Accueil > Travaux en commission > Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Mercredi 26 mai 2010

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 52

Présidence de M. Christian Jacob Président puis de Mme Fabienne Labrette-Ménager Vice-présidente

– Audition, ouverte à la presse, de M. François Drouin, président-directeur général de l’établissement public OSEO, sur le financement du développement durable et de la croissance verte

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. François Drouin, président-directeur général de l’établissement public d’OSEO, sur le financement du développement durable et de la croissance verte.

M. Christian Jacob, président. Je suis très heureux que notre commission puisse aujourd’hui accueillir M. François Drouin, Président directeur-général d’OSEO, auquel je souhaite la bienvenue. Je lui renouvelle, au nom de l’ensemble des membres de la commission, toutes nos excuses pour avoir dû, le 12 janvier 2010, reporter cette audition en raison des circonstances exceptionnelles qui avaient amené notre Assemblée à modifier son ordre du jour afin de rendre un dernier hommage à la fois à Philippe Séguin, ancien président de l’Assemblée nationale, et à Jean-Paul Charié, notre regretté collègue membre pendant de longues années de la commission des affaires économiques, ce qui explique que de nombreux commissaires n’aient pu assister à ce moment-là à la réunion de notre commission.

Il aurait pu sembler naturel que vous soyez auditionné par la commission des affaires économiques, mais j’ai souhaité que nous puissions nous intéresser, compte tenu des attributions de notre commission, au rôle joué par OSEO dans le financement du développement durable. Afin de lancer le débat, je vous prie tout d’abord de présenter les compétences et les moyens financiers d’OSEO, que vous voulez d’ailleurs je crois voir accroître. Il s’agit d’un sujet qui m’est un peu familier puisque lorsque j’étais ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation, OSEO avait été porté sur les fonts baptismaux, à partir notamment de la Banque du développement des PME (BDPME).

Vous pourriez dresser également un bilan des prêts et des financements accordés dans le cadre du plan de relance et présenter ensuite le financement des PME-PMI dans le cadre du développement durable et son effet sur l’augmentation des métiers liés à la « croissance
verte ». En particulier, quelle est votre évaluation de la progression des « emplois verts » dans l’économie française ? L’objectif, issu du Grenelle 1, de 600 000 emplois verts à créer d’ici 2020 - objectif ambitieux repris dans le cadre du « plan de mobilisation des filières et des territoires pour le développement des métiers liés à la croissance verte » - vous paraît-il réaliste ? Comment accompagnez-vous les entreprises dans ce domaine ? La crise a-t-elle un impact sur le développement de ces emplois ou constituent-ils au contraire un secteur épargné dont l’activité continue à progresser ?

M. François Drouin, Président directeur général d’OSEO. Monsieur le Président, je vous remercie de l’occasion qui m’est donnée de présenter brièvement OSEO et de vous détailler son action dans le domaine de ce qu’il est désormais convenu d’appeler « l’économie verte ». Dans sa configuration actuelle, OSEO a beaucoup évolué puisqu’elle résulte de la fusion successive de différentes entreprises publiques comme le Crédit hôtelier, la Caisse nationale des marchés de l’État, et le Crédit d'Équipement des petites et moyennes Entreprises (CEPME), la BDPME, pour les plus anciennes d’entre elles, et la Société française de garantie des financements des PME (SOFARIS), l’Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR), et l’Agence de l’innovation industrielle (AII), pour les plus récentes. Cet ensemble a pour objectifs ceux qui lui ont été assignés par le Gouvernement : faire de la France un grand pays d’innovation et d’entrepreneurs, et jouer le rôle de relais efficaces dans la conduite des politiques publiques en matière de PME-PMI. Au fil des ans, OSEO s’est affirmé comme le guichet unique de ces entreprises pour le soutien à l’innovation, la garantie des prêts bancaires, et le co-financement.

Ces trois métiers sont complémentaires. Le premier, le soutien à l’innovation, permet d’aider environ 4 000 projets par an, mais aussi, sur une toute autre échelle, de traiter les dossiers du programme d’innovation industrielle et stratégique, issus de l’ex-AII, c’est-à-dire une trentaine de projets par an, mais sur lesquels les aides sont d’une toute autre ampleur puisqu’elles peuvent s’élever, sur chacun d’entre eux, jusqu’à 10 millions d’euros. Plus récemment, nous nous sommes également vus confier la gestion du Fonds unique interministériel (FUI), dont l’objet est de financer les pôles de compétitivité, et donc des projets encore plus structurants. C’est dans ce champ du soutien à l’innovation qu’OSEO touche au plus près à l’économie verte, même si notre entreprise y est également liée par son deuxième métier, qui est celui de garantie des prêts consacrés par les banques aux entreprises, mais aussi des interventions des sociétés de capital-risque et de capital investissement. Elle l’est également dans son troisième et dernier métier, qui est celui de cofinancement, aux côtés des banques, notamment dans le domaine de l’immatériel et donc du développement durable.

OSEO a fait la preuve de sa réactivité et de sa capacité d’adaptation en ajoutant à cette palette une autre activité, celle de soutien à l’économie, qui nous a été confiée en 2009 dans le cadre du plan de relance. Cette nouvelle mission, rendue possible grâce aux moyens considérables qui ont été octroyés par le Gouvernement, consistait à garantir la trésorerie des entreprises, parfois presque en totalité, et ce dans tous les domaines. Au total, ce sont 21 000 entreprises qui ont bénéficié de l’intervention d’OSEO, au moyen d’un encours de 4,5 milliards d’euros de prêts bancaires. Une étude réalisée récemment auprès de 5 000 de ces entreprises bénéficiaires a mis en lumière que 50 % d’entre elles ont évité le dépôt de bilan grâce à cette intervention, 30 % ont pu ne pas détériorer la situation de leurs salariés (en évitant le recours à des licenciements, ou en ne baissant pas le niveau des recrutements), et que 20 %, qui ont eu recours par précaution aux services d’OSEO, n’ont pas ressenti d’impact particulier sur leur situation. Il s’agit d’un bilan considérable dans l’économie réelle !

En 2010, nous poursuivons cette action de soutien, grâce aux moyens que le Gouvernement continue à mettre à notre disposition, , mais à un niveau moindre car les tensions sur la trésorerie des entreprises s’affaiblissent, ce dont on ne peut que se réjouir. La situation s’améliore, ce qui nous permet de nous recentrer sur les trois piliers de la croissance des entreprises que sont l’innovation, l’investissement et l’international, et qui ont comme moteur commun les fonds propres des entreprises, fonds qui ont été mis à mal par la crise.

Dans le domaine des technologies vertes, OSEO a vu ses moyens d’action renforcés notamment dans le cadre de l’emprunt national puisque 2,8 milliards d’euros ont été mis à sa disposition. Une partie importante - soit 500 millions d’euros - sera employée aux prêts verts bonifiés, destinés à toutes les entreprises jusqu’à 5 000 salariés, puisque les premiers dossiers seront instruits au mois de juin de cette année, et que l’ensemble du dispositif sera opérationnel en septembre. Les pôles de compétitivité quant à eux bénéficieront d’une enveloppe de 300 millions d’euros.

M. Jean-Paul Chanteguet. Je souhaite avoir votre sentiment sur trois points. S’agissant de ce que l’on qualifie « d’économie circulaire » d’abord, c’est-à-dire d’économie ne produisant pas de déchets, ceux d’un secteur industriel donné constituant la matière première d’un autre situé en aval dans le processus de production, je serais désireux de savoir si OSEO est amené à financer des projets s’y apparentant.

En ce qui concerne par ailleurs « l’économie de la fonctionnalité », c’est-à-dire l’essor de services permettant de limiter la consommation globale d’énergie – je pense par exemple au service de location de pneumatiques mis en place par Michelin -, financez-vous des projets qui permettraient de la renforcer ?

Enfin, si quatre projets sur dix ayant trait aux énergies renouvelables sont financés par OSEO, pourriez-vous nous indiquer si vos services ont pu établir une estimations des investissements nécessaires à l’objectif d’avoir en 2020 au minimum 23 % de l’énergie produite grâce à des sources renouvelables ?

M. Serge Grouard. Monsieur le Président directeur-général, il est incontestable que vos fonctions font de vous un acteur et un observateur privilégié du secteur économique qui occupe notre commission. Comment percevez-vous la mutation de l’économie française vers une croissance verte ? Pourriez-vous nous dresser un tableau des entreprises qui sollicitent votre expertise et votre intervention ? Ont-elles intégré les particularités et les contraintes de la « croissance verte », et si oui de quelle manière ? Enfin, pourriez-vous nous indiquer comment OSEO compte intervenir dans les pôles de compétitivité « nouvelle formule », compte tenu du nouvel appel à candidatures récemment ouvert ?

M. Yves Cochet. J’apprends aujourd’hui même que la Commissaire européenne chargée de l’action en faveur du climat, Mme Connie Hedegaard, va proposer au nom de la Commission que l’objectif de réduction des gaz à effet de serre soit porté de 20 % à 30 % à l’horizon de 2020. Pour vertueux qu’il soit, cet objectif est contesté par l’Allemagne et par la France, officiellement pour des raisons conjoncturelles. Ces deux pays considèrent en effet que cela sera déjà bien si on tient l’objectif de moins 20 % ! Qu’en pensez-vous ? Je ne dis pas – comme d’autres… – que « l’environnement, ça commence à bien faire ! » mais ne faut-il pas considérer que nos objectifs en matière de développement durable posent un problème de compétitivité de notre économie ? Ne faut-il pas, selon vous, ralentir un peu la croissance verte (murmures sur divers bancs) – pour autant que celle-ci existe ? Je précise que je me borne à employer le vocabulaire qui a cours ici car, pour moi, le concept de croissance verte n’a pas de sens et je ne considère pas davantage que la croissance constitue un objectif en soi.

Je m’interroge également sur la méthode d’évaluation des projets qui vous sont adressés. Disposez-vous d’un réseau d’ingénieurs et de techniciens pour analyser leur pertinence ? Comment décidez-vous que telle ou telle proposition est intéressante ou relève plutôt des élucubrations d’un « professeur Nimbus » ?

Un article entier de la loi « Grenelle II » traite des véhicules électriques et je ne puis contester que cette voie intéresse nombre de constructeurs, français ou étrangers. Pour ma part, j’ai tendance à considérer que cela ne fait que déplacer la source de pollution, dans la mesure où la présence obligée d’un convertisseur crée un surcroît de dépense d’énergie. Quelle est votre opinion ? OSEO soutient-il le véhicule électrique, notamment en Poitou-Charentes avec Heuliez ?

S’agissant des énergies renouvelables, sur quels critères vous fondez-vous pour considérer qu’un projet est douteux ou, au contraire, prometteur, tant du point de vue environnemental qu’économique ?

M. le président Christian Jacob. Je note avec satisfaction qu’Yves Cochet reprend désormais à son compte le concept de croissance verte… (Sourires, cependant que M. Yves Cochet s’exclame et fait des signes de dénégation)

M. Stéphane Demilly. Président du groupe d’étude de notre Assemblée sur les biocarburants, je suis particulièrement attentif au développement des transports durables. A cet égard, pouvez-vous préciser les grands axes d’utilisation du Fonds fluvial d’initiative ? Entendez-vous persévérer dans la politique d’aide à l’acquisition de péniches à grand gabarit pour encourager notre batellerie à profiter de toutes les opportunités créées par le canal Seine Nord Europe ? Alors que le président du Port autonome de Paris avance que la batellerie française est quatre fois moins compétitive que la moyenne de la flotte européenne, êtes-vous conscient des enjeux qui s’attachent à ce secteur ?

J’en viens aux biocarburants de deuxième génération, en pensant notamment au projet Futurol, dans la Marne, à l’utilisation de la biomasse lignocellulosique ou à l’action du pôle de compétitivité « Industrie et agro-alimentaire » (IAR). OSEO soutient-il des projets liés aux biocarburants, et, dans l’affirmative, pouvez-vous nous les présenter ?

M. François Drouin. Je précise aux différents intervenants que notre méthode de travail consiste à répondre aux sollicitations des entrepreneurs. Ce n’est donc pas de notre propre initiative que nous nous intéressons à tel ou tel secteur mais toujours pour répondre à une demande.

Il me semble tout aussi indispensable de rappeler la différence fondamentale entre recherche et innovation : la recherche consiste, en exploitant au mieux les techniques disponibles, à transformer de l’argent en idées ; l’innovation, à entraîner les marchés pour créer de la richesse à partir d’une idée. En France, nous avons historiquement du mal à rapprocher les deux mondes : les entrepreneurs voient les chercheurs comme des « Nimbus », les chercheurs les entrepreneurs comme des money makers sans scrupules… En créant des synergies, les pôles de compétitivité contribuent pour beaucoup à dissiper ce malentendu. Et cela est indispensable, car, pour créer de la richesse, il faut à la fois de l’argent et des idées !

Selon le rapport Guillaume sur la valorisation de la recherche paru en 2007, la France, via l’économie de la connaissance, concentre à l’excès la ressource sur la recherche amont alors qu’il faudrait aussi faire porter l’effort sur les nouveaux débouchés. OSEO a donc un rôle à jouer dans la fluidification de l’ensemble de la chaîne.

Monsieur Chanteguet, nous soutenons des projets qui ont trait à l’économie circulaire lorsque les entrepreneurs concernés nous le demandent, nombre d’entre eux ayant trait au traitement des déchets, souvent selon des modalités extrêmement pertinentes. De l’avis général, la France n’est du reste pas en retard dans le domaine des clean techs.

Je précise à M. Cochet que nous disposons d’équipes d’ingénieurs et de techniciens parfaitement à même d’évaluer la pertinence technique d’un projet donné.

L’économie de la fonctionnalité progresse et constitue à nos yeux un axe intéressant. Vous avez pris l’exemple pertinent des locations de pneus, j’évoquerai pour ma part la location et le recyclage des palettes qui illustrent l’importance des normes et de la réglementation dans la facilitation de l’économie de la fonctionnalité. S’il n’était pas interdit de brûler les palettes, les entreprises ne feraient pas l’effort de les entretenir et de les recycler. L’existence de normes adaptées est donc déterminante pour développer de nouvelles activités rentables.

Dans le domaine de l’économie renouvelable, OSEO participe au financement de quatre projets sur dix, en particulier dans l’éolien et le photovoltaïque.

Vous m’avez demandé si la mutation vers l’économie verte relevait du mirage ou de la réalité. Je suis pour ma part convaincu que c’est une réalité économique, animée principalement par des petites entreprises, et souvent sur des créneaux. Il ne faut cependant pas oublier que l’innovation peut « bégayer » : on lance des pistes, et, au final, l’on suit parfois une autre direction…

En 2009, l’activité d’OSEO a été particulièrement dense : 107 209 interventions au profit de quelque 80 000 entreprises, pour un montant versé aux entreprises de l’ordre de 26 milliards d’euros.

Je crois aux pôles de compétitivité, qui font gagner beaucoup de temps aux PME et contribuent à la dissipation des préjugés que j’évoquais tout à l’heure. Encore faudra-t-il affiner leurs modalités d’évaluation, notamment pour ce qui concerne leur activité de soutien à l’innovation. A présent que nous sommes en charge de la gestion du Fonds unique interministériel (FUI), cette démarche d’évaluation des pôles représente l’une de nos priorités.

S’agissant des objectifs de réduction des émissions de GES, M. Cochet m’a demandé s’il était préférable de les fixer à moins 20% ou moins 30% en 2020. Je suis au regret de lui répondre qu’OSEO n’a pas d’avis autorisé sur ce type de problématique macroéconomique !

Pour en revenir au réseau d’ingénieurs et à leur aptitude à juger de la pertinence des projets qui leur sont soumis, je rappelle qu’ils ont mis en évidence le fait que le recours massif aux biocarburants pouvait s’apparenter à une fausse bonne idée, la dépense primaire d’énergie étant excessive.

Aujourd’hui, nous mettons plutôt l’accent sur le photovoltaïque, même s’il convient de déplorer que la filière industrielle ne soit pas française. Pour l’éolien, les jeux semblent déjà faits, sauf peut-être pour ce qui concerne les éoliennes Vergnet…

M. Yves Cochet. Rustiques mais efficaces !

M. François Drouin. … bien adaptées à certaines conditions climatiques, comme l’a montré leur installation en Ethiopie.

Il ne faut pas négliger non plus les pistes ouvertes par le solaire direct obtenu par les installations de fours. La France peut trouver là des longueurs d’avance à prendre, ne les négligeons pas !

S’il n’est certainement pas une panacée, le véhicule électrique constitue un bon complément, en particulier pour les déplacements urbains et si l’électricité utilisée est décarbonée. L’obstacle du stockage des batteries n’est pas levé, mais plusieurs entreprises – notamment Heuliez ou Michelin – conduisent des programmes de recherche prometteurs.

Dans la mesure où sont consentis des avantages financiers non négligeables, il convient de faire preuve de discernement en veillant à ne pas soutenir des filières douteuses, comme la production d’électricité à partir de panneaux photovoltaïques entraînés durant la nuit par un groupe électrogène à moteur thermique… (sourires)

Le soutien d’OSEO au transport fluvial prend essentiellement la forme d’une aide à la batellerie permettant l’achat de bateaux plus importants. Ce soutien est opéré par le biais du fonds « Fluvial initiative » qui est encore peu connu.

OSEO soutient également des projets en faveur de la biomasse de deuxième génération, tels que le projet « Futurol » à hauteur de 30 millions d'euros. Ainsi, un important projet est mené à Nogent-sur-Seine et un démonstrateur de distillation de la biomasse fonctionne déjà.

M. le président Christian Jacob. La dernière étude de l’ADEME, cofinancée par le ministère du développement durable et de l’agriculture, que nous tenons à votre disposition, démontre qu’il y a une différence de prix de l’ordre de 30% entre les biocarburants et le pétrole sans prendre en compte ses coûts d’extraction.

M. Jean-Marie Sermier. Dans le domaine du développement des voitures propres, la filière de l’hydrogène bénéficie-t-elle des crédits d’OSEO ? Par ailleurs, la France enregistre un certain retard dans le domaine de la méthanisation ; c’est pourtant une énergie propre qui pourrait ouvrir de nouveaux débouchés au monde agricole mais il y a besoin d’un financement important et d’une structuration du marché : OSEO est-elle engagée dans cette voie ?

Vous êtes peu intervenu sur la filière bois ; agissez-vous en faveur de la filière française qui est très morcelée par rapport à nos concurrents américains ? Certains crédits sont disponibles dans le cadre des pôles d’excellence rurale, mais il serait utile que les collectivités territoriales puissent en bénéficier en tant que porteurs de projet.

M. Philippe Plisson. La crise ayant accru les interventions dans le domaine de la garantie des PME, avez-vous désormais l’impression que l’aide à l’innovation enregistre une certaine reprise, notamment dans le domaine du développement durable ?

Enfin, le projet actuellement mené en Gironde, visant à acheminer vers Bordeaux ceux qui y travaillent par voie fluviale, pourra-t-il bénéficier d’une participation d’OSEO ?

M. Jacques Le Nay. Que manque-t-il aux PME françaises pour être compétitives et se développer davantage à l’international ?

M. Martial Saddier. Pouvez-vous nous dire quel est le délai de réponse moyen d’OSEO lorsqu’elle est saisie d’une demande d’aide par une entreprise ? Avez-vous l’impression que les besoins sont maintenant plus importants dans le domaine de l’investissement que dans celui de la trésorerie ? Quelle est la politique interministérielle dans ce domaine ? Quelles sont vos interventions dans le domaine de la transformation du bois et dans celui du stockage du CO2 ?

M. André Vézinhet. Il est dommage d’opposer recherche fondamentale et recherche appliquée. Par ailleurs, dans le domaine du photovoltaïque, il y a actuellement beaucoup de projets réalisés avec les panneaux fabriqués à l’étranger, notamment en Chine, dont la qualité fait l’objet d’interrogations. Quelles sont vos actions en faveur de la production en France de panneaux solaires de meilleure qualité ?

M. Jérôme Bignon. En termes d’aménagement du territoire, peut-on considérer que la répartition des crédits d’OSEO sur l’ensemble de la France est satisfaisante ? Par ailleurs, quel est votre regard sur le fonctionnement actuel des banques dans le financement de la croissance des entreprises ? Les outils d’OSEO en faveur des entreprises (aides, prêts, reconstruction des bilans, investissements…) sont-il suffisants ? Peuvent-ils être améliorés ?

M. Maxime Bono. S’agissant du faible développement des PME françaises à l’international, considérez-vous qu’il provienne d’un manque de brevets en amont ou d’un manque d’innovation ou de financement en aval ?

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Dans le même ordre d’idée, serait-il imaginable qu’OSEO joue un rôle d’intermédiaire entre les entreprises pour aider au financement et à la recapitalisation des PME ? Au-delà de ce qui existe en matière de crédit d’impôt recherche, leur accès au financement est en effet souvent un parcours du combattant !

Mme Martine Lignières-Cassou. Quelle est la part du budget d’OSEO destiné respectivement à l’innovation et au soutien des entreprises ? N’est-on pas en train d’ajouter des missions à OSEO au détriment de l’aide à l’innovation ?

Mme Françoise Branget. Le rôle d’OSEO en faveur de la garantie du patrimoine du fondateur d’une entreprise individuelle à responsabilité limitée sera-t-il tenu ?

M. Jean-Luc Pérat. Les collectivités locales peuvent-elles bénéficier du prêt en faveur des petits projets fluviaux ? Les pôles d’excellence rurale de nouvelle génération permettront-ils de soutenir la production de bois locaux tout en luttant contre la déforestation ? Quelles sont les interventions d’OSEO en faveur des carrières, visant notamment à permettre leur mobilisation dans le domaine de la construction ? Enfin quelles sont vos réflexions s’agissant de la place des femmes dans l’entreprenariat ?

Mme Fabienne Labrette-Ménager remplace M. Christian Jacob à la présidence.

M. François Drouin. Pour la filière hydrogène, il existe de nombreux projets en amont ou, plus précisément, des parties de projets s’inscrivant dans des actions globales. OSEO soutient, par ailleurs, des sylviculteurs ou des scieries, mais connaît peu de projets concernant la filière bois. Qu’en est-il d’un soutien apporté aux collectivités territoriales partenaires de pôles d’excellence rurale ? En réalité, OSEO n’intervient qu’auprès d’entreprises et ne soutient donc pas les projets portés par des collectivités locales en tant que telles.

Voit-on aujourd’hui les signes d’une reprise économique ? Il semble que cela soit effectivement le cas, après qu’on a observé de réelles difficultés sur la trésorerie des entreprises en juillet puis août 2009 et un peu moins au second semestre de l’année ; depuis janvier 2010, la situation globale s’est améliorée.

OSEO a accordé une garantie aux banques pouvant atteindre le niveau de 90 %, soit pour toutes les entreprises de moins de 5 000 salariés, un soutien de 15 millions d’euros. Le taux de garantie a été ramené à 70 %, ce qui ne semble pas créer de vrais problèmes, les banques acceptant de prendre des risques. OSEO a bien fait d’offrir de telles garanties, permettant à 50 % des entreprises concernées d’éviter le dépôt de bilan. L’aide apportée a été ainsi efficace, sans être coûteuse, puisque l’on a observé jusqu’à ce jour un faible niveau de sinistres.

OSEO peut apporter des aides aux secteurs de l’énergie éolienne et du transport fluvial, dès lors que sont concernés des entrepreneurs et non des collectivités territoriales. Le soutien accordé se fait toujours au plus près du terrain, les décisions se prenant localement dans nos 42 implantations en province.

Comment faire pour que nos entreprises soient plus tournées vers l’international ? Il y a en réalité un lien particulier entre le développement à l’extérieur et l’innovation, comme l’a montré une étude menée en collaboration avec Ubifrance, qui a révélé que 94 % des entreprises qui innovent se tournent vers l’international dans les trois ans et ceci, même s’il s’agit de petites entreprises. On peut estimer ainsi que soutenir l’innovation, c’est soutenir dans le même temps l’international.

OSEO est confronté à une insuffisance globale des demandes en matière d’investissement qui, lorsqu’il est réalisé, concerne plus les restructurations de filières que les constructions proprement dites. OSEO fait ainsi face ainsi à une demande moindre de trésorerie, mais sans que la part de la demande d’aide à l’investissement ne progresse.

Des projets d’investissement très lourds mais peu nombreux existent en matière de stockage de carbone. Ils sont en fait portés par de très grandes entreprises.

Mme Martine Lignières-Cassou. Il faut mentionner à cet égard le projet de Total sur le stockage de CO2.

M. François Drouin. L’État a confié la gestion du Fonds unique interministériel (FUI) à OSEO, qui vient de recevoir les fonds correspondants. Pour OSEO, il est essentiel de parvenir à une gestion réactive et rapide correspondant au rythme très court de l’innovation, et éviter une gestion trop « bureaucratique » des dispositifs.

Monsieur Vézinhet, vous avez raison de rappeler que les projets concernant le photovoltaïque fleurissent dans le sud de la France et qu’ils font appel pour l’essentiel à des panneaux d’origine chinoise ou américaine. Nous soutenons désormais des projets français, notamment en Mayenne, mais force est de constater que l’on a un peu mis « la charrue avant les bœufs » en créant un marché – via des tarifs de rachat particulièrement attrayants – sans avoir constitué au préalable une filière industrielle nationale.

S’agissant de la répartition géographique des projets sur lesquels nous intervenons, je précise que nous n’avons pas de politique de zonage ou d’harmonisation territoriale, ce qui pose parfois des problèmes locaux d’adaptation de nos effectifs à la demande, la capacité d’innovation de chaque région étant éminemment variable. L’axe Paris Lyon Marseille – en incluant Grenoble – est le plus puissant du point de vue de l’innovation. Dans d’autres régions, nous avons des équipes mais très peu de dossiers à gérer.

Les relations d’OSEO avec les banques sont essentielles puisque, de fait, nous ne travaillons jamais seuls avec les entreprises. Hors quelques exceptions ponctuelles, nous agissons en partenariat avec le réseau bancaire, au point que nous donnons parfois délégation aux banques pour délivrer notre garantie. L’obtention de la garantie d’OSEO par l’entrepreneur est alors instantanée et s’obtient « en un clic informatique », ce qui donne une très grande réactivité.

J’ai été interrogé sur les liens entre le Fonds stratégique d’investissement (FSI) et OSEO : à l’évidence, nous ne jouons pas dans la même cour. L’année dernière, le FSI n’a procédé qu’à une vingtaine d’interventions, dont la moitié lui avait été transmise par la Caisse des dépôts. En outre, le FSI n’agit que sur le capital des entreprises alors qu’OSEO, notamment dans le cadre des contrats de développement participatifs, procure aux entrepreneurs des quasi fonds propres sans nécessité pour eux d’ouvrir leur capital, ce qui est extrêmement avantageux.

Le 5 octobre dernier, le Président de la République a annoncé conjointement qu’un milliard d’euros serait dévolu au FSI pour investir dans le capital des plus petites entreprises, cependant qu’OSEO recevrait la même somme pour lancer les contrats de développement participatifs. A ce jour, 350 contrats ont été conclus. Le prêt consenti aux entreprises peut atteindre 3 millions d’euros et un effet de levier de un à deux est systématiquement recherché : ainsi, l’entreprise peut recevoir jusqu’à 3 millions d’euros d’OSEO et 6 millions des banques, ce qui peut représenter un apport maximal -non négligeable ! - de 9 millions d’euros. S’y ajoutent des prêts verts bonifiés dédiés au développement durable, qui constituent un excellent outil pour les entreprises compte tenu de la faiblesse des taux d’intérêt actuels. Au total, nous disposons d’un dispositif de soutien extrêmement complet et des ressources pour l’alimenter.

Je ne crois pas à la notion de taille critique pour se développer à l’international car je considère que le problème est plus général : il existe une taille critique pour être viable et les PME françaises sont trop petites. C’est pourquoi nous les incitons à se regrouper pour grandir. Il convient aussi de mieux faire connaître aux entreprises les moyens dont elles disposent pour obtenir des capitaux. A cet effet, nous avons constitué une communauté virtuelle forte de 2 000 chefs d’entreprises, choisis pour leur potentiel de développement à cinq ans, au sein du réseau « OSEO excellence ». L’animation régionale de ce réseau commence à s’organiser et nous en attendons beaucoup.

Un autre axe fort de notre politique consiste à sensibiliser les contribuables assujettis à l’ISF au dispositif d’investissement dans la PME de leur choix, créé il y a trois ans. Le site Internet « capital-pme.oseo.fr » permet de mettre en contact redevables de l’ISF et entrepreneurs : le succès du dispositif nous a surpris. Alors que nous pensions qu’il porterait en priorité sur de petits montants, la somme moyenne investie s’est élevée à 21 000 euros en 2008 et à 28 000 euros l’année dernière. Gratuit pour l’Etat et particulièrement efficace, ce système bénéficie en priorité aux entreprises innovantes. Chaque année, le 15 juin à minuit – date d’exigibilité de la redevance à l’ISF -, l’argent parvient aux PME !

Je rappelle qu’il n’entre pas dans la vocation d’OSEO d’intervenir en faveur des entreprises en difficulté. Même si la notion semble aujourd’hui un peu fluctuante du fait de la crise économique et financière, nous n’intervenons qu’en faveur des entreprises « saines ».

Au titre de l’innovation, nous avons bénéficié en 2009 de 500 millions d’euros de dotations d’Etat en vue de distribuer des subventions et des avances remboursables. En 2008, ce montant avait atteint 800 millions et il devrait être cette année de 500 millions, Fonds unique interministériel (FUI) de financement des pôles de compétitivité inclus. L’aide à l’innovation, c’est, pour les entreprises, du très bon argent avec des taux de remboursement particulièrement compétitifs. Au titre de la garantie des fonds prêtés par les banques, l’action d’OSEO s’inscrit dans des modalités très différentes puisqu’il s’agit essentiellement d’une participation au risque avec un effet de levier significatif. Je ne manquerai pas, Mesdames et Messieurs les députés, de vous communiquer un tableau retraçant nos différentes formes d’intervention.

Nous n’aurons pas de difficulté à intégrer la réforme de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) car le statut juridique de l’entreprise n’influe pas sur nos modalités d’intervention.

Je rappelle que nous n’avons pas vocation à soutenir les collectivités locales et que les projets qu’elles portent ne sont donc pas éligibles à nos actions. S’agissant des pôles d’excellence rurale (PER) de deuxième génération récemment lancés par M. Michel Mercier, rien ne s’oppose à ce que nous soutenions certains de leurs projets. Qu’elles soient en milieu rural ou urbain, animées par des femmes ou par des hommes, toutes les entreprises qui tendent à innover en créant de la richesse à partir d’une idée peuvent s’adresser à nous.

M. Philippe Boënnec. Je salue l’efficacité de l’action d’OSEO dont le travail est réellement d’utilité publique. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre statut juridique ? A quel niveau se situe votre prise de risque par rapport à celle que les banques sont prêtes à assumer ?

M. François Drouin. La réactivité est un élément clé de la culture d’OSEO et nous la devons au fait d’être au contact quotidien des PME. Du reste, je suis convaincu que l’efficacité n’est pas liée au statut juridique et qu’il n’est pas interdit à une entreprise publique d’être performante !

L’EPIC OSEO est la tuile faîtière du dispositif. Il est essentiel que l’établissement reste majoritairement contrôlé par l’Etat pour mener une politique en faveur des PME. Hors l’Etat, nous avons de nombreux actionnaires – près de 500 –, ce qui ne manque pas de causer quelques frottements. Les différentes structures qui composent le groupe (OSEO innovation, OSEO garantie, OSEO financement,…) ne sont pas encore fusionnées même si j’en suis le seul PDG. Sur le terrain, les équipes sont fusionnées sous l’autorité des directeurs régionaux mais les statuts des personnels peuvent encore différer.

Heureusement, les dispositions adoptées au début de ce mois dans le cadre de la loi relative à l’EIRL devraient nous aider à rationaliser notre organisation et à réduire le nombre de structures, et, partant, à faire des économies de fonctionnement, sans doute de l’ordre de 2,5 millions d’euros par an. À terme, il y aura une SA coiffée par l’EPIC.

M. Jérôme Bignon. Pourquoi conserver alors un EPIC plutôt que de s’orienter vers une fusion complète ?

M. François Drouin. Il n’est pas mauvais que la puissance publique conserve une structure « État pur sucre » pour définir sa stratégie. En outre, cela présente un intérêt pour les marchés car il est pour eux préférable de bénéficier de la garantie explicite d’un EPIC plutôt que de celle, implicite, de l’Etat. Un EPIC doublé d’une SA représente un bon dispositif !

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Il me reste, Monsieur le Président directeur général, à vous remercier pour la précision de vos réponses. Nous nous félicitons de l’efficacité d’OSEO, dont les délais d’intervention sont remarquables : votre excellent travail profite à de très nombreuses entreprises.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 26 mai 2010 à 9 h 30

Présents. - M. Jérôme Bignon, M. Philippe Boënnec, M. Maxime Bono, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Françoise Branget, M. Jean-Paul Chanteguet, M. André Chassaigne, M. Yves Cochet, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, M. Stéphane Demilly, M. Philippe Duron, M. Albert Facon, M. Yannick Favennec, M. Daniel Fidelin, M. André Flajolet, Mme Geneviève Gaillard, M. Serge Grouard, M. Jacques Houssin, M. Christian Jacob, M. Armand Jung, M. Jacques Kossowski, Mme Fabienne Labrette-Ménager, Mme Conchita Lacuey, M. Jacques Le Nay, Mme Annick Lepetit, M. Bernard Lesterlin, M. Gérard Lorgeoux, M. Jean-Pierre Marcon, Mme Christine Marin, M. Bertrand Pancher, M. Jean-Luc Pérat, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Marie-Line Reynaud, M. Martial Saddier, Mme Françoise de Salvador, M. Jean-Marie Sermier, M. André Vézinhet

Excusés. - M. Lucien Degauchy, M. Pierre Lang

Assistait également à la réunion. - Mme Martine Lignières-Cassou