Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires économiques > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires économiques

Mercredi 6 avril 2011

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 61

Présidence de M. Serge Poignant Président

– Rapport d’information sur le contrôle de l’application de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (Mme Catherine Vautrin et M. Jean Gaubert, rapporteurs).

La commission a examiné le rapport d’application de la loi n° n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie sur le rapport de Mme Catherine Vautrin et M. Jean Gaubert, rapporteurs.

M. le président Serge Poignant. Mes chers collègues, nous voici réunis pour procéder cet après-midi à l’examen du rapport sur l’application de la Loi de modernisation de l’économie (LME) rédigé par nos deux rapporteurs Catherine Vautrin et Jean Gaubert. Vous le savez tous : la LME, promulguée le 4 août 2008, a fait partie des travaux importants menés par notre Commission. Je ne peux manquer, mais chacun sera, j’en suis certain, d’accord avec moi, de rappeler encore une fois l’implication constante et décisive de Jean-Paul Charié sur ce sujet. Après un premier bilan de la LME réalisé par nos collègues du Sénat en décembre 2009 puis un deuxième réalisé déjà par notre commission en février 2010, voici venu le temps d’un troisième bilan. Il est vrai que, compte tenu du nombre de sujets abordés par la LME, les examens peuvent se multiplier sans pour autant être redondants. Je rappellerai par ailleurs que notre Commission a, sans que cela soit examiné sous couvert d’un rapport spécifiquement consacré à la LME, à l’occasion de certaines auditions notamment, porté un regard à la fois lucide et critique sur certaines innovations de la LME : la réforme de l’auto-entrepreneur, celle d’Ubifrance, la réforme du Livret A… Je rappelle également que nous avons entendu Mme Christine Lagarde et M. Frédéric Lefebvre le 11 janvier dernier sur le bilan de la LME de manière générale. Avant de laisser la parole à nos rapporteurs, qui nous expliqueront l’angle d’attaque qu’ils ont retenu, je souhaite leur poser deux questions :

- tout d’abord, le sujet des délais de paiement. On sait que les accords dérogatoires vont se terminer le 1er janvier prochain et qu’une harmonisation communautaire est en cours, une directive devant être transcrite dans notre droit national avant le mois de mars 2013. Pouvez-vous nous faire part de votre réflexion sur ce sujet extrêmement important pour la vitalité de nos entreprises ?

- ensuite, je souhaiterais vous interroger sur la question tout aussi essentielle des sanctions pouvant être prononcées par l’Autorité de la concurrence, qui fait d’ailleurs l’objet de développements particuliers dans le cadre de votre rapport. Pensez-vous que la démarche actuellement engagée par le Président Bruno Lasserre soit de nature à entraîner une meilleure acceptation de ses décisions et, de ce fait, à renforcer l’Autorité ?

Je vous remercie et je vous laisse tout de suite la parole.

Mme Catherine Vautrin, co-rapporteur. Je vous remercie monsieur le Président. Plus de deux ans et demi après le vote de la LME, il était temps de faire un nouveau bilan de la LME et, avec Jean Gaubert, nous avons choisi de traiter spécifiquement un certain nombre de sujets qui sont les soldes flottants, l’Autorité de la concurrence, les délais de paiement et la négociabilité. Plusieurs sujets ne seront donc pas abordés : ainsi, vous reconnaîtrez avec nous que tout ce qui concerne le Livret A nous semble relever davantage de la Commission des finances ; un bilan de l’auto-entrepreneur a par ailleurs déjà été effectué et même présenté à notre Commission il y a quelques mois. Quant à l’urbanisme commercial, il a fait l’objet d’une proposition de loi déposée par notre ancien président Patrick Ollier et qui a, pas plus tard que jeudi dernier, été débattue en séance publique au Sénat ; il nous a donc paru opportun de ne pas troubler de quelque manière que ce soit le processus législatif actuellement en cours et dont nous savons que Michel Piron, notre rapporteur sur ce sujet, le suit avec la plus extrême attention. Enfin, je suis tout à fait d’accord avec vous Monsieur le Président en disant que, pour Jean Gaubert et moi, il ne se passe pas un seul instant lorsque nous travaillons sur ce sujet sans que nous n’ayons également une pensée pour notre ami Jean-Paul Charié, dont nous savons effectivement combien il s’était investi sur ce texte.

Avant que Jean Gaubert ne vous parle plus particulièrement des relations entre fournisseurs et distributeurs et de tout ce qui concerne les négociations commerciales, je vais aborder dans un premier temps les autres thèmes évoqués dans ce rapport.

Comme l’ont illustré les quatre grands objectifs poursuivis par la LME, comme le sous-entend également l’appellation même de cette loi, il s’agit d’un texte de nature à toucher l’ensemble de notre économie. Contrairement à l’impression qu’on a parfois pu avoir, la LME ne concerne pas seulement le secteur agro-alimentaire même si, ne nous en cachons pas, les relations entre fournisseurs et distributeurs sont essentielles et sont fortement affectées par ce texte.

C’est la raison pour laquelle nous avons tenu à traiter d’un sujet important, les échos dans la presse en témoignent, qui est celui des « soldes flottants ». Les soldes flottants, actuellement codifiés à l’article L. 310-3 du code de la consommation, désignent une période complémentaire de soldes d’une durée globale de deux semaines que les magasins peuvent utiliser à n’importe quel moment de l’année soit d’un seul tenant, soit sous la forme de deux semaines séparées. L’idée pouvait sembler séduisante à première vue, mais ces soldes ont suscité une forte opposition à tel point que l’ancien secrétaire d’État au commerce et à l’artisanat, M. Hervé Novelli, a été conduit à en demander l’évaluation. À notre tour, nous avons entendu différentes personnes sur ce sujet qui ont, de manière quasi unanime, souhaité leur disparition. Dans leur immense majorité, elles ont souligné la perturbation supplémentaire que les soldes flottants peuvent entraîner à l’égard du consommateur, déjà placé au milieu d’un véritable tourbillon de soldes, de promotions, de déstockages, de ventes privées qui se multiplient par les voies traditionnelles mais également, de plus en plus, par le biais d’Internet. À ce titre, nous pensons qu’il pourrait être utile de procéder à une analyse sociologique et économique du dispositif, mais aussi d’effectuer une analyse globale des soldes, quelle que soit la modalité retenue (soldes effectuées chez un détaillant, sur Internet…) avant de déterminer s’il convient ou non de supprimer le dispositif des soldes flottants. Il convient également de préciser qu’une idée qu’avait émise en son temps la FCD et qui consistait à conserver les soldes flottants tout en raccourcissant encore la durée des soldes traditionnels n’a trouvé aucun écho, certains détaillants ayant fait état du fait que les soldes de cette année avaient mal commencé mais qu’ils s’étaient rattrapés sur les dernières semaines, cette période correspondant à une véritable habitude de consommation qui leur semble donc intéressante de garder. Quant aux grands magasins, notamment ceux situés sur le Boulevard Haussmann, ils n’ont visiblement pas besoin des soldes flottants, pouvant sans difficulté fonctionner sur leur propre système de promotions.

Sujet qui concerne également l’ensemble de l’économie, celui des délais de paiement, dont chacun ici connaît l’importance pour le financement des entreprises, notamment de nos PME. Les précédents rapports relatifs à la LME avaient déjà souligné, même si celui de l’Assemblée nationale avait un peu plus critique que celui du Sénat, la réussite de la LME en ce domaine puisque les délais de paiement ont baissé de 11 jours en moyenne. Cela dit, Jean Gaubert et moi nous interrogeons sur l’évolution de la réglementation. En effet, les accords dérogatoires qui, ce n’est pas négligeable, concernent tout de même 20 % de notre économie, sont appelés à disparaître au 1er janvier 2012 ; par ailleurs, une harmonisation communautaire est en cours puisqu’une directive sur ce sujet datant du mois de février dernier devra être transposée dans notre droit interne avant le 16 mars 2013. Or, cette dernière prévoit, tout en fixant à 60 jours le délai de paiement de droit commun, qu’il pourra y être librement dérogé si les parties en conviennent. Que faut-il entendre ainsi ? Si la France fait des efforts pour diminuer les délais de paiement, la réglementation européenne autoriserait-elle davantage de liberté en la matière ? Si des entreprises ou des secteurs font des efforts pour passer au délai de 60 jours ou de « 45 jours fin de mois » tels que fixés par la LME, cela signifie-t-il que leurs efforts seront vains puisqu’il pourra y être dérogé à l’avenir ? En outre, connaissant les rapports du faible au fort qui existent dans le domaine commercial, peut-on penser un seul instant qu’un petit fournisseur refusera, au risque de se voir déréférencé, de déférer à la demande d’un distributeur qui souhaitera adopter des délais de paiement supérieurs à 60 jours ? Sur cette question, nous avons regretté que l’Observatoire des délais de paiement, pas plus que le Gouvernement d’ailleurs, n’aient pu nous éclairer sur ce point en dépit de nos sollicitations puisque, visiblement, leur réflexion n’a pas encore débuté sur ce sujet. Autant de raisons pour lesquelles nous devons, ici à l’Assemblée nationale, absolument anticiper ce que seront demain les délais de paiement dans notre réglementation afin de ne pas nous laisser surprendre et de ne pas contraindre inutilement des branches qui auraient fait des efforts de manière inutile. Il existe par exemple des secteurs qui connaissent de véritables difficultés pour adopter le délai légal (secteurs du jouet, du jardinage, ceux qui vendent des produits à rotation lente). Enfin, il semble que la doctrine ne soit pas totalement unanime pour savoir si les dispositions relatives aux délais de paiement doivent ou non s’appliquer aux fournisseurs étrangers : si tel n’est pas le cas, les facilités offertes en termes de délais de paiement risquent de favoriser les concurrents étrangers et de pénaliser nos propres entreprises. Il convient donc d’y être parfaitement attentif.

Autre sujet qui a attiré notre attention, celui de l’Autorité de la concurrence. Nous savons tous ici, pour avoir travaillé sur la LME ou pour avoir entendu ici, à diverses reprises, M. Bruno Lasserre nous parler de l’institution qu’il préside avec, que l’Autorité de la concurrence est aujourd’hui une institution incontournable. Actuellement codifiée aux articles L. 461-1 et suivants du code de commerce, l’Autorité de la concurrence a retenu notre attention à au moins deux égards. D’une part, il s’agit d’une autorité administrative indépendante dotée de pouvoirs extrêmement importants aujourd’hui, qu’il s’agisse des nouveaux contrôles qui lui ont été dévolus (je pense naturellement au contrôle des opérations de concentration qui, rappelons-le pour mesurer le chemin parcouru, relevait auparavant du ministre de l’économie), de sa capacité à s’autosaisir ou de sa capacité à se pourvoir en cassation contre une décision de la Cour d’appel de Paris qu’elle n’approuverait pas. D’autre part, il s’agit d’une institution qui subit de profonds changements en ce qui concerne notamment sa politique de sanctions. Chacun se souvient ici du coup de tonnerre lorsque la Cour d’appel de Paris, dans l’affaire dite du « cartel de l’acier », avait ramené l’amende de 570 millions d’euros prononcée par l’Autorité à 75 millions d’euros ! Tirant les enseignements de ces différents épisodes, l’Autorité de la concurrence a engagé une profonde réflexion sur sa manière d’agir : on ne peut que l’en féliciter. On ne pouvait donc que s’y intéresser dans le cadre de ce rapport. Nous avons retenu deux pistes intéressantes de réflexion à ce sujet. La première concerne la formation des magistrats en matière économique qui doit impérativement être renforcée, notamment s’ils ont vocation à connaître du contentieux de la régulation économique, préconisation qu’avait faite l’ancien premier président de la Cour de cassation Guy Canivet dans un rapport paru il y a quelques années. La seconde, qu’observe naturellement dès à présent l’Autorité de la concurrence, concerne le respect du contradictoire qui doit présider à l’ensemble des procédures et contentieux afférents à la matière concurrentielle ; l’Autorité doit notamment veiller à ne pas analyser des problèmes locaux à travers un prisme qui soit seulement national, je pense notamment au rapport rendu sur l’affiliation des magasins indépendants.

Avant de laisser la parole à Jean Gaubert pour l’entendre nous donner les grands enseignements que ce contrôle a pu nous apporter sur les relations entre fournisseurs et distributeurs, je souhaiterais préciser deux points. D’une part, la totalité des personnes que nous avons auditionnées souhaitent, sans exception aucune, ne pas rouvrir le chantier législatif de la LME. Il convient de préserver au mieux la stabilité législative. D’autre part, les acteurs souhaitent également que la notion de « déséquilibre significatif » dont le Conseil constitutionnel a confirmé la conformité à la Constitution le 13 janvier dernier, soit désormais concrétisée : il appartient maintenant au juge de dire, au gré des affaires qu’il devra examiner, quelle en est la signification profonde. Étant là aux portes de la négociabilité, je laisse maintenant la parole à mon co-rapporteur, Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert, co-rapporteur. Comme l’a dit Catherine Vautrin, c’est moi qui, une fois n’est pas coutume, vais maintenant intervenir devant vous sur la partie du rapport spécifiquement consacrée aux négociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs.

Je reviendrai au préalable sur une remarque que vient de faire Catherine Vautrin et à laquelle je souscris entièrement. Il ne nous semble en effet pas souhaitable de rouvrir le chantier législatif de la LME. Avouons que la tentation peut être grande parfois tant, et je vais y venir dans un instant, l’observation de certains comportements dans les relations commerciales nous semblent choquants, soit qu’ils violent ouvertement la loi (dans ce cas, on pourrait être tenté de renforcer les dispositifs contraignants qui existent dès à présent dans le texte), soit que des imperfections dans le texte ou dans l’application de la loi nous soient signalées.

Par ailleurs, ni Catherine Vautrin, ni moi ne voulons, dans ce rapport, jeter l’opprobre sur une catégorie d’acteurs en particulier. Bien souvent, nous avons entendu, au fil des auditions que nous avons conduites, parler de comportements condamnables qui sont imputables aussi bien à certains fournisseurs qu’à certains distributeurs. Il est néanmoins vrai que ces derniers sont plus fréquemment montrés du doigt, et ce pour des raisons objectives. La France compte sept centrales d’achat et des dizaines, voire des centaines de milliers de fournisseurs : il est objectivement plus facile de débusquer un comportement illicite dans un petit groupe que parmi une multiplicité de protagonistes. Par ailleurs, les auditions ont conduit à des témoignages concordants sur un certain nombre de pratiques de la part de distributeurs alors même que ceux qui nous en ont fait part exercent leur profession dans des domaines extrêmement différents. Les mauvais comportements n’existent pas seulement chez les acteurs du secteur agro-alimentaire. Enfin, on a pu objectivement constater que des distributeurs se sont engagés à respecter un certain nombre de principes et que, dans la pratique, il n’en est rien. Vous trouverez donc dans ce rapport quelques remarques parfois acerbes à l’égard des distributeurs mais nous ne sommes pas dans le secret des négociations et nous faisons donc état de comportements qui, comme nous allons le voir, violent tant l’esprit que la lettre de la LME.

Comme dans le précédent rapport, nous abordons ici les négociations commerciales qui, même si elles ne sont pas le seul objet de la LME, figurent néanmoins parmi les points les plus importants. En février 2010, lors de la présentation du premier rapport d’application de la LME dans cette commission, nous avions, Jean-Paul Charié, Patrick Ollier et moi-même, déjà souligné le bon bilan concernant la diminution des délais de paiement : Catherine Vautrin y a fait allusion tout à l’heure. Même si certains secteurs posent problème, la situation est globalement bonne sur ce sujet. Nous avions également salué la diminution des marges arrière qui témoignaient d’une véritable normalisation des pratiques commerciales. Nous avions enfin déjà signalé un certain nombre de pratiques qui nous semblaient être autant de détournements de la loi ; c’est la raison pour laquelle nous nous étions réjouis des neuf assignations effectuées par le Gouvernement à l’encontre de plusieurs grandes enseignes de la distribution.

Malheureusement, plus d’un an après ce constat, la situation entre fournisseurs et distributeurs semble objectivement s’être aggravée alors qu’on pouvait espérer aller vers davantage de respect de la parole donnée, davantage d’écoute, en un mot davantage de loyauté. Comme l’illustre notre rapport, les acteurs économiques ont eu à faire face à deux types de difficultés.

Des difficultés juridiques en premier lieu comme l’a parfaitement illustré la question prioritaire de constitutionnalité relative à la notion de « déséquilibre significatif ». Cette notion, qui figure à l’article L. 442-6 du code de commerce, pourtant si centrale dans les relations entre fournisseurs et distributeurs, a été jugée conforme à la Constitution mais, pour autant, nous ne savons toujours pas quel en est le contenu, sauf à faire un parallélisme avec la jurisprudence qui s’est développée par ailleurs dans le domaine des clauses abusives. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette conformité à la Constitution mais, aujourd’hui, il convient notamment que les procédures judiciaires décidées par le Gouvernement dans le cadre des assignations effectuées à l’automne 2009 aboutissent afin que les acteurs économiques sachent quel comportement ils doivent éviter s’ils ne veulent pas tomber sous le coup d’un tel déséquilibre. On a connu situation plus confortable !

Des difficultés d’ordre pratique en second lieu. Nous avons ainsi été interpellés à de nombreuses reprises sur le sens qu’il convenait de donner à la convention unique, définie à l’article L. 441-7 du code de commerce. Quels éléments doivent y figurer ? Jusqu’à quel degré de détail peut-on aller ? En outre, de très nombreuses questions se sont posées à l’égard de la date butoir du 1er mars, le code de commerce prescrivant en effet la règle selon laquelle la convention unique doit être signée le 1er mars au plus tard. Pour de nombreuses branches d’activité, le 1er mars ne signifie rien. Au mieux faudrait-il peut-être fixer comme limite le 1er janvier, de manière à faire coïncider la validité de la convention unique avec l’année civile mais, là aussi, cette date peut poser des difficultés pour un certain nombre de secteurs. Catherine Vautrin a fait allusion au secteur de l’habillement tout à l’heure lorsqu’elle a abordé le sujet des soldes flottants : il va de soi que le chiffre d’affaires du secteur de l’habillement ne peut véritablement être connu qu’une fois la période des soldes achevés, c’est-à-dire aux environs de la mi-février. Négocier, en toute connaissance de cause, et conclure une convention unique qui soit applicable dès le 1er mars est naturellement parfaitement illusoire dans ces conditions ! C’est la raison pour laquelle nous émettons l’idée dans le rapport, tout en reconnaissant qu’une telle modification ne peut passer que par un changement législatif, de permettre à chaque branche de signer une convention unique à la date qu’elle souhaite, qui serait toujours valable pour une année, à condition que les CGV (conditions générales de vente) aient été transmises au partenaire commercial au moins deux mois avant le terme fixé. Cette solution pourrait allier une certaine souplesse avec le respect d’une durée de négociation minimale, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas.

Autre exemple de difficulté pratique, qui est d’autant plus incompréhensible et d’autant plus révoltante pour des députés comme nous qui avons discuté puis, pour certains, voté une loi et qui souhaitons maintenant tous, puisqu’il s’agit d’une loi de la République, la voir pleinement appliquée, que la disposition applicable figure très clairement dans le code de commerce, c’est celle qui dispose que les conditions générales de vente (CGV) constituent en principe le « socle de la négociation commerciale ». La pratique montre que les distributeurs opposent de manière quasi systématique leurs conditions générales d’achat (CGA), refusant sinon de commencer à négocier en vue de la conclusion de la convention unique. Il y a là une manifestation criante des rapports du fort au faible que nous ne pouvons tolérer. Ce n’est pas un hasard, et nous les citons dans le rapport, si nous avons entendu, lors d’auditions différentes, des expressions telles que « la LME a accru le sentiment d’invulnérabilité des distributeurs » ou la LME a instauré « un véritable sentiment d’impunité » chez les distributeurs !

Par ailleurs, et ce sont des comportements liés à des préoccupations relativement nouvelles, on constate une attitude assez récalcitrante de la part des distributeurs à prendre en compte une part des hausses des prix des matières premières dont la volatilité ne cesse semble-t-il de s’accroître. Notre Commission a lancé un groupe de travail sur ce sujet, je ne serai donc pas long, mais nous avons souhaité, Catherine Vautrin et moi-même, énoncer un certain nombre de principes que nous souhaiterions voir respectés à l’avenir par les distributeurs et les fournisseurs. Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple, nous aimerions que les règles de prise en compte d’une variation des prix des matières premières soient exactement les mêmes que cette variation joue à la hausse ou à la baisse. Il est en effet intolérable de voir un distributeur refuser de prendre en compte une hausse de prix de matière première qui pèse sur un de ses fournisseurs et, si le prix diminue, imposer à ce même fournisseur une réouverture de la convention unique pour revoir le prix à la baisse !

Enfin, Monsieur le Président, mes chers collègues, je conclurai mon propos en rappelant à quel point il est important d’avoir en France des institutions fortes. Catherine Vautrin a évoqué tout à l’heure l’Autorité de la concurrence, j’évoquerai pour ma part la DGCCRF. Alors que celle-ci se voit confier un nombre toujours plus important de missions, alors qu’elle doit exercer une surveillance aussi fine que possible sur l’ensemble du territoire, nous avons besoin d’une DGCCRF forte, dotée de moyens humains et budgétaires conséquents. On ne peut que se féliciter d’avoir vu les effectifs de la « brigade LME » passer de 80 à 120 personnes aujourd’hui mais on se rend bien compte, eu égard à la multiplicité des comportements qui cherchent à contourner la LME encore une fois aussi bien dans la lettre que dans son esprit, que celle-ci doit être constamment renforcée. J’espère qu’il en sera ainsi à l’avenir.

M. le président Serge Poignant. Je vous remercie mes chers collègues pour cette présentation détaillée, concrète, assortie de plusieurs propositions, et qui suscite en effet de nombreuses questions comme la bonne date à retenir pour la conclusion de la convention unique : le 1er mars pose des difficultés mais, pour bien des secteurs comme celui du jouet, celle du 1er décembre est tout aussi problématique. Je donne maintenant la parole aux orateurs pour les groupes.

M. Daniel Fasquelle. Au nom du groupe UMP, je souhaiterais à mon tour vous remercier pour ce rapport où vous pointez en effet un certain nombre de sujets importants, qui reflètent de réelles préoccupations dont on nous a fait également part sur le terrain.

Sur le sujet des soldes flottants, il apparaît en effet que le dispositif ne donne pas pleinement satisfaction. Si on doit un jour étudier les périodes de soldes, je pense qu’il faudra notamment regarder la situation propre aux communes et zones touristiques : il peut y avoir des décalages dans leur situation avec celles des grandes villes et cela ne manque pas de susciter certaines difficultés.

La libre négociabilité était au cœur de la LME puisqu’on avait souhaité, par ce dispositif, faire en sorte qu’il y ait une véritable négociation sur le prix afin qu’il diminue et qu’il puisse ensuite bénéficier au consommateur. Disposez-vous à ce sujet d’éléments statistiques qui permettraient de montrer que le niveau des prix a effectivement baissé grâce à la LME ? C’est certes le sentiment que l’on peut avoir aujourd’hui puisqu’il existe également une concurrence par les prix entre distributeurs (il suffit de voir la publicité comparative sur ce sujet pour s’en rendre compte) mais qu’en est-il réellement ? C’est un sujet fondamental puisque cela touche au pouvoir d’achat, préoccupation essentielle de nos concitoyens que nous partageons tous naturellement.

Sur les conditions générales de vente, je suis tout à fait d’accord avec vous pour que l’on réaffirme clairement qu’elles doivent servir de socle aux négociations commerciales.

Quant à l’Autorité de la concurrence, la LME lui a conféré un certain nombre de pouvoirs importants, notamment dans le domaine du contrôle des concentrations ; à ce sujet, nous avions souhaité une vigilance toute particulière des concentrations dans le secteur de la distribution : savez-vous si l’Autorité de la concurrence utilise les nouveaux moyens qu’elle a à sa disposition pour opérer de tels contrôles. ? Elle l’a fait pour Paris, mais par ailleurs a-t-elle l’intention de la faire pour le reste de notre territoire, qui ne présente pas les mêmes caractéristiques que Paris et sa région ?

Je pense qu’il faut veiller également à une bonne articulation entre l’action de l’Autorité de la concurrence et l’action qui peut être menée par d’autres acteurs (la DGCCRF, vous en avez parlé, mais au aussi le juge judiciaire, seul habilité à prononcer des amendes civiles…). Sur la DGCCRF, je pense qu’il faut effectivement veiller à son renforcement pour qu’elle puisse procéder aux enquêtes nécessaires ; je souhaite également que les procédures judiciaires avancent de manière à parfaitement définir certaines notions, comme celle du « déséquilibre significatif » qui demeure encore très incertaine.

Quant au sujet des délais de paiement, vous avez souligné la réussite de la LME ; c’est vrai mais il faudra effectivement voir comment cela s’agencera avec cette directive communautaire que nous devons transposer avant mars 2013 en espérant que, cette fois-ci, nous n’aurons pas autant de retard qu’habituellement dans la transposition d’une directive.

En conclusion, je pense qu’il manque un volet sur l’urbanisme commercial dans ce rapport mais vous nous en avez donné très légitimement la raison. Par ailleurs, je pense également qu’il ne faut pas bouleverser la législation et attendre que la pratique, les acteurs en présence et la jurisprudence mettent en œuvre ce texte important, sous l’œil et la vigilance de chacun, à commencer par celle de nos deux rapporteurs.

M. François Brottes. Si nous n’étions pas entre gens de bonne volonté et que j’étais homme à faire des effets de tribune, je dirais que l’on est passé « de la posture à l’imposture ». Voilà ce qui m’est venu à l’esprit en lisant les « seize propositions pour une meilleure application de la LME » en fin de rapport. Vous aviez pourtant adopté une posture lucide et incisive, Mme Vautrin, lors d’un point d’étape antérieur. Loin de moi l’idée de remettre en cause le travail minutieux que vous avez mené, notamment au sein de l’instance que vous présidez, mais il n’y a pas que les soldes qui sont flottants : votre rapport se contente de proposer un approfondissement de l’analyse et des moyens supplémentaires pour l’administration. C’est trop peu !

Encore une fois, l’analyse est bonne, mais je suis très déçu par les propositions qui en découlent. « Adopter une politique suffisamment dissuasive en matière de sanctions », « exiger une reddition systématique des comptes », « réaffirmer la primauté des conditions générales de vente », cela ne passe-t-il pas par une évolution de la loi ? Le rapport est en deçà de la manière dont on appréhendait le sujet il y a peu de temps encore. Peut-être les choses ont-elle évolué dans le bon sens depuis mais, dans ce cas, je n’ai pas tout suivi.

Enfin, j’ai bien entendu les raisons pour lesquelles vous n’aviez pas évoqué le sujet de l’urbanisme commercial, mais je le regrette. Je partage le souhait de voir le texte de MM. Piron et Ollier rapidement revenir devant notre commission, pour que l’on puisse débattre une nouvelle fois de ces questions dans les meilleurs délais.

M. le président Serge Poignant. La proposition de loi de MM. Piron et Ollier a été examinée par le Sénat le 31 mars dernier : son inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ne dépend pas de nous !

M. Jean Dionis du Séjour. Je m’associe aux propos de M. François Brottes sur le sujet de l’urbanisme commercial. Il me semble extrêmement important de mener ce travail jusqu’à son terme. À ce titre, M. le président, vous avez un rôle important à jouer : si la Commission des affaires économiques ne va pas chercher ce texte, personne ne le fera à sa place, beaucoup considérant qu’il est déjà trop tard en cette dernière année de Législature…

Dans votre rapport intermédiaire, vous aviez dit votre optimisme en matière de recul des marges arrière, car vous aviez constaté qu’elles avaient diminué, passant de 30 % à 10 %, notamment par rapport au prix de vente au consommateur final. Ce gain a-t-il été consolidé ? Mon fils, qui est commercial chez Danone, me dit qu’un nouveau phénomène est en train de se développer pour contourner la loi : les exemplaires gratuits…

Mme Catherine Vautrin, co-rapporteur. Oui : dans le jargon, on appelle ça les « NIP » (nouveaux instruments promotionnels).

M. Jean Gaubert, co-rapporteur. L’exemple type est celui du « trois pour le prix de deux ».

M. Jean Dionis du Séjour. Ces NIP, comme cela se dit, recréent-ils les 30 % de marges arrière ?

Troisième point que je souhaiterais aborder, la place dominante de certaines enseignes dans les villes moyennes. Casino a longtemps été en position de monopole sur le bassin agenais. La LME ouvre la possibilité de saisir l’Autorité de la concurrence dans de tels cas : cela a-t-il été fait ? Si oui, combien de cas ont-ils été signalés ?

Mme Frédérique Massat. Je m’associe aux propos de M. François Brottes en constatant que le rapport est dense mais que les préconisations sont édulcorées. « Procéder à une analyse », « obtenir de l’Observatoire des réponses concrètes », ce ne sont pas des demandes très impérieuses. S’agissant de cette dernière proposition, un observatoire n’est-il pas, par définition, fait pour ça ? « Réaffirmer », « veiller », les mots sont faibles. On ne peut « réaffirmer » sans accroître les sanctions ; et l’on ne peut non plus se contenter de « veiller », il faut exiger ! C’est d’autant plus surprenant que certaines des propositions contenues dans le corps du rapport ne sont pas reprises intégralement. Or, elles sont souvent bien plus détaillées et lourdes de conséquences que celles qui sont présentées dans les dernières pages. Je pense notamment à l’une d’entre elles, relative aux conditions générales de vente, qui nécessiterait une modification du code de commerce. Vous remarquez qu’une pratique viole ouvertement les dispositions de la LME visant à réaffirmer l’importance des CGV : le constat est fort, mais les propositions en regard ne sont pas à la hauteur.

Vous mentionnez, au sujet des soldes flottants, qu’il existe un « quasi-consensus » en faveur de leur suppression. Que proposez-vous en conséquence ? De « procéder à une analyse globale des soldes ». Il me semble que le rapport l’a déjà très bien fait. Avez-vous envisagé la réintroduction de la sanction, appliquée en cas de soldes hors période, supprimée par la LME,  qui pouvait aller jusqu’à 75 000 euros ? Il faudra bien prendre une décision, maintenir ou supprimer ces soldes flottants.

M. Jean-Pierre Nicolas. Ce rapport était nécessaire et je salue à mon tour sa grande qualité. Il illustre la nécessité d’un suivi très strict de l’application des lois, sans lequel la légitimité du législateur est inévitablement altérée.

En matière commerciale, la créativité est grande pour s’adapter aux nouvelles réglementations, et le législateur a toujours un quart d’heure de retard sur les pratiques. J’ai bien noté que l’évolution des délais de paiement était satisfaisante, et je regrette avec vous que vous n’ayez pu auditionner le président de l’Observatoire. Vous soulignez également que le Gouvernement a manqué d’anticipation en n’ayant pas encore véritablement réfléchi à l’impact de l’harmonisation communautaire sur le droit national, alors que se profile la fin prochaine des accords dérogatoires. Ce point est fondamental pour certaines professions, notamment celles dont la rotation des stocks s’allonge, qui éprouveront des difficultés croissantes pour coordonner leurs dépenses et leurs recettes.

Je lis avec plaisir que la DGCCRF fait un travail tout à fait remarquable, et que les effectifs de la « brigade LME » ont augmenté, passant de 80 à 120 agents. Souhaitons que ses moyens restent à la hauteur des missions qui lui sont confiées. S’agissant des propositions, on pourrait vouloir qu’elles soient plus sévères, mais je me contenterai d’insister sur l’exemplarité de la personne publique, comme vous le soulignez vous-même.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous avez très bien cerné le problème de la libre négociabilité et ses enjeux en matière de discrimination. Cela dit, dans la proposition correspondante, la seizième, vous vous contentez d’attendre que les procédures engagées s’achèvent afin de déterminer le contenu effectif de la notion de « déséquilibre significatif ». Vous rappelez que l’on a affiné le texte dans le dispositif de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce en introduisant une nouvelle infraction liée à l’existence d’un « déséquilibre significatif » ; nous avions d’ailleurs repris le terme utilisé dans la loi sur la consommation (sauf que le texte sur les consommateurs parle lui de la relation entre « professionnels et non professionnels », alors que la LME ne concerne que les rapports entre professionnels). Vous avez évoqué la procédure initiée par le secrétariat d’État, la question prioritaire de constitutionnalité qui a conduit le Conseil constitutionnel à considérer que le dispositif était conforme à la Constitution, et vous concluez en disant que vous attendez les décisions de justice. Je suis très ennuyé ! Vous appelez le juge à nous donner la définition du « déséquilibre significatif » mais, comme le dit très bien Jean-Pierre Nicolas, le législateur a toujours un temps de retard sur les pratiques d’autant qu’à ce retard peut s’en ajouter un autre lié à l’attente de la décision de la Cour de cassation… Pour moi, il est inconcevable que nous ne revisitions pas la notion de « déséquilibre significatif », car une décision de justice est longue à venir et aléatoire. Par exemple, si elle se plaçait dans le cadre des rapports entre professionnels, elle serait à côté de l’objet. Toutes ces questions sont pertinentes, et il me semble que le législateur pourrait déjà les régler !

Il y a un autre aspect du sujet que je souhaiterais aborder : le secrétariat d’État a saisi la juridiction compétente, mais quels étaient les motifs invoqués ? Quels étaient à ses yeux les éléments constitutifs d’un déséquilibre significatif ? Quelle définition défendra-t-il ? Je suggère que nous travaillions de notre côté à construire cette notion, car si nous nous reposons sur le juge, nous prenons le double risque d’attendre trop longtemps et d’être insatisfaits de sa réponse. Nous serions alors obligés de nous relancer dans un travail législatif, avec beaucoup de retard.

M. Michel Piron. Je voudrais tout d’abord remercier les rapporteurs, qui nous apportent une nouvelle fois le constat de la pérennisation de certaines pratiques, et non de leur amélioration. Le chantier ouvert par la LME était très vaste, et il reste des chapitres qui demanderont des modifications législatives ultérieures. Je m’associe au souhait de certains de voir la Commission achever son travail sur l’urbanisme commercial. M. Jean Gaubert, qui avait pris la suite de Jean-Paul Charié, avait d’ailleurs fait ce constat dès le précédent rapport.

S’agissant de l’Observatoire de formation des prix et des marges, j’ai pu entendre, lors d’une récente audition effectuée par notre Commission, son analyse de la situation mais je n’ai pu poser la seule question essentielle à mes yeux : cet Observatoire s’est-il seulement donné pour objet d’observer ? Et qu’observe-t-il ? J’ai entendu certains parler d’« opacité », et j’avoue qu’entendre l’Observatoire ne m’a pas aidé à lever le brouillard… Selon vous, remplit-il ses missions ? À la page 42 de votre rapport, vous faites notamment allusion à son rôle dans la définition de la notion de « marge ». Quelle est sa position sur ce sujet ?

J’avais, au même titre que certains, souligné les mots employés dans vos propositions : « obtenir », « réaffirmer », « rappeler ». Il y a un temps pour la conception, un temps pour la rédaction des règles, mais il y a aussi un temps pour leur application. Et, manifestement, ce temps-là n’est pas encore arrivé. Je ne peux que vous inviter à poursuivre vos efforts, en suivant notamment la voie de la dernière proposition, qui réclame une application « pure et dure » de la loi à travers des décisions juridictionnelles.

Enfin, lorsque l’on parle de concurrence, de quelle concurrence parle-t-on ? De celle des points de vente ? Mais ne devrait-on pas au préalable évoquer celle des centrales d’achat, qui sont infiniment moins nombreuses que les points de vente ? Vous signalez vous-même un véritable double langage des distributeurs, qui n’ont pas respecté les « accords Novelli » qu’ils avaient signés.

Je le dis clairement : en premier lieu, la question qui se pose est celle du prix final mais celle de ses composantes en second lieu en est une autre. Quel moyen nous donnons-nous pour voir clair là-dessus ? Ensuite, comment pensez-vous exiger et pouvoir obtenir d’y voir plus clair ? Éventuellement, quelles sanctions envisagez-vous, dans le cadre d’un paysage totalement déséquilibré entre fournisseurs et acheteurs ?

Mme Annick Le Loch. J’avoue ne pas avoir eu le temps de lire le rapport, qui est sans doute de grande qualité. Je voudrais faire part de mes toutes mes inquiétudes sur la question des négociations commerciales. Je n’ai jamais été autant interpellée que cette année, et pourtant je ne suis pas en première ligne, par les industriels à ce sujet : ici, un producteur d’œufs, là de poulets ou encore une fabrique de conserves. J’insiste sur ce dernier exemple, qui concerne une fabrique de conserves de poisson de ma circonscription, qui a demandé un rendez-vous au premier ministre pour évoquer ce problème ; le prix du poisson, qui entre à hauteur de 50 % dans le coût de production des conserves, a fortement augmenté ces derniers mois, de même d’ailleurs que l’acier servant à la confection des boîtes ; les distributeurs n’ont pourtant pas voulu de hausse de prix, d’où la naissance d’une légitime inquiétude sur la diminution des marges et la préservation de l’emploi. L’actuel conflit entre Lactalis et Leclerc, désormais sur la place publique, montre la vivacité des problèmes en matière de négociations commerciales. J’ai aussi également été interpellée à plusieurs reprises sur le transfert de charges opéré en matière de logistique : pourriez-vous nous dire ce qu’il en est aujourd’hui ?

M. Lionel Tardy. Je voudrais rapidement revenir sur la question des accords dérogatoires, déjà abordée par Jean-Pierre Nicolas. Aujourd’hui, une quarantaine d’accords existent qui génèrent, pour les entreprises qui y sont soumises, difficultés, cacophonie et casse-tête. J’avais fait part, à l’époque, de mon opposition à ces accords ; la fin de ces accords est programmée pour le 1er janvier 2012 et la question se pose de leur poursuite. Le rapport note à ce propos que cette difficulté proprement nationale se trouve doublée par plusieurs évolutions attendues au plan communautaire. Il conclut sur la question de savoir s’il ne conviendrait pas d’autoriser la poursuite des accords dérogatoires jusqu’à ce que le Parlement transpose la directive communautaire et sur le regret de n’avoir pu entendre M. Jean-Hervé Lorenzi, qui doit remettre prochainement un rapport au Gouvernement sur ce sujet. Je souhaiterais avoir des précisions sur cette sortie des accords dérogatoires.

M. William Dumas. Je remercie également les rapporteurs pour leur travail. Concernant les délais de paiement, mon expérience me fait dire qu’il n’y aura pas d’évolution, et que les acteurs continueront à se comporter comme ils le font aujourd’hui. Sur les accords dérogatoires, je voudrais évoquer un secteur dans lequel il n’en existe pas mais que je connais bien : celui du vin. Depuis des dizaines d’années, les distributeurs réservent d’énormes quantités sans verser d’acomptes ni signer de contrats, et ils attendent ensuite parfois jusqu’à un an et demi avant de réaliser l’achat. J’aimerais que vous vous penchiez sur la question : le fonctionnement du marché du vin est scandaleux et il conviendrait de le moraliser.

Concernant enfin la DGCCRF, je constate que les effectifs ont été réduits au fil des années alors que sa charge d’activité n’a cessé d’augmenter. Je pense que nous sommes tous d’accord pour juger cette situation dommageable, alors qu’il n’y a que la DGCCRF qui soit capable de faire respecter la loi.

Mme Marie-Lou Marcel. Je commencerai par une question générale : le 11 janvier dernier, nous avions auditionné Mme Lagarde et M. Lefebvre, qui affirmaient que la LME a engendré 0,4 point de croissance et 11 000 emplois : qu’en pensez-vous ?

Vous soulignez en outre dans votre rapport que les pratiques des marges arrière et des stocks déportés ont perduré, mais vous n’avancez aucune proposition concrète pour mettre fin à ces pratiques et vous vous contentez d’un catalogue de bonnes intentions. Je m’inquiète enfin de l’évolution des soldes flottants : M. Novelli s’était également saisi de ce problème et avait chargé l’institut français de la mode et le CREDOC d’une étude et sur ce sujet, sur lequel vous n’avancez malheureusement aucune proposition.

M. Jean-Marie Morisset. Ma question sera brève et portera sur les accords dérogatoires. Les acteurs économiques ont besoin de connaître la manière dont ils vont évoluer : quelle est la position du Gouvernement sur cette question ?

M. le président Serge Poignant. Je voudrais rappeler à nos collègues, notamment à M. François Brottes, que l’objet du rapport est le contrôle de l’application de la LME. Il me paraît à cet égard de très bonne qualité : il n’y a pas d’obligation à préconiser des évolutions législatives.

M. Jean Gaubert, co-rapporteur. Il y a en effet un point dont nos travaux ont montré qu’il faisait consensus parmi les acteurs : la demande de stabilité législative. La LME n’est peut-être pas parfaite mais tout le monde nous a dit qu’il fallait encore lui laisser une chance.

Concernant l’évolution des prix, nous n’avons pas d’assurance qu’il y a eu une baisse ; en revanche, il est clair que nous sommes sur une tendance à la stabilité.

L’un d’entre vous faisait référence aux comparatifs entre les produits. Il faut être méfiant sur ces comparaisons, notamment lorsqu’on compare deux produits différents et non deux produits de la même marque : ainsi, une pâte à tartiner peut être moins chère qu’une autre, mais encore faut-il vérifier qu’elles contiennent toutes les deux le même pourcentage de cacao... Les comparatifs sont de, ce fait, plus souvent des arguments publicitaires que l’expression d’une réalité.

Sur l’Observatoire de formation des prix et des marges, je crois que nous partageons, avec Catherine Vautrin, la déception que plusieurs d’entre vous ont exprimée, suite à l’audition qui a été réalisée.

Concernant l’emploi et la croissance engendrée par la LME, il me semble que le problème est le même que pour le traité de Maastricht : ce traité était vendu au motif qu’il créerait cinq millions d’emplois. Le problème, c’est qu’on ne comptait pas ceux qui seraient détruits. Il est donc aujourd’hui très difficile d’estimer le gain net en termes d’emploi.

Si la LME a engendré un progrès, c’est bien sûr en matière de délais de paiement. Il faut effectivement trouver une solution pour certains secteurs, qui ne pourraient pas s’en sortir avec la fin pure et simple des accords dérogatoires. Le risque est que les distributeurs s’approvisionnent à l’étranger et, j’en discutai récemment avec un distributeur de jouets implanté dans ma circonscription, une réduction de la taille de leur catalogue. Mais, de manière générale, en ce qui concerne les délais de paiement, je voudrais répondre à Mme Marie-Lou Marcel que lorsque la situation apparaît satisfaisante, il faut le reconnaître et qu’il n’y a pas lieu d’avancer des propositions !

Les nouveaux instruments promotionnels (NIP) ont effectivement largement remplacé les marges arrière, cette situation étant à la limite de la légalité. Il faudra sans doute y revenir mais même les fournisseurs nous ont demandé d’en rester au droit actuel pour l’instant.

En matière de délais de paiement, les stocks déportés, par lesquels les distributeurs laissent la responsabilité des stocks aux fournisseurs et ne font courir le délai de paiement qu’à partir du moment où le produit leur est effectivement livré, constituent un autre problème.

Sur le vin, nous sommes prêts à faire un rapport sur le sujet.

Avant de laisser la parole à Catherine Vautrin, je signale enfin que nous avons rencontré le président de l’Autorité de la concurrence, qui est très volontariste sur ces dossiers et qui fera en sorte de mener les enquêtes en tenant compte des liens réels qui existent entre les différents acteurs.

Mme Catherine Vautrin, co-rapporteur. S’agissant des NIP, nous sommes tellement convaincus que c’est une manière de revenir vers les marges arrière que nous considérons qu’il faut exiger une reddition systématique des comptes. En effet, actuellement, les nouveaux instruments promotionnels font l’objet de mandats, qui ne figurent pas dans la convention unique. Et, très souvent, il n’y a aucune reddition des comptes alors que cette traçabilité est indispensable. Cela est d’autant plus vrai que c’est généralement le fournisseur qui fait la promotion, mais que c’est le distributeur qui en fait l’annonce, rendant l’action du fournisseur peu lisible. Nous souhaitons en outre que ce mandat soit annexé à la convention unique pour favoriser le contrôle de la DGCCRF qui pourra alors assurer un suivi de l’ensemble des opérations. C’est exactement la même chose pour les stocks déportés. Nous avons exigé que lorsqu’il y a convention entre un logisticien et un distributeur, la convention logistique soit ajoutée à la convention unique afin, encore une fois, de favoriser cette traçabilité.

En ce qui concerne les soldes flottants, certains regrettent que nous n’envisagions que de procéder à des analyses : c’est tout simplement parce que la dernière étude en la matière (la fameuse étude du CRÉDOC) date de décembre 2010. À la suite de cette étude, le nouveau secrétaire d’État chargé du commerce a décidé de prolonger, pour une année supplémentaire, le dispositif. Il nous semble donc que nous avons aujourd’hui besoin d’une analyse sociologique et économique chiffrée des résultats de cette année supplémentaire pour pouvoir ensuite prendre une décision véritablement éclairée sur le sujet. Il y a un autre point qui n’a pas été suffisamment mis en avant : c’est Internet, qui, actuellement, n’est absolument pas concerné par le dispositif.

S’agissant des délais de paiement, Jean Gaubert a globalement répondu. Je souhaiterais simplement revenir sur une remarque de Lionel Tardy. La directive européenne vient d’être publiée, sa transposition devant être effectuée d’ici le 16 mars 2013. La question que nous posons au Gouvernement (et à laquelle nous n’avons pas encore obtenu de réponse, sachant que M. Lorenzi n’a pas pu être présent à l’audition à laquelle nous l’avons convié) est de savoir s’il faut contraindre les entreprises qui sont encore sous leur régime des accords dérogatoires à faire l’effort nécessaire pour les achever, alors qu’elles connaissent des difficultés pour ce faire et que l’application de la directive en 2013 pourrait revenir sur les durées fixées. C’est pourquoi nous demandons à ce que le Gouvernement prenne position sur le sujet avant le 1er janvier 2012.

Mme Annick Le Loch a fait allusion aux difficultés de négociation : certes, il y a eu cette année des difficultés, ainsi que nous l’ont dit les professionnels. Ainsi, Lactalis a fait volontairement le choix de ne plus livrer parce que l’entreprise n’obtenait pas les conditions qu’elle souhaitait, notamment en termes de tarification. Nous avons entendu des acteurs exprimer leurs difficultés mais ces mêmes acteurs (distributeurs et fournisseurs) nous ont tous dit qu’à ce stade, ils ne souhaitaient pas que la loi soit modifiée. On pourrait très bien rédiger un rapport préconisant de légiférer mais nous préférons essayer de refléter au maximum ce que nous avons entendu en audition ! Vous pouvez nous reprocher la tiédeur de certaines propositions, toujours est-il qu’elles reflètent ce que nous avons entendu. De surcroît, ce rapport émane de deux rapporteurs, l’un de l’opposition, l’autre de la majorité, ce qui vous permet de considérer qu’il s’agit d’une analyse globale du sujet : on ne va pas légiférer contre l’avis des premiers intéressés !

En ce qui concerne le « déséquilibre significatif », il suffit de se référer à la décision du Conseil constitutionnel qui invite elle-même à regarder la jurisprudence qui va naître des différents jugements qui seront rendus. Nous avons pris la peine de demander au Gouvernement de nous transmettre le calendrier de ces différents jugements : certains auront lieu dans les prochaines semaines et nous allons d’ailleurs les joindre en annexe au rapport.

S’agissant des soldes en zone touristique, il me semble qu’il vaut mieux faire une photographie globale du sujet qui méritera d’être regardée à la fin du bilan sur les soldes flottants. M. Frédéric Lefebvre a donné une nouvelle autorisation pour un an, ce qui signifie que fin 2011, il faudra de toute façon revoir globalement la question.

En ce qui concerne l’Autorité de la Concurrence, non seulement elle s’est autosaisie mais elle a rendu des avis, s’agissant notamment de la Fédération du commerce associé. Cette fédération « reproche » d’ailleurs à cette autorité de vouloir régler des problèmes régionaux en adoptant une approche nationale, en expliquant que les commerçants associés peuvent effectivement changer d’enseigne et que le droit de préemption ne s’exerce que quand il y a vente. C’est dire si le sujet fait débat et si l’Autorité de la Concurrence s’en est saisie mais ce n’est qu’un avis de sa part. De la même manière, il est intéressant de noter, comme l’illustre le tableau figurant dans notre rapport, que la DGCCRF a considérablement développé ses enquêtes, qu’il s’agisse de fiches de signalement, de visites, d’assignations ou d’interventions. C’est de cette façon que la loi va effectivement évoluer. Immédiatement après la signature de la convention unique au 1er mars, la DGCCRF diligente deux types de contrôle : l’un chez les fournisseurs (pour les 3 mois après le 1er mars), l’autre chez les distributeurs, le but de ces contrôles consistant à examiner les conventions uniques qui ont été signées.

Cela nous conduit à considérer que cette loi est loin d’avoir atteint tous les objectifs que l’on pouvait en attendre. Il est clair, au terme de nos auditions, qu’en matière de négociations, il subsiste des difficultés. Vous pouvez nous reprocher de dire qu’il faut réaffirmer la primauté des conditions générales de vente mais je vous rappelle que l’article L. 441-6 du code de commerce précise dès à présent que les conditions générales de vente forment le socle de la négociation : il est donc inutile de l’écrire à nouveau dans la loi. La loi prévoit, par ailleurs, que la convention unique est conclue pour une durée de 12 mois : quand cela se passe sur 12 mois glissants, cela signifie qu’il ne doit pas y avoir de rétroactivité entre le 1er janvier et le 28 février. Il y a en effet un problème sur cette période, pendant laquelle nombre d’acteurs voudraient jouer sur une certaine rétroactivité.

Aujourd’hui, notre difficulté est donc que certaines dispositions de la loi sont mal appliquées. Or, il existe des moyens d’y remédier, que nous avons besoin de mettre en oeuvre : les contrôles, les jugements, et l’application des peines prononcées.

M. Jean Dionis du Séjour. J’aimerais obtenir un avis de synthèse de la part de Catherine Vautrin et de Jean Gaubert. Pour moi, la LME regroupe les thèmes suivants : l’urbanisme commercial, la négociabilité et les marges arrière, et les délais de paiement. Sur le thème de l’urbanisme commercial, nous nous sommes globalement enlisés et avons renvoyé la question à la proposition de loi Ollier-Piron. Les marges arrière et la négociabilité sont des points capitaux. J’en étais resté au diagnostic intermédiaire qui faisait état d’un succès, avec un recul de 30 à 10 % des marges arrière ; or, vous indiquez que ce recul est largement remis en cause par les NIP. En outre, la seule avancée de la LME semble résider dans les délais de paiement : est-ce la seule avancée claire, selon vous ?

M. François Brottes. Certes, personne ne vous a demandé d’évolution législative (j’ignore d’ailleurs si vous avez auditionné les consommateurs et ce qu’ils en pensent). Cependant, quelle est votre propre conviction ?

M. Michel Piron. Si l’enjeu est de mieux faire appliquer la loi, il s’agirait de mieux observer (or, on ne le fait pas) et de mieux contrôler.

Mme Catherine Vautrin. Je suis intimement convaincue qu’il faut que la loi soit appliquée. Or, ainsi que nous le mettons en exergue dans le rapport, sur un certain nombre de points, l’application de la loi est imparfaite, ce qui appelle des sanctions. En outre, un certain nombre de pratiques ont vu le jour après la mise en œuvre de la loi, qui méritent d’être corrigées et sur lesquelles il faut être vigilant : c’est typiquement le cas des NIP. Or, même s’il faut être vigilant, on ne peut pas dire que les NIP aient totalement remis en cause le recul des marges arrière. Chaque loi engendre automatiquement une créativité nouvelle. Nous devons donc observer les choses de manière suffisamment précise, ainsi que le préconise Michel Piron, afin de tuer l’idée dans l’œuf. Quand une pratique commence à exister, il faut immédiatement la sanctionner de façon à éviter qu’elle n’aille plus loin. Notre objectif consiste à ce que les gains obtenus par rapport aux marges arrière bénéficient aux consommateurs : il ne faudrait donc pas que les NIP ne servent pas les consommateurs.

En ce qui concerne les délais de paiement, il y a effectivement des avancées. Sur la négociabilité par ailleurs, tout n’est pas négatif car certaines données se discutent. Le problème réside dans l’application de la notion de « déséquilibre significatif » et du rapport du fort au faible, qui peut varier selon les interlocuteurs.

S’agissant enfin de l’urbanisme commercial, un certain nombre d’entre nous ont signé une proposition de loi il y a près d’un an, car le Gouvernement n’avait pas tenu ses engagements : on a donc déjà depuis longtemps tiré les leçons de la LME en la matière !

M. Jean Gaubert. S’agissant des délais de paiement, les résultats sont effectivement plutôt positifs même si la question des accords dérogatoires pose objectivement problème. Les solutions peuvent résider dans la saisonnalité, les stocks à rotation lente …

La négociabilité apparaît toujours comme le point le plus difficile. Je me souviens avoir dit que je ne doutais pas de la capacité des acteurs à inventer de nouvelles stratégies ; il faut reconnaître que, parfois, ce sont les fournisseurs qui, pour se différencier, font des propositions qui se retournent ensuite contre eux. Une fois que l’on offre quelque chose, cela est ensuite exigé de tout le monde. C’est comme cela que les « NIP » ont commencé. Ce ne sont pas toujours les distributeurs qui les ont demandées. Le problème est donc extrêmement complexe même si je suis moins optimiste que Catherine Vautrin.

Enfin, on devra peut-être un jour légiférer à nouveau mais on ne peut le faire pour interdire une pratique qui n’a pas encore commencé à exister ! D’où l’intérêt de voir une jurisprudence s’établir, ce qui prendra du temps.

Je conclurai en disant que l’une des grandes avancées de cette loi, dispositions votées par tous, réside dans le raccourcissement des délais de paiement mais il faut également compter la création de l’Autorité de la Concurrence, grâce notamment à l’impulsion Président Lasserre.

M. le président Serge Poignant. Il nous reste à remercier les rapporteurs pour leur rapport d’information. Je vous demande maintenant d’autoriser la publication de ce rapport.

La commission autorise la publication du rapport.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 6 avril 2011 à 16 h 15

Présents. - M. François Brottes, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Annick Le Loch, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, Mme Anny Poursinoff, M. Jean Proriol, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Vautrin

Excusés. - M. Jean-Michel Couve, M. Jean Grellier, M. Louis Guédon, Mme Conchita Lacuey, M. Pierre Lasbordes, M. Jacques Le Guen, M. Michel Lejeune, M. François Loos, M. Philippe Armand Martin, M. Michel Raison, M. Bernard Reynès, M. Francis Saint-Léger