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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 23 octobre 2007

Séance de 17 heures 45

Compte rendu n° 11

Co-présidence de M. Jean-Luc Warsmann, Président et de M. Patrick Ollier, Président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire

– Audition commune avec la commission des Affaires économiques, de l’environnement et du territoire de M. Christian Estrosi, secrétaire d’État chargé de l’outre-mer, sur le projet de loi de finances pour 2008

– Avis sur les crédits de la mission outre-mer (M. Didier Quentin, rapporteur)

La Commission a procédé à l’audition conjointe avec la commission des Affaires économiques, de l’environnement et du territoire de M. Christian Estrosi, secrétaire d’État chargé de l’outre-mer, sur le projet de loi de finances pour 2008.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, a accueilli M. Christian Estrosi en soulignant que la commission des affaires économiques est passionnée par les problèmes de l’outre-mer, qu’ils concernent l’agriculture, les transports, l’aménagement du territoire ou le tourisme. Il a évoqué deux points particuliers : d’une part la qualité et la densité des services publics, notamment l’éducation et la justice, dont le niveau doit être similaire à celui de la métropole ; d’autre part l’environnement, notamment la question des pesticides maintenant interdits.

La mission d’information, que le président Ollier avait lancée et dont le rapport a été publié en juin 2005, avait procédé à l’audition de 163 personnes. Il a été décidé, avec le représentant du groupe socialiste, qu’il fallait confirmer ce résultat. D’où la création d’un comité de suite présidé par M. Jacques Le Guen, qui procédera à un certain nombre d’auditions et présentera ses conclusions dans un délai d’un mois.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois, de la législation et de l’administration générale de la République a exprimé sa satisfaction d’entendre pour la première fois M. Estrosi dans ses fonctions de secrétaire d’État à l’outre-mer.

La commission sera particulièrement attentive à deux sujets : d’une part l’évolution statutaire des collectivités - la départementalisation de Mayotte et les nouvelles collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy- ; d’autre part la lutte contre l’immigration clandestine avec le renforcement des contrôles et de la coopération avec les États voisins : les Comores pour Mayotte, le Surinam et le Guyana pour la Guyane.

M. Christian Estrosi, secrétaire d’État à l’outre-mer, a remercié les présidents Ollier et Warsmann de l’accueillir à l’occasion de cette audition, qui permettra de présenter aux commissions les grandes lignes du budget 2008, sa nouvelle architecture et les priorités auxquelles il répond.

C’est le premier budget de l’outre-mer de cette législature. C’est aussi un moment révélateur des priorités du Président de la République et du Gouvernement qui les met en œuvre, avec Mme Alliot-Marie, pour ce qui concerne l’Outre-mer.

Ce budget manifeste l’attachement de la France aux départements et collectivités d’Outre-mer, malgré un contexte particulièrement contraignant pour le budget de l’État.

Pour 2008, les crédits directement gérés par le secrétariat d’État à l’outre-mer s’élèvent à 1,76 milliard d’euros en autorisation d’engagement et 1,73 milliard d’euros en crédits de paiement. Cela ne représente qu’une petite partie de l’effort global de l’État au bénéfice des départements et collectivités d’outre-mer, qui s’élève à 15,3 milliards d’euros.

La stricte comparaison des crédits de la mission Outre-mer avec ceux de l’année précédente ne présente aucune pertinence. La lecture ne peut se faire qu’au regard des transferts de crédits d’anciens programmes au ministère de l’économie des finances et de l’emploi et vers d’autres programmes du ministère de l’intérieur, de l’outre mer et des collectivités territoriales. Ainsi une centaine de millions d’euros de crédits correspondant à des dépenses de personnel et de fonctionnement vont-ils être transférés sur des programmes relevant de la mission « administration générale et territoriale de l’État ». De même, passent sous la gestion du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi 158 millions d’euros consacrés aux dispositifs de soutien à l’emploi et à la formation dans les DOM, à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon.

Cette nouvelle organisation, qui exprime l’unité du territoire de la République et de son administration, répond avant tout au souci de simplifier et d’améliorer l’efficacité de l’action du Gouvernement. Les enjeux et les spécificités de l’outre-mer pourront être mieux pris en compte et leur gestion optimisée. Ces adaptations devraient également permettre de réaliser des économies, qui seront réaffectées au développement de l’outre-mer.

Par conséquent, si il y a une baisse « optique » des crédits de la mission, ils sont en réalité en augmentation de 2% en autorisations d’engagement et de 3 % en crédits de paiement à périmètre constant.

Le nouveau périmètre s’articule désormais autour de deux programmes, au lieu des trois de l’année précédente : l’emploi et les conditions de vie.

Toujours dans le but d’améliorer la gestion des crédits mais aussi d’optimiser leur utilisation, un conseil pour l’outre-mer va être mis en place prochainement. Il sera placé sous l’autorité du Président de la République et coordonnera l’action de l’État en faveur de l’outre-mer.

Outre cette volonté d’efficacité, les objectifs que s’est fixés le Gouvernement et particulièrement le Secrétariat d’État à l’outre-mer, dans le projet de loi de finances pour 2008, reprennent clairement les engagements du Président de la République : soutenir le développement de l’économie et de l’emploi ; soutenir le développement local en partenariat avec les collectivités territoriales d’outre-mer ; garantir la sécurité et l’égalité des chances des citoyens outre-mer.

Les économies ultramarines sont globalement en décalage de développement, même si une baisse du taux de chômage a été enregistrée depuis cinq ans. L’écart avec la moyenne nationale est toujours trop élevé ; 19,6 % de la population active des DOM contre 8,4 % de celle de la métropole en juin 2007.

La première priorité du budget est donc naturellement l’emploi. En témoigne l’importance des crédits qui sont consacrés à sa promotion : ils sont de 1,008 milliard d’euros, répartis entre les 867 millions pour les exonérations de charges sociales contre 819 en 2007, soit une augmentation de 6% par rapport au précédent exercice, 30 millions d’aides directes et 110 millions pour le service militaire adapté.

Si les politiques publiques d’accompagnement de l’emploi restent indispensables pour préserver la cohésion sociale, elles ne peuvent pas être la seule réponse. L’enjeu fondamental est de donner à ces économies une forme d’autonomie, une plus grande capacité de développement par elles-mêmes.

Le problème ne se pose plus seulement en termes de « rattrapage » par rapport au modèle métropolitain ou européen. S’il constitue une exigence, le rattrapage ne doit pas faire oublier la dynamique et les défis supplémentaires. Chaque économie doit trouver sa voie et s’intégrer davantage dans son environnement régional.

Il convient, par conséquent, de concentrer les efforts dans deux grandes directions : lever au maximum les contraintes qui pèsent sur la création de richesses, et structurer les filières porteuses. Cela se traduit de plusieurs façons.

La création dans les quatre DOM de zones franches globales d’activités doit permettre de favoriser l’émergence d’économies compétitives et rendre ainsi plus performants les dispositifs visant à adapter les créations d’emplois dans le secteur marchand. Il faut agir ici sur plusieurs leviers, dont celui de la fiscalité des entreprises en l’adaptant au contexte local : des mesures fiscales touchant à l’impôt sur les bénéfices, la taxe professionnelle et la taxe foncière sont prévues. Prenant effet en 2009, elles concerneront les activités économiques au titre de 2008.

Dans la même logique, la mise en place de pôles de compétitivité devrait permettre de redonner confiance aux acteurs économiques mais aussi de valoriser le potentiel en matière de recherche, qui est fort en outre-mer. Sa situation géographique et l’ensemble de ses atouts, la richesse de ses terres, de ses eaux, de sa biodiversité, le prédisposent à devenir un laboratoire grandeur réelle et une vitrine avancée de la France dans le domaine technologique.

Ce sont de nouveaux métiers, donc de nouveaux emplois, de nouvelles entreprises qui vont être créés. Ce sont aussi de nouvelles filières de formations qui seront proposées aux jeunes.

Ces pôles sont également une concrétisation de rengagement de l’outre-mer pour la protection de l’environnement. Le développement de nouvelles technologies de production d’énergies renouvelables, les solutions innovantes en matière de santé et de biotechnologies sont de vrais enjeux pour ces territoires. Ils sont d’ailleurs déjà très en avance sur la métropole, sur certains sujets : ainsi à La Réunion, 36 % de l’énergie provient de modes renouvelables.

Ces solutions ont en outre vocation à s’exporter dans le monde entier. Ainsi, après QUALITROPIC, labellisé pôle de compétitivité en 2005 et qui concernait la filière agroalimentaire, ce sont les créations récentes des pôles « Santé tropicale » en Guyane, sur les nouveaux risques infectieux et les maladies émergentes, de « SYNERGILE» en Guadeloupe et très prochainement « TEMERGIE » à La Réunion, sur les énergies renouvelables, qui témoignent de cet engagement.

Le champ est vaste : de la gestion des risques naturels à l’utilisation de la mer à des fins énergétiques ou de bio produits. En redynamisant la recherche, ces pôles deviendront une des clés d’un nouveau développement économique.

Cependant le développement de l’emploi et la lutte contre le chômage passent également par le maintien d’un contexte social favorable. Il faut pour cela tenir compte de l’environnement spécifique de l’outre-mer qui subit notamment une forte pression démographique. La question cruciale est celle de l’amélioration des conditions de logement. L’État va donc intensifier ses efforts pour favoriser l’accès au logement social.

Seront poursuivies les actions mises en œuvre à la suite de la première conférence nationale sur le logement outre-mer, qui s’est tenue le 27 février 2007, en orientant la défiscalisation vers le logement social. La loi de programme en préparation comportera un volet consacré à cet effort. En outre, les crédits de la mission Outre-mer affectés au logement social passent cette année de 175,7 millions à 200 millions d’Euros. Ce qui constitue une hausse significative de 14%. Après l’effort exceptionnel accompli en 2007 pour solder les dettes importantes accumulées sur la « LBU », ce nouvel effort en loi de finances témoigne de l’attention portée à ce sujet essentiel pour l’égalité des chances de nos concitoyens.

Le développement de l’outre-mer passe aussi par l’accompagnement de l’exercice des responsabilités locales. C’est tout le sens des projets de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles pour l’outre-mer déjà votés ou en cours de préparation.

Cette priorité se concrétise par le renforcement des engagements de l’État en faveur des collectivités locales d’outre-mer. À ce titre, les dotations gérées directement par le secrétariat d’État connaîtront l’année prochaine une légère progression et atteindront 316 millions d’euros en crédits de paiement.

Le projet de budget pour 2008 prévoit en outre une augmentation de 10% au titre des engagements contractuels de l’État. Ces crédits atteignent 110 millions d’euros en crédits de paiement dont 28 millions d’euros s’inscrivant dans le contrat de projet pour la Polynésie française.

Enfin, l’amélioration de la sécurité demeure un axe fort de l’engagement du Président de la République, en outre-mer comme sur l’ensemble de notre territoire, car elle est une des conditions majeures du développement économique.

Les résultats observés en matière de lutte contre la délinquance sont encourageants et l’effort de l’État sera poursuivi.

La hausse générale des chiffres est liée à une forte augmentation de l’activité des services : elle a augmenté de 4,59 % pour l’ensemble de l’outre-mer. La délinquance de voie publique est en baisse de 5,09 % avec des résultats très bons en Guyane (- 25,62 %), à la Martinique (-16,28 %), en Nouvelle Calédonie (- 8,1 %) ou à La Réunion (- 5,78 %).

Depuis 2002, une politique résolue a été menée pour lutter contre l’immigration irrégulière. Les résultats sont excellents. Le problème reste fort en Guyane et à Mayotte mais il est désormais moindre en Martinique et en Guadeloupe, preuve que dans ce domaine aussi la volonté politique peut-être efficace.

La baisse du nombre des reconduites hors du territoire français en Martinique et en Guadeloupe s’explique par le fait qu’une partie de l’immigration clandestine arrivait par la Dominique, qui ne réclamait pas de visa à l’immigration aux ressortissants d’Haïti. Le ministre de l’intérieur de l’époque obtint de la Dominique qu’elle exige un tel visa. Depuis, les Haïtiens ne viennent plus à la Dominique, pour gagner ensuite la Martinique et la Guadeloupe par les voies navigables.

À Mayotte, la situation était difficile. La fédération des Comores avait décidé un blocus contre l’île d’Anjouan, ce qui aboutit à interdire, pendant trois semaines, toute liaison maritime et aéroportée. D’où l’importance de la pression migratoire à Mayotte, où le préfet n’avait plus la possibilité d’organiser les reconduites. Depuis que les liaisons ont été rétablies, les chiffres de reconduites de l’année dernière ont quasiment été rattrapés ; ils seront même sans doute dépassés cette année.

Reste le problème de la Guyane. L’orpaillage clandestin n’a cessé de se développer. Il se trouve que la Guyane est le seul territoire d’outre-mer en situation continentale, avec deux frontières, celles de l’Oyapok et du Maroni entre le Brésil d’un côté et le Surinam de l’autre. L’immigration clandestine qui passe par la voie fluviale est très difficile à contenir. La France est en train de mettre en place avec le Brésil et le Surinam des brigades communes qui commencent à porter leurs fruits. D’ici à la fin de l’année, le niveau des reconduites à la frontière devrait être beaucoup plus acceptable. Sans compter le chantier de construction du pont de Saint-Georges de l’Oyapok, pour lequel les crédits ont été débloqués ; cette voie de circulation permettra de contrôler plus efficacement les déplacements entre le Brésil et la Guyane.

Dans le domaine de la sécurité civile, la politique d’amélioration de la prévention des risques se poursuit également. Le secrétariat d’État à l’outre-mer y travaille, en étroite collaboration avec les directions du ministère de l’intérieur ainsi qu’avec les collectivités territoriales qui ont un rôle à jouer sur ce plan.

Le fonds de secours de l’outre-mer reste l’outil privilégié d’aide aux victimes de catastrophes naturelles.

En 2007, 36,6 millions d’euros ont été délégués par le Secrétariat d’État à ce titre, dont 17,6 millions en faveur des sinistrés du cyclone Gamede à La Réunion et 5,8 aux entreprises victimes du chikungunya à La Réunion et à Mayotte. L’aide aux sinistrés de DEAN à la Martinique et en Guadeloupe sera progressivement versée d’ici à la fin de l’année. Les dégâts viennent d’être évalués par les experts à 558 millions d’euros.

Il convient de saluer les représentants de la Martinique et de la Guadeloupe et, à travers eux, les collectivités territoriales qui ont contribué, avec l’État, à un important travail de solidarité. Jamais la commission spécialisée ne s’était réunie aussi vite pour procéder à la déclaration de l’état de catastrophe naturelle. Toutes les communes de la Martinique ont été retenues à ce titre. Deux - Baillif et Deshaies - ne l’ont pas été à la Guadeloupe, parce que des mouvements de terrain ont obligé à reporter l’examen des dossiers, mais l’avis favorable ne saurait tarder. Il convient également de saluer les collectivités, les particuliers et les organisations de métropole qui ont témoigné de leur solidarité à l’égard de la Martinique et de la Guadeloupe.

Enfin, le développement économique de l’outre-mer passe par la réduction de la fracture numérique. Les technologies de l’information et de la communication sont essentielles pour développer l’attrait et la compétitivité des territoires. La loi de programme en préparation comportera un volet consacré à cet effort, notamment afin de faciliter le déploiement des câbles sous-marins et donner ainsi une qualité de service et une concurrence tarifaire équivalentes à celles de la métropole. Le câble arrive à la Guadeloupe et va arriver à la Martinique ; cela permettra l’ouverture à la concurrence, la baisse des tarifs et une meilleure qualité de service. Le câble sera ensuite acheminé en Guyane.

En matière de téléphonie portable, les habitants d’outre-mer qui se rendaient en métropole étaient soumis à une double tarification : la tarification normale, plus la tarification de réception ; il en était de même pour les habitants de métropole qui se rendaient en outre-mer. La France a obtenu à Bruxelles une baisse de 40 à 50 %, valable de l’outre-mer en métropole, de métropole en outre-mer, mais aussi de tous les pays de l’Union européenne vers l’outre-mer et vice-versa.

La mise en place des deux collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, depuis le 15 juillet dernier, se déroule comme prévu. De nombreux échanges ont lieu avec les présidents. Les textes d’application de la loi organique sont pris ou interviendront très vite. La loi de finances pour 2008 sera amendée pour prévoir les modalités transitoires de compensation des transferts de compétences. La commission d’évaluation se réunira dès la parution du décret l’instituant.

La question de la position de ces deux collectivités a été également réglée au regard de l’Union européenne. Tant qu’elles dépendaient du territoire de la Guadeloupe, elles bénéficiaient, notamment en matière d’aménagement du territoire, des fonds européens. En quittant leur statut antérieur, n’allaient-elles pas perdre ce bénéfice, notamment pour la période 2007-2013 ? La France est en train de faire en sorte qu’elles deviennent des régions ultrapériphériques, dans le cadre du traité simplifié.

S’agissant de la départementalisation de Mayotte, le Président de la République s’est engagé à consulter les électeurs mahorais si le conseil général le demande après son renouvellement de mars 2008. Si ces électeurs approuvent cette évolution, le Parlement sera appelé à l’entériner dans le cadre de la loi organique. L’évolution vers le département devra alors être adaptée et progressive. En effet, la situation de la société mahoraise et des collectivités nécessite l’adoption d’une démarche spécifique, en concertation avec les élus de Mayotte.

M. Alfred Almont, rapporteur pour avis de la commission des questions économiques, a remercié l’ensemble des collègues présents, notamment ceux des régions d’outre-mer avec lesquels il entretient des relations étroites de travail et d’amitié.

Quelles réflexions tirer de l’examen du projet de budget pour l’outre-mer, dont les régions se considèrent, non comme les morceaux d’un tout, mais comme des entités qui aspirent à davantage de responsabilité et de considération ?

Ce projet de budget reflète une certaine continuité. Il s’inscrit, à l’évidence, dans la perspective de la nouvelle loi de programme pour l’outre-mer qui est appelée, grâce aux dérogations qui sont attendues, à répondre aux vrais besoins du développement économique et social des régions concernées.

Il s’élève à 1,7 milliard d’euros, ce qui correspond à une baisse apparente de 11,7 %. Elle s’explique par la modification du périmètre de la mission désormais structurée autour de deux programmes, du fait du transfert vers le ministère de l’intérieur et le ministère des finances de certains dispositifs spécifiques - dépenses de personnels et de fonctionnement -, et par une mutualisation de certains moyens.

Les deux programmes qui restent : « conditions de vie outre-mer » et « emploi outre-mer » bénéficient d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement en hausse. Les principales orientations pour 2008 devront permettre de promouvoir l’habitat social, qui constitue l’un des enjeux principaux du développement des régions ultramarines. Les entreprises spécialisées ne demandent qu’à travailler. Les matériaux d’industries locales ne demandent qu’à servir. Les besoins sont de plus en plus importants.

Ces orientations sont appelées à promouvoir le développement des collectivités locales au moyen de dotations mieux adaptées, et d’outils contractuels comme les contrats de projet État régions ou les conventions de développement. Elles sont de nature à encourager la création d’emploi, grâce à des dispositifs spécifiques d’exonération de charges sociales, et grâce à des mesures de soutien à la desserte aérienne et maritime.

Si ce budget s’élève à 1,7 milliard d’euros, l’effort total de l’État en faveur de l’outre-mer atteint 15,3 milliards d’euros, soit neuf fois plus. C’est notamment le résultat des transferts et imputations sur d’autres budgets, notamment l’intérieur et les finances. Il serait toutefois intéressant de connaître, non seulement le montant des crédits ainsi transférés, mais plus encore la ventilation complète de l’ensemble des crédits affectés à l’outre-mer.

M. le rapporteur pour avis proposera, dans un souci de clarté, à la commission d’adopter deux recommandations à l’adresse du Gouvernement, visant à permettre, dans le document budgétaire annuel de la mission : d’une part, une lecture plus précise de la répartition des crédits selon chaque collectivité destinataire, d’autre part, une présentation budgétaire retraçant les crédits affectés à l’outre-mer dans chacun des autres ministères, ainsi que les crédits relevant des fonds européens.

À partir du 1er janvier 2008, les aides directes à l’embauche des publics les plus éloignés de l’emploi seront prises en charge par le ministère de l’emploi. Cela semble justifier la diminution en 2008, par rapport à 2007, de l’action « Mesures d’insertion et aide directe à l’emploi », qui passent de 316,4 millions à 141,6 millions. Le solde, 174, 8 millions, devrait se retrouver au ministère chargé de l’Emploi ; or le montant transféré ne serait que de 158 millions. Qu’en est-il donc précisément ?

La présentation des dépenses fiscales, conséquence de la LOLF, constitue un indicateur précieux. S’agissant de l’outre-mer, un tableau analogue retraçant les dépenses sociales, d’allégement et d’exonération des charges patronales sur le travail serait tout aussi précieux. Celles-ci font l’objet d’une compensation en faveur des caisses de sécurité sociale, qui s’impute directement dans le budget d’outre-mer. Il en va différemment de la dépense fiscale, qui ne donne pas lieu à compensation. Il serait pourtant utile de présenter sur le même plan les deux sortes de dépenses, afin de mieux faire apparaître la réalité du coût de la mission outre-mer.

Le ministère a confié à un cabinet spécialisé une étude visant à évaluer le dispositif spécifique d’exonération des charges pour l’outre-mer. Où en sont ses travaux ?

L’aide à la structuration du dialogue social relève d’une excellente initiative, en raison de la dureté de certains conflits sociaux outre-mer. Il serait utile d’avoir certaines précisions sur la méthode, ses modalités et ses objectifs.

Les crédits d’aide au logement social bénéficient d’une progression sensible, de 14 %. On a reproché à l’État d’avoir accumulé, au cours des dernières années, des arriérés de paiement aux organismes sociaux locaux. Pour quelle part le rattrapage de ces arriérés rentre-t-il en compte dans cette progression de crédits ?

Il serait nécessaire d’afficher le montant de l’aide par collectivité. À titre d’exemple, en Martinique, les besoins sont évalués à 1 500 maisons par an et à 500 logements évolutifs sociaux (LES), soit, en termes financiers, à 60 millions d’autorisations d’engagement et 50 millions de crédits de paiement. À cet égard, le temps paraît venu de réviser le plan de prévention des risques, pour tenter d’accroître les capacités foncières.

Un rapport d’information a été remis à l’Assemblée sur l’utilisation des pesticides organochlorés utilisés en Martinique et en Guadeloupe entre 1983 et 1993, notamment le chlordécone. Ce que les populations ont entendu ici et là, qui a été relayé par la presse et les médias, a provoqué une vive inquiétude et suscité des débats passionnés.

La commission des affaires économiques a décidé d’assurer un suivi de la mise en place des préconisations du rapport d’information. Il serait bon de connaître où en sont les travaux du secrétariat d’État chargé de l’Outre-mer sur ce douloureux et vital sujet. Des mesures très énergiques s’imposent, tant en matière d’indemnisation que de dépollution des sols.

Enfin, les futures zones globales d’activité ont été réaffirmées comme prioritaires. Le Gouvernement a souhaité qu’on les mette en place le plus rapidement possible. Peut-on avoir des précisions sur le calendrier prévu et sur la procédure ? La date d’effet annoncée, le 1er janvier 2008, sera-t-elle assurée ?

Il faut enfin évoquer le passeport mobilité, car le décret du 10 février 2004 mériterait d’être modifié pour corriger les dérives observées dans la gestion du dispositif de continuité territoriale.

M. Didier Quentin, rapporteur pour avis de la commission des lois, a indiqué que le budget alloué à la mission « outre-mer » pour 2008 était marqué par une stabilité générale, même si les modifications de périmètre budgétaire en compliquent l’analyse et si l’évolution des crédits est variable selon les politiques financées. Les crédits de paiement de la mission s’élèvent à 1,73 milliard d’euros, dont 1,01 milliard d’euros au titre du programme « emploi outre-mer » et 721 millions d’euros au titre du programme « conditions de vie outre-mer ». Il convient toutefois de rappeler que le ministère de l’outre-mer ne gère que 11,3 % des 15,3 milliards d’euros qui financent l’ensemble des politiques dont bénéficie l’outre-mer.

Près de 60 % des crédits de la mission « outre-mer » seront donc à nouveau consacrés l’an prochain à la promotion de l’emploi, qui demeure ainsi la priorité du ministère chargé de l’outre-mer. La lutte contre le chômage a déjà porté ses fruits outre-mer, puisque, sous la précédente législature, le taux de chômage a été ramené, en moyenne, de 25,4 % à 19,6 % de la population active dans les DOM. Toutefois, ce taux reste encore plus du double de la moyenne nationale ; la mise en place en 2008 de zones franches globales d’activité et de « pôles d’excellence » permettra certainement d’accélérer le retour vers l’emploi de nos compatriotes d’outre-mer. Il semble d’ailleurs que les collectivités ultramarines auraient un intérêt économique évident à adopter une stratégie globale pour devenir le « fer de lance » des technologies innovantes pour le développement durable (en matière d’énergie, de transports, d’agriculture ou de gestion des risques naturels et des déchets).

Ce budget reflète également la seconde grande priorité du Gouvernement pour l’outre-mer : l’amélioration des conditions de logement, puisque les crédits consacrés au logement social progressent de 13,8 % par rapport à l’année précédente.

Par ailleurs, les crédits de paiement destinés à l’aménagement du territoire augmentent de 10 % pour atteindre 110 millions d’euros, tandis que ceux qui financent la continuité territoriale demeurent stables à 54,2 millions d’euros. Enfin, les dotations aux collectivités ultramarines gérées par le ministère de l’outre-mer seront maintenues à 314 millions d’euros. Serait-il possible d’avoir des précisions sur le versement de l’aide aux sinistrés du cyclone Gamede à La Réunion et de l’ouragan Dean aux Antilles ?

S’agissant des questions relevant plus directement des compétences de la commission des Lois, il convient de souligner les excellents résultats enregistrés outre-mer dans la lutte contre l’immigration clandestine. En 2006, pour les seuls départements d’outre-mer, 10 605 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits vers leur pays d’origine, ce qui représente une augmentation de plus de 50 % en deux ans. Des progrès spectaculaires ont été faits dans les collectivités ultramarines les plus affectés par ce phénomène : par rapport à l’année précédente, le nombre d’éloignements est en hausse de 37 % en Guyane, de 57 % en Guadeloupe et, surtout, de 73 % à Mayotte.

Cette réussite incontestable est le fruit d’une volonté politique affirmée, qui s’est concrétisée par le renforcement des moyens humains et matériels de la police aux frontières (PAF), mais aussi par la mise en œuvre des mesures innovantes prévues dans le volet ultramarin de la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration. Comme en métropole, les immigrés légaux seront d’autant mieux acceptés et intégrés dans ces collectivités que l’immigration clandestine y sera réduite.

La délinquance générale a connu outre-mer une légère augmentation de 2,7 % en 2006, mais celle-ci s’explique largement par l’augmentation du nombre d’infractions à la police des étrangers – ces infractions représentent outre-mer une proportion de la délinquance presque neuf fois plus élevée qu’en métropole. En réalité, la délinquance de voie publique et les violences aux personnes ont respectivement baissé de 11,7 % et de 3,6 % en 2006, confirmant la tendance de l’année précédente. Les effectifs de la police et de la gendarmerie nationale ont été globalement accrus, et l’indice de criminalité demeure inférieur à celui de la métropole. Ces résultats mériteraient d’être mieux connus du grand public. On peut toutefois s’interroger sur l’accélération du trafic de drogue dans les départements français d’Amérique : le nombre d’infractions à la législation sur les produits stupéfiants a augmenté de presque 32 % en 2006. Elles demeurent toutefois un peu moins nombreuses qu’en 2003.

Même si la gestion des prisons relève du ministère de la justice, je remarque également que la surpopulation carcérale s’aggrave outre-mer, puisqu’en juillet, le taux d’occupation moyen des établissements s’élevait à 148 %, contre 128 % un an plus tôt. Il convient de remédier au plus vite à la situation dans les collectivités du Pacifique, avec des taux d’occupation supérieurs à 188 % en Nouvelle-Calédonie et à 237 % en Polynésie française. En outre, pourriez-vous nous indiquer la date de mise en service du nouveau centre pénitentiaire en construction dans le quartier de Domenjaud à Saint-Denis de La Réunion, l’actuelle prison de la rue Juliette Dodu étant particulièrement insalubre, et pour tout dire indigne de la République ?

S’agissant des évolutions qui affectent les institutions de l’outre-mer, une rénovation statutaire majeure a été conduite avec les lois organique et ordinaire du 21 février dernier. Ces lois ont créé deux nouvelles collectivités d’outre-mer (COM), Saint-Barthélemy et Saint-Martin, et mis à jour les statuts de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, pour tenir compte de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003. Elles ont aussi doté les conseils régionaux et généraux d’outre-mer de pouvoirs normatifs renforcés, tout en offrant aux électeurs des COM de nouveaux instruments de démocratie directe. Il convient, à présent, de mettre en œuvre tous ces changements législatifs. Où en est l’application de cette loi, s’agissant notamment de la parution des décrets d’application ? Quel est le calendrier a été retenu par le Gouvernement pour préparer la départementalisation du statut de Mayotte, comme le souhaitent sa population et ses élus ? Enfin, certains conseils généraux ou régionaux d’outre-mer ont-ils, depuis huit mois, demandé à être habilités par la loi à adapter localement les lois et règlements ?

Cette vaste entreprise de rénovation statutaire, qui n’a pas encore permis de moderniser le statut, pourtant dépassé, de Wallis et Futuna, devrait être à présent poursuivie avec un projet de loi organique et un projet de loi visant à stabiliser les institutions de la Polynésie française.

Le jeu des nouvelles alliances politiques n’a pas permis à l’assemblée de la Polynésie française d’approuver ces textes. Stabiliser ces institutions répond pourtant à une évidente nécessité, dont attestent régulièrement, depuis 2004, les crises politiques polynésiennes. Au-delà de la seule question du mode de scrutin pour l’élection de l’assemblée polynésienne, la mise en place de motions de défiance constructives et le renforcement des contrôles entourant les activités économiques et financières de la COM devraient favoriser la responsabilité et la transparence. Quelles observations de l’assemblée polynésienne pourraient être prises en compte par le Gouvernement ? Plus profondément, comment le Gouvernement entend-il concilier à l’avenir le rétablissement de divers contrôles et prérogatives de l’État en Polynésie française avec l’autonomie qui avait été reconnue à cette COM en 2004 ?

Enfin, en ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, la Constitution a été modifiée au mois de février dernier, afin de clarifier les règles applicables pour les élections provinciales et au Congrès. Quelle est maintenant l’orientation politique retenue par le Gouvernement pour la conduite des discussions entre les signataires des accords conclus à Nouméa le 5 mai 1998 ?

M. Jean-Claude Fruteau a exprimé sa perplexité devant l’augmentation de 2 %, à périmètre constant, des crédits alloués à la mission outre-mer annoncée par le secrétaire d’État, alors que le tableau récapitulatif qui figure dans le projet de loi de finances indique, toujours à périmètre constant, une diminution des crédits de paiement de 6,84 %. Comment le secrétaire d’État justifie-t-il cet écart ?

Pour le logement social, 25 millions d’euros supplémentaires sont affectés en crédits de paiement. On peut s’en réjouir car, dans ce secteur quasiment sinistré, les besoins sont considérables. Mais la mission d’audit de 2006 sur le logement outre-mer établit le « stock de dettes » de l’État en ce domaine à 450 millions d’euros. Même si les estimations varient, il n’en reste pas moins qu’il y a une dette antérieure de l’État compte tenu de la politique des autorisations de programme et des crédits de paiement utilisée pendant de nombreuses années. Les 25 millions d’euros supplémentaires vont-ils être utilisés pour rattraper la dette de l’État ou pour engager des opérations supplémentaires ? La mission d’audit de 2006 estime à 307 millions d’euros les moyens nécessaires pour répondre aux besoins.

Le congé-solidarité semble avoir disparu du projet de loi de budget. Qu’en est-il ?

Dans l’action 7 du programme 123 « conditions de vie outre-mer », il est fait allusion à la nécessité pour les départements d’outre-mer de se préparer à l’adaptation des accords de partenariat économique que l’Union européenne s’apprête à signer avec les pays ACP. De fait, il y a un grand danger pour les économies de ces départements si la spécificité des départements d’outre-mer, et des régions ultrapériphériques notamment, n’était pas reconnue. Où en sont les négociations ? La signature des accords interviendra-t-elle avant la date du 1er janvier 2008 qui avait été annoncée ? Les départements d’outre-mer seront-ils exclus, en vertu de leur spécificité, du champ d’application des accords ? S’il en était autrement, ce serait dramatique pour les économies domiennes et les efforts réalisés par le secrétaire d’État pour l’emploi outre-mer risqueraient d’être réduits à néant.

En matière de continuité territoriale, les disparités de traitement entre différentes parties de la nation demeurent. Il n’est que de comparer les sommes affectées par l’État par tête d’habitant : 650 euros pour la Corse, contre 10 euros pour La Réunion. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour corriger ces disparités et assurer une vraie continuité territoriale, à laquelle aspirent légitimement, comme l’a reconnu lui-même le secrétaire d’État, les populations d’outre-mer ? Faut-il rappeler que le seul moyen de mobilité de ces dernières est l’avion ?

M. Serge Letchimy a repris à son compte les questions de M. Fruteau sur la continuité territoriale – 5 millions d’euros pour la Martinique, 772 millions d’euros pour la Corse – et sur le congé-solidarité. Des milliers de postes vont se libérer du fait des départs à la retraite. Si l’on supprime ce que l’on appelle les congés-solidarité, on va rencontrer des problèmes pour remplacer les fonctionnaires.

M. le rapporteur a avancé, pour l’outre-mer, un taux de chômage de 19 %. Or, pour la Martinique, il est de 25,6 % en moyenne, et celui des moins de vingt-cinq ans, aux alentours de 50 %. Dans un domaine où il faut choisir résolument la rupture, le présent budget s’inscrit malheureusement dans la continuité.

Alors que les besoins en matière de logements se montent à 1 600 par an en Martinique, il n’en est construit que 250. La dette de l’État sur l’ensemble des DOM est évaluée à 100 millions d’euros, alors que l’augmentation est de 35 millions. Le taux d’insalubrité est de l’ordre de 5 % avec beaucoup de bâtiments à démolir pour être reconstruits. De plus, le patrimoine est soumis aux risques majeurs. Les crédits sont insuffisants alors que l’enjeu est très important.

M. Serge Letchimy s’est félicité qu’aient été évoquées l’expérimentation et l’évolution statutaire dans le domaine du développement économique. Il a suggéré une piste pour concilier le Grenelle de l’environnement, c’est-à-dire la prise en compte de la biodiversité et de la richesse locale, et la recherche de solutions permettant un développement local et endogène : un lien peut-être fait entre la zone franche globale, de la future loi-programme et une dynamique de développement reconnaissant un statut écologique particulier. Si l’on veut redévelopper localement, il faut créer un cadre juridique financier, contractuel et programmatif en matière d’aménagement du territoire qui puisse permettre de tenir compte des enjeux locaux liés aux richesses et à la biodiversité. Cela aurait certainement permis d’éviter la pollution par le chlordécone et par les autres pesticides.

M. Letchimy regrette profondément que M. le président de la commission n’ait pas retenu le principe d’une commission d’enquête à ce sujet. La mission d’information qui a été mise sur pied, même si elle a fait un excellent travail, n’a pas donné les résultats escomptés et il ne voit pas ce que peut donner un comité de suivi, d’autant qu’on n’en voit pas la traduction dans le budget actuel. Un geste fort de l’État serait important pour l’ensemble des habitants de la Martinique et de la Guadeloupe. Qu’est-il prévu de faire pour dépolluer et permettre la reprise en main de l’agriculture locale ?

La situation de la Martinique et de la Guadeloupe, comme celle des autres départements d’outre-mer, exige de changer de braquet. Il faudra demeurer très attentif à la place qui sera donnée aux évolutions institutionnelles dans le cadre des débats qui vont s’ouvrir et notamment ouvrir dans le temps et l’espace l’expérimentation prévue sur deux ou trois ans par la loi organique. Pour instaurer un véritable pouvoir local dans le cadre de l’article 73, il conviendrait de faire franchir un pas à celle-ci en programmant sur la même durée – quinze ans – la zone franche globale, la loi-programme et un cadre de développement économique expérimental, de façon à pouvoir sortir du régime de l’économie d’habitation.

Mme Jeanny Marc a déclaré qu’elle se retrouvait tout à fait dans les propos tenus par les deux orateurs qui l’ont précédée. Elle a posé une question complémentaire sur les emplois aidés. Le chômage est un problème endémique en outre-mer, surtout pour la population jeune. Or les documents fournis ne donnent pas beaucoup d’informations sur le transfert de la gestion et de l’administration des emplois aidés au ministère de l’économie. Selon quelles modalités sont-ils désormais organisés ? Ils ne sont pas une panacée mais permettent un premier accès des jeunes à l’emploi.

On attend des signes forts du Gouvernement sur le dossier du chlordécone. Plus que la pollution, ce qui inquiète la population, c’est le manque de transparence et l’absence de lisibilité de la position du Gouvernement.

M. Michel Piron s’est félicité de la progression – 13,8 % – des crédits affectés au logement, mais a fait remarquer qu’on observe, depuis de nombreuses années, une sous-consommation des crédits, la production de logements ne suivant pas toujours les financements ouverts. Il a demandé au secrétaire d’État de faire le point sur l’écart éventuel pouvant exister entre les crédits ouverts et leur consommation réelle.

Il s’est également enquis de l’articulation entre le rôle des collectivités territoriales et celui de l’État.

Mme Annick Girardin a fait part de son inquiétude concernant l’objectif de décélération fixé au niveau national par Mme Christine Lagarde. La fongibilité des crédits entre les aides pour l’outre-mer et les aides nationales laisse craindre que les emplois aidés dans le programme formation outre-mer ne servent de variables d’ajustement aux objectifs nationaux. Comment l’outre-mer va-t-elle être traitée ? Elle a demandé au secrétaire d’État de veiller à ce que les aides soient pérennes et d’un niveau au moins égal à celui de 2007.

Un deuxième sujet de préoccupation concerne les finances des collectivités locales ultramarines. On constate une disparité entre les collectivités dont les charges structurelles ont été reconnues, comme la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie pour lesquelles des fonds spécifiques sont prévus, et celles pour lesquelles il n’y a pas encore de compensation par l’État, au premier rang desquelles Saint-Pierre-et-Miquelin dont le déficit, en 2006, était de plus de 7 millions d’euros et la dette de plus de 29 millions d’euros. L’enjeu est de taille. Les spécificités de ces collectivités doivent être reconnues.

Dans le cadre du PLF pour 2008, Mme Girardin déposera deux amendements. Le premier interviendra sur le dispositif de contrat de stabilité et visera à ce que l’indexation des dotations des collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon soit réalisée sur la base de l’inflation locale et non pas de l’inflation nationale. Le second tendra à la création d’un fonds spécifique, ou du moins d’une dotation complémentaire, qui prendrait en charge l’ensemble des difficultés structurelles incompressibles que connaissent Saint-Pierre-et-Miquelon et les autres territoires d’outre-mer dont la spécificité n’a pas été prise en compte.

La continuité territoriale est un sujet qui concerne tous les outre-mer. Les critères d’attribution de la dotation de continuité territoriale sont totalement en défaveur de Saint-Pierre-et-Miquelon. Le billet d’avion pour cette collectivité coûte en moyenne 1 300 euros, ce qui est sans doute le prix le plus cher de tous les départements et collectivités d’outre-mer.

Elle a souhaité connaître les positions du secrétaire d’État sur toutes ces préoccupations et les moyens qui seront alloués en 2008 pour prendre en compte les difficultés et les spécificités de l’outre-mer.

M. Louis-Joseph Manscour a considéré que les moyens mis à la disposition du secrétaire d’État étaient nettement insuffisants pour satisfaire les exigences des DOM-TOM, qu’il s’agisse de la continuité territoriale, du logement, de l’emploi ou de la sécurité.

Concernant le logement, les crédits augmentent certes de 14 % mais ces crédits ont toujours été très insuffisants dans le passé. Par ailleurs, pour la seule Martinique, près de 100 millions d’euros de crédits de paiement restent en suspens. Les opérateurs sont menacés dans leur survie.

Le taux de chômage outre-mer est deux fois celui du chômage moyen en métropole. M. Manscour s’est étonné du taux moyen indiqué par le secrétaire d’État – 19 % -- alors qu’il se situe, dans presque tous les départements d’outre-mer, entre 24 et 25 %.

M. Abdoulatifou Aly a demandé où en étaient les rapports entre Mayotte et l’Union européenne. Alors que le projet de Constitution qui a été rejeté prévoyait des négociations en vue de l’intégration de cette collectivité dans l’Union, le mini-traité semble ne pas parler du tout de cette question.

Mayotte est la « championne de la République » en matière de lutte contre l’immigration clandestine. Cela devrait avoir pour contrepartie une augmentation de l’emploi au niveau local. Or, jusqu’à présent, cela ne se traduit pas dans le concret. Quelles mesures le Gouvernement entend-il appliquer à Mayotte pour favoriser l’emploi ? Les mesures d’exonération sociale qui s’appliquent ailleurs outre-mer vont-elles lui être étendues ?

Cela fait au moins cinq ans qu’aucun logement n’a été réalisé à Mayotte. Comment va se traduire la relance du logement ? Va-t-on continuer avec une seule société immobilière ou va-t-il y avoir une généralisation, c’est-à-dire une liberté totale puisque la défiscalisation est présentée comme un moyen de favoriser le logement social outre-mer ?

Enfin, qu’entend faire le Gouvernement pour améliorer la continuité territoriale entre Mayotte et la métropole ?

M. Michel Vaxès a indiqué que toutes les questions qui ont été posées traduisent une préoccupation commune. Il est revenu à nouveau sur la question dramatique du logement outre-mer. Comment le secrétaire d’État compte-t-il s’y prendre pour réorienter la défiscalisation vers le logement social ? Les différents rapports qui ont été produits sur cette question montrent qu’elle n’a pas réussi à répondre aux attentes qui avaient été placées en elle. Il a également fait remarquer que cette défiscalisation représente pour l’État un effort plus important que la dépense budgétaire.

Le secrétaire d’État s’est félicité de l’intérêt porté par un certain nombre de parlementaires de métropole aux dossiers de l’outre-mer. Alors que l’outre-mer a souvent fait l’objet d’incompréhension. Ces Français du bout du monde ont le sentiment que l’esprit d’équité et de justice s’applique plus facilement à certaines grandes agglomérations de métropole qu’à certaines îles éloignées. Il a pu se rendre compte, lors de ses déplacements, qu’il y a des situations qui ne sont pas dignes de la part de l’État. L’hôpital de Futuna, par exemple, n’a même pas un appareil de radiographie en état de fonctionner. La solidarité nationale consiste à donner plus à ceux qui ont moins. Elle n’a rien à voir avec l’égalitarisme, qui consiste à donner la même chose à tout le monde. La France est ce pays à nul autre pareil qui peut revendiquer d’être une addition d’histoires et de cultures différentes, d’une immense communauté de destins. S’il manquait une seule parcelle de cette histoire, la France ne serait plus la France. De là naît cette exigence de solidarité.

Le budget pour 2008 ne va pas rattraper trente ans. Il en rêverait comme beaucoup de députés de l’outre-mer. Mais une exigence est déjà posée dans le vocabulaire, à savoir de ne pas sortir du mot « rattrapage », de le répéter en permanence et de tout faire pour que, année après année, une part du budget soit consacrée à celui-ci. Il importe également d’inventer des outils qui y contribuent. Il ne suffira pas de répondre en termes budgétaires ; il faudra également parler compétitivité et attractivité, et donc trouver de nouvelles filières économiques pour attirer de nouveaux investisseurs. C’est par l’addition de l’un et de l’autre que l’on peut se donner une chance.

Il faudra, par ailleurs, essayer de ne pas imposer une vision de Paris. C’est déjà détestable pour ceux qui vivent en Savoie ou en Bretagne. Cela l’est encore plus pour ceux qui habitent au milieu de l’Océan indien, de l’Océan Pacifique ou de la mer des Caraïbes.

La tâche est difficile mais le gouvernement promet de veiller à ce que l’État ait un autre regard de modestie et d’humilité sur l’outre-mer et d’inventer des outils qui répondent à ses besoins. Les députés des DOM-TOM sont les mieux placés pour les exprimer puisqu’ils sont au quotidien sur ces territoires et savent quelles sont les ressources humaines et les ressources naturelles. Il revient aux fonctionnaires des administrations de la métropole de se doter d’outils adaptés à ces territoires.

Les modèles dans les territoires d’outre-mer sont très différents, comme on peut s’en rendre compte dans les relations et les rapports en société, les lignes de partage et même les débats idéologiques. Les réponses ne peuvent donc par être les mêmes. Il est possible, comme cela s’est souvent manifesté, de mettre en commun les énergies, quel que soit le banc sur lequel on siège, pour aller dans le même sens et regarder dans la même direction.

Le secrétaire d’État a ensuite répondu aux questions des députés.

Il a remercié les deux rapporteurs pour le soutien qu’ils lui ont apporté sur son budget et pour les questions très pertinentes qu’ils ont posées.

M. Almont s’est félicité de l’augmentation de 2 % du budget, à périmètre constant, tandis que M. Fruteau s’est étonné que les documents budgétaires fassent apparaître une diminution des crédits de 6,84 %. Ils ont tous les deux raison. En effet, les documents budgétaires, tels qu’ils ont été imprimés, comportent une erreur fondamentale. Sur le budget du ministère de l’emploi, n’apparaissent pas les 158 millions d’euros qui ont été transférés du budget du ministère d’outre-mer vers le ministère de l’emploi. Le document budgétaire définitif avec la correction de l’erreur matérielle qui a été commise sera prochainement distribué. Le secrétaire d’État a également demandé à ce que les députés disposent d’ici à la semaine prochaine, conformément à la demande de M. Almont, d’un document précis avec la répartition ministère par ministère de tout ce qui touche à la mission outre-mer pour qu’ils puissent avoir une vision d’ensemble, avec un affichage clair des spécificités de chaque secteur.

La présentation conjointe des dépenses fiscales et des dépenses sociales d’allégement et d’exonération de charges patronales sur le travail serait une information très utile mais c’est au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) que revient la responsabilité de faire apparaître les engagements de l’État vis-à-vis des organismes de sécurité sociale.

L’étude visant à évaluer, à l’aide d’un modèle économétrique, le dispositif spécifique d’exonération de charges sociales pour l’outre-mer, c’est-à-dire le nombre d’emplois créés, a été confiée au Centre d’étude de l’emploi, qui est l’organisme de référence en la matière. Un rapport d’étape vient d’être livré. Les conclusions finales seront fournies prochainement aux parlementaires.

La méthode d’aide à la restructuration du dialogue social est simple à énoncer mais difficile à mettre en œuvre. Cela consiste à faire vivre ensemble les protagonistes du dialogue, au cours de sessions d’une durée globale de plusieurs semaines, généralement organisées hors de la collectivité d’origine, autour d’exemples examinés sur le terrain – par exemple la régulation des rapports sociaux au Québec. Les participants de ces sessions doivent rendre des travaux communs à partir de leur expérience commune. On espère que les liens particuliers noués au cours de cette expérience éroderont la tentation du seul recours à la confrontation. Mais il est peut-être illusoire de penser qu’une seule session ou même une série de sessions permettra d’atteindre immédiatement un tel résultat. Les sessions doivent déboucher sur des initiatives concrètes dans le champ social.

Concernant les arriérés de paiement de l’État aux organismes sociaux locaux pour le logement, la dette antérieure a été purgée début 2007, mais le secrétaire d’État n’est pas en mesure de donner l’état pour 2007 puisqu’il n’a pas reçu toutes les factures. Toutefois, la dette antérieure a été purgée au 31 décembre 2006.

Pour la Martinique, la ligne budgétaire unique – LBU – de 2007 a permis de payer les dettes de 2006. Cela signifie qu’en 2007, on a peu construit : 250 logements LLS contre 1 500 il y a dix ans.

Pour ce qui concerne la sous-consommation des crédits, il est vrai qu’il y a eu, à un moment donné, un problème lié aux réserves foncières. Mais il s’est atténué considérablement du fait de l’élargissement des financements à d’autres produits et de la construction d’un nombre moindre de logements, compte tenu du niveau budgétaire. Il n’y a pas aujourd’hui, en Martinique, de retard et de non-consommation de fonds

On ne peut pas parler de non-consommation budgétaire. Sur le budget 2007, ont été inscrits des crédits en augmentation importante pour régler par anticipation une part de la dette de 2007. La Martinique n’a pas été en mesure en 2007 d’apporter le foncier qui aurait permis de réaliser les logements dont elle a besoin. Les cinq problèmes majeurs dans les outre-mer sont le logement, l’emploi, l’assainissement, la couverture numérique et la continuité territoriale. Ce sont les cinq volets qui seront inscrits dans la nouvelle loi de programme qui sera débattue dans l’année 2008.

Il faut inventer, avec l’ensemble des députés de l’outre-mer, des modèles adaptés à leur territoire. Il a besoin, pour ce faire, du concours de chacun, avec sa spécificité propre.

Pour la continuité territoriale, plusieurs orateurs ont fait référence à la Corse. On peut également faire un parallèle avec elle en matière de logement. Des dispositions corses ont été prises avec un établissement spécifique créé par décret au mois de mai dernier sur les problèmes d’indivision. Alors que l’outre-mer souffre d’un problème dramatique de logements insalubres, vacants ou squattés, résultant souvent de problèmes d’indivision, on ne dispose d’aucun outil juridique pour le régler. C’est pourquoi le secrétaire d’État souhaite que, dans la loi de programme, il y ait, à côté du volet des zones franches globales, et par territoire, une réponse identifiée à chacun des problèmes rencontrés : logement, emploi, assainissement, couverture numérique, continuité territoriale.

Pour le logement, devra être créé un établissement foncier adapté à la spécificité de chaque territoire pour pouvoir faire les réserves foncières nécessaires pour le logement et procéder aux adaptations nécessaires pour régler les problèmes d’indivision et de réhabilitation de logements insalubres dans le cadre de l’indivision. Cela peut se faire sous plusieurs formes et le secrétaire d’État a invité les députés d’outre-mer à inventer des modèles. Cela pourrait consister en une aide à la réhabilitation et des garanties de loyers pour les propriétaires bailleurs. Nombre de propriétaires redoutent, en effet, de mettre leurs logements sur le marché de la location par peur de ne pas pouvoir encaisser les loyers. Il faut travailler sur du donnant-donnant. Cela peut consister également à diriger vers les entreprises. La Fédération du bâtiment et des travaux publics de La Réunion, par exemple, a demandé s’il ne pouvait pas être accordé des aides spécifiques aux entreprises de plus de cinquante salariés. Le secrétaire d’État s’y est déclaré favorable dès lors que la Fédération s’engage à produire, elle-même, plus de logements sociaux par an.

À chaque territoire, on peut inventer un modèle spécifique et des solutions nouvelles.

Le complément de la LBU pour le logement social, c’est-à-dire la réforme de la défiscalisation sur le logement, sera introduite dans la loi de programme de manière à la réserver progressivement uniquement au logement social.

M. Michel Vaxès a demandé au secrétaire d’État comment il allait faire pour orienter la défiscalisation vers le logement social car, jusqu’à présent, cela n’a pas fonctionné.

Le secrétaire d’État a répondu qu’il sera précisé dans la loi de programmation que la défiscalisation profitera exclusivement au logement social, et non plus à la production de logements de luxe.

Il a été entendu récemment avec ses collègues de l’environnement, de la santé et de l’agriculture par la commission des affaires économiques du Sénat, à la suite d’une communication dénonçant la pollution des sous-sols et des productions agricoles des Antilles – La Guadeloupe et la Martinique – par le chlordécone, lequel se retrouverait également dans les aliments et est accusé de provoquer des cancers de la prostate. Alors que se déroulent les débats sur le Grenelle de l’environnement. Ces accusations étaient profondément injustes et mettaient en difficulté les Antilles. D’ailleurs l’auteur du rapport s’est contredit quelques semaines plus tard, en reconnaissant qu’elles n’étaient pas prouvées. Des épidémiologistes qui travaillent au CHU de Fort de France et de Pointe-à-Pitre et dont certaines enquêtes ont une lisibilité et une traçabilité sur près de vingt ans, n’aboutissent pas aux mêmes conclusions.

Le sujet est grave. On ne peut pas jeter à la figure d’un citoyen martiniquais ou guadeloupéen le fait qu’un tel risque pèse sur sa santé ou sur celle d’un de ses proches.

Cela étant, en 1990, des indications concernant le chlordécone ont commencé à se répandre, en 1991, des préconisations ont été prises et, en 1993, a été décrétée une interdiction définitive d’utilisation.

Écrire que tous les sols de la Martinique et de la Guadeloupe sont concernés est faux. Il y a des parcelles bien identifiées qui le sont. Des normes précises sont imposées et le chlordécone est interdit d’utilisation.

D’autres débats sont ouverts sur les pesticides mais ils le sont sur tous les territoires de France. Il y a eu l’affaire du pyralène dans le Rhône.

Le secrétaire d’État a voulu la transparence la plus totale sur ce dossier, comme peuvent en témoigner les élus martiniquais qui se réunissent régulièrement avec les services de l’État, la Direction de la répression et des fraudes, les services sanitaires et les associations, en présence de représentants de la presse. L’État n’a pas le droit de cacher quoi que ce soit.

Lorsque le secrétaire d’État s’est rendu à la Martinique et à la Guadeloupe pour un suivi des réparations entreprises à la suite du cyclone Dean, quelques jours après une nouvelle déclaration sur le chlordécone, il a souhaité que, à chaque fois qu’il entrait quelque part, la porte soit laissée grande ouverte afin que tous les médias et tous les élus puissent y avoir accès et qu’il n’y ait ainsi aucun soupçon de conversations occultes.

Les produits provenant de terres identifiées comme étant contaminées, ce qui n’est pas le cas de tout le territoire, sont soumis à des analyses. La norme de 50 microgrammes par kilogramme, qui est en train de passer à 20, doit être respectée, notamment pour les légumes racines. En ce qui concerne la banane, s’il y a des traces de chlordécone, elles se trouvent dans la peau et pas dans le fruit.

Durant les dernières années, les producteurs ont réalisé un travail qualitatif sur les produits antillais.

Le secrétaire d’État s’emploie à ce qu’on renforce d’abord les services d’analyse. Quelque 180 prélèvements pas an sont effectués. C’est insuffisant. Le secrétaire d’État a demandé qu’on multiplie par trois ou quatre le nombre de prélèvements – sur la terre comme sur les produits. Des échantillons sont répartis dans trois sachets avec des cachés. L’un est envoyé dans un laboratoire dans la Drôme, un autre est conservé par l’exploitant, le troisième est dans un coffre-fort à Paris.

Le secrétaire d’État a également demandé, avec M. Michel Barnier, à ce que soit créé un label qualité. Les producteurs qui font un travail exceptionnel pour mettre sur les étals dans les grandes surfaces ou à l’exportation des produits de grande qualité doivent être reconnus.

Le secrétaire d’État souhaite également qu’il y ait des poursuites fortes à l’égard des fautifs. Au tribunal de Pointe-à-Pitre, sur les deux dernières années, les services de la répression et des fraudes ont dénoncé et transmis huit infractions : six ont été classées sans suite, deux ont fait l’objet d’amendes de 700 euros. Il serait utile que le Parlement réfléchisse à des sanctions plus fortes quand les normes imposées par la loi ou le règlement ne sont pas respectées. C’est ainsi qu’on réussira à rassurer totalement la population.

Ce que le secrétaire d’État peut assurer, c’est que tous les produits qui sont sur les étals, en grande surface et à l’exportation sont de qualité et sont contrôlés. On n’a pas le droit de montrer du doigt la Martinique ou la Guadeloupe en parlant de contamination et de pollution.

Il faut par ailleurs mener de grandes politiques de prévention et de détection pour voir s’il y a eu des atteintes à la santé humaine. Les études épidémiologiques en cours dans les deux CHU devraient rapidement, avec l’AFSSA et l’INSERM, apporter des réponses définitives.

M. Alfred Almont, a insisté sur le fait que, compte tenu des engagements pris, des actions en cours et de la pollution qui est réelle, il s’agit, aujourd’hui, non seulement de sanctionner mais surtout d’indemniser et de dépolluer.

Le secrétaire d’État a répondu que la décontamination étant très compliquée, il est davantage question de requalification. Partout où il y a des terres de qualité, il faut produire de la qualité. Là où il y a de la contamination, comme on n’a aucune certitude de parvenir à décontaminer, on compte aider à la reconversion dans les nouvelles cultures, comme la biomasse, et les énergies renouvelables. De la même manière que La Réunion propose un grand dossier « île verte » et que M.  Serge Letchimy invite à inventer de nouveaux modèles sur la base des zones franches globales et du Grenelle de l’environnement, on aura montré qu’on était capable de transformer cet inconvénient en avantage en créant une nouvelle économie et de nouvelles filières, à côté d’une production de qualité. On joue gagnant-gagnant.

S’agissant des places de détention outre-mer, il convient notamment de rappeler qu’un nouveau centre est en construction à Saint-Denis de La Réunion ; le gros œuvre est sorti de terre. D’autres projets vont se concrétiser : 32 places supplémentaires en Polynésie ; extension du centre de Remire Montjoly, en Guyane, avec 70 places supplémentaires. Pour autant, la surpopulation carcérale restera encore très forte en Guyane, en Polynésie et en Calédonie et il conviendra de réfléchir à la construction d’un établissement pénitentiaire à Saint-Martin.

S’agissant de la Nouvelle-Calédonie, il a indiqué à M. Jean-Claude Fruteau que, conformément à l’engagement du Président de la République devant les Français, à la mission qui lui a été confiée par le Premier ministre et à ses convictions personnelles, les accords de Nouméa, tous les accords de Nouméa et rien que les accords de Nouméa devraient être respectés de A à Z.

Il avait annoncé avant son départ en Nouvelle-Calédonie qu’il réunirait, à la demande du FLNKS, le comité des signataires avant la fin de l’année. Pour donner encore plus de solennité à cette démarche, le Premier ministre a décidé que le comité se réunirait à Matignon.

On constate que, dans le respect des accords de Nouméa, des avancées significatives ont eu lieu en Nouvelle-Calédonie. Le secrétariat d’État a obtenu l’autorisation de défiscaliser 216 millions de dollars pour permettre le lancement du chantier de l’usine du Nord et Xstrata s’est engagé le 17 octobre dernier. Il convient par ailleurs de saluer le travail effectué avec Paul Néaoutyine, le président de la province du Nord, et avec M. Néko Hnepeune, le président de la province des Îles ; on arrive en effet au terme du chantier de l’usine du Sud.

Dans le cadre des accords de Nouméa, on a su réaliser un rééquilibre territorial, qui permettra de répartir richesses et créations d’emplois. S’agissant des infrastructures nécessaires à la réalisation de ces chantiers, le secrétariat d’État s’engage tant pour les voiries d’accès que pour les logements accueillant les actifs (près de 7 500 pour le chantier de l’usine du Nord).

Le secrétaire d’État a ajouté qu’il souhaitait que, dans le strict respect des accords de Nouméa, ceux qui auront à se prononcer le moment venu dans le cadre du référendum d’autodétermination fassent plutôt le choix de la Nouvelle-Calédonie dans la France.

Il a souhaité également que l’État soit totalement impartial. Dans le Pacifique, c’est le principe de l’autonomie qui prévaut au plan institutionnel. Au fur et à mesure que les élus le demanderont, des transferts de compétences leur seront accordés.

Ce statut d’autonomie a démontré son efficacité en termes de développement économique. En Nouvelle-Calédonie, on enregistre aujourd’hui le taux de croissance et le nombre de créations d’emplois parmi les plus élevés. Parallèlement à cela, l’État, dans ses compétences régaliennes, doit se montrer impartial et veiller à entretenir le dialogue social, à côté de ceux qui ont à gérer les institutions autonomes. Et lorsqu’il y a des blocages et des violences, il doit veiller à exercer ses responsabilités en matière de sécurité et de justice. Lorsque deux policiers sont blessés à Nouméa, il est normal que le secrétaire d’État demande que toutes les poursuites soient engagées contre ceux qui ont attaqué des fonctionnaires de l’État chargés de garantir la sécurité des personnes et des biens.

En ce qui concerne l’application de l’actuel statut de la Polynésie française, la situation y est instable : en trois ans, il y a eu cinq présidents et quatre motions de censure, après de nombreuses demandes de dissolution par toutes les parties concernées. Ces demandes n’ont pas abouti : il existe des institutions, et les élus qui votent une motion de censure ne font qu’utiliser les moyens mis à leur disposition par les lois de la République. Il n’y a pas à les remettre en cause.

Seulement, cette instabilité coûte très cher au développement économique. On a discuté un contrat de projet 2007-2013, de 450 millions d’euros, avec une participation de l’État de 177 millions d’euros. Or on n’arrive pas à le signer, parce que le précédent président et le président actuel, qui se relaient tous les six mois, rejettent à tour de rôle ce qui a été discuté par leur prédécesseur.

Cela a des conséquences sur l’enseignement supérieur, la recherche, l’université, les communes, les réseaux d’assainissement ou la couverture numérique, le câble numérique. Si jamais on signait ce contrat, les citoyens polynésiens recevraient Internet en haut débit fin 2009, début 2010 !

Fin juillet 2007, toutes les formations politiques polynésiennes demandaient la dissolution de l’assemblée de Polynésie française. Le 4 août dernier, le Gouvernement a répondu par une déclaration selon laquelle tout le temps nécessaire serait pris pour réfléchir à une évolution institutionnelle susceptible de garantir la stabilité sans remettre en cause l’autonomie. Tout le monde a été entendu, et chacun a donné son accord.

On a profité de cette opportunité pour rajouter des mesures de transparence financière. Dans l’avis donné par l’assemblée de Polynésie française, ces mesures de transparence financière ont recueilli une approbation unanime. Ont en revanche été contestés la date des nouvelles élections territoriales, ou encore le seuil fixé pour pouvoir fusionner au deuxième tour de scrutin. Toutefois la plupart des dispositions ont été validées.

Le Conseil d’État a apporté à ces projets de légères modifications qui ne transforment en rien le fond du dossier, tout en émettant un avis favorable la semaine dernière. Le texte de loi organique sera donc présenté devant le Conseil des ministres jeudi 25 octobre, au Sénat le 12 novembre prochain, à l’Assemblée nationale à la fin du mois de novembre, puis au Conseil constitutionnel.

Depuis le 4 août dernier, ce cheminement a été parfaitement respecté. On a pris tout le temps de dialoguer et de se concerter, et ce n’est pas fini. L’avis de chacun compte à chaque étape. Le secrétaire d’État a assuré qu’il tiendrait compte des amendements, des propositions et des contre propositions, car le débat parlementaire enrichira encore ce texte.

Chacun doit être convaincu qu’il faut conforter l’autonomie tout en assurant la stabilité nécessaire aux institutions de la Polynésie française.

Le calendrier applicable à Mayotte est le suivant : élections au mois de mars ; ensuite, si le conseil général le demande, référendum ; si le référendum confirme le souhait de départementalisation, transfert progressif des compétences.

Cette progressivité est nécessaire et il convient d’y réfléchir. En métropole, les conseils généraux financent, par exemple, la totalité des collèges ; jusqu’à présent, ceux qui sont construits à Mayotte sont financés à 100 % par l’État. Il en est de même des infrastructures, des programmes ANRU, etc. On ne peut donc pas transférer d’un coup toutes les compétences.

Si les Mahorais font le choix de la départementalisation au mois de mars prochain, le secrétaire d’État ouvrira un débat avec les parlementaires pour regarder comment et à quel rythme il sera possible, sur plusieurs années, d’opérer ce transfert de compétences en faveur du conseil général de Mayotte.

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Après le départ du secrétaire d’État, la Commission a procédé à l’examen pour avis des crédits de la mission « outre-mer » pour 2008.

Conformément aux conclusions de son rapporteur pour avis, M. Didier Quentin, la Commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « outre-mer » pour 2008.

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