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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mardi 24 juin 2008

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 96

Présidence de M. Didier Migaud, Président

– Examen, pour avis, d’un projet de décret d’avance et d’annulation en application de l’article 13 de la LOLF

La Commission a examiné une proposition d’avis, présentée par M. Gilles Carrez, Rapporteur général, sur un projet de décret portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance, en application de l’article 13 de la loi organique n° 2001–692 relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF).

Le Rapporteur général a présenté l’économie générale du projet de décret. L’ouverture de crédits porte sur 326,8 millions d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et 307,7 millions d’euros de crédits de paiement (CP). Elle a pour objet de financer trois séries de dépenses : des mesures de soutien à la pêche pour 178,9 millions d’euros d’AE et 159,8 millions d’euros de CP ; la mise en œuvre d’un plan pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans abri pour 147 millions d’euros d’AE et de CP ; la mise en place d’une administration de mission en appui au secrétariat d’État chargé du Développement de la région capitale pour 924 000 euros d’AE et de CP. En contrepartie, des annulations sont effectuées, pour des montants équivalents, sur les crédits mis en réserve.

En matière d’aides à la pêche, le Rapporteur général a indiqué que deux séries de mesures résultent de décisions prises après le vote de la loi de finances pour 2008 : une aide sociale exceptionnelle destinée à soutenir le revenu des pêcheurs touchés par la hausse du prix du gazole et un plan annoncé à la mi-janvier consistant principalement dans des mesures de renouvellement de la flotte, co-financées par les collectivités territoriales et le Fonds européen pour la pêche. En revanche, les exonérations de cotisations sociales en faveur des pêcheurs étaient connues dès novembre 2007 et auraient donc dû être prises en compte dans la loi de finances pour 2008 ou dans le collectif budgétaire de fin d’année 2007.

Les ouvertures de crédits en faveur de l’hébergement d’urgence ne sont pas une surprise : chaque année, les dotations budgétaires initiales sont insuffisantes et nécessitent des ouvertures complémentaires par décret d’avance ou en loi de finances rectificative. Cette année, les crédits prévus dans le décret d’avance, justifiés par un nouveau plan pluriannuel, correspondent quasiment à un doublement des crédits consacrés à l’hébergement d’urgence dans la loi de finances pour 2008.

La « mission d’appui » au secrétaire d’État chargé du « Grand Paris » ne pose, quant à elle, guère de problème de principe, dès lors qu’elle sera placée auprès de la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT).

Le Rapporteur général a souligné que ces ouvertures de crédits sont gagées par des annulations d’un même montant, portant sur 27 missions et 68 programmes et touchant les crédits mis en réserve en début d’année. Pour les programmes concernés par les annulations, sont annulés environ 18 % des AE et 21 % des CP hors titre 2 actuellement en réserve, moyennant plusieurs ajustements effectués sur demandes des différents ministères. Comme de coutume, certaines missions et certains programmes échappent par principe aux annulations de crédits : soit parce qu’ils bénéficient d’ouvertures dans le décret ; soit parce qu’ils étaient déjà exonérés de toute mise en réserve initiale (crédits évaluatifs et pouvoirs publics) ; soit parce qu’ils comportent des dépenses dites « inéluctables » (subventions aux régimes sociaux et de retraites ; dépenses à « guichet ouvert » etc.). De façon plus conjoncturelle, d’autres programmes échappent aux annulations de crédits du fait de leurs difficultés d’exécution prévisibles d’ici la fin de l’année. Il faut relever en particulier que la totalité des programmes du ministère de la Défense sont exonérés d’annulation de crédits dans le projet de décret d’avance : il s’agit vraisemblablement de préparer un autre décret d’avance qui, comme chaque année, devra couvrir les surcoûts liés aux opérations extérieures et devrait être « auto-financé » par le ministère de la Défense.

M. Michel Bouvard a souhaité obtenir des précisions quant aux règles applicables en matière de régulation budgétaire pour la Cour des comptes et des autres juridictions financières. Il s’est également interrogé sur l’opportunité de certaines annulations, évoquant le projet Chorus et le retard dans la mise en œuvre des systèmes d’information.

Le Rapporteur général a précisé que la Cour des comptes et les juridictions financières n’échappent pas à la régulation budgétaire mais que les crédits mis en réserve sont gérés dans le respect de leur indépendance. Les annulations sur le programme d’expérimentation du projet Chorus portent sur environ 1 % des crédits initiaux hors titre 2, soit une proportion identique à celle des autres programmes de la mission Administration générale et territoriale de l’État.

M. Michel Bouvard a rappelé, s’agissant des ouvertures de crédits en faveur des pêcheurs, que chaque année une crise nécessite des moyens supplémentaires au ministère de l’Agriculture, qu’il s’agisse d’une crise structurelle ou liée à des questions climatiques. Il conviendrait de réfléchir sérieusement, comme cela a été évoqué à plusieurs reprises, à la mise en place d’une ligne budgétaire pour faire face aux imprévus.

Le Président Didier Migaud a souligné que le principe même de réduction forfaitaire des crédits pose problème, s’interrogeant sur la pertinence de la réduction de crédits sur certains programmes, par exemple la sécurité routière. Il a souhaité savoir si certains programmes contribuent aux annulations pour un pourcentage supérieur au taux uniforme de 18 % des AE et 21 % des CP hors titre 2.

Le Rapporteur général a répondu que, sur proposition des ministères gestionnaires, la répartition des annulations entre programmes d’un même ministère a parfois été modifiée, entraînant des contributions pouvant aller au-delà du taux uniforme. À l’issue du décret, la réserve de précaution constituée sur les crédits initiaux, dépenses de personnel comprises, serait réduite à 5,9 milliards d’euros d’AE (au lieu de 6,2 milliards d’euros) et à 5,6 milliards d’euros de CP (au lieu de 5,9 milliards d’euros).

La Commission a ensuite adopté la proposition d’avis sur le projet de décret d’avance, qui comporte notamment les trois observations suivantes :

– l’ouverture de 37,2 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement destinée à compenser les exonérations de cotisations sociales en faveur des pêcheurs, annoncées et appliquées dès novembre 2007, aurait dû être évitée : soit par ouverture dans la loi de finances pour 2008 de crédits supplémentaires sur le programme Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins, soit par minoration des annulations de crédits effectuées sur ce même programme dans la loi de finances rectificative pour 2007 ;

– l’essentiel des autres ouvertures de crédits sont justifiées par la nécessité de couvrir des dépenses non prévues lors du vote de la loi de finances pour 2008. Pour légitimes qu’elles soient, nombre d’entre elles – en particulier les plans en faveur de la pêche et de l’hébergement d’urgence – découlent de décisions prises en janvier 2008, soit très peu de temps après le vote de cette loi. Elles posent donc, pour l’avenir, la question d’une meilleure anticipation, dans l’élaboration des projets de loi de finances, des mesures susceptibles de remettre en cause les crédits votés par le Parlement ;

– sous réserve qu’elles correspondent à de véritables économies, les annulations de crédits – qui portent essentiellement sur la réserve de précaution constituée en début d’année – permettent de préserver l’équilibre budgétaire défini par la loi de finances pour 2008. Tout en tenant compte de l’évolution des contraintes de gestion au fur et à mesure de l’exécution budgétaire, la contribution aux annulations devrait être équitablement répartie entre les programmes et les efforts partagés par le plus grand nombre possible d’entre eux. Le projet de décret peine à satisfaire à ces exigences, en particulier parce que le ministère de la Défense est exonéré de toute annulation de crédits.

——fpfp——