Accueil > Travaux en commission > Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mardi 30 octobre 2007

Séance de 21 heures 15

Compte rendu n° 22

Présidence de M. Didier Migaud, Président

– Suite de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008 (n° 189)

– Vote sur les crédits des missions :

– Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (M. Jean-François Lamour, Rapporteur spécial) 2

– Outre-mer (M. Jérôme Cahuzac, Rapporteur spécial) 7

– Remboursements et dégrèvements (M. Jean-Yves Cousin, Rapporteur spécial) 10

– Sécurité sanitaire (M. Bruno Le Maire, Rapporteur spécial) 12

La Commission a poursuivi l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008 et procédé, sur le rapport de M. Jean-François Lamour, Rapporteur spécial, à l’examen des crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation.

M. Jean-François Lamour, Rapporteur spécial, a tenu, en premier lieu, à rendre hommage à son prédécesseur, Jean-Claude Mathis, pour l’excellent travail qu’il a accompli au cours de la précédente législature.

Il a ensuite précisé que dans le cadre de la LOLF, les défis d’une bonne gouvernance financière ont tenu toutes leurs promesses puisque 100 % des réponses du ministère lui étaient parvenues à la date butoir du 10 octobre dernier.

Il a indiqué que les crédits destinés à la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation s’élèveront pour 2008 à environ 3,768 milliards d’euros.

Le premier programme Liens entre la Nation et son armée est doté de 258 millions d’euros,

Le deuxième programme Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant est doté de 3 milliards 361 millions d’euros,

Les crédits du troisième programme, qui porte sur l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale s’élèvent à 148 millions d’euros.

Les crédits directement en faveur du monde combattant, et à ce titre gérés par le Ministère des anciens combattants, figurent tous dans cette mission. Ils sont de 3 milliards 370 millions d’euros.

Le Rapporteur spécial a précisé que les crédits de la mission étaient en baisse de 2,17 % par rapport à 2007. Il a ajouté que, compte tenu de l’évolution démographique, la dotation moyenne par pensionné (programme 169) augmente de 3,27 % par rapport à l’an dernier. Aussi, depuis 2002, cette dotation moyenne par pensionné est passée de 7 830 euros à 9 154 euros, soit une hausse de presque 17 % sur l’ensemble de cette période.

Il a tout d’abord souligné que grâce à ce budget les droits des anciens combattants seront garantis.

En premier lieu, la décristallisation est consolidée et s’étend en 2008. Le coût de la revalorisation de la valeur du point a été correctement évalué en 2007 à 110 millions d'euros. Les premiers paiements à l’étranger au taux « décristallisé » sont intervenus, en règle générale, aux échéances normales. Dans le présent projet de loi, le financement du complément de mesures de décristallisation votées en 2007 est prévu. Ainsi 24 millions d'euros permettront l’ouverture de droits à de nouveaux bénéficiaires, notamment à 3 800 conjoints survivants supplémentaires.

S’agissant de la retraite du combattant, il a précisé qu’un crédit de 5 millions d'euros supplémentaire est inscrit pour tenir compte de l’évolution à la hausse de la population concernée.

Il a cependant regretté qu’une nouvelle hausse de l’indice de la retraite du combattant ne soit pas prévue. C’est pourquoi, il a indiqué qu’il présenterait un amendement de transfert de crédits visant à permettre le financement d’une telle mesure.

S’agissant des crédits d’appareillage, 9,775 millions d'euros permettront de maintenir la prise en charge des prestations de qualité et de garantir de meilleurs remboursements notamment pour les gros appareillages.

Quant aux crédits nécessaires à la prise en charge du régime de sécurité sociale des invalides de guerre, ils connaissent une progression de 8,4 millions d'euros pour s’établir à 172 millions d'euros, soit une augmentation de 5 %.

Par ailleurs, la dotation consacrée aux rentes mutualistes augmente de 4 % pour se situer à 226,5 millions d'euros, soit une hausse de 9 millions d'euros pour prendre en compte l’évolution du nombre de bénéficiaires et financer la majoration du plafond décidée en loi de finances 2007. Cette mesure n’aura d’effet en matière budgétaire qu’à compter de 2008, puisque les mutuelles versent les majorations aux souscripteurs et sont remboursées l’année suivante par l’État.

Il s’est réjoui que l’allocation différentielle en faveur des conjoints survivants les plus démunis soit mise en place. Ce dispositif sera pérennisé grâce à l’augmentation des crédits sociaux de l’ONAC de 4,5 millions d'euros, auxquels il convient d’ajouter le crédit de 0,5 million d'euros inscrit par un amendement parlementaire lors du vote des crédits de la mission à l’Assemblée nationale, à l’automne dernier. Ces crédits correspondent au financement en année pleine d’une allocation différentielle assurant à chaque conjoint survivant un revenu mensuel au moins égal à 550 euros. L’effectif des bénéficiaires potentiels en 2008 est estimé à 3 200 conjoints survivants pour un coût moyen mensuel de 130 euros, soit 1 560 euros par an.

Le Rapporteur spécial a indiqué, enfin, que le Gouvernement a décidé de pérenniser l’ONAC et de lui donner, à l’occasion de la préparation du contrat d’objectifs et de moyens pour les années 2008-2012, les ressources lui permettant de faire face à l’ensemble de ses missions. Ainsi, soutien significatif, une augmentation 2,8 millions d'euros de sa subvention, lui est accordé pour son fonctionnement. Elle permettra notamment de prendre en charge la hausse du taux de charge sur les cotisations de pension des fonctionnaires des établissements publics.

Il a poursuivi en présentant les budgets des principales actions des trois programmes.

À titre liminaire, il a indiqué que le montant de la dépense fiscale liée à cette mission est estimé pour 2008 à plus de 540 millions d'euros, dont 200 millions pour la demi-part supplémentaire et 70 millions pour la déductibilité des versements à la rente mutualiste.

S’agissant de la journée d’aptitude à la préparation à la défense (JAPD), on note une baisse constante des crédits qui lui sont consacrés. Ils sont estimés à 156 millions d'euros en 2008. Cette baisse est de 5 % en autorisations d’engagement et de 1 % en crédits de paiement.

Une diminution substantielle de crédits nécessaires au fonctionnement a été obtenue grâce à des efforts de rationalisation. Ainsi, des économies de fonctionnement de 28 % en autorisations d’engagement et 8 % en crédits de paiement sont attendues grâce à la fois à la réalisation de marchés globalisés et aux perspectives d’externalisation, mais également à la modernisation des outils et la simplification des procédures de recensement et de convocation. Ces économies ont pu être réalisées sans porter atteinte au taux de satisfaction des usagers. Celui-ci doit atteindre une valeur cible de 90 % en 2010. Le coût moyen par participant doit être maintenu en dessous de 200 euros.

Cette baisse des crédits demandés doit tout de même être relativisée si l’on tient compte du soutien dont bénéficie la JAPD en provenance du programme 212 Soutien à la politique de défense évalué à 20 millions d'euros pour 2008, notamment avec la mise à disposition de locaux et de personnels.

En application de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, les crédits destinés à la politique de la mémoire connaissent une forte hausse en raison de l’inscription de 3 millions d'euros destinés au capital de la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie et des combats de Tunisie et du Maroc

2,74 milliards d’euros seront consacrés à l’administration de la dette viagère : 1,96 milliard pour les pensions militaires d'invalidité et 775 millions d'euros pour la retraite du combattant.

La baisse du nombre de ressortissants en matière de pensions militaires d'invalidité est estimée à 4,85 % en 2007 et à 3,8 % en 2008. Le ministère estime que les marges de manœuvre dégagées en matière de pension seront de l’ordre de 102 millions d'euros. Cependant les crédits demandés pour le paiement des pensions ne baissent que de 78 millions d'euros afin de permettre l’ouverture de droits à de nouveaux bénéficiaires, à hauteur de 24 millions d'euros, dans le cadre des mesures de décristallisation.

Quant aux crédits destinés à la retraite du combattant, ils augmentent donc de plus de 5 millions d’euros pour tenir compte de l’évolution du nombre de bénéficiaires. Dans les prochaines années, l’accroissement du nombre de bénéficiaires devrait se ralentir, les postulants en âge légal de solliciter la retraite du combattant nés en 1942 et 1943 ayant été très peu sollicités durant les opérations d’Afrique du nord.

La dotation 2008 ne comporte pas de crédits supplémentaires au titre de la décristallisation puisque celle-ci est désormais achevée pour la retraite du combattant.

Le Rapporteur spécial a indiqué qu’après étude du rapport annuel de performances 2006 et d’après les prévisions portant sur les principaux indicateurs du programme, notamment ceux ayant trait au nombre de dossiers traités par agent, un ajustement des effectifs sera nécessaire pour tenir compte de la baisse d’activité de la Direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale.

Il a ajouté qu’en réponse à l’audit de modernisation relatif au traitement des demandes de pensions militaires d'invalidité de juillet 2006, les mesures mises en œuvre ont permis de réduire la durée moyenne de traitement d’un dossier de 470 jours fin 2006 à 455 jours au 30 juin 2007. Ces mesures concernent notamment la formation des agents, la revalorisation du travail des experts médicaux ou la normalisation de la composition d’un dossier.

Quant à l’ONAC et à l’Institution des Invalides, ils bénéficient d’un soutien continu de la part du gouvernement. L’ONAC doit recevoir une subvention pour charge de service public de 38,7 millions d'euros à laquelle s’ajoutent 18,6 millions d'euros pour son action sociale.

L’Institution des Invalides recevra 10,6 millions d'euros, dont 2,1 millions destinés à permettre la poursuite des travaux de sécurité de l’institution dont elle a grand besoin.

148 millions d’euros sont destinés à l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie durant la Seconde Guerre Mondiale.

S’agissant des orphelins, la plupart d’entre-eux ont déjà fait valoir leur droit. Une majorité, environ 60 %, opte pour des indemnisations sous forme de capital, actuellement fixée à 27 440 euros, la rente mensuelle s’établissant à 457 euros.

En revanche, l’indemnisation des victimes de spoliations se poursuit à un rythme soutenu. Le montant moyen des indemnisations accordées au titre des spoliations est de 22 445 euros. Les crédits nécessaires à cette action sont en hausse car l’instruction de dossiers concernant des patrimoines particulièrement importants devrait arriver à son terme en 2008.

Enfin, le Rapporteur spécial a précisé qu’un objectif Améliorer le délai de paiement des dossiers d’indemnisation des victimes de spoliation dès l’émission de recommandations favorables et deux indicateurs sont présentés dans le projet annuel de performances 2008. Il s’agit certainement d’une réponse aux observations formulées par la commission des Finances l’an dernier.

Les objectifs quant aux délais de paiement par l’administration sont fixés à quatre mois et demi pour ceux qui résident en France et à cinq mois et demi pour ceux qui résident à l’étranger. Ces délais ne prennent pas en compte la durée d’instruction des dossiers qui est très variable et souvent très longue, en moyenne deux ans.

M. Dominique Baert a posé trois questions au Rapporteur spécial :

– quels sont les éléments de pérennisation de l’ONAC ? Les diminutions d’effectifs ne remettent-elles pas en cause la poursuite de son activité sur tous les territoires ?

– s’agissant de l’allocation différentielle à destination des veuves de combattants, le Rapporteur spécial connaît-il le nombre de dossiers qui ont obtenu satisfaction ? La condition de ressources de 550 euros ainsi que les nombreuses conditions d’attribution rendent l’obtention de cette allocation extrêmement difficile. Les 4,5 millions d’euros de crédits prévus pour cette allocation en 2008 ne seront sans doute pas consommés en totalité ;

– 3 millions d’euros sont prévus pour la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie. Le Rapporteur spécial a-t-il connaissance du lieu d’implantation de cette fondation ?

M. Jean-Pierre Gorges s’est étonné que les crédits de cette mission ne diminuent que de 2,17 % alors que l’évolution démographique à la baisse de la population concernée est bien plus rapide. Pourquoi l’évolution des crédits n’est-elle pas proportionnelle à la diminution des effectifs ?

M. Michel Bouvard s’est également interrogé sur l’aboutissement des dossiers de demandes d’allocation différentielle pour les veuves de combattants. La mise en place de cette nouvelle allocation s’est-elle traduite par la diminution des secours distribués par l’ONAC aux veuves de combattants ?

Par ailleurs, au sein du programme Liens entre la nation et son armée, les crédits prévus pour la Journée d’appel et de préparation à la défense (JAPD) ne sont que de 127 millions d’euros en 2008, alors que 131 millions d’euros de crédits ont été consommés en 2007, avec une dotation initiale de 126 millions d’euros. Ces crédits seront-ils suffisants ?

M. Jérôme Cahuzac a évoqué la demande des anciens combattants de réduire l’âge à partir duquel ils ont droit à une demi-part supplémentaire pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Cet âge est de 75 ans aujourd’hui. L’abaisser à 70 ans coûterait très cher, mais on pourrait imaginer une solution progressive en commençant par abaisser cet âge d’un an en 2008.

M. Jean-Yves Cousin a demandé des explications sur la longueur des délais d’instruction des dossiers concernés par le programme 158.

M. Bruno Le Maire a interrogé le Rapporteur spécial au sujet de l’indemnisation des orphelins victimes de la barbarie nazie. Les députés reçoivent toujours de nombreuses lettres d’orphelins de résistants ou de parents juifs non déportés mais victimes de la barbarie nazie, à qui l’indemnisation n’est pas accordée par l’État. Est-ce que la définition des victimes qui doivent être indemnisées fait l’objet d’un consensus ?

M. Jean-François Lamour, Rapporteur spécial, a répondu à M. Dominique Baert que le contrat d’objectifs 2008-2012 garantit la pérennité de l’ONAC. S’agissant de l’allocation différentielle pour les veuves, les services du ministère estiment que 9 000 personnes pourraient être concernées. Pour 2008, on évalue le nombre de dossiers qui seront acceptés à 3 200. Quant à la fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie, il a fait savoir qu’il n’avait pas d’information sur sa localisation.

Le budget de la mission est stable malgré la tendance démographique à la baisse de la population concernée en raison de la « décristallisation » des pensions des ressortissants des pays anciennement sous souveraineté française. Cette mesure est indispensable à la reconnaissance du sacrifice et de l’engagement des combattants.

Les crédits de la JAPD vont être maîtrisés grâce à la diminution du niveau d’encadrement de la formation, des catégories B étant remplacées par des catégories C.

Le coût de la demi-part supplémentaire est actuellement de 200 millions d’euros. Il sera amené à augmenter de façon importante dans les prochaines années, en raison de l’arrivée à 75 ans de la génération des anciens d’Algérie.

M. Marc Le Fur a souligné que la demi-part supplémentaire profite d’abord aux plus riches. La mesure de revalorisation des pensions proposée par le Rapporteur spécial dans son amendement est meilleure car elle est ciblée sur les personnes les plus modestes.

M. Jean-François Lamour, Rapporteur spécial, a indiqué que les délais d’instruction étaient très longs lorsqu’il s’agissait de réunir des preuves de spoliation matérielle. De ce fait, les délais sont de deux ans en moyenne.

Pour recevoir une indemnisation en tant qu’orphelin des victimes de la barbarie nazie, il faut avoir été orphelin avant l’âge de 21 ans, d’un père ou d’une mère déporté dans les conditions définies aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.

La Commission a ensuite examiné un amendement du Rapporteur spécial visant à majorer le montant de la retraite du combattant de 2 points d’indice, ce qui se traduirait par un coût de 38 millions d’euros. L’augmentation des crédits du programme Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant serait compensée par la diminution des crédits de communication, de promotion et de valorisation du patrimoine culturel ainsi que des crédits de la JAPD, inscrits sur le programme Liens entre la nation et son armée.

Le Président Didier Migaud a apprécié le caractère sérieux et réaliste de la diminution des crédits proposée pour compenser la mesure, et déclaré l’amendement recevable au titre de l’article 40 de la Constitution.

M. Jérôme Cahuzac ayant exprimé le soutien des commissaires du groupe socialiste, radical et citoyen à cet amendement, la Commission a adopté cet amendement à l’unanimité.

Puis, le Rapporteur spécial ayant émis un avis favorable à leur adoption, la Commission a adopté les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ainsi modifiés.

*

* *

La Commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Jérôme Cahuzac, Rapporteur spécial, à l’examen des crédits de la mission Outre-mer.

M. Jérôme Cahuzac, Rapporteur spécial, a souhaité commencer son propos en saluant son prédécesseur, M. Alain Rodet.

L’analyse des crédits de la mission Outre-mer pose un certain nombre de questions strictement budgétaires, mais appelle également une réflexion sur le rôle du secrétariat d’État à l’Outre-mer.

Préalablement à l’examen du budget, il faut souligner que le secrétariat d’État à l’Outre-mer est loin d’être exemplaire à l’égard du Parlement. Au 10 octobre, seules 63 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient disponibles, et les réponses aux questions les plus sensibles sont toujours manquantes à ce jour.

La mission Outre-mer sera affectée en 2008 par deux mesures de périmètre plutôt bienvenues:

– l’ancien programme Intégration et valorisation de l’outre-mer sera supprimé. Les moyens de personnel et de fonctionnement qu’il comportait seront transférés vers la mission Administration générale et territoriale de l’État. Dorénavant, le ministère de l’Intérieur sera responsable des moyens matériels de l’outre-mer, en collectivités comme pour l’administration centrale ;

– les contrats aidés seront financés depuis la mission Travail et emploi, qu’ils soient destinés à la métropole ou à l’outre-mer.

À structure 2008, c’est-à-dire une fois déduites de 2007 les charges qui seront financées en 2008 par d’autres missions, les crédits de paiement de la mission Outre-mer progressent de 3,4 % pour s’établir à 1,73 milliard d’euros. Très curieusement, le secrétariat d’État à l’Outre-mer affiche une progression de 3 % seulement, sans fournir d’explication à ce sujet.

Les crédits de la mission Outre-mer représentent seulement 11 % de l’effort de l’État qui, dépenses fiscales comprises, s’élève pour 2008 à 15,6 milliards d’euros. Pour être complet, il faut y ajouter les fonds communautaires.

De nombreux dispositifs concourant à l’action publique outre-mer font l’objet d’une évaluation très insuffisante. Dans le rapport annuel de performances pour 2006, certains indicateurs ne sont même pas renseignés.

La politique publique outre-mer est une politique de dette, en contradiction avec l’objectif affiché de désendettement de l’État :

– la dette de l’État auprès des organismes de sécurité sociale, qui doivent recevoir compensation des exonérations décidées en faveur de l’emploi, devrait atteindre la somme considérable d’un milliard d’euros en 2008 ;

– l’État est également débiteur des bailleurs sociaux, à hauteur de 500 millions d’euros ;

– enfin, les collectivités territoriales attendent de l’État le paiement de 90 millions d’euros environ, au titre des dispositifs contractuels type contrats de projets.

Au-delà de la question majeure de l’endettement, deux mécanismes doivent particulièrement retenir l’attention de la Commission :

– le coût du passeport mobilité ne cesse de croître. Ce dispositif, qui permet aux étudiants ultramarins de voyager gratuitement vers la métropole, est victime de son succès, ainsi que l’a montré M. Michel Bouvard dans le rapport qu’il lui a consacré en 2007. Alors que plus de 20 millions d’euros ont été nécessaires pour financer le dispositif en 2006, moins de 16 millions d’euros sont prévus pour 2008, bien que rien n’indique que la demande va faiblir. Cette prévision contrarie le principe de sincérité budgétaire. Le Rapporteur spécial et M. Laurent Hénart, Rapporteur spécial de la mission Enseignement supérieur, devraient entendre prochainement le secrétaire d’État à l’Outre-mer au sujet du passeport mobilité ;

– l’État a très peu de visibilité sur certaines dotations qu’il verse aux collectivités d’outre-mer. La dotation globale de développement ou DGDE, versée à la Polynésie française, est l’exemple le plus significatif. Cette dotation (188 millions d’euros prévus en 2008) est destinée à compenser la perte d’activité économique générée par la cessation des essais nucléaires. Chaque année, la DGDE est versée de manière globale à la Polynésie, qui l’affecte aux projets d’investissements figurant dans un plan quinquennal. Une fois l’investissement achevé, des pièces administratives et comptables sont adressées à l’État. Il n’y a donc pas de contrôle a priori, et le contrôle a posteriori est quasi-inexistant. Si le motif de création de la DGDE n’est pas à remettre en cause, les modalités doivent être profondément rénovées.

Le rôle du ministère chargé de l’Outre-mer doit être repensé. Le fait de gérer une partie très minoritaire des concours publics à l’outre-mer et le caractère défaillant de l’évaluation de certains dispositifs doivent conduire le secrétariat d’État à l’Outre-mer à passer d’une logique de gestion des crédits à une logique de pilotage et de coordination. À cet égard, le projet de budget marque une avancée avec le transfert vers la mission Travail et emploi des contrats aidés.

M. Michel Bouvard a considéré à titre personnel que la commission des Finances devrait s’attacher, durant cette législature, à évaluer l’efficacité des aides de l’État à l’outre-mer, qu’elles soient budgétaires ou fiscales. De nombreux rapports ont été publiés par la commission des Finances sur ce sujet, l’objectif étant d’ailleurs davantage d’améliorer la performance de la dépense publique que de réduire l’aide de l’État en faveur des collectivités d’outre-mer. Un exemple tiré du document de politique transversale montre les marges de progrès : la dépense fiscale nécessaire à la création d’un emploi dans les collectivités d’outre-mer s’élève à 896 000 euros ! Il semble tout à fait envisageable d’améliorer l’efficacité de tels dispositifs dans le cadre d’un dialogue constructif avec les élus d’outre-mer afin de promouvoir le développement économique de ces territoires. M. Michel Bouvard a rappelé avoir présenté un rapport d’information à la commission des Finances sur le passeport mobilité. Ce dernier illustre les effets néfastes d’une politique mise en place trop rapidement et sans étude d’impact préalable. Le rapport cite plusieurs exemples d’abus : des billets aller simple coûtant 1 200 euros ou des boursiers bénéficiant de deux aller-retour dans l’année et en profitant pour participer au Carnaval. Le dispositif, en outre, favorise davantage les trajets entre les collectivités d’outre-mer et la métropole que les trajets entre îles, ce qui fragilise l’université d’Antilles-Guyane alors qu’il faudrait que l’État favorise son dynamisme. Le passeport mobilité est d’autant plus coûteux que les CROUS doivent régler des agios bancaires en raison notamment de retards de paiement à l’égard de la compagnie Air France. Le rapatriement du passeport mobilité au sein de la mission Enseignement supérieur permettrait davantage de transparence et une meilleure gestion du dispositif. Cela éviterait de maintenir deux responsables ministériels pour une même aide.

Des recommandations très précises ont été faites dans ce rapport. Pour l’instant, il semble qu’aucune n’a été suivie d’effet. Il serait souhaitable que la commission des Finances auditionne le secrétaire d’État à l’outre-mer pour connaître les suites qui sont données aux propositions du rapport d’information.

M. Marc Le Fur s’est interrogé sur l’effort financier global en faveur de l’outre-mer, en prenant en compte les dépenses fiscales.

M. Jérôme Cahuzac, Rapporteur spécial, a indiqué que le document de politique transversale faisait état d’un budget global de 15,6 milliards d’euros. Le budget du secrétariat d’État à l’outre-mer ne représente que 1,73 milliard d’euros. Il serait souhaitable de transformer ce secrétariat d’État de mission en un secrétariat d’État de coordination. La suppression d’un programme et le rapatriement des crédits des contrats aidés vers le ministère de l’Économie relèvent de cette philosophie. Le budget de la mission comprend encore des crédits relatifs à la politique du logement. Néanmoins, cela constitue peut-être une transition vers un budget futur davantage orienté vers des fonctions de coordination que vers des fonctions d’intervention. Chaque ministère aurait ainsi vocation à décliner sa politique dans l’outre-mer, le secrétaire d’État assurant dès lors une fonction de pilotage tout à fait essentielle. Par exemple, les dispositifs de défiscalisation ont favorisé le développement du parc locatif privé, parfois au détriment de la construction de logements sociaux. Si le secrétariat d’État assurait une fonction de coordination, il pourrait assurer un développement équilibré et coordonné des différentes politiques publiques et éviter ces effets pervers.

M. Michel Bouvard a noté que la majoration des pensions des fonctionnaires outre-mer figurait dans le compte d’affectation spéciale Pensions et non dans le budget de l’outre-mer. Ces majorations sont considérées comme un transfert en faveur du développement économique des territoires. De nombreuses recommandations ont été faites par M. Jean-Pierre Brard dans un rapport d’information remis cette année à la commission des Finances.

Le Président Didier Migaud a indiqué qu’il participerait prochainement à un déplacement avec le Rapporteur général et le Rapporteur spécial dans les départements d’outre-mer afin d’apprécier l’efficacité des dispositifs de défiscalisation. La performance de la dépense publique outre-mer constitue un sujet récurrent de la commission des Finances et ce thème n’est pas tabou pour les élus d’outre-mer.

Sur le vote des crédits de la mission, M. Jérôme Cahuzac, Rapporteur spécial, s’est prononcé en faveur de l’abstention, en raison du manque de transparence du secrétariat d’État de l’Outre mer, de la dette croissante de l’État à l’égard des collectivités d’outre-mer et des errements de certains dispositifs comme le passeport mobilité. Il est tout à fait contestable, par exemple, que le budget prévoit 15 millions d’euros pour ce passeport, alors que la dépense pour 2006 s’élève à 20 millions d’euros et qu’aucune mesure d’économie structurelle n’a été prise. Il faut espérer que cette abstention motivera le secrétariat d’État, afin que l’année prochaine le budget ne souffre pas des mêmes lacunes.

La Commission a adopté les crédits de la mission Outre-mer.

*

* *

La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Jean-Yves Cousin, Rapporteur spécial, les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements.

M. Jean-Yves Cousin, Rapporteur spécial, a indiqué que la mission Remboursements et dégrèvements a la double particularité d’être la plus importante du budget de l’État, puisqu’elle détaille l’emploi de 83,16 milliards d’euros, et d’être constitué exclusivement de crédits à caractère évaluatif.

Ces crédits sont très composites, certains correspondant à des dépenses automatiques, s’agissant de restitutions liées aux mécanismes de recouvrement de l’impôt comme la régularisation des acomptes d’impôts sur les sociétés ou de TVA, d’autres à des dépenses traduisant la mise en œuvre de politiques publiques de soutien aux ménages et aux entreprises comme la prime pour l’emploi et les crédits d’impôt.

Les crédits de la mission sont en progression de 8,7 % pour 2008.

Le programme Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État regroupe 67,13 milliards d’euros de crédits, dont 44,4 milliards d’euros de remboursements de crédits de TVA, sans impact sur le solde budgétaire. Les remboursements au titre de l’impôt sur les sociétés sont évalués à 9,9 milliards d’euros, dont 1,39 milliard d’euros pour le crédit d’impôt-recherche, fortement revalorisé dans le projet de loi de finances. 3,6 milliards d’euros sont mobilisés pour les restitutions liées à l’impôt sur le revenu, en croissance de 1,4 milliard d’euros en raison du crédit d’impôt au titre des intérêts des prêts pour la résidence principale, de la montée en charge du crédit d’impôt en faveur du développement durable, et de la réforme du « bouclier fiscal » qui porte le coût du dispositif à 810 millions d’euros.

À ce sujet, le Rapporteur spécial a fait remarquer que seulement 3 % des bénéficiaires potentiels du « bouclier fiscal » avaient, à ce jour, sollicité un remboursement pour un montant total de 112 millions d’euros alors que 400 millions d’euros sont inscrits dans le budget pour 2007. Il a également indiqué que le mécanisme de partage du coût du dispositif entre l’État et les collectivités territoriales avait été supprimé, l’État prenant à sa charge la totalité du coût.

S’agissant du programme Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, son examen a le mérite de faire ressortir les 16 milliards d’euros d’impôts locaux payés par l’État aux collectivités territoriales, qui s’ajoutent aux autres concours financiers. Ces dégrèvements représentent un cinquième du produit des émissions de rôles d’impôts locaux, ce qui est le plus souvent méconnu de nos concitoyens.

Plus des deux-tiers de ce programme concernent la taxe professionnelle pour 11,7 milliards d’euros dont 1,3 milliard d’euros est relatif au dégrèvement pour investissements nouveaux et 9 milliards, au plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. Les dégrèvements de taxes foncières sont évalués à 640 millions d’euros, tandis que ceux de la taxe d’habitation sont attendus à 3,2 milliards d’euros dont 2,4 milliards d’euros pour le plafonnement en fonction du revenu et le solde pour le dégrèvement d’office aux allocataires du RMI et aux personnes âgées ou handicapées aux revenus modestes.

Il est délicat de porter une appréciation sur les dépenses « automatiques » de la mission. En revanche, les dépenses qui participent de politiques publiques comme la prime pour l’emploi ou le crédit d’impôt-recherche sont non seulement retracées dans les missions concernées, mais également dans la mission Remboursements et dégrèvements dès lors qu’une restitution est opérée, ce qui n’est pas satisfaisant.

La stratégie de performance est limitée en raison de l’objectif unique de la mission, tourné vers la seule satisfaction de l’usager.

Enfin, la mission ne dispose pas de crédits de personnel malgré une mobilisation administrative considérable dont il serait souhaitable d’évaluer le coût.

La Cour des comptes a rendu en juin 2007 un rapport qui corrobore les critiques émises par la Commission. C’est dans ce contexte que le ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique a souhaité que la direction générale des impôts étudie la possibilité de faire évoluer l’architecture de la mission Remboursements et dégrèvements.

Le Président Didier Migaud, approuvant la conclusion du Rapporteur spécial, a observé que son aboutissement logique était la disparition pure et simple de la mission, ce qui ne serait pas incohérent au regard de la LOLF.

Sur la proposition du Rapporteur spécial, la Commission a adopté les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements.

*

* *

Enfin, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Bruno Le Maire, Rapporteur spécial, les crédits de la mission sécurité sanitaire.

M. Bruno Le Maire, Rapporteur spécial, a rappelé que la sécurité sanitaire représente aujourd’hui un défi majeur, dans un contexte marqué par la multiplication des risques de pandémie liés à la mondialisation. L’influenza aviaire en est le meilleur exemple. Ces risques représentent deux enjeux capitaux : un enjeu de santé publique naturellement, qui appelle une réponse forte des pouvoirs publics ; mais également un enjeu économique, en particulier de l'incidence de ces épidémies sur l'économie touristique. L'épisode du chikungunya en est aussi un exemple évident.

Aujourd'hui, les moyens consacrés à la sécurité sanitaire sont à la hauteur de ses enjeux : plus de 710 millions d’euros seront alloués en 2008 à la mission, en progression de 8,3 % par rapport à 2007.

Le Rapporteur spécial a souhaité dans un premier temps évoquer rapidement les grandes évolutions de ce budget, avant de retracer les principaux axes de réflexion de son rapport spécial.

La politique de sécurité sanitaire est constituée de deux volets majeurs, correspondant à deux programmes : d’un côté, la veille et la gestion des crises, qui relève de la direction générale de la santé, de l’autre, la sécurité alimentaire, sous la responsabilité du ministère de l’agriculture.

En 2008, l’effort portera en particulier sur la politique de veille sanitaire et de réaction aux urgences : avec 166 millions d’euros, le budget de cette politique est en augmentation de près de 60 %. Cette hausse résulte de l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007, relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur. Cette loi prévoit la constitution d’un corps de réserve sanitaire, destiné à renforcer les équipes soignantes en cas de crise, mais également la mise en place d’un établissement de réponse aux urgences sanitaires, chargé de la gestion du corps de réserve, mais également du « stock national santé ». Cet établissement, l’EPRUS, né à la fin du mois d’août 2007 et qui est actuellement en cours d’installation, mobilisera 75 millions d’euros en 2008. Il faudra naturellement s'interroger sur la dimension que les pouvoirs publics souhaitent donner à ce nouvel établissement. Il peut être soit un simple établissement supplémentaire de prévention sanitaire parmi d'autres, soit au contraire un instrument essentiel de pilotage de l'ensemble des crises sanitaires en France. Dans un souci de cohérence, c'est plutôt la deuxième option qui devrait être retenue, ce qui représente un défi majeur pour l'État.

S’agissant de la sécurité alimentaire, peu de changements affectent le budget en 2008 : on note un léger infléchissement, de l’ordre de 1,3 %, du montant des crédits, qui s’établissent à 546 millions d’euros. Cette évolution résulte de trois éléments positifs qui méritent d'être portés à la connaissance de la commission des Finances.

Il s’agit en premier lieu de l’efficacité de la politique de déstockage des farines animales qui doit aboutir en 2010 : le coût de l’élimination de ces farines est d’ores et déjà décroissant, il baissera de 28 % en 2008, pour un peu plus de 38 millions d’euros qui y sont consacrés.

Il s’agit, deuxièmement, de l’effort de réduction des effectifs qui est porté par le ministère de l’Agriculture, et qui conduira en 2008, au non renouvellement d’un départ sur deux à la retraite. Avec 70 départs, ce sont donc 35 suppressions qui sont actées.

Enfin, dans le domaine de la protection du végétal, la rationalisation du réseau des laboratoires nationaux de référence va rendre possibles à termes de réelles économies d’échelle : la construction d’un nouveau laboratoire à Angers permettra de réduire le nombre des antennes des laboratoires, en les faisant passer de 13 à 8 en 2008, et à terme, à 5.

Ces trois éléments témoignent des résultats tangibles qui sont rendus possibles par un esprit de réforme. En effet, la réduction de ces dépenses permettra à terme un redéploiement des crédits vers de nouvelles actions prioritaires. On peut d'ores et déjà prévoir notamment la nécessité d'une augmentation des moyens alloués à la biovigilance et à la surveillance des OGM en 2008. À ce sujet, il serait utile que le ministère de l'Agriculture précise les modalités de financement de l'augmentation des crédits de 600 000 euros en 2007 à 1 630 000 euros.

S'agissant de la gestion des crises sanitaires à proprement parler, le Rapporteur spécial a fait quatre observations générales.

Premièrement, il convient de reconnaître que face à la multiplication des crises constatées sur les deux dernières décennies, la France a su s’adapter rapidement, et qu’elle dispose aujourd’hui d’une force très efficace de réaction aux risques sanitaires. Toutefois, ce système, incarné par le réseau des agences sanitaires, s’est construit au coup par coup, de façon empirique, - on pourrait presque dire, crise après crise -, ce qui a conduit à un empilement des structures et des réglementations. On compte aujourd’hui pas moins de six agences dans le domaine sanitaire : l’Institut de veille sanitaire (InVS), l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), l’Agence de la biomédecine dans le domaine des greffes, mais également la plus récente Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET), sans compter le dernier-né : l’Établissement public de réponse aux urgences sanitaires. Il faudrait également recenser l’ensemble des instituts de recherche spécialisés dans ces divers secteurs (INERIS, INRS, Ifremer,…).

Face à cette multiplication des agences, il semble indispensable de procéder à une certaine remise en ordre du système, afin de préciser les responsabilités de chaque acteur ainsi que leurs objectifs de santé publique, mais également de fixer un point d’équilibre entre les coûts générés et les risques à assumer. Sans privilégier la mise en place d’un opérateur unique, qui ne semble pas souhaitable, il convient toutefois de réaliser des économies d’échelles en améliorant la cohérence d’ensemble du réseau des agences, mais surtout en favorisant une meilleure coordination des agences entre elles. Il conviendrait notamment de mettre les différents instituts d'expertise techniques à la disposition de l'AFSSET, afin de lui permettre de se constituer en agence de moyens, comme toutes les autres agences. Ce préalable rempli, il faudra réfléchir à un rapprochement de l'AFSSET et de l'AFSSA, de façon à disposer d'outils avec la taille critique nécessaire. Pour mémoire, l'AFSSA comprend près de 1 000 agents contre une centaine seulement pour l'AFSSET.

La seconde priorité consiste à garantir l’équilibre territorial face aux enjeux de sécurité sanitaire : à titre d'exemple, la plateforme de Roissy ne dispose que de deux agents en charge de la sécurité sanitaire pour traiter les dizaines de milliers d'arrivées quotidiennes.

La troisième dimension identifiée est celle de l’Europe : il est nécessaire de s’organiser davantage dans un cadre européen, face à des enjeux qui dépassent largement les frontières nationales. Or, les délais de réaction et de mise en place des réglementations demeurent trop longs au niveau communautaire. C’est une véritable politique de sécurité sanitaire à l’échelon européen qui doit être menée ; à cet égard, la présidence française de l’Union au second semestre 2008 gagnerait à faire de la sécurité sanitaire un axe privilégié.

Enfin, quatrième point, la question du financement des conséquences de crises sanitaires dont la survenue n’est jamais sûre, mais toujours possible. Le problème est celui des modalités d’un financement de précaution, pour lequel il convient d’échapper aux ouvertures de crédits intempestives en cours d’année, qui ne relèvent pas d’une saine gestion budgétaire. Pour surmonter cet obstacle, il faut étudier la meilleure articulation possible entre d’une part, le financement par l’État, et d’autre part, ce qui peut ou doit relever d’un système assurantiel individuel ou propre aux filières professionnelles. De ce point de vue, la mise en place d'un fonds pour le financement de l'indemnisation des éleveurs victimes de la fièvre catarrhale me semble aller dans le bon sens.

Si les voies de réforme de la sécurité sanitaire sont nombreuses, au regard d’une politique qui est, quoi qu’on en dise, encore jeune, l’effort est réel et les perspectives de budget pour 2008 en témoignent. En conclusion, le Rapporteur spécial s’est prononcé pour l’adoption des crédits de la mission Sécurité sanitaire.

M. Jean-Yves Cousin a souhaité savoir si la création à moyen terme d’un opérateur unique de la politique de sécurité sanitaire relevait de l’utopie.

M. Bruno Le Maire, Rapporteur spécial, a répondu qu’en tout état de cause il fallait procéder par étapes et non imposer à l’ensemble des agences un plan global préétabli. Il faut dans un premier temps distinguer entre les agences ayant atteint la taille critique et les autres – telle l’AFSSET, par ailleurs dépourvue de moyens opérationnels. Dans un deuxième temps, il convient d’organiser des synergies entre agences dont les missions sont voisines, à l’image de l’AFSSET et de l’AFSSA, pour envisager dans un troisième temps un éventuel regroupement de l’ensemble des agences sous l’égide de l’EPRUS. À ne pas suivre cette progression méthodique, on s’expose à créer dans le futur une nouvelle agence pour chaque crise sanitaire nouvelle.

M. Jean-François Lamour s’est inquiété de la création d’un fonds de précaution face aux crises futures, qui devra être régulièrement apuré ou qui incitera à la dépense. Le décret d’avance récemment examiné par la Commission montre pourtant dans le cas de la réponse sanitaire à la fièvre catarrhale du mouton, qu’il est possible de se passer d’un tel fonds en opérant par simple redéploiement de crédits.

M. Bruno Le Maire, Rapporteur spécial, a répondu que la création d’un fonds ad hoc se justifiait sur deux points : les montants en cause, qui, s’ils peuvent être couverts par redéploiement de crédits lorsqu’ils sont limités, nécessiteront un abondement exceptionnel, par exemple en cas de survenue d’une épidémie de chikungunya en Corse, et d’autre part l’association éventuelle de tiers au financement de la réponse à une crise sanitaire, les éleveurs par exemple, s’agissant d’une épizootie de fièvre catarrhale.

La Commission a adopté les crédits de la mission Sécurité sanitaire.

——fpfp——