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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mercredi 13 avril 2011

Séance de 10 heures 30

Compte rendu n° 36

Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente

–  Audition, ouverte à la presse, de M. Xavier Darcos, ambassadeur, chargé de mission pour l’action culturelle extérieure de la France, président de l’Institut français, sur la mise en place de l’Institut français

Information relative à la Commission

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 13 avril 2011

La séance est ouverte à dix heures trente.

(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)

La Commission procède à l’audition, ouverte à la presse, de M. Xavier Darcos, ambassadeur, chargé de mission pour l’action culturelle extérieure de la France, président de l’Institut français, sur la mise en place de l’Institut français.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Nous avons le plaisir d’accueillir M. Xavier Darcos, président depuis le début de cette année de l’Institut français qui a été créé par la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État.

Nous attachons une grande importance à la présence culturelle de la France à l’étranger ainsi qu’à l’attractivité culturelle de notre pays qui est un facteur de rayonnement et de puissance, et nous nous réjouissons, monsieur le président, de votre nomination à la présidence du nouvel établissement public qui rassemble les compétences auparavant dévolues à l’association CulturesFrance, qui s’appuie sur le réseau des centres et instituts culturels français à l’étranger et qui collabore avec le réseau des Alliances françaises.

Vous avez déjà pu rendre compte du démarrage de l’Institut français à nos collègues de la Commission des affaires étrangères. Pour ce qui nous concerne, nous souhaitons vous entendre sur les objectifs que vous vous êtes fixés et sur la façon dont vous allez accomplir les missions qui vous ont été assignées par la loi. Je pense notamment à l’expérimentation du rattachement à l’Institut français des services culturels des ambassades, au rapprochement avec les Alliances françaises et, plus généralement, à la volonté que nous avons eue lors des débats de simplifier et de renforcer la présence culturelle française. Vous pourrez peut-être également nous donner des éléments sur le contrat d’objectifs et de moyens que vous finalisez avec l’État.

M. Xavier Darcos, président de l’Institut français. Nous avons déjà eu l’occasion avec votre Commission, lors d’une réunion conjointe avec une autre, d’évoquer la création de l’Institut français. Aussi, je ferai plutôt un point d’étape. La mise en place de l’Institut, une fois n’est pas coutume, s’est faite dans un délai relativement bref, qu’il s’agisse de traduire la loi de 2010 en décrets d’application ou de prendre les dispositions nécessaires pour le démarrage puis pour le fonctionnement de cette lourde machine dès le 1er janvier 2011. Cependant, même si l’établissement public est déjà en action – mon propre agenda est là pour le prouver ! –, nous sommes dans une période de transition puisqu’il nous faut encore organiser la première tenue du conseil d’administration – j’espère avant l’été, le 18 juin – et que nous attendons la nomination de plusieurs représentants, ceux des ministères des affaires étrangères et européennes et de la culture et de la communication et ceux des départements et régions. Le décret du 30 décembre 2010 relatif à l’Institut français prévoit à cet égard que le conseil d’administration comprend, outre son président, vingt-neuf membres : deux députés et deux sénateurs – je me félicite d’y voir siéger pour ce qui vous concerne deux bons connaisseurs du réseau culturel extérieur, M. Didier Mathus et M. Hervé Gaymard –, treize représentants de l’État, cinq personnalités qualifiées, quatre représentants des collectivités territoriales et trois représentants du personnel de l’établissement.

Il conviendra également de réunir avant l’été, si possible au mois de juin, le conseil d’orientation stratégique. Bien que l’institut n’ait qu’une tutelle – le Quai d’Orsay –, le président de ce conseil – le ministre des affaires étrangères – est assisté d’un vice-président en la personne du ministre chargé de la culture. Là aussi, un député et un sénateur doivent être désignés par leur assemblée respective.

Toujours parmi les obligations administratives nécessaires au bon fonctionnement de l’établissement public, nous aurons à finaliser la conclusion d’une convention triennale d’objectifs et de moyens. La logique de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) nous obligeant à rédiger un texte relativement complexe, de nombreuses réunions y sont consacrées sous la direction du secrétaire général du Quai d’Orsay. Ce document sera non seulement signé par les ministères des affaires étrangères et de la culture, mais aussi par celui du budget.

Par ailleurs, nous avons des discussions compliquées – dues notamment à la Révision générale des politiques publiques (RGPP) – pour achever le transfert de la masse salariale des agents des deux ministères concernés : si nous avons pratiquement conclu le transfert des sept agents du ministère de l’éducation nationale, je dois rencontrer le ministre de la culture dans dix jours s’agissant de ses six agents transférés. Dans l’esprit de la loi, l’Institut devait être doté à Paris pour son fonctionnement national de 200 emplois. Nous en comptons aujourd’hui environ 150, et il faudra absolument que les emplois complémentaires soient transférés car nos missions sont très lourdes, bien au-delà de celles de CulturesFrance – je pense notamment à l’expérimentation du rattachement à l’Institut français de treize antennes du réseau culturel de la France à l’étranger.

Je rappelle en effet, concernant cette expérimentation, qu’à moyen terme la totalité des centres et instituts devrait être rattachée à l’Institut français sous un logo unique. C’est un sujet difficile, qui a fait l’objet de nombreuses discussions, voire de résistances, certains de nos représentants locaux ayant le sentiment d’être dépossédés d’une partie de leurs responsabilités. Pour autant, si l’on veut que l’Institut français soit crédible et comparable à ses homologues étrangers tels que le British Council ou le Goethe Institut, la mise en réseau est nécessaire. Un rapport, remis par nous sur ce sujet le 31 mars, sera d’ailleurs transmis au Parlement sur ce point.

Les difficultés sont d’ailleurs d’ordre moins théorique – car tout le monde comprend bien l’intérêt d’un réseau unique – que technique, du fait des nombreux problèmes que cela pose en termes de rattachement administratif ou encore de contrats locaux, surtout dans les petits postes. Notre ambassadeur à Belgrade me faisait ainsi part hier de sa difficulté, en raison de la faiblesse de son service de coopération culturelle, à faire en sorte qu’une partie de ses cadres se partage entre les compétences liées à la gouvernance et celles liées à la culture.

La situation comptable de l’Institut repose sur un budget initial de 45 millions d’euros, qui sera porté, si l’expérimentation réussit, à 67,3 millions d’euros au 1er janvier 2012 puisque ces postes représentent aujourd’hui 22,3 millions dont 10 de recettes. La montée en puissance du réseau unique changera donc notre budget, ce qui exigera d’ailleurs un changement de notre système comptable – ce qui est un très grand défi – pour le rendre compatible avec celui des établissements à autonomie financière (EAF), lesquels sont soumis au régime de la comptabilité publique.

Si l’expérimentation réussit, nous procéderons, au 1er janvier 2013, à l’organisation du réseau unique. Cette réussite tient à deux éléments : d’abord que l’expérimentation soit réversible – si elle ne marche pas –, ensuite qu’elle soit représentative, et c’est pourquoi nous avons choisi des postes extrêmement différents qui vont de ceux de l’Inde et du Chili, à ceux du Koweït, du Ghana, de Singapour, du Sénégal, de Serbie ou d’Abu-Dhabi. Ce dernier exemple est d’ailleurs caractéristique des pays dans lesquels la diplomatie française a fait le choix de renforcer notre action, sachant que les Émirats sont eux-mêmes très demandeurs : il existe à Abu-Dhabi une Sorbonne et un Louvre, dotés de budgets de 500 millions d’euros, et il serait dommage que l’action culturelle française proprement dite soit en retrait vis-à-vis de ces établissements publics qui créent des lieux nouveaux. L’Institut français doit venir en complément et en appui. Tel devra être aussi le cas à Shanghai où les acteurs culturels devront contribuer à donner vie au pavillon français de l’Exposition universelle – conservé, contrairement à l’immense majorité des autres. Peut-être même faudra-t-il y installer notre Institut – solution que j’ai examinée avec le consul général.

Je cite ces deux exemples pour montrer combien il faut faire du cousu main, en s’adaptant aux divers lieux et situations locales. En Inde, où le réseau repose essentiellement sur celui des Alliances françaises, faire entrer ce dernier dans une logique unique mérite ainsi une attention spécifique.

Je suis convaincu de l’utilité de cette mise en réseau. Elle constitue une valeur ajoutée en rendant beaucoup plus lisibles les actions de la France dans le monde, en permettant une économie de moyens, et surtout en promouvant un projet commun de diplomatie culturelle française : les valeurs portées par la France ne peuvent être différentes selon les pays, qu’il s’agisse de l’idée que nous nous faisons de la gouvernance, des droits de l’Homme, du rapport à l’environnement, du dialogue Nord-Sud ou encore de la répartition des richesses. Au-delà de la marque unique « Institut français », il faut une stratégie commune dans ces domaines. L’Institut constitue à cet égard un appui à la diplomatie française par les voies de l’influence culturelle, bien évidemment sous la tutelle du ministère des affaires étrangères et européennes.

Pour en revenir aux problèmes matériels, nous comptons nous installer dans les deux mois qui viennent dans nos locaux propres en rapatriant nos personnels travaillant aujourd’hui dans différents lieux : rue de la Convention, où se trouve le ministère chargé de la coopération, dans les anciens locaux de CulturesFrance et dans différents ministères. Nous avons à cet effet loué, sous le contrôle de France Domaine, les 3 500 mètres carrés qu’occupait le Commissariat à l’énergie atomique, rue de la Fédération.

Nous avons par ailleurs récupéré 99 salariés de CulturesFrance et recruté 41 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, soit une équipe relativement serrée, je le répète, pour des projets aussi immenses, sachant que nous avons recruté une directrice du département communication et nouveaux médias, Mme Catherine Briat, et que nous allons recruter deux directeurs, un pour le département du mécénat et des partenariats – car il faut évidemment lever des fonds – et un pour celui de la Langue française.

La panoplie d’activités qui est devant nous est énorme, qu’il s’agisse de fournir de l’offre culturelle à nos représentants dans les divers postes, de gérer de grands événements tels que le Pavillon « Les Cinémas du Sud » au Festival de Cannes ou la Biennale de Venise, ou de mettre en œuvre des décisions déjà prises, par exemple l’organisation des Saisons croisées comme celle décidée par le Président de la République et par son homologue Jacob Zuma avec une saison française en Afrique du Sud en 2012 et une saison sud-africaine en France en 2013. C’est vous dire à quel point ces activités sont variées et immenses, mais également passionnantes pour le président que je suis.

J’insisterai plus particulièrement sur l’une de nos compétences nouvelles, à savoir la professionnalisation des acteurs culturels appartenant au réseau, qu’il s’agisse de la formation ou du suivi des carrières. Nos agents dans les services culturels ont en effet des origines et des formations d’une très grande disparité – sachant que tous sont des passionnés qui, avec peu de moyens, accomplissent des miracles. Nous tiendrons à Marseille, dans la deuxième quinzaine de juillet, un premier séminaire de formation.

M. Jean Roatta. L’Institut français est une belle aventure, mais certaines questions se posent.

D’abord, où situez-vous votre action par rapport à celle des attachés culturels des ambassades ? Ensuite, comment fonctionnera le conseil d’orientation stratégique avec 29 membres ? Par ailleurs, la phase expérimentale étant prolongée par une évaluation dont le Parlement sera saisi, sur quels critères repose cette dernière ? Enfin, si l’Institut français est, je le répète, une belle aventure, aurez-vous les moyens de durer et d’en faire une belle réussite ?

M. Hervé Féron.  Dans un contexte financier compliqué pour l’action extérieure de l’État – avec une baisse de crédits de 10 % entre 2005 et 2008, de 13 % en 2009 et de 11 % en 2010 – comment appréhendez-vous le budget que l’on vous a confié, sachant que la nature juridique de l’établissement que vous présidez, à savoir celle d’établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), est un signe de désengagement de l’État ? Pouvez-vous nous rassurer sur la pérennité des dotations de l’État dont la ligne avait par ailleurs disparu dans le texte de loi à l’origine de cet Institut ?

La recherche de nouvelles sources de financement – partenariats privés et tarifications d’activités jugées rentables – est-elle compatible avec la mission de service public de l’Institut français ? La création artistique et culturelle ne risque-t-elle pas d’être remplacée par le commerce culturel ?

La moitié de nos centres culturels ont fermé en Allemagne et la même tendance se profile malheureusement en Italie, en Inde, en Grèce et en Afrique francophone. Quelle est votre position à ce sujet ? Dans la période de transition qui s’ouvre avec le plan triennal 2011-2013 d’évolution du réseau culturel et de coopération, qui privilégie en particulier le rapprochement avec le réseau des Alliances françaises, aucune nouvelle fermeture de centre ne devrait survenir.

Par ailleurs, qu’adviendra-t-il des opérateurs locaux qui ne pourront s’autofinancer ? Devront-ils fermer leur porte ?

Nous avons regretté la précipitation et le manque d’évaluation qui ont accompagné le vote de la loi. À cet égard, une inquiétude tient à la forme commerciale de l’établissement public et donc au statut des fonctionnaires. Celui-ci sera-t-il confirmé aux agents de l’État lors de leur intégration ?

Le personnel du réseau culturel redoute que les propositions de réemploi s’écartent de leurs qualifications d’autant qu’ils souffrent parfois de précarité. Nous devons avoir également une attention particulière pour les recrutés locaux qui pourraient bien être victimes d’un dégraissage. Pouvez-vous nous rassurer à cet égard ?

Enfin, la tutelle unique du ministère des affaires étrangères ne peut réussir que si une étroite collaboration, notamment au sein du conseil d’administration, s’instaure avec le ministère de la culture. Quelle est l’implication de ce dernier dans l’action de l’Institut ?

L’une des missions du nouvel établissement étant la promotion, la diffusion et l’enseignement à l’étranger de la langue française, quels liens envisagez-vous avec l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) qui a une mission assez proche ?

Mme Marie-Hélène Amiable.  À l’occasion du vote de la loi relative à l’action extérieure de l’État, nous avions souligné que la méthode et les moyens proposés pour réformer les structures de l’action culturelle et de la coopération technique n’étaient pas à la hauteur des enjeux s’agissant de la place de la France et de la culture française dans le monde. Par la suite, la baisse continue des crédits du programme « Rayonnement scientifique et culturel » de la mission « Action extérieure de l’État » nous a fait craindre que la loi ne serve qu’à réaliser des économies et à permettre à l’État de se désengager financièrement d’une partie de ses activités diplomatiques. Surtout, le statut d’EPIC impose aux établissements concernés de retirer une part significative de leurs ressources du produit de leurs propres prestations, et d’aboutir à un autofinancement à hauteur de 55 %. Qu’en est-il de cette évolution ? Nous nous inquiétons notamment de l’introduction progressive d’intérêts marchands privés.

Quant aux conséquences du changement de structure sur les personnels, quelles sont les conditions dans lesquelles les agents des opérateurs culturels ont été réemployés ?

S’agissant du rattachement des établissements locaux à l’Institut français, vous avez déclaré le 9 février au Sénat – propos que vous avez confirmé aujourd’hui – qu’il se heurtait à une certaine complexité administrative et réglementaire. La réforme introduite par la loi ne semble pas avoir apporté de changements profonds par rapport aux expérimentations précédentes. Quelles seraient les conditions pour accélérer le processus et pour l’améliorer ?

Enfin quelles sont les priorités culturelles que vous entendez dégager ?

M. Pascal Deguilhem. Parmi les neuf missions assignées à l’Institut français, je retiendrai particulièrement la promotion des échanges artistiques internationaux et du dialogue des cultures par l’organisation de festivals en France et à l’étranger. Je vous demanderai dans ce cadre de bien vouloir intervenir auprès du ministère de la culture – qui ne m’a pas répondu sur ce point –, car des festivals de folklore et d’art traditionnel, qui regroupent chaque année environ 3 000 participants, accueillent 1 million de spectateurs et travaillent sous forme associative, se trouvent en péril à la suite de difficultés juridico-administratives. Je veux parler de l’obtention des visas et de l’obligation qui est faite aux troupes du monde entier, organisées elles-mêmes sous forme associative, de se mettre en conformité avec le droit du travail français, ce qui grèverait considérablement les budgets de la plupart des festivals au point de remettre en question les plus grands, comme ceux de Confolens et de Montignac.

M. Alain Marc. Si nous espérons, dans cette période de mise en place de l’Institut français, que vous réussirez à apporter de la cohérence aux actions dévolues en matière culturelle aux ambassades et aux Alliances françaises, nous nous demandons si un dispositif d’évaluation indépendant en continu permettant de donner une plus grande efficacité à la diplomatie française est prévu, indépendamment du rapport qui sera soumis au Parlement.

Mme Monique Boulestin. La création de l’Institut français a été dictée par l’ambition de conduire une politique culturelle redonnant à la France un dynamisme intellectuel, culturel et linguistique aujourd’hui menacé. Sans revenir sur la forme d’EPIC de l’Institut, quels sont vos moyens pour réaffirmer une telle ambition politique ?

Par ailleurs, quelle est l’articulation entre une structure recentralisée – très « parisienne » – et ses différentes « filiales » à l’étranger ? Comment, dans ce contexte, prendre en compte les diversités et initiatives locales ?

Enfin, quel est le rôle du ministère des affaires étrangères dont vous dépendez pour défendre, valoriser voire moderniser la francophonie qui n’a plus d’interlocuteur clairement identifié au sein du Gouvernement ?

Mme Marie-Hélène Thoraval. Pouvez-vous nous préciser les critères permettant d’évaluer la performance eu égard aux objectifs prévus ? Par ailleurs, comment s’articuleront les actions de l’Institut par rapport à celles de l’audiovisuel extérieur ?

M. Marcel Rogemont.  Le contenu de ces actions me semble d’ailleurs insuffisamment déterminé, faute de précisions suffisantes sur le fond.

On a récemment beaucoup parlé d’identité dans notre pays. À cet égard, s’il y a un marqueur de l’identité française, c’est bien la culture. Aussi, je me demande comment l’État, avec ses 144 instituts, peut encore en supprimer, alors que, pour prendre un seul exemple, la ville de Rennes est capable d’entretenir 19 maisons de quartier...

Au plan géographique, quelles priorités avez-vous définies ? Il a été fait allusion à l’Afrique, mais il ne faudrait pas oublier par exemple le Vietnam qui est francophone. Des précisions seraient utiles pour rassurer les différents instituts.

Concernant notre présence culturelle, sur quels axes allez-vous fonder votre action tant il est vrai que, jusque là, CulturesFrance essayait de fonctionner en liaison avec le ministère de la culture ? Avec votre volonté d’autofinancement, ne risquez-vous pas de gauchir l’objectif culturel premier qui est la présence intellectuelle de la France ?

M. Bernard Debré. Quels seront vos liens avec France 24, TV5 Monde, RFI, qui sont des vecteurs de la culture et, pour certains d’entre eux, de la francophonie ?

Par ailleurs, où s’arrête selon vous la culture ? Au-delà des pièces de théâtre et des expositions, englobez-vous dans le terme « culture » la nourriture, les fromages, le vin, bref l’art de vivre, sachant que le repas gastronomique des Français a officiellement fait son entrée au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco ?

Mme Marie-Odile Bouillé. Comment comptez-vous assurer la cohérence entre le ministère de la culture et votre Institut après que le ministre a défini aujourd’hui même des priorités ?

Par ailleurs, y a-t-il des pays dans lesquels nous ne sommes pas présents aujourd’hui et où il serait intéressant de développer la culture française ?

Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud. Les établissements rattachés à titre expérimental à l’Institut français, ont-ils été volontaires pour participer à l’opération ? À cet égard, comment le réseau culturel français à l’étranger perçoit la mise en place de cet opérateur unique ?

Mme Colette Langlade.  Si la France doit peser sur les affaires du monde, elle doit aussi promouvoir, au-delà de ses idées et de sa langue, toute la richesse de ses régions.

À propos de l’expérimentation, vous avez parlé de la mise en place d’un logo commun, aboutissement d’un travail de mise en réseau. De quels moyens financiers et humains disposez-vous pour y parvenir ?

M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Le réseau culturel extérieur français est aujourd’hui particulièrement morcelé. La politique de promotion culturelle de la France dépend ainsi à la fois des ambassades, des différents instituts culturels et de toutes les Alliances françaises présentes dans le monde. Votre volonté de doter notre pays d’une véritable politique cohérente de promotion de la langue et des productions culturelles, tout en renforçant nos échanges artistiques avec d’autres pays, nécessite donc, pour mener à bien ce projet ambitieux, une rationalisation. Vous avez engagé à cet égard une évaluation de la faisabilité du rattachement du réseau culturel français à l’Institut français. Pouvez-vous nous faire part des premières conclusions de cette expérimentation ?

Avec la mise en place d’un opérateur unique de l’action culturelle extérieure de la France, nous dotons notre pays d’un puissant outil de promotion de ses idées, de sa culture et de sa langue. Nous ne pouvons que nous en féliciter, d’autant que cette politique s’accompagne d’une véritable ambition, marquée notamment par une consolidation des moyens financiers mobilisés. Pour autant, comment l’Institut français pourra faire en sorte que les langues et cultures régionales, fondement de la richesse culturelle de notre pays, soient mises en avant conformément aux orientations définies par l’État ?

Mme Marietta Karamanli. Selon le document de présentation de l’Institut français, la baisse des crédits de l’action culturelle extérieure a été stoppée et 100 millions d’euros seront alloués sur cinq ans. Pour autant, les moyens actuels sont-ils comparables à ceux d’avant la baisse ? Plus précisément, quel est le budget consolidé de votre établissement ?

Toujours selon le même document, l’un des objectifs de l’Institut, s’agissant de la promotion de la langue française, est d’encadrer l’activité d’enseignement dans les réseaux culturels français à l’étranger, sachant que l’on compte 1 million de personnes qui suivent des cours. Si j’insiste sur ce point, c’est parce que j’ai appris le français dans la ville de Volos – je suis d’origine grecque – dans un institut qui n’existe plus, et qui accueillait pourtant 1 000 étudiants.

Quels sont, dans ces conditions, vos objectifs en matière d’apprentissage de la langue ? Envisagez-vous d’instituer des partenariats avec la télévision, notamment TV5 Monde ? Comment comptez-vous faire en sorte que la découverte de notre langue puisse s’appuyer, avec l’usage de nouvelles technologies, sur d’autres vecteurs d’apprentissage ?

M. Michel Herbillon. À mon tour, je serai intéressé par des précisions concernant les liens envisagés entre l’Institut français et l’ensemble de l’audiovisuel extérieur de la France. Il existe là aussi un moyen pour vous de promouvoir notre culture et notre langue.

Concernant justement la promotion de la langue française, on entend de façon récurrente soit des regrets concernant sa perte d’influence soit des vœux pieux. Quel est votre plan d’action concret pour atteindre l’un des objectifs de l’Institut que vous présidez, à savoir promouvoir notre langue ?

Si la vocation du français n’est pas d’être la première langue parlée au monde – si c’était encore possible, cela se saurait ! –, elle est en revanche la première deuxième langue pratiquée lorsqu’un système éducatif oblige à un apprentissage de deux langues vivantes. Ainsi, lorsque l’Espagne a introduit l’obligation d’une deuxième langue, le nombre de lycéens et d’étudiants espagnols apprenant notre langue a été multiplié par sept.

Sachant qu’en Europe, moins d’un tiers des pays a l’obligation d’une deuxième langue vivante, comment l’ancien ministre de l’éducation que vous êtes pourrait faire en sorte que le système d’enseignement, notamment en Europe, oblige à l’apprentissage de deux langues vivantes ?

Mme Françoise Imbert.  Le rayonnement culturel français est moins fort qu’il y a quelques années – je pense notamment à l’Afrique. Cette situation n’est-elle pas due au fait que nous accueillons moins d’élites étrangères pour les former, en raison d’un manque de moyens financiers et d’une politique de visa d’accueil très restrictive ?

L’image culturelle de la France à travers le monde a vieilli – vous le dites vous-même. Dans de nombreux domaines scientifiques, diplomatiques et économiques, la culture anglo-saxonne est devenue la référence, en particulier dans le cinéma. Comment peut-on redonner à notre pays une plus juste place dans le monde culturel et avec quelles priorités ? Comment comptez-vous concrètement faire face à la prépondérance américaine ?

Enfin, l’échec de l’Année du Mexique en France ne va-t-il pas avoir des conséquences sur notre implantation culturelle en Amérique centrale et en Amérique du Sud ?

M. Jacques Grosperrin. Je me félicite que le pari de chapeauter cette nébuleuse de 154 services de coopération et d’action culturelle des ambassades (SCAC) et des 144 instituts français soit en voie d’être réussi.

Sachant que vous œuvrez pour la propagation des « Lumières françaises » avec une inflexion sur le livre et sur des débats d’idée, pouvez-vous apporter des précisions sur la quinzaine d’expérimentations lancée à ce jour, sur les programmes de diffusion de la culture scientifique, et sur le programme de résidence internationale en France comme à l’étranger ?

M. Bernard Lesterlin. S’agissant de la question de la réciprocité, c’est-à-dire de l’accueil en France de futures élites de pays étrangers, je déplore à mon tour d’entendre partout dans les pays de la francophonie le regret de voir la France accueillir de moins en moins de jeunes étrangers, lesquels vont se former ailleurs et souvent dans d’autres langues. La diffusion culturelle de la France par l’accueil en France est pourtant quelque chose d’essentiel.

Voilà un an, nous avons créé le service civique. Ne pourrait-on pas réfléchir ensemble à la façon dont cette forme d’engagement citoyen pourrait renforcer, sans substitution à l’emploi, des structures très éparpillées dans le monde ? Je pense par exemple, au sein de l’Union des Comores, à l’Alliance française de Fomboni dans l’île de Mohéli ou encore à l’île d’Espiritu Santo haut lieu de la francophonie de la République du Vanuatu, où de jeunes volontaires français seraient bien utiles.

M. Pierre-Christophe Baguet. Si je me félicite de votre action au sein de l’Institut français, en espérant que l’expérience sera réussie, je m’interroge sur les moyens de faire participer les collectivités locales aux Saisons croisées. Comptez-vous les y associer ?

M. Michel Pajon. L’Institut français avait en charge la promotion de l’Année du Mexique en France. Même si, pour les raisons que chacun connaît, la plupart des événements ont été annulés, les sociétés du CAC40 avaient été sollicitées pour contribuer au financement de cette opération. Le programme prévoyait également seize manifestations économiques dont une université d’été du Medef et un séminaire avec UbiFrance, l’agence française pour le développement international des entreprises. Ne vous semble-t-il pas dommageable que des entreprises prennent le relais d’un État qui se désengage du financement de telles actions culturelles ?

Pouvez-vous par ailleurs nous préciser votre conception des relations entre culture et économie, et nous faire part des raisons pour lesquelles l’Institut français avait décidé de mettre l’accent sur les échanges économiques lors de cette Année du Mexique en France  plutôt que sur la diplomatie culturelle ?

Mme Marie-George Buffet. L’Institut français a été mis en place pour donner plus de cohérence dans les échanges culturels. Son statut d’EPIC et son obligation d’autofinancement ne risquent-ils pas d’avoir des conséquences sur la qualité du rayonnement culturel, notamment des spectacles vivants en privilégiant des spectacles plus commerciaux ? Comment le conseil d’orientation stratégique veillera-t-il à conserver la qualité culturelle ?

Par ailleurs, dans le rapprochement avec l’audiovisuel extérieur, en particulier TV5 Monde, quels sont vos objectifs concernant le développement de la francophonie ?

M. Patrick Bloche. Vous concevez-vous comme une tête de réseau, avec la volonté de casser des cloisonnements afin d’être en synergie avec l’AEFE, les Alliances françaises, l’audiovisuel extérieur de la France, voire les structures de la francophonie ?

Avez-vous des priorités géographiques, avec le souci de favoriser telle région du monde plutôt que telle autre, ou comptez-vous être présent de manière universelle ?

Enfin, comment allez-vous répondre au reproche qui était fait aux structures qui vous ont précédé de privilégier dans leur programmation toujours les mêmes artistes et de viser des publics très élitistes francophiles voire francophones, certes sympathiques mais vieillissants ? Bref, avez-vous l’ambition de conquérir de nouveaux publics, notamment les jeunes générations à travers le monde ?

Mme Marie-Josée Roig. À mon tour, je souhaiterais savoir si vous allez encourager la collaboration avec les collectivités locales s’agissant notamment des festivals internationaux et des résidences ?

Mme la présidente Michèle Tabarot. Voilà de nombreuses questions qui vous sont posées, sachant que vous aurez également l’occasion demain matin de répondre à celles qui ont plus particulièrement porté sur l’audiovisuel extérieur, puisque vous serez alors auditionné par notre mission d’information relative à la mise en œuvre de la réforme de l’audiovisuel extérieur de la France.

M. Xavier Darcos. Ces nombreuses questions montrent en tout cas l’intérêt que Mmes et MM. les parlementaires portent à l’Institut français, et je tiens à les en remercier. Si vous le permettez, je reprendrai de façon synthétique les principaux points abordés plutôt que de répondre à chacun séparément.

Concernant les moyens, les élus socialistes ont en particulier insisté sur le fait que la création de l’Institut français ne devait pas cacher un désengagement de l’État. Dois-je rappeler que CulturesFrance disposait d’un budget de 23 millions d’euros contre 45 pour l’Institut, sachant que Bernard Kouchner, alors ministre des affaires étrangères, avait prévu pour crédibiliser cette création une réserve de 2 millions d’euros supplémentaires ? Certes, il s’agit d’un EPIC qui devra, comme l’ont remarqué certains, dégager des recettes. Mais cela est normal et même très sain.

Nos représentants dans les divers pays – conseillers et attachés culturels – sont d’ailleurs coutumiers, en matière de projets et moyens, du fait de solliciter des entreprises, des associations et des organismes divers pour venir concourir à l’action envisagée, car l’intérêt à agir est commun. Souvent d’ailleurs des opérateurs locaux interviennent financièrement de manière modeste, sans volonté de retour économique immédiat, tout simplement parce qu’ils aiment notre pays et qu’ils veulent soutenir la communauté française et valoriser l’image de la France.

Je n’ai donc aucun état d’âme concernant le fait que l’établissement public puisse gérer des actions à caractère commercial. Même si ce n’est pas son objectif, c’est un des moyens par lesquels il devra agir.

Pour ce qui est des agents, aucun ne nous a quittés. Tous ceux qui étaient déjà dans le réseau – à CulturesFrance ou dans divers services – ont été sans exception récupérés. Et très peu d’établissements publics ont, dans ces derniers mois, recruté comme nous 41 personnes, donnant ainsi une assise plus large à notre réseau.

Certes, la culture a pu parfois ressentir les conséquences du resserrement global des moyens alloués aux divers postes. Pour autant, ceux qui, dans ce contexte, ont choisi de continuer à être des acteurs très actifs et à construire des projets, ont pu obtenir un complément d’enveloppe en milieu d’année de la part de l’administration centrale, certains projets n’ayant pas été finalisés dans d’autres postes. Autrement dit, les agents les plus efficaces sur le terrain, y compris dans le domaine de la culture, finissent par trouver les moyens de leur action.

Pour autant, je ne sous-estime pas la critique qui a été faite en la matière. On ne peut aller plus loin dans le resserrement qui a été opéré ces dernières années sur les moyens de services même si souvent, avec très peu de moyens – des enveloppes de 50 000 voire 20 000 euros – ils accomplissent des miracles.

J’en arrive à la question de nos relations avec les tutelles diverses, d’une part, et avec les autres acteurs, d’autre part.

Qu’il s’agisse de la tutelle unique du ministère des affaires étrangères et européennes ou de nos relations avec le ministère de la culture et de la communication, avec l’Alliance française et avec l’audiovisuel extérieur, mon souci est de faire en sorte que nous soyons tous efficaces. Il n’y aurait rien de plus stupide que de vouloir rivaliser entre nous. Nous avons donc rencontré les représentants de ces divers organismes, ce qui a permis, soit de signer des accords – comme avec UniFrance pour le cinéma ou avec les Alliances françaises –, soit d’effectuer des rapprochements afin d’éviter que des difficultés surviennent. L’Institut français n’a pas vocation à dévorer les autres.

Les lycées français à l’étranger sont aussi, au fond, des centres culturels. Et avec la directrice de l’AEFE, Mme Anne-Marie Descôtes, nous allons trouver les moyens de notre action. De même, la fondation Alliance française est essentielle pour nous avec ses plus de 1 000 implantations dans le monde : il est difficile d’imaginer, avec nos 144 instituts français, que nous puissions travailler sans elle. Il y a même des pays où la structure repose uniquement sur l’Alliance française – l’Inde est un exemple typique –, sans compter que certaines Alliances françaises demandent à être fondues au sein de l’Institut français : tel est le cas à Dubaï, car une association, comme dans tous les Émirats, ne peut y être employeur. Nous n’avons en tout cas aucune volonté hégémonique. Simplement, nous voulons que tous travaillent ensemble.

Pour ce qui est de nos relations avec le ministère de la culture et de la communication, les choses avaient été décidées avant que je ne fusse nommé. Il me semble cependant judicieux que l’Institut français soit considéré comme un moyen d’influence culturelle au service de la stratégie diplomatique française et qu’en conséquence l’on retrouve le ministère au sein du conseil d’orientation stratégique et du conseil d’administration ou dans les signataires de la lettre qui constituera mon contrat d’objectifs et de moyens. La répartition s’est faite de manière à peu près convenable.

Concernant l’audiovisuel extérieur, je serai entendu demain par votre mission d’information sur ce point. Ne voulant cependant pas esquiver la question, j’avoue trouver étrange le fait que dans la conception même de l’Institut français on n’ait pas évoqué ses relations nécessaires avec l’audiovisuel extérieur s’agissant de la diffusion de la culture. Il y a peut-être là une petite faiblesse congénitale, mais qui se réglera là aussi par des accords et par un travail en commun. Nous avons évidemment déjà rencontré nos partenaires de l’audiovisuel – France 24, TV5 Monde, RFI et l’ensemble des médias concernés. Notre direction Communication et nouveaux médias est d’ailleurs également chargée des relations avec le monde des médias, et j’ai toute confiance quant à la possibilité de travailler ensemble.

La francophonie est un sujet à la fois passionnant et compliqué. Ainsi, l’exemple cité par M. Michel Herbillon relève d’une autre compétence que la mienne s’agissant de savoir s’il faut ou pas un accord entre tous les pays européens pour l’instauration d’une deuxième langue vivante systématique. Lorsque l’Allemagne a décidé qu’il n’y aurait plus qu’une langue vivante, l’anglais, les effets ont été calamiteux pour la francophonie. Il existe à l’échelon européen des organismes culturels, dont un nommé « Ethique », qui réunissent des opérateurs européens pour étudier ce type de question, mais vous comprendrez que c’est quelque chose qui me dépasse un peu, même si je souhaite profondément que la deuxième langue soit maintenue partout, car c’est alors souvent le français qui est choisi. La question de la francophonie dépasse donc le seul Institut français, même si c’est un sujet qui me passionne en qualité d’ancien ministre en charge de la francophonie.

L’Organisation internationale de la francophonie n’est pas – comme son titre l’indique – quelque chose qui appartient à la France : son secrétaire général est un Sénégalais et son directeur général un Québécois. C’est une organisation qui fonctionne de manière efficace, mais nous n’en sommes que l’un des membres – certes l’un des plus influents. La manière dont nous travaillons avec les réseaux francophones est d’ailleurs excellente.

En revanche, il est incompréhensible pour certains de nos interlocuteurs, tel le ministre chinois de la culture que j’ai rencontré voilà deux jours, qu’un pays de 65 millions d’habitants ait un système si complexe – avec des structures différentes pour s’occuper l’une de la francophonie, d’autres de la culture et de l’audiovisuel, le tout aux côtés des Alliances françaises –, alors que lui gère tout seul la culture d’un pays de plus d’un milliard d’habitants. Pour être crédible vis-à-vis de nos partenaires, nous avons donc tout intérêt à aller vers une structure la plus unifiée et, en tout cas, la plus concertée possible.

Voilà pourquoi je considère que tout ce que nous faisons pour aller vers un réseau unique, d’abord par l’expérimentation du rattachement de 13 postes puis par des dispositifs de toutes natures qui nous permettront de mieux travailler en commun, va dans le bon sens. C’est l’intérêt de la France, de nos agents et de nos finances puisque nous faisons évidemment des économies d’échelle lorsque nous nous coordonnons.

Il m’a été reproché de ne pas avoir suffisamment parlé du fond. J’ai considéré, d’une part, que ce serait répéter des choses déjà entendues lors d’auditions précédentes et, d’autre part, que les objectifs de l’Institut français figuraient dans la loi et le décret de façon détaillée après avoir fait l’objet de longues discussions lors de leur élaboration : nous avons toute la compétence pour l’animation artistique – faire connaître nos écrivains, nos peintres, nos musiciens ; pour l’aide à la langue française et au livre – faciliter les traductions et les rencontres d’écrivains ; pour les échanges avec les pays dans le cadre des Saisons croisées ou de grandes manifestations ; pour la formation ou encore pour le cinéma professionnel. Bref ces compétences se retrouvent dans les textes et voilà pourquoi je n’ai pas cru devoir les présenter à nouveau. Mais j’ai eu tort de ne pas le faire, sachant que les parlementaires ont une vue beaucoup plus plurielle des choses que moi.

S’agissant des visas, il y a en effet quelque chose de paradoxal – qui m’est d’ailleurs opposé presque partout où je me déplace – à voir la France organiser des manifestations et souhaiter qu’à cette occasion des intellectuels viennent jusqu’à elle pour finalement leur claquer la porte au nez. C’est un sujet qui préoccupe nos ambassadeurs et nos consuls généraux, qui d’ailleurs trouvent généralement des solutions. Pour autant, il nous faut être très vigilants sur cette question, car nous décrédibilisons ainsi une grande partie de nos actions. M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes, en est conscient et j’ai toute confiance dans sa capacité à faire évoluer rapidement les choses, en y mettant un peu de souplesse.

Concernant nos relations avec le monde de la culture scientifique ou de la culture au sens très large – la gastronomie, l’art de vivre –, la culture selon nous englobe tout : on ne peut défendre la culture française sans défendre les valeurs qui vont avec. C’est d’ailleurs notre mission, et c’est tout l’intérêt d’avoir une tête de réseau, car sur de tels sujets il est impératif que nous ayons une doctrine. Nos partenaires jugent d’ailleurs que la France sait très bien se servir de projets culturels pour mieux faire valoir ses idées, ses convictions intellectuelles ou politiques, ses valeurs. J’ai ainsi récemment cité dans un article un télégramme diplomatique publié par WikiLeaks dans lequel un ambassadeur américain appelait à se méfier de l’action culturelle française qui servirait à cacher la défense des intérêts de ses entreprises – j’espère que ce télégramme a vraiment existé, car il rendait là un hommage à notre action !

S’agissant de l’Année du Mexique en France, le comité des mécènes, qui était présidé par M. Jean-Paul Herteman, président du directoire de Safran, s’était beaucoup investi dans l’opération dont l’interruption présente pour eux de très grands inconvénients s’agissant de leurs projets économiques et commerciaux. Cependant, nous n’y pouvons rien si la partie mexicaine a pris si mal le fait que l’on ne pouvait traiter l’Année du Mexique en France sans parler de nos compatriotes en difficulté. De nombreux opérateurs qui avaient programmé cette manifestation, essaient aujourd’hui de se débrouiller par eux-mêmes pour voir si l’année prochaine, lorsque le contexte sera différent, il ne serait pas possible de faire revivre certaines opérations, sachant que de toute façon la manifestation n’aura pas lieu. La Pinacothèque de Paris envisage de reporter ainsi à l’an prochain l’exposition sur les masques de jade, tandis que les musées de l’Orangerie et d’Orsay tentent également de trouver des solutions.

Concernant l’expérimentation, nous sommes de bonne foi dans cette démarche : nous verrons bien comment les choses fonctionnent. Personne ne considère comme anormal que nous disposions dans chaque pays d’une structure unique avec si possible une certaine autonomie financière et que l’ensemble constitue un réseau commun. Le problème est plutôt de savoir comment y parvenir. J’observe d’ailleurs que nous avions plus de volontaires que nous ne pouvions prendre d’expérimentateurs. La tendance du réseau et des postes est plutôt à considérer que l’expérimentation doit réussir et qu’il faut que nous nous dotions d’un système unique comme le font nos partenaires.

Pour ce qui est de la promotion de la langue française – question notamment abordée par Mme Karamanli et M. Herbillon – le nombre des apprenants en français n’est pas en recul. Il est au contraire en augmentation de 4 % par an, ce qui n’est pas si mal dans un contexte où le chinois, le portugais et l’espagnol sont des langues en grand développement. Lorsque j’étais ministre de l’éducation nationale, j’ai d’ailleurs initié le projet Jules Verne d’échange d’enseignants : tout de qui va dans le sens d’une plus grande présence de ces derniers dans le monde et de l’apprentissage de la langue française est donc plutôt en bon état, même si ce n’est pas glorieux.

Quant à la question des étudiants – qui rejoint celle des visas –, il s’agit d’une compétence de CampusFrance qui l’assume d’ailleurs fort bien. Je ne sais pas où en est la mise en place de ce groupement d’intérêt public, mais là aussi nous travaillerons en parfaite confiance avec lui. En tout cas, les chiffres en la matière ne sont pas ridicules puisque nous recevons chaque année en France 30 000 étudiants chinois et 2 000 étudiants indiens, chiffres tout à fait convenables.

J’espère, madame la présidente, avoir ainsi couvert tous les grands sujets évoqués.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Merci de cette audition très intéressante.

La séance est levée à douze heures.

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Information relative à la Commission

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation a désigné M. Jean-Jacques Gaultier rapporteur d’information sur le contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 13 avril à 10 heures 30 :

Présents. – Mme Marie-Hélène Amiable, M. Pierre-Christophe Baguet, M. Eric Berdoati, M. Marc Bernier, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Monique Boulestin, M. Xavier Breton, Mme Marie-George Buffet, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, M. Édouard Courtial, M. Bernard Debré, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Delong, M. Bernard Depierre, Mme Marianne Dubois, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mme Valérie Fourneyron, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, M. Gérard Gaudron, M. Jean-Jacques Gaultier, M. Jacques Grosperrin, Mme Françoise Guégot, M. Michel Herbillon, Mme Françoise Imbert, M. Olivier Jardé, M. Régis Juanico, Mme Marietta Karamanli, M. Christian Kert, Mme Colette Langlade, M. Dominique Le Mèner, M. Bernard Lesterlin, M. Claude Leteurtre, Mme Geneviève Levy, M. Apeleto Albert Likuvalu, M. Alain Marc, M. Michel Ménard, M. Michel Pajon, Mme Françoise de Panafieu, M. Franck Riester, M. Jean Roatta, M. Marcel Rogemont, Mme Marie-Josée Roig, M. Daniel Spagnou, Mme Michèle Tabarot, Mme Marie-Hélène Thoraval

Excusés. – Mme Sylvia Bassot, M. Bruno Bourg-Broc, M. Jean-François Copé, Mme Jacqueline Farreyrol, Mme Muriel Marland-Militello, Mme Martine Martinel, M. Jean-Philippe Maurer, M. Jean-Luc Pérat, M. Frédéric Reiss, M. Patrick Roy