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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 5 février 2008

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 40

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales et examen en application de l’article 86, alinéa 8 du Règlement, du rapport sur la mise en application de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers (MM. Éric Diard, rapporteur et Julien Dray, co-rapporteur)

– Examen de la proposition de résolution de M. Guy Geoffroy, rapporteur de la délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne sur la proposition de directive prévoyant des sanctions à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (E3534) (n° 612) (M. Guy Geoffroy, rapporteur)

– Informations relatives à la Commission

La Commission a procédé à l’audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales et examiné, en application de l’article 86, alinéa 8 du Règlement, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers (MM. Éric Diard, rapporteur et Julien Dray, co-rapporteur).

Le président Jean-Luc Warsmann rappelle que le rapport d’application a été confié à un binôme, composé d’un rapporteur de la majorité, M. Éric Diard et d’un co-rapporteur de l’opposition, M. Julien Dray.

Il remercie Mme la ministre pour l’intérêt qu’elle porte à la réunion de la commission puisqu’elle en a fait état dans une interview qu’elle a donnée à un grand quotidien national la semaine précédente en évoquant l’utilisation croissante d’Internet par les réseaux terroristes et en soulignant qu’une disposition de la loi du 23 janvier 2006 vise précisément ce risque.

M. Éric Diard, rapporteur, rappelle que la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers a été promulguée il y a un peu plus de deux ans. Adoptée en urgence, à la suite des attentats de Londres du 7 juillet 2005, elle n’avait pas pour objectif de révolutionner le droit français de l’antiterrorisme, mais plus modestement d’en compléter certaines lacunes, notamment en matière de police administrative.

En effet, la France, qui a été très tôt victime du terrorisme, a dû imaginer, il y a quelques années, une réponse à ce difficile défi, notamment avec la loi du 9 septembre 1986 qui fixe le cadre juridique et la méthode de lutte contre le terrorisme. Cette option française de l’antiterrorisme est fondée sur le primat de la détection précoce des réseaux terroristes, très en amont de l’organisation d’attentats : l’utilisation de l’incrimination de l’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ainsi que l’absence de frontières étanches entre services de renseignement et dispositif judiciaire sont des atouts qui expliquent en grande partie les succès de la France dans le domaine de la lutte contre le terrorisme.

En 2005, le Gouvernement a jugé utile de donner de nouveaux outils aux services de lutte contre le terrorisme, notamment pour leur permettre de détecter plus en amont les réseaux terroristes, en dehors de toute commission d’infraction. À l’Assemblée nationale, le projet de loi avait été adopté avec les voix des députés de l’UMP et de l’UDF, les députés socialistes s’abstenant et les députés communistes votant contre.

La commission des Lois a estimé qu’il était devenu nécessaire de faire le point sur la mise en application de cette loi, dont le calendrier d’adoption avait été particulièrement rapide. En outre, certaines des dispositions les plus novatrices de la loi – articles 3, 6 et 9 – n’ont été adoptés qu’à titre temporaire et ne sont applicables que jusqu’au 31 décembre 2008. Le Parlement sera donc conduit à se prononcer sur la pérennisation de ces dispositifs et il importe qu’il dispose des éléments pour le faire dans de bonnes conditions. La ministre souhaite-t-elle une pérennisation de ces dispositifs ou bien une prolongation de leur application pour une nouvelle période temporaire de trois ans ?

Les rapporteurs de la commission des lois ont, d’une part, réalisé un bilan sur la publication des décrets et circulaires nécessaires à la pleine application de la loi du 23 janvier 2006 et, d’autre part, évalué les conditions de la mise en œuvre concrète de celle-ci.

Le bilan sur la publication des décrets et circulaires nécessaires à la pleine application de la loi est globalement satisfaisant puisque la quasi-totalité des dispositifs prévus par celle-ci sont aujourd’hui utilisés par les services de lutte contre le terrorisme.

Une seule disposition de la loi, certes importante, ne peut aujourd’hui faire l’objet d’une mise en œuvre en raison de l’absence de publication d’un acte réglementaire : il s’agit de l’obligation pour les hébergeurs de site Internet et les fournisseurs d’accès à Internet de conserver et de transmettre aux services de lutte antiterroriste les données concernant l’identification des personnes à l’origine de la création de contenus en ligne – II de l’article 6 de la loi. Il est regrettable que cette disposition, applicable jusqu’au 31 décembre 2008, n’ait pas encore pu entrer en vigueur. M. Diard déclare partager la conviction exprimée par Mme la ministre dans une interview au Figaro de vendredi dernier, de l’utilisation croissante d’Internet par les réseaux terroristes. Quand le décret d’application en question pourra-t-il être publié, sachant que la consultation préalable de la CNIL a déjà eu lieu ?

Une autre disposition de la loi n’est pas appliquée par les services concernés dans l’attente d’une circulaire du ministre de la justice et du ministre de l’intérieur : cette disposition vise à permettre aux agents et officiers de police judiciaire de ne pas apparaître nominativement dans les affaires de terrorisme, mais seulement par un numéro d’immatriculation administrative. Cette disposition est très attendue par les enquêteurs pour assurer leur sécurité et celle de leurs familles. Elle semblait pourtant d’application directe, mais elle a vu sa mise en œuvre retardée par la nécessité d’en préciser le régime juridique. Il est aujourd’hui urgent que la circulaire annoncée soit transmise le plus rapidement possible aux services de police et de gendarmerie intéressés. La publication de cette circulaire est-elle prévue prochainement ?

Enfin, il manque un petit nombre de textes d’application pourtant prévus par la loi, sans que cela n’empêche pour autant la mise en œuvre des dispositions qu’ils doivent préciser. Dans le domaine de la transmission des données de connexion aux services de lutte contre le terrorisme par les opérateurs de communication électronique, le décret précisant les tarifs des réquisitions administratives ainsi que celui fixant les modalités techniques de transmission des données sont toujours attendus. Dans un souci de sécurité juridique, la publication rapide de ces décrets s’impose.

S’il est encore prématuré, et difficile compte tenu du sujet, de tirer un bilan de l’efficacité des dispositifs de la loi, il est néanmoins possible de donner un avis sur la mise en œuvre de ses principales dispositions emblématiques.

En matière de vidéosurveillance, l’adoption de la loi a eu des résultats concrets, permettant l’installation de dispositifs dans des lieux qui ne pouvaient pas en être équipés jusque-là, et autorisant l’accès direct des services de police et de gendarmerie aux images. Le rapporteur regrette simplement que la disposition permettant d’imposer la mise en place de systèmes de vidéosurveillance à des organismes susceptibles d’être menacés par le terrorisme n’ait pas fait l’objet d’application. Le Gouvernement compte-t-il utiliser prochainement la possibilité ainsi offerte par l’article 2 de la loi antiterroriste ?

Le régime juridique de la vidéosurveillance a été modernisé et semble aujourd’hui adapté : son développement repose principalement sur les moyens financiers qui seront dégagés, notamment dans le cadre du « plan national d’action de développement de la vidéoprotection » que la ministre a annoncé en novembre 2007. Où en est la mise en œuvre de ce plan ?

Le dispositif de réquisition administrative des données de connexion conservées par les opérateurs de communications électroniques, prévu à l’article 6, est pleinement applicable depuis le 2 mai 2007. Une plateforme de l’UCLAT – l’unité de coordination de la lutte antiterroriste – basée à Levallois-Perret, opère la centralisation nécessaire d’un dispositif qui satisfait aujourd’hui services utilisateurs, autorités de contrôle et opérateurs de communications électroniques. Les services de lutte contre le terrorisme disposent donc d’un outil utile pour surveiller les cellules terroristes très en amont, sans utiliser des dispositifs particulièrement intrusifs pour les libertés publiques comme les « écoutes téléphoniques ».

Les traitements automatisés des données relatives aux déplacements des voyageurs du transport aérien sont progressivement mis en place, sur une base expérimentale. Ces traitements doivent encore être perfectionnés pour devenir réellement opérationnels car ils constitueront sans doute dans les prochaines années un outil très utile dans le cadre de la prévention du terrorisme.

L’adaptation du dispositif judiciaire de lutte contre le terrorisme a répondu aux objectifs qui lui étaient assignés : améliorer le système à la marge, sans le remettre en cause. Ainsi, la centralisation de l’application des peines ou encore la possibilité de réunir une cour d’assises spécialement composée pour le jugement des mineurs accusés de terrorisme ont permis de répondre à des difficultés concrètes qui se posaient. Quant à la prolongation possible de la garde à vue en matière de terrorisme, pour vingt-quatre heures supplémentaires, renouvelable une fois, elle n’a été utilisée qu’une seule fois. En effet, les précautions prises par le législateur ont permis de donner un caractère tout à fait exceptionnel à cette mesure.

Dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, évaluer l’efficacité des moyens de prévention et de répression est une entreprise très difficile. En effet, le fait que la France n’ait pas subi d’acte terroriste d’origine étrangère sur son sol depuis 1996 ne doit pas être perçu comme le signe que le pays serait à l’abri d’une nouvelle vague d’attentats majeurs. La France reste, en effet, une cible de choix du terrorisme islamiste. C’est pourquoi le dispositif de lutte antiterroriste doit se remettre en cause en permanence afin d’essayer d’avoir toujours un temps d’avance sur les terroristes.

À ce sujet, et pour conclure, la ministre pense-t-elle que les services de lutte contre le terrorisme disposent aujourd’hui, notamment grâce à la loi examinée, des moyens juridiques nécessaires pour mener à bien leur mission ? Au-delà des moyens juridiques, disposent-ils de moyens humains et financiers suffisants ?

M. Julien Dray, co-rapporteur, rappelle que la loi du 23 janvier 2006 n’était ni une loi d’exception, ni une loi exceptionnelle. Elle n’était pas le Patriot Act mis en place par les Américains après les attentats du 11 septembre. Elle était avant tout une loi d’adaptation des différentes activités des services de sécurité visant souvent à inscrire dans la loi des pratiques qui existaient et à sécuriser les agents par rapport à ces pratiques. C’est pourquoi les députés socialistes n’avaient pas manifesté une hostilité de principe à l’égard de ce dispositif en 2005 et en 2006. Ils avaient pris acte de l’état d’esprit qui présidait à l’élaboration de cette loi, qui était d’essayer de rendre plus opératoire l’action humaine des services de renseignement et de ne pas basculer dans le tout technologique – qui a montré son inefficacité par la suite dans un certain nombre d’opérations.

Le temps est venu d’évaluer le dispositif.

Les députés socialistes s’étaient demandés à l’époque s’il convenait d’adopter certaines mesures. Les faits montrent que plusieurs d’entre elles – notamment celles concernant la garde à vue – n’ont pas été beaucoup utilisées. Il peut être avancé qu’elles ne l’ont pas été parce que les circonstances n’ont pas conduit à en avoir besoin, alors même que l’activité terroriste n’a pas baissé. Si les services n’ont pas eu besoin d’avoir recours à ces mesures, c’est parce qu’ils ont souvent travaillé en amont, dans la recherche du renseignement – ce qui est la méthode de bon sens.

Les députés socialistes avaient également mis en garde contre certains dispositifs technologiques, notamment ceux sur la connexion des fichiers. Mais les interventions de la CNIL ont permis de « cadenasser » les procédures afin de garantir les libertés publiques et le respect d’un certain nombre de principes.

Tout d’abord, est-il nécessaire de prolonger l’expérimentation pour pouvoir faire une évaluation ? On peut en douter, au regard de l’expérience.

En réalité, soit on considère que le dispositif doit être maintenu et pérennisé, en l’intégrant dans le droit commun, soit, ce qui est préférable, on examine les dispositifs un à un, sans forcément les pérenniser, comme on peut le faire d’ores et déjà pour la garde à vue.

En second lieu, la question des opérateurs téléphoniques avait donné lieu à un débat très important. Le ministre de l’intérieur de l’époque avait stigmatisé les facturations et les délais exigés par les opérateurs téléphoniques. On avait l’impression d’être dans une situation d’urgence et que le ministre allait faire ce qu’il fallait pour « mettre au pas » les opérateurs téléphoniques. Force est de constater que tout cela n’était que discours. Les décrets n’ont pas été appliqués et tout continue comme avant, à la plus grande satisfaction des opérateurs téléphoniques.

Concernant la vidéosurveillance, des dispositions ont été prises dans la loi pour contraindre à son installation, mais il y a encore des réticences. Il ne s’agit aujourd’hui plus d’un débat philosophique, mais d’une discussion sur le caractère opérationnel ou non de la vidéosurveillance. Le bilan de la région Île-de-France en la matière n’est pas aussi bon que la ministre veut bien le dire. L’expérience de la ville de Londres, souvent mise en avant, n’est pas non plus très convaincante.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, félicite les rapporteurs pour la qualité du travail effectué et se déclare convaincue de la nécessité démocratique de procéder à une évaluation des lois.

La loi faisant aujourd’hui l’objet d’un rapport d’application a, comme l’a rappelé M. Diard, un peu plus de deux ans. Elle se voulait un moyen supplémentaire contre le terrorisme. Il existait déjà un certain nombre de dispositions en ce domaine mais le renforcement de la menace impliquait l’instauration de nouveaux moyens d’action. Ainsi, l’un des fondements de notre dispositif anti-terroriste reste l’incrimination d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste qui permet d’intervenir en amont du passage à l’acte. Elle est très utilisée, contre toutes les formes de terrorisme – islamiste comme de l’ETA.

La loi comporte un nombre important d’avancées. Certaines sont pérennes. D’autres ont été prévues, comme l’a souligné M. Diard, pour une durée limitée à trois ans : les contrôles d’identité dans les trains internationaux, la communication des données de connexion ou d’identification électroniques, et l’accès à des fichiers.

Concernant l’avenir de ces dispositions temporaires, la ministre précise qu’un article de la future LOPPSI qui sera soumise au Parlement avant l’été, prévoit la prorogation pour quatre ans, jusqu’au 31 décembre 2012 des articles 3, 6 et 9 du texte de 2006.

L’ensemble des dispositions de la loi de 2006, comme celles qui concernent les interceptions de véhicules, les aggravations de peines, l’habilitation des personnels intervenant en amont des zones réservées des aéroports, ou l’anonymat des procéduriers de police ou de gendarmerie n’appelle pas de commentaire particulier, étant précisé, sur ce dernier point, que le projet de circulaire a été finalisé par la direction générale de la police nationale et la direction des affaires criminelles et des grâces et est actuellement en cours de signature.

Certaines dispositions essentielles, très concrètes, de la loi de 2006, que les rapporteurs ont largement évoquées, méritent en revanche une attention particulière.

La première est la vidéoprotection, terme préférable à celui de vidéosurveillance, car le but des caméras est bien de protéger les citoyens contre, non seulement le terrorisme, mais également un certain nombre d’actes délictueux. Pour avoir écouté des maires de toute obédience politique au cours des derniers mois, la ministre constate que, contrairement aux dires de M. Dray, l’installation de caméras entraîne une baisse automatique et sensible de la délinquance dans les zones couvertes par celles-ci. Lors des derniers attentats de Londres, il a été manifeste que l’existence de caméras a permis d’éviter des conséquences beaucoup plus graves.

En dehors de la vidéosurveillance, les autres dispositions de la loi qui appellent des commentaires sont les communications électroniques ou téléphoniques, le traitement des données nominatives des passagers aériens – et, plus généralement, des personnes signalées qui sont amenées à se déplacer – et la lecture automatisée des plaques d’immatriculation.

Ces mesures dotent la France de nouveaux instruments efficaces, d’ores et déjà en application, qu’il revient au ministre de rendre toujours plus performants. C’est pourquoi, après les avoir exposés, elle se propose de faire le point sur leur mise en œuvre et les développements qu’elle entend leur donner.

Il faut d’abord remarquer que, deux ans après l’adoption de la loi, l’essentiel des textes d’application est en vigueur.

Les articles 1 et 2 de la loi autorisent le recours à la vidéosurveillance comme outil de prévention des actes de terrorisme. Des arrêtés du 26 septembre 2006 et du 3 septembre 2007 imposent désormais des normes techniques qui permettent l’exploitation de l’image lors des enquêtes judiciaires.

La France a cependant encore beaucoup de retard, non seulement en comparaison avec d’autres pays, mais simplement au regard des besoins. C’est la raison pour laquelle la ministre veut multiplier par trois le nombre de caméras sur la voie publique, pour passer de 20 000 à 60 000, et qu’elle a parallèlement entrepris de systématiser, partout où cela est techniquement possible, le raccordement des centres de supervision des municipalités aux services de police ou de gendarmerie nationale, permettant ainsi une réaction immédiate et une interpellation dans les meilleurs délais.

Dès octobre 2007, le fonds interministériel de prévention de la délinquance a été sollicité à cette fin. Avant la fin du présent trimestre, 69 communes auront ainsi bénéficié de raccordements qui n’existaient pas avant et il y en aura 115 autres avant la fin de l’année. Au plan du soutien financier de l’État, ce ne sont pas moins de 30 millions d’euros qui viendront appuyer cette stratégie cette année.

La vidéoprotection ne concerne pas seulement les municipalités. Les transporteurs – RATP et SNCF principalement – vont accroître leur parc de caméras non seulement dans les gares et les stations mais également dans les trains, puisque des faits divers se sont malheureusement produits, montrant que la présence de caméras aurait pu sauver des vies humaines. Le développement des caméras se fera également dans les ports et les aéroports.

La ministre veillera à ce que tout cela se fasse en totale transparence et dans le souci de la protection des libertés publiques. C’est la raison pour laquelle tous les acteurs, transporteurs, collectivités locales et responsables du ministère de l’intérieur et même de la justice, se retrouvent dans différentes instances collectives, comme la commission nationale de la vidéo surveillance, ou le comité de pilotage stratégique dont la ministre a décidé la création. Sur le plan local, les préfets animent eux-mêmes ce dispositif renouvelé, avec, pour souci, l’efficacité et la protection des libertés publiques.

Au vu des résultats des premiers échanges, qui se déroulent dans un esprit partenarial et constructif, il ne semble pas que l’application coercitive prévue par l’article 2 de la loi de 2006 soit nécessaire.

Le deuxième grand domaine est celui des communications électroniques ou téléphoniques.

La ministre se déclare très attentive au problème de la cybercriminalité. C’est un enjeu fondamental dans la lutte contre le terrorisme. Les menaces récentes formulées contre la France sur des sites bien connus montrent l’actualité de cette préoccupation. Les terroristes utilisent Internet pour passer leurs messages. Ces messages peuvent avoir des effets sur des esprits faibles et les conduire à se transformer en terroristes potentiels, qu’il est difficile de repérer.

Les terroristes, qui utilisent Internet pour faire circuler des informations, ont pris depuis longtemps l’habitude de communiquer par Internet à partir de bornes Wi-fi ou de cybercafés. C’est pourquoi les articles 5 et 6 fixent les obligations de ces établissements, des opérateurs de communication électronique, et des hébergeurs de sites Internet, au bénéfice des services chargés de la lutte antiterroriste. Il est regrettable que ces obligations légales, notamment en matière de conservation d’un certain nombre de données, ne soient pas toujours respectées par ces opérateurs.

Le décret prévu à l’article 6 II bis a été présenté à la CNIL au début de l’automne. L’avis rendu par cette instance le 20 décembre contenait plusieurs observations, et les conditions de leur prise en compte doivent prochainement être décidées au cours d’une réunion interministérielle, précédant la saisine du Conseil d’État.

Les deux autres textes cités par M. Diard, du niveau de l’arrêté, sont en phase de finalisation. Ils concernent le tarif des réquisitions administratives et les modalités techniques de transmission des données par les opérateurs. Ce dernier arrêté fait l’objet de demandes de précisions du secrétariat général de la défense nationale, qui vont être prises en compte.

Mais sur le plan opérationnel, l’ensemble du texte est maintenant en application.

Ainsi, l’article 6 prévoit une structure permettant aux services de renseignement d’accéder aux données de trafic téléphonique et électronique auprès des opérateurs et des hébergeurs de sites Internet.

La plateforme UCLAT a été créée à cette fin. Opérationnelle depuis le 2 mai dernier, elle permet de traiter les demandes de transmission aux services de renseignement d’informations sur les échanges électroniques et téléphoniques. Elle est devenue rapidement un instrument incontournable pour les services de renseignement. Elle permet aujourd’hui à 551 fonctionnaires spécifiquement habilités, issus de sept directions, d’obtenir des données techniques d’identification et de connexion de la part d’opérateurs ou d’hébergeurs de sites Internet, dans un délai de 24 à 48 heures.

La procédure suivie est à la fois efficace et respectueuse des libertés individuelles. Toute demande de la part des services est validée par la « personnalité qualifiée », nommée par la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS). Cette dernière reçoit chaque semaine le bilan des demandes, et peut formuler des observations qui sont aussitôt prises en compte.

Le troisième grand domaine de la loi de 2006 est le suivi des personnes recherchées. L’article 7 de la loi permet le traitement automatique de données nominatives de passagers extérieurs à l’Union européenne. Dans l’esprit de ce texte, le fichier des passagers aériens – FPA –, interconnecté avec le fichier des personnes recherchées – FPR –, a été créé. Il recueille les données APIS – Advanced Passengers Information System – envoyées électroniquement par les compagnies aériennes.

Le fichier des passagers aériens est actuellement en cours d’expérimentation pour deux ans sur les aéroports de Roissy CDG, Orly et Marseille. Il permet de détecter en amont les passagers recherchés, et de garder une trace des voyageurs en provenance ou à destination de cinq pays sensibles : l’Afghanistan, le Pakistan, l’Iran, le Yémen et la Syrie.

Le renforcement des contrôles aux frontières aériennes est une priorité ; il devra encore être perfectionné en l’élargissant à un plus grand nombre de pays sensibles.

Il faut aussi tenir compte du fait que les personnes que les services de sécurité ont en face d’eux savent ce que ces derniers font et détectent, et vont donc essayer de contourner les mesures mises en place. Par conséquent, même si c’est techniquement difficile, il faudra, en plus d’élargir la liste des pays sur lesquels doit s’appliquer le système de contrôle, prendre en compte les vols indirects. Certaines personnes dangereuses passent, pour se rendre en Afghanistan ou au Pakistan, par la Suisse et ne figurent donc pas sur les fichiers français. La tâche n’est pas facile mais elle est indispensable pour que les services de sécurité soient efficaces.

La présidence française de l’Union européenne à partir du 1er juillet 2008 devra être mise à profit pour essayer d’accélérer l’adoption d’une décision cadre permettant aux services de sécurité français d’effectuer des croisements avec les fichiers PNR – Passenger Name Record – mis en place dans l’espace Schengen pour essayer de mutualiser les connaissances en la matière. Leur champ d’application est plus large que celui des fichiers APIS.

Un autre dispositif important est celui de la lecture automatique des plaques d’immatriculation, dit LAPI, prévu à l’article 8. L’utilisation de ce dispositif a, par exemple, permis à la Grande-Bretagne d’identifier certains réseaux terroristes. Ce système permet de comparer immédiatement l’immatriculation au fichier des véhicules volés ou signalés.

Le programme est en cours d’expérimentation, depuis un peu moins d’un an. Plus d’1,2 million de plaques ont été lues et comparées au fichier des véhicules volés, 65 véhicules mis sous surveillance ont été détectés et 76 interpellations effectuées et la ministre a voulu que ce programme soit généralisé sur l’ensemble du territoire.

Un programme d’extension du dispositif « LAPI », commun à la Police, à la Gendarmerie et aux Douanes a été lancé le 6 décembre 2007.

Le bilan de l’application de la loi de 2006 est donc satisfaisant, mais la menace oblige à aller plus loin dans la lutte contre le terrorisme. Un large plan de protection et d’action antiterroriste, à la fois global, efficace et coordonné, doit ainsi être mis en place.

Tout d’abord, le plan doit être global car protéger contre le terrorisme suppose de protéger contre tout risque d’attentat non seulement les personnes mais également tous les intérêts fondamentaux de la Nation, y compris le patrimoine économique et scientifique. Il ne faut pas oublier – d’ailleurs Al Qaida le dit très explicitement – que le but des terroristes est d’ébranler le système occidental. Les actions peuvent donc prendre des formes multiples, jusqu’à l’utilisation de découvertes par des laboratoires de haute technologie ou de recherche sur les virus, ou la neutralisation de données relatives à la communication ou à l’énergie indispensables à la nation.

Ensuite, l’action doit être efficace, c’est-à-dire apte à prévenir le danger et surtout les attentats. La réorganisation des services de renseignement, récemment engagée, est nécessaire à la pleine efficacité de ces instruments.

Enfin, l’action doit être coordonnée. Le terrorisme est, par définition, transnational. Un pays ne peut s’en protéger seul. C’est pourquoi il faut un développement de la coopération internationale dense et opérationnelle. Ce sera l’un des thèmes de la présidence française de l’Union européenne.

Tels sont les éléments de réponse qui peuvent être apportés aux questions des rapporteurs, étant précisé que l’arrêté qui fixe les tarifs des réquisitions administratives – lesquels seront identiques aux tarifs judiciaires – sera prochainement publié. Un groupe de travail, piloté par la Chancellerie et auquel la ministre de l’intérieur participe, recherche les évolutions nécessaires tout en simplifiant les règles de transmission des réponses.

M. Éric Diard, rapporteur, se déclare particulièrement satisfait de la prolongation pour quatre ans des dispositions des articles 3, 6 et 9 de la loi.

Il souhaite que les préfets soient incités à imposer l’installation de vidéosurveillance mais attire l’attention de Mme la ministre sur l’existence d’un flou concernant son financement.

Il se réjouit de l’obligation faite aux cybercafés de conserver les données de trafic. Il est, en effet, avéré que le terroriste surnommé shoe bomber a utilisé Internet dans un cybercafé avant d’essayer de commettre son attentat sur un vol entre Paris et Miami. C’est un moyen d’accès à Internet plus anonyme qu’une connexion Internet personnelle.

Il précise qu’en région PACA, la vidéoprotection a permis de faire baisser notablement la délinquance et d’élucider de nombreuses affaires.

M. Julien Dray se propose d’offrir aux membres de la commission l’étude évaluative réalisée sur la vidéosurveillance par l’IAURIF, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Île-de-France. Il indique ne pas croire que la vidéosurveillance ait fait baisser les chiffres de la délinquance. Elle est certes utile mais il faut savoir l’utiliser. Or le tout-vidéosurveillance est une fuite en avant qui, souvent, dispense du travail de terrain nécessaire.

En réponse à M. Éric Diard, rapporteur, la ministre précise que, si les préfets sont chargés d’inciter à l’installation de vidéosurveillance, ils ont également pour tâche de mettre en relation l’ensemble des partenaires concernés. Le Gouvernement apporte une aide en la matière, notamment avec le fonds interministériel de prévention de la délinquance.

Les cybercafés comme les points d’accès Wi-Fi sont des lieux importants qui méritent d’être surveillés de près.

En réponse à M. Julien Dray, co-rapporteur, la ministre précise que la ville de Saint-Jean-de-Luz n’étant pas équipée de vidéosurveillance, elle n’avait pu directement constater son efficacité, mais qu’elle se fondait sur l’analyse et aux témoignages des maires qui sont les mieux à même de savoir ce qui se passe sur leur territoire. Des maires de Seine-Saint-Denis, dont la plupart sont des amis politiques de M. Dray, lui ont dit que la diminution de la délinquance grâce à la vidéosurveillance allait jusqu’à 100 % sur les parkings et 40 % dans les autres zones.

M. Michel Hunault se félicite de cette réunion consacrée à l’examen de l’application de la loi du 23 janvier 2006 qui traite d’un sujet difficile, à savoir l’adaptation du dispositif de lutte contre le terrorisme. Il se réjouit que la ministre ait rappelé l’exigence que la lutte contre le terrorisme se déroule dans le strict respect de la légalité et des libertés publiques, équilibre qui n’est pas toujours facile à maintenir.

Il rappelle que la loi de 2006 comporte un dispositif relatif à l’extension du délit de non-justification de ressources, qui concerne le financement même du terrorisme. Or, si la loi de 1996 contre le blanchiment de l’argent a été votée en application d’une convention de 1990 du Conseil de l’Europe, qui a été réactualisée en 2002, la France n’a toujours pas transposé la troisième directive de l’Union européenne de 2005 ni ratifié la convention du Conseil de l’Europe de 2005 contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Quand va-t-elle y procéder ?

Enfin, un débat difficile a eu lieu à l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe lors de la dernière session, il y a dix jours, sur l’établissement d’une liste noire des organisations terroristes. Quelle suite le Gouvernement entend-il donner à la recommandation du Conseil de l’Europe à ce sujet, sachant que la liste concerne certaines organisations situées en France ?

M. Philippe Goujon se félicite également de cette réunion consacrée à l’examen de la loi du 23 janvier 2006. Nul ne doute aujourd’hui que la France soit dotée d’un dispositif efficace de prévention du terrorisme – rendu encore plus performant par la loi de 2006 – , et respectueux des droits fondamentaux.

Le régime juridique de la vidéosurveillance, aujourd’hui modernisé et adapté, concilie bien la défense des libertés et la prévention du terrorisme. Estimant que la préconisation du rapport tendant à ce que les préfets imposent la vidéosurveillance aux gestionnaires d’équipements confrontés à des risques terroristes doit être approuvé, il se déclare étonné de la réaction de M. Dray, avec lequel il a travaillé sur ces sujets à la région, et qui n’a pas hésité à recourir à des dispositifs de vidéoprotection, notamment dans les transports. D’ailleurs, le président de la région Île-de-France s’est déclaré très favorable à leur développement. Quant à l’étude de l’IAURIF, examinée par l’Observatoire national de la délinquance, c’est la mauvaise exploitation de la vidéoprotection – qui est de la responsabilité de ses utilisateurs – qu’elle met en cause.

Il est donc indispensable que le système de vidéosurveillance retenu soit bien adapté et que les personnels qui l’utilisent soient formés en conséquence. Près de 300 villes en France en sont équipées et la baisse de la délinquance constatée montre qu’elle a eu un incontestable impact, même si elle n’en constitue pas le seul facteur. Personne n’a jamais prétendu que ce type de dispositif était destiné à remplacer toute forme de protection humaine. Mais, dans les zones sensibles, les lieux de forte fréquentation ou de grands rassemblements comme les abords des gares et les lieux touristiques, il a démontré son utilité aussi bien pour le contrôle de la délinquance que pour la lutte antiterroriste. Il est également efficace dans les transports en sous-sol. Si le SRPT – le service régional de la police des transports – a enregistré une baisse de près de 12 % de la délinquance en 2007 dans le réseau souterrain d’Île-de-France, c’est en grande partie grâce à lui. Le week-end dernier, un SDF est malheureusement décédé en tombant sur la voie d’une station de métro parisien. C’est grâce aux caméras installées sur le quai que la police a pu identifier les conditions dans lesquelles s’était produit cet évènement.

Rappelant qu’à Londres, ce sont quelque 65 000 caméras qui sont reliées à Scotland Yard alors qu’à Paris, il n’y en a aucune qui le soient pour des raisons de sécurité, M. Philippe Goujon demande où en est le développement de la vidéoprotection dans la capitale et quelle est la contribution de la mairie de Paris en la matière.

M. Jacques Alain Bénisti reconnaît l’intérêt de la vidéosurveillance mais met en garde contre la tentation d’en faire une panacée. Il considère qu’elle n’est qu’un des éléments de la prévention de la délinquance parmi tous ceux prévus, par exemple, dans la loi relative à la prévention de la délinquance.

Il fait ensuite observer que placer des dispositifs de vidéosurveillance dans les cités sensibles, par exemple, est d’une utilité limitée car la plupart des faits délictueux ont lieu à l’extérieur, notamment en centre ville.

Cela étant, et même s’il n’est pas possible, faute de recul, d’établir un constat définitif, les résultats de la vidéosurveillance sont très concluants. Ainsi, les quatre caméras installées dans la ville dont M. Bénisti est le maire ont permis d’arrêter une dizaine de délinquants qu’il aurait été impossible de prendre sur le fait sans ce dispositif.

Trois avantages peuvent être retirés des installations de vidéosurveillance.

Le premier est la rapidité d’intervention des forces de police, puisque celle-ci peut être immédiatement alertée lorsque les images font l’objet d’un visionnage en direct.

Le deuxième avantage est l’aide considérable apportée à l’élucidation des actes délictueux, même lorsque le dispositif se borne à un enregistrement d’images dont le visionnage est différé.

Le troisième avantage est le sentiment de sécurité ressenti par les citoyens dans les zones surveillées par des caméras.

Les seuls mécontents sont donc les délinquants qui se trouvent démunis face à cette nouvelle forme d’élucidation des affaires par vidéo.

En réponse, la ministre apporte les précisions suivantes :

- Les textes mentionnés par M. Hunault relèvent de la Chancellerie et non du ministère de l’intérieur, qui ne peut donc donner aucune information les concernant.

- La « liste noire » liée au terrorisme fait l’objet de nombreuses contestations car elle a été élaborée par les États-unis – y figurer entraîne l’interdiction de s’y rendre – et est extrêmement large.

Cette liste, en elle-même, ne donne pas lieu à l’application de mesures particulières par la France. Néanmoins, il est évident que les services de sécurité suivent les personnes qui peuvent présenter un danger, utilisant également pour cela le système des visas délivrés par nos consulats dans les pays à risque. Ce qui est important, c’est de contrôler les personnes en fonction de leur dangerosité potentielle plutôt que de leur appartenance à une structure, surtout si cette dernière n’a pas d’implantation en France.

- Pour que la vidéoprotection soit efficace, il faut qu’elle soit d’une certaine qualité. C’est pourquoi l’effort doit porter non seulement sur le nombre de caméras mais aussi sur la qualité de l’image. Dans le cas de l’accident dramatique dont a été victime cet été un journaliste italien, le film tiré du système de vidéosurveillance était inexploitable du fait de la vétusté des caméras et il n’a pas permis de retrouver les coupables.

Le développement de la vidéoprotection – auquel la ministre se déclare attachée et pour lequel elle a mis des structures en place – doit impérativement s’effectuer dans le respect des libertés publiques et individuelles. Les groupes terroristes n’attendent que le moment où les gouvernements porteront atteinte aux droits individuels, et il faut veiller à ce que la recherche de protection ne se retourne pas contre les peuples, comme la ministre a eu l’occasion de l’affirmer à plusieurs reprises à des chefs d’État ou de gouvernement étrangers.

- Au-delà du triplement du nombre de caméras prévu sur l’ensemble de la France, il est envisagé à Paris un « plan 1000 » : la préfecture de police – donc le ministère de l’intérieur – installera sur la voie publique mille caméras, soit un peu plus de trois fois le dispositif existant accessible aux services de sécurité. Pour y parvenir, un partenariat public-privé sera mis en place. Cela s’ajoutera aux efforts particuliers qui sont faits notamment par la RATP et la SNCF. Parallèlement, il est prévu d’ouvrir aux services de sécurité l’accès à 150 caméras privées implantées sur un certain nombre de lieux stratégiques.

- Il n’est, bien entendu, pas question que la vidéosurveillance remplace les autres moyens de protection contre le terrorisme. C’est un moyen supplémentaire, qui s’ajoute au renseignement – élément fondamental puisque qu’il permet de repousser les risques – et au contrôle aux frontières – qui suppose des croisements de fichiers et une présence humaine très importante. Si la vidéoprotection est une aide à la réactivité en même temps qu’un élément de dissuasion, il est évident qu’elle ne remplace en rien une présence sur le terrain, que la ministre s’emploie également à renforcer comme le montre le plan qu’elle a développé en Seine-Saint-Denis et qui a vocation à être élargi à d’autres départements.

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La Commission a examiné, sur le rapport de M. Guy Geoffroy, rapporteur de la délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne, la proposition de résolution de M. Guy Geoffroy sur la proposition de directive prévoyant des sanctions à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (E3534) (n° 612).

M. Guy Geoffroy, rapporteur, a rappelé que la commission des Lois était saisie, en application de l’article 88-4 de la Constitution, d’une proposition de résolution adoptée, à son initiative, par la Délégation pour l’Union européenne à l’unanimité le 16 janvier 2008 et dont l’objet est d’exprimer la position de l’Assemblée nationale sur cette importante directive, qui vise à harmoniser les sanctions administratives et pénales mises en œuvre par les États membres de l’Union européenne à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

Il a souligné l’importance des enjeux entourant ce projet de texte communautaire, à la veille de la présidence française de l’Union qui a fait de l’immigration une de ses priorités. Ces enjeux justifient pleinement que l’Assemblée nationale se prononce sur ce texte et fournisse un appui au Gouvernement dans les négociations en cours à Bruxelles.

Cette directive doit permettre de donner à l’Union européenne les moyens de mieux lutter contre l’emploi de travailleurs irréguliers et d’ainsi franchir une étape dans la lutte contre l’immigration illégale dans l’Union : la possibilité de trouver du travail dans un des pays membres constitue en effet un facteur encourageant l’immigration clandestine.

Le rapporteur a rappelé que la France concentre avec l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne et la Grande-Bretagne 80% des flux migratoires au sein de l’UE. Notre pays, qui dispose d’un arsenal législatif très complet en la matière a un intérêt prioritaire à l’élaboration d’une politique cohérente de l’immigration au sein de l’Union.

Le rapporteur a ensuite présenté la proposition de résolution adoptée par la Délégation pour l’Union européenne.

Il a tout d’abord indiqué qu’il fallait se féliciter de l’initiative prise par la Commission européenne, l’Europe ayant en la matière une réelle valeur ajoutée : une action coordonnée des différents États membres est nécessaire pour réduire les disparités entre les législations et entre les mesures d’exécution et ainsi neutraliser l’avantage économique conféré par l’emploi illégal, qui fausse la concurrence.

À titre préventif, la proposition de directive prévoit l’obligation pour l’employeur de vérifier, avant de les recruter, que les ressortissants des pays tiers disposent d’un titre de séjour ou d’une autorisation équivalente valable pour la période d’emploi concernée.

Le deuxième volet de la proposition de directive, de nature répressive, prévoit des sanctions administratives et financières, mais aussi pénales, qui sont réservées aux cas les plus graves.

Le texte prévoit en outre l’obligation de créer des mécanismes de réclamation efficaces permettant aux salariés de faire valoir leurs droits contre l’employeur, ainsi que l’obligation, pour les États membres, de réaliser un nombre minimum d’inspections dans les sociétés établies sur leur territoire.

Pour autant, le rapporteur a déploré que le texte n’aille pas assez loin, et a présenté les pistes d’amélioration contenues dans sa proposition de résolution. S’agissant tout d’abord du champ de la directive, il a regretté qu’il soit limité aux employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et a souhaité le voir élargi aux employeurs de ressortissants présents régulièrement sur le territoire de l’Union, mais qui ne sont pas autorisés à exercer une activité professionnelle et qui travaillent en violation de leur statut de résident.

Il a par ailleurs plaidé pour que soient apportées des améliorations de nature plus technique au texte, d’une part, pour prévoir une rédaction plus claire et plus précise des incriminations pénales, et, d’autre part, pour que soit revu l’objectif, manifestement irréaliste, fixé par la Commission européenne que 10% des sociétés soient contrôlées chaque année par les États membres. Il a plaidé pour son remplacement par un objectif annuel d’accroissement du nombre des contrôles effectués.

Puis la Commission passée à l’examen de l’article unique de la proposition de résolution qu’elle a adopté sans modification.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

—  M. Jacques-Alain Bénisti, rapporteur d’application de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique ;

—  M. Michel Piron, rapporteur et M. Bernard Derosier, co-rapporteur d’application de la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale ;

—  M. Guy Geoffroy, rapporteur, et M. Christophe Caresche, co-rapporteur d’application de la loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs.

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