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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mercredi 25 juin 2008

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 102

Présidence de M. Didier Migaud, Président

– Audition de M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, sur le rapport préalable au débat d’orientation budgétaire

– Examen du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007

Le Président Didier Migaud : Je souhaite la bienvenue à M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, ainsi qu’à M. Christian Babusiaux, Président de la première chambre et aux magistrats qui les accompagnent.

Monsieur Séguin, la commission des Finances vous a déjà entendu sur le projet de loi de règlement des comptes de 2007. Elle a maintenant la possibilité de revenir sur ces comptes, afin d’appréhender l’évolution des finances publiques, d’en saisir les tendances et de préparer l’avenir. Ce sera l’objet du débat du débat d’orientation budgétaire qui aura lieu le 10 juillet prochain.

Nous venons d’entendre M. le ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique sur l’exécution des comptes de 2007. Nous disposons depuis ce matin du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, préliminaire au débat d’orientation budgétaire. Selon ce rapport, la situation de nos finances publiques a plutôt tendance à se dégrader par rapport à celle des pays voisins. Quelle est votre analyse et que recommandez-vous pour améliorer les comptes publics de la France ?

Je tiens à remercier la Cour des comptes pour l’intérêt et la qualité de ses rapports, qui contribuent au débat public, et pour la qualité des relations qu’elle entretient avec le Parlement, plus particulièrement avec l’Assemblée nationale et sa commission des Finances.

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes : C’est avec grand plaisir que je reviens devant la commission des Finances pour présenter le rapport de la Cour sur la situation et les perspectives des finances publiques. Ce rapport clôt une véritable trilogie dont je vous ai présenté les deux premiers volets, l'acte de certification des comptes de l'État et le rapport sur les résultats et la gestion budgétaire, il y a quelque trois semaines.

Le rapport d'aujourd'hui est consacré à la situation d'ensemble de nos finances publiques, c'est-à-dire à la fois celles de l'État, de la sécurité sociale et des collectivités locales et à leurs perspectives à court, moyen et long terme. Il permet de saisir les interactions et les relations financières, toujours plus importantes, entre les différentes administrations publiques. Il analyse l'année 2007, les premières tendances de l'année 2008 et trace les perspectives des années à venir. Ce travail vise à vous apporter la contribution de la Cour à la préparation du débat d'orientation budgétaire. Je vais vous le présenter dans ses grandes lignes. Nous serons bien entendu à votre disposition pour préciser les points qui vous intéresseront plus particulièrement.

L'an dernier, dans ce même rapport, nous avions constaté une petite amélioration de la situation des finances publiques avec une légère décrue du déficit et, en même temps, du ratio d'endettement. Nous avions néanmoins souligné la fragilité et la lenteur de ces progrès ainsi que le caractère en partie artificiel de la réduction du déficit et de la dette. Nous avions raison d'être mesurés et circonspects : en 2007, les tendances se sont en effet inversées et le déficit public est reparti à la hausse, passant de 2,4 % de la richesse nationale à 2,7 % et ce après trois années de baisse.

La tonalité de ce rapport n’est donc pas celle de l'an dernier. Il y a trois raisons principales à cela.

D'abord, à un tel niveau de déficit, la dette publique ne manque évidemment pas de s'alourdir. Nous dépassons pour la cinquième année consécutive le seuil de 60 % fixé comme limite maximale par le traité de Maastricht et nous nous en écartons davantage. Aujourd'hui, en France, tout actif occupé a sur ses épaules un endettement de 47 000 euros avec un coût annuel de 2 000 euros de charges financières. Et, malheureusement, rien n'indique que ce chiffre soit appelé à décroître de manière significative prochainement.

Le deuxième motif de préoccupation, c'est que cette dégradation des comptes, comme d'ailleurs la lente amélioration de nos comptes de 2004 à 2006, ne résulte pas d'une croissance économique insuffisante. Si, au cours de cette période, la croissance française n'a certes pas été extraordinaire, elle est restée dans une honnête moyenne en Europe et proche de la « croissance potentielle » c'est-à-dire de la croissance française de long terme, un peu au-dessus de 2 % par an en volume. Il est donc inquiétant que, dans cette période de relative bonne tenue de la croissance dans notre pays et en Europe, nous ne soyons pas parvenus à amorcer un véritable rééquilibrage de nos finances publiques. En d'autres termes, notre déficit prend des allures structurelles et un affaiblissement de la conjoncture pourrait le refaire passer au delà de la limite des 3 %.

La troisième source de préoccupation vient de notre situation au regard de la plupart des pays voisins, en particulier, ceux de la zone euro, qui ont, à la différence de la France, profité de la croissance de ces dernières années pour accélérer l'assainissement de leurs finances publiques. En 2007, la moyenne de la zone euro hors France est ainsi à l'équilibre budgétaire. L'Allemagne, notamment, est revenue à l'équilibre. Seule la Grèce, au sein de la zone euro, et la Grande-Bretagne, font moins bien que nous.

La position de la France est donc assez singulière en Europe, à contre-courant de l'orientation générale. La situation semble plus sérieuse encore si on affine l'approche chiffrée. Pour ne prendre que l'exemple de la dette publique, officiellement de 63,9 % du PIB, celle-ci serait, en réalité, plus proche de 65 %, si l'on prenait en compte certaines des dettes portées par des entreprises publiques qui ont, selon nous, toutes les caractéristiques de la dette publique. Ainsi en est-il d'une partie de la dette de Réseau ferré de France, comme la Cour l'a montré dans un récent rapport public particulier.

Quelles sont donc les causes de la situation si dégradée de nos finances publiques ?

La première cause, et sans doute la principale, tient au dynamisme de la dépense publique dans notre pays. Ce n'est pas un fait nouveau, mais la croissance en volume des dépenses publiques en 2007 a été supérieure à la moyenne constatée ces dix dernières années, avec 2,5 % contre 2,2 %. Là encore nous nous démarquons : chez tous nos voisins, le poids des dépenses publiques a été réduit depuis vingt ans, grâce à des exercices systématiques de révision des programmes publics. Chez nous, jusqu'ici, il n'en a rien été, et la France est ainsi en passe de devenir le pays d'Europe où le poids des dépenses publiques est le plus lourd, avec plus de 52 % du PIB. Nous avons dépassé la plupart des pays d'Europe du Nord les plus socialisés. Nous sommes au-dessus de tous, sauf de la Suède ; et encore, celle-ci, qui a été pendant trente ans au premier rang en Europe pour ce ratio, a engagé un effort considérable pour réduire le poids de sa dépense publique et devrait passer derrière la France l'an prochain.

Notre principal partenaire en Europe, l'Allemagne, a quant à elle réduit le poids de ses dépenses de 48,5 % du PIB en 2003 à 44,0 % du PIB en 2007, soit une réduction de l'ordre de 1 point de PIB par an pendant cinq ans. Cet effort considérable explique, avec les hausses de fiscalité indirecte récemment décidées, le retour rapide à l'équilibre des comptes. En termes de poids des dépenses publiques, nous dépassons désormais l'Allemagne de plus de 8 points de PIB, ce qui représente un supplément de dépenses par rapport à notre voisin de 160 milliards d’euros, toutes choses égales par ailleurs, soit l'équivalent de la totalité de nos dépenses d'assurance maladie !

La seconde cause tient à la politique budgétaire menée en haut de cycle. Force est de constater que dans notre pays, quand la croissance est forte, la politique budgétaire est généralement « procyclique », c’est-à-dire qu’on en profite pour accroître les dépenses ou réduire les impôts au lieu de profiter du surcroît de recettes dû à la croissance pour rétablir l’équilibre.

Voilà les grandes tendances. Pour affiner le diagnostic, il faut analyser ces données globales par grandes catégories d'administrations publiques.

Quels sont maintenant les faits saillants ?

Tout d’abord, le fort dynamisme des dépenses des collectivités locales, qui s'est traduit en 2007 par un besoin de financement des collectivités locales de 0,4 % du PIB, traduisant une augmentation qui n'avait pas été anticipée. Les investissements des collectivités territoriales se sont à nouveau accrus en 2007 dans un contexte marqué par des transferts importants d'équipements de l'État.

Compte tenu de la stagnation de l'autofinancement, la hausse de l'endettement, observée depuis 2004, s'est poursuivie en 2007. Elle est restée cependant parallèle à celle du PIB. Ainsi, les taux d'endettement des collectivités locales demeurent modérés, avec des capacités moyennes de désendettement variant de deux à quatre ans pour les régions et départements, de six à sept ans pour les communes et leurs groupements.

En revanche, les sections de fonctionnement des collectivités territoriales, bien que toujours équilibrées, supportent plus difficilement les charges supplémentaires d'intérêts qui ont augmenté de 9,2 % en 2007 avec la remontée des taux.

La situation est d'autant plus tendue que l'ensemble des dépenses croît rapidement. En 2007, les dépenses des collectivités locales ont progressé de 6,5 % et les dépenses de personnel de 9,5 %. Cette croissance est en partie imputable aux conséquences financières des transferts de compétences. La Cour estime néanmoins que les dépenses hors transferts ont progressé de 5,3 % soit plus que le PIB en valeur – 4,7 % –, tout en reconnaissant qu'une partie des dépenses transférées, de par leur nature, était appelée à croître rapidement.

La croissance des recettes ne suit pas cette progression des dépenses.

Le produit des impôts directs (62,5 milliards d’euros) a ralenti, avec une augmentation de 3,2 % en 2007 contre 6 % en 2006. Les bases de la fiscalité locale, correspondant à des « stocks » de biens immobiliers, d'équipements et de mobiliers professionnels peu volatiles, restent dynamiques mais elles ont été rétrécies par les réformes de la taxe professionnelle. De plus, on a constaté en 2007 une modération des taux d'imposition qui ont quasiment stagné pour les communes et leurs groupements, après plusieurs années de hausse.

L'accroissement de la fiscalité a surtout tenu aux impôts indirects – +13,6% en 2007, après +8,4 % en 2006 – du fait des transferts de fiscalité – je pense notamment aux fractions de taxe intérieure sur les produits pétroliers et de taxe spéciale sur les conventions d'assurance. La croissance des droits de mutation, qui bénéficie surtout aux départements, est également demeurée forte, avec la hausse des prix de l'immobilier ancien. Jusqu’en 2007, elle a apporté aux collectivités territoriales 1 milliard de recettes supplémentaires.

Enfin, les dotations et subventions de l'État, qui représentent 56,8 milliards d’euros, ont encore progressé, mais de 2,9 % au lieu de 4,8 % en 2006. En incluant la compensation des dégrèvements et admissions en non valeur des impôts locaux, pour 13,5 milliards d’euros et la fiscalité transférée, pour 19,6 milliards d’euros, les concours financiers de l'État atteignent 90 milliards d’euros en 2007, soit une augmentation de 6,5 % par rapport à 2006.

Il faut rappeler qu'en 2007, les recettes de fonctionnement des collectivités étaient de 153 milliards d’euros et celles d'investissement de 18,7 milliards d’euros, ce qui montre le poids relatif très important des transferts de l'État.

En définitive, la situation des collectivités locales se tend progressivement mais je veux souligner que ce n'est pas là le principal problème de nos finances publiques. L'endettement des collectivités territoriales reste en effet, je l'ai dit, limité et il ne représente que 11 % de la dette publique, contre 80 % pour l'État. Difficile d’attribuer aux collectivités territoriales une responsabilité directe dans l’évolution de la situation de nos comptes.

Le deuxième trait saillant est le contraste, au sein des administrations de sécurité sociale, entre UNEDIC et régimes de base de sécurité sociale. Il est vrai que le régime d'indemnisation du chômage, l'UNEDIC, rétablit année après année sa situation financière, grâce à la baisse de la demande d'emploi. Avec plus de 3,5 milliards d’euros d'excédents en 2007, il commence à se désendetter, mais son stock de dette était encore de 9,5 milliards d’euros à la fin de 2007. A l'inverse, les régimes de base de sécurité sociale sont encore en lourd déficit pour plus de 10 milliards d'euros.

Nous vous préciserons ces chiffres à l'occasion de la certification des comptes de la sécurité sociale la semaine prochaine. Mais on peut d'ores et déjà souligner que le régime général est en déficit d'une dizaine de milliards d'euros par an depuis 2003. Jamais il n'aura connu dans son histoire une période aussi longue de déficit si élevé. Le résultat est l'accumulation d'une dette « sociale » de 130 milliards d’euros à la fin de 2007, qui se creuse de 10 milliards d’euros par an environ, alors qu'elle n'existait pas en 1997. Les déficits se sont reproduits malgré quelques décisions de relèvement des prélèvements sociaux. Le fait marquant lors de la période récente reste néanmoins le phénomène de « mitage » des recettes de la sécurité sociale avec la multiplication des niches sociales.

Du côté des dépenses, on observe une progression encore soutenue des dépenses d'assurance maladie, avec une accélération de 2006 à 2007 – 4,2 % contre 3,1 % –, même si, sur ces deux années, leur progression reste en deçà de celle du PIB en valeur. Les dépenses de retraite, quant à elles, restent très dynamiques, notamment du fait des départs anticipés des personnes ayant eu des carrières longues, dont le coût en 2007 a représenté 2,1 milliards d’euros après 1,8 milliard en 2006. Au total, il est intéressant de noter que le déficit de la branche vieillesse est désormais supérieur à celui de la branche maladie.

Pour ce qui est de l'État, enfin, les dépenses semblent mieux maîtrisées, même si le respect de la norme qui les encadre en partie n'a été rendu possible en 2007 qu'avec un accroissement des charges à payer en fin d'exercice – qui étaient de 7,5 milliards d’euros – et par des opérations de débudgétisation dont je vous ai parlé lors de ma dernière intervention.

Ce qui frappe en revanche, je l'ai également souligné la dernière fois, c'est la quasi- stagnation des recettes fiscales nettes de l'État qui, en 2007, ont atteint 266 milliards d’euros, soit un chiffre quasi identique à celui de 2004 – 265 milliards. Si l'on regarde les dernières années, les recettes fiscales spontanées ont progressé en trois ans de 51 milliards sous l'effet de la croissance, mais cette manne a été principalement utilisée en transferts d'impôts et de taxes vers la sécurité sociale et les collectivités territoriales pour 28 milliards et en allégements d'impôts pour 22 milliards. L'année 2007, comme je vous l'ai expliqué lors de ma dernière intervention, n'a pas fait exception à la règle.

En outre, le solde de financement de l'ensemble constitué par l'État et par les divers organismes d'administration centrale qui lui sont liés s'est nettement dégradé en 2007, passant de - 41 milliards d’euros à - 46,8 milliards d’euros. Il explique 92 % du besoin de financement des administrations publiques en 2007. Les organismes divers d’administration centrales, ou ODAC, liés à l'État ont en effet enregistré en 2007 un besoin de financement global de 7,6 milliards d’euros. Ce déficit global est inhabituel pour ces organismes, qui dégageaient une capacité de financement de 6,4 milliards d’euros en 2006, et de 3 milliards d’euros en moyenne sur les cinq dernières années. Cette dégradation du solde s'explique essentiellement par l'évolution de la Caisse de la dette publique qui est passée d'un excédent de 4,9 milliards en 2006 à un déficit de 4,9 milliards en 2007, du fait des opérations réalisées pour l'État, dont le remboursement de la dette au régime général de la sécurité sociale dont je vous ai parlé la semaine dernière. Ce remboursement n'a laissé aucune trace dans le budget de l'État ; en revanche il apparaît clairement dans les comptes de la Caisse de la dette publique. La dette globale de l'État et des ODAC liés est passée, en comptabilité nationale, de 908 milliards à la fin de 2006 à 953 milliards à la fin de 2007, soit de 50,2 à 50,6 % du PIB.

Voilà les principaux constats concernant 2007. J’en viens aux perspectives pour 2008 et 2009.

Les prévisions publiées en avril 2008 par le ministère de l'Économie tablent sur une réduction du déficit en 2008 de 2,7 à 2,5 % du PIB. Cette baisse proviendrait pour moitié des collectivités locales sous l'effet d'un ralentissement de leurs dépenses mais il s'agit d'une hypothèse incertaine, pour ne pas dire davantage, vu leur évolution de ces dernières années.

La prévision de réduction du déficit suppose également que les recettes fiscales soient conformes aux évaluations de la loi de finances initiale en dépit de la révision à la baisse de la prévision de croissance du PIB. Or, si la reprise de l'inflation peut laisser espérer de meilleures recettes de TVA, de lourdes incertitudes pèsent sur le produit de l'impôt sur les sociétés, notamment parce que le quart des recettes de l'impôt sur les sociétés vient du secteur bancaire.

Enfin, la hausse des taux d'intérêt observée depuis 2007 et la reprise de l'inflation risquent d'entraîner, par le jeu des mécanismes d'indexation, une pression sur les dépenses dès 2008 et surtout en 2009.

Ces observations mettent clairement en évidence les orientations à prendre si l'on veut atteindre l'équilibre de nos finances publiques dans les délais impartis par le programme de stabilité.

Ce programme, sur lequel la France s'est engagée, est fondé sur l'hypothèse d'une progression en volume de la dépense publique de 1,1 % par an, soit une division par deux du rythme observé ces dernières années, qui était, je l'ai dit, de 2,2 % et même de 2,5 % en 2007. Les dépenses de l'État seraient stabilisées en volume, celles de la sécurité sociale progresseraient de 2 % environ par an, soit un peu en deçà de leur tendance de longue période. L'effort le plus important serait demandé aux collectivités locales, pour lesquelles le rythme de progression des dépenses serait ramené de 4,2 % en volume par an à 1,4 %, soit un freinage très marqué. C'est évidemment une hypothèse centrale de cette stratégie.

La seconde hypothèse forte porte sur le rythme de la croissance. Le Gouvernement fait en effet l'hypothèse d'une accélération de la croissance française, dopée en quelque sorte par les réformes de structure qui seraient mises en œuvre sur la période. Ce faisant, il retient une croissance sur la période de 2,5 % à 3 %  qui permettrait, par les suppléments de recettes qu'elle procurerait, d'atteindre l'équilibre en 2012 – dès lors que le freinage, dont j’ai parlé tout à l’heure, aurait été opéré. Il faut savoir que, si la France n'atteignait pas ces taux et restait sur sa tendance de 2 %, le déficit serait encore de 1,2 % en 2012, cela même en supposant intégralement réalisé le freinage des dépenses. D'où l'importance de la croissance et des réformes structurelles engagées et à venir.

Ces réformes sont d'autant plus nécessaires que notre pays, comme les autres, aura à affronter des enjeux de long terme en matière de dépenses publiques, liées essentiellement au vieillissement de la population, avec toutes ses conséquences. Sans parler des enjeux liés à l'environnement et au réchauffement climatique, qui auront des conséquences sur les finances publiques à cet horizon dans une mesure encore difficile à préciser mais certainement importante. Tous ces enjeux représentent plusieurs points de PIB de dépenses publiques supplémentaires, qu'il faudra absorber.

Quelles sont donc, selon la Cour, les conditions d'un rééquilibrage de nos comptes publics ?

Tout d'abord, il faudrait renforcer les instruments de pilotage global. L'ampleur des transferts de l'État vers les collectivités locales – 90 milliards d’euros – et vers la sécurité sociale – 45 milliards d’euros – montre assez qu'une stratégie de rééquilibrage ne peut être que globale. À quoi servirait-il que l’État renforce les contraintes sur ses dépenses, par exemple en ne remplaçant pas un fonctionnaire partant en retraite sur deux, si, dans le même temps, les opérateurs de l'État et les collectivités locales recrutaient fortement ?

La mise en place du Comité des finances publiques – COFIPU – constitue donc une initiative heureuse, mais il est souhaitable que cette instance soit régulièrement réunie, en particulier au moment où s'élabore la stratégie financière pluriannuelle du pays, afin de permettre de dégager des consensus sur ces sujets.

Nous accordons aussi un grand crédit à la mise en place annoncée par le Gouvernement d'une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques qui viserait à la fois à soumettre au Parlement une stratégie financière pluriannuelle concernant toutes les administrations publiques, pour trois ans, et à fixer, pour ce qui est du budget de l'État, des plafonds de dépenses par grande politique publique, c'est-à-dire pour reprendre la terminologie de la LOLF, par mission et programme. Nos recommandations sur ce point ont été suivies et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Nous formulons dans ce rapport plusieurs recommandations concernant le pilotage des finances publiques. Je ne rentrerai pas dans le détail, mais il nous apparaît notamment nécessaire de renforcer le caractère pluriannuel du pilotage financier dans les administrations sociales et locales.

Pour les collectivités territoriales, il serait certainement opportun de retenir des objectifs tendanciels pour les effectifs et les dépenses de personnel.

Une règle d'équilibre des comptes, sur moyenne période, devrait également être adoptée pour la sécurité sociale et des progrès devraient être accomplis dans la régulation infra-annuelle des dépenses sociales, notamment par l'assurance maladie. Ainsi, les écarts par rapport aux objectifs devraient être décelés plus vite en cours d'année. La création du comité d'alerte répond à ce souci dans le domaine de l'assurance maladie et des progrès ont été faits dans le suivi conjoncturel des principaux indicateurs des finances sociales. Mais ils doivent être poursuivis. La Cour recommande aussi que les mesures qui seraient prises en cas de dépassement de l'objectif de dépense soient annoncées lors du débat sur la loi de financement. Cela donnerait à la correction des dérives un caractère plus automatique et crédibiliserait le dispositif. Une autre piste consisterait à abaisser le seuil à partir duquel le comité d'alerte est tenu de notifier un dépassement, seuil fixé depuis 2004 à 0,75 % du montant des dépenses d'assurance maladie. Le seuil pourrait être abaissé de 0,75 à 0,5 %. Mais il faudrait que ce resserrement du dispositif aille de pair avec une capacité plus fine du comité à apprécier les dépassements, ce qui suppose notamment une amélioration des remontées d'information sur la situation infra-annuelle des établissements de santé, aujourd'hui très insuffisantes et tardives.

Voilà quelques pistes. Nous en détaillons de nombreuses autres dans le corps du rapport. Cela dit, le renforcement de nos instruments de pilotage, pour nécessaire qu’il soit, ne suffira pas à assurer le respect de nos objectifs financiers. C'est une démarche générale de révision des programmes publics qui doit être poursuivie, à l'image des pratiques observées dans tous les pays voisins.

C'est la logique de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, qui a pris le relais des audits de modernisation, avec une démarche qui, il est vrai, se veut plus ambitieuse. Mais les mesures annoncées, suite aux trois "vagues" qui sont déjà intervenues, dont la principale est le non remplacement d'un fonctionnaire partant en retraite sur deux, n'entraîneraient, selon le gouvernement lui-même qu'une économie évaluée à 7,7 milliards d’euros à l'horizon de 2012, dont 1,7 milliard serait d'ailleurs réutilisé pour améliorer la situation des fonctionnaires. Au total, l'économie nette attendue en 2012, après ces trois vagues, ne sera donc que de 6 milliards d’euros, alors même que pour respecter le programme de stabilité, il faudrait 46 milliards d'économies. Il faut aller beaucoup plus loin. Si la RGPP doit être poursuivie, il faut l'amplifier ou trouver d'autres méthodes pour ramener l'évolution de la dépense au rythme annoncé. Dans un cas comme dans l'autre, les cibles sont assez aisées à identifier. Dans son rapport, la Cour suggère ainsi plusieurs pistes d’investigations possibles.

Telles sont, monsieur le président, les quelques indications que je voulais donner à la Commission. Je suis à votre disposition, ainsi que le président Babusiaux, pour répondre aux questions.

Le Président Didier Migaud : Monsieur le Premier président, nous avons été très attentifs à vos propos, d’autant que vous vous exprimez de manière très claire, sans langue de bois.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général : Monsieur le Premier président, je partage très largement le constat général que vous venez de faire sur les finances publiques. Il correspond à ce que j’avais indiqué, le 28 mai dernier, lors de la conférence des finances publiques que présidait le Premier ministre. Si nous voulons tenir l’objectif de 2012, il faut que nous réduisions le dynamisme de nos dépenses publiques et que nous sécurisions nos recettes.

Sur le premier point, nous sommes obligés de travailler en consolidé, avec les 300 milliards d’euros de dépenses de l’État, les quelque 200 milliards d’euros des collectivités locales, et les 450 milliards d’euros des comptes sociaux. La singularité française tient au fait que ces presque 1 000 milliards d’euros de dépenses publiques représentent environ 52 % ou 53 % du PIB. Au cours des dix dernières années, d’autres pays comme la Suède ou le Danemark sont passés de 65 % ou 67 % à 55 %. Plus généralement, on observe dans tous les pays comparables aux nôtres une réduction continue de la dépense publique, alors que chez nous celle-ci continue de progresser nettement plus rapidement que l’inflation. Elle accompagne le PIB et les mauvaises années, où la croissance est faible, elle va plus vite que la richesse nationale.

C’est l’occasion pour moi de vous poser quelques questions.

Depuis 2003, et c’est une novation importante, nous avons institué la règle du « zéro volume » : d’une année sur l’autre, les 300 milliards de dépenses de l’État n’ont pas augmenté plus vite que l’inflation. Nous avons commencé par les crédits stricto sensu. Nous avons étendu cette règle en 2008 aux prélèvements sur recettes. Et pour 2009, nous venons de proposer au Gouvernement, dans le cadre d’un rapport que Didier Migaud, Charles de Courson et moi-même avons présenté, que l’on mette en place une norme spécifique de dépenses fiscales.

Cela dit, quand on regarde l’exercice 2008, on s’aperçoit de plusieurs zones de fragilité : sans doute un sous-financement du prélèvement sur recettes de l’Union européenne – alors que nous avions été bien contents de bénéficier en 2007 d’une marge de manœuvre de près d’un milliard d’euros, la prévision ayant été excessive – ; ensuite, une partie de notre dette étant indexée sur l’inflation, mécaniquement, une majoration celle-ci de l’ordre d’un milliard ou 1,5 milliard d’euros due au regain d’inflation ; enfin, quelques incertitudes sur certaines zones de crédit, type OPEX, même s’il y a moins lieu d’être inquiet à ce propos. Globalement, en cumulant tous ces effets, à quels chiffres arriveriez-vous pour 2008 ?

L’exercice de RGPP, la pluri-annualité et toute une série de dispositions se mettent en place les unes après les autres. Mais l’exercice de RGPP n’a abouti jusqu’à présent qu’à « sécuriser » le fait de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant en retraite. Et la réduction du nombre de fonctionnaires, à laquelle se sont prêtés tous les autres pays, aura pour seul effet de stabiliser, en 2012, la masse salariale en euros courants. Cela ne permettra pas, par exemple, de financer, dans le budget 2009, le milliard et demi d’euros que nous devrons trouver pour le revenu de solidarité active ou RSA. Il y a donc de quoi s’interroger s’agissant des comptes de l’État.

Nous devons faire preuve de beaucoup plus de lucidité, que ce soit dans la majorité ou dans l’opposition, à propos des politiques sociales mises en place : l’allocation personnalisée d’autonomie ou APA, les mesures en faveur des carrières longues, l’allocation de garde d’enfant à domicile ou AGED, les mesures en faveur du handicap, maintenant le RSA et éventuellement le cinquième risque de dépendance. Quand ces différentes mesures ont été prises, des études d’impact ont été faites. Or on s’aperçoit que le rapport entre la prévision et la réalité est de 1 à 2, voire de 1 à 3. Cette dynamique infernale des nouvelles politiques sociales impacte d’abord le budget de la sécurité sociale, mais aussi celui de l’État et des collectivités territoriales. Comment obliger collectivement la Nation, c’est-à-dire chacun d’entre nous, à regarder en face le coût réel des décisions prises en matière de politiques sociales ?

S’agissant du budget des collectivités locales, il faut là encore être lucides. Une progression de 5 % ou 6 % par an, même avec une grande part d’investissements, n’est pas soutenable à long terme. Les collectivités locales nous opposent, à juste titre, l’article 62 de la Constitution relatif à leur libre administration. M. Emmanuelli pourrait engager le débat sur le désengagement de l’État …

M. Henri Emmanuelli : Ce n’est pas nous qui décidons de l’APA, dont le montant est fixé par l’État !

Le Rapporteur général : Quelle est la marge de manœuvre ? La Cour des comptes, à travers ses chambres régionales, notamment celle de la région Midi-Pyrénées, a été la première à nous alerter, voici six ou sept ans, sur le fait que l’intercommunalité conduisait plus à engager de nouvelles dépenses qu’à faire des économies d’échelle. Certes, on ne peut pas, comme en Suède, comme en Allemagne ou en Angleterre, créer des normes de dépenses locales et les imposer d’en haut. Comme il y a un énorme tuyau entre le budget de l’État et celui des collectivités locales, qui représente 70 milliards d’euros, l’État pourrait être tenté de réduire la taille de ce tuyau et, par un assèchement de la ressource, d’obliger les collectivités territoriales à réguler leurs dépenses. Mais, vous en serez d’accord, une telle solution n’est pas satisfaisante.

M. Henri Emmanuelli : Que l’État paie d’abord ses dettes !

Le Rapporteur général : Je terminerai sur une note plus optimiste : l’effort n’est tout de même pas hors de portée. Les dépenses publiques sont à peu près de 1 000 milliards d’euros. Elles ont augmenté d’un peu plus de 40 milliards d’euros par an. Il faudrait qu’elles n’augmentent que d’un peu plus de 30 milliards d’euros par an. Il ne s’agit pas de dire que l’on va diminuer la dépense publique, mais de dire que celle-ci doit augmenter moins vite.

Si nous arrivons à gagner une dizaine de milliards par an, au bout de cinq ans, nous retombons sur notre problème de déficit structurel. Ce qui est très grave, c’est qu’à ce déficit structurel de l’État, qui est apparu au début des années quatre-vingt, est venu s’ajouter depuis 1993 un autre déficit structurel, celui des comptes sociaux.

Il est évident qu’il faut sécuriser les recettes. Nous avons présenté il y a trois semaines un rapport sur les dépenses et les niches fiscales ; je pense que nous avons été entendus par le Gouvernement sur un certain nombre de points. Yves Bur vient de présenter le pendant de notre propre rapport sur les exonérations sociales ; nous soutenons cette démarche. Vous avez vous-même, l’an dernier, tiré la sonnette d’alarme : nous ne pouvons plus nous permettre de créer des trous, donc de miter à la fois nos recettes fiscales et sociales par différentes exonérations, allègements, abattements, dégrèvements.

Que pensez-vous d’un amendement qui vient d’être voté au Sénat, auquel nous avions déjà réfléchi dans le cadre de la réforme constitutionnelle, selon lequel : « pour qu’une dépense fiscale ou une exonération sociale puisse être appliquée, il faut qu’elle soit validée par une loi de finances ou une loi de financement » ? Autrement dit, avec une telle disposition, pour être mises en œuvre dès l’été, l’année dernière, certaines mesures auraient nécessité un collectif.

M. Henri Emmanuelli : À l’époque, nous vous l’avions demandé !

Le Rapporteur général : Et nous, nous vous l’avions demandé il y a cinq ans !

J’ai essayé de faire une intervention d’ordre général sur l’amélioration de nos règles de gouvernance. C’est un thème que nous portons, à la commission des Finances en tout cas, entre la majorité et l’opposition. N’est-ce pas, monsieur le président de la commission des Finances ?

Le Président Didier Migaud : En effet.

Tout à l’heure, le président de la commission des Affaires sociales a rappelé une évidence, à savoir que le Parlement vote la loi, y compris le budget et les différentes dispositions fiscales. Si le Parlement arrêtait de voter de nouvelles niches fiscales ou sociales, il n’y en aurait pas davantage. C’est une question de volonté. J’ai beaucoup apprécié ce rappel.

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes : La Cour applaudit à cet amendement, pour une raison simple qui explique que je sorte de ma réserve : nous l’avons proposé il y a trois semaines, à l’occasion de notre rapport. D’autres variantes sont possibles, comme l’obligation de valider de manière régulière la reconduction de la mesure concernée. Mais le passage par la loi de finances ou de financement serait la solution idéale.

M. le rapporteur général m’a demandé comme il fallait faire pour persuader les Français de bien regarder en face le coût de certaines dépenses... Sachez que nos efforts vous seront acquis.

S’agissant des risques pesant sur les dépenses de l’État en 2008, nous n’avons pas procédé à un recensement exhaustif des risques de dépassement des crédits inscrits dans la loi de finances initiale. Mais nous avons recherché à évaluer l’ordre de grandeur des principaux risques identifiables ; leur montant correspond au montant de la réserve réellement mobilisable. On peut les chiffrer à 3 milliards d’euros, plus la marge de 800 millions d’euros sur les dépenses de personnel, soit 3,8 milliards d’euros.

À ce stade de l’année, un certain nombre de dépassements sont certains. Ce ne sont pas forcément ceux qui peuvent être le plus facilement quantifiés ; je pense au prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, pour lequel un dépassement de plusieurs centaines de millions d’euros était envisagé lorsque le rapport que vous avez en mains a été arrêté. D’autres risques peuvent être quantifiés, mais l’estimation fournie devra être révisée avant la fin de l’exercice. Par exemple, la charge d’indexation sur l’inflation des OAT - obligations assimilables du Trésor – devrait représenter un surcoût estimé aujourd’hui à 1,5 milliard d’euros. Je pourrais aussi citer les opérations extérieures de la défense ; on en est actuellement à 400 millions d’euros.

Nous appelons à faire preuve d’une grande discipline pour respecter la norme de croissance malgré la réapparition de l’inflation. Cela suppose de ne pas engager de nouvelles dépenses ou de nouvelles réductions de recettes qui ne seraient pas gagées par des économies dans d’autres domaines.

Nous réfléchissons actuellement à ce curieux dispositif que le monde ne nous envie pas, qui fait que l’État décide des prestations sociales, et que la collectivité territoriale doit payer sans avoir quelque maîtrise ni même quelque connaissance que ce soit de l’évolution de la dépense concernée. C’est un véritable sujet.

M. Henri Emmanuelli : Les remboursements de la Caisse d’allocations familiales auprès des municipalités sont passés de 70 % à 55 %. Les municipalités n’ont pas le choix : elles vont payer, sans pouvoir répercuter une telle dépense. Il est facile de dire que les dépenses des collectivités territoriales augmentent !

Le Président Didier Migaud : C’est pour cela que nous avons apprécié les propos nuancés du Premier président sur la responsabilité des collectivités locales dans la dégradation de nos comptes publics.

M. Jérôme Cahuzac : Monsieur le Premier président, M. le rapporteur général ayant survolé la situation d’une certaine hauteur, avec beaucoup de brio et de courage, je me contenterai de quelques questions assez précises.

Ma première question est relative à la Caisse de la dette publique et au remboursement, par l’État, de ces fameux 5,1 milliards d’euros à la sécurité sociale. Nous en avons débattu tout à l’heure avec le ministre des Comptes publics, M. Woerth. Il se trouve que la loi de finances initiale de 2007 avait prévu que ladite caisse rembourserait 8 milliards d’euros d’emprunts. Estimez-vous que ces 5,1 milliards s’imputent sur ces 8 milliards ? Ou estimez-vous que, ces 8 milliards étant un rachat de la dette contractée par notre pays au sens du déficit public, ces 5,1 milliards ne s’imputent pas sur ces 8 milliards ? Pensez-vous que, contrairement à la loi de finances initiale, il n’y a pas eu de rachat de dette au sens du déficit public ? Ne pas l’avoir fait une année où les taux étaient évidemment inférieurs à ce qu’ils s’apprêtent à être en 2008, aura pour conséquence d’alourdir encore la charge de la dette de notre pays. Estimez-vous qu’en l’espèce une telle gestion peut être jugée imparfaite – ou d’un terme que vous jugerez plus adéquat …

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes : Merci de m’y autoriser !

M. Jérôme Cahuzac : Vous faites remarquer que le besoin de financement engendré par la somme du déficit budgétaire et de la charge de la dette avait plutôt baissé entre 2006 et 2007, de 115 à 104 millions d’euros, et que ce même besoin de financement serait, en 2008, de 145 milliards d’euros, soit une augmentation de 40 %, essentiellement en raison de l’alourdissement de la charge de la dette qui passerait, d’une année sur l’autre, de 83 à 103 milliards d’euros, soit une augmentation de 20 milliards d’euros. Quand j’ai cité tout à l’heure ce chiffre, tiré de votre rapport, au ministre des Comptes publics, il a paru surpris et n’a pas repris à son compte un tel élément. J’aimerais que vous donniez à notre Commission des précisions en la matière.

Vous avez indiqué, et notre rapporteur général a insisté sur ce point, que la tenue de nos comptes publics supposait une sécurisation des recettes de l’État. Estimez-vous probable que dans les quatre années qui viennent, et comme le Président de la République s’y était engagé, les prélèvements obligatoires baissent de 95 milliards d’euros ? Si ce n’est pas le cas, quel serait pour vous le degré d’improbabilité ?

M. Michel Bouvard : La situation appelle un certain nombre de mesures visant à protéger les recettes de l’État, à faire preuve de davantage de rigueur dans la mise en œuvre de nouvelles mesures d’ordre fiscal ou social, en les regroupant dans les lois de finances et dans les lois de financement de la sécurité sociale. Dans ces périodes de contrainte, on sait que les ministères font tout pour contourner la norme de dépenses. Cela fait déjà quelques années que nous essayons de suivre ce qui se passe du côté des opérateurs et j’ai constaté que votre rapport évoquait la question.

Vous avez fait tout à l’heure le calcul des économies que l’on pouvait espérer de la réduction des effectifs, dans le cadre du non remplacement d’un fonctionnaire qui part en retraite sur deux. Mais vous évaluez dans le même temps une nouvelle perspective de croissance des effectifs des opérateurs : « Les données fragmentaires disponibles sur les opérateurs de 2006 à 2008 laissaient prévoir une augmentation de 14 000 agents, ce qui correspond à peu près au tiers des suppressions de postes dans les services de l’État. » Dans ces conditions, vous préconisez une consolidation des budgets des ministères avec les opérateurs.

La Cour a-t-elle un avis sur la mise en œuvre de plafonds d’autorisations d’emplois ? Chaque fois que l’on aborde cette question, on nous oppose l’autonomie de gestion des opérateurs. Peut-on concilier une certaine autonomie des opérateurs avec le passage, sous un nombre normé, des autorisations d’emplois des opérateurs ?

On a évoqué à plusieurs reprises le transfert d’un certain nombre de ressources en direction des opérateurs. On a bien compris qu’il était souhaitable que les niches soient régulièrement revisitées. Est-ce que la Cour préconiserait aussi que le Parlement puisse se prononcer chaque année sur l’affectation d’une recette totale à un opérateur ? Cela reviendrait à remettre en cause, au regard des résultats obtenus, la recette affectée et la possibilité, donnée à un opérateur, de percevoir un impôt.

Ne faut-il pas aujourd’hui, si l’on va jusqu’au bout du raisonnement, envisager la réintégration d’un certain nombre d’actions portées par des opérateurs au sein du budget de l’État ? Si oui, certains opérateurs seraient-ils identifiés, au sens de la Cour, comme n’ayant plus de fonction qui justifie qu’elle soit assumée séparément du budget ?

M. Charles de Courson : Au fond, ce que vous dites, tous les gens de bon sens le partagent. Alors, pourquoi n’arrive-t-on pas à le faire ? Pratiquement tous les autres peuples d’Europe y sont arrivés, à l’exception de l’Italie, qui va aussi mal que nous.

On vous a fait travailler sur l’évaluation des niches sociales et des allègements de charges, et vous avez émis deux idées : on est allé trop loin en appliquant les exonérations de cotisations à 1,6 SMIC et il conviendrait d’abaisser ce plafond à 1,4 SMIC; et puis, comme les effets de ces exonérations ne sont pas sensibles dans les grandes entreprises, il conviendrait de pratiquer une réduction par le haut.

En redescendant, éventuellement sur deux ou trois ans, le plafond à 1,4 SMIC, on économiserait déjà 6 milliards d’euros ; et en limitant le bénéfice des exonérations aux 1 000 premiers emplois, on en économiserait 3 autres. Soit 9 milliards au total, grosso modo, le quart des économies à réaliser dans les quatre ans qui viennent. Ces deux seules mesures, préconisées par la CNAMTS, examinées ici, reprises par le rapport Bur tout à l’heure, ont été approuvées par toutes les sensibilités politiques…

M. Michel Sapin : Je le confirme !

M. Charles de Courson : Tout le monde a dit que c’était ce qu’il fallait faire. Mes chers collègues, puisque nous n’avons plus rien à attendre des gouvernements, semble-t-il, prenons l’initiative ! M. le rapporteur général a rappelé que nous avions le droit d’amendement…

Le malheureux ministre Woerth est très seul. Il auditionne ses collègues ministres ; ceux-ci veulent toujours plus et pas un ne propose d’économies. Tout repose sur ses frêles épaules. Aidons-le !

La Cour des comptes a soulevé plusieurs fois le problème des niches fiscales. Nous avons fait des propositions, d’ailleurs insuffisantes. En effet, on pourrait à la fois procéder à un plafonnement analytique et essayer de plafonner globalement. Cela ne nous économiserait pas grand-chose : 200, 300 ou 400 millions d’euros. Mais, au moins, faisons-le !

Le Président Didier Migaud : Votre question ne s’adresse pas vraiment au Premier président, mais plutôt à nous-mêmes.

M.  Michel Sapin : C’est promis, on déposera cet amendement !

M. Charles de Courson : En ce qui concerne les dettes de l’État à l’égard de la sécurité sociale, je pense qu’il faudrait au moins imputer les 2,5 milliards de recréation de dettes au titre de 2007 et rattacher les 5,1 milliards pour rapprocher les déficits comptables de la réalité. Nous en sommes à 2,5 milliards d’euros, mais la situation risque de perdurer et on se retrouvera avec 5 milliards d’euros à la fin de l’année prochaine.

M. Jean-Pierre Brard : Monsieur le Premier président, Charles de Courson vient de nous donner une version « bibliothèque rose » de la situation de M. Woerth. Vous avez entendu nos collègues, qui veulent protéger les recettes de l’État. Nous essayons parfois de nous faire votre écho dans cet hémicycle. Mais c’est comme la voix de Jeanne d’Arc : cela a du mal à passer !

Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit de façon fort pertinente, dans l’un de vos rapports, sur l’inutilité des exonérations de cotisations sociales, qui ont plombé les comptes publics ? De nouvelles niches ont pourtant été introduites dans la loi de modernisation de l’économie – sans que cela n’affecte trop nos collègues.

Monsieur le Premier président, tel le Commandeur, vous pouvez sans doute parler avec autorité. Quand nous répétons ce que vous dites, nous ne sommes pas entendus. Mais si c’est vous, peut-être aurons-nous un peu plus de chance ?

Je voudrais par ailleurs connaître votre appréciation sur la dégradation de la situation patrimoniale de l’État, que vous évoquez dans votre rapport. Avez-vous ou allez-vous travailler sur les cessions de l’immobilier d’État ? Je citerai au hasard : l’imprimerie nationale et le centre de conférences international.

À la fin d’une audition, à laquelle beaucoup d’entre nous ont assisté, un haut fonctionnaire, après qu’on a évoqué le fait que plusieurs centaines de millions d’euros se soient volatilisés, a eu cette conclusion fantastique : il avait appris une chose, à savoir que la prochaine fois, il faudrait faire appel à quelqu’un de compétent ! La formation des hauts fonctionnaires est-elle à ce prix ?

Si vous ne l’avez déjà fait, comment comptez-vous travailler sur cette question ? Et peut-être avez-vous une première évaluation de la pertinence des choix qui ont été faits en faveur de la loi TEPA ?

M. Georges Tron : Un conseil sur le patrimoine immobilier de l’État, auquel nous participons M. Brard et moi, débutera dans quelques instants ; le ministère des Affaires étrangères devrait être concerné.

Nous constatons, dans le domaine de l’immobilier, des tentatives de dissimulation de la réalité des chiffres : des ministères, pour rentrer dans les normes de ratio mètres carrés/agent, inventent devant nous de nouvelles façons de compter qui leur permettent de se dégager complètement des obligations auxquelles on veut les contraindre. Même chose pour des opérateurs qui ignorent les injonctions que nous leur adressons. Ne doit-on pas en arriver à institutionnaliser un système de sanctions, d’un budget sur l’autre ? Devant des dysfonctionnements de cette nature, que je qualifie de volontaires, nous devons reprendre le contrôle de la situation. Le diagnostic est fait. Quittons le domaine des incantations !

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes. Je remercie les premiers intervenants. Je ne répondrai pas à l’ensemble des questions car, pour certaines, je m’en remettrai à M. Babusiaux.

M. Cahuzac a visiblement bien travaillé sur nos travaux. J’aurais aimé répondre à sa dernière question, mais d’une part je suis incapable de le faire, d’autre part, si je le faisais, je sortirais vraisemblablement des devoirs qui s’imposent à moi. Mais en tout état de cause, quelle que soit la voie choisie, la route sera rude. Faire passer la progression de la dépense publique de 2,2 % à 1,1 % peut ne pas paraître décisif. Cela a pourtant une signification, à savoir que certaines dépenses seront freinées, que certains droits seront réduits, qu’il y aura des mécontentements et des remous. Et la route sera d’autant plus rude qu’on aura sans doute trop attendu pour l’emprunter.

Je remercie M. Bouvard pour ses questions très précises, auxquelles M. Babusiaux répondra. Je remercie également M. de Courson pour ses observations.

Monsieur Brard, on vous entend ! Je vous en donne bien volontiers acte. S’agissant des problèmes que vous traitez en commun avec M. Tron, je vous rappelle que l’Assemblée nationale, par l’intermédiaire de son Président, a la faculté de saisir la Cour de discipline budgétaire et financière.

Le Président Didier Migaud : Nous étudions cela !

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes : Celle-ci est bien décidée à ne pas rester inerte. Selon toute vraisemblance, une saisine bien argumentée de la part de l’Assemblée nationale aurait toute chance de prospérer rapidement.

M. Christian Babusiaux : Si M. le rapporteur général me le permet, j’accentuerai le chiffre qu’il a fourni tout à l’heure : compte tenu du retard qui a été pris par rapport au programme de stabilité, c’est en fait 12 milliards d’euros supplémentaires qu’il faudra trouver chaque année, et non pas 10. Même si c’est une nuance, nous savons qu’au-delà d’un certain seuil, l’exercice devient de plus en plus difficile.

Monsieur Cahuzac, il n’y a pas de doute : le projet annuel de performances, ou PAP, prévoyait que les 5,1 milliards d’euros qui venaient de la privatisation des autoroutes seraient affectés à la réduction de la dette financière de l’État. C’était normal, dans la mesure où il s’agissait de la cession d’actifs de l’État. Il est non moins certain que ces 5,1 milliards d’euros ont servi à régler des dettes non financières, et des dépenses d’exploitation - dépenses courantes qui n’avaient pas pu être réglées dans le passé.

Je ne reviendrai pas sur la régularité de l’opération, connaissant la position du rapporteur général sur le sujet. Mais il est incontestable qu’il y a eu changement d’affectation par rapport à ce qui était prévu dans le PAP du compte « Participations financières de l’État ». Le ministre l’a d’ailleurs reconnu puisqu’à notre demande, dans le rapport annuel de performances de 2007, il est justement écrit que l’affectation a été modifiée et que cela a servi en réalité à régler une dépense d’intervention.

Pour des raisons de sincérité budgétaire, nous avons tenu – et le ministre et le Gouvernement ont bien voulu s’y ranger – à ce que ce changement d’affectation soit explicité dans le document budgétaire qui est joint au projet de loi de règlement.

Passons aux fameux 2,5 milliards d’euros, évoqués notamment par M. de Courson. De fait, l’État avait bien à payer au régime général une somme de 2,5 milliards d’euros à la fin de 2007. Et si l’on prend en compte l’ensemble des régimes, cette « dette » était de 4 milliards d’euros.

À notre sens, ces 4 milliards d’euros auraient dû faire l’objet d’autorisations d’engagement, même s’ils ne faisaient pas l’objet de paiement. C’est ce que nous avons dit dans le rapport sur les résultats et la gestion budgétaire que le Premier président vous a présenté il y a trois semaines. C’est un point que le Parlement aura à vérifier quand il examinera le projet de budget pour 2009, pour qu’il y ait au moins une trace budgétaire de la dette certaine.

S’agissant du calendrier des emprunts, M. Cahuzac a tout à fait raison. Nous l’évoquons dans le rapport et Mme Lagarde le sait bien : on peut parler d’un coup d’accordéon dans le calendrier des émissions du Trésor public, pour des raisons de durée de dette. Un creux en 2008 permettra d’émettre relativement peu d’emprunts pour renouveler la dette ; en revanche, il faut s’attendre à une remontée très forte en 2009.

Monsieur Bouvard, vous avez utilisé l’expression de « contournement de la norme » en évoquant la question des dépenses fiscales. Mais les dépenses fiscales ne sont pas les seules concernées ; les budgets annexes et certains comptes spéciaux le sont aussi. À notre sens, quand un compte spécial est alimenté par des recettes fiscales, les dépenses de ce compte devraient être dans la norme de dépenses – la situation étant différente pour un compte de commerce. Or certaines dépenses des budgets annexes et des comptes spéciaux augmentent plus rapidement que la part du budget général qui entre dans la norme.

Nous avons relevé le problème posé par les opérateurs, et nous avons évoqué deux pistes.

Nous avons d’abord remarqué qu’entre la loi de finances et la loi de financement votées par le Parlement, s’était creusé un hiatus et que tout ce qui était entre les deux échappait au vote du Parlement. Or, seul le déficit « État plus ODAC » est significatif. Il faut donc réfléchir à un instrument, législatif ou organique, qui nous permettrait d’éviter ce hiatus gênant, surtout dans une optique de programmation globale des finances publiques.

La seconde idée est relative à la consolidation des comptes de comptabilité générale. Nous estimons le moment venu d’appeler à l’élaboration de comptes consolidés de l’État et de ses opérateurs essentiels.

M. Pierre-Alain Muet : Monsieur le Premier président, il est toujours intéressant de vous entendre parler d’une façon aussi claire et pédagogique de sujets souvent évoqués de manière obscure.

Vous écrivez dans le rapport que le déficit n’a toujours pas atteint le point qui permettrait de stabiliser la dette. Le paradoxe est que la dette a baissé en pourcentage par rapport au PIB – du moins en 2006. On a donc l’impression que le profil de la dette ne correspond pas à la réalité du déficit. Le rapport explique très bien ce phénomène par l’importance des cessions d’actifs.

Je sais bien que ce sont là des conventions européennes, et qu’il est toujours difficile de savoir ce que recouvre une dette brute. Mais peut-être que la Cour des comptes, dans la foulée de son rapport, pourrait suggérer d’indiquer, à côté de la dette traditionnelle, au sens du traité de Maastricht, une dette hors cessions d’actifs. Cela permettrait d’apprécier l’évolution réelle de la situation financière de notre pays.

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes : Il ne s’agit pas d’institutionnaliser la démarche, mais d’aider la représentation nationale à bien voir les choses. Le traité de Maastricht a sa définition de la dette et du déficit. Mais plusieurs lectures sont possibles. Nous essayons de donner l’ensemble de ces lectures. À charge pour chacun de choisir celle qui lui paraît la plus idoine et d’en tirer les conséquences.

Cela me permet de préciser que nous ne sommes qu’au service du Parlement. Et de démentir avec la dernière énergie quelque manœuvre que ce soit de la Cour qui viserait à empêcher que l’on précise, dans le texte constitutionnel, que le Parlement évalue les politiques publiques. Nous n’avons jamais prétendu qu’à concourir à lévaluation, ce qui déjà très ambitieux parce que l’exercice peut se révéler très compliqué.

Prenez l’exemple de l’évaluation du plan cancer ; il faudra attendre le décès de la dernière personne cancéreuse au moment où le plan s’est déclenché, pour donner une dimension de santé publique à ladite évaluation. On pourra faire toutes les évaluations que l’on voudra sur le plan financier, comptable, administratif, etc. Pour apprécier l’impact de ce plan en termes de santé publique, il faudra attendre trente-cinq ans.

Le Parlement doit pouvoir disposer du maximum d’approches et de points de vue possibles sur la matière à évaluer, en ayant recours, le cas échéant, à des spécialistes, géographes, nutritionnistes, que sais-je … pour donner à son évaluation des dimensions que la Cour ne pourrait lui donner à elle seule – à moins d’avoir des effectifs démesurés.

Le Président Didier Migaud : Merci, monsieur le Premier président, pour votre intervention et votre rapport.

*

* *

La Commission a ensuite, sur le rapport de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, examiné le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007 (n° 917).

Article premier : Résultats du budget de l’année 2007

La Commission a adopté l’article 1er sans modification.

Article 2 : Tableau de financement de l’année 2007

La Commission a adopté l’article 2 sans modification.

Article 3 : Résultat de l’exercice 2007 – Affectation au bilan et approbation du bilan et de l’annexe

La Commission a adopté l’article 3 sans modification.

Article 4 : Budget général – Dispositions relatives aux autorisations d’engagement et aux crédits de paiement

La Commission a adopté l’article 4 sans modification.

Article 5 : Budgets annexes – Dispositions relatives aux autorisations d’engagement et aux crédits de paiement

La Commission a adopté l’article 5 sans modification.

Article 6 : Comptes spéciaux – Dispositions relatives aux autorisations d’engagement, aux crédits de paiement et aux découverts autorisés – Affectation des soldes

La Commission a adopté l’article 6 sans modification.

Article 7 : Règlement du compte spécial 911 « Constructions navales de la marine militaire »

La Commission a adopté l’article 7 sans modification.

Article 8 : Constatation d’une perte au titre d’avances consenties

La Commission a adopté l’article 8 sans modification.

Article 9 : Reconnaissance d’utilité publique de dépenses comprises dans une gestion de fait

La Commission a adopté l’article 9 sans modification.

Article additionnel après l’article 9 : Annexes récapitulant les dispositions fiscales et les exonérations de cotisations sociales adoptées en cours d’année

La Commission a examiné un amendement présenté par MM. Didier Migaud et Gilles Carrez, tendant à créer, d’une part, une annexe au projet de loi de finances de l’année récapitulant les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances de l’année précédente et, d’autre part, une annexe récapitulant les mesures de réduction et d’exonération de cotisations sociales et de contributions concourant au financement de la protection sociale ainsi que les mesures de réduction ou d'abattement de l'assiette de ces cotisations et contributions, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de financement de l’année précédente.

Le Rapporteur général a précisé que cet amendement concrétise une proposition de la mission d’information sur les niches fiscales. Avec ces deux nouvelles annexes, le législateur financier disposera de toute l’information nécessaire lui permettant de valider les mesures fiscales et les exonérations de cotisations sociales adoptées en dehors des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Le Gouvernement devra notamment indiquer le détail de l’objet, de la durée d’application et du coût de chacune des mesures en cause, pour l’année de leur entrée en vigueur et pour les trois années suivantes. Sans préjuger de la décision que l’Assemblée nationale prendra lors de l’examen du projet de loi constitutionnelle en deuxième lecture, ce dispositif s’impose si, comme le propose le Sénat, la validation des dispositions fiscales et des exonérations de cotisations sociales par une loi de finances ou de financement de la sécurité sociale devient une obligation constitutionnelle.

Le Président Didier Migaud a insisté sur l’intérêt de cet amendement, issu des réflexions de la récente mission d’information sur les niches fiscales. Il a également attiré l’attention de la Commission sur le rapport présenté ce jour même par M. Yves Bur au nom de la mission d’information commune à la commission des Finances et à la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales sur les exonérations de cotisations sociales. Comme le montrent les récents débats au Sénat sur le projet de révision constitutionnelle, la réflexion sur le rapprochement entre loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale progresse. Il faut aller plus loin, afin d’offrir une vision consolidée des recettes publiques.

La Commission a adopté cet amendement, puis adopté l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

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