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Commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire

Mercredi 21 mai 2008

Séance de 10 heures 15

Compte rendu n° 52

Présidence de M. Patrick Ollier Président

– Suite de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie (n° 842) (M. Jean-Paul Charié, rapporteur)

La commission a poursuivi, sur le rapport de M. Jean-Paul Charié, l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie (n° 842).

Après avoir regretté la configuration de la salle de réunion, peu propice aux échanges de points de vue entre les commissaires, M. François Brottes a signalé au président l’existence de dispositions susceptibles de porter atteinte au droit d’amendement dans le projet de loi constitutionnelle relatif à la modernisation des institutions de la Vème République, notamment à son article 18. Il a souligné que la commission des affaires économiques était, par l’étendue de son champ de compétences, la commission de la vie quotidienne et de ce fait amenée, peut-être plus que d’autres, à enrichir les textes par voie d’amendement. Il a en conséquence souhaité que le Président de la commission soit vigilant à ce qu’aucune disposition du projet de loi constitutionnelle ne soit susceptible de porter préjudice au travail parlementaire.

Le président Patrick Ollier a indiqué qu’il n’avait pas la maîtrise directe de la configuration de cette salle et qu’il saisirait le Bureau de l’Assemblée Nationale de ce problème.

Il a souligné, par ailleurs, que la majorité ne souhaitait pas remettre en cause le droit d’amendement et était, de ce point de vue, en accord avec l’opposition. Il a ajouté avoir donné satisfaction à la demande de M. François Brottes concernant un meilleur accès des membres de la commission aux documents communautaires. La directive « services » figurera en annexe du rapport sur le projet de loi de modernisation de l’économie, tandis que la mise en demeure et l’avis motivé adressés à la France par la Commission européenne, relatifs à la législation sur l’équipement commercial, pourront être consultés au secrétariat de la commission.

La commission a désigné M. Jean-Claude Lenoir rapporteur sur la proposition de résolution de M. André Schneider sur le troisième paquet de libéralisation du marché de l’énergie (n° 887).

Elle a ensuite repris, sur le rapport de M. Jean-Paul Charié, l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie (n°842).

Titre II

MOBILISER LA CONCURRENCE COMME NOUVEAU LEVIER DE CROISSANCE

Chapitre Ier : Négociation des conditions générales de vente

Article additionnel avant l’article 21 : Action de groupe

La commission a examiné conjointement un amendement du rapporteur, un amendement de M. Jean Gaubert, un amendement de M. Jean Dionis du Séjour et un amendement de M. Daniel Paul introduisant l’action de groupe en droit français.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur, a souligné que l’action de groupe doit permettre d’améliorer sensiblement la prise en charge des intérêts individuels des consommateurs victimes de pratiques commerciales illicites ou abusives contre lesquelles ils renoncent le plus souvent à exercer une action individuelle eu égard au faible montant d’un grand nombre de litiges de consommation. Cette innovation est donc de nature à garantir une meilleure effectivité de la loi. Il convient toutefois d’en encadrer strictement l’exercice afin d’éviter les dérives que l’on connaît outre-Atlantique.

M. Jean Gaubert a précisé qu’il poursuivait le même objectif que celui du rapporteur. Il a souligné que le consommateur est généralement démuni face aux petites « arnaques » et qu’il était donc indispensable de lui donner la possibilité effective de s’organiser et d’ester en justice. Il a indiqué que l’amendement présenté par les membres du groupe SRC permettait de limiter les dérives en instaurant un examen de recevabilité des demandes et en réservant cette action aux seules associations faisant la preuve de leur existence réelle et sérieuse depuis au moins cinq ans.

M. Daniel Paul a souligné que son amendement s’inscrivait dans la même logique. Il a indiqué que son contenu reprenait, pour l’essentiel, le contenu d’une proposition de loi déposée il y a quelques mois au nom du groupe GDR par M. Jacques Desallangre, laquelle n’a pas été examinée par la commission. Il s’est félicité de l’unanimité qui se manifeste aujourd’hui sur le principe de la création de l’action de groupe, bien qu’il soit nécessaire de se pencher sur ses modalités de mise en œuvre, et du fait qu’un débat parlementaire allait pouvoir s’engager sur ce sujet.

Le rapporteur a estimé qu’il y avait des différences importantes entre les différents amendements, même si tous leurs auteurs s’accordaient sur la nécessité d’introduire l’action de groupe dans le droit français. Il a souligné la nécessité de limiter les dérives de cette procédure, notamment pour éviter tout retour en arrière par la suite. Il a jugé inopportun d’étendre, comme le fait l’amendement présenté par M. Gaubert, le champ de l’action de groupe à la santé et à l’environnement, au moins dans un premier temps. Il a estimé en outre que l’amendement présenté par M. Daniel Paul n’instaurait pas vraiment de limites à l’action de groupe, alors qu’il serait prudent de la cantonner au domaine économique et financier et de la réserver aux seules associations agréées.

M. François Brottes a souligné que la santé ne devait pas être exclue du champ de l’action de groupe, dans la mesure notamment où le Gouvernement favorise actuellement l’automédication. Il s’est déclaré dubitatif sur l’effectivité et la portée de l’amendement du rapporteur. Celui-ci ne prévoit en effet qu’une réparation forfaitaire, alors que les préjudices peuvent être d’importance variable, et exige, pour que l’action soit recevable, des conditions cumulatives très difficiles à réunir, telles la preuve de l’existence d’un lien de causalité, ou le caractère matériel du préjudice, alors que ce dernier peut revêtir plusieurs formes différentes. Il a donc considéré que la proposition du rapporteur instaurait une action de groupe risquant d’être dénuée de toute véritable portée.

M. Daniel Paul s’est élevé contre la présentation faussée par le rapporteur de l’amendement du groupe GDR. Il a précisé que cet amendement prévoit certes la possibilité pour une personne physique seule d’engager une action de groupe mais à condition qu’elle le fasse au nom d’un ensemble des personnes soumises à des litiges identiques. Si ces conditions d’engagement de l’action de groupe sont plus souples que celles prévues par l’amendement du rapporteur, il est excessif d’évoquer une absence de limites.

Le président Patrick Ollier et le rapporteur ont souligné, en réponse aux intervenants, le souci d’équilibre auquel obéit l’amendement de ce dernier.

La commission a adopté cet amendement, rendant sans objet les amendements de MM. Jean Gaubert, Jean Dionis du Séjour et Daniel Paul.

Avant l’article 21

M. Lionel Tardy a retiré un amendement portant article additionnel visant à introduire dans le code de la consommation une liste de clauses abusives.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission a rejeté un amendement identique de M. Jean Dionis du Séjour.

Puis M. Lionel Tardy a retiré un amendement permettant au juge d’ordonner sous astreinte la suppression d’une clause jugée abusive dans tous les modèles de contrat.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission a rejeté un amendement identique de M. Jean Dionis du Séjour.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Lionel Tardy instaurant une procédure de saisine de la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) par les associations de consommateurs afin de sanctionner les pratiques illicites et abusives.

Tout en admettant l’importance du problème soulevé par l’amendement, le rapporteur a estimé que cette disposition relevait du domaine réglementaire en indiquant que de telles pratiques peuvent, d’ores et déjà, être portées à la connaissance des services de la DGCCRF.

Le président Patrick Ollier a suggéré à M. Tardy de faire préciser par le gouvernement l’état du droit en ce domaine lors de l’examen du texte en séance publique.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté cet amendement de M. Tardy ainsi qu’un amendement identique de M. Jean Dionis du Séjour.

Conformément à l’avis du rapporteur, la commission a également rejeté deux amendements de M. Daniel Paul :

– le premier abrogeant la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs ;

– le second prévoyant la présentation par la commission, avant le 31 décembre 2008, d’un rapport d’évaluation sur les conséquences de cette loi en termes d’évolution des prix dans la grande distribution et de rémunération des fournisseurs des supermarchés et des hypermarchés.

Article 21 (articles L. 441-6, L. 441-7 et L. 441-2-1 du code de commerce) : Assouplissement des possibilités de différenciation tarifaire ; allégement du formalisme des contrats ; exigence de contreparties à la négociation tarifaire portant sur les produits agricoles périssables

La commission a examiné conjointement cinq amendements :

– un amendement de M. André Chassaigne, supprimant les trois premiers alinéas de l’article 21, qui prévoient que les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de prestations de services, et qui disposent en outre que tout producteur peut convenir avec un acheteur de conditions particulières de vente ;

– un amendement du même auteur, substituant aux alinéas précités, un dispositif prévoyant que les opérations de mise en tête de gondole, promotions des enseignes, référencement et autre service commercial relèvent du distributeur et ne peuvent faire l’objet d’aucune contrepartie financière de la part du fournisseur ;

– un amendement rédactionnel du rapporteur ;

– un amendement de M. Lionel Tardy, complétant la définition des conditions particulières de vente en précisant que l’octroi d’avantages supplémentaires dans le cadre des conditions particulières de vente doit se justifier par une contrepartie de la part du client ;

– et un amendement du rapporteur, permettant la prestation de services de coopération commerciale entre professionnels, et non plus seulement entre un professionnel et un consommateur non professionnel.

Le rapporteur a fait une présentation générale de l’article 21 et de ses amendements. S’agissant de la notion de discrimination, il ne peut y avoir de commerce sans différence tarifaire. C’est pourquoi le Gouvernement réintroduit la négociabilité à l’article 21 du projet de loi. On peut négocier les conditions générales de vente, à la condition expresse que cette négociation n’obéisse pas à la loi de la jungle, mais repose sur la loyauté, la conformité au bon sens économique, et des engagements qui soient réciproques. Le dispositif prévu par le projet de loi est fondé sur une convention unique, et ne devra pas créer de déséquilibres significatifs. Il faudra sanctionner tout ce qui fait augmenter indûment les tarifs.

Se déclarant favorable à une vraie concurrence, le rapporteur considère comme normal qu’il y ait des différences au bénéfice d’un client qui paie plus tôt, ou encore d’un client qui augmente le volume de sa commande, car cela est intéressant pour le fournisseur.

Il existe trois manières d’obtenir des avantages : les baisses, sous forme de rabais, ristournes, ou remises ; les services distincts ; la coopération commerciale.

L’objectif consiste avec cette convention à rassembler les trois éléments dans une seule et même négociation. La convention pourra bien entendu être modifiée en cours d’année, par exemple, si le client accroît substantiellement le volume de sa commande. Si un déséquilibre significatif est créé entre les engagements des parties, il donnera lieu à sanction.

Le rapporteur s’est également déclaré favorable à la coopération commerciale, fort utile aux petites entreprises puisqu’elle leur permet de faire de la publicité sur le lieu de vente alors qu’elles ne sont pas à même de le faire à la télévision et qu’elles peuvent ainsi mieux promouvoir de nouveaux produits et mieux réagir face à la concurrence. Cette coopération figurera dans la convention et continuera à être facturée par le distributeur. En revanche, les services distincts figureront uniquement sur la facture du fournisseur.

Cet ensemble de pratiques ne saurait entraîner de déséquilibres en termes de droits et devoirs entre les parties, lesquelles seraient sanctionnées quelle que soit la dépendance économique d’un cocontractant par rapport à l’autre.

Quatre mesures sont prévues pour assurer l’effectivité de la procédure de sanction favorisée en outre par la simplification du dispositif législatif : la spécialisation des tribunaux en droit de la concurrence ; l’augmentation des amendes civiles ; le maintien de l’auto-saisine de la capacité pour le ministre de l’économie de saisir le juge pour demander la nullité des clauses, le versement d’une amende ou la répétition de l’indu ; le renforcement de la capacité des commissaires aux comptes à révéler les pratiques délictueuses.

Le rapporteur a enfin insisté sur l’importance de son amendement prévoyant que la convention devait mentionner les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix convenu à l’issue de la négociation commerciale. L’équilibre est ainsi garanti sans recours au système des contreparties ligne à ligne.

M. Jean Gaubert a souligné que cette loi allait encore être un texte inachevé, et qu’on en n’avait pas terminé avec les marges arrière. Le système proposé ne contribuera pas totalement à une vérité sur les prix et ne s’attaque notamment pas à l’arnaque au référencement. Ce dernier ne devrait pas donner lieu à des contreparties financières. Il convient en revanche de se féliciter de l’augmentation des amendes et de la spécialisation de juridictions.

M. Michel Piron s’est également félicité de cette spécialisation et considéré que la négociabilité ne doit pas se traduire par une absence de lisibilité, ce qui l’a conduit à présenter avec M. Michel Raison des amendements précisant que les contreparties à la négociation doivent être vérifiables.

M. Jean-Marie Sermier a souligné qu’il n’existait pas d’équilibre entre la multitude des entreprises agroalimentaires et les six centrales d’achat. Aucune entreprise ne peut se permettre d’être déréférencée. Il faudrait dépasser le niveau des entreprises pour effectuer des contrôles : il serait souhaitable de mettre en place des contrôles inopinés de l’Etat, permettant de s’assurer que l’on a affaire à une négociation commerciale claire et digne de confiance.

M. Daniel Fasquelle a considéré que la libre négociabilité doit être approuvée dans la mesure où l’instauration d’une concurrence par les prix sera tout à fait bénéfique aux consommateurs mais qu’elle implique des obligations réciproques et un encadrement des conventions à même de garantir la réalité des contreparties. En ce qui concerne le régime des sanctions, il importe de distinguer ce qu’il appartient à la victime de demander, c’est-à-dire la réparation du préjudice, de ce qui relève du ministère public, c’est-à-dire requérir les amendes prévues par la loi. Il reste au droit à évoluer sur la question du niveau des amendes, qui doit être soulevée. La spécialisation des juridictions dans les domaines de la consommation et de la concurrence constitue un progrès appréciable.

Mme Catherine Vautrin a estimé que les conditions générales de vente doivent conserver leur fonction de socle de la négociation, de façon à favoriser l’équilibre des obligations contractuelles. Il sera nécessaire de préciser les modalités de vérification des engagements de chacun.

Le rapporteur a rejeté l’idée que l’ensemble des marges arrière soit proscrit. En effet, une petite proportion de la coopération commerciale correspond à un véritable service. En revanche, il est certain que la restauration de la concurrence et la disparition de la fausse coopération commerciale ne manqueront pas de profiter aux petits commerçants. Le terme de négociabilité ne comporte aucune connotation négative : équilibre global, elle consiste simplement en la réciprocité d’éléments suffisamment vérifiables pour que le juge, saisi par le ministère public en cas de suspicion, puisse en apprécier la réalité. La loi opère le choix de l’efficacité économique en lieu et place d’une sécurité juridique dont l’expérience démontre le caractère illusoire face à l’inventivité des juristes. L’instauration de cet équilibre global recueille l’aval de l’ensemble des intervenants du secteur commercial.

La commission a rejeté deux amendements de M. André Chassaigne, le premier maintenant la législation en vigueur en matière de négociations commerciales et le second interdisant que les campagnes promotionnelles du distributeur puissent donner lieu à des contreparties financières de la part du fournisseur.

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

Elle a rejeté un amendement de M. Lionel Tardy prévoyant que le recours à des conditions particulières de vente doit être justifié par des contreparties, le rapporteur ayant précisé que l’un de ses amendements, examiné ultérieurement, répond à la préoccupation de son auteur.

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur autorisant la prestation de services de coopération commerciale entre professionnels et non plus seulement entre un professionnel au consommateur.

M. Lionel Tardy a demandé au rapporteur des précisions sur la question de la contraction des factures et sur la lisibilité des échanges croisés.

M. Michel Raison a souhaité une cohérence entre le projet de loi et les dispositions du code de commerce relatives à la facturation.

Le rapporteur a indiqué que l’ensemble des services distincts devront à l’avenir être facturés par le fournisseur sous forme de réduction de prix, les services distincts n’étant pas détachables, en pratique, de l’opération d’achat vente. Il n’y a donc pas de contradiction, en droit, entre les règles de facturation et la définition des services distincts.

M. François Brottes a jugé nécessaire le maintien de la distinction entre rabais et ristournes, d’une part, et services faisant l’objet de prestations effectives, d’autre part.

M. Michel Raison a souligné la nécessité de sérier les différentes causes de réduction du montant facturé.

Le président Patrick Ollier a rappelé que les dispositions du projet de loi constituent un tout cohérent, l’aboutissement d’un long travail de coproduction législative entre le Gouvernement et sa majorité. Altérer significativement un article risquerait de prévenir la bonne mise en œuvre des dispositions ainsi élaborées. La navette parlementaire seule permettra d’apporter en toute connaissance de cause les modifications nécessaires et utiles.

Mme Fabienne Labrette-Ménager a jugé le projet de loi tout à fait adapté en l’état : les petits fournisseurs ne pouvant intervenir dans la négociation par les volumes, il est normal de ménager une autre voie, notamment celle des services.

M. Jean Gaubert s’est au contraire inquiété d’un rassemblement sous la même étiquette légale de comportements concernant des acteurs différents ; il a réaffirmé les interrogations formulées, notamment sur le plan fiscal, quant aux requalifications et aux contractions de facture.

Mme Laure de la Raudière a déclaré qu’elle approuvait la rédaction actuelle, qui distingue ce qui est directement lié à la vente, et doit figurer sur la facture du fournisseur, de ce qui n’y est pas directement rattaché, et doit faire l’objet d’une facturation distincte.

Mme Catherine Vautrin a souligné l’intérêt de la démarche globale du rapporteur, notamment parce qu’elle fait figurer tout le plan d’assaire sur une convention unique, M. François Brottes faisant remarquer que le distributeur devrait supporter le coût de ces services d’animation commerciale.

M. Lionel Tardy a estimé que le problème rencontré était avant tout de nature juridique et qu’était posée la question de la TVA applicable, celle de la catégorisation des services dans le plan d’affaires et enfin celle des normes comptables.

Le rapporteur a insisté sur la nécessité d’assurer un vrai équilibre entre les parties, ce qui correspond au simple bon sens économique et sur le fait que tous les éléments doivent être mentionnés dans la facture. Une distinction claire doit être opérée entre le service rendu par le revendeur à son fournisseur non visible du client et non lié à la revente, et le service rendu par le distributeur à l’occasion de la revente. Seuls les services distincts sont remontés dans la facture du fournisseur. Pour la coopération commerciale – les « têtes de gondole » par exemple, la publicité sur le lieu de vente – elle reste facturée par le client, et imposée au taux de TVA applicable aux services. En toute hypothèse, il faut insister sur deux données : tout sera mentionné sur la même convention globale ; les actions de coopération commerciale figureront sur la facture du revendeur. Le projet de loi répond aux préoccupations exprimées.

Après les interventions du président Patrick Ollier, de M. Jean Gaubert et du rapporteur, la commission a successivement rejeté ;

– un amendement de M. Jean Dionis du Séjour complétant cet alinéa par une référence expresse aux obligations convenues en vu de favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur et supprimant l’obligation de faire figurer les services distincts sur la facture du fournisseur ;

– un amendement de M. Michel Raison prévoyant que la contrepartie financière des services distincts ne peut figurer sur la facture du fournisseur que si elle répond aux règles prévues à l’article L. 441-3 du code du commerce ;

– un amendement de M. Daniel Fasquelle prévoyant que la convention entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services doit indiquer les contreparties aux avantages tarifaires consentis.

M. Michel Raison a ensuite retiré un amendement précisant que la convention indique les contreparties substantielles et vérifiables aux avantages consentis. Il a salué le travail du rapporteur et indiqué son souhait de co-signer son amendement qui poursuit le même objectif, et qui était indispensable à l’équilibre du texte. Il a fait part de son souhait que puissent être trouvées des solutions pour que la relation commerciale avec la grande distribution puisse devenir un véritable plan d’affaire donnant de la visibilité au fournisseur et lui permettant de planifier ses investissements.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Michel Raison précisant que la convention doit indiquer les contreparties, substantielles et vérifiables, aux avantages consentis ainsi qu’un amendement de M. Jean Proriol, ayant un objet similaire,

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur, cosigné par MM. Patrick Ollier, président, Michel Raison, Michel Piron, François Loos, Mme Arlette Franco, MM. Jacques Le Guen, Antoine Herth, Claude Gatignol, Jean Proriol, Bernard Gérard, Jean-Marie Morisset, Jean-Pierre Decool, Alain Suguenot, Mme Marie-Louise Fort, MM. Lionnel Luca, Mmes Françoise Branget, Catherine Vautrin, MM. Lionel Tardy, Louis Cosyns, Jean Dionis du Séjour, Mme Fabienne Labrette-Ménager, MM. Philippe Meunier, Didier Gonzales, Christian Jacob, Yves Albarello, Jean-Claude Lenoir, Alain Gest, Bernard Reynès, Serge Poignant et Yanick Paternotte précisant que la convention unique indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix convenu à l’issue de la négociation commerciale.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Lionel Tardy ouvrant la possibilité que la convention unique ou le contrat-cadre annuel puisse être conclu à une autre date que le 1er mars.

Le rapporteur a fait remarquer que cette possibilité existait d’ores et déjà dans le cadre de la législation en vigueur, pour les relations commerciales nouées en cours d’année, et que le projet de loi élargissait cette faculté aux produits saisonniers.

M. Christian Jacob a fait observer que la date du 1er mars représentait un avantage pour la grande distribution, analyse récusée par le rapporteur qui a indiqué que cette date butoir limitait le risque pour un fournisseur de se voir imposer une relation commerciale en dehors de tout cadre contractuel.

M. Yanick Paternotte a indiqué partager la préoccupation de M. Lionel Tardy et a fait part de son scepticisme quant à la rédaction de cette disposition du projet de loi.

Le président Patrick Ollier a indiqué que le problème soulevé par l’amendement de M. Lionel Tardy pourrait utilement faire l’objet d’une demande de précision au Gouvernement lors de l’examen du texte en séance publique.

M. Lionel Tardy a retiré son amendement.

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

La commission a examiné un amendement de M. Lionel Tardy exonérant du contrat unique les relations commerciales de faible importance. Le rapporteur ayant fait valoir qu’il convenait d’assurer le même niveau de protection juridique aux petites et aux grandes entreprises, l’amendement a été retiré.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Dionis du Séjour visant à garantir l’abandon du « ligne à ligne »  pour les éléments justifiant la différentiation tarifaire.

Elle a examiné un amendement de M. Louis Cosyns incluant, parmi les produits agricoles bénéficiant d’un statut particulier, les produits transformés ayant la qualité d’appellation d’origine contrôlée (AOC) ou d’indication géographique protégée (IGP), afin, selon son auteur, d’améliorer la protection des fleurons de la gastronomie française. Le rapporteur ayant rappelé que le projet de loi tenait compte des particularités des produits frais périssables et estimé que l’amendement pourrait faciliter le comportement d’acheteurs indélicats qui souhaiteraient échapper à la conclusion d’un contrat, et Mme Laure de la Raudière, prenant l’exemple de la pomme de terre, ayant souhaité que l’on précise la définition de ces produits, l’amendement a été retiré.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. André Chassaigne supprimant la dérogation à l’interdiction de la revente à perte prévue par les dispositions de l’article L. 442-4 du code de commerce, connue sous le nom d’exception d’alignement.

Un amendement de M. Christian Jacob réduisant à quinze jours le délai de paiement des produits frais a été retiré.

Puis, la commission a rejeté un amendement de M. André Chassaigne étendant le mécanisme du coefficient multiplicateur entre prix d’achat et prix de vente des produits frais périssables.

Elle a également rejeté un amendement de M. Jean Dionis du Séjour fixant au 1er janvier 2009 la date d’entrée en vigueur de la réforme de la négociabilité des tarifs.

La commission a alors adopté l’article 21 ainsi modifié.

Après l’article 21

Un amendement de M. Christian Jacob donnant à l’administration et au juge la possibilité de sanctionner les conditions générales d’achat abusives a été retiré.

Article additionnel après l’article 21 : Nullité des clauses interdisant à un commerçant membre d’un réseau de revendre son commerce en dehors de ce réseau

La commission a ensuite examiné un amendement du même auteur prévoyant qu’est nulle toute clause contractuelle par laquelle une société tête de réseau de commerçants interdit à ces derniers de revendre leur magasin à un concurrent.

Le rapporteur a déclaré partager la préoccupation de l’auteur de l’amendement mais s’est interrogé sur les difficultés qui pourraient en résulter en raison de son caractère très général.

Mme Fabienne Labrette-Ménager a souligné la tendance actuelle à la multiplication des monopoles commerciaux, par exemple dans le secteur des farines.

M. Michel Piron ayant souligné la qualité et la pertinence de l’amendement, M. Jean Gaubert s’est déclaré favorable, bien qu’il ne réglait pas tous les aspects d’une question complexe, et indiqué qu’il convenait de rendre plus souples les changements d’enseignes des commerçants de détail.

Le président Patrick Ollier a estimé que l’amendement pourrait certes être rectifié mais que, d’ores et déjà, il favorisait la suppression de certains carcans en faveur de la liberté du commerce.

La commission a adopté l’amendement.

Article 22 (articles L. 442-6 du code de commerce) : Abrogation de l’interdiction de discrimination. Renforcement de l’effectivité des sanctions civiles des pratiques restrictives de concurrence

La commission a d’abord rejeté quatre amendements :

– le premier de M. André Chassaigne supprimant cet article ;

– le second de M. Jean Proriol maintenant notamment l’interdiction de discrimination ;

– le troisième de M. Jean Dionis du Séjour supprimant l’interdiction d’obtenir un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ;

– le quatrième de M. Claude Gatignol interdisant à un cocontractant en situation d’imposer sa volonté le fait de soumettre son partenaire à une obligation ou un ensemble d’obligations disproportionnés.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Bernard Reynès visant à faciliter pour les commerçants franchisés, la transmission de leur fonds de commerce en fin de contrat, en obligeant le franchiseur à indemniser le franchisé, pour le préjudice qu’occasionnerait son refus d’agréer l’acheteur choisi par le franchisé.

Le rapporteur a redouté certains effets pervers, telles que des promesses d’achat factices, obtenues dans le seul but d’obtenir une indemnisation.

M. Jean Gaubert a estimé nécessaire de pouvoir pointer, en la matière, les clauses abusives dont souffrent certains franchisés.

L’amendement a été retiré.

Ont également été retirés :

– un amendement de M. Daniel Fasquelle remplaçant la notion de « déséquilibre significatif » par celle d’« obligations disproportionnées », le rapporteur ayant considéré qu’il s’agissait d’un retour en arrière ;

– un amendement du même auteur supprimant l’interdiction de soumettre un partenaire à des conditions manifestement abusives dans un certain nombre de domaines.

La commission a examiné un amendement de M. Lionel Tardy facilitant les augmentations de prix de matières premières en cours de contrat de fournitures lorsque le contexte économique l’exige.

Le rapporteur a estimé qu’un fournisseur n’avait pas de raison d’augmenter un tarif en cours de contrat portant sur des volumes et que, hors ce cas, il convenait de favoriser la négociabilité des clauses du contrat, les centrales d’achat pouvant parfois contraindre certains fournisseurs à vendre à perte.

M. François Brottes a considéré qu’il fallait préserver la réactivité du client et, pour cela, envisager des clauses de rediscussion en cours d’exécution du contrat.

M. Michel Piron a précisé que l’amendement instituait seulement une possibilité de révision tarifaire, telle que pouvait l’imposer la conjoncture sur le marché des matières premières.

Mme Catherine Vautrin a appuyé ce point de vue et jugé qu’il fallait concilier la sécurité des fournisseurs sur la durée pour la prise en compte des impondérables.

Le rapporteur a précisé que l’interdiction de soumettre un partenaire à une obligation créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties aurait vocation à s’appliquer au cas où, dans l’impossibilité d’obtenir une révision de tarif, un fournisseur aurait perdu tout intérêt économique au contrat.

La commission a adopté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Michel Raison étendant la sanction de l’abus dans la relation commerciale aux clauses des contrats qui permettent à une centrale d’achat ou à un grossiste de figer un fonds de commerce dans son circuit de distribution en obtenant de son client un droit de préférence en cas de cession, de subordonner l’approvisionnement à une clause d’exclusivité ou d’exiger une garantie avant l’exécution de toute commande.

Le rapporteur a indiqué de tels abus étaient réels, mais que les hypothèses de déséquilibres significatifs entre les parties étaient innombrables, et qu’il fallait éviter de les énumérer dans la loi, qui ne pourrait être exhaustive, renvoyant à la Commission d’examen des pratiques commerciales. De plus, les clauses d’exclusivité sont parfois déloyales, mais elles peuvent aussi contribuer au développement du commerce. Il faut donc pouvoir les examiner au cas par cas.

Le président Patrick Ollier et Mme Catherine Vautrin ont précisé que les missions de l’Autorité de concurrence seront précisées par un décret, qui pourra inclure de telles compétences.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.

Elle a ensuite examiné deux amendements de M. Daniel Fasquelle prévoyant que c’est à la victime de faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l’indu, et non au ministère public ou au ministre de l’économie, ces derniers ayant plutôt à requérir une amende civile.

Le rapporteur a constaté qu’aujourd’hui, ni les victimes ni les concurrents ne portent plainte, alors qu’en Allemagne par exemple, tout manquement à l’éthique, même en l’absence de texte, est aussitôt dénoncé. Notre droit prévoit que le ministre peut saisir le juge civil pour faire respecter le droit des pratiques restrictives de concurrence.

M. Christian Jacob a approuvé le rapporteur : du fait de la concentration de la distribution, les victimes, même quand il s’agit des plus importants fournisseurs, ne portent pas plainte.

M. Daniel Fasquelle a rappelé qu’il s’agissait d’un amendement de clarification des rôles, la situation actuelle étant contraire aux principes fondamentaux du droit, comme l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme, ou au principe qui veut que nul ne plaide par procureur.

Le rapporteur a répondu qu’un bouleversement juridique était en l’occurrence nécessaire, pour que le droit puisse sanctionner efficacement les arnaques, mentionnant une étude édifiante sur l’affaiblissement de l’industrie agroalimentaire, pourtant un fleuron de l’économie française.

M. Jean Gaubert a constaté que lorsque les victimes ne portent pas plainte par crainte de représailles, on peut parler d’un système mafieux. Les juges devraient mettre autant d’énergie à lutter contre ces pratiques qu’à contrôler le financement des partis politiques, sans attendre la mort économique des entreprises victimes.

Mme Sandrine Mazetier a rendu hommage à la majorité, dont les amendements visent à renforcer l’action de la puissance publique, protectrice, corrigeant l’inspiration libérale du projet de loi.

Le président Patrick Ollier a rappelé que les gaullistes étaient nombreux au sein de la commission, et attachés depuis longtemps au rôle de l’Etat pour assurer une régulation efficace et garantir l’équité, tout autant qu’à l’exercice d’une grande liberté dans l’activité économique. Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission a rejeté ces deux amendements.

La commission a examiné trois amendements visant à modifier le 11ème alinéa de cet article.

M. Bernard Reynès a présenté un amendement visant à modifier l’alinéa 11 de cet article en fixant à 5 % du chiffre d’affaire mondial le montant des amendes civiles. Il s’agit de calquer le dispositif prévu sur celui introduit par la loi Chatel du 3 janvier 2008 prévoyant la dépénalisation du droit des affaires et, en contrepartie, le renforcement des sanctions civiles, de manière à mieux prendre en compte la puissance économique réelle des entreprises concernées.

En réponse à M. François Brottes, le rapporteur a précisé que l’indu concernait les sommes qui n’auraient pas été perçues si la loi avait été respectée. Il a estimé que la notion de pourcentage du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise n’était pas satisfaisante, car elle frapperait avec une sévérité différente les groupes intégrés et les réseaux d’indépendants.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur à l’alinéa 11.

Elle a rejeté un amendement de M. Daniel Fasquelle visant à instaurer un régime d’amende proportionnelle à la taille de l’entreprise, à ses résultats et à l’importance de la somme indûment perçue et plafonnée à 2 % du chiffre d’affaires.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

M. Claude Gatignol a retiré un amendement limitant le montant de l’amende civile à deux millions d’euros augmentés du montant de l’indu.

La commission a rejeté un amendement de M. Denis Fasquelle clarifiant le droit des pratiques restrictives en supprimant la possibilité pour le ministère public ou le ministre de l’économie de se substituer à la victime, en matière de dommages et intérêts.

Le rapporteur a présenté un amendement visant à dénommer « commission d’éthique des pratiques commerciales » l’actuelle commission d’examen des pratiques commerciales.

Après les interventions de MM. Michel Piron, Christian Jacob et François Brottes, qui ont estimé que le maintien d’une appellation plus neutre et plus normative était en l’occurrence préférable, le rapporteur a retiré son amendement.

La commission a adopté un amendement présenté par M. Denis Fasquelle modifiant le paragraphe IV de l’article 442-6 en supprimant toute référence aux pratiques discriminatoires, en cohérence avec les dispositions introduites par le projet de loi, rendant sans objet un amendement de M. Lionel Tardy.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Lionel Tardy précisant que les dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce sont d’ordre public, après que le rapporteur a jugé cette précision inutile.

La commission a adopté l’article 22 ainsi modifié.

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