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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mardi 29 janvier 2008

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 48

Présidence de M. Didier Migaud, Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, sur l’exécution du budget 2007

Le Président Didier Migaud a souhaité la bienvenue à M. Younoussi Touré, Premier vice-président de l'Assemblée nationale du Mali, ainsi qu’à MM. Ouali Diawara et Sounkoutou Sissoko, président et rapporteur général de la commission des Finances.

Il a ensuite accueilli M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, afin d’aborder successivement deux sujets : l'exécution 2007 puis la question des systèmes d'information de l'État.

Sur l'exercice 2007, le ministre avait pu donner à la commission, dans le courant du mois de décembre, quelques aperçus sur l'exécution, bien avancée, de la loi de finances en cours. À l’issue de la période complémentaire, qui s'est achevée à la mi-janvier, l'exercice est clos, et il convient donc de l’entendre sur les ajustements qui ont dû être opérés par rapport à la loi de finances rectificative de décembre et sur les raisons de ces ajustements.

Au contraire des années précédentes, les chiffres font apparaître une certaine dégradation du niveau de déficit constaté, abstraction faite d’une mesure exceptionnelle de régularisation des pensions en décembre 2005. De même, il convient de s’interroger sur les recettes d’impôt sur le revenu – une mission a d’ailleurs été créée par la Commission sur l’évolution et la maîtrise des dépenses fiscales –, sur la reconstitution de la dette de l’État vis-à-vis de la sécurité sociale en dépit du remboursement, qui avait été salué en son temps, d’une dette de 5 milliards d’euros à la sécurité sociale, ainsi que sur le rythme de consommation en fin d’année 2007, sans oublier les effets de la crise financière avec leurs conséquences notamment sur les rentrées en matière d’impôt sur le revenu.

Dans ces conditions, comment le ministre analyse-t-il, dans l’attente du rapport de la Cour des comptes et de l’examen du projet de loi de règlement, l'exécution 2007 du budget, et quelles conséquences en tire-t-il sur les hypothèses de construction de la loi de finances pour 2008 ?

M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, s’est réjoui de pouvoir présenter plus en détail les résultats de l'exécution du budget de l'État en 2007.

La période complémentaire s'est achevée le mercredi 16 janvier, avec quatre jours d'avance sur la date limite impartie par la LOLF. Ce progrès, qui reste encore à poursuivre, permet de répondre à une demande de la Cour des comptes, en lui donnant un délai d'examen plus long pour la réalisation de ses travaux de certification.

Pour ce qui est des résultats, ils sont en ligne avec les prévisions. Le projet de loi de finances rectificative de fin 2007 tablait sur un déficit budgétaire révisé à 38,3 milliards d’euros. Le solde budgétaire s'établit, en exécution, à 38,4 milliards d’euros, en amélioration de 3,6 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale. Un chiffre bien meilleur
– 34,7 milliards d’euros – pourrait même être avancé, l'écart de 3,7 milliards d’euros tenant à l'enregistrement du produit de cession de titres EDF, réalisé en fin d'année et destiné au financement du plan immobilier en faveur des universités, qui se traduit par une amélioration en quelque sorte artificielle du solde du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l’État ». Cependant, mise à part cette recette exceptionnelle devant financer un investissement exceptionnel, c'est bien le chiffre réel de 38,4 milliards d’euros qu’il faut retenir.

Le compte y est par rapport à la prévision, en dépit de toutes les incertitudes qui ont entouré l'examen du collectif l'an dernier. Les risques n'ont pas pour autant disparu cette année – l'actualité de ces derniers jours le démontre –, mais les résultats enregistrés à la fin de l'année 2007 ne doivent pas conduire à exagérer les craintes.

La mise en perspective du résultat permet d’observer, d’une part, que la réduction importante du déficit budgétaire en 2006 – plus de 10 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale – n'est pas restée sans lendemain puisque le déficit par rapport à la LFI est en amélioration de presque 4 milliards d’euros ; d’autre part, que le déficit budgétaire est ramené, pour la deuxième année consécutive, à environ 2 % du produit intérieur brut, confortant ainsi l'excédent primaire atteint l'année dernière.

Pour ce qui est des dépenses, le plafond voté par le Parlement est, pour la cinquième année consécutive, strictement respecté. Le résultat se situe même à 47 millions d'euros en dessous du plafond voté – ce qui ne constitue pas pour autant une cagnotte, le déficit restant très élevé – tout en étant atteint dans le respect du cadre budgétaire initialement fixé pour 2007 : le jeu de la LOLF a été joué jusqu'au bout, en s’interdisant de rebattre les cartes distribuées en début d'année aux ministères. Ce parti pris conduit cependant à constater la reconstitution d'une dette importante vis-à-vis de la sécurité sociale, du fait de sous-budgétisations dans la construction de la loi de finances de 2007. Le montant, d’environ 1,5 milliard d’euros, devra être précisé, mais on ne pourra en tout état de cause s’en satisfaire.

L’année 2007 permet également de conforter, avec le recul, les premiers enseignements tirés en 2006 de la gestion en mode LOLF : d’une part, la mise en réserve des crédits en début d'année démontre que l’on peut à la fois donner de la visibilité aux gestionnaires des ministères et disposer des marges nécessaires pour faire face aux aléas de gestion ; d’autre part, les ministères ont aussi montré qu'ils savaient pleinement tirer parti des souplesses de gestion offertes par la LOLF et financer la plupart des besoins en cours de gestion par redéploiement des crédits. Ainsi la fongibilité asymétrique a été utilisée à hauteur d'environ 300 millions d’euros. Il appartiendra aux ministères, au travers des rapports annuels de performances – RAP –, de rendre compte au Parlement de leurs choix de gestion ainsi que des objectifs de performance réalisés.

S’agissant des recettes, elles traduisent, dans leur ensemble, une amélioration de 150 millions d’euros par rapport aux prévisions du collectif. Ce résultat recouvre toutefois des évolutions de sens contraire : d'une part, une moins-value sur les recettes fiscales et un prélèvement sur recettes plus important ; d'autre part, un surcroît de recettes non fiscales.

Pour sa part, la moins-value sur les recettes fiscales se limite à 0,5 milliard d’euros par rapport au collectif, tandis que l’impôt sur les sociétés s'inscrit en plus-value de presque 5 milliards d’euros par rapport à la LFI, soit un chiffre en léger retrait de 270 milliards d’euros par rapport au collectif. Même si, bien sûr, les entreprises ne clôtureront définitivement leurs comptes que dans les prochains mois, le produit du dernier acompte versé en décembre, en ligne avec les prévisions – à 270 millions d’euros près –, est un signe encourageant de la santé de nos entreprises et, à quelques exceptions près, de la résistance de notre secteur financier à la crise des subprimes. La TVA, qui est un bon indicateur de la tenue de la consommation, est même légèrement meilleure que prévu. Les recettes nettes dépassent de 0,4 milliard d’euros la prévision du collectif.

L'impôt sur le revenu net des remboursements, des dégrèvements et des restitutions de primes pour l’emploi – PPE – accuse, en revanche, une baisse de 0,4 milliard d’euros par rapport à l'évaluation retenue en loi de finances rectificative. Un tel écart par rapport aux évaluations initiales conduit à s’interroger sur le coût grandissant des crédits d'impôts, y compris la prime pour l’emploi, qui ont pour effet d'amputer l'assiette d'un impôt pourtant particulièrement dynamique.

Sans surprise, un manque à gagner de 180 millions d’euros peut également être observé sur la taxe intérieure sur les produits pétroliers – TIPP par rapport aux évaluations en loi de finances rectificative. C'est l'effet d'une consommation de carburant plus modérée que prévu dans un contexte de renchérissement des prix du pétrole. Pour le reste, les recettes fiscales nettes sont, dans leur ensemble, conformes aux prévisions.

Quant aux prélèvements sur recettes, ils conduisent à une détérioration de l'équilibre
de 0,6 milliard d’euros par rapport au collectif. Cette dégradation se retrouve à peu près également partagée entre le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne et celui au profit des collectivités locales. L'écart sur le dernier tient au seul dynamisme des dépenses du fonds de compensation pour la TVA – FCTVA –, qui, au total, augmentent de presque 0,4 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale.

À l’inverse, les recettes non fiscales affichent une exécution supérieure de
1,2 milliard d’euros à la prévision retenue en collectif. L'ampleur de la plus-value peut surprendre, mais elle s'explique principalement par le versement d'une soulte de 640 millions d’euros par la SNCF, en contrepartie de la reprise de la dette du service annexe d’amortissement de la dette – SAAD – intervenue au 31 décembre dernier.

S’agissant des comptes spéciaux, le solde est en dégradation de 0,4 milliard d’euros par rapport à la loi de finances rectificative. Alors que ce solde avait contribué, à hauteur de 3,5 milliards d’euros, à l'amélioration du déficit budgétaire en 2006, il ne joue quasiment pas sur l'équilibre en 2007. La véritable surprise tient à l'apparition d'un déficit important sur le compte d'avances aux collectivités locales : alors que le solde du compte d'avances était régulièrement positif – ce qui était parfois reproché –, il bascule à moins 455 millions d’euros en 2007. C'est une clarification utile dans le débat sur les relations financières avec les collectivités locales. En tout cas, ces résultats appellent à poursuivre les efforts.

L'objectif qui guide le Gouvernement pour l'avenir est le retour à l'équilibre des finances publiques en 2012. La discussion de la proposition de loi constitutionnelle à l'Assemblée nationale, voilà deux semaines, à l’initiative du groupe Nouveau centre, a permis de réaffirmer cet engagement. Il convient maintenant de lui donner corps en préparant les réformes de structures, qui sont identifiées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, et en s’appuyant sur une stratégie qui aille au-delà du simple cadre de la loi de finances annuelle.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a souligné que, si l’exécution du budget de 2007 a abouti à un déficit sensiblement inférieur de près de 4 milliards d’euros aux prévisions, certaines fragilités n’en apparaissent pas moins du côté tant des dépenses que des recettes.

S’agissant des dépenses, la norme très ambitieuse de moins 1 % en volume est-elle tenable pour le budget pour 2008, sachant l’existence de sous-budgétisations, concernant en particulier la sécurité sociale ?

Pour ce qui est des recettes, la réalisation de l’impôt sur le revenu est, pour la première fois depuis une dizaine d’années, très inférieure aux prévisions. En effet, si elle accuse une baisse de seulement 0,4 milliard d’euros par rapport à l'évaluation retenue en loi de finances rectificative, le montant est en fait supérieur de plus d’un milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale, faute d’une dépense fiscale suffisamment évaluée, laquelle vient miner, voire miter les différents impôts, avec comme résultat la mobilisation de l’emprunt pour couvrir le déficit.

Ce budget étant le deuxième exécuté en mode LOLF, quels enseignements peut-on en tirer, qu’il s’agisse des améliorations à apporter ou des difficultés à éviter ?

Concernant la fongibilité asymétrique, elle est, avec 300 millions d’euros, inférieure en 2007 par rapport à 2006, où elle était montée à près de 400 millions d’euros, en raison d’une masse salariale mieux définie. À cet égard, les multiples engagements pris ces derniers mois pourront-ils être tenus en 2008 concernant les heures supplémentaires payées au taux de 125 %, l’apurement des heures impayées, le rachat des stocks de comptes épargne temps, ou encore les mesures de garantie de pouvoir d’achat et de revalorisation du point ? Par ailleurs, quel est l’impact 2007 des compensations d’exonération de charges sociales dues à la loi TEPA ?

S’agissant de l’impôt sur les sociétés, si l’acompte de décembre a pu rassurer, quelles informations peuvent être données sur le solde, qui est payé au 15 mars ou au 15 avril au titre de l’exercice 2007, mais qui impacte le budget 2008 ?

Quant au manque à gagner de 180 millions d’euros sur la TIPP par rapport aux évaluations, a-t-il pu être en partie compensé par un gain de TVA ? Plus exactement, quel est l’impact global de la TIPP et de la TVA au titre de la fiscalité pétrolière ?

Enfin, la dette négociable de l’État, qui était au 31 décembre 2006 de 877 milliards d’euros, soit 49 % du PIB, est passée, fin 2007, à 921 milliards, soit 49,5 % du PIB. Dans ces conditions, la prévision pour 2007, qui était, en consolidé, de 64,2 %, est-elle tenable ?

Le Président Didier Migaud a demandé, à propos de la diminution des recettes fiscales, si l’augmentation de la dépense fiscale de 2007 sur 2006 avait pu être chiffrée.

M. Éric Woerth a d’abord estimé, suite à la remarque du Rapporteur général sur les fragilités budgétaires, qu’un déficit du budget de 34 milliards d’euros ne peut, par principe, que rendre fragile. Seul le rétablissement des finances publiques permettra de retrouver des marges de manœuvre.

Quant aux sous-budgétisations chroniques en matière sociale, s’il y a été répondu dans le budget de 2007 par le remboursement d’une dette vis-à-vis de la sécurité sociale, on ne peut à la fois dénoncer une telle dette et s’étonner qu’elle soit remboursée. En tout cas, ce remboursement a permis de résoudre un problème récurrent entre les organismes de sécurité sociale et l’État, les premiers ayant pour habitude de dénoncer les efforts qui leur sont demandés par le second alors que celui-ci crée de la dette à leurs dépens. Il faut maintenant éviter que cette dette ne se recrée, ce qui explique d’ailleurs, dans le budget pour 2008, une rectification à la hausse de certaines prestations sociales, telle l’aide médicale d’État, à un niveau proche de la réalité.

Il vaut mieux afficher un objectif tel que la norme « zéro volume » sur le long terme et s’y tenir, plutôt que viser un objectif de « moins un volume ». La marge de manœuvre ainsi récupérée – qui peut s’élever à 4 à 5 milliards d’euros sur la base d’un taux moyen d’inflation de 1,5 à 1,7 % – permet d’éponger les dépenses de pensions supplémentaires, qui ne peuvent être pilotables qu’à moyen terme et non à court terme, et de mieux gérer la problématique de la dette, laquelle augmente de presque 2 milliards sauf diminution des taux. La norme « zéro volume » permet ainsi d’absorber les dépenses presque incompressibles supplémentaires et de stabiliser en volume les dépenses à un niveau proche, en euros courants, de l’année précédente.

S’agissant des recettes, les dépenses fiscales jouent à plein leur effet, notamment pour l’impôt sur le revenu. A cet égard, si le rapport entre les dépenses fiscales de 2006 et de 2007 n’est pas encore connu, il convient en tout cas d’approfondir, dès cette année, pour le projet de budget pour 2009, le concept même de dépense fiscale.

Pour ce qui est de l’impôt sur le revenu, le coût des crédits d’impôt aura presque doublé entre 2006 et 2007. C'est ainsi que le crédit d’impôt relatif aux dépenses d’équipement en faveur des économies d’énergie, qui coûte près de 2 milliards d’euros, aura presque doublé d’une année sur l’autre. La priorité absolue donnée aux économies d’énergie se fait, dans ces conditions, aux frais de l’État, au point même que les agents de recouvrement des impôts deviennent des spécialistes en matière de chaudières ! La représentation nationale doit aider à faire évoluer un dispositif qui, ouvert à tous, devient en fait un dispositif de défiscalisation et non plus d’incitation.

La prime pour l’emploi a, pour sa part, beaucoup augmenté en raison d’un facteur plutôt positif, à savoir qu’avec l’augmentation de l’emploi, un nombre plus important de personnes y accède.

Quant à la fongibilité asymétrique, le fait qu’elle soit inférieure en 2007 par rapport à 2006 traduit la meilleure prise en compte de leur masse salariale par les gestionnaires de ressources humaines. En 2008, les prévisions devraient être encore meilleures – même si le fait de mieux définir les lignes budgétaires aboutit à une moindre réserve – et permettre une plus grande élasticité dans les actions.

Pour 2008, 130 millions d’euros ont été prévus en matière d’heures supplémentaires, mais encore faut-il se mettre d’accord avec les organisations syndicales, à la suite d’un dialogue approfondi, sur autre chose que sur le seul point d’indice. Il convient en effet de se pencher également sur les modalités d’attribution de la moitié des économies réalisées avec le départ de fonctionnaires, sur le nombre de jours rachetés dans le cadre des comptes épargne temps – sachant que la proposition faite en octobre 2007 de racheter quatre jours a été saisie par plusieurs dizaines de milliers de fonctionnaires – ou encore sur les modalités de mise en œuvre de la garantie individuelle de pouvoir d’achat qui, en ne bénéficiant qu’à ceux qui en ont vraiment besoin, est à la fois plus juste et moins coûteuse pour les finances publiques.

Le coût de la loi TEPA sur 2007 est estimé à 1,3 milliard d’euros. Les chiffres relatifs aux heures supplémentaires pour les entreprises de moins de dix salariés ne seront disponibles qu’en février, mais les résultats devraient être en ligne avec les prévisions.

Quant aux inquiétudes concernant l’impôt sur les sociétés, seuls des acomptes ont été jusqu’à présent versés sur la base des résultats de 2007. Les affaires récentes appellent à une certaine prudence d’ici au mois de mars s’agissant du résultat, car elles auront certainement un impact sur les rentrées de quelques établissements. Même si les chiffres étaient disponibles, ils ne pourraient être communiqués compte tenu du secret fiscal. En tout cas, le solde reste un sujet de préoccupation.

Si les chiffres de la TIPP sont, eux, disponibles, tel n'est pas le cas pour la TVA. Quant à la dette, il n’y a pas de raison de remettre en cause aujourd’hui le pourcentage de 64,2 % qui a été prévu pour 2007 et qui a été consolidé au moment de l’examen de la loi de finances rectificative.

M. Michel Bouvard s’est d’abord félicité de l’amélioration, contrairement à ce que beaucoup pronostiquaient, de l’exécution du budget par rapport à la loi de finances initiale, pour un montant de 4 milliards d’euros, ainsi que de la limitation du déficit du budget de l’État à 2 % et du respect de l’excédent primaire.

Pour ce qui est des dépenses fiscales, si tous les éléments d’information ont été fournis pendant la discussion de la loi de finances pour 2008, la fiabilité de certains d’entre eux pose cependant problème, comme le montre la comparaison des évaluations faites dans les projets annuels de performances – PAP – et dans les RAP. Un travail ayant été engagé en la matière, la commission ne pourrait-elle pas bénéficier d’indications sur la méthodologie retenue, voire être associée à ce travail eu égard aux enjeux en matière d’impôt sur le revenu ?

Par ailleurs, nombre de responsables de budgets opérationnels de programme
– BOP – se sont plaints, auprès de la mission d'information constituée par la commission des finances sur la mise en œuvre de la LOLF, que la fongibilité asymétrique ne joue pas pleinement son rôle, puisque, à la fin de l’exercice, les crédits non consommés sont récupérés par Bercy faute de pouvoir être redéployés. On peut donc craindre que le moindre recours à la fongibilité asymétrique que l’on observe soit moins due à une meilleure appréciation des dépenses qu’à un certain découragement devant la diminution arbitraire de crédits.

Sans prétendre remettre en cause l’analyse du ministre, on peut être sceptique et émettre le souhait que soit menée une opération vérité conjointe sur le fonctionnement de la fongibilité asymétrique, éminent facteur de responsabilisation des gestionnaires sur le terrain. La MILOLF accueillerait avec plaisir M. Philippe Josse à l’occasion d’un déplacement sur le terrain à la rencontre des responsables.

M. Éric Woerth ayant souligné que, en 2007, la croissance avait été inférieure aux prévisions, M. Jérôme Cahuzac lui a demandé si les dispositions du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi, et du pouvoir d’achat créaient le choc de confiance, donc le pic de croissance attendus.

Par ailleurs, le budget que le Parlement a voté est fondé sur une parité entre l’euro et le dollar dont les paramètres ne sont plus d’actualité. Il en va de même pour l’inflation et le prix du baril. Nombre d’instituts et d’économistes prévoient pour l’année prochaine une croissance de 1,5 ou 1,6 au lieu des 2,25 retenus par Mme Christine Lagarde et le ministre. Un collectif budgétaire, comme chaque année, interviendra. Or le ministre du budget a déclaré, par voie de presse, qu’une augmentation de TVA et de CSG serait d’actualité au premier semestre de cette année, soit avant le 30 juin, et qu’elle permettrait d’abonder les comptes sociaux, mais pas le budget de l’État. Qu’est-il donc envisagé pour 2008 ?

En effet, si le Rapporteur général s’est félicité de l’amélioration du déficit par rapport à la loi de finances initiale, il faut rappeler qu’un déficit s’apprécie de l’exécution de l’année n par rapport à l’exécution de l’année n-1. De ce point de vue, le déficit s’aggrave de plus de 3 milliards, passant d’un peu moins de 36 milliards l’année dernière, à plus de 38 milliards.

Concernant par ailleurs la cession des titres EDF, ils auraient perdu 5 % entre l’annonce faite par le Président de la République et leur vente. Le ministre confirme t-il cette information ? A combien évalue-t-il la perte pour les ressources de l’État ?

Enfin, le ministre maintient-il l’objectif d’une dette publique inférieure à 60 % en 2012, compte tenu de la dégradation du déficit budgétaire de l’État et des grandes inconnues quant à l’évolution des comptes sociaux ?

M. Charles de Courson a demandé au ministre où en étaient les déficits publics : État, sécurité sociale, collectivités territoriales. Les dernières informations en la matière font état d’un véritable dérapage des dépenses de sécurité sociale, en particulier de l’assurance maladie, sans parler de l’assurance vieillesse, victime du succès plus important que prévu de la possibilité offerte à ceux ayant commencé à travailler jeunes d’anticiper leur retraite. De surcroît, ces chiffres ne tiennent pas compte d’un certain nombre de reports de charges et de recettes exceptionnelles, notamment à caractère non fiscal ; même si le ministre s’est attaché à rembourser la plus grosse part des dettes de l’État à la sécurité sociale, il reste encore 1,2 milliard à payer, sans parler de la situation très difficile de la défense.

S’agissant des comptes épargne temps, aucune provision n’a été comptabilisée, selon le rapport de M. Philippe Vigier.

Du côté des recettes non fiscales, la soulte de la SNCF a permis de récupérer 640 millions ; cependant les dettes reprises en contrepartie n’apparaissent pas en opérations budgétaires, mais dans le compte de résultat de l’État, ce qui n’est pas logique.

Enfin, il y a l’affaire EDF et ses 923 millions.

Compte tenu de tous ces éléments, comment tenir l’exécution de 2008 ?

Pour ce qui est du taux des prélèvements obligatoires en 2007, est-il exact qu’il aurait encore augmenté par rapport à 2006 ?

Enfin, depuis plusieurs années, la norme de dépenses est complètement contournée. De combien la dépense budgétaire brute a-t-elle augmenté en 2007 ?

M. Jean-Claude Sandrier a demandé au ministre comment il pouvait se satisfaire de la situation alors que, selon le Président de la République, les caisses sont vides.

Que pense-t-il par ailleurs de ces mannes financières qui circulent, entre la manipulation de 50 milliards d’euros à la Société Générale, le chiffre d’affaires des paradis fiscaux – 2 500 milliards –, et la mise sur le marché par la Banque centrale européenne de 350 milliards de liquidités pour des institutionnels privés en 2007. « L’argent coule à flots », a déclaré Patrick Arthus. Si c’est vrai, un mince filet de ce flot ne pourrait-il renflouer le budget de la France ? Il faut en effet que circulent dans le monde, en actifs financiers, la valeur de trois produits intérieurs bruts.

Enfin, a-t-il été tenu compte des conclusions du rapport de la Cour des comptes de 2006, selon lesquelles, sur 20 milliards d’exonérations de cotisations sociales, 17 milliards n’avaient pas servi à l’emploi ?

M. Pierre-Alain Muet a, à son tour, souligné le déficit en exécution et le ralentissement de la croissance par rapport à la prévision. Les recettes fiscales – TVA, impôt sur le revenu – baissent. Que va-t-il se passer l’année prochaine ? Se référant au rapport du rapporteur général, il a exprimé ses craintes qu’en 2008, le déficit de l’ensemble des finances publiques ne dépasse à nouveau les 3 %.

M. Éric Woerth a tout d’abord répondu à M. Michel Bouvard que, s’il était vrai que les dépenses fiscales représentaient des montants très élevés, il fallait continuer à mieux les gérer et, parallèlement, ne pas considérer qu’une fatalité pèse sur le stock de dépenses fiscales. Les sénateurs ont ainsi proposé des dépenses fiscales à durée déterminée. Il faut introduire plus de transparence, plus de plafonnements, plus de délais impartis. Le ministre fera des propositions à ce sujet, et le groupe de Bercy se réunira début février pour étudier les règles susceptibles d’être mises en œuvre suite à la proposition de loi du groupe Nouveau centre.

S’agissant de la fongibilité symétrique, il convient de saluer la meilleure tenue par les gestionnaires de la prévision de dépenses de titre II de la masse salariale. Alors que la sous-exécution s’était élevée en 2006 à 850 millions, elle aura été de 650 millions en 2007.

Il est vrai par ailleurs que des crédits ont été annulés pour tenir la norme de dépenses, dans une logique de bonne gestion.

Le ministre a enfin assuré aux députés que M. Philippe Josse serait ravi de participer à leurs travaux.

Il s’est étonné de ce que M. Jérôme Cahuzac juge le budget 2008 insincère, du fait de l’inflation ou de la croissance. Il est en effet impossible de modifier sans cesse le budget en fonction de la volatilité des marchés ou des prévisions de croissance. Il faut au contraire faire preuve d’un minimum de sang-froid. Si la croissance en 2007 a été inférieure à la prévision, les recettes fiscales et non fiscales ont été supérieures, ce qui prouve qu’une certaine prudence a été de mise. De même, en 2008, le coefficient d’élasticité entre les recettes fiscales et la croissance a été fixé à 1,3, contre 1,6 en 2007 et presque 2 en 2006.

Pour ce qui est de l’inflation, elle a été prévue à 1,6. Certes, elle a augmenté ces derniers mois, mais nul ne peut savoir ce que cela donnera en moyenne sur l’année 2008. Ce serait une erreur de revoir les prévisions.

L’essentiel est de maîtriser la dépense et de présenter des comptes sincères. Le Gouvernement s’est ainsi attaché à réadapter les crédits afin d’affronter la situation telle qu’elle est, avec les moyens disponibles.

Revenant sur les critiques émises à l’encontre du mode de comparaison des exécutions, M. le ministre a considéré que seuls les chiffres de 38,4 et 39 milliards pouvaient, au final, être comparés, et que la dépense était maîtrisée, malgré les circonstances difficiles.

S’agissant des titres EDF, il a rappelé qu’ils avaient été bien vendus, bien mieux en tout cas que s’il avait fallu les vendre aujourd’hui. Ils ont été vendus au moment où le Président de la République l’a souhaité, à un cours très supérieur à la moyenne des cours annuels des dernières années.

Les objectifs d’équilibre des finances publiques sont maintenus, malgré les difficultés et la nécessité de franchir, en 2009, une étape bien plus importante que celle de 2008.

Il a indiqué à M. de Courson qu’il ne disposait pas encore de l’état des déficits publics dans leur ensemble, mais que les dérapages dans le domaine de l’assurance maladie avaient été anticipés grâce à la prévision des 12 milliards d’euros pour les régimes retraite–assurance maladie. De surcroît, les nouvelles sont meilleures du coté de l’Unedic. On en saura davantage vers mars ou avril.

Il est vrai par ailleurs que la réintroduction des déficits de la sécurité sociale dans l’exécution budgétaire représente 1,2 milliards de dettes supplémentaires, mais il faut qu’à terme chacun ait son propre déficit ; en la matière beaucoup de chemin reste à faire.

Quant au provisionnement des comptes épargne temps, c’est du bilan et non du déficit maastrichien.

Il y a également eu des recettes exceptionnelles, comme dans tous les budgets. Les chiffres sont donc sincères.

Pour ce qui est des prélèvements obligatoires, le taux de 44 % a été présenté, et aucun élément ne justifie aujourd’hui qu’il soit modifié.

S’agissant de la norme de dépense, le ministre s’est dit d’accord pour que la dépense fiscale soit considérée comme une vraie dépense budgétaire, mais elle est plus difficile à normer que les autres. Il est compliqué de fixer des normes sur lesquelles l’on ne dispose d’aucun instrument de pilotage. Il conviendrait de s’orienter vers une limitation dans le temps des dépenses fiscales, un impact clairement mesuré de la dépense fiscale, et des dépenses fiscales réservées aux lois de finances.

Le Président Didier Migaud a précisé qu’une mission sur la dépense fiscale avait été mise en place et qu’elle formulerait des propositions, notamment sur le fait de réserver aux lois de finances l’exclusivité des mesures fiscales.

M. Éric Woerth a confirmé à M. Jean-Claude Sandrier que les caisses de l’État étaient vides, et même plus que vides, puisqu’en déficit. Loin de s’en réjouir, il s’est attaché à le réduire. Si l’argent coule à flot, il s’agit d’argent privé, qui n’a rien à voir avec l’argent de l’État.

Pour ce qui est des exonérations de charge, elles s’élèvent dans leur ensemble à 29 milliards d’euros. Elles correspondent aux exonérations dites « Fillon » : compensations des 35 heures, diminution des charges jusqu’à 1,6 fois le SMIC, compensation des exonérations de charges sociales etc. Le Gouvernement souhaite lier de plus en plus ces exonérations à une dynamique de la politique salariale.

Enfin, le ministre a rappelé à M. Pierre-Alain Muet que le lien entre la croissance et le budget n’était pas mécanique, et que le pays n’était pas en récession. On parle de la croissance française, qui se tient même plutôt mieux que celle d’autres pays. Tout ne va pas si mal : le taux de chômage diminue, le taux de création d’entreprises est bon etc. Surtout, il faut garder son sang froid, d’autant plus qu’a été prévu, dans le budget 2008, une réserve de 7 milliards – contre 5 en 2007 – qui sera certainement utile pour mieux tenir la dépense.

Il faut accompagner, accélérer le mouvement de réforme du pays, là est la vraie réponse.

Le Président Didier Migaud a remercié le ministre du Budget et indiqué que la Commission reviendrait sur l’exécution 2007 à l’occasion de la remise du rapport de la Cour des comptes et de la discussion de la loi de Règlement.

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