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Commission des affaires économiques

Mercredi 20 octobre 2010

Séance de 10 heures 30

Compte rendu n° 8

Présidence de M. Patrick Ollier Président

– Audition de Mme Catherine Vautrin, présidente de la commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC)

La commission a auditionné Mme Catherine Vautrin, présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC).

M. le Président Patrick Ollier. Monsieur Brottes, vous avez la parole pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. Je voudrais vous faire part, Monsieur le Président, des demandes du groupe SRC pour les travaux à venir de la Commission.

Tout d’abord, nous souhaiterions avoir des éclaircissements sur les fameux 4 000 MW qui seraient en stock concernant les raccordements photovoltaïques : la polémique est en train d’enfler sur la réalité du fondement de ce chiffre. Il appartient à notre Commission de faire toute la lumière sur cette affaire et notamment d’obtenir des chiffres précis, région par région, sur les demandes de raccordement qui entravent les dispositions à mettre en œuvre par ERDF, et ce d’autant plus que nous sommes dans une période de mutation concernant les tarifs de rachat.

La deuxième demande a trait au régime de La Poste. M. le Président, vous êtes très attaché au contrôle de l’application de la loi. Un texte a été voté en urgence en 2010 pour permettre d’augmenter le capital de La Poste, changer son statut afin de lui permettre d’acquérir un certain nombre de positions et réaliser un certain nombre d’investissements. Or, nous constatons qu’il n’y a pas eu un seul euro investi par l’État dans le capital de La Poste depuis le changement de statut. Il semblerait, en outre, que l’État attende de connaître l’apport de la Caisse des dépôts et consignations pour fixer le niveau de sa propre participation. Parallèlement, le Gouvernement a en projet de diminuer le commissionnement des banques sur le livret A. La Poste est concernée au premier chef, elle va donc perdre des recettes : or si elle ne tient pas son objectif de recettes, j’ai cru comprendre que l’État n’investirait pas dans son capital. Qu’en est-il exactement ? Et surtout, y avait-il réellement urgence à légiférer compte tenu de la situation actuelle ?

Troisième demande : nous souhaitons que dans le cadre de l’application de la loi, nous examinions les modalités d’application de la loi DALO, qui suscitent quelques inquiétudes. Comme nous le faisons sur les pratiques commerciales, nous devons creuser le sujet.

Enfin, en matière de crédit d’impôt recherche, mais également de certificats d’économie d’énergie ou encore de droit du travail, notamment avec la question des franchises, on constate qu’un certain nombre d’entreprises ont tendance à se démanteler pour servir au mieux leurs intérêts et obtenir soit une fiscalité plus avantageuse, soit de moindres contraintes en matière de droit de travail. Notre quatrième demande, qui pourrait d’ailleurs associer la Commission des finances puisque cette tendance concerne tous les secteurs de l’économie, consisterait à étudier les dérives existantes en matière de démantèlement artificiel des sociétés.

M. le Président Patrick Ollier. Monsieur Brottes, j’apprécie le caractère constructif de votre rappel au règlement et les propositions légitimes et judicieuses que vous avancez.

Sur le premier point concernant le photovoltaïque, il y a effectivement une réelle interrogation sur le problème que vous évoquez : c’est de la compétence de notre Commission de travailler sur cette question. Nous avons d’ailleurs déjà commencé à le faire, puisque j’ai encore évoqué ce point hier avec le cabinet du ministre d’État, M. Jean-Louis Borloo. Je crois qu’une audition s’impose effectivement sur ce que l’on appelle désormais la « bulle photovoltaïque », qui est en train de gonfler et risque d’exploser. Cette spéculation autour de la CSPE est inquiétante. Le Gouvernement en est parfaitement conscient et des mesures vont être prises. Mais je vais demander à M. Jean-Louis Borloo de venir devant la Commission le plus rapidement possible ; en revanche, le lancement d’une mission me paraît prématuré.

S’agissant de votre deuxième demande, nous en avions déjà parlé et j’avais évoqué avec M. Jean Proriol, rapporteur sur le projet de loi, le lancement de la mission de suivi de l’exécution de la loi. Cependant, M. Proriol travaille actuellement avec M. Gaubert sur la mission relative aux réseaux de distribution d’électricité et souhaite logiquement achever ses travaux avant de passer au contrôle de l’application de la loi. Nous pouvons néanmoins dans un premier temps programmer l’audition de M. Estrosi ou de M. Bailly, le contrôle de l’exécution de la loi pouvant être lancé par la suite.

Pour la loi DALO, je vous rappelle que la commission compétente au fond est la Commission des affaires sociales. Étant moi-même très attaché à la défense de nos prérogatives, j’estime que nous ne pouvons pas lancer une initiative qui empièterait sur les compétences d’une autre commission. Je veux bien saisir le Président Méhaignerie pour lui suggérer une initiative conjointe mais je ne lancerai pas de mission spécifique sur le sujet.

Enfin, sur le quatrième et dernier point, le sujet que vous avez abordé concerne à la fois le droit du travail, les finances, le commerce. Il s’agirait globalement d’une mission commune sur les effets d’aubaine : vous comprendrez que je ne puisse pas, là non plus, vous donner une réponse immédiate mais je vais en parler aux présidents de commission concernés.

M. Goldberg. Qu’en est-il de l’action de la Commission en matière de crédit d’impôt recherche ?

M. le Président Patrick Ollier. La Commission des finances a toute compétence pour intervenir en matière budgétaire, quel que soit le domaine concerné. Je peux cependant vous assurer que s’agissant du crédit d’impôt recherche, il y a un fort débat interne à la majorité auquel les députés de la Commission des affaires économiques participent activement dans l’objectif de défendre ce dispositif et de limiter les effets des amendements de la Commission des finances, car 1 euro de crédit d’impôt recherche, c’est 2 euros de recherche supplémentaire et 1 point de PIB en plus dans les dix années qui suivent. Je peux d’ores et déjà vous dire que suite aux discussions que nous avons eues, la Commission des finances va renoncer à la consolidation, qu’elle accepte une remontée de 50 % à 75 % et qu’elle est d’accord pour que tous les matériaux de recherche soient pris en compte dans l’assiette. Le rabot va donc passer d’une échelle de 11 à 6. Et nous allons tenter d’aller plus loin : Mme de La Raudière a des amendements, Serge Poignant et moi-même également, pour limiter encore la portée de ceux déposés par la Commission des finances. Et je peux vous le dire, nous avons l’appui du Gouvernement dans cette démarche. Il faut se battre contre les conclusions de la MEC qui, si elles étaient mises en œuvre, auraient des effets pervers importants. Je suis là dans une démarche sincère, menée au nom de la Commission des affaires économiques, contre la Commission des finances, dont les amendements sont cosignés par le rapporteur général et par le Président de la Commission qui, comme vous le savez, n’appartient pas à la majorité. Le débat aura lieu en séance, donc n’hésitez pas, M. Goldberg, chers collègues de l’opposition, à venir apporter votre soutien à nos amendements !

Nous allons maintenant procéder à l’audition de Madame la Présidente de la CEPC, qui est également la spécialiste de la majorité au sein de notre Commission en matière de relations commerciales : elle a remplacé en cela Jean-Paul Charié, et travaille désormais, pour l’opposition, avec Jean Gaubert.

Très brièvement, la CEPC a été créée le 15 mai 2001 par la loi relative aux nouvelles régulations économiques. Elle est aujourd’hui au cœur du suivi de la mise en œuvre de la LME, notamment avec l’initiative des « Mardis de la LME » qui ont pour objectif d’essayer de mettre en œuvre des solutions partenariales, via le dialogue et la concertation, et notamment de régler par accord la question du « déséquilibre significatif », notion que nous n’avons pas été capables de préciser dans la LME.

Je souhaiterais que nous puissions évoquer avec vous, Madame la Présidente, plus particulièrement deux points :

– tout d’abord, la question prioritaire de constitutionnalité : qu’en est-il aujourd’hui alors que, vendredi dernier, la Cour de Cassation, saisie en juillet par le tribunal correctionnel de Bobigny, a accepté de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la constitutionnalité du « déséquilibre significatif » ?

– ensuite, l’attitude des distributeurs, qui semblent tenir un double langage en acceptant les règles fixées par la loi, tout en durcissant la négociation et en adoptant des pratiques que je considère comme illégales, comme par exemple les déréférencements.

Merci de nous expliquer également comment vous travaillez dans le cadre de la CEPC et ce que vous attendez de la Commission des affaires économiques pour soutenir votre action ou interpeller le Gouvernement sur ce qui ne va pas.

Mme Catherine Vautrin, présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC). Mes chers collègues, présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales depuis maintenant 10 mois, dans les circonstances que vous savez, puisque j’ai succédé à notre regretté collègue et ami Jean-Paul Charié, je vous propose de faire aujourd’hui un point sur les missions de la CEPC, de dresser un bilan d'activité et je conclurai mon propos sur l'actualité récente des relations commerciales

Cénacle pluraliste, rassemblant élus (un député et un sénateur), magistrats, acteurs économiques, personnalités qualifiées et représentants de l’administration (DGCCRF), la CEPC est un lieu où l’on débat de problèmes économiques essentiellement sous l’angle juridique, ce qui est à la fois une force et parfois peut apparaître comme une faiblesse. Aborder les sujets sous l’angle du droit ne doit pas étonner puisque la CEPC doit en effet donner des avis, émettre des recommandations, arrêter des bonnes pratiques qui, par la suite, seront autant de règles dotées d’une véritable force juridique qui ne manqueront pas d’inspirer la jurisprudence. Pour autant il me semble que la CEPC doit également appréhender les sujets sous un angle économique, davantage en prise avec la sphère réelle si je puis m’exprimer ainsi.

Depuis le vote de la LME, 107 questions-réponses ont été examinées par la commission dont 43 questions en 2010 sur les sujets suivants :

– 10 sur les conditions de règlement (retenue usuelle, déductions du règlement, déductions de pénalités) ;

– 26 sur les abus dans les relations commerciales (discrimination, CGV catégorielles, déduction de pénalités) ;

– 4 sur la facturation (validité du mode de transmission de la facture, délais de recours, répercussion ou non des éco taxes) ;

– 3 sur la négociation commerciale : tarif, convention unique ;

Par ailleurs, cinq avis ont été adoptés en 2010 :

– le premier concerne la publicité comparative et les conditions nécessaires à la licéité de l'opération ;

– le second sur la licéité d'une opération publi-promotionnelle menée par un distributeur ;

– le troisième sur l'examen d'une opération promotionnelle au regard de l'interdiction de la revente à perte ;

– le quatrième sur l'utilisation de nouveaux instruments promotionnels pour une communication sur les prix, réalisée par des distributeurs sur le marché du jouet ;

– enfin le cinquième que nous avons rendu fin septembre, concerne les modifications de l'organisation logistique des approvisionnements.

Rapidement, je souhaiterais maintenant vous donner quelques éléments sur cette saisine, comme illustration de notre travail. En général, une organisation professionnelle de l'industrie nous interpelle sur le problème des modifications de l'organisation logistique des approvisionnements puisque le passage à cette nouvelle organisation doit se faire dans certains cas en quelques semaines, la réduction importante des stocks en entrepôts et l'adoption de la technique des flux tendus visés par la demande du distributeur conduisant à de fortes modifications des schémas logistiques en vigueur, les conséquences pour les fournisseurs pouvant être :

– une augmentation du nombre des livraisons hebdomadaires ;

– une réduction des quantités livrées ;

– des délais de livraison plus courts.

La CEPC s'est prononcée, sur le fondement de l’article L. 440-1 du code de commerce, sur la légalité de la demande et les éventuels risques de création de déséquilibre significatif ; elle a ensuite rendu un avis quant à la mise oeuvre de bonnes pratiques relatives à nouveau schéma logistique exigé par un distributeur en précisant que celui-ci nécessitait :

– des délais d'adaptation suffisant (plusieurs mois) pour que le fournisseur puisse s’organiser ;

– que les coûts supportés par les fournisseurs en cause soient estimés de même que les gains réalisés par le distributeur ;

– que, si la modification du flux logistique devait intervenir après la signature de la convention unique, les parties s'accordent sur une répartition du solde entre gain pour les uns et coût supplémentaire pour les autres.

Les sujets abordés par la CEPC peuvent potentiellement concerner tous les secteurs d'activité, mais force est de constater que le prisme agro-alimentaire est très fort. Cela s’explique facilement. La France peut s’enorgueillir d’avoir des producteurs performants, notamment dans le secteur alimentaire, qui fournissent des produits dont la qualité est reconnue bien au-delà de nos frontières. Par ailleurs, notre modèle français de distribution est également salué comme étant un des meilleurs au monde et, pourtant, nous perdons régulièrement des parts de marché comme en témoignent les chiffres les plus récents de notre commerce extérieur. Ainsi, depuis 2000, le marché agro-alimentaire mondial croît de 5 % par an (en moyenne exprimé en euros, 8 % en dollars). Sur la même période, la croissance des exportations françaises est moitié moindre et la part de marché mondial de la France a baissé d’environ deux points. Même si notre recul est en partie dû aux effets de la crise, à l’appréciation de l’euro par rapport aux autres devises, au renforcement de la compétitivité-prix de nombreux concurrents notamment parmi les pays émergents, cette moindre performance est également due à des facteurs strictement nationaux. Une réflexion profonde sur notre propre manière de fonctionner doit donc être conduite : c’est notamment ce que fait la CEPC à travers ses avis.

La CEPC effectue en parallèle des études juridiques ; deux ont été adoptées cette année: l'une reprend les bilans établis par la DGCCRF pour les décisions judiciaires intervenues en matière de transparence et de pratiques restrictives de concurrence et par la faculté de droit de Montpellier (spécialisée dans le droit des relations commerciales) sur les décisions judiciaires rendues sur les actions engagées par les seuls acteurs économiques. L'autre est spécifiquement relative à l'application de la LME dans le temps. En parallèle 3 groupes de travail dédiés ont travaillé sur les sujets suivants :

– la convention unique

– le déséquilibre significatif

– les marques de distributeurs (MDD)

Le 7 juillet dernier, nous avons présenté les sept recommandations de la CEPC relatives à l’élaboration des contrats MDD. Y sont détaillées les modalités principales d'un contrat depuis sa genèse, sa durée, l'interdiction de faire appel à la coopération commerciale rémunérée par le fournisseur pour stimuler les ventes, le respect d'engagements de volume, l'encadrement des audits, les conditions de rupture de contrat et la protection du savoir faire. Je souligne que la part des MDD est passée de 17 à 34 % entre 1997 et 2008. C’est donc un sujet très sensible puisque, en 2008, les MDD étaient fabriquées à 57 % par des PME nationales (notamment dans le secteur du papier, de la crémerie…) ! Nous sommes convenus d'approfondir plus particulièrement la notion de « protection du savoir-faire » ; pour cela le groupe de travail va poursuivre son travail. Malheureusement, les deux autres groupes n'ont pas connu la même évolution. Pour ce qui est de la convention unique, après 9 mois d'échanges les travaux ont été interrompus faute d'accord ; pour le déséquilibre significatif, entre l’épisode des neuf assignations et la QPC, il est apparu sage à la CEPC de s'effacer devant le juge et d’attendre les décisions qui devront être rendues.

Or, dans le silence de la loi comme de la jurisprudence, les différents acteurs économiques se sont trouvés face à un véritable vide juridique, chacun en profitant le cas échéant pour adopter des comportements contraires aux bonnes pratiques qui devraient normalement prévaloir dans le secteur du commerce. On a rapidement constaté, en pratique, un véritable problème de définition : la notion de « déséquilibre significatif » n'est toujours pas fixée aujourd'hui depuis août 2008, pas plus au plan juridique qu'au plan jurisprudentiel, je vais y revenir.

C’est donc ce double constat, la dimension parfois théorique des débats au sein de la CEPC et les inévitables imperfections de la loi, qui a motivé mon souhait de créer « les Mardis de la LME », réunions hebdomadaires que je vous ai déjà présentées il y a quelques semaines. Dans un cadre différent, peut-être plus pragmatique, j’ai donc souhaité associer notamment l’ensemble des distributeurs (Intermarché, Casino, Carrefour, Système U, Auchan, Casino, Leclerc), un certain nombre de fournisseurs (Pains Jacquet, Mars, Somapro, Kronenbourg, le groupe Seb, Bourgeois…) et, mais seulement à titre d’observateurs avisés, les grandes fédérations œuvrant dans le secteur du commerce (ANIA, CGAD, FCD, ILEC, CGI, FIEEC). La confrontation des expériences ressenties et éprouvées sur le terrain nous a ainsi permis d’avancer sur plusieurs points depuis le 1er septembre dernier, date de notre première réunion. Au fil de nos différents rendez-vous qui ont chacun duré trois heures en moyenne, nous avons travaillé à ce jour sur quatre thématiques : la logistique, les effets des variations des prix des matières premières sur le niveau général des prix, les nouveaux instruments promotionnels et la convention unique. Certes, en se fondant parfois sur le plus petit dénominateur commun, l’ensemble des participants a néanmoins été convenu d’adopter un certain nombre de bonnes pratiques que je souhaite vous présenter brièvement :

– sur la logistique, fournisseurs et distributeurs sont tombés d’accord pour préciser dans un document (en principe la convention unique) les modalités logistiques dont ils seront convenus afin de pouvoir les modifier facilement en cours d’exercice ; en outre, ils acceptent d’établir un cahier des charges, qui aurait vocation à être annexé à cette convention unique, dans lequel seraient notamment définies les relations devant exister entre le fournisseur, le distributeur et le prestataire extérieur, c’est-à-dire le logisticien ;

– sur le sujet fondamental des prix, plus particulièrement sur la manière dont il convient de répercuter les variations de prix des matières premières dans les relations entre fournisseurs et distributeurs, nous avons veillé à dégager des points de consensus en évitant un double écueil : ne faire peser les variations de prix que sur un seul acteur afin de préserver le pouvoir d’achat du consommateur et, au contraire, laisser se former une véritable spirale inflationniste. Sur ce sujet, les fournisseurs se sont engagés à expliciter les éléments qui conduisent à une hausse ou à une baisse des prix afin de parfaire leur lisibilité et de faciliter l’explication du phénomène, permettant ainsi aux distributeurs d’accéder ensuite à leur demande de prise en considération d’une hausse ou d’une baisse de tarifs. En outre, tous sont d’accord pour que l’on adopte un parallélisme des formes pour répercuter les prix selon qu’il s’agit d’une augmentation ou d’une diminution ;

– en ce qui concerne les nouveaux instruments promotionnels (les « NIP »), un accord est intervenu pour considérer que, à partir du moment où les NIP étaient inclus dans un contrat de mandat établi ex ante, il était ensuite impératif d’établir une reddition des comptes afférents à une date fixée contractuellement ;

– enfin, en ce qui concerne la convention unique, terme auquel tous se sont ralliés et que je trouve préférable à celui de « plan d’affaires », qui n’est pas juridiquement consacré et qui désigne tout autre chose, les participants sont d’accord pour faire en sorte que la convention unique soit signée non le 1er mars au plus tard comme le spécifie pourtant le code de commerce,mais plutôt au 31 décembre afin de la faire coïncider avec l’année civile, par ailleurs période de référence pour l’établissement de nombreux autres documents comptables ou administratifs. Les parties se sont également engagées à transmettre au plus tôt les différents documents (CGV, conditions générales de vente, CGA, conditions générales d’achat…) nécessaires pour pouvoir commencer leurs négociations commerciales avant la fin du mois de septembre.

Voilà donc ce sur quoi nous nous sommes mis d’accord. Je souhaite que ces conclusions soient par la suite présentées à la CEPC afin que celle-ci les entérine le 4 novembre prochain et, de ce fait, leur donne force juridique.

Même si ces avancées peuvent vous sembler modestes, elles n’en constituent pas moins un nouveau pas vers le développement de bonnes pratiques propres à faciliter les relations entre fournisseurs et distributeurs. En outre, et ce n’est peut-être pas le moindre des avantages des « Mardis de la LME », ces différents accords ont été obtenus à l’issue de discussions fructueuses entre partenaires commerciaux.

En effet, le modèle commercial français est basé sur une opposition stricte, parfois dure et frontale, entre, d’un côté, les fournisseurs et les producteurs, de l’autre, les distributeurs, chacun fonctionnant et raisonnant donc selon une logique qui lui est propre. Si le fournisseur s’attache en premier lieu à mesurer la création de valeur que génère son activité, le distributeur préfère regarder immédiatement la rentabilité des capitaux qu’il a pu investir dans son secteur : complémentaires dans une certaine mesure, ces deux logiques s’affrontent néanmoins. De plus, le paysage commercial français est profondément inégalitaire puisqu’il confronte quelques géants de la distribution avec plusieurs milliers, voire dizaines de milliers de fournisseurs et petits producteurs, nécessairement captifs à leur égard. Il va en effet de soi que, lors des négociations commerciales, les distributeurs bénéficient d’un rapport de force qui est incontestablement à leur avantage ! Cette opposition doit donc nous conduire à favoriser les discussions entre les acteurs afin de maximiser les points d’accords.

À ce titre, je tiens à souligner que nous ne travaillons pas dans une tour d’ivoire mais, bien au contraire en liaison et en complément de nombreux autres acteurs. La CEPC collabore et échange de plus en plus avec différentes instances, qu’il s’agisse de l’Observatoire des prix et des marges, de l’Autorité de la concurrence ou du Médiateur des relations inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance. De manière générale d’ailleurs, la CEPC s’attache à œuvrer en complément de l’action des pouvoirs publics, qui reste essentielle par rapport à la politique gouvernementale et à la politique de contrôle.

Ainsi, je prendrai l’exemple des accords que M. Hervé Novelli, Secrétaire d’État aux PME, au commerce extérieur et à l’artisanat, a signés avec plusieurs professionnels du secteur de la distribution en matière de relations commerciales le 5 octobre dernier. Ce dernier exemple montre bien, la complémentarité qui existe entre les différents acteurs impliqués dans l’amélioration des relations commerciales. Alors que les « Mardis de la LME » avaient travaillé quelques jours auparavant sur ce sujet, la CEPC venait de rendre un avis le Gouvernement apporte à son tour une pierre à l’édifice en faisant naître de nouvelles « bonnes pratiques » dans le domaine de la logistique. Ces accords n’ont été signés que par les distributeurs, les fournisseurs n’ayant pas été associés à cette réunion. En outre, un distributeur a refusé de signer ces accords : de fait, seuls 83 % d’entre eux se sont engagés. C’est la raison pour laquelle je souhaite maintenant que ces accords passent devant la CEPC qui, cette fois-ci avec l’ensemble des acteurs concernés, les avalisera et leur donnera ainsi une véritable valeur juridique.

Une autre difficulté, et non des moindres, tient au respect de la parole donnée : il est indispensable naturellement de respecter les accords signés. Ainsi, nous avons récemment appris qu’un grand groupe de distribution s’apprêterait à effectuer un certain nombre de déréférencements à l’égard de fournisseurs qui auraient conclu des accords tarifaires plus intéressants avec un autre distributeur.

Sur un autre sujet, je l'évoquais il y a quelques instants, l'actualité récente montre que la notion de « déséquilibre significatif » n'est vraiment pas encore fixée. Cette notion très importante, introduite à l’article L. 442-6 du code de commerce par la LME, a fait aujourd’hui l’objet d’une Question prioritaire de constitutionnalité posée par le Tribunal de commerce de Bobigny le 13 juillet dernier. Vendredi dernier, la Cour de cassation, a décidé de renvoyer au Conseil constitutionnel le problème relatif à l’interprétation de la notion de « déséquilibre significatif », notion fondamentale dans les relations commerciales. Je ne vous cache pas que, si le Conseil rend une décision de non-conformité, le législateur devra vraisemblablement retravailler toute une partie du code de commerce relative aux négociations commerciales. En outre, dans l’attente de sa décision, ce sont l’ensemble des opérateurs qui voient leur horizon quelque peu obscurci alors que les négociations commerciales viennent de démarrer

Nous le voyons bien, le temps des affaires s’accommode mal du temps du temps du législateur et encore plus mal de celui de la justice !

Il revient en premier lieu aux acteurs économiques de s’organiser entre eux afin de peser davantage le cas échéant dans les négociations commerciales. Ainsi, pour reprendre une idée chère à notre collègue François Brottes, les fournisseurs peuvent, au même titre que les distributeurs, s’organiser en centrales d’achat afin de disposer d’une puissance économique nettement plus forte que celle de chaque affilié pris individuellement et de bénéficier ainsi d’une capacité de négociation très efficace. Cette capacité à se rassembler existe naturellement lorsque différents acteurs sont unis par des liens capitalistiques mais il leur appartient également de susciter de tels rapprochements et de s’organiser par eux-mêmes. Peut-être certains secteurs doivent-ils également, comme cela a pu se faire par le passé dans des domaines aussi stratégiques que l’automobile, l’aéronautique ou la chimie, s’organiser en filières ? C’est notamment dans cette optique que la prochaine réunion des « Mardis de la LME » qui doit se réunir le 3 novembre accueillera M. Jean-Claude Volot, Médiateur des relations inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance, que votre commission a déjà auditionné M. le Président, afin de réfléchir à cette approche filière.

Le plus petit dénominateur commun entre les acteurs est d’éviter d’avoir à légiférer de nouveau. Le sujet des relations commerciales a déjà fait l’objet de sept lois en vingt ans, suscitant aussi bien l’incompréhension des différents acteurs concernés qu’une insécurité juridique préjudiciable aux affaires et, in fine, à l’emploi. Nous saurons dans quelques semaines si le Conseil constitutionnel nous conduit à rouvrir le dossier. Dans tous les cas, je souhaite donc ardemment que nous parvenions à stabiliser les pratiques commerciales par le dialogue et la confrontation toujours féconde entre le droit et le fait. C’est la tâche à laquelle je m’emploie avec tous les membres de la CEPC et je compte bien parvenir à de nouvelles avancées dans les prochains mois.

M. le Président Patrick Ollier. Merci Madame la Présidente. Je pense que chacun mesure ici l’importance du travail de la CEPC et l’importance du rôle qu’elle joue. Les relations entre fournisseurs et distributeurs ne peuvent être entièrement réglées par la loi, comme nous avons pu le constater au moment des débats sur la LME. J’espère, en conséquence, que le travail fourni au sein de la CEPC pour aboutir à des décisions consensuelles sera couronné de succès. La solution doit être trouvée dans le partenariat plutôt que dans des conflits stériles qui aboutissent devant les tribunaux. Mais, parallèlement, la Commission des affaires économiques doit faire preuve de sa détermination à aller jusqu’au bout de ses travaux. La CEPC joue un rôle essentiel : c’est le seul lieu de dialogue qui existe pour mettre en place un cahier des charges de la négociation. Si la CEPC y parvient, nous nous en féliciterons ; si elle n’y parvient pas, la Commission des affaires économiques jouera son rôle. Comme dans la filière nucléaire, comme dans la filière énergie, nous dialoguerons avec le Gouvernement et nous ferons des propositions dans l’intérêt national. Nous allons bientôt auditionner M. Lasserre, le président de l’Autorité de la concurrence, Mme Homobono, directrice générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et nous auditionnerons, bien sûr, les ministres chargés de l’économie et de la consommation, et ce d’ici la fin du mois de novembre. Nous sommes en train de construire quelque chose : soit cela passera par la loi, comme nous l’avons fait en matière d’urbanisme commercial en déposant une proposition, soit cela passera par le travail de la CEPC. Mais il faut que nous trouvions des solutions : il n’est pas question ici d’imposer des contraintes nouvelles mais bien davantage d’instiller de bonnes pratiques qui mettent fin aux plaintes que l’on reçoit en permanence, comme celles de la Fédération nationale bovine.

M. Jean Gaubert. Je tiens avant tout à saluer le travail de la Présidente de la CEPC et à la remercier de son invitation à participer aux « Mardis de la LME ». Sa présentation met en évidence des imprécisions que le groupe socialiste avait lui-même pointées lors des débats sur la LME : la notion de « déséquilibre significatif » est ainsi utilisée par les uns et les autres pour se défausser de leurs responsabilités mais il faut désormais attendre la décision que rendra sur ce point le Conseil constitutionnel. La loi s’est également refusée à régler un certain nombre de problèmes : or, est-il vraiment réaliste de croire que ceux-ci peuvent être dépassés par un consensus entre tous les acteurs ? Un des distributeurs a d’ailleurs annoncé son intention de ne pas participer à la concertation. En effet, du moment qu’il est question d’argent, comment penser que les difficultés seront résolues par un quelconque équilibre, par la vertu des acteurs économiques ou par la morale des affaires : je crois plus pour ma part aux règles des affaires.

Pour revenir sur ce qui a été dit concernant les MDD, la perte de compétences des fournisseurs résulte des audits de qualité : il serait grand temps que ceux-ci soient menés par des sociétés indépendantes, qui ne révèlent pas les formules de fabrication auxquelles ont aujourd’hui accès les distributeurs. La petite biscuiterie artisanale notamment a beaucoup pâti de cette pratique.

S’agissant de la convention unique, ce projet ne tient pas la route pour le moment. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, le 1er mars n’est pas forcément une bonne date : vous l’avez d’ailleurs relevé. Ensuite, penser qu’un document pourrait régler les problèmes pour toute l’année n’est pas réaliste. Prenons, par exemple, les fruits et légumes : comment régler l’ensemble des problèmes alors que l’on ne connaît pas encore le volume ni les éventuelles difficultés de la production pour l’année à venir ? Il faut donc instaurer un peu de souplesse mais veiller à ce qu’elle ne soit pas à sens unique en ne profitant qu’aux mêmes.

Sur le débat CGV/CGA, il est clair que la négociabilité des conditions générales de vente a ouvert la porte à des demandes reconventionnelles : néanmoins, abandonner l’idée selon laquelle les CGV doivent demeurer le socle de la négociation serait extrêmement dangereux.

Enfin, la nécessité d’un cadre juridique stable s’oppose, me semble-t-il, à une démarche de consensus dont le résultat n’est, au final, respecté que par celui qui le veut bien et qui s’empresse, parallèlement, d’inventer d’autres formules, comme les NIP.

Un dernier point : il faut favoriser le regroupement de la mise en marché par la création de plateformes. Il est donc nécessaire que le Gouvernement explique clairement à la DGCCRF que de telles pratiques ne sont pas anticoncurrentielles.

M. Michel Raison. Je voudrais adresser toutes mes félicitations à la Présidente de la CEPC pour son énergie et sa compétence : elle réalise un travail remarquable et honore la mémoire de notre défunt collègue et ami Jean-Paul Charié.

Depuis 2002, les lois régissant les relations entre fournisseurs et distributeurs ont été modifiées à plusieurs reprises : c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous nous sommes opposés à toute modification supplémentaire, Catherine Vautrin s’en souvient, dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (LMAP). Le travail de médiation de la CEPC est en effet préférable à un excès de législation, et ce d’autant plus que les dispositions législatives ont beaucoup de mal à être appliquées car elles nécessitent de nombreux contrôles et donnent lieu à des contentieux.

Lorsqu’on regarde comment fonctionnent les acteurs économiques, je pense qu’il faut croire à l’intelligence et à l’humanisme : les résultats du groupe de travail informel sur la composition des prix des produits en sont un bel exemple. À cet égard, la création dans la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche d’un Observatoire de la formation des prix et des marges devrait contribuer à faire avancer ce travail.

Par ailleurs, s’agissant du secteur agroalimentaire, le fait que les fournisseurs doivent à l’avenir conclure des contrats avec les agriculteurs devrait rendre d’autant plus nécessaire la conclusion de contrats avec les distributeurs dans lesquels figurent un maximum d’informations, de manière à éviter qu’il y ait des ajouts par les distributeurs en cours de contrat. Ces contrats doivent être intelligents, complets et respectés. Les distributeurs ne devraient pas pouvoir modifier ensuite les cadences de fourniture, les quantités, comme cela a pu nous être rapporté au cours d’auditions précédentes. Bref, la morale doit revenir dans les échanges !

Sur la négociabilité des CGV, je n’étais pas d’accord avec cette évolution : elle est désormais mise en œuvre. Force est de constater que cette liberté supplémentaire accordée aux distributeurs a ajouté aux difficultés rencontrées par les fournisseurs pour obtenir un prix de vente qui correspondent réellement aux conditions générales de vente et couvre le prix de revient ! Dans ce contexte, quel pourrait être le rôle de la CEPC pour rééquilibrer les relations commerciales ?

M. Jean Dionis du Séjour. Je tiens à mon tour à saluer l’initiative des « Mardis de la LME » car nous avons incontestablement besoin de lieux de discussion, surtout lorsque les enjeux financiers sont considérables comme c’est le cas ici.

Je m’interroge tout d’abord sur la possibilité pour les juristes de clarifier la notion de « déséquilibre significatif » en raison de sa complexité et de la diversité des secteurs économiques concernés.

Je suis par ailleurs très frappé par l’impressionnante montée en puissance des MDD qui, vous l’avez dit Mme la Présidente, sont passées de 17 à 34 %, ce qui leur confère un caractère structurant en matière d’intégration verticale. Il en va de même de la capacité d’imagination des distributeurs qui sont parvenus à déplacer le curseur en direction des NIP qui constituent des pratiques nouvelles auxquelles il convient de s’intéresser de près.

Je souhaite poser trois questions :

– Le modèle commercial français repose, en matière de croissance économique, sur le primat du consommateur, et donc du distributeur, au détriment du producteur. Quand aura-t-on le courage de faire des arbitrages en faveur des producteurs ? Il s’agit là de décisions indispensables si l’on souhaite développer le « fabriqué en France » comme l’a d’ailleurs souhaité M. Christian Estrosi lors de son audition par notre commission il y a quelques jours. Le secteur des fruits et légumes, que je connais bien, est caractérisé par un scandaleux déséquilibre significatif qui résulte du rapport de force qui existe entre producteurs et distributeurs et qui conduit, in fine, à des prix multipliés par 10 entre l’achat et la revente ! Il est urgent d’entendre les producteurs qui en sont parfois rendus à un état d’esprit proche de la jacquerie !

– Comment s’articulent les rapports entre la CEPC, la DGCCRF et l’Autorité de la concurrence à l’encontre des distributeurs ? J’ai le sentiment qu’il faut user de toute la gamme des actions, aussi bien la discussion que les contrôles et, le cas échéant, les sanctions. Il est notamment indispensable que l’Autorité de la concurrence ose enjoindre aux distributeurs de fermer des magasins en cas de monopole local.

– J’ai voté avec enthousiasme la LME et je considère qu’il s’agit d’une loi structurante qui a permis de modifier beaucoup de pratiques dans le bon sens. Cette loi a eu un effet particulièrement bénéfique pour faire reculer les marges arrières, mais celles-ci demeurent néanmoins à hauteur de 10 %. La CEPC peut-elle se pencher sur cette question ?

Mme Frédérique Massat. Le Secrétaire d’État chargé du commerce a signé avec huit grandes enseignes de la distribution un accord pour encadrer leurs pratiques en matière de stocks déportés, de pénalités de retard et de garantie de marge, en contrepartie de quoi il n’y aura pas de nouvelles assignations. Ce choix d’un accord précontentieux est-il la conséquence de l’inefficacité de l’assignation ? Les procédures judiciaires en cours à l’encontre de neuf groupes sont-elles remises en cours par cet accord ?

Le Président de l'Association Nationale des Industries Alimentaires (ANIA) remet en cause cet accord, regrettant que la loi ne soit pas appliquée et que la grande distribution en bénéficie. La LME prévoit en effet que les contreparties font l’objet d’une convention unique qui prouve que les remises consenties font bien l’objet d’une identification : or, cette disposition n’est pas appliquée en pratique et les enseignes qui se placent délibérément hors la loi gagnent des parts de marché. Que pensez-vous de cette situation ?

Enfin, comment la CEPC va-t-elle travailler avec l’Observatoire des prix et des marges récemment mis en place par le Ministre de l’agriculture dans le cadre de la LMAP ?

Mme Laure de La Raudière. La question de la régulation des relations commerciales est un sujet ancien et récurrent et tous les gouvernements se sont penchés sur cette question. D’ailleurs la CEPC a été créée en 2001 par la gauche et depuis cette date plusieurs textes législatifs sont intervenus en ce domaine. On s’aperçoit que, si la LME a constitué une avancée pour les grands groupes, il en va tout autrement des PME et tout particulièrement celles qui interviennent en qualité de fournisseurs de ces grands groupes. Dans la pratique, en effet, les entreprises signent un accord annuel sur les volumes et les prix qui est remis en cause à peu près tous les deux mois à l’initiative des grands distributeurs, à l’échelon européen et sous forme d’enchères inversées. Ces pratiques, qui sont illégales, profitent aux grands groupes comme Danone qui disposent ensuite d’un poids considérable sur le marché. Pensez-vous que le contrôle et la sanction de tels comportements fassent partie des objectifs prioritaires assignés à la DGCCRF ?

M. François Brottes. Pour faire court, et au risque de caricaturer quelque peu la situation, je dirai que l’on a le choix pour qualifier votre commission de parler d’ambulance, de friperie ou de kermesse !

Ambulance tout d’abord car la CEPC est là pour tenter de corriger les méfaits de la LME qui constitue le mal endémique à l’égard duquel nous avions d’ailleurs tenté de vous mettre en garde.

Friperie ensuite, par boutade, car à force de parler de NIP on a un peu l’impression que ce type de commerce est prépondérant.

Kermesse enfin car j’ai l’impression qu’on a affaire à une commission au sein de laquelle on discute poliment, sans jamais aboutir, et qui risque de devenir, à force de bonnes résolutions, celle de Sœur Sourire ! L’exemple récent de M. Novelli qui réunit les distributeurs qui veulent bien venir, et donc pas Michel Leclerc qui est pourtant essentiel dans ce contexte, s’apparente à une mascarade ! Il m’apparaît en conséquence souhaitable que le législateur puisse intervenir pour renforcer l’action de la CEPC qui mérite d’être pleinement soutenue.

M. le Président Patrick Ollier. Je rappelle que la kermesse peut également être héroïque !

M. Thierry Benoit. Je souhaite centrer mon intervention autour de la politique de contrôle. Tout d’abord en ce qui concerne le développement important des MDD, je crois qu’il faut d’une part préserver le savoir-faire qui est l’apanage des entrepreneurs et non des distributeurs et, d’autre part, faire porter l’attention sur les risques que représentent ces produits en termes d’identification et de traçabilité.

En ce qui concerne l’action de la DGCCRF, il semble que son action sur le terrain soit davantage tournée vers les marchés d’importance locale et les petits producteurs que vers les grands groupes de distribution à envergure nationale ; cette tendance mérite sans doute d’être modifiée.

Enfin, je souhaite davantage de contrôles, voir de sanctions, à l’encontre des slogans publicitaires quasi mensongers et en tout cas sans rapport avec la réalité des coûts de production pratiqués par les éleveurs et les agriculteurs.

M. Philippe Armand Martin. Force est de constater que certaines mesures législatives comme la réduction des délais de paiement n’ont pas produit les effets escomptés puisque certaines entreprises françaises sont évincées des marchés par des entreprises étrangères qui, elles, proposent des délais de paiement plus souples. Que peut-on envisager de faire pour aider ces entreprises et ce phénomène a-t-il fait l’objet d’études chiffrées ?

Quel est le bilan de l’application de la LME en termes de sanctions à l’encontre des entreprises ? Dans quelle mesure pourrait-on qualifier d’illégale une négociation commerciale qui imposerait une compensation à la réduction des délais de paiement ?

De nombreux commerçants refusent le paiement par carte bancaire pour des achats de faible montant. Cette pratique, qui va à l’encontre de la nécessaire modernisation des moyens de paiement de nos concitoyens, peut-elle être qualifiée d’illégale ? Dans quels cas ? Et quels sont les moyens de recours des consommateurs ?

Mme Annick Le Loch. Je tiens tout d’abord à saluer votre action énergique et courageuse, Mme la Présidente, à la tête de la CEPC. Il en va de même pour cette initiative intéressante que constituent les « Mardis de la LME » à laquelle j’ai eu la chance de participer à deux reprises. Je crois que, passée une période initiale de tension relativement compréhensible, ces réunions permettent un véritable échange et font réellement bouger les lignes. Pour autant le travail au sein de la Commission des affaires économiques permet de constater que l’application de la LME continue de poser de nombreux problèmes sur le terrain.

En ce qui concerne l’accord intervenu entre le ministère et huit grands distributeurs, c’est vrai qu’il est difficile de comprendre l’articulation entre les travaux du Parlement et les actions du Gouvernement. On voit bien dans cet exemple, dénoncé aussi bien par l’ANIA que par le syndicat majoritaire qui demandent la simple application de la loi, que la situation a, en réalité, peu évolué sur le terrain comme nous pouvons tous le constater au contact des petits producteurs qui se voient opposer un refus de prise en compte du renchérissement des intrants, par exemple l’alimentation animale, dans leur prix de vente au distributeur. La question se pose donc de savoir s’il ne faut pas dépasser le stade des recommandations pour évoluer vers des mesures plus coercitives.

Enfin, pouvez-vous nous apporter des informations complémentaires sur une procédure judiciaire en cours dans laquelle une grande entreprise de distribution aurait été condamnée pour pratique de marges arrières à hauteur de 23 millions d’euros à l’égard de 23 fournisseurs ? Il semble, en effet, que les fournisseurs n’entendent pas réclamer leur part de dédommagement en raison de la crainte de mesures de rétorsion et des règles non écrites qui prévalent dans les relations commerciales.

M. Jean-Pierre Nicolas. Comme chacun sait, les négociations commerciales constituent un domaine complexe dans lequel s’entremêlent dispositions législatives, réglementaires et pratiques contractuelles privées qu’il est très difficile d’encadrer efficacement. Vous avez évoqué, Mme la Présidente, la nécessité de répercuter la hausse du coût des matières premières, encore faut-il que cette répercussion concerne l’ensemble des segments de la chaîne et non un seul des maillons. Je salue l’activité de la CEPC qui va assurément dans le bon sens et j’abonde dans votre sens, M. le Président, quant vous souhaitez que le travail que nous menons ici aboutisse à la signature de bons contrats pour toutes les parties. Encore faut-il ne pas oublier que les grands groupes disposent d’une importante force de frappe dans le domaine juridique ; la CEPC peut-elle agir en ce domaine ? Je crois à cet égard en l’exemplarité de la sanction.

M. Michel Lefait. Pouvez-vous nous dire, Mme la Présidente, quand vos préconisations en faveur de la répercussion des augmentations des matières premières pourront être suivies d’effet car, sur le terrain, de nombreuses petites entreprises, particulièrement dans le secteur maraîcher, se plaignent de subir la loi d’airain des distributeurs ? Il est en outre illusoire de considérer que les marges arrière ont totalement disparu. La CEPC a-t-elle la capacité de mettre un terme aux pratiques d’entente qui existent entre les grands distributeurs au détriment des fournisseurs ?

M. Alain Suguenot. Je souhaite tout d’abord saluer l’action de la CEPC qui préexistait à la LME mais qui est d’autant plus nécessaire désormais. Je pense, tout comme certains de mes collègues, que la DGCCRF devrait davantage faire porter ses contrôles sur les grands groupes. Je suis en revanche très dubitatif sur le rôle que peut jouer le Conseil constitutionnel pour améliorer la définition du « déséquilibre significatif » : nous sommes en effet là dans le domaine de la liberté contractuelle et une telle définition est, par essence, compliquée.

Je souhaite connaître votre sentiment sur la nécessité de définition des pratiques anti-concurrentielles à l’échelon européen, notamment en matière de refus de livraison et de délais de paiement ? A-t-on observé une diminution des clauses léonines dans les contrats types ? Enfin est-il légal de prévoir des clauses en vertu desquelles le prix d’achat du distributeur est fixé en fonction du prix de revente le plus bas pratiqué par d’autres distributeurs à un moment où on ouvre la publicité comparative ?

Mme Marie-Lou Marcel. Pouvez-vous préciser le rôle de la CEPC devenue régulateur des relations commerciales et quid des préconisations ? Quelle est l’articulation des fonctions de la CEPC avec celles des organisations professionnelles, de la DGCCRF et de l’Autorité de la concurrence ? Comment les réponses de la CEPC, qui s’élèvent au nombre de 43 en 2010, sont-elles portées à la connaissance du public ? Quel est le bilan de la réforme des délais de paiement ?

M. Michel Piron. On ne peut que constater la situation particulièrement contrainte qui se caractérise par l’extrême concentration des centrales d’achat en face d’une foule atomisée de producteurs. En ce qui concerne la question de la formation des prix et de leur variabilité relative, on peut noter que l’augmentation des matières premières touche principalement les producteurs et qu’il existe par ailleurs des coûts fixes et des coûts variables qui peuvent être affectés par des gains de productivité. On parle plus rarement de la formation des prix pour les transformateurs et je souhaite poser deux questions à cet égard :

– S’agissant des coûts publicitaires des distributeurs, peut-on les considérer comme des données variables susceptibles d’ajustement en fonction de l’évolution des prix des matières premières ou de l’amont ?

– À combien peut-on estimer les coûts de location qui sont souvent liés à des stratégies foncières de groupes qui ont à la fois intégré la fonction de distribution et la fonction de promoteurs ?

Mme Colette Langlade. J’ai deux questions à vous poser, Madame la Présidente.

La première concerne les MDD, ces articles qui prennent de plus en plus d’importance et d’ampleur. Avant d’arriver dans les rayons, leur fabrication fait l’objet de contrats qui sont signés entre les industriels de l’agroalimentaire et les enseignes de la grande distribution mais certaines anomalies et confusions ont été dévoilées et révélées. En effet, on s’aperçoit que certains distributeurs facturent parfois des prestations de coopération commerciale à leurs fournisseurs de MDD. Autrement dit, les enseignes font payer aux entreprises l’animation et la mise en avant du produit en rayon. Avez-vous réfléchi à cette question et comment pensez-vous remédier à ce grave dysfonctionnement sachant que, par définition, les produits en question ne portent pas la marque de l’industriel mais celle de l’enseigne ?

Ma deuxième question porte sur certains contrats de fabrication de produits, qui se limitent à un an. C’est un délai que les petits industriels trouvent trop bref car ils subissent ensuite des difficultés pour amortir les investissements nécessaires à la chaîne de fabrication. L’ANIA voudrait s’assurer que ces petits industriels bénéficient d’une protection supplémentaire, surtout en ce qui concerne leur savoir-faire. Pour aller dans ce sens, vous avez dévoilé au mois de juillet dernier les « sept bonnes pratiques », portant notamment sur la signature du contrat pluriannuel, visant à interdire la facturation de la mise en avant, et surtout permettant de garantir la protection du savoir-faire. J’aimerais savoir, Madame la Présidente, où vous en êtes à ce sujet ?

M. Daniel Fasquelle. Je tiens d’abord à remercier Madame Vautrin pour l’excellent travail qu’elle mène à la tête de la CEPC. On le voit bien, il y a à la fois la question du fond du droit et la question de son application effective. Du point de vue de l’efficacité, les victimes de pratiques commerciales peuvent-elles saisir librement la CEPC ? On sait qu’elles hésitent souvent à saisir les tribunaux… La confidentialité est-elle garantie lors des saisines de la CEPC ? Par ailleurs, une disposition de la LME permet aussi aux tribunaux de saisir la CEPC pour avis, en vue de les éclairer. Cette disposition est-elle appliquée ? Je crois qu’elle l’est très peu et on peut le regretter. On peut aussi se demander pourquoi.

Un autre point : on en a beaucoup parlé lors de la LMAP, il faudrait que les producteurs puissent s’associer face aux quelques centrales d’achat des distributeurs pour être plus forts. Cela suppose une évolution du droit français mais aussi du droit européen de la concurrence. Vous êtes-vous intéressée à ce sujet, qui ne concerne pas que la LMAP, et qui permettrait pour partie de régler les problèmes que nous soulevons du fait de la puissance d’achat de la grande distribution ?

Une dernière question qui concerne les MDD : ne pensez-vous pas qu’il s’agit d’un moyen de contourner l’interdiction de la revente à perte, de poursuivre et d’amplifier les pratiques de prix d’appel qui nuisent au petit commerce ?

M. Jean Proriol. À mon tour d’indiquer à Catherine Vautrin combien nous apprécions son « travail d’Hercule », d’autant qu’il reste encore beaucoup à faire, s’agissant notamment des « bonnes pratiques ». À ce sujet, précisément, peut-on considérer comme une bonne pratique le fait que les acheteurs, qui dans les faits ne sont pas les dirigeants des grandes centrales, « mettent sous le nez » des petits producteurs leurs bilans financiers, qu’ils ont obtenu par l’intermédiaire des tribunaux de commerce ? Ce comportement incite en effet les dirigeants de PME à ne plus communiquer leurs résultats aux tribunaux de commerce puisque, finalement, cela peut se retourner contre eux, surtout quand par ailleurs ils investissent pour innover. Comment faire en sorte que le code de bonnes pratiques soit effectivement mis en pratique ?

M. le président Patrick Ollier. Merci à tous. Madame la Présidente, vous avez le temps que vous souhaitez pour répondre à toutes ces questions.

Mme Catherine Vautrin. Vous me permettrez, Monsieur le Président, de commencer par vous remercier, ainsi que l’ensemble des députés présents, qui ont bien voulu marquer leur intérêt pour les travaux de la CEPC.

Tout d’abord une bonne nouvelle à l’adresse de M. Jean Gaubert, sur la partie MDD et la notion d’audit. Dans la recommandation du 7 juillet, il y a précisément un point extrêmement détaillé sur les audits, qui préconise de travailler avec des laboratoires ou des prestataires extérieurs, dont la qualification est reconnue par la profession. Nous partageons totalement son analyse et souhaitons encore pouvoir avancer sur le sujet.

S’agissant de la volonté de garder de la souplesse dans la convention unique, j’en suis tout à fait consciente et je l’ai dit à plusieurs reprises : celle-ci constitue plus que jamais le fondement de la relation commerciale mais elle doit aussi être adaptée au cadre des affaires.

En ce qui concerne les observations de M. Michel Raison sur le prix d’un produit ainsi que sur le rôle de l’Observatoire des prix et des marges, j’attends avec beaucoup d’intérêt de pouvoir commencer à travailler avec cet observatoire. Certains produits et secteurs d’activité doivent prendre en compte le facteur « dépendance » : il me vient l’exemple d’un producteur de miel pour qui les cours sont très importants, et pour qui le prix de la matière première correspond quasiment au prix du produit. Si le professionnel ne peut répercuter ses coûts, il peut se trouver certaines années dans une situation de vente à perte et, à terme, c’est la pérennité même de son entreprise qui se trouve menacée. Il y a une vraie difficulté à ce sujet, sur laquelle il faut travailler et qui renvoie aussi à une approche humaine de la question.

Cette dimension humaine se retrouve aussi dans la question de M. Jean Proriol. Qu’un acheteur « mette sous le nez » de son fournisseur les résultats de cette entreprise au moment de la négociation n’est rien d’autre qu’un moyen de pression. Vous avez tous évoqué les notions de moralité et de respect, qui font sens et qui doivent être effectivement des point-clés de notre réflexion. J’y suis très attachée, comme vous !

À M. Jean Dionis du Séjour, qui parlait des difficultés de certains producteurs, je tiens à dire que je partage ses préoccupations. Je prendrais l’exemple d’une présidente de fédération qui m’expliquait que lorsqu’à Pâques, elle accepte de faire une promotion sur le prix des salades, elle en fixe en pratique le prix pour toute l’année, ce qui a incontestablement des conséquences sur la vie de l’entreprise.

Vous avez été très nombreux à parler de l’articulation entre les missions de la CEPC, de la DGCCRF et de l’Autorité de la concurrence. On se rend bien compte que l’objet de la CEPC tel qu’il a été défini par la loi consiste vraiment à travailler en amont sur les relations entre fournisseurs et distributeurs. L’Autorité de la concurrence et la DGCCRF, quant à elles, interviennent en aval sur ces relations. Leur fonction de contrôle mérite d’être soulignée, notamment pour la DGCCRF ; en tout état de cause, ces différentes interventions sont plus que jamais complémentaires les unes des autres.

Cela me permet de faire le lien avec la question de Mme Frédérique Massat sur les assignations. Celles qui ont été lancées iront à leur terme. Si elles ont été provisoirement renvoyées, c’est uniquement parce que les tribunaux désiraient attendre la réponse de la Cour de cassation sur la question prioritaire de constitutionnalité relative à la notion de « déséquilibre significatif ». En tout état de cause, les affaires concernées seront jugées. Cette question doit être distinguée de celle de l’accord entre le ministre et les distributeurs qui ne porte sur rien d’autre que sur les points qui y sont évoqués. Du reste, les fournisseurs considèrent à juste titre qu’ils sont restés extérieurs à cet accord. Je ne veux pas prendre parti dans ce débat car je considère que tout ce qui permet d’avancer est intéressant et je ne veux donc pas opposer les uns aux autres. M. Jean-René Buisson, président de l’ANIA, a une réflexion à mener qui est logique par rapport aux attentes de sa profession ; d’un autre côté, il serait dommage que l’on se prive de l’acquis relatif à ce qui a été signé. Si ces accords doivent acquérir une force juridique, ils devront passer devant la CEPC où ils pourront recevoir l’aval des distributeurs et des fournisseurs : ce sera d’ailleurs l’objet de la réunion du 4 novembre prochain.

Mme Laure de La Raudière a fait un commentaire tout à fait pertinent sur la réouverture trop fréquente de la convention unique, qui rejoint mon souhait de travailler sur cette notion de « convention unique » afin de préciser ce qu’elle recouvre exactement. Il y a un lien avec la question posée par M. Alain Suguenot sur les conventions-types car il y a effectivement des conventions-types qui ont été utilisées. On doit trouver dans la convention unique la spécificité de chaque contrat. De la même manière, il est évident qu’un accord sur les prix à la revente est parfaitement illégal.

J’invite par ailleurs M. Thierry Benoit à regarder les recommandations faites par la CEPC au sujet des MDD, qui prennent parfaitement en compte la question du savoir-faire des entreprises. J’ai bien noté également son commentaire sur le fait que les contrôles de la DGCCRF seraient plus nombreux sur les marchés que dans la grande distribution. Vous savez que Mme Christine Lagarde a demandé l’an dernier à la DGCCRF de se réorganiser complètement, en mettant en place les fameuses « brigades LME », qui sont en fait des groupes d’intervention chargés d’opérer des contrôles. J’espère que Mme Homobono, que nous auditionnons bientôt, sera en mesure de nous donner des résultats chiffrés et précis sur les missions de la DGCCRF à ce sujet.

S’agissant de la question de Mme Annick Le Loch sur le groupe Leclerc, sur les 23 millions d’euros de pénalités, 22 millions ont été payés aux fournisseurs : il reste en fait 910 000 euros qui concernent l’enseigne Fleury-Michon, qui refuserait de se voir remboursé. Ce sont les seules informations dont je dispose et qu’il convient de vérifier.

M. Jean-Pierre Nicolas parlait de ce que devrait être un « bon contrat », ainsi que de l’exemplarité des contrôles. Je crois que l’exemplarité est importante mais ne constitue qu’un élément d’un ensemble plus vaste : il est essentiel également qu’il puisse y avoir une communication sur ces contrôles. Certains distributeurs se situant eux-mêmes principalement sur le terrain de la communication, c’est sur ce terrain qu’il faut se porter. La CEPC n’étant pas directement concernée par cette question, il s’agit du moins de l’avis personnel de sa présidente.

Sur la question des marges arrière qui n’ont pas totalement disparu, pour répondre à M. Michel Lefait, c’est vrai qu’il y a eu des améliorations notables mais il faut encore vérifier que ces marges arrière n’ont pas été remises en avant par le biais des nouveaux outils promotionnels. Par ailleurs, en ce qui concerne les ententes, celles-ci sont très clairement interdites et doivent faire l’objet de contrôles.

S’agissant de la saisine de la CEPC, je garantis naturellement l’anonymat des victimes qui portent des questions devant elle. Il faut tenir compte du climat général qui influe également sur les missions de la DGCCRF. Nous avons beaucoup de difficultés à faire remonter des informations précises. Il ne faut pas laisser s’instaurer une atmosphère générale de peur et c’est d’ailleurs pour cela que j’ai insisté sur l’impératif de la communication.

Plusieurs d’entre vous ont posé des questions autour des délais de paiement mais ce point ne figure pas vraiment dans le cadre de la mission de la CEPC. J’ai bien noté également les interrogations portant sur la concurrence des pays étrangers, qu’il faudra examiner à l’occasion du contrôle de l’application de la loi.

Sur la qualification de la notion d’« abus commercial », la jurisprudence a commencé à cerner le problème. Je n’ai pas de chiffres à ce stade mais je ne manquerai pas de revenir vers vous.

M. Michel Piron est revenu sur un élément tout à fait important, à savoir la composante de l’élément prix. Nous avons commencé à travailler sur la distinction de l’élément « matière première » mais il faut aller plus loin.

À Mme Colette Langlade, je voudrais dire que c’est le principe même de la MDD de vendre sur la marque du distributeur. Sur le contrat de fabrication, comme vous l’avez noté, nous avons indiqué dans la recommandation que ce n’était pas forcément la durée d’un an qui convenait. Eu égard aux investissements réalisés, il est important que l’entreprise puisse disposer le cas échéant de plus de temps.

Je conclus avec une réponse à M. François Brottes : entre « Hercule » et « Sœur Sourire », je ne sais pas où doit aller la CEPC… Nous avons travaillé jusqu’à maintenant dans un cadre délibérément consensuel. 107 questions ont été soulevées depuis l’adoption de la LME et nous entrons progressivement « dans le dur ». Restent aujourd’hui à traiter les sujets les plus lourds : entre les questions que nous avons à traiter et l’attente de la réponse du Conseil constitutionnel sur la question prioritaire de consitutionnalité, les travaux de la CEPC vont opérer un véritable virage. Je n’agis pas à la tête de la CEPC uniquement pour garantir le consensus, je souhaite également que des réponses concrètes puissent être apportées aux problèmes soulevés ; c’est aussi dans cette perspective que j’ai lancé les « Mardis de la LME ». La CEPC n’est pas là uniquement pour délivrer de bonnes résolutions et ses avis sont d’ailleurs pris en compte par les juridictions : si elle n’est pas saisie directement, elle peut ainsi être consultée. Enfin, j’attends beaucoup du travail avec les professionnels et des contacts pris avec M. Jean-Claude Volot, Médiateur des relations inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance. C’est une démarche nouvelle que d’envisager une réflexion sur la filière complète commerce distribution. Nous sommes prêts pour cette longue marche.

M. le président Patrick Ollier. Je vous remercie pour la qualité de vos réponses et leur précision. J’ai le sentiment, Madame la Présidente, que dans le cadre de la longue marche que vous envisagez, vous avez besoin de davantage de moyens pour aller plus loin et plus vite. Ces moyens, notre Commission est disposée à vous les fournir. On voit bien que la résolution des problèmes dépend encore beaucoup de la bonne volonté des uns et des autres et qu’il faut adapter l’outil législatif. Afin de faire converger les moyens de la CEPC et ceux du législateur, je vous propose, mes chers collègues, de confier à Madame Vautrin, la responsabilité, en tant que rapporteure, d’une nouvelle mission de contrôle sur l’application de la LME, menée dans le cadre des travaux de la commission des affaires économiques. Cette mission poursuivrait le travail engagé sur les négociations commerciales par Jean-Paul Charié, Jean Gaubert et moi-même à l’occasion d’un précédent rapport. Elle se pencherait également sur l’institution et les modalités de fonctionnement de l’Autorité de la concurrence. Je propose à l’opposition de désigner ultérieurement un co-rapporteur pour participer aux travaux de la mission.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 20 octobre 2010 à 10 h 30

Présents. - M. Jean-Paul Anciaux, M. Thierry Benoit, M. Bernard Brochand, M. François Brottes, M. Jean-Michel Couve, M. Jean-Pierre Decool, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Bernard Gérard, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, M. Jean-Pierre Grand, M. Louis Guédon, M. Gérard Hamel, Mme Laure de La Raudière, M. Pierre Lasbordes, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Michel Lefait, M. Jacques Le Guen, M. Michel Lejeune, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Claude Lenoir, M. Jean-Louis Léonard, M. François Loos, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Patrick Ollier, M. Daniel Paul, M. Michel Piron, Mme Josette Pons, Mme Anny Poursinoff, M. Jean Proriol, M. François Pupponi, M. Michel Raison, M. Bernard Reynès, M. Franck Reynier, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Alfred Trassy-Paillogues, Mme Catherine Vautrin, M. René-Paul Victoria, M. Jean-Michel Villaumé

Excusés. - M. Jean Auclair, M. Gabriel Biancheri, Mme Geneviève Fioraso, M. Pierre Gosnat, M. Jean Grellier, M. Henri Jibrayel, M. Serge Poignant, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau

Assistait également à la réunion. - Mme Colette Langlade