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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mercredi 10 octobre 2007

Séance de 11 heures 30

Compte rendu n° 4

Présidence de M. Guy Teissier, président

– Audition de M. Michel Miraillet, directeur des affaires stratégiques, sur le projet de loi de finances pour 2008

Audition de M. Michel Miraillet, directeur des affaires stratégiques, sur le projet de loi de finances pour 2008

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Michel Miraillet, directeur des affaires stratégiques, sur le projet de loi de finances pour 2008 (n° 189).

M. Michel Miraillet a présenté en préambule les principaux éléments à retenir de la fin de la gestion de l’exercice 2007. S’agissant du titre 2, le programme 144 devrait terminer la gestion de l’année avec un solde positif de 20,3 millions d’euros. Cet excédent porte essentiellement sur les rémunérations d’activité et reflète notamment les difficultés de la DGSE, dont les effectifs représentent plus de la moitié de ceux du programme, à réaliser son schéma d’emplois 2007 en raison des difficultés récurrentes pour le recrutement de certains spécialistes (linguistes rares et spécialistes des techniques informatiques et des systèmes d’information). S’agissant des autres titres et sous condition de la levée des réserves, qui représentent environ 50 millions d’euros, le solde de gestion du programme sera proche de zéro tant en autorisations d’engagement (AE) qu’en crédits de paiement (CP).

Il a souligné que le projet de budget pour 2008 a été élaboré dans un contexte de forte contrainte sur les emplois et les crédits. Le programme 144 enregistre une diminution globale de l’ordre de 0,7 % en AE et de 0,6 % en CP, due pour l’essentiel à une baisse de 7,3 % des crédits du titre 2. Sa part dans la mission Défense représente 4,5 % des crédits de paiement, soit une très légère régression par rapport à 2006 et 2007.

Les dépenses de personnel du programme représentent 2,9 % des crédits de rémunérations et charges sociales de cette mission et 2 % de l’ensemble du ministère de la défense en 2008, contre 2,2 % en 2007. La place relative des effectifs financés du programme (8 934 en 2007, 8 800 en 2008) diminue légèrement, passant de 2,1 % des effectifs totaux du ministère de la défense en 2007 à 2 % en 2008. La diminution de 7,3 % des crédits du titre 2 s’explique, d’une part, par le recalage des crédits de rémunération du programme sur la réalité des effectifs et, d’autre part, par le transfert de crédits de rémunération du BOP DGA vers son titre 3 pour financer la charge salariale des personnels mis à la disposition des écoles de la DGA.

A l’instar des autres programmes de la mission Défense, la quote-part du programme dans le plafond ministériel des emplois autorisés a été alignée sur les effectifs moyens 2007, estimés à la date du 30 juin, et complétés d’un schéma d’emploi qui comprend, d’une part, l’extension en année pleine des créations de postes décidées en 2007 et, d’autre part, la contribution du programme à la réduction des effectifs au titre du non remplacement d’un départ à la retraite sur deux, soit 34 postes. Le nouveau plafond d’emploi se situe à 8 800 équivalents temps plein (ETP), en réduction de 316 ETP par rapport à 2007. De ce fait, le programme ne connaîtra pas en 2008 de progression de ses effectifs, marquant une pause par rapport aux progressions sensibles qui avaient marqué les gestions précédentes. Il faut souligner le choix de préserver cependant une petite capacité de recrutement (16 ETP) au profit de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSE), compte tenu de l’importance des missions confiées à ce service et de la poursuite de sa montée en puissance dans certains domaines.

Hors titre 2, les crédits du programme connaissent une augmentation de 2,3 % en autorisations d’engagement et 2,6 % en crédits de paiement. Dans ces conditions, le niveau des ressources inscrites dans le projet de loi de finances doit permettre au programme d’atteindre ses objectifs. Avec 940 millions d’euros en AE et 910 millions d’euros de CP, la part de l’agrégat LPM dans l’ensemble du programme 144 représente toujours près de 80 % des crédits. Au sein de cet agrégat, les CP augmentent de 16,4 millions d’euros (+ 1,8 %) au bénéfice des investissements de la DGSE (+ 7,6 millions d’euros) et de la DGA (+ 8,9 millions d’euros).

M. Michel Miraillet a ensuite présenté les principales évolutions pour chacune des actions du programme. L’action 1 « Analyse stratégique » voit ses AE augmenter de 1,3 millions d’euros (31 %), les CP demeurant à leur niveau de ces dernières années. Il s’agit de permettre dès 2008 le lancement de plusieurs marchés d’études triennaux sur des thématiques globales. Ces marchés, d’un volume plus conséquent que les études annuelles traditionnelles, permettront de contribuer à une meilleure structuration des centres de recherche en leur offrant une réelle visibilité et en favorisant ainsi le recrutement de chercheurs de qualité. Ils permettront également de disposer d’une réactivité accrue pour faire face à des événements imprévus.

Cette évolution importante prolonge l’action déterminée engagée par la DAS pour redonner à la recherche stratégique française efficacité, visibilité et, il faut l’espérer, rayonnement afin que le budget non négligeable qui y est consacré soit employé avec profit. Une centaine d’études nouvelles seront engagées en 2008. Le comité de coordination des études prospectives (CCEP), qui regroupe les représentants des forces armées et des autres services du ministère sous la direction de la DAS, coordonne le choix des sujets d’étude à partir de priorités définies au préalable et recouvrant cette année très largement les thématiques inscrites dans les travaux du Livre blanc.

L’action 2 « Prospective des systèmes de force » bénéficie également d’un accroissement sensible (+ 4 millions d’euros en AE) au profit des études opérationnelles et technico-opérationnelles (EOTO). Les travaux qu’il est prévu d’engager en 2008 correspondent aux orientations découlant du plan prospectif à 30 ans. Destinées à éclairer les choix en matière d’équipement ou d’emploi, ces études permettent notamment de dégager les orientations techniques et opérationnelles les mieux adaptées aux besoins de défense à moyen et long termes, ainsi que d’aider à la recherche du meilleur compromis entre les caractéristiques opérationnelles, les spécifications techniques et les coûts des systèmes futurs ou des évolutions des systèmes existants.

L’action 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France » voit également ses moyens s’accroître en autorisations d’engagement (+ 5,6 %) et en crédits de paiement (+ 3,7 %), presque exclusivement au titre de la DGSE, dont le nouveau centre de calcul entrera en fonction en 2008, avec en corollaire une hausse sensible de la consommation électrique. Les moyens alloués à la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) restent inchangés. La masse salariale attribuée aux deux services de renseignement est quasi stable (- 0,9 % en euros constants hors compte d’affectation spéciale pensions), ce qui permet de maintenir la capacité opérationnelle.

L’action 4 « Maintien des capacités technologiques et industrielles », qui représente à elle seule 80 % du programme hors titre 2, dispose de 967 millions d’euros en AE (+ 0,8 %), tandis que ses CP s’accroissent de 2 %. Cette augmentation est liée, d’une part, au lancement d’études amont importantes dans le domaine nucléaire et, d’autre part, au transfert vers les subventions de fonctionnement des crédits de rémunérations destinés aux écoles de la DGA et à l’Office national d’études et recherches aérospatiales (ONERA).

Le montant des crédits alloués aux études amont (689,75 millions d’euros en AE et 644,55 millions d’euros en CP) est stable et respecte l’objectif d’engagement de 700 millions d’euros assigné par le ministre. Il inclut notamment 15 millions d’euros destinés aux pôles de compétitivité, transférés vers le programme 192 «Recherche duale». Si des contrats relatifs aux études amont du domaine nucléaire arrivent à maturité en 2008, celles du domaine espace enregistrent une réduction de 12 millions d’euros des besoins de CP et celles du domaine classique une diminution des AE de 38,7 millions d’euros.

S’agissant enfin des subventions versées aux opérateurs de l’État relevant du programme (écoles de la DGA et ONERA), les crédits inscrits sont un peu inférieurs aux besoins stricts des contrats d’objectifs et de moyens passés avec ces établissements. Ces écarts feront l’objet soit de mesures en gestion, soit d’une renégociation de certains contrats pour les écoles, compte tenu de leurs situations respectives.

Les actions 5 « Soutien aux exportations » et 6 « Diplomatie de défense » n’appellent pas de commentaire particulier.

M. Michel Miraillet a rappelé que, comme l’a souligné le rapport annuel de performance 2006, les valeurs prévisionnelles des indicateurs de performance du programme ont été globalement atteintes pour le précédent exercice. Au vu des résultats atteints à ce stade, il devrait en être de même pour 2007. Le projet annuel de performance pour 2008 comporte quelques améliorations pour renforcer leur pertinence.

Il a souhaité formuler quelques réflexions sur la gouvernance du programme 144 inspirées par deux années pleines de gestion sous le régime de la LOLF.

Un programme LOLF est un programme budgétaire recouvrant une politique publique et sa gouvernance doit donc être appréciée sur le double plan de la gestion budgétaire d’ensemble et du management de cette politique. Le contrôle de gestion interne au programme fait le lien entre la gestion budgétaire et l’orientation politique et l’adaptation aux contraintes ou aléas de gestion. L’expérience acquise depuis deux ans dans la conduite du programme 144, programme atypique dont les entités, à l’exception de la DAS, ne relèvent pas de l’autorité organique du responsable de programme, permet de dire aujourd’hui qu’une véritable gouvernance est possible. Certes, les systèmes d’information budgétaires actuels sont insuffisants pour donner sa pleine dimension à l’exercice et les effectifs réduits consacrés au pilotage du programme rendent difficiles de s’extraire au quotidien de la simple gestion d’exécution.

Des signes traduisent toutefois la prise en main progressive et effective par le responsable de programme d’une véritable gouvernance. En témoigne le projet annuel de performance, qui présente cette année une stratégie d’ensemble, ainsi que l’association désormais officielle du responsable de programme à l’élaboration et à la présentation au ministre des documents d’orientation et de programmation des études amont. Il est également possible de citer l’action de fond engagée par la DAS pour relancer l’efficacité des études de prospective et organiser, au sein du ministère de la défense, la mise en cohérence de l’ensemble des aspects de la démarche prospective.

Enfin, la conduite de la gestion 2007 et la préparation du présent projet de loi de finances ont montré que le responsable de programme disposait des moyens réels pour exercer ses arbitrages. Sans atteindre encore sa pleine mesure, la gouvernance du programme 144 a sensiblement progressé.

Par-delà cet optimisme, bien des difficultés restent à résoudre. Certaines, d’ordre technique, le seront de fait par la mise en œuvre du système CHORUS en 2010. D’autres procèdent d’une démarche interministérielle plus complexe, comme le besoin de susciter des arbitrages clairs et d’y associer plus étroitement les responsables de programme en allant au-delà de l’examen des seuls sujets financiers. On peut aussi relever que la lourdeur actuelle du système mis en place pour la LOLF absorbe, au-delà du raisonnable, les acteurs dans des tâches de micro-gestion financière qui ne laisse plus une place suffisante au pilotage par la performance. Le programme 144 a particulièrement souffert de cette situation en raison de la faiblesse des effectifs affectés à son pilotage et de sa complexité intrinsèque.

Afin de prolonger l’action engagée, une réunion du comité de pilotage et d’orientation politique du programme 144 aura lieu avant la fin de l’année afin de réfléchir à un renforcement de son pilotage stratégique. Il s’agit d’amener progressivement l’exercice de la responsabilité du programme du plan budgétaire à celui du contenu et de la cohérence entre les missions. Placée dans une perspective pluriannuelle, la déclinaison de la stratégie sur la base d’objectifs et d’indicateurs plus opérationnels et d’une méthode d’analyse commune des enjeux mènerait à une meilleure adéquation des objectifs et des moyens, tout en permettant d’envisager le développement de politiques transverses dans le domaine des ressources humaines.

L’importance et la cohérence du programme 144 sont parfaitement illustrées dans la démarche prospective engagée par la DAS au sein du ministère de la défense. Fondée sur la mise en cohérence des analyses prospectives des différents services, elle débouche aujourd’hui concrètement sur des documents qui sont à la base des travaux de réflexion engagés pour la préparation du futur Livre blanc. Ainsi en est-il du plan prospectif à 30 ans, du rapport établi conjointement par la DAS et l’état-major des armées sur les engagements futurs et des réflexions de prospective stratégique à l’échéance de 2030 conduites par la DAS avec les différents services.

Cette démarche se développe aujourd’hui dans plusieurs directions : concertation au sein du comité de cohérence de la prospective présidé par le DAS, création d’un référentiel ministériel des activités et des outils de prospective, extension du réseau d’expertise interne et externe. Elle est complétée par des actions destinées à en améliorer les méthodes.

M. Michel Miraillet a conclu son propos en précisant que le 5e séminaire de prospective de la DAS serait organisé au début de 2008.

Le président Guy Teissier a rappelé que l’espace avait été un thème fort des universités d’été de la défense de septembre dernier. Cette dimension est essentielle pour l’observation, la communication et la dissuasion. Il s’est étonné de la légère baisse des crédits de paiement pour le renseignement, surtout dans un contexte d’augmentation des besoins en fonctionnement. Il a souhaité obtenir des précisions sur l’origine de ces évolutions budgétaires, en soulignant l’importance accordée par les parlementaires au renseignement d’origine humaine. Alors que les questions de défense s’élargissent à celles de sécurité et que les travaux de rédaction du Livre blanc s’attachent à cette question, le renseignement doit rester prioritaire.

M. Michel Miraillet a indiqué que la DGSE a bénéficié d’efforts conséquents en matière de personnel : des poste ont été créés en 2007 et, pour 2008, une marge d’embauches supplémentaires a été prévue. Il reste que ce service continue à rencontrer des difficultés pour trouver les personnels aux compétences rares dont il a besoin.

L’amiral Anne-François de Saint-Salvy a précisé que la DGSE a bénéficié d’augmentations d’effectifs substantielles ces dernières années résultant de créations de postes et de transferts d’emplois, en provenance en particulier du programme 178. Les difficultés de recrutement rencontrées ont également été liées au niveau des salaires proposés. Ce service a donc choisi de limiter les recrutements tout en maintenant la masse salariale afin de dégager des moyens lui permettant d’aligner ses offres de rémunération sur celles du marché. Il en résulte en 2007 la persistance de 80 emplois vacants, tandis que les crédits de rémunération sont consommés. De fait, le plafond ministériel d’emplois autorisés est aujourd’hui au niveau des effectifs réalisés.

Il convient d’ajouter que pour 2008, le responsable du programme a choisi de laisser une marge de recrutement supplémentaire à la DGSE et qu’en contrepartie, d’autres entités du programme, notamment l’état-major des armées et la direction du développement international de la DGA, se sont vu imposer des réductions d’effectifs l’an prochain. Il y a donc bien eu application à la DGSE des contraintes d’emploi imposées à l’ensemble du ministère, mais il a été tenu compte de son importance particulière puisqu’elle a reçu une capacité de « respiration » au détriment des autres.

M. Michel Miraillet a relevé que le directeur de la DGSE ne lui avait pas fait part de récriminations particulières en termes de personnels et l’amiral de Saint-Salvy a complété son propos en précisant que le choix de ne pas recruter à hauteur des 80 postes vacants pour embaucher des spécialistes mieux payés avait été effectué par la DGSE elle-même.

M. Yves Fromion a considéré que, même si cela n’est pas toujours simple, il est effectivement possible de trouver des éléments de cohérence dans la construction du programme 144. En ce qui concerne l’analyse stratégique, les thèmes des études financées étaient par le passé souvent peu cohérents. Il a souhaité savoir si le Parlement pourrait avoir connaissance des conclusions de certaines d’entre elles, comme l’engagement en avait été pris auparavant.

S’agissant de la recherche et de l’exploitation du renseignement, il a rappelé que la DGSE représente seulement de l’ordre de la moitié des effectifs et moyens des services équivalents britanniques, reconnus pour leur efficacité. Alors que le niveau des services allemands rejoint celui des services français, il a invité à une grande vigilance dans le domaine du renseignement, celui-ci représentant un moyen de puissance déterminant. Il conviendrait de ce point de vue que les appréciations sur l’état de notre dispositif de renseignement militaire soient présentées avec toute l’objectivité nécessaire afin de ne pas se contenter d’un optimisme de façade.

A cet égard, on peut souligner qu’en matière de drones, la situation est calamiteuse : les ruptures capacitaires sont très importantes, alors que la France souhaitait occuper une place éminente en Europe. Quelles sont les perspectives de rétablissement de la situation ? S’agissant du renseignement d’origine électromagnétique, les insuffisances sont également préoccupantes du fait du non remplacement du DC8–Sarrigue. Même si le niveau technique du renseignement est satisfaisant pour les images, on doit constater une accumulation de lacunes dans les autres domaines qui pèse sur le niveau de nos capacités, y compris en opérations. Ce mouvement doit être enrayé.

Rappelant le rôle essentiel joué par la DAS dans le contrôle des exportations d’armement, il a jugé indispensable la mise en œuvre de réformes du dispositif. Les exportations de matériel de guerre ont chuté de 50 % en 15 ans et la gestion prudentielle de la commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre doit être équilibrée par un soutien gouvernemental affirmé.

Après avoir fait état de ses fonctions antérieures au sein du Ministère des Affaires étrangères, M. Michel Miraillet a déclaré mesurer la lourdeur des systèmes de contrôle des exportations d’armement. Si les structures qui en sont chargées ne se sont pas adaptées et réformées suffisamment, on peut aussi déplorer une forme d’acharnement des industriels à leur égard, alors qu’eux-mêmes n’ont pas su faire face aux évolutions techniques et commerciales d’un marché mondial pourtant en pleine expansion. Comme le souhaite le ministre de la défense, une réforme rapide des procédures de contrôle doit intervenir. Elle sera d’autant plus difficile que les services concernés n’ont pas depuis des années bénéficié des investissements nécessaires, tant sur le plan de la formation des personnels que sur celui des systèmes d’information. Par ailleurs, il est indispensable que l’organe de contrôle puisse avoir recours à l’expertise technique de l’ensemble de la DGA et pas seulement de sa direction du développement international, dont la mission est avant tout la promotion commerciale. Un contrôle sérieux reste nécessaire, compte tenu des tentations toujours présentes chez les industriels.

M. Yves Fromion a estimé que les libertés que certains industriels peuvent prendre avec la réglementation tiennent aussi à l’inadaptation des procédures en vigueur et surtout à l’incapacité des administrations concernées à rendre une décision dans un délai acceptable.

Partageant cette analyse sur les délais de réponse, M. Michel Miraillet a néanmoins souligné qu’il convenait de préserver l’effectivité des contrôles face aux défis posés par la prolifération. On ne peut s’en remettre à la seule responsabilité des industriels dans un domaine aussi sensible. Le dispositif a au moins eu le mérite jusqu’à présent de ne pas exposer la France aux reproches que l’on peut faire à certains membres de l’Union européenne pour la diffusion de technologies sensibles dans des États proliférants. Il n’en reste pas moins qu’une réorganisation administrative d’ampleur doit intervenir dans les plus brefs délais, même si les efforts à entreprendre se heurtent actuellement à un déficit de main d’œuvre qualifiée ; la DGA se refusant notamment à détacher les ingénieurs principaux de l’armement demandés afin de contrôler les biens à double usage.

Le directeur des affaires stratégiques a souligné l’importance de la préservation d’une capacité nationale autonome de renseignement. Les conclusions du Livre blanc sur la défense devraient permettre de définir sur le long terme les objectifs dans ce domaine ainsi que les moyens nécessaires pour les services de renseignement. Il reste que l’organisation de transferts importants de personnels du ministère de la défense vers ces derniers ne sera pas une opération facile.

La mise en œuvre de capacités de renseignement à l’échelle européenne n’est pas non plus exempte de difficultés. En témoigne par exemple le fait que la France ne peut effectuer une programmation du système Hélios II sans l’accord exprès de tous les partenaires, alors qu’elle finance ce programme à hauteur de 92 %.

Répondant à une remarque de M. Yves Fromion sur l’absence d’utilisation du centre satellitaire de l’Union européenne, que la France finance pourtant largement, il a estimé que le renseignement relevait encore de relations bilatérales entre pairs et ne pouvait être pour le moment européanisé. Le développement souhaitable de nos capacités de renseignement se heurte aux contraintes budgétaires.

L’amiral Anne-François de Saint-Salvy a ajouté que le renforcement de nos capacités en matière de renseignement relève de décisions politiques dépassant largement la capacité d’arbitrage du responsable du programme 144 et doit être traité dans le cadre du Livre blanc.

Il a précisé que les études prospectives font l’objet d’un effort de rationalisation et de mise en cohérence depuis la fin de l’année 2006. Le CCEP centralise désormais l’ensemble des propositions d’études et fixe les orientations annuelles : les études sont ainsi moins nombreuses et plus ciblées. La liste des études financées sera arrêtée en novembre et il sera possible d’assurer la transmission d’études complètes aux rapporteurs intéressés à leur demande. En 2006, les crédits d’études n’ont pas été épuisés : 60 études ont été réalisées pour un montant total de 1,4 million d’euros, sensiblement inférieur aux dotations initiales. Au 1er octobre 2007, les études ont été moins nombreuses (50) mais pour un montant nettement supérieur (2,5 millions d’euros).

——fpfp——