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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mercredi 17 octobre 2007

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 8

Présidence de M. Guy Teissier, président

– Audition de M. Christian Piotre, secrétaire général pour l’administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2008

Audition de M. Christian Piotre, secrétaire général pour l’administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2008

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Christian Piotre, secrétaire général pour l’administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2008 (n° 189).

Après avoir indiqué que les crédits consacrés à la défense dans le projet de loi de finances s’élèvent à 48,1 milliards d’euros, M. Christian Piotre a précisé que les programmes placés sous la responsabilité du secrétaire général pour l’administration (SGA) représentent sept milliards d’euros : 3,44 milliards d’euros au titre du programme 212 « soutien de la politique de défense » ; 258 millions d’euros pour le programme 167 « liens entre la nation et son armée » et 3,36 milliards d’euros au titre du programme 169 « mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».

Le programme 212 est le programme transversal de soutien et d’administration centrale du ministère de la défense. Il regroupe les fonctions de direction, de contrôle et de soutien à compétence ministérielle (cabinets des ministres, contrôle général des armées, plusieurs directions du SGA).

L’ajustement technique du plafond d’emplois autorisé (PMEA), sans incidence financière, se traduit par la suppression de 218 équivalents temps plein travaillé (ETPT) dont 65 militaires et 153 civils. La contribution du programme au non remplacement d’un départ à la retraite sur deux se traduit par la suppression de 109 ETPT concernant 59 militaires et 50 civils.

Il a cité, parmi les principales variations du titre 2, le rééquilibrage des crédits entre les programmes du ministère qui se traduit par une contribution du programme 212 de 50 millions d’euros et l’augmentation substantielle des crédits de la subvention d’équilibre du fonds spécial des pensions des ouvriers industriels de l’État (FSPOEIE) qui passe de 832 millions d’euros à 915 millions d’euros. Les mesures de périmètre, d’un montant de 95,88 millions d’euros, portent pour l’essentiel sur l’augmentation du nombre d’immeubles concernés par les loyers budgétaires : 195 nouveaux immeubles représentant 86,82 millions d’euros, portant ainsi le total des loyers budgétaires à 153,89 millions d’euros.

Abordant la condition militaire, il a évoqué le plan d’amélioration de la condition militaire (PACM) dont l’objet est de compenser les sujétions, de financer l’exercice du temps d’activité et d’obligations professionnelles complémentaires (TAOPC), de conforter l’environnement social des militaires et le fonds de consolidation de la professionnalisation (FCP) qui vise à renforcer l’attractivité du métier et à fidéliser le personnel en favorisant les qualifications, le potentiel et les responsabilités. Le plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) renforce l’encadrement de la gendarmerie par la promotion interne, répondant ainsi aux objectifs de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI). Le coût de la poursuite de ces trois plans est de 41,3 millions d’euros. Enfin, suivant les recommandations du haut comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM), 44,82 millions d’euros iront à la revalorisation des parcours indiciaires des caporaux et caporaux-chefs ainsi que les deux premiers échelons du grade de gendarme et de sergent.

La continuation de l’effort en faveur des personnels civils se traduit par un montant de 15,9 millions d’euros en mesures nouvelles permettant la revalorisation des parcours professionnels dans les filières administrative et technique.

Il a ensuite présenté les mesures consacrées à l’action sociale d’un montant de 90 millions d’euros d’autorisations d’engagement, en précisant qu’elles seront affectées à quatre types d’intervention : vie personnelle et familiale, vie professionnelle, vacances, actions de soutien au réseau social.

Les crédits de l’action « Politique immobilière » s’élèvent à 905 millions d’euros en autorisations d’engagement et 945 millions d’euros en crédits de paiement. Sont concernées la mise aux normes d’infrastructures techniques de la DGA ; la réalisation d’infrastructures opérationnelles, en accompagnement de l’arrivée de nouveaux équipements tels le Rafale, le NH 90, le Tigre ou le M51 ; le transfert de certains organismes tels l’école nationale de techniques avancées (ENSTA) ou l’EMAT ; et enfin l’adaptation de l’offre de logements pour 105 millions d’euros.

Par ailleurs, le ministère poursuit sa démarche de rédaction de schémas directeurs et de dépollution/aliénation en employant les crédits du compte d’affectation spéciale alimenté par le produit des ventes réalisées.

Il a enfin précisé que la rationalisation des systèmes d’information d’administration et de gestion (SIAG) bénéficiera de 114,69 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de 120,22 millions d’euros de crédits de paiement.

S’agissant du programme 167 « liens entre la nation et son armée », il a rappelé qu’il regroupe les politiques concourant à la promotion de l’esprit de défense et au développement de la relation entre la nation et les forces armées. Il englobe également la communication, les politiques de mémoire et culturelle, ainsi que l’organisation de la JAPD.

L’ajustement technique du PMEA, sans incidence financière, se traduit par la suppression de 133 ETPT dont 82 militaires et 51 civils. La contribution du programme au non remplacement d’un départ à la retraite sur deux permet à la suppression de 70 ETPT soit 42 militaires et 28 civils. La direction du service national prévoit 780 000 jeunes présents aux JAPD en 2008, et poursuivra son action de réduction des coûts de fonctionnement. Enfin, la politique de mémoire et de valorisation du patrimoine culturel concerne plusieurs projets, notamment la dotation en capital pour la « Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie et des combats de Tunisie et du Maroc », la mise en valeur du site du Mont Valérien, avec la création d’un centre d’information du public, l’aménagement d’une exposition permanente consacrée à la répression de la Résistance et aux fusillés d’Île-de-France. Le budget 2008 prévoit aussi le financement d’investissements dans les musées et, en particulier, l’achèvement d’une grande partie du programme ATHENA du musée de l’armée, consacré à la rénovation de cette institution depuis 1999.

Il a précisé que le programme 169 « mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » recouvre deux grands domaines : la reconnaissance et la réparation en faveur du monde combattant (80 % de 1’activité) et la mémoire. Les dépenses de personnel et de fonctionnement représentent 3 % des crédits. Deux établissements publics apportent leur concours à la réalisation du programme : 1’ONAC et l’INI. L’ajustement technique du PMEA, sans incidence financière, se traduit par la suppression de 73 ETPT civils. La contribution du programme au non remplacement d’un départ à la retraite sur deux permet la suppression de 29 ETPT civils.

Le programme 169 améliore les prestations dues aux anciens combattants, ainsi, la dotation par pensionné poursuit sa progression, de 3,27 %, après avoir augmenté de 5,05 % en 2007 du fait de la décristallisation des pensions. De 2002 à 2008, cette dotation est passée en moyenne de 7 830 euros à 9 154 euros, ce qui constitue une hausse de 17 % sur la période. Une mesure nouvelle de 24 millions d’euros doit permet le financement supplémentaire des mesures de décristallisation, notamment pour l’ouverture du dispositif à près de 3 800 veuves qui n’avaient pas pu faire valoir leur droit à pension auparavant.

L’action sociale de l’ONAC est abondée de 4,5 millions d’euros et disposera en 2008 d’un budget de 5 millions d’euros prioritairement destiné à près de 3 200 veuves en difficultés financières. Les subventions de fonctionnement des établissements publics augmentent significativement, l’ONAC et l’INI recevant respectivement 2,8 millions d’euros et 0,8 million d’euros supplémentaires en 2008.

Les moyens sont ajustés aux évolutions démographiques : les pensions militaires d’invalidité de victime de guerre sont en baisse de 102 millions d’euros en raison de la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires ; le remboursement des soins de sécurité sociale aux invalides décroît de 4,5 millions d’euros pour la même raison ; le fonds de solidarité pour les anciens combattants d’Afrique du nord et d’Indochine baisse de 6,46 millions d’euros. Les coûts de fonctionnement des services et les rémunérations (actions 4 et 5) diminuent de 3,7 millions d’euros, soit - 5,4 % du fait de la diminution des effectifs des directions interdépartementales des anciens combattants.

M. Christian Piotre, abordant les grands chantiers en cours, a tout d’abord fait valoir que, depuis 2005, un travail important a été mené pour adapter les statuts particuliers après la refonte du statut général. À la rénovation de ces statuts est liée la révision des grilles indiciaires qui doit notamment tenir compte des conclusions du premier rapport du HCECM et mieux différencier les carrières. Cette réforme doit aboutir en 2008 pour pouvoir entrer en vigueur en 2009.

S’agissant de la reconversion, il a estimé que les dispositifs d’aide au retour à la vie civile des militaires font partie intégrante du chantier de rénovation de la politique des ressources humaines militaires engagée à la fin de l’année 2005.

Quatre axes d’action sont privilégiés : la personnalisation et l’adaptation du dispositif de reconversion et l’aide aux personnels dont le service a duré moins de quatre ans ; l’amélioration du fonctionnement de la chaîne reconversion en lui donnant plus de cohérence et d’unité ; l’amélioration de la reconnaissance des qualifications militaires par les autres fonctions publiques ; le développement du partenariat entre le ministère de la défense et les entreprises.

Des progrès certains ont été accomplis par la défense dans le domaine du développement durable avec notamment la réduction du nombre de ses installations classées, la dépollution des terrains, l’élaboration des plans d’exposition au bruit, les chartes qualité de l’environnement sonore pour les aérodromes militaires, la cession de 1 500 hectares au conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CELRL).

Il a par ailleurs indiqué que dans le droit fil de la stratégie nationale de développement durable qui s’achève en 2008 et des travaux du « Grenelle de l’environnement », le ministère prépare un plan d’action « environnement », et précisé que le Fonds d’intervention pour l’environnement (FIE) sera doté dès 2008 de 500 000 euros contre 178 000 actuellement pour financer des projets innovants.

Rappelant que la LOLF prescrit à l’État de tenir une comptabilité patrimoniale, dans des conditions aussi proches que possibles de celles que connaissent les entreprises, il a fait valoir que le ministère de la défense a un poids considérable dans le bilan de l’État, avec des actifs bruts évalués à environ 130 milliards d’euros qui rassemblent 98 % des actifs incorporels de l’État, 80 % de ses immobilisations corporelles et 98 % des stocks.

La certification des comptes 2006 a été obtenue sous 13 réserves majeures, dont certaines concernent le ministère : les systèmes d’information financière du ministère sont anciens et inadaptés à la nouvelle comptabilité ; les dispositifs de contrôle interne et d’audit interne viennent d’être mis en place dans le ministère ; les actifs du ministère de la défense ne sont pas tous comptabilisés et la valorisation des opérations d’armement n’est pas encore conforme aux normes comptables.

Il a indiqué que la défense, comme les autres ministères, est engagée dans la révision générale des politiques publiques qui doit permettre d’identifier des marges de manoeuvre dans les organisations et les coûts de fonctionnement.

Les services du SGA sont concernés par ces travaux, au sein du programme 212 (service d’infrastructure de la défense, service des moyens généraux) ou dans d’autres programmes (direction du service national au programme 167 et direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale au programme 169).

En conclusion, M. Christian Piotre a considéré que le projet de budget donne au ministère de la défense les moyens de poursuivre les actions engagées depuis le début de la loi de programmation.

Cela se vérifie dans le domaine des équipements comme dans celui des politiques ministérielles dont le SGA est chargé de la mise en oeuvre, sous l’autorité du ministre et du secrétaire d’État. Pour autant, comme par le passé, la défense contribue aux efforts demandés dès 2008 à toutes les administrations, comme le montrent les réductions d’effectifs et les économies demandés sur le fonctionnement courant.

Le président Guy Teissier a salué le fait que l’État a tenu sa parole dans le domaine de la revalorisation de la condition militaire et a choisi à juste titre de traiter prioritairement le cas des militaires du rang, des jeunes sous-officiers et des gendarmes. Soutenues par l’ensemble de la commission de la défense, ces dispositions sont utilement complétées par les mesures destinées à mieux prendre en considération les besoins particuliers des militaires ayant servi moins de quatre ans, lesquels constituent à tous égards les populations les plus fragiles.

Il a par ailleurs relayé deux inquiétudes des représentants des organisations syndicales du ministère de la défense précédemment entendues, la première portant sur une dérive vers une forme de « militarisation » des emplois, la seconde sur les projets de réorganisation de l’armée de terre.

M. Christian Piotre a souligné l’ampleur du défi que constitue l’amélioration de la gestion des ressources humaines pour le ministère de la défense. De 2003 à 2006, les dépenses liées à l’indemnisation du chômage sont passées de 45 à 90 millions d’euros. Cela a conduit à s’interroger sur les dispositifs de reconversion, tout particulièrement pour les personnels ayant servi durant une courte durée, qui ont souvent un faible niveau de formation et pour lesquels la valorisation des acquis professionnels est difficile à mettre en œuvre. Plus généralement, c’est la question de la capacité du ministère de la défense à recruter et à fidéliser les personnels dont il a besoin qui est posée, notamment au regard des évolutions de la démographie et du marché du travail qui se traduisent par une concurrence accrue entre employeurs. Les débats sur les questions de défense sont souvent davantage orientés vers les questions de matériels et de format des forces, mais il convient de ne pas perdre de vue les aspects socio-économiques et humains. L’armée de terre dispose de seulement 1,2 candidat par poste et ce taux de sélection pourrait encore diminuer en raison des évolutions du marché du travail.

Les reproches portant sur une militarisation supposée des emplois sont récurrents de la part des organisations syndicales mais ils ne reposent sur aucune constatation objective. Le plus souvent ce sont des situations ponctuelles qui sont mises en exergue, comme en témoignent les protestations survenues lors de l’attribution à des militaires de postes de direction au sein du service industriel aéronautique (SIAé). Le ministère réalise en fait d’importants efforts pour affecter des civils dans des postes d’encadrement et de responsabilités, notamment par le biais d’un projet visant à assurer aux cadres supérieurs issus des corps techniques une large place dans les corps d’encadrement supérieur, avec un statut A+ en cours d’élaboration. La logique de la LOLF favorise d’ailleurs ce mouvement dans la mesure où les coûts des personnels militaires, plus élevés en raison de leurs régimes indemnitaires et de pension, poussent à les affecter prioritairement aux fonctions opérationnelles.

S’agissant du format et des implantations des armées, de nombreuses réflexions ont été conduites depuis quatre ans qui ont retrouvé une certaine actualité avec la RGPP et l’anticipation de divers scénarios possibles en fonction des travaux de la commission du Livre blanc. La recherche de marges de manœuvres budgétaires au profit de la condition militaire et du renouvellement des matériels conduit en tout état de cause à s’interroger sur le coût de fonctionnement des emprises des armées, toujours croissant du fait notamment des travaux de remises aux normes. Ces réflexions ont, à l’évidence, suscité des inquiétudes, particulièrement là les implantations apparaissent le plus discutables, mais la décision finale appartient aux autorités politiques.

Le président Guy Teissier s’est dit préoccupé de l’effet des diverses rumeurs de réorganisation sur le moral des unités et a souhaité une plus grande transparence quant aux mesures envisagées et à leurs motivations.

M. Philippe Folliot a jugé essentielles les questions de la condition militaire et de l’attractivité des carrières. La qualité des personnels recrutés à court et moyen terme aura un impact sur l’efficacité de l’outil militaire dans les dix années à venir. De ce point de vue, les mesures de remise à niveau prévues dans le projet de loi de finances s’imposaient, y compris celles relatives à l’accueil des enfants en bas âge, l’équilibre familial jouant un rôle certain dans la motivation des personnels. Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur les effets du décret du 21 mai 2005 renforçant le rôle du CEMA et l’état des réflexions concernant le rôle du contrôle général des armées.

M. Christian Piotre a estimé que l’image que donneront les armées tiendra bien évidemment aux mesures en faveur de la fidélisation et aux mesures indemnitaires mais aussi, tout autant, à la disponibilité des équipements, à leur modernisation et à l’action de l’encadrement de proximité.

Le décret du 21 mai 2005 a eu pour objectif de renforcer le rôle d’arbitre du CEMA au sein des armées, afin notamment d’en finir avec des logiques d’armées conduisant à d’éventuelles redondances. Cette autorité accrue s’exerce après examen des dossiers au sein du conseil des systèmes de forces. À ce jour, ce texte n’a pas produit tous ses effets, notamment du fait de l’avancement de la loi de programmation militaire 2003-2008 et de perspectives budgétaires encore peu lisibles. Les prochains mois seront décisifs pour vérifier comment s’exerce ce pouvoir d’arbitrage, tout particulièrement au travers de l’élaboration de la prochaine loi de programmation militaire. Les relations entre les différents acteurs et leurs rôles respectifs ne sont pas encore stabilisés et il faut souhaiter que le CEMA joue pleinement son rôle d’arbitre tout en précisant le rôle de l’EMA et des états-majors d’armée. Des réflexions sont en cours au sein de l’EMA sur la manière d’exercer son rôle de stratège d’ensemble, avec le concours de consultants extérieurs. En matière de gestion des ressources humaines, on peut penser que le partage le plus efficace consisterait à laisser à l’EMA le soin de fixer les besoins, au SGA celui de synthétiser une politique de recrutement et des normes communes, tandis que les gestionnaires d’armées resteraient au contact direct avec les réalités du recrutement. Les modifications au dispositif seront plus efficaces si elles proviennent du retour d’expérience plutôt que d’une construction abstraite.

La question de l’avenir du contrôle général des armées se pose avec d’autant plus d’acuité que les principes fondateurs à l’origine du corps ne sont plus en harmonie avec les exigences nouvelles de gestion découlant de la LOLF, comme l’évaluation précise des performances et des coûts des politiques menées. Il conviendra donc d’adapter la mission et les métiers du contrôle, sans doute en développant son rôle d’audit. Une réflexion doit également être menée sur la cohérence des différents contrôles.

Après avoir observé que les orientations budgétaires actuelles appellent des efforts de rationalisation et de concentration des activités, Mme Patricia Adam a déploré que les parlementaires ne disposent que de peu d’informations et souhaité que les collectivités territoriales soient associées à la concertation préalable aux prises de décision. Alors que des investissements importants ont été réalisés, en particulier pour le soutien des forces, des rumeurs concernant de possibles fermetures de sites se propagent et suscitent des inquiétudes. La discussion doit être menée région par région afin de vérifier la pertinence des choix. Les collectivités territoriales et le ministère doivent pouvoir travailler en bonne intelligence, notamment autour des pôles de compétitivité.

Les écoles militaires et les écoles d’ingénieurs dépendant du ministère de la défense sont en situation de concurrence pour leurs budgets de recherche et d’équipements des laboratoires, situation qui produit des redondances et, partant, des incohérences dans les dépenses d’investissement.

Par ailleurs, des rumeurs circulent au sujet de restructurations envisagées des archives de la marine, situées à Brest ; il est regrettable que les parlementaires ne découvrent ces projets que par la presse. Des investissements ont été réalisés localement et les collectivités territoriales auraient utilement pu contribuer à la réflexion sur ce dossier.

Mme Patricia Adam a également souligné le manque de concertation dans le domaine de l’action sociale. En ce qui concerne les crèches, les particularités propres aux besoins des militaires sont reconnues. Les discussions engagées avec les caisses d’allocation familiale doivent être réorientées afin que le caractère atypique des horaires des militaires soit pris en compte par le ministère de la défense, en particulier en termes de coûts.

Le développement durable constitue une obligation reconnue par le ministère de la défense qui participe au « Grenelle de l’environnement ». Qu’en est-il aujourd’hui de la déconstruction des navires ? Le Clemenceau est toujours présent à Brest alors qu’aucune perspective n’est dégagée.

M. Christian Piotre a affirmé que dans le passé, la mise en œuvre s’est faite dans le cadre d’un partenariat étroit avec les collectivités territoriales. Il a à cet égard évoqué le rôle du délégué interministériel aux restructurations de défense. Aucune décision ne sera prise tant que les conclusions du Livre blanc et de la revue générale des politiques publiques (RGPP) ne seront pas connues puisqu’elles détermineront l’ampleur des restructurations. Différents critères permettront d’apprécier les propositions d’évolution qui seront avancées : économiques, promotion de la recherche, investissements déjà réalisés… Après avoir déploré l’incident relatif aux archives, placées sous sa responsabilité, il a assuré Mme Patricia Adam qu’une réponse rapide lui serait donnée.

M. Christian Piotre a estimé par ailleurs que la France est sous-équipée dans les domaines comptable et industriel en matière de déconstruction de flottes retirées du service actif, qu’elles soient aériennes terrestres ou navales. À l’avenir, le coût des programmes englobera les coûts de déconstruction. Hélas aucune filière ne manifeste aujourd’hui d’intérêt pour cette activité. Malgré un rapport parlementaire, aucune avancée significative vers la constitution d’une capacité de déconstruction n’a été engagée. En ce qui concerne le Clemenceau, les expertises sont proches de leur terme mais la déconstruction ne commencera pas tant qu’un maître d’œuvre industriel ne se sera pas engagé sur le projet.

Pour la recherche et les pôles de compétitivité, les redondances éventuelles et les synergies possibles seront étudiées.

M. Michel Voisin a rappelé que la loi de professionnalisation des armées prévoyait un enseignement relatif à la défense dans les établissements scolaires. Il semble que cette disposition soit restée lettre morte. Il a ainsi regretté que sa présence à la lecture de la lettre de Guy Môquet dans un collège de sa circonscription ait dû être annulée en raison d’une opposition des enseignants à la cérémonie.

Concernant la fermeture de bases ou d’autres sites de la défense, il a observé que les difficultés de cession des terrains tiennent en grande partie aux opérations de dépollution nécessaires.

M. Christian Piotre a reconnu que la mise en oeuvre du « parcours citoyen » n’était pas parfaite. L’élaboration d’un protocole entre le ministère de la défense et l’éducation nationale a été engagée il y a deux ans et a abouti en début d’année. Les échanges et engagements réciproques témoignent d’une volonté commune d’aboutir. Il reste que dans les faits, l’application des circulaires interministérielles dépend de l’encadrement des établissements et du bon vouloir des enseignants.

En ce qui concerne le patrimoine immobilier, une réflexion est en cours sur l’aménagement de tous les dispositifs d’accompagnement qui seraient nécessaires. Trois séries d’instruments ont été identifiées : des mesures en faveur du personnel ; l’adaptation de l’offre de logement ; l’examen des dispositions législatives et réglementaires qui amélioreraient les opérations de déconstruction et de dépollution.

M. Pierre Forgues a souhaité connaître la nature des partenariats tissés entre le ministère de la défense et les entreprises privées en matière de reconversion des personnels militaires : s’agit-il d’une collaboration en matière de formation ou bien d’embauche ? Il a ensuite évoqué la question de la déconstruction des aéronefs, en évoquant les blocages dus au ministère des finances pour la livraison des appareils aux industriels.

M. Christian Piotre a indiqué que les partenariats avec les entreprises sont construits selon une logique « gagnant-gagnant » : lorsqu’une entreprise cherche à embaucher, le ministère de la défense s’engage à lui proposer des personnes présentant des garanties en matière de compétences et/ou de comportement et, en contrepartie, l’entreprise s’engage à leur délivrer une formation afin de transformer l’expérience en qualification et d’éventuellement les embaucher à l’issue de la période d’essai. Les contacts directs avec les entreprises sont privilégiés dans les bassins d’emplois où existent des sorties importantes de personnel militaire.

S’agissant de la déconstruction des matériels militaires en fin de vie, il a fait état de difficultés avec le service des Domaines du ministère des finances, qui est chargé de vendre les équipements après que ceux-ci ont été déclassés. Un protocole de simplification des procédures est en cours de rédaction. Son application devrait donner plus de visibilité aux industriels, qui ont besoin, pour établir leurs plans de charge, d’une plus grande fluidité dans l’approvisionnement de la chaîne de déconstruction.

M. Jacques Lamblin a rappelé que l’attractivité de la condition militaire était fortement liée à la question du niveau de vie. Or celui-ci est, pour les militaires comme pour le reste des ménages français, fortement conditionné par la possibilité de disposer d’un second salaire grâce au travail du conjoint. Dans le choix d’une affectation, la possibilité pour celui-ci de trouver un emploi est ainsi devenue déterminante. Il serait donc souhaitable que l’armée développe dans ses zones d’implantation, en collaboration avec les collectivités locales, des structures d’aide à l’emploi des conjoints non militaires. En revanche, cette question du potentiel d’emploi des conjoints ne doit pas devenir un critère majeur dans les choix des restructurations à venir, ceux-ci devant être établis sur la base d’impératifs de nature militaire. Il ne faudrait pas que les implantations dans les bassins d’emploi les plus dynamiques soient systématiquement privilégiées.

M. Christian Piotre a estimé qu’il existe parfois des contraintes inconciliables, qu’il s’agisse de l’emploi du conjoint ou de la scolarisation des enfants. Le ministère fait de son mieux pour accompagner les familles lors d’une mobilité et a notamment créé des cellules d’aide à l’emploi du conjoint après mutation. Les armées ont beaucoup évolué sur la question de la mobilité et de grands efforts ont été faits pour assurer une stabilité du milieu familial. La question reste néanmoins extrêmement difficile à traiter et, lors de la définition des schémas d’implantation, un équilibre devra être trouvé entre différentes contraintes. Il n’y a pas, pour le moment, de décision en la matière.

Il a ensuite indiqué qu’il rendrait compte des préoccupations exprimées par les parlementaires quant à leur manque d’information et d’association aux processus de réflexion en cours. Il a également signalé que le ministre avait récemment rencontré les cadres de l’administration pour leur communiquer des éléments de calendrier et qu’il fera de même, le 8 novembre, avec les chefs de corps.

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