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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mission d’évaluation et de contrôle

Les externalisations dans le domaine de la défense

Mardi 10 mai 2011

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 21

Présidence de M. David Habib, Président, puis de M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur

– Audition, ouverte à la presse, de M. Bruno Vieillefosse, délégué pour le regroupement des états-majors et de services de la défense, responsable du projet « Balard », sur les externalisations dans le domaine de la défense

M. David Habib, Président. Monsieur Vieillefosse, nos deux rapporteurs, M. Louis Giscard d’Estaing M. Bernard Cazeneuve, représentent respectivement la commission des Finances et la commission de la Défense. Ils sont en outre chacun d’une sensibilité politique différente. Quant à M. Yves Deniaud, qui vous interrogera également, il est Rapporteur spécial pour la politique immobilière de l’État et connaît bien le sujet qui nous occupe aujourd’hui.

Nous serons accompagnés par les magistrats de la Cour des comptes, Mme Françoise Saliou, conseiller maître, et M. Olivier Brochet, rapporteur.

La date de l’audition a été choisie de façon à ce que vous puissiez répondre à l’ensemble de nos questions et enrichir la réflexion de nos deux rapporteurs.

M. Bruno Vieillefosse, délégué pour le regroupement des états-majors et de services centraux de la défense, responsable du projet « Balard ». Le projet « Balard » arrive à un tournant décisif puisque nous allons signer le contrat dans les tous prochains jours, sous réserve d’avoir réglé, d’ici là, des problèmes d’ordre matériel : le contrat comptant autour de 20 000 pages, le finaliser, le relire et le vérifier prend du temps. La mise au point contractuelle qui a été engagée une fois choisi l’attributaire pressenti se termine dans de bonnes conditions.

Le projet – est-il besoin de vous le rappeler ? – consiste à regrouper sur un site unique, à Balard, les trois états-majors d’armée, l’état-major des armées, la direction générale pour l’Armement, les services du secrétariat général pour l’Administration, et tous les services centraux du ministère tels que le contrôle général des armées, la délégation à l’Information et à la communication de la défense (DICoD), ainsi que les inspections générales de chaque armée. La superficie de l’ensemble, propriété de l’État, est de 16,5 hectares qui se répartiront entre la Cité de l’air rénovée – 8,5 hectares –, et la parcelle Ouest – 8 hectares – qui sera divisée en deux : trois hectares, à l’extrémité ouest, feront l’objet d’une opération de valorisation immobilière – construction de bureaux à usage locatif qui procureront un revenu venant en déduction de l’assiette de l’investissement –, et les cinq hectares restants seront occupés par un bâtiment neuf accueillant les hautes autorités du ministère et les centres opérationnels des armées. Au total, le ministère emploiera sur place 9 300 personnels civils et militaires.

La phase de travaux proprement dits commencera au début de l’année 2012, pour s’achever à titre principal en juin 2014. Il restera alors une phase de travaux secondaires à la Cité de l’air, qui se termineront en février 2016, quand les derniers effectifs de la DGA rejoindront le site.

L’opération a été lancée en décembre 2007, sur proposition du ministre de la Défense, par le Président de la République, chef des armées. Elle a été menée à un rythme accéléré pour respecter les engagements et réduire les coûts.

L’année 2008 a été, pour l’essentiel, consacrée aux études de faisabilité et à l’évaluation préalable prévue par l’ordonnance de 2004 pour les partenariats public-privé. Au premier semestre 2009, le programme fonctionnel a été élaboré et la procédure lancée en juin. Un premier cahier des charges a été remis en septembre 2009. Les premières pré-esquisses architecturales ont été reçues dans le cadre d’une compétition architecturale – procédure innovante préférée au traditionnel concours international d’architecture – en novembre 2009. Les propositions initiales ont suivi en février 2010, précédant le cycle d’auditions des trois candidats menées en mars et avril 2010. Nous avons alors remis un second cahier des charges en mai 2010 qui a donné lieu à des propositions dites intermédiaires de la part des candidats, remises le 1er juillet suivant. Celles-ci ont déclenché un nouveau cycle d’auditions entre juillet et octobre. Nous avons rendu le dossier final de consultation des entreprises le 12 novembre 2010, à charge pour les soumissionnaires de déposer leurs offres avant le 11 janvier 2011. Le 17 février dernier, nous avons annoncé le choix de l’attributaire pressenti. Les ajustements techniques, financiers et juridiques ont été effectués en temps et en heure puisque nous allons signer le contrat dans les tous prochains jours, respectant ainsi le calendrier prévu. Un décalage de deux semaines est négligeable dans un projet d’une telle ampleur.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Pourriez-vous nous rappeler le montant de l’investissement réalisé par l’attributaire retenu et celui des loyers que devra acquitter le ministère de la Défense, ainsi que la durée du bail ?

M. Bruno Vieillefosse. Tant que le contrat n’est pas signé, je ne peux pas être très précis, mais je pourrai ultérieurement compléter ma réponse.

L’investissement immobilier, hors taxes et honoraires, s’élèvera à 600 millions d’euros environ, et le loyer annuel à moins de 130 millions hors taxes. Ce dernier sera réglé dès que nous aurons pris réception des immeubles, en principe le 1er septembre 2014, jusqu’à la fin du contrat, c'est-à-dire en mai 2041, le contrat ayant une durée de 30 ans. Il s’agit d’un montant moyen, la redevance devant être plus élevée dans la première phase puisqu’elle inclura l’acquisition des postes informatiques individuels qui seront amortis sur cinq ans.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Le loyer inclut-il le prix des services que le prestataire s’est engagé à fournir pour assurer le fonctionnement du « Balardgone » ?

M. Bruno Vieillefosse. Oui. Nous achetons en réalité non pas un immeuble, mais un ministère qui fonctionne. Le loyer proprement dit ainsi que les frais financiers représenteront environ 35 % de la redevance globale ; mais la prestation comprend également l’entretien et la maintenance des bâtiments pendant vingt-sept ans et les services tels que la restauration, le nettoyage, le gardiennage extérieur…

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Et combien aurait coûté le fonctionnement du ministère dans ses bâtiments actuels rénovés ?

M. Bruno Vieillefosse. En l’absence de projet « Balard », il aurait fallu rénover l’immobilier, et la plupart des réseaux informatiques. Le tout aurait coûté au bas mot 600 millions d’euros. C’est à partir du coût actuel de fonctionnement du ministère qu’a été calculée la redevance annuelle de sorte que tout abondement des crédits budgétaires soit inutile. Les crédits actuels de l’administration centrale convenablement redéployés couvriront le prix de la redevance toutes taxes comprises.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Comment traitez-vous l’investissement initial de 600 millions ?

M. Bruno Vieillefosse. Pour nous, il ne s’agit pas d’un coût direct. Le projet coûtera au budget de la Défense le montant annuel de la redevance multiplié par le nombre d’années prévu au contrat. Les ressources budgétaires ont été analysées et ventilées de manière extrêmement précise, avec l’aide du contrôle général des armées, qui a procédé à une évaluation en juillet 2010, laquelle a ensuite été soumise à la direction du Budget, puis ajustée. C’est en fonction de ces dépenses qu’ont été déterminées les ressources budgétaires.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Je voudrais seulement m’assurer que les informations mises à la disposition de la commission de la Défense sont concordantes. L’attributaire, si j’ai bien compris, devra débourser 600 millions d’euros et percevra en contrepartie 27 fois 130 millions d’euros, soit environ 3,5 milliards. Autrement dit, il s’agit de la somme qu’auraient représenté la rénovation des bâtiments actuels et le fonctionnement du ministère de la défense sur la période…

M. Bruno Vieillefosse. Exactement, cette somme cumulée de 3,5 milliards d’euros sur 27 ans équivaut au fonctionnement actuel du ministère.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Selon que l’on adopte le point de vue du ministère de la Défense ou celui de l’État – ils sont différents dans la mesure où le second encaisse les loyers budgétaires payés par le premier –, quel est le bilan de l’opération ?

M. Bruno Vieillefosse. Il y a équivalence entre la redevance acquittée pendant vingt-sept ans et les ressources budgétaires. Par ailleurs, nous n’engagerons pas les dépenses de rénovation des bâtiments actuels – au moins 600 millions d’euros qu’il aurait été difficile de trouver – et, en cédant les emprises actuelles, nous devrions dégager, d’après les estimations des quatre principales emprises par France Domaine, un peu moins de 600 millions d’euros. L’économie générale du projet repose sur les crédits budgétaires actuels qui gagent le financement de la redevance, plus une non-dépense de 600 millions d’euros et une recette exceptionnelle liée à la vente des quatre principales emprises d’ici à 2014.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. L’équation est positive pour le ministère à raison de deux paramètres : les 600 millions économisés et les recettes exceptionnelles. Les 3,5 milliards qu’aurait coûté le maintien dans les lieux incluent-ils les dépenses de 600 millions ?

M. Bruno Vieillefosse. Non.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Cela porte alors la facture à 4,1 milliards.

M. Bruno Vieillefosse. Non. Si le ministère était resté dans ses locaux de l’îlot Saint-Germain, il aurait continué à dépenser 130 millions hors taxes par an au titre de son fonctionnement, auxquels se seraient ajoutés assez rapidement 600 millions, pour rénover les immeubles et les systèmes informatiques.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Quel est le montant des recettes attendues de la cession des emprises du ministère de la Défense ?

M. Bruno Vieillefosse. Un peu moins de 600 millions pour les quatre emprises principales, l’Hôtel de la Marine exclu.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. L’équilibre global du projet ne risque-t-il pas d’être compromis si les recettes exceptionnelles continuent d’être très en deçà des montants inscrits au budget du ministère ?

M. Bruno Vieillefosse. Non. Les emprises parisiennes ne seront pas vendues tant que nous n’aurons pas signé le contrat « Balard ». Il est certain qu’elles ne pourront pas être vendues du jour au lendemain, mais je n’ai aucun doute qu’elles aiguiseront les appétits et qu’elles seront cédées le moment venu à un bon prix. En toute hypothèse, le produit des cessions d’emprise n’est pas affecté au projet Balard.

M. Yves Deniaud. Considérez-vous avoir atteint l’ambition que vous nourrissiez quand nous nous sommes rencontrés, à savoir monter une opération « blanche », c'est-à-dire installer le ministère de la Défense à Balard pour un coût équivalant à son fonctionnement dans le périmètre actuel – soit 129 millions d’euros par an – en neutralisant le coût de la construction neuve grâce à un PPP ?

M. Bruno Vieillefosse. Tout à fait, si l’on raisonne toutes taxes. En d’autres termes, les crédits de fonctionnement actuels financeront le fonctionnement futur et l’investissement.

M. Yves Deniaud. Couvriront-ils aussi l’informatique ?

M. Bruno Vieillefosse. L’informatique est incluse en partie dans le contrat de partenariat, tout comme la sécurité.

Nous avons arbitré entre les fonctions sensibles et les autres. Certaines compétences resteront du ressort de l’État : la direction informatique du ministère, la DIRISI, continuera d’assurer la supervision de l’ensemble des réseaux et les interconnexions avec les autres réseaux ministériels. Mais certaines prestations, telles que l’assistance bureautique, seront confiées au secteur privé.

M. Yves Deniaud. Est-ce déjà le cas ?

M. Bruno Vieillefosse. Non. Aujourd'hui, il s’agit quasi exclusivement de régies.

M. Yves Deniaud. On gagne donc des locaux neufs à 600 millions d’euros qui, jusqu’en 2041, continueront d’être entretenus comme il convient, contrairement aux locaux actuels, qui ne sont pas dans un état optimal.

M. Bruno Vieillefosse. Les bâtiments, non plus que les réseaux informatiques, ne sont pas dans un état optimal, c’est le moins que l’on puisse dire. Ce n’est pas le moindre intérêt de ce contrat de partenariat que de garantir dans la durée l’entretien des immeubles ; il ne sera plus à la merci de la première restriction budgétaire venue. Les clauses du contrat sont explicites à cet égard.

M. Yves Deniaud. Qui encaissera les loyers de la partie ouest ?

M. Bruno Vieillefosse. Sur les trois hectares concernés, seront construits aux frais et charges de l’attributaire privé quatre immeubles de bureaux, soit 90 000 mètres carrés de surfaces à louer. Il encaissera les loyers correspondants pendant une durée de soixante ans, et assurera l’entretien des bâtiments. Nous nous sommes assurés que nous les récupérerions le moment venu dans un bon état général.

Pour mener à bien ce projet, le foncier sera mis à disposition de l’investisseur pour soixante ans, moyennant un versement initial, dit upfront, dès 2014, légèrement supérieur à la valorisation du terrain nu effectuée par France Domaine en 2007, juste avant la crise financière et immobilière, soit 195 millions d’euros. Nous tirerons plus de valeur sur soixante ans que nous prévoyions d’en tirer d’une cession pure et simple quatre ans auparavant.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Lors d’une précédente audition, vous aviez indiqué que le loyer de Balard serait de l’ordre d’une centaine de millions d’euros par an, et il est passé à 130 millions. D’où vient l’augmentation ? De même, vous prévoyiez de transférer 10 000 agents. Ils ne sont plus que 9 300. Où est passée la différence ?

M. Bruno Vieillefosse. J’ai annoncé de longue date que le coût de la redevance annuelle dépasserait 100 millions d’euros sans plus de précision à cause de la procédure concurrentielle. Depuis la remise des offres finales, j’ai donné une fourchette – entre 100 et 150 millions d’euros taxes comprises. Le chiffre exact sera bientôt connu, et je peux d’ores et déjà vous informer que le montant définitif sera très peu différent du montant de l’évaluation préalable qui avait été faite fin 2008, même si certains paramètres ont bougé. Il n’y aura pas d’augmentation du coût, et je m’en réjouis.

S’agissant des effectifs, le ministre de la Défense a demandé en septembre 2010 une dernière réévaluation des besoins en ressources humaines en cherchant toutes les sources d’économie possibles et en passant en revue toutes les entités du ministère, jusqu’au cabinet lui-même. Notre objectif initial était une réduction de 5 % des effectifs, et nous sommes parvenus à 6 % sans porter atteinte aux capacités. C’était une des conditions de réussite de l’opération.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Avez-vous des éléments de comparaison avec d’autres pays de l’Union européenne qui se sont livrés à des regroupements identiques ?

M. Bruno Vieillefosse. Les comparaisons ne sont pas faciles car l’organisation n’est pas la même. Pour autant que l’on puisse en juger, les effectifs sont à peu près comparables en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Italie.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Je reviens sur les recettes exceptionnelles : que se passerait-il si la vente des emprises devait être différée ou, inversement, s’il fallait retarder le déménagement une fois qu’elles auraient été cédées ?

M. Bruno Vieillefosse. Il n’y aura pas d’aléa, pour la bonne raison qu’il n’existe aucun lien budgétaire entre la vente des emprises parisiennes et la réalisation de Balard, qui sera financée par redéploiement de crédits existants. Les recettes exceptionnelles viendront abonder d’autres programmes d’équipement du ministère qui, eux, en subiraient les conséquences éventuelles.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Quelles seront les fonctions assurées jusque-là en régie ou en propre qui seront externalisées ? Et pourriez-vous nous donner des éléments de coûts comparatifs ?

M. Bruno Vieillefosse. Quatre principales catégories de prestations seront confiées à l’attributaire : la restauration, l’entretien des bâtiments, la maintenance et l’informatique. Les prestations de restauration et gardiennage sont d’ores et déjà partiellement externalisées.

Nous avons examiné les tâches une à une, méthodiquement et précautionneusement, en distinguant ce qui pouvait être confié sans risque à un prestataire privé et ce qui relevait du cœur des missions régaliennes. L’accueil et le filtrage des visiteurs reviendront à des sociétés privées. En revanche, la sécurité des zones sensibles sera assurée par des gendarmes. Ils surveilleront notamment le poste central de protection – le poste de sécurité militaire – tandis que le poste de sécurité technique sera aux mains du prestataire. Je suis hostile à toute approche idéologique, mais faire garder le centre opérationnel des armées par des personnels civils de sociétés privées n’aurait pas été raisonnable, surtout après les quelques expériences faites à l’îlot Saint-Germain. Les zones de sécurité seront sécurisées par des personnels militaires, dont c’est le métier et la vocation. De même, la sécurité incendie sera dévolue à une compagnie permanente de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris.

La comparaison des coûts est relativement facile. Avant le démarrage de la démolition de la parcelle Ouest, le service de restauration de Balard, en régie, servait 4 500 repas et employait 310 personnes. À l’îlot Saint-Germain, les 57 personnes d’une société privée servent 2 300 repas par jour. Une simple règle de trois démontre l’intérêt de l’externalisation. Balard passe, sans doute à raison, pour la meilleure cantine de Paris, mais la qualité de la prestation proposée à l’îlot Saint-Germain est tout à fait convenable. La différence de prix de revient s’explique par l’expérience, l’organisation et l’efficacité de la société privée.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Et pour l’informatique ?

M. Bruno Vieillefosse. Les études ont été encore plus compliquées et plus longues dans la mesure où il a fallu à la fois garder la maîtrise du dispositif tout en établissant des responsabilités clairement identifiées entre l’État et ses prestataires. Il a fallu aller très loin dans les détails techniques et le dialogue compétitif à ce sujet a pris beaucoup de temps.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Qui est le prestataire informatique ?

M. Bruno Vieillefosse. Thales, qui fait partie du groupement de candidatures. Vous trouvez autour de Bouygues, en charge de la construction, Thales pour l’informatique, Sodexo pour la quasi-totalité des services, et Dalkia pour la fourniture d’énergie, sans compter les investisseurs, dont la Caisse des dépôts. La participation de cette dernière au capital de la société qui porte le projet a été imposée.

M. Yves Deniaud. Le choix de l’attributaire est-il susceptible de recours de la part de candidats malheureux ?

M. Bruno Vieillefosse. Je me garderai de tout pronostic, mais les contacts que j’ai eus avec eux n’augurent pas d’une telle décision.

M. Yves Deniaud. Vous annoncez la rénovation des emprises actuelles pour 600 millions environ ; mes chiffres faisaient état de 700 millions.

M. Bruno Vieillefosse. Nous avons raisonné a minima en appliquant un ratio moyen par mètre carré, et nous avons même minoré les chiffres, par précaution. D’où un écart possible.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Si les deux opérations sont indépendantes, pourquoi se livrer à de tels calculs ?

M. Bruno Vieillefosse. L’opération Balard répond avant tout aux objectifs opérationnels du ministère, mais elle s’inscrit aussi dans un cadre budgétaire déterminé – ne pas engager de dépense supplémentaire – qu’il fallait s’assurer de respecter.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Ces 600 millions sont donc nécessaires à l’équilibre financier du projet ?

M. Bruno Vieillefosse. Non. Ils correspondent au surplus estimé de l’opération. Même si cela devait prendre du temps à cause de l’ampleur des investissements nécessaires, j’aurais peine à croire que trois hectares situés en plein Paris ne trouvent pas preneur et restent longtemps en friche.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Les 600 millions que devra débourser le groupement d’entreprises sélectionné correspondent-ils à votre estimation initiale ou y a-t-il eu des ajustements en cours de procédure ?

M. Bruno Vieillefosse. Nous restons dans l’épure : le budget construction sera un peu inférieur, et le budget informatique légèrement supérieur.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Lors de la discussion budgétaire, le ministre avait évoqué une augmentation de 300 millions d’euros de l’enveloppe initiale car le terrain est inondable…

M. Bruno Vieillefosse. C’est ce que la presse a dit, à tort, car, si le site est inondable en cas de crue centennale, il suffit d’installer au premier étage les équipements techniques menacés, de sorte que, dès la décrue, le site du ministère soit immédiatement opérationnel, ce qui n’est pas le cas actuellement. Mais il n’y aura pas de surcoût. Le différentiel de 300 millions correspond à la TVA et aux honoraires.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Comment avez-vous résolu la question de la TVA ? Quel sera le sort budgétaire réservé au versement upfront encaissé en 2014 ? Tous vos chiffres sont-ils exprimés en euros constants ?

M. Bruno Vieillefosse. Il existe un dispositif interministériel qui permet à une administration bénéficiaire de prestations externalisées de se voir reverser le produit de la TVA qu’elle acquitte à ce titre, soit une dizaine de millions d’euros par an.

Le versement upfront ne sera pas considéré comme une recette exceptionnelle dans la mesure où il viendra en déduction de l’assiette du projet. Ce montage présente l’avantage de réduire les frais financiers, ce qui nous permet de rester dans la limite de l’enveloppe initiale. Nous tirerons de l’opération de la corne Ouest un bénéfice sensiblement supérieur à ce que nous en attendions.

Enfin, je raisonne en euros constants décembre 2010.

M. Yves Deniaud. Les 600 millions d’euros de produits de cession et le versement upfront de l’investisseur seront-ils affectés à la loi de programmation militaire ?

M. Bruno Vieillefosse. Il en sera ainsi de la cession des emprises, mais, pour ce qui est de la partie ouest de Balard, la recette brute viendra en déduction de l’investissement, ce qui aura pour conséquence de minorer les frais financiers et la redevance annuelle.

M. Yves Deniaud. Le chiffre de 130 millions d’euros par an intègre donc l’encaissement de 200 millions de trésorerie.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Quelle est la part des loyers budgétaires payés pour les emprises actuelles ?

M. Bruno Vieillefosse. Le chiffre de 130 millions d’euros tient compte du bénéfice du versement de la corne Ouest. Les loyers budgétaires se montent aujourd'hui à 82 millions d’euros. Nous payons en outre un loyer d’un peu plus de 15 millions pour le site de la DGA à Bagneux, qui restera occupé jusqu’en 2016.

Une fois installé à Balard, le ministère paiera un loyer au prestataire qui se cumulera avec les loyers budgétaires des emprises parisiennes, lesquelles, conformément à la règle en vigueur, continueront d’être payés pendant deux ans suivant leur libération. Nous devrions conserver une assiette de loyers budgétaires pour Balard de l’ordre de 35 millions d’euros.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Le projet représente une économie pour le ministère de la Défense. Mais qu’en est-il pour l’État ?

M. Bruno Vieillefosse. Au terme du contrat de partenariat, l’État récupérera des immeubles qui auront été bien entretenus notamment grâce aux loyers budgétaires, et, à l’issue de l’opération de valorisation de la corne Ouest, 90 000 mètres carrés de bureaux sans verser un euro. Au total, acquérir un parc de 420 000 mètres carrés bien entretenus au moyen de loyers budgétaires répond à une certaine logique immobilière et budgétaire.

M. Bernard Cazeneuve, Rapporteur. Les problèmes budgétaires se posent tout de suite à l’État.

M. Bruno Vieillefosse. C’est un investissement. Et, même sans Balard, il aurait fallu continuer à payer les 82 millions de loyers budgétaires, tout en acquittant les dépenses de fonctionnement actuelles.

M. Yves Deniaud. Ce sont 47 millions de loyers budgétaires en moins.

M. Bruno Vieillefosse. Mais ils ne sont pas synonymes d’économie pour l’État.

(M. Louis Giscard d’Estaing remplace M. David Habib à la présidence de la séance.)

M. Yves Deniaud. Quel sort subiront l’Hôtel de la Marine et l’hôtel de Brienne ?

M. Bruno Vieillefosse. L’hôtel de Brienne, compte tenu de son importance historique et patrimoniale, sera conservé. L’utilisation de l’Hôtel de la Marine reste en débat.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Où en est la cession des locaux de l’ancien secrétariat d’État aux anciens combattants ?

M. Bruno Vieillefosse. Je suis dans l’impossibilité de vous répondre car je m’occupe exclusivement de Balard, mais ces locaux seront intégrés dans les cessions à venir.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur. Nous vous remercions.