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Mercredi 24 juin 2009

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 68

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

– Examen du rapport sur le contrôle de l’application de la loi n° 2003-9 du 3 janvier 2003 relative à la sécurité des piscines (M. Lionnel Luca, rapporteur et M. Pascal Deguilhem, rapporteur adjoint).

Commission
des affaires économiques, de
l’environnement et du territoire

La Commission a examiné le rapport présenté par M. Lionnel Luca, rapporteur, et M. Pascal Deguilhem, rapporteur adjoint, sur le contrôle de l’application de la loi n° 2003-9 du 3 janvier 2003 relative à la sécurité des piscines.

M. le président Patrick Ollier. Nous sommes réunis aujourd’hui pour autoriser, ou non, la publication du rapport d’information concernant le contrôle de l’application de la loi du 3 janvier 2003 relative à la sécurité des piscines. J’avais confié ce travail à Messieurs Lionnel Luca et Pascal Deguilhem.

M. Lionel Luca, rapporteur. Pascal Deguilhem et moi-même soumettons aujourd’hui à votre approbation le rapport sur l’application de la loi du 3 janvier 2003 sur la sécurité des piscines, loi qui a été adoptée à l’unanimité. Ce rapport est la conclusion d’un long travail débuté à l’automne dernier, pour évaluer et contrôler l’application d’une loi brève, comportant trois courts articles.

Je rappelle que cette loi avait pour objectif de réduire les noyades d’enfants de moins de cinq ans, en dehors des périodes de baignade, dans les piscines privées, familiales ou collectives. Elle comprenait trois articles, le premier obligeant les propriétaires de piscines privées non closes enterrées à équiper leur bassin d’un dispositif anti-noyade normalisé, le deuxième prévoyant des sanctions pénales pour faire respecter cette obligation, et le troisième disposant que le Gouvernement devait déposer un rapport d’application de la loi au Parlement.

Nous avons auditionné plus de quarante personnes à Paris et en province. En plus de nos départements d’élection respectifs, largement concernés par la question, nous nous sommes déplacés dans un département où le parc de piscines privées et l’accidentologie sont particulièrement importants, le Gard. Nous avons présenté nos propositions aux acteurs du secteur et en avons modifié certaines pour tenir compte de leurs remarques. La présentation du rapport d’application à la Commission des affaires économiques est aussi l’occasion de prolonger ce travail de recommandation en discutant avec vous des propositions que nous avons faites afin de les faire évoluer.

Je tiens à souligner l’esprit constructif dont ont fait preuve tous les acteurs entendus. En dépit de leurs divergences d’analyse et d’intérêts, la fédération des professionnels de la piscine, les fédérations des professionnels du tourisme, la commission de la sécurité des consommateurs, l’association française de normalisation, l’association « Sauve qui veut », les services centraux concernés et le cabinet du secrétaire d’État à la consommation et tous les autres acteurs, notamment locaux, ont cherché à affiner le diagnostic de l’application de la loi du 3 janvier 2003. Nous remercions tout particulièrement M. Jean-Marc Roubaud, qui nous a accueillis lors de notre déplacement à Villeneuve-lès-Avignon et a bien voulu mobiliser ses services pour répondre à nos interrogations.

Le rapport répond à trois questions. Premièrement, la loi a-t-elle eu des effets positifs ? Deuxièmement, les dispositifs anti-noyades sont-ils aujourd’hui sûrs ? Troisièmement, la loi a-t-elle été correctement appliquée ?

Commençons par la première question : la loi a-t-elle eu des effets positifs ? Il semble que oui, même si on manque d’informations pour le prouver avec certitude.

Il faut noter tout d’abord que contrairement aux craintes qui avaient été exprimées au cours des débats législatifs, la loi n’a ni conduit à un effondrement du marché des piscines, ni déresponsabilisé les parents, ni été perçue comme une intrusion dans la vie privée.

Bien sûr, les données relatives aux noyades sont incomplètes. Les enquêtes noyades de l’Institut de veille sanitaire permettent de disposer de données sûres pour 2002, 2003, 2004, et 2006 mais n’ont pas été réalisées depuis. Les professionnels de la piscine se sont substitués à cette institution mais l’exhaustivité de leurs informations n’est pas garantie. Les chiffres relatifs au parc de piscines et surtout à son équipement en dispositifs anti-noyade reposent sur des éléments déclaratoires recueillis par sondage sur des échantillons de population limités. Autrement dit, nous ne disposons pas d’une information suffisante pour évaluer l’impact de l’équipement des bassins en dispositifs anti-noyade sur les noyades de jeunes enfants avec des méthodes quantitatives sûres.

Si on s’en tient aux chiffres bruts dont on dispose, les décès d’enfants de moins de six ans consécutifs à une noyade dans une piscine familiale semblent toutefois suivre une tendance nettement à la baisse : 25 décès en 2003 et 12 décès en 2004 ; 10 décès en 2005 ; 12 décès en 2006 ; 4 décès en 2007 ; 6 décès en 2008. Dans le même temps le parc de piscines familiales enterrées extérieures a augmenté de 675 000 à 850 000, ce qui signifie que le ratio de décès pour 100 000 piscines a fortement chuté, de 3,7 à 0,7. Ces éléments plaident évidemment en faveur de l’efficacité d’une loi dont nous avons toujours dit que, si elle ne devait sauver qu’un seul enfant, elle constituerait un succès.

Deuxième question : les dispositifs anti-noyades sont-ils aujourd’hui sûrs ? Ils offrent un supplément de sécurité, mais ne préviennent pas toutes les noyades et ne se substituent pas à la surveillance. Bien pire, ils peuvent rassurer à l’excès, au détriment de la vigilance.

Il existe aujourd’hui quatre dispositifs normalisés : abris, couvertures, barrières, alarmes. Leur prix est variable, les moins chers étant les alarmes à détection d’immersion qui coûtent quelques centaines d’euros.

Le principal débat sur la sécurité porte sur ces alarmes, qui se déclenchent suite à la pénétration dans le bassin d’un corps créant des vagues à la surface du bassin. D’un côté, les acteurs du secteur opposés aux alarmes à détection d’immersion (commission de la sécurité des consommateurs, association « Sauve qui veut », etc.) font valoir que les alarmes ne sont pas des dispositifs de prévention puisqu’elles ne se déclenchent qu’après le début de l’immersion et que le respect des normes est problématique, comme l’ont mis en évidence les difficultés à reproduire les tests de conformité à la norme à l’été 2008, qui ont conduit à retirer 5 alarmes du marché. D’un autre coté, les professionnels affirment qu’il n’y a pas de sur-accidentologie avec les alarmes et que la possibilité d’installer une alarme est un élément essentiel de l’acceptation de la loi. Dans ces conditions, chacun campe sur ses positions.

Indépendamment de toutes statistiques, les barrières, abris et couverture apparaissent préférables car à condition d’être correctement refermés ils empêchent la chute dans l’eau. Mais le manque de données sur l’accidentologie ne permet pas de trancher ce débat.

Il faut noter par ailleurs que les garanties apportées par les dispositifs de sécurité dépendent de l’usage qui en est fait, et qu’un nombre important de propriétaires de piscines familiales ne semble pas faire un usage correct du dispositif anti-noyade qu’il a acheté.

Troisième question : la loi a-t-elle été correctement appliquée ? La réponse à cette question est complexe.

Les textes d’application contredisent en partie la loi.

Alors que la loi dispose que les bassins doivent être équipés de dispositifs de sécurité normalisés, un premier décret d’application de la loi a prévu que le dispositif doit être conforme, je cite, « soit aux normes françaises, soit aux normes ou aux spécifications techniques ou aux procédés de fabrication prévus dans les réglementations d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, assurant un niveau de sécurité équivalent ».

Un second décret a prévu que le dispositif de sécurité visé par la loi peut être « une barrière de protection, une couverture, un abri ou une alarme répondant à des exigences de sécurité » listées, donc ne respectant par nécessairement les normes.

Ces divergences entre la loi et le décret sont justifiées, car elles procèdent de l’obligation de respecter le droit communautaire. Mais elles ont conduit à une réglementation que les acteurs ne comprennent pas.

Elles mettent aussi en évidence le fait que le renvoi explicite dans la loi à la notion de « normes » est discutable. Il présente certes des avantages, dans la mesure où il permet de disposer de lignes directrices, techniquement fiables et évolutives, pour concevoir des dispositifs de sécurité et améliorer la qualité des dispositifs commercialisés.

Mais il présente aussi de nombreux inconvénients :

- l’évolution des normes est un facteur d’insécurité juridique et représente un coût important, pour les professionnels comme pour les particuliers ;

- les normes ne sont pas accessibles facilement au grand public : leur accès via Internet est payant et les informations qu’elles contiennent sont destinées aux professionnels ;

- les normes françaises ne s’articulent pas forcément bien avec les réglementations étrangères : d’une part, les exigences posées par le droit communautaire ont conduit à reconnaître dans les textes d’application des dispositifs de sécurité ne répondant pas aux normes, en application des principes de libre circulation des produits et de reconnaissance mutuelle, et d’autre part les normes facultatives ne sont pas harmonisées au niveau européen, voire international ;

- le processus de normalisation coûte cher, même si ce coût s’apparente à un « coût caché » : il mobilise en effet un grand nombre d’acteurs, de la sphère publique comme de la sphère privée, pendant un grand nombre d’heures.

Dans le respect de l’esprit de la loi, de grandes campagnes d’information ont été réalisées, associant l’État et les professionnels de la piscine et du tourisme.

Contrairement à l’esprit de la loi, les obligations d’équipement ne sont en revanche à peu près pas contrôlées par l’État. La DGCCRF réalise un contrôle sommaire de l’équipement des piscines collectives à l’occasion de contrôles portant sur d’autres obligations de sécurité. Pour les piscines à usage individuel, il n’existe aucun contrôle, sauf par les notaires au moment de la cession de la propriété comprenant une piscine. Celui-ci devrait d’ailleurs, à la longue, constituer un recueil de données intéressant. Il n’existe d’ailleurs pas de base législative explicite pour procéder à de tels contrôles.

Enfin, la loi prévoyait que le gouvernement transmettrait au parlement un rapport d’application dressant le bilan de l’accidentologie avant le 1er janvier 2007. Ce rapport n’a pas été transmis dans les délais, et il ne dresse pas réellement le bilan de l’accidentologie.

Venons en maintenant aux recommandations.

La première : mieux évaluer, car on est en présence d’une insuffisance inacceptable.

Tant qu’on ne disposera pas d’évaluations robustes sur les noyades en piscines privées, il ne sera pas possible d’apporter une réponse entièrement convaincante aux questions relatives à l’efficacité de la loi et au degré de protection offert par les différents dispositifs de sécurité. Dès lors, les professionnels persisteront à se rejeter les responsabilités.

Pour disposer de telles évaluations, il est nécessaire que le gouvernement s’assure que les enquêtes noyades sont réalisées chaque année, que la taille du parc de piscines privées et son taux d’équipement en dispositifs anti-noyade sent correctement estimés, et que les données recueillies sont soumises à des traitements statistiques appropriés.

La deuxième : mieux informer.

L’information est fondamentale pour réduire le nombre de noyades et faire en sorte que la loi soit correctement appliquée. De grandes campagnes d’information doivent être réalisées à destination du grand public. Le Gouvernement relancera d’ailleurs une campagne cet été, ce qui n’était pas acquis au début de notre mission.

Afin de mieux informer les propriétaires de leur obligation d’équiper leur bassin d’un dispositif anti-noyade, il serait utile de mentionner explicitement cette obligation dans le formulaire type de déclaration de travaux.

Enfin, l’information des maires et de leurs services doit être améliorée. À cet égard, nous avons été surpris par l’attitude de l’Association des maires de France qui n’a pas donné suite à nos sollicitations. De même, dans mon département, j’ai adressé un questionnaire à 85 communes et obtenu seulement 15 réponses.

Troisième recommandation : mieux légiférer.

Les difficultés d’application de la loi du 3 janvier 2003 permettent de faire deux souhaits d’ordre général en matière législative.

La référence explicite à des normes dans la loi n’apparaît pas souhaitable, notamment parce qu’elle s’articule mal avec le droit communautaire et que les normes ne sont pas accessibles facilement gratuitement. Et prévoir des sanctions ne garantit pas forcément le respect de la loi et il est utile de prévoir aussi des moyens de contrôle.

M. Patrick Deguilhem, rapporteur. Parmi les organismes auditionnés, à l’exception des professionnels et des consommateurs, les interlocuteurs sont en demande d’information. Nous avons essayé, dans notre rapport, d’apporter des éclairages et on constate que les avis divergent entre consommateurs et professionnels.

Mme Catherine Vautrin. Le sujet est difficile : la piscine est un élément ludique qui peut aussi être l’endroit d’un drame. Vous n’avez pas relevé l’accroissement de la mortalité par noyade chez les plus de 85 ans, alors que la tendance est à la baisse dans les autres tranches d’âge.

Le groupe UMP est, en outre, favorable au suivi des noyades que vous proposez, qu’il s’agisse d’une enquête annuelle ou d’un observatoire.

Par ailleurs, pour reprendre le propos énoncé en page 18 de votre rapport, certaines pistes ont été laissées de côté par rapport à la loi. Ainsi le fait que les constructeurs doivent fournir des dispositifs de sécurité a été rejeté. Ceux-ci se donnent bonne conscience en fournissant une alarme, mais en indiquant aux consommateurs « surtout ne l’utilisez pas ». Il faut des dispositifs qui puissent fonctionner 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et qui soient opérationnels. Le dernier décret permet d’avancer, certes, mais il faut des éléments concrets dans la loi, que les citoyens doivent appliquer et qu’on doit pouvoir contrôler.

M. le président Patrick Ollier. Dans le Midi, notamment dans les Bouches-du-Rhône, on constate une certaine négligence des parents par rapport aux enfants de telle sorte que les barrières de sécurité ne servent à rien. Certains enfants sont en effet capables de les ouvrir.

M. François Brottes. Cette loi est un texte concret, un sujet de vie quotidienne et il s’agissait d’ailleurs à l’origine d’une proposition de loi. On constate en effet que plus un projet de loi est long - on songe notamment au projet de loi « Grenelle 2 » qui contient 200 lois à lui tout seul - moins on peut faire de travail de suivi de l’application de la loi.

M. le président Patrick Ollier. On peut décider de ne contrôler qu’un ou deux articles d’une loi. Plus on s’implique dans le contrôle, plus je suis un Président heureux.

M. François Brottes. Il est regrettable que l’on ait mis un ou deux ans pour savoir quels dispositifs seraient agréés ou pas. En revanche, on peut saluer le fait que beaucoup d’entreprises aient été créées pour fabriquer des systèmes de sécurité.

Ainsi que l’a rappelé le Président, la fausse sécurité peut s’avérer plus dangereuse que l’absence de sécurité.

Quant au rôle des maires, je comprends les réticences de l’Association des Maires de France, car si l’on soumet à déclaration sur l’honneur la mise en place de systèmes de sécurité, on risque de mettre en cause la responsabilité du maire qui n’aurait pas vérifié la sincérité d’une telle déclaration. Or, les services de l’État ne sont pas en mesure de procéder à ces vérifications. On se trouve donc face à un dilemme pour favoriser une bonne application de la loi.

Le président Patrick Ollier. On peut effectivement s’interroger quant aux besoins humains de contrôle.

M. Philippe Martin. Par rapport aux piscines collectives, on constate que les obligations en termes de contrôles de sécurité sont différentes : comment cela se fait-il ? Par ailleurs, avec les appareils mis en place, il semble bien qu’on ait réduit la vigilance des parents vis-à-vis des enfants.

M. Jean-Michel Villaumé. Un nouveau concept, qui a fait ses preuves en Allemagne, en Autriche, en Suisse et en Scandinavie, est en train de se développer en France : celui de piscines naturelles biologiques. Or, la collectivité ne parvient pas à obtenir une réglementation de ce concept. Quelles sont les réflexions en cours à ce sujet ?

M. Daniel Boisserie. L’ordre des architectes n’a pas été consulté sur ce rapport, et on peut le regretter.

Il faudrait pouvoir mettre en harmonie la loi et le décret.

En outre, les normes changent régulièrement et l’on doit parfois tout détruire six mois après, ce qui est fort coûteux, par exemple dans les hôpitaux. Engageons-nous pour cinq ou sept ans, le temps d’amortir le coût des installations.

S’agissant des clôtures, il faut que les choses soient beaucoup mieux précisées. Dans un site classé, on ne peut pas mettre de clôtures en bois (en châtaigner) : on est obligé de mettre du grillage !

J’estime en outre que pour les systèmes de sécurité, il faut donner la notice aux consommateurs au moment de la signature du contrat.

Enfin, je suis d’accord avec François Brottes : on en demande trop aux maires !

M. Raymond Durand. Il est légitime de se soucier des jeunes enfants mais il ne faut pas oublier les personnes âgées. Je connais en effet des cas de noyade en piscine, en particulier lorsque des aînés vivent chez leurs enfants. Dans ma commune, une personne âgée est restée coincée entre la couverture et le mur et a connu une fin atroce.

J’appelle aussi l’attention sur une confusion fréquente : lorsqu’ils obtiennent le permis de construire leur maison, certains se croient dispensés de déclarer les travaux de construction d’une piscine et ils « font les deux trous » en même temps ! Ma commune comptant au moins trois cents piscines, je ne peux pas mobiliser en permanence la police municipale pour tout vérifier, surtout s’il n’y a pas eu de déclaration et que je ne suis pas informé de l’existence d’un bassin. Bien entendu, le fait que la déclaration génère une imposition particulière n’est pas étranger à ce phénomène de sous-déclaration.

Sur ce sujet sensible, je regrette à mon tour que l’Association des maires de France ne se montre pas plus coopérative car son devoir serait de nous aider.

M. Jacques Le Nay. Merci pour ce rapport de qualité. Il faut être attentif aux effets pervers de la loi. En tant que président de l’association des maires de mon département, je peux témoigner que les maires endossent déjà beaucoup de responsabilités : n’en rajoutons pas ! Par analogie avec le domaine des jeux pour enfants dans les espaces collectifs, où les normes changent très vite, ou encore aux plans d’eau où les panneaux d’interdiction de baignade ne sont pas respectés, je suis convaincu qu’il est indispensable de responsabiliser les gens et de leur faire admettre que certains accidents ne sont hélas pas évitables. Attention à ne pas laisser croire à une sécurité illusoire car il est nombre de cas où seul un comportement responsable peut empêcher la survenue d’un drame.

M. Dino Cinieri. Je salue la qualité du travail de nos collègues. Il est dommage que, pour des raisons de coût, les propriétaires de piscines préfèrent les alarmes de détection aux abris, barrières et autres systèmes de couverture. J’insiste en outre sur la formation des vendeurs. Malgré les efforts de sensibilisation du Gouvernement, certains vendeurs n’ont aucune compétence en matière de sécurité. Je me demande s’il ne serait pas utile d’instituer un système d’agrément, de sorte que les installateurs puissent justifier de réelles connaissances quant aux systèmes de protection.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Je félicite à mon tour les auteurs du rapport. Le marché des piscines est en pleine expansion et on peut certainement s’en réjouir à certains égards. Je regrette simplement que les assurances laissent trop de latitude aux propriétaires. La présence d’une piscine dans une propriété devrait emporter des conséquences plus lourdes en terme de responsabilité civile.

M. Jean-Marie Sermier – Pouvez-vous préciser la notion de « noyade accidentelle suivie ou non de décès » telle qu’elle figure à la page 10 du projet de rapport ?

M. Pascal Deguilhem, rapporteur. On peut se noyer sans que cela entraîne la mort, lorsqu’il y a réanimation par exemple, ce qui explique cette précision.

M. Jean-Marie Sermier. S’agissant des questions de responsabilité, je suggère que l’on mette à contribution les organismes de certification qui existent déjà en les chargeant de délivrer un certificat de conformité au moment de la première mise en eau du bassin. Il ne saurait être question de charger les maires de nouvelles obligations.

M. le président Ollier. Je donne la parole à M. Deguilhem pour répondre aux différents orateurs.

M. Pascal Deguilhem, rapporteur. Madame Vautrin, vous avez raison de souligner que la loi ne doit pas avoir pour effet de déresponsabiliser les parents.

L’AFNOR a publié un guide d’installation des dispositifs anti-noyade et il faut persévérer dans la voie de la sensibilisation, de manière à faire prendre conscience aux parents de leurs responsabilités, notamment dans les piscines d’hôtels ou de collectivités où leur vigilance se relâche parfois.

M. le président Ollier nous a interrogés avec raison sur les systèmes de barrières et sur l’habileté des jeunes enfants à les contourner. Il faut rappeler que les normes relatives aux barrières ont été élaborées afin d’empêcher l’accès aux piscines des seuls enfants de moins de cinq ans.

Merci, cher François Brottes, d’avoir relevé le caractère très concret et pragmatique de ce rapport. Comme je viens de le dire, la référence aux normes pose problème. Il ne faut pas non plus négliger le fait que la protection représente un marché que l’on peut évaluer au minimum à 50 millions d’euros en année pleine, soit 200 millions en quatre ans – je renvoie à cet égard à la page 33 de notre projet de rapport.

Parce qu’ils sont aussi maires, plusieurs d’entre vous ont attiré notre attention sur la dérive qui consisterait à confier aux maires de nouvelles responsabilités en matière de sécurité des piscines. Notre idée serait plutôt de mieux les associer à la prévention, en leur donnant accès à des informations qu’ils ne détiennent pas, de manière à éviter qu’ils ne découvrent des situations anormales qu’à l’occasion d’un drame.

A cet effet, nous avons proposé à l’administration centrale que soit rappelée dans le formulaire de déclaration de travaux l’obligation de mettre en place un dispositif de sécurité.

Parmi les autres pistes de travail que nous avons explorées figure la possibilité de faire porter aux plus jeunes enfants un bracelet électronique de localisation à distance, en particulier lorsqu’ils utilisent une piscine privée à usage collectif. Les parents pourraient ainsi procéder être alertés lorsque leurs enfants s’approchent d’une piscine.

M. Philippe Armand Martin. Ne serait-il pas plus simple de procéder à des contrôles ?

M. Pascal Deguilhem, rapporteur. Je rappelle la difficulté de procéder à un contrôle dans une enceinte privée, même si elle est destinée à un usage collectif.

M. Lionnel Luca, rapporteur. Il est fréquent que la direction de la jeunesse et des sports ou la DGCCRF procède à un contrôle superficiel de l’existence d’un dispositif de sécurité, sans avoir les moyens d’en vérifier le bon fonctionnement ! La DGCCRF n’est d’ailleurs pas missionnée pour cela.

M. Pascal Deguilhem, rapporteur. Il reste que, au moins dans les années de référence, il n’y a pas eu de décès à déplorer dans une piscine privée à usage collectif telle que celle d’un hôtel ou d’un camping en dehors des périodes de baignade.

Comme vous l’avez vous-même indiqué, la question, Monsieur Villaumé, des piscines et bassins écologiques n’entrait pas dans le champ du présent rapport. Je partage l’idée qu’il serait intéressant d’en traiter dans un autre cadre.

Bien que nous ayons auditionné plus de quarante personnes, il est vrai, Monsieur Boisserie, que nous n’avons pas rencontré l’ordre des architectes. En revanche, nous avons bien entendu rencontré les assureurs mais j’aurai l’occasion d’y revenir ultérieurement.

M. Durand a évoqué l’accidentologie particulièrement notable qui concerne les plus de 85 ans. Il convient d’en tenir compte, même si le cœur de la cible des mesures de prévention reste les enfants de moins de 5 ans. Les noyades des plus de 85 ans sont particulièrement fréquentes en eaux libres, beaucoup choisissant ce mode de suicide pour mettre fin à leurs jours.

S’agissant des déclarations de travaux, je rappelle qu’elles sont obligatoires pour toutes les piscines enterrées et partiellement enterrées.

En ce qui concerne les maires, je partage l’avis qu’on ne saurait encore solliciter leur responsabilité d’élu local, qui est déjà suffisamment sollicitée par ailleurs.

Quant à la question de l’efficacité des dispositions législatives, je note que les chiffres des noyades ont diminué depuis leur promulgation. C’est sans doute là un indicateur d’importance. Je suis par ailleurs d’accord pour faire agréer les installateurs, mais qui en serait chargé et sur quelle base ? Les professionnels ont reconnu séparer leurs activités d’installation de bassin de leurs interventions dans le domaine de la prévention des accidents. Ils ont affirmé toujours accompagner la vente d’une piscine de la délivrance d’une notice de sécurité.

La fédération des sociétés d’assurance ne conditionne pas la couverture des sinistres au respect de la loi. Je signale que les remarques formulées par Fabienne Labrette-Ménager trouvent par ailleurs un écho dans les actions de l’association « Sauve qui veut ».

Enfin, il y a obligation d’installer des dispositifs de prévention des noyades dans les piscines, mais il est toujours compliqué pour les maires de vérifier le respect de cette prescription, a fortiori lorsqu’ils se trouvent dépourvus de services. Le seul moyen pour accéder aux équipements consiste à contrôler l’assainissement, mais ce n’est pas toujours possible.

M. le président Patrick Ollier. Nous achevons ici cette phase de contrôle d’exécution de la loi dans laquelle notre Commission est exemplaire, mais je crois qu’il faut aller plus loin. Je suggère aux rapporteurs d’insérer dans le rapport les propositions qu’ils ont entendues aujourd’hui, notamment celle qui a trait à la déclaration sur l’honneur. En outre, je me propose d’écrire au ministre pour l’inviter à répondre devant la Commission aux questions soulevées et à y apporter des réponses.

M. Lionnel Luca, rapporteur. Nous souscrivons pleinement à cette proposition. Nous avons toujours considéré que ce débat en commission constituerait l’ultime audition de nos travaux. En ce qui concerne la déclaration sur l’honneur, il faudrait faire en sorte qu’elle concerne les équipements existants et pas seulement les installations nouvelles. Cela peut soulever des difficultés en rapport avec la réglementation fiscale.

M. le président Patrick Ollier. Suivant les réponses du gouvernement, la Commission s’honorerait à déposer unanimement une proposition de loi, évidemment brève, qui règle les difficultés qu’elle a détectées. Le Parlement doit faire pleinement usage des prérogatives que lui donne la Constitution.

A l’issue de la discussion, la Commission autorise à l’unanimité la publication du rapport.

——fpfp—