemple en matière de marchés publics, fluctue selon l’endroit où l’on se trouve.

S’agissant des excès de vitesse, j’ai été le rapporteur d’une convention ad hoc entre la France et la Suisse ; il n’y a donc pas d’impunité sur ce point.

M. Jean-Paul Dupré. Pour avoir travaillé dans le secteur bancaire en France, je puis vous assurer qu’il existe une obligation de vérifier en cas de doute ou de soupçon l’origine des fonds déposés et de les signaler.

M. Claude Birraux, Rapporteur. J’avais donc mal compris, pardon, votre question.

Mme Martine Aurillac, Présidente. L’amendement de M. Jean-Pierre Brard sera défendu en séance publique.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (no 2338).

Uruguay : accord relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale

La commission examine, sur le rapport de M. Alain Néri, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République orientale de l'Uruguay relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale – n° 2585.

M. Alain Néri, rapporteur. L’accord entre la France et l’Uruguay relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale s’inscrit dans la liste des nombreux accords de cette nature que la France a signés récemment et dont nous avons déjà eu l’occasion de débattre ici même. C’est pourquoi je ne m’étendrai pas sur les éléments de contexte désormais bien connus.

En revanche, je reviendrai plus en détail sur les particularités qui font de l’Uruguay une exception en Amérique latine mais aussi parmi les « paradis fiscaux » et sur les nombreux efforts dont fait preuve ce pays pour se conformer aux standards internationaux.

Souvent qualifié de « Suisse de l’Amérique latine »  pour des raisons de fiscalité mais aussi de qualité de vie, l’Uruguay compte une population de près de 3,5 millions d’habitants dont le niveau de vie, à l’européenne, est bien plus élevé que dans les autres pays d’Amérique latine. L’économie uruguayenne, qui repose largement sur le secteur des services s’est distinguée par une très bonne tenue face à la crise internationale comme en témoigne la croissance positive de l’ordre de 2 % au cours de l’année 2009. Le PIB par habitant était alors de 10 000 USD soit 20 % de plus que la moyenne régionale, les perspectives pour 2010 sont encourageantes avec une croissance aux alentours de 4 % du PIB. Cette situation s’explique par un environnement économique et financier sain, caractéristiques encore relativement rares en Amérique latine.

Avant la crise argentine de 2001-2002, l’Uruguay était encore une place financière internationale relativement importante, notamment grâce au système bancaire qui bénéficiait du secret pour le développement des activités off-shore. Aujourd’hui le secteur bancaire présente trois caractéristiques, à savoir une très forte dollarisation, une extrême liquidité et enfin une faible représentation des crédits à 1/3 des dépôts.

Deux banques françaises étaient présentes en Uruguay jusqu’au début de cette année. Mais depuis lors, le Crédit Agricole – qui souhaite recentrer ses activités en Europe et méditerranée – et la BNP-Paribas ont déclaré qu’elles se retiraient des « paradis fiscaux non-coopératifs ».

Je souhaite attirer tout particulièrement votre attention sur les nombreux efforts de réforme de la législation interne que les autorités uruguayennes ont commencé de mettre en œuvre depuis plusieurs années, effort qui se poursuit aujourd’hui. Dès 2007, une réforme a ainsi conduit à soumettre au droit fiscal commun des sociétés uruguayennes les sociétés financières off-shore et à partir du 1er janvier 2011, plus aucune de ce type de sociétés ne pourra être créée.

Dans la continuité du gouvernement précédent, l’ancien guérillero Tupamaros, José Mujica qui a pris ses fonctions de Président le 1er mars dernier fait de la lutte contre fraude et l’évasion fiscales l’une de ses priorités. Preuve en est, l’importante diminution des dépôts des non-résidents ramenés de 41 % à 17 % en 2010. Au début du mois de juin le nouveau ministre des finances, Fernando Lorenzo, a déposé un projet de loi sur la flexibilisation du secret bancaire. Cette réforme s’inspire directement des dispositions prises par le Chili avant son entrée dans l’OCDE. Elle prévoit d’étendre les cas qui permettent aux autorités d’exiger la levée du secret bancaire à la présomption de fraude fiscale, dans le cas de l’application des accords de non double imposition et d’échange d’informations mais aussi s’il y a présomption de fraude dans la déclaration patrimoniale.

Ces efforts pour le renforcement de la régulation financière ont été salués lors de la récente réunion du GAFISUD, groupe d’action financière de lutte contre le blanchiment d’argent en Amérique du Sud. Cette organisation a souligné la bonne volonté uruguayenne mais aussi la nécessité de fournir un effort supplémentaire dans le secteur immobilier et en particulier dans la station balnéaire de Punta del Este.

La structure même de cet accord est similaire à ce que nous avons déjà pu voir lors de l’examen des conventions précédentes puisqu’il est directement inspiré du modèle de l’OCDE. Néanmoins, il comporte des améliorations notoires. En particulier s’agissant des impôts couverts, l’article 3 détermine les impôts concernés par l’accord sans les énumérer allant ainsi plus loin que le modèle de l’OCDE. Cet accord contraint les parties à prendre les mesures de nature à garantir la disponibilité des informations et leur propre capacité à y accéder. Aucune prise en charge, par la partie requérante, des coûts éventuels n’est prévue. Enfin, la quatrième amélioration concerne les sociétés cotées puisque le présent accord ne fixe pas de limite dans l’échange d’informations relatives à ces structures.

Même si des interrogations persistent quant à la mise en œuvre de cet accord, je tiens à souligner les bonnes intentions des autorités uruguayennes et je reste optimiste. C’est pourquoi je vous invite à approuver ce projet de loi.

Mme Geneviève Colot. Je souhaiterais connaître la différence sur le plan juridique entre un accord et une convention puisque ici nous examinons un accord.

M. Alain Néri, rapporteur. Ce sont deux synonymes qui ne comportent pas différence dans leur contenu ou leur portée juridique.

M. Jean-Paul Dupré. Je souhaiterais des informations sur le niveau de nos échanges économiques avec l’Uruguay ainsi que sur le nombre de nos compatriotes qui y résident.

M. Alain Néri, rapporteur. Il existe en Uruguay 40 implantations françaises employant 8 000 personnes. Le groupe Casino possède la moitié des supermarchés du pays. Le volume des échanges économiques représente 400 millions de dollars. La France est le 6ème investisseur. On dénombre par ailleurs 2 000 résidents français.

M. Jean-Claude Guibal. Comment l’Uruguay est-il devenu la « Suisse d’Amérique latine » ? Qui sont les principaux bénéficiaires des facilités fiscales offertes par l’Uruguay ?

M. Alain Néri, rapporteur. L’absence de régime démocratique pendant une longue période a certainement favorisé le développement des trafics.

M. Robert Lecou. Le nombre d’habitants mérite d’être vérifié, me semble t-il.

Mme Henriette Martinez. D’autres accords ont-ils été signés, notamment avec les voisins de l’Uruguay ?

M. Alain Néri, rapporteur. L’Uruguay a signé des accords de même nature avec le Mexique, l’Espagne, le Portugal et l’Allemagne.

M. Jacques Remiller. Pour en revenir aux questions de définition, il me semble que la convention a plus de force que l’accord.

M. Alain Néri, rapporteur. Je vous confirme que convention et accord ont la même portée juridique. Je vous propose d’organiser un exposé exhaustif sur cette question lors d’une prochaine réunion.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (no 2585).

Petites Caraïbes : échange de renseignements en matière fiscale : accords avec Antigua-et-Barbuda, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines et Saint-Christophe-et-Niévès

La commission examine, sur le rapport de M. Loïc Bouvard, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement d’Antigua-et-Barbuda relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2587), le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Grenade relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2588), le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sainte-Lucie relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2589), le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Saint-Vincent-et-les-Grenadines relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2590) et le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Saint-Christophe-et-Niévès relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale (n° 2591).

M. Loïc Bouvard, rapporteur. Les accords que je vais vous présenter concernent Antigua-et-Barbuda, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, la Grenade et Saint-Vincent-et-les-Grenadines, cinq Etats indépendants situés dans la mer des Caraïbes : Antigua-et-Barbuda et Saint-Christophe-et-Niévès sont au nord de la Guadeloupe ; les trois autres sont au sud de la Martinique. Ces anciennes colonies britanniques à l’histoire et aux structures économiques et politiques proches font l’objet de projets de lois sur l’échange de renseignements en matières fiscale strictement identiques, c’est pourquoi la Commission a décidé de leur consacrer un seul et même rapport.

Je ne m’étendrai pas sur les éléments de contexte de signature de ces accords qui sont désormais bien connus de tous. Ces Etats sont d’anciennes colonies britanniques ayant acquis leur indépendance entre les années 1970 et 1980 ; ils appartiennent aujourd’hui au Commonwealth.

Les économies de ces pays sont de taille modeste, leur PIB étant comprises entre 1,2 milliard de dollars américains pour Antigua-et-Barbuda et de 524 millions pour Saint-Christophe-et-Niévès. Leurs populations sont aussi très limitées puisque, à eux cinq, ils sont moins peuplés que le département du Morbihan où je suis élu ! On peut incontestablement les qualifier d’Etats confettis…

Mais les économies de chacun de ces pays pâtissent d’un manque de diversification. Le tourisme demeure une grande source de revenus, le cas d’Antigua-et-Barbuda est révélateur de cette situation puisque selon le FMI, 50 % du PIB émane directement de l’activité touristique. Cet Etat est en effet une destination très appréciée des Américains, notamment car il est plus moderne et mieux équipé que la plupart de ses voisins Ce n’est donc pas un hasard si les Etats-Unis ont conclu un accord d’échange de renseignements fiscaux avec lui dès 2000. Le secteur touristique représente aussi un peu plus du quart du PIB de Saint-Christophe-et-Niévès. La croissance économique de ces pays est également stimulée par le secteur de la construction, lui-même directement liés aux besoins touristiques, phénomène également observé dans les territoires français de Saint-Martin et Saint-Barthélémy.

Toutefois, ces cinq îles connaissent une forte dépendance vis-à-vis d’un secteur financier qui s’est développé sous l’effet d’une fiscalité favorable permettant l’afflux de capitaux étrangers. Les taux d’imposition sur les sociétés varient entre 25 % et 35 % mais les dividendes et les plus-values sont quasiment exonérés de toute taxe. De plus, l’imposition des dividendes des non-résidents est comprise entre 0 % et 25 % selon les pays. Ces transactions sont effectuées à l’abri de toute surveillance des instances internationales et des administrations fiscales internationales. Cette situation facilite le blanchiment d’argent de montants financiers importants issus du trafic de drogue ou d’armes, provenant d’Amérique du Sud et transitant par les Caraïbes.

Le secteur offshore est aussi florissant, comme sur l’île de Niévès où sont domiciliés 90 compagnies d’assurance, 3 800 trusts et environ 34 000 International Business Compagnies.

La récente crise financière n’a pas épargné ces archipels. En effet, plusieurs grands groupes des secteurs de la finance et des assurances ont fait faillite et mis en danger leurs économies.

Soucieux d’être retirés de cette liste « grise », les cinq Etats ont signé, le plus souvent entre l’automne 2009 et le printemps 2010, un nombre d’accords suffisants pour figurer sur la liste « blanche », soit, à l’heure actuelle, douze pour la Grenade, dix-sept pour Antigua-et-Barbuda, dix-huit pour Saint-Christophe-et-Niévès et pour Sainte-Lucie et dix-neuf pour Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Certains pays comme la Grenade ont remis de l’ordre dans leur fiscalité, puisque qu’une TVA a été approuvée par le Parlement, une réforme des impôts indirects est à l’étude et une taxe sur la propriété foncière devrait voir le jour d’ici à janvier 2011. Toutefois, ces réformes font figure d’exception, puisqu’il semblerait que pour le moment les engagements pour se conformer aux standards ne soient pas mis en œuvre.

Ces accords bilatéraux ne comportent pas de différences majeures par rapport à ceux déjà étudiés par notre commission depuis plusieurs mois. Comme vous le savez ces accords ont été signés selon les modèles de l’OCDE mais comportent quelques améliorations, par exemple en ce qui concerne le champ des impôts couverts ou l’obligation pour les parties de prendre les mesures de nature à garantir la disponibilité des informations.

La conclusion de ces accords relatifs à l’échange de renseignements en matière fiscale avec des territoires encore considérés il y a peu comme non coopératifs est très importante pour eux, puisqu’elle leur a permis de sortir de cette catégorie et de retrouver une forme de respectabilité internationale. A ce jour, les cinq Etats n’ont pas notifié l’accomplissement des procédures internes requises pour l’entrée en vigueur des accords.

Pour la France, les enjeux ne sont pas du même ordre. Les bénéfices concrets – financiers – qu’elle peut en espérer sont impossibles à évaluer, de l’aveu même du Gouvernement. Mais ces accords ont en tout état de cause valeur de symbole : toute la communauté internationale – et en particulier le Forum mondial qui passera en revue la situation dans ces Etats au cours de l’année 2011 – sera attentive à ce que les signataires respectent leurs engagements, ce qui suppose que les accords ne soient pas seulement signés mais aussi entrent en vigueur et soient appliqués le plus rapidement possible.

Par conséquent, je vous invite à approuver ces projets de lois.

M. Jacques Remiller. Existe t-il un accord avec ces pays en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants ? Par ailleurs, il me semble que la signature des accords par ces pays est motivée par la seule volonté de sortir de la liste grise de l’OCDE. De quel moyen de pression dispose t-on pour s’assurer de leur application effective ?

M. Jean-Paul Dupré. Je m’interroge sur la crédibilité et la stabilité des structures étatiques de ces pays.

M. Pascal Clément. Je ne suis pas convaincu de la nécessité de ratifier ces accords. Ces pays vivent bien plus des activités financières que du tourisme pour lequel ils doivent faire face à une importante concurrence. Il est donc peu probable que la transparence dans ces matières s’améliore réellement. Je n’ai pas relevé dans votre exposé d’éléments faisant état de progrès sur ce sujet après la crise financière.

M. Robert Lecou. Je crains également qu’il s’agisse pour nous de voter des projets de lois qui permettent à ces pays de sortir de la liste grise. Leurs institutions seront-elles capables d’appliquer ces accords ?

Mme Henriette Martinez. Alors que les textes concernant les Pays-Bas et la Suisse, tous deux pays européens, sont qualifiés de convention, ceux avec les Caraïbes portent le nom d’accords. Cela me semble indiquer que la qualification de convention leur confère une plus grande solidité. Je partage par ailleurs la réserve de mes collègues vis-à-vis de ces textes.

Mme Martine Aurillac. Il faut soutenir ce début de chemin vers la transparence de la part de ces pays. Dans le cas contraire, nous ne pouvons nous appuyer sur aucune base pour exiger des efforts de leur part.

M. Eric Raoult. Je comprends mes collègues mais je veux leur rappeler que la France, grâce à la Martinique et la Guadeloupe, est voisine de tous ces Etats. De nombreuses communes guadeloupéennes et martiniquaises sont jumelées avec des homologues des autres îles environnantes. Il existe une coopération régionale en matière culturelle et sportive. Je veux donc mettre en garde mes collègues contre une attitude qui pourrait avoir des répercussions non négligeables sur les relations de la Guadeloupe et de la Martinique avec ces îles.

M. Jacques Remiller. J’entends l’argument de M. Raoult. Je crains cependant que la France, en ratifiant ces accords, ne devienne complice d’un trafic qui se poursuivra.

M. Loïc Bouvard, rapporteur. En rappelant au début de mon exposé la position géographique de ces îles, j’ai voulu souligner la présence de la France dans cette région. Ces pays veulent effectivement sortir de la zone grise et rentrer dans la zone blanche mais le Forum mondial réalisera en 2011 des contrôles qui pourront donner lieu à des sanctions en l’absence de progrès en matière de transparence fiscale, celles-ci pouvant aller jusqu’à sortir de la zone blanche. Par ailleurs, de nombreux autres pays ont signé avec ces Etats « confettis » des accords de même nature en espérant les faire adhérer aux normes internationales. Il est enfin important que le Parlement se prononce en faveur de ces accords afin que les autorités compétentes de notre pays puissent investiguer sur place comme les textes le permettent. En conclusion, nous avons intérêt à ce que ces pays « rentrent » dans la norme internationale

M. Robert Lecou. La réponse du rapporteur m’a convaincu de voter en faveur des projets de lois. Il était important de rappeler l’existence d’un contrôle à venir de la réalité des efforts entrepris par les pays signataires des accords.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification les projets de loi (nos 2587, 2588, 2589, 2590, 2591).

La séance est levée à douze heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 15 septembre 2010 à 10 h 15

Présents. - Mme Nicole Ameline, M. François Asensi, Mme Martine Aurillac, M. Jean-Paul Bacquet, M. Jacques Bascou, M. Christian Bataille, M. Claude Birraux, M. Alain Bocquet, M. Jean-Michel Boucheron, Mme Chantal Bourragué, M. Loïc Bouvard, M. Jean-Christophe Cambadélis, M. Hervé de Charette, M. Jean-Louis Christ, M. Dino Cinieri, M. Pascal Clément, M. Philippe Cochet, Mme Geneviève Colot, M. Alain Cousin, M. Michel Destot, M. Jean-Pierre Dufau, M. Jean-Paul Dupré, M. Jean-Michel Ferrand, M. Alain Ferry, Mme Marie-Louise Fort, M. Hervé Gaymard, M. Paul Giacobbi, M. Jean Grenet, M. Jean-Claude Guibal, M. Serge Janquin, M. Patrick Labaune, M. Jean-Paul Lecoq, M. Robert Lecou, M. François Loncle, M. Lionnel Luca, Mme Henriette Martinez, M. Didier Mathus, M. Gérard Menuel, M. Jean-Claude Mignon, M. Jacques Myard, M. Alain Néri, M. Jean-Marc Nesme, M. Éric Raoult, M. Jean-Luc Reitzer, M. Jacques Remiller, M. François Rochebloine, M. Jean-Marc Roubaud, Mme Odile Saugues, M. André Schneider, M. Michel Terrot, M. Michel Vauzelle

Excusés. - Mme Sylvie Andrieux, M. Patrick Balkany, M. Pierre Cohen, M. Michel Delebarre, M. Tony Dreyfus, M. Jean Glavany, Mme Élisabeth Guigou, M. Didier Julia, M. Renaud Muselier, M. Axel Poniatowski, M. Rudy Salles, M. André Santini, M. Dominique Souchet

Assistait également à la réunion. - M. Gaëtan Gorce