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Commission des affaires économiques

Mardi 16 novembre 2010

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 21

Présidence de M. Serge Poignant Vice-Président

– Examen de la proposition de loi visant à lutter contre les marchands de sommeil (n° 2597) (M. Sébastien Huyghe, rapporteur)

– Amendements examinés par la commission

M. Serge Poignant, président. Avant que nous n’examinions la proposition de loi visant à lutter contre les « marchands de sommeil », je voudrais rappeler que, lors de sa réunion du 10 novembre 2010, notre Commission a auditionné M. Pascal Viné, personnalité pressentie pour occuper le poste de directeur général de l'Office national des forêts (ONF). Elle a ensuite été amenée à exprimer par un vote son avis sur cette nomination.

Conformément au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution, le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat représente au moins trois-cinquièmes des suffrages exprimés.

Le scrutin a eu lieu à l'Assemblée nationale à onze heures le mercredi matin et s'est tenu au Sénat l'après-midi. Le dépouillement a été effectué simultanément dans les deux assemblées à partir de seize heures quarante-cinq.

Je vous en communique les résultats : au Sénat, les 8 votants ont tous émis un avis favorable à la nomination ; à l'Assemblée nationale, les 36 votants se sont partagés entre 21 votes favorables et 15 abstentions, et il n'y a pas eu de vote « contre ». Au total, sur les 44 suffrages exprimés, on décompte donc 29 votes « pour », 15 abstentions et aucun vote « contre ». Le nombre de suffrages requis pour s'opposer à la nomination était de 27.

Les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ne s'opposent donc pas à la nomination de M. Pascal Viné au poste de directeur général de l'Office national des forêts.

La Commission examine, sur le rapport de M. Sébastien Huyghe, la proposition de loi visant à lutter contre les marchands de sommeil (n° 2597).

M. Serge Poignant, président. Je voudrais remercier de sa présence M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.

Enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 9 juin 2010, la proposition de loi visant à lutter contre les « marchands de sommeil » a été déposée par M. Sébastien Huyghe et plusieurs de ses collègues. Afin de rapporter sur le texte, notre collègue a quitté la Commission des lois. Il a été nommé rapporteur la semaine dernière. Depuis, il a pu entendre nombre des acteurs concernés : élus locaux, associations œuvrant dans le domaine du logement des personnes en difficulté, autorités de l'État, notamment.

Dans le contexte de crise du logement que nous connaissons, la lutte contre le phénomène d’ampleur que constituent les marchands de sommeil nous paraît essentielle. Ce thème transcende nos divisions politiques. Il me semble que nous pouvons tous saluer l'action volontariste menée par le Gouvernement en la matière au cours des dernières années.

Nous avons eu l'occasion, à plusieurs reprises, de débattre de ce thème au sein de notre Commission : la loi portant engagement national pour le logement (loi ENL) et la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion ont en effet servi de base législative à l'élaboration d'ordonnances dont le contenu est aujourd'hui salué par le monde associatif. Le Gouvernement dispose donc désormais d'outils solides pour agir et il s'est doté d'un pôle national de lutte contre l'habitat indigne. Les préfets et les maires sont au cœur du dispositif.

Notre rapporteur nous propose de compléter l'édifice constitué au cours des dernières années.

M. Sébastien Huyghe, rapporteur. Je regrette d’avoir à m’exprimer, pour des raisons de calendrier, en même temps que le Président de la République…

M. François Brottes. C’est un autre « marchand de sommeil » !

M. le rapporteur. Le 9 juin dernier, plusieurs collègues et moi-même avons déposé une proposition de loi visant à lutter contre les marchands de sommeil. Pourquoi ?

Ainsi que nous le rappelons dans l’exposé des motifs, près de 600 000 logements en France sont considérés comme indignes. La moitié environ appartient à des propriétaires bailleurs. Certains de ceux-ci sont de véritables « marchands de sommeil » qui louent des logements insalubres à des ménages vulnérables. On dénombre aussi 3 000 hôtels meublés habités par des occupants permanents. Or, beaucoup de ces hôtels meublés n’offrent pas un niveau de qualité acceptable – nous avons tous en mémoire des faits divers dramatiques.

Dans ce contexte, le Gouvernement a fait de la lutte contre l’habitat indigne une priorité de son action.

Tout d’abord, il a constitué au fil des années un arsenal juridique. Celui-ci est désormais très opérationnel.

L’ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux a simplifié les régimes de police administrative en matière de salubrité – procédure prévue par le code de la santé publique – et de sécurité – procédure de péril prévue par le code de la construction et de l’habitation.

La loi ENL a renforcé la prise en compte de la lutte contre l’habitat indigne dans les documents de politique locale de l’habitat.

L’ordonnance n° 2007-42 du 11 janvier 2007 apporte de meilleures garanties pour le recouvrement des créances des collectivités locales.

La loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion du 25 mars 2009 vise à une meilleure protection du droit des occupants et à une meilleure articulation du dispositif avec la loi instituant le droit au logement opposable. Elle confère aussi un rôle prépondérant à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) dans la lutte contre l’habitat indigne.

Le Gouvernement a également mis en place un pôle national de lutte contre l’habitat indigne, désormais sous la responsabilité du préfet Alain Régnier, pour coordonner l’action des différents ministères concernés. Le 8 juillet 2010, le préfet Régnier a adressé aux préfets de région une circulaire dans laquelle il annonçait ses trois axes d’intervention : la constitution de pôles départementaux de lutte contre l’habitat indigne, la poursuite de l’effort visant à augmenter le nombre d’arrêtés et à mener à leur terme les dossiers anciens et, enfin, l’accompagnement des communes dans la lutte contre l’habitat indigne. Cette politique volontariste peut donc être saluée.

Afin de bien faire comprendre les enjeux du dispositif que nous proposons, je rappellerai brièvement les procédures existantes.

En matière de lutte contre l’insalubrité, je m’en tiendrai, si vous le voulez bien, à l’habitat insalubre remédiable, visé par notre proposition de loi. Le dispositif est simple : sous la responsabilité du préfet, les services communaux d’hygiène ou, à défaut, les services préfectoraux (agences régionales de santé), repèrent les logements insalubres et prescrivent par arrêté les mesures que le propriétaire doit prendre, dans un délai déterminé – de trois à neuf mois –, pour remédier à l’insalubrité. Au terme du délai fixé par l’arrêté, l’autorité administrative peut, au bout de trente jours, mettre en demeure le propriétaire de réaliser les travaux et même, éventuellement, les réaliser d’office aux frais de celui-ci. Comme nous l’ont indiqué les personnes que nous avons auditionnées, la procédure des travaux d’office est toutefois lourde pour l’autorité administrative : le délai de mise en œuvre semble être de trois ans.

Les procédures de péril relèvent, quant à elles, de la police spéciale du maire. Elles s’appliquent aux cas où les désordres constatés touchent à la solidité de l’édifice ou d’une partie de ses éléments et sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité physique des occupants ou de leurs voisins. Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques menaçant ruine et pouvant, par leur effondrement, compromettre la sécurité, ou, d'une façon générale, n'offrant pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique.

Enfin, des procédures spécifiques existent pour les hôtels meublés, sous la responsabilité du maire et, à Paris, du préfet de police.

Venons-en à présent au contenu même de la proposition de loi. Je vais d’abord vous présenter le texte initial. J’opérerai ensuite une synthèse de mes amendements.

Le droit positif est désormais très complet en matière de lutte contre l’insalubrité et le péril. Notre proposition de loi, texte très court, vise à apporter un complément.

La question que nous nous sommes posée est la suivante : comment toucher de la manière la plus sensible les personnes que l’on vise dans la lutte contre l’habitat indigne ? Il nous semble que c’est en les frappant au porte-monnaie que nous réussirons à atteindre les propriétaires de mauvaise foi.

L’objectif que nous poursuivons est bien l’accélération des procédures de réalisation des travaux, pour éviter le recours à la procédure extrêmement longue des travaux d’office. Notre objectif n’est donc pas financier, mais incitatif, au bénéfice des personnes mal-logées.

Le texte initial prévoit une faculté pour l’autorité administrative d’instaurer une astreinte journalière au terme de l’arrêté d’insalubrité, de l’arrêté de péril ou de l’arrêté portant sur un hôtel meublé. Cette astreinte viendra compléter la mise en demeure d’effectuer les travaux. Son montant sera compris entre 50 et 500 euros par jour ; il reviendra à l’autorité administrative compétente de le fixer.

Le propriétaire disposera néanmoins de quinze jours pour présenter ses observations avant le déclenchement de l’astreinte.

Le texte conserve une certaine souplesse ; il prévoit la possibilité pour l’autorité administrative de consentir une remise ou un reversement partiel du produit de l’astreinte quand les travaux prescrits par l’arrêté ont été exécutés et que le redevable établit qu’il n’a pu observer le délai imposé pour l’exécution totale de ses obligations en raison de circonstances indépendantes de sa volonté. Cette souplesse nous semble indispensable afin de tenir compte de la situation réelle sur le terrain. Elle garantit que ne seront touchés que les véritables marchands de sommeil – d’ailleurs souvent bien connus de l’autorité administrative – et non des propriétaires bailleurs très modestes qui n’auraient pu réaliser les travaux du fait de leur situation financière et qui ne sont pas, quant à eux, connus des services municipaux ou préfectoraux. De même, dans le cas, certes exceptionnel mais possible, où c’est le locataire qui est de mauvaise foi, le propriétaire aura aussi la possibilité de démontrer sa bonne foi et de se voir accorder une remise.

Si le dispositif vise principalement les marchands de sommeil, il nous paraît également de nature à accélérer les travaux dans le cas des successions où des indivisaires – qui, rappelons-le, ne sont pas des marchands de sommeil – ne sont pas d’accord entre eux pour effectuer les travaux. La menace pécuniaire de l’astreinte sera en effet de nature à les inciter à trouver rapidement un accord entre eux.

Il convient de noter que, si le dispositif fonctionne bien, l’astreinte, à l’instar de toute sanction, est bien vouée à ne pas être liquidée. Remarquez aussi que son montant est plafonné à 50 000 euros. Il nous paraît en effet cohérent que le montant de l’astreinte administrative ne puisse être supérieur au montant de l’amende correspondante.

Les amendements de fond que nous vous proposons d’adopter sur chacun des articles visent à renforcer l’incitation du propriétaire à réaliser les travaux.

Ils prévoient ainsi que l’autorité administrative compétente (maire ou préfet) pourra directement assortir l’arrêté (d’insalubrité, de péril, ou concernant les hôtels meublés) de l’astreinte journalière. Il s’agit ainsi de gagner du temps sur la procédure administrative, sans attendre le déclenchement de la procédure de mise en demeure. En outre, le propriétaire du logement, de l’immeuble ou de l’hôtel meublé en sera informé dès notification de l’arrêté.

Si le préfet ou le maire n’a pas fait usage de cette faculté au moment de l’édiction de l’arrêté, il conservera la possibilité de le faire au moment de la mise en demeure, comme le prévoit initialement la proposition de loi. Dans un souci d’harmonisation, nous proposons de porter de quinze à trente jours le délai dont dispose le propriétaire pour s’expliquer.

Toujours afin d’inciter le propriétaire à réaliser rapidement les travaux, les amendements prévoient également que le montant de l’astreinte peut être progressif dans le temps.

Par ailleurs, nous vous proposons d’affecter le produit de l’astreinte à l’ANAH, principal acteur de la lutte contre l’habitat indigne.

Enfin, nos auditions nous ont permis de constater que le cas des parties communes dans les copropriétés n’est pas réglé par notre proposition de loi. Pour les copropriétés, deux cas de figure sont possibles. Si les propriétaires défaillants sont minoritaires au sein de la copropriété, on peut penser que l’astreinte constituera un moyen de pression supplémentaire pour que la copropriété vote les travaux. Si les propriétaires défaillants sont majoritaires dans la copropriété, on peut penser qu’ils s’opposeront au vote des travaux. Dans cette hypothèse, l’astreinte pourrait alors constituer une « double peine », en quelque sorte, puisqu’elle va peser indifféremment sur les bons et les mauvais payeurs, tout en risquant d’aggraver la situation financière de la copropriété.

En tout état de cause, la question des copropriétés est complexe. Pour cette raison, nous ne disposons pas encore d’amendement à vous proposer sur ce point. Cependant, étant donné l’importance du problème, nous allons essayer d’en élaborer un à votre intention d’ici à l’examen de la proposition de loi en séance publique, le 30 novembre.

Moyennant ces modifications, je vous propose d’adopter la proposition de loi.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. La lutte contre les marchands de sommeil ne rencontre aucune contestation de notre part. Nous sommes tous d’accord sur l’objectif.

Cependant, les instruments législatifs dont nous disposons sont-ils efficaces et pertinents ? Assortir le dispositif existant d’une astreinte apporte-t-il une valeur ajoutée réelle et sérieuse ? En posant cette question, je ne vous dissimule pas l’ampleur de nos interrogations.

Le dispositif législatif a été revisité à plus d’une reprise depuis sept ans. Aux dispositions de la loi ENL, prises dans un souci d’efficacité, de nouvelles ont été ajoutées, à l’initiative de Mme Christine Boutin, alors ministre chargée du logement, dans la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

Mme Boutin a aussi inséré au sein du programme de l’ANAH des préceptes qu’elle a demandé par circulaire aux préfets et aux autorités de mettre en œuvre. Dans une circulaire du 14 novembre 2007 relative au plan d'action d'urgence contre les « marchands de sommeil », elle écrivait ainsi : « Il appartient à l'État, garant de la solidarité nationale, du droit à la sécurité et à la santé des personnes, et du droit à un logement décent, de recourir à toutes les voies de droit ouvertes pour assurer ou veiller à l'exécution des arrêtés de police : il y va de la crédibilité de l'action publique ainsi que du respect des personnes et d'un État de droit. Tous les outils coercitifs existent pour faire respecter les arrêtés de police, que ce soit sur le plan civil ou sur le plan pénal. Or l'État paraît encore trop timoré dans l'exercice de ses responsabilités. » La ministre exposait ensuite que le ministère de la justice avait donné un certain nombre d’instructions aux parquets pour définir et mettre en œuvre des stratégies.

Monsieur le secrétaire d’État, vos propos de novembre 2009 en faveur de l’établissement de l’astreinte m’ont surpris. Des éléments permettaient-ils d’établir l’efficacité du dispositif que nous avions mis en place ?

Si ce sont les maires qui, pour des raisons financières, hésitent à entrer dans la stratégie de travaux – c’était une des difficultés que nous avions envisagées –, la réponse a été apportée par le positionnement de l’ANAH et par l’élaboration par votre prédécesseur d’un dispositif – à mes yeux utile, même si, pour autant que j’en sache, il est très peu utilisé – de mise en œuvre du processus de travaux rendant possible l’intervention du maire tout en lui ouvrant l’ensemble des capacités de recouvrement publiques. Pour moi, la technique existe donc bel et bien.

En revanche, dans le cas où le propriétaire est sans moyens et qu’ainsi le maire ou, à défaut, le préfet, peut craindre une absence de retour à la collectivité, locale ou nationale, des sommes avancées pour le compte de celui-ci, l’astreinte, loin d’arranger la situation, alourdira au contraire l’ardoise.

Si donc l’approche de l’ANAH a atténué la difficulté, celle-ci, lorsqu’elle apparaît, ne peut être réglée par l’astreinte – laquelle, au passage n’est qu’une sanction financière. Je le sais par expérience, tant les lois que les décisions de condamnation des juridictions assorties d’astreintes n’établissent que rarement de lien entre l’astreinte, et donc son montant, et la capacité à agir de celui qui intervient.

Ensuite, l’attention portée lors de la discussion de la loi ENL à nos arguments, notamment sur le permis de louer, nous a permis de progresser vers l’institution de celui-ci. Même si une telle disposition n’est pas forcément facile à mettre en œuvre, elle constituerait une solution définitive, voire la seule possible. Le jour où un bailleur ne pourra louer que muni du certificat, tamponné, du service d’hygiène et de salubrité, plusieurs difficultés seront réglées.

La loi ENL prévoyait aussi dans un délai de cinq ans la conduite d’une expérimentation répertoriant les actions éventuelles des collectivités locales. Le 23 décembre prochain, juste six mois avant l’expiration du délai de cinq ans, qui expire le 23 juillet 2011, le Gouvernement doit nous en faire parvenir les résultats. J’attends avec intérêt son rapport, qui nous permettra de connaître les démarches engagées, leurs résultats, ou encore les raisons de l’absence d’action.

Pour nous, l’efficience des stratégies prime sur le déploiement de techniques qui pourraient apparaître comme des techniques de communication sans aucune efficacité eu égard aux objectifs que nous essayons tous d’atteindre.

M. Michel Piron. Le débat que nous tenons ici se situe dans la prolongation d’une loi qui, non seulement a très clairement posé les questions relatives aux marchands de sommeil, mais n’a pas totalement négligé d’y apporter des réponses – à travers notamment la possibilité de faire réaliser des travaux immédiatement, et sans l’accord du propriétaire en cas de défaillance de celui-ci. Cela, je crois, vient d’être reconnu. Je salue donc l’objectivité au moins partielle de l’orateur précédent.

Si la question fait très largement consensus, l’honnêteté intellectuelle doit nous conduire à considérer que la difficulté n’est pas conceptuelle ou de principe, mais bien opérationnelle.

La lutte contre les marchands de sommeil, il faut le rappeler, est d’abord une lutte contre l’extrême précarité. Il s’agit de rendre service à des personnes dans l’incapacité totale, ou presque, de faire valoir leurs droits les plus élémentaires.

Nous ne disposons pas d’évaluation de l’impact de la loi ENL, mais je serais très étonné que celle-ci n’ait eu aucun effet. Ne tombons pas d’un excès dans l’autre ! Sans doute les effets sont-ils cependant insuffisants. Autrement, nous le saurions. Je m’associerais donc bien volontiers à la demande d’un état des lieux des réhabilitations ou des remises aux normes de logements.

Si j’ai bien compris le rapporteur, l’objectif de la proposition de loi est de rendre plus opérationnelles les dispositions de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, et surtout de permettre une mise en œuvre beaucoup plus rapide des mesures à prendre. Des délais de trois ans ne peuvent permettre de répondre à l’enjeu. C’est donc surtout sur la rapidité et la réactivité que porte l’essentiel des propositions que nous examinons. Cela dit, même si l’astreinte peut ne pas constituer un instrument suffisant, à mon sens elle ne peut pas nuire : accentuer la pression ne peut qu’être positif.

Ensuite, comment les interventions des collectivités locales et de l’État doivent-elles s’articuler ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En l’occurrence, le maire agit en qualité de représentants de l’État !

M. Michel Piron. C’est bien du maire que j’entendais parler.

Puisque nous sommes ici dans le champ législatif – comme il est logique, puisque nous touchons au droit de propriété –, des mesures réglementaires ne pourraient-elles pas être imaginées pour la déclinaison pratique et concrète des principes posés parla loi et la mise en œuvre des solutions ?

Je ne peux pas ne pas signaler qu’une part considérable du problème a pour origine les copropriétés. Dès lors que les difficultés qui en relèvent sont considérées par le rapporteur comme restant à traiter, j’avoue très humblement que je serais preneur de toutes propositions, y compris de l’opposition, pour y remédier. Nous n’avons sans doute pas encore trouvé les outils nécessaires.

Enfin, je crains que les effets pervers du permis de louer ne soient supérieurs à ses effets positifs. Je crains notamment l’apparition d’une « sur-administration » qui pourrait être cause d’une raréfaction supplémentaire de l’offre de location.

Nous avons donc encore beaucoup de travail devant nous pour rendre plus efficiente une loi qui, à mon sens, reste malgré tout une bonne loi. Je salue, dans le texte qui nous est présenté, et qui nous ramène à la pratique quotidienne, un effort en ce sens.

M. Alain Cacheux. La procédure est d’une grande complexité et, bien que l’État se soit organisé pour être aussi efficient que possible, le résultat reste très modeste dans nos communes.

Des moyens plus efficaces existent peut-être, comme le permis de louer qui vient d’être évoqué. De fait, personne ne conteste la procédure du permis de construire exigé pour le moindre bâtiment – procédure qui peut même se révéler très longue dans le périmètre protégé qui entoure les monuments historiques. Pourquoi donc redouter la « bureaucratie » d’une mesure qui toucherait ici à la santé des gens ?

Par ailleurs, pourquoi l’expérimentation prévue par la loi ENL de 2006 n’est-elle pas mise en œuvre ?

En outre, la situation de l’habitat indigne est d’autant plus préoccupante que le marché du logement est en crise. Il faut donc accélérer la construction de logements sociaux.

Enfin, nous observons que, dès le lendemain du jour où les personnes en situation très fragiles qui nous saisissent de leurs difficultés et pour lesquelles nous nous efforçons d’intervenir ont pu quitter leur logement, ce logement est à nouveau occupé. Il conviendrait donc, dès que le caractère insalubre du logement a été constaté, de suspendre le tiers payant et de verser directement au locataire l’aide personnalisée au logement : le rapport de force avec le propriétaire indélicat en serait grandement modifié.

M. William Dumas. Le texte qui nous est proposé part d’une bonne intention. Il faut en effet lutter contre les marchands de sommeil qui font du profit sur le dos des pauvres gens. Il est trop rare que les personnes en situation de fragilité occupant des logements indignes dénoncent leurs conditions de vie et saisissent les tribunaux, ce qui profite aux propriétaires. Le permis de louer ou le versement direct des aides sont des solutions qui méritent examen, mais il faut aller encore plus loin.

Mme Josette Pons. Je souscris aux propos de M. Dumas. En effet, de nombreux dispositifs existent déjà lorsqu’un logement est recensé comme insalubre, mais la réponse est inadaptée aux marchands de sommeil, qui louent des locaux qu’ils ne devraient pas louer.

M. François Brottes. La mesure proposée ne peut certes pas nuire. J’ai entendu citer ce matin à la radio le cas d’un immeuble dont les ascenseurs sont en panne depuis des mois et dont les habitants sont victimes de marchands qui ne leur offrent pas tant du sommeil qu’une sorte d’exercice physique obligatoire, car ils doivent parfois monter sept étages à pied plusieurs fois par jour. Cette situation est insupportable, notamment pour les personnes handicapées.

Nous avons voté de nombreux textes relatifs à l’amélioration de la qualité de l’habitat, portant sur le plomb, l’amiante, les piscines, le diagnostic thermique – si indigent soit-il – les compteurs intelligents et les ampoules électriques, et adopté les réglementations thermiques, ou RT 2012 et 2020. Mais, si bonnes que soient ces mesures, nous ne nous sommes pas donné les outils nécessaires pour contrôler leur mise en œuvre. Des dispositions coercitives s’imposent donc et le permis de louer serait aussi utile que pourraient l’être un permis de vendre pour certaines agences immobilières ou un permis de gérer pour certains syndics.

M. Michel Piron. Et pourquoi ne pas prévoir un permis de délivrer un permis, tant que l’on y est ?

M. François Brottes. N’oublions pas qu’il existe des gens qui vivent dans des conditions de logement inacceptables.

Est-ce aux maires de faire également la police à l’intérieur des logements ?

Quels moyens nous donnons-nous de faire respecter ce que nous votons ?

M. Louis Cosyns. Je souscris au souci de lutter contre les marchands de sommeil. À proprement parler, du reste, ces derniers sont ceux qui, comme on le voit dans certains reportages, louent parfois le même logement à plusieurs personnes

Pour ce qui est des logements indignes, il n’est pas toujours facile pour le propriétaire bailleur de faire les travaux requis, car le locataire peut parfois s’y opposer.

Quant aux maires, comment seront-ils remboursés lorsqu’un arrêté de péril pris par le préfet les contraint à faire des travaux que les propriétaires refusent de faire ? Un tel cas se présente dans ma commune, où deux barres de quatorze logements ne comptant plus que deux locataires qu’on ne peut pas faire sortir exigent des travaux que le bailleur public ne réalise pas. Comment la commune sera-t-elle remboursée si le maire fait procéder à ces travaux ? Il conviendra de traiter ce type de problème.

Si donc l’idée de la proposition de loi est bonne, je reste réservé quant aux mesures coercitives qu’elle prévoit.

M. le rapporteur. Monsieur Le Bouillonnec, il est certes déjà possible de faire réaliser les travaux d’office, mais les délais sont très longs – jusqu’à trois ans, pendant lesquels les personnes concernées vivent dans des conditions déplorables.

La proposition de loi qui vous est soumise vise précisément à raccourcir ces délais en incitant le propriétaire indélicat à faire effectuer les travaux de crainte de devoir payer, outre ces travaux mêmes, une astreinte qui peut atteindre 50 000 euros. Je le répète : il s’agit de frapper là où ça fait mal, c’est-à-dire au porte-monnaie, car les marchands de sommeil ne comprennent que ce langage. Quant aux propriétaires qui n’ont pas les moyens de payer, la proposition de loi ménage une souplesse suffisante en permettant à l’autorité administrative d’accorder la remise de l’astreinte lorsque ces propriétaires sont en mesure de prouver leur bonne foi. C’est notamment le cas lorsque des héritiers indivisaires ne peuvent se mettre d’accord pour entreprendre les travaux ou choisir une entreprise car, malgré la possibilité désormais offerte de décider à la majorité qualifiée – amélioration apportée par un amendement dont j’étais l’auteur en qualité de rapporteur de la loi portant réforme des successions et libéralités –, le délai reste souvent excessif.

Monsieur Piron, l’enjeu est bien, comme vous le soulignez, la rapidité d’exécution. Si la constatation de l’insalubrité des logements ne relève pas de la présente proposition de loi, il s’agit ici de faire en sorte que les travaux soient réalisés au plus vite, l’astreinte ayant un rôle d’incitation.

Pour ce qui est de l’expérimentation prévue par l’article 48 de la loi ENL du 13 juillet 2006, je précise que des arrêtés du 24 avril 2007 et du 30 octobre 2007 ont défini une liste de villes qui expérimentent pour cinq ans la déclaration préalable de mise en location – dont Roubaix, Tourcoing, Faches-Thumesnil, Valenciennes Métropole pour le premier de ces arrêtés, et Dunkerque, Halluin, Wattrelos et Nantes pour le second.

M. Benoist Apparu, secrétaire d’État chargé du logement. Nous disposons d’un arsenal juridique et financier globalement adapté à la situation. La question est de savoir comment le traduire concrètement sur le terrain.

Monsieur Brottes, même s’il est vrai qu’il existe une multitude d’obligations nouvelles qui procèdent d’une multitude de lois, il n’en est pas moins vrai que l’ensemble des mesures réglementaires prises depuis une quarantaine d’années a largement amélioré la qualité globale de l’habitat. Cela ne signifie pas pour autant que les logements soient assez nombreux, mais c’est un autre débat.

Le développement des interventions de l’ANAH, en complément de celles des collectivités locales, a contribué à l’amélioration du parc de logements français. Après avoir investi 186 millions d’euros en 2010 dans la lutte contre l’habitat indigne au profit de 13 500 logements appartenant à des propriétaires occupants et bailleurs, l’ANAH y consacrera 263 millions d’euros en 2011. Le Gouvernement a en effet décidé de recentrer les aides de cet organisme sur ces logements, qui constituent son cœur de métier.

Notre arsenal juridique et financier reste néanmoins compliqué. Comme l’a en effet indiqué M. Piron, il importe d’éviter le risque d’inconstitutionnalité lié au droit de propriété et de trouver un bon équilibre en la matière.

Surtout, l’arsenal juridique est très long à mettre en œuvre. L’objectif de la proposition de loi que vous examinez n’est pas de tout remettre à plat, mais de donner à l’autorité administrative un moyen supplémentaire pour aller plus vite que dans le cadre de la procédure actuelle. Aujourd’hui, en effet, la première étape consiste en un arrêté de péril, de sécurité pour les établissements recevant du public – en l’espèce, les hôtels – ou d’insalubrité. Si aucune suite n’est donnée à cet arrêté, un deuxième acte administratif demande des travaux d’office, en accordant un délai. Si ce délai n’est pas respecté, une troisième étape consiste à faire exécuter les travaux. La collectivité locale, ou la préfecture, peut alors se retourner contre le propriétaire pour obtenir le remboursement. Tout ce processus est très long et la proposition de loi tend à doter le maire ou le préfet d’un outil supplémentaire, d’un plus gros « bâton » pour pousser le propriétaire à effectuer les travaux dès que l’arrêté a été pris. Je précise qu’il s’agit là d’une procédure administrative, qui ne nécessite pas de recourir aux tribunaux. Un amendement propose d’assouplir encore le dispositif en permettant à l’autorité de décider d’une astreinte automatique dès l’arrêté de péril.

Le plus souvent, nos collectivités locales sont confrontées à des propriétaires qui refusent de dépenser un seul euro pour les travaux et veulent continuer à louer le plus cher possible à des gens qui n’ont pas d’autre solution que d’accepter la situation. Les services municipaux ou d’État, qui constatent le problème, ne possèdent pas les armes suffisantes pour lutter contre ces marchands de sommeil. L’arme financière devrait leur permettre d’accélérer les choses.

Pour les dossiers importants et très complexes – comme à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, où l’on compte d’importantes poches d’insalubrité et où je me suis rendu voici quelques jours –, le Programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) rendra possible une approche plus globale en permettant de traiter à la fois, dans un quartier, l’insalubrité et les marchands de sommeil avec de nouveaux instruments juridiques et financiers. Nous n’en devons pas moins disposer d’une multitude d’outils. J’ajoute que cette efficacité accrue répond à une demande forte du monde associatif.

Enfin, monsieur Cacheux, si je suis tout à fait favorable à votre proposition de suspendre le tiers payant en cas de refus du propriétaire de procéder aux travaux requis après arrêté de péril, de sécurité ou d’insalubrité – j’ai d’ailleurs demandé à mon cabinet d’en étudier la faisabilité –, je suis plus partagé quant au permis de louer. De fait, en dépit de ce qu’a déclaré tout à l’heure l’un de vos collègues, nombreux sont ceux qui contestent la bureaucratie liée au permis de construire. Prenons donc garde de ne pas multiplier de tels outils. L’instauration d’un permis de louer peut se révéler intéressante en cas d’arrêté de péril ou d’insalubrité, mais je suis moins convaincu de sa nécessité pour l’ensemble des 8 millions de locations du secteur privé et je suis réservé quant à la sur-administration.

Enfin, un permis de louer n’aura aucun impact sur les logements en bon état, mais il risque, lorsque les locaux ne répondent pas aux normes, de se traduire pour les locataires par une nouvelle insécurité en poussant les bailleurs dans l’illégalité et en les incitant à louer « au noir », sans contrat de location.

Attendons les résultats des expérimentations en cours, qui doivent faire l’objet d’un rapport au Parlement, et tirons-en les enseignements appropriés !

Je vous confirme, monsieur Brottes, que la RT 2012 sera la base des permis de construire et qu’elle sera donc bien respectée.

La Commission passe à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er (article L. 1331-29-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Faculté pour le préfet d’instaurer une astreinte journalière en cas de non-réalisation de mesures prescrites par un arrêté d’insalubrité

La Commission examine d’abord l’amendement CE 1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement donne la possibilité à l’autorité administrative d’imposer une astreinte journalière dès l’adoption de l’arrêté d’insalubrité. À l’issue du délai imparti pour réaliser les travaux, le propriétaire disposera d’un délai de trente jours pour se justifier auprès de l’autorité administrative au moyen d’un diagnostic établi par une entreprise agréée. S’il n’en fait rien, l’astreinte sera automatiquement appliquée.

Dans l’hypothèse où l’autorité administrative n’aurait pas assorti l’arrêté d’insalubrité d’une astreinte, elle conservera la possibilité d’y soumettre le propriétaire par la suite. Le texte offre une certaine souplesse à l’autorité compétente. Il me semblerait cependant préférable, pour des raisons d’efficacité, que l’astreinte soit prévue d’emblée.

M. le secrétaire d’État. Je suis favorable à cet amendement, qui simplifie le processus : il ne sera plus nécessaire de recourir à un acte supplémentaire pour infliger des pénalités, lesquelles pourront être automatiques, ce qui devrait réduire les délais.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ne faut-il pas procéder, en droit administratif, à la liquidation de l’astreinte ? Qui en aura la compétence ? Est-ce l’autorité administrative ou les juridictions ? L’autorité qui fixe l’astreinte ne peut pas être celle qui la liquide, me semble-t-il.

M. le rapporteur. Elle sera liquidée par les services de la trésorerie de l’autorité administrative concernée.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais qui délivrera le titre exécutoire ?

M. le rapporteur. L’autorité administrative compétente, à savoir le préfet ou le maire, selon le cas.

M. le secrétaire d'État. Les autorités administratives compétentes diffèrent, en effet, selon qu’il s’agit d’un arrêté d’insalubrité, d’un arrêté de péril ou d’un arrêté relatif à la sécurité des hôtels meublés : il s’agit du préfet dans la première hypothèse et du maire dans les deux autres, étant entendu que ce dernier agit au nom de l’État pour la réalisation d’office des travaux en matière d’insalubrité. L’autorité qui fixera l’astreinte sera celle qui prend l’arrêté. Puis, il reviendra tantôt au trésorier-payeur général, tantôt au trésorier municipal de procéder à sa liquidation.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sur cet amendement, les commissaires du groupe SRC s’abstiendront.

La Commission adopte l’amendement CE 1.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CE 2 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CE 3 du rapporteur.

M. le rapporteur. Par cet amendement, je propose d’affecter le produit des sommes recouvrées dans le cadre d’astreintes à l’ANAH.

M. le secrétaire d’État. On peut avoir une hésitation quand l’arrêté est pris par le maire, mais il me paraît logique que le produit des astreintes soit affecté à l’ANAH en l’espèce : les arrêtés d’insalubrité sont pris par le préfet, et les travaux d’office sont réalisés par l’État. Avis favorable, donc.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sur cet amendement, nous nous abstiendrons.

La Commission adopte l’amendement CE 3.

Elle en vient à l’amendement CE 4 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, qui tend à remplacer, à l’alinéa 5 de l’article 1er, la référence au préfet par celle à l’« autorité administrative compétente ». Le maire peut en effet intervenir.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CE 5 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à préciser que l’autorité administrative peut accorder une remise totale ou partielle de l’astreinte.

M. le secrétaire d'État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CE 6 du rapporteur.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sur l’article 1er, les commissaires du groupe SRC s’abstiendront.

La Commission adopte l’article 1er modifié.

Article 2 (article L. 511-2-1 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Faculté pour le maire d’instaurer une astreinte journalière en cas de non-exécution d’un arrêté de péril

La Commission examine l’amendement CE 7 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a le même objet que l’amendement CE 1, mais cette fois pour ce qui concerne les arrêtés de péril.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CE 8 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je propose que l’astreinte soit aussi affectée à l’ANAH dans le cadre de cette procédure.

M. le secrétaire d'État. Étant partagé sur ce point, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

Les arrêtés de péril sont pris par les maires, et les travaux d’office sont exécutés par les municipalités. On pourrait donc s’étonner que le produit des astreintes soit affecté à l’ANAH. Cela étant, 50 % des travaux sont subventionnés par cet organisme, ce qui peut justifier l’amendement. Je précise, en dernier lieu, que la collectivité récupère les sommes investies auprès du propriétaire – quand elle le peut. Le total qui lui revient alors peut atteindre 150 % de l’investissement.

Pour toutes ces raisons, je ne suis pas hostile à ce que l’on affecte le produit des astreintes à l’ANAH, mais je comprendrais aussi qu’il revienne plutôt aux collectivités locales. Au demeurant, les interventions de l’ANAH font en général l’objet d’un cofinancement des collectivités – ce sont elles qui montent les opérations – et 80 % des financements ont lieu dans le cadre de la délégation des aides à la pierre.

M. Michel Piron. J’aimerais connaître la position de nos collègues de l’opposition. Sur cette question, ils pourraient peut-être aller au-delà de leur abstention « positive ».

M. François Pupponi. Si les collectivités récupèrent les montants investis, on pourrait envisager qu’il en soit de même pour l’ANAH. Il ne serait pas normal que les collectivités « gagnent » au passage 50 % du total.

La question des astreintes est différente. Il n’est pas anormal que ce soit la collectivité mettant en œuvre la procédure qui encaisse le produit des astreintes, à l’instar des procès-verbaux dressés par la police municipale.

M. le rapporteur. Le texte permet une certaine souplesse aussi bien pour la fixation de l’astreinte que pour sa remise, qui peut être partielle ou totale. On pourrait donc craindre que certaines collectivités ne se décident en fonction des gains espérés. Une neutralité dans ce domaine me paraît utile pour garantir la neutralité des choix.

M. Alain Cacheux. Je suis sensible aux arguments du secrétaire d’État. Bien que les procédures soient effectivement interminables, certaines municipalités se sont engagées dans la lutte contre les logements indignes. Il ne me paraîtrait pas choquant que le produit de ces efforts leur revienne. Je suggère au rapporteur de continuer son travail sur le sujet afin d’arriver, avant le 30 novembre, à un texte prenant en compte cet aspect de la situation. Une solution préférable ne serait-elle pas de verser le produit des astreintes au « 1 % logement », qui finance en quasi-totalité l’ANAH ?

M. le rapporteur. Je maintiens mon amendement.

La Commission adopte l’amendement CE 8.

Elle en vient à l’amendement CE 9 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a le même objet que l’amendement CE 2 à l’article 1er.

La Commission adopte l’amendement CE 9.

Puis elle adopte successivement les amendements CE 10 et CE 11du rapporteur.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sur l’article 2, les commissaires du groupe SRC s’abstiendront.

La Commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 (article L. 123-3-1 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Faculté pour le maire d’instaurer une astreinte journalière en cas de non-exécution d’un arrêté relatif à la sécurité des hôtels meublés

La Commission examine l’amendement CE 12 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a le même objet que les amendements CE 1 et CE 7, mais cette fois pour ce qui concerne les hôtels meublés.

M. le secrétaire d'État. Avis favorable.

M. François Pupponi. Le fait de réaliser des travaux ne règle pas le problème de la sur-occupation. Un appartement peut cesser d’être insalubre tout en restant occupé par deux ou trois familles. Il faut également s’occuper de cette question.

M. Michel Piron. La sur-occupation est un problème distinct qui mérite un traitement particulier. Il s’agit ici de lutter contre l’insalubrité. Ne mélangeons pas tout ! J’ajoute qu’un logement peut très bien faire l’objet d’une sur-occupation alors qu’il n’est plus insalubre.

La Commission adopte l’amendement CE 12.

Puis elle adopte successivement les amendements CE 13 et CE 14 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CE 15 du rapporteur.

M. le rapporteur. Là encore, il s’agit de la remise partielle ou totale de l’astreinte.

La Commission adopte l’amendement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sur l’article 3, les commissaires du groupe SRC s’abstiendront.

La Commission adopte l’article 3 modifié.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sur l’ensemble de la proposition de loi, les commissaires du groupe SRC s’abstiendront.

La Commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Le Gouvernement entend-il remettre un rapport sur la mise en œuvre de l’expérimentation relative aux déclarations de mise en location, comme le prévoit l’article 48 de la loi du 13 juillet 2006 ?

M. le secrétaire d'État. Comment imaginer, un seul instant, que nous ne respections pas cette obligation ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je tiens à présenter mes excuses aux fonctionnaires auxquels cette tâche va incomber dès demain matin…

M. Serge Poignant, président. Merci au rapporteur pour cette proposition de loi, qui offre un outil supplémentaire.

Merci également, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir assisté à nos travaux, et je vous adresse toutes mes félicitations pour votre re-nomination. Permettez-moi de vous adresser tous mes encouragements.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CE 1 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 1er

Substituer aux alinéas 2 et 3 les alinéas suivants :

« Art. L. 1331-29-1. – I. A l’issue du délai imparti par l’arrêté prévu au II de l’article L. 1331-28, le propriétaire dispose de trente jours pour notifier à l’autorité administrative compétente un diagnostic faisant état de la réalisation des mesures prescrites par l’arrêté. Ce diagnostic est établi conformément à l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation. L’arrêté peut prévoir qu’à l’issue de ces trente jours, une astreinte journalière est perçue auprès du propriétaire jusqu’à la complète exécution de ces mesures constatée dans les conditions prévues à l’article L. 1331-28-3. Le montant de l’astreinte journalière est compris entre 50 et 500 euros. Il peut être progressif dans le temps. L’arrêté précité précise le montant de l’astreinte journalière, la date à compter de laquelle elle court et, le cas échéant, les modalités de sa progressivité.

II. Lorsque l’autorité administrative n’a pas usé de la faculté prévue au I, elle peut, après avoir invité le propriétaire par lettre avec avis de réception à s’expliquer dans un délai de trente jours sur la non réalisation des mesures prescrites par l’arrêté précité et au vu des explications qui auront pu lui être apportées, assortir la mise en demeure mentionnée au II de l’article L. 1331-29 d’une astreinte journalière d’un montant équivalent à celui prévu au I du présent article. L’astreinte court à compter de la réception de la notification de la mise en demeure jusqu’à la complète exécution des mesures prescrites constatée dans les conditions prévues à l’article L. 1331-28-3. La mise en demeure précise le montant de l’astreinte journalière, la date à compter de laquelle elle court et, le cas échéant, les modalités de sa progressivité. »

Amendement CE 2 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 1er

A l’alinéa 4, substituer au mot : « prévu » les mots : « de l’amende prévue ».

Amendement CE 3 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 1er

Compléter l’alinéa 4 par les phrases suivantes :

« L’astreinte est assise et recouvrée comme un droit de timbre. Son produit est affecté au budget de l’Agence nationale de l’habitat. »

Amendement CE 4 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 1er

A l’alinéa 5, substituer aux mots : « Le préfet » les mots : « L’autorité administrative compétente ».

Amendement CE 5 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 1er

A l’alinéa 5, substituer aux mots : « ou reversement partiel » les mots : « totale ou partielle ».

Amendement CE 6 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 1er

A l’alinéa 5, substituer au mot : « travaux » le mot : « mesures ».

Amendement CE 7 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 2

Substituer aux alinéas 2 et 3 les alinéas suivants :

« Art. L. 511-2-1. – A l’issue du délai imparti par l’arrêté de péril pris en application de l’article L. 511-1, le propriétaire dispose de trente jours pour notifier au maire un diagnostic faisant état de la réalisation des mesures prescrites par l’arrêté. Ce diagnostic est établi conformément à l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation. L’arrêté de péril peut prévoir qu’à l’issue de ces trente jours, une astreinte journalière est perçue auprès du propriétaire jusqu’à la complète exécution de l’arrêté de péril constatée dans les conditions prévues à l’article L. 511-5. Le montant de l’astreinte journalière est compris entre 50 et 500 euros. Il peut être progressif dans le temps. L’arrêté précité précise le montant de l’astreinte journalière, la date à compter de laquelle elle court et, le cas échéant, les modalités de sa progressivité. »

II. Lorsque le maire n’a pas usé de la faculté prévue au I, il peut, après avoir invité le propriétaire par lettre avec avis de réception à s’expliquer dans un délai de trente jours sur la non exécution de l’arrêté de péril pris en application de l’article L. 511-1 et au vu des explications qui auront pu lui être apportées, assortir la mise en demeure mentionnée au IV de l’article L. 511-2 d’une astreinte journalière d’un montant équivalent à celui prévu au I du présent article. L’astreinte court à compter de la réception de la notification de la mise en demeure jusqu’à la complète exécution de l’arrêté de péril constatée dans les conditions prévues à l’article L. 511-5. La mise en demeure précise le montant de l’astreinte journalière, la date à compter de laquelle elle court et, le cas échéant, les modalités de sa progressivité.»

Amendement CE 8 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 2

Rédiger ainsi l’alinéa 4 : « L’astreinte est assise et recouvrée comme un droit de timbre. Son produit est affecté au budget de l’Agence nationale de l’habitat. »

Amendement CE 9 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 2

A l’alinéa 5, substituer au mot : « prévu», les mots : « de l’amende prévue ».

Amendement CE 10 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 2

A l’alinéa 6, substituer aux mots : « ou reversement partiel » les mots : « totale ou partielle ».

Amendement CE 11 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 2

A l’alinéa 6, après le mot : « arrêté», insérer les mots : « de péril ».

Amendement CE 12 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 3

Substituer aux alinéas 2 et 3 les alinéas suivants :

« Art. L. 123-3-1. – I. A l’issue du délai imparti par l’arrêté pris en application de l’article L. 123-3, le propriétaire et l’exploitant disposent de trente jours pour notifier au maire un diagnostic faisant état de la réalisation des mesures prescrites par l’arrêté. Ce diagnostic est établi conformément à l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation. L’arrêté peut prévoir qu’à l’issue de ces trente jours, une astreinte journalière est perçue auprès du propriétaire et l’exploitant jusqu’à la complète exécution de l’arrêté. Le montant de l’astreinte journalière est compris entre 50 et 500 euros. Il peut être progressif dans le temps. L’arrêté précité précise le montant de l’astreinte journalière, la date à compter de laquelle elle court et, le cas échéant, les modalités de sa progressivité.

II. Lorsque le maire n’a pas usé de la faculté prévue au I, il peut, après avoir invité le propriétaire et l’exploitant par lettre avec avis de réception à s’expliquer dans un délai de trente jours sur la non exécution de l’arrêté mentionné au I et au vu des explications qui auront pu lui être apportées, assortir la mise en demeure mentionnée à l’article L. 123-3 d’une astreinte journalière, d’un montant équivalent à celui prévu au I du présent article. L’astreinte journalière court à compter de la réception de la notification de la mise en demeure jusqu’au constat de la complète exécution de l’arrêté. La mise en demeure précise le montant de l’astreinte journalière, la date à compter de laquelle elle court et, le cas échéant, les modalités de sa progressivité. »

Amendement CE 13 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 3

A l’alinéa 4, substituer au mot « prévu » les mots : « de l’amende prévue ».

Amendement CE 14 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 3

Rédiger ainsi l’alinéa 5 :

« L’astreinte est assise et recouvrée comme un droit de timbre ; son produit est affecté au budget de l’Agence nationale de l’habitat. »

Amendement CE 15 présenté par M. Sébastien Huyghe, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 3

A l’alinéa 6, substituer aux mots : « ou reversement partiel » les mots : « totale ou partielle ».

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 16 novembre 2010 à 21 h 30

Présents. - M. Alfred Almont, M. François Brottes, M. Louis Cosyns, M. William Dumas, M. Daniel Fasquelle, M. Sébastien Huyghe, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Annick Le Loch, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. François Pupponi, M. Francis Saint-Léger, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau

Excusés. - M. Gabriel Biancheri, Mme Geneviève Fioraso, Mme Laure de La Raudière, M. Pierre Lasbordes, M. Michel Lejeune, M. Kléber Mesquida

Assistait également à la réunion. - M. Alain Cacheux