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Commission des affaires sociales

Commission des affaires sociales

Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Mercredi 1er juin 2011

Séance de 11 heures 30

Compte rendu n° 14

Présidence de M. Jean Mallot et M. Pierre Morange, coprésidents

–  Audition, ouverte à la presse et au public, sur la lutte contre la fraude sociale, de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

MISSION D’ÉVALUATION ET DE CONTRÔLE
DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Mercredi 1er juin 2011

La séance est ouverte à 11h45

(Présidence de M. Jean Mallot et M. Pierre Morange, coprésidents de la mission)

La Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) procède à l’audition de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Il est important pour moi de venir m’expliquer devant la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) dans la mesure où la lutte contre la fraude sociale me tient à cœur depuis longtemps. Depuis que je suis entré au Gouvernement – en tant que secrétaire d’État à l’assurance maladie –, je n’ai jamais cessé, dans les différentes fonctions ministérielles que j’ai assumées, de me préoccuper de ce sujet, qui n’est pas mineur, même s’il a longtemps été minoré et parfois ignoré. Au nom de la valeur travail, à laquelle je crois profondément, la lutte contre la fraude est un impératif.

D’ailleurs, ce problème alimente un sentiment d’injustice chez nos concitoyens, parce que la fraude à la protection sociale constitue un vol de la protection sociale. Hier encore, j’avais l’occasion de discuter avec un certain nombre d’observateurs qui se demandaient si elle ne pouvait pas s’expliquer, voire s’excuser : pour moi, la réponse est clairement non ! Les fraudeurs sont des voleurs et la fraude n’est pas un système « D » ou une façon de se débrouiller ! Au-delà du sentiment d’injustice, la fraude a un impact financier. La faire reculer est donc avant tout une exigence de justice sociale, mais aussi un impératif de bonne gestion.

Le fait que votre mission rédige un rapport sur le sujet montre bien une prise de conscience collective et un changement complet d’approche à cet égard, même si certains d’entre vous – je pense notamment à M. Pierre Morange et à M. Dominique Tian – n’ont pas attendu cela pour se mobiliser. Cet engagement global a du sens et nous donne davantage de chances d’être efficaces.

Si l’on ne veut pas ajouter une injustice au sentiment d’injustice, il faut que la lutte contre la fraude concerne chacun, quel que soit son statut, sa situation ou sa position sociale. Elle doit s’en prendre au chef d’entreprise qui use et abuse du travail clandestin avant l’assuré social. De même, en matière d’arrêts de travail abusifs, il convient de contrôler le médecin qui « surprescrit » – seule façon légitime de mettre en cause l’assuré social qui en bénéficie. Conçue de cette manière, la lutte contre la fraude ne devrait pas encourir de reproche.

Au-delà de nos travaux, chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale permet de revenir régulièrement et de façon légitime sur le sujet.

L’action contre la fraude s’est d’ailleurs accrue depuis 2004, notamment au temps où M. Éric Woerth occupait des fonctions ministérielles. Je tiens à lui rendre hommage : il s’est toujours mobilisé sur le sujet, qu’il s’agisse de la fraude fiscale ou d’autres types de fraudes – je me souviens notamment des premiers comités nationaux de lutte contre la fraude que nous avons présidés ensemble et de la détermination farouche dont il a toujours fait preuve dans ce domaine.

Depuis 2007, nous sommes passés à la vitesse supérieure, avec la mise en place de nouveaux outils. Les acteurs de contrôle ont besoin de se les approprier : il est donc utile que nous les examinions ensemble au cours de cette audition.

Le regroupement, au sein de mon ministère, des secteurs du travail, de l’emploi et de la santé constitue un gage de cohérence et d’efficacité. Pour lutter contre la fraude sociale, un décloisonnement et une vision d’ensemble sont en effet indispensables. Les fraudeurs ont d’ailleurs généralement une approche décloisonnée de ce à quoi ils peuvent avoir droit en fraudant ; or, l’action des pouvoirs publics a souvent été trop morcelée et cloisonnée.

Un grand nombre de fraudes sont au croisement des problématiques de l’emploi et de la santé – je pense notamment aux arrêts de travail, qui concernent à la fois l’assurance maladie et le travail. Quant à la lutte contre le travail clandestin, elle exige l’action conjointe de l’assurance maladie et des employeurs ; elle concerne aussi l’inspection du travail et a un impact sur les comptes sociaux.

Notre méthode d’action est d’agir au plus près du terrain. Voter des lois, c’est bien, mais encore faut-il qu’elles soient suivies d’effet et que les nouveaux outils soient utilisés par les acteurs de terrain. Faute de quoi nous passerons à côté de très nombreux cas de fraude.

Mon approche pragmatique m’a conduit à me rendre à différentes reprises dans plusieurs comités opérationnels départementaux anti-fraude (CODAF) ; je continuerai à le faire régulièrement pour voir ce dont les acteurs de terrain ont besoin pour être encore plus efficaces. J’y ai rencontré des personnes très compétentes et motivées, avec un sens élevé de la protection sociale ; elles sont convaincues que leur action est totalement légitime. Sans cette motivation, cette compétence et une bonne circulation de l’information entre les acteurs, rien ne se passerait.

Cela dit, la lutte contre la fraude ne repose pas seulement sur les corps de contrôle. Tout agent de liquidation doit, lorsqu’il a un soupçon légitime, avoir le réflexe de leur en faire part. Il ne s’agit naturellement pas de confondre les missions de chacun, qui sont bien définies par ailleurs. Bien souvent, cela peut se faire à l’occasion d’une simple demande d’information. Il faut que chacun ait conscience de ce qu’est la fraude et de la façon dont elle met en péril nos comptes sociaux et notre système de protection sociale.

Je ne suis pas le seul à me mobiliser : l’ensemble du Gouvernement aura à prendre dans les semaines à venir de nouvelles initiatives ; il est encore trop tôt pour en parler car nous devons prochainement nous réunir sur le sujet. Il est important également que cette action puisse être conduite conjointement avec les parlementaires.

M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission des affaires sociales. La fraude sociale est un problème plus aigu en France qu’ailleurs. D’une part, parce que l’on y recense en moyenne 24 prestations sociales entre la naissance et la mort et que la protection sociale mobilise 32 % de la richesse nationale. D’autre part, en raison de la complexité de notre système de protection sociale.

Dès qu’on aborde cette question, on a tendance à être caricaturé. Je tiens à dire deux choses à cet égard : d’abord, la maîtrise des dépenses sociales et la lutte contre la fraude sont un moyen de mieux gérer les dépenses pour les redéployer dans la lutte contre les inégalités de départ. Deuxièmement, comme le disait M. Jacques Delors dans un rapport du Centre d’étude des revenus et des coûts (CERC), l’effort de productivité du pays lors des vingt dernières années a été absorbé par le poids croissant des prestations au détriment du salaire direct.

Au cours des vingt-cinq dernières années, les dépenses sociales ont connu une augmentation équivalant à 6,1 % du PIB en France, contre un accroissement de 2,4 % en Allemagne et une diminution de 0,7 % en Suède – qui a, comme les autres pays scandinaves, infléchi sa politique en faveur de la protection de l’emploi et d’un meilleur redéploiement des dépenses.

La lutte contre la fraude sociale est donc un moyen d’assurer une plus grande justice.

M. Dominique Tian, rapporteur. La question de la fraude sociale est en effet abordée de façon relativement récente, mais le fait que la création d’une mission d’information sur le sujet ait été décidée à la demande de l’ensemble des groupes politiques atteste une prise de conscience.

Nous essayons d’établir un bilan aussi précis que possible. Vous avez, lors de différentes interviews, indiqué que la fraude sociale recouvrait des sommes considérables : à combien l’estimez-vous ? Certains disent que si on luttait plus efficacement contre elle, nos comptes sociaux ne seraient quasiment plus en déficit. C’est sans doute excessif, mais un montant de l’ordre de 1 % des dépenses paraît crédible ; d’aucuns prétendent même qu’au vu d’études portant sur d’autres pays européens, ce montant pourrait être de 4 % ou 5 % des dépenses.

Quels sont les résultats des expérimentations mises en place depuis octobre 2010 sur les arrêts de travail des fonctionnaires ? Qu’en est-il plus précisément s’agissant de chacune des fonctions publiques : nationale, territoriale et hospitalière ?

Quelles précisions pouvez-vous nous apporter sur les pistes que vous avez évoquées s’agissant des prestations servies à l’étranger ?

Les croisements de fichiers semblent avoir pris du retard – je pense notamment au répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS), qui est une priorité absolue – : qu’en est-il ?

Enfin, où en sommes-nous de l’accès des organismes de sécurité sociale à l’application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF), qui est également importante ?

M. le ministre. L’évaluation de la fraude est par nature difficile. Nos évaluations reposent sur les fraudes détectées, que l’on estime à 457,6 millions d’euros en 2010.

La détection s’est accrue de 19 % entre 2009 et 2010, après une progression de 8 % entre 2008 et 2009. Elle n’est pas, contrairement à ce que j’ai pu lire dans la presse, liée à une augmentation de la fraude, mais à une plus grande efficacité des procédures et des services.

Depuis 2006, où ont été lancés les premiers programmes nationaux de lutte contre la fraude au sein de la sécurité sociale, plus de 1,7 milliard d’euros de fraudes ont été détectés par les organismes de sécurité sociale. Les sommes récupérées permettent non seulement de réduire les déficits, mais surtout de mieux lutter contre les inégalités, comme vient de le souligner M. Pierre Méhaignerie. Elles permettent aussi de garantir la pérennité du système et de mieux rembourser certains actes. J’ai quelques idées sur ce point dont nous aurons l’occasion de reparler dans les mois qui viennent. Le montant annuel de la fraude détectée a plus que doublé depuis 2006, ce qui montre l’utilité des programmes nationaux.

Les redressements notifiés par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) se sont élevés à plus de 185 millions d’euros en 2010, contre 130 millions d’euros en 2009, soit une augmentation de 42 %. Les fraudes détectées sur les prestations ont atteint 266 millions d’euros l’an dernier, soit 15 millions de plus qu’en 2009. Pour la branche Maladie, la fraude constatée est comprise entre 150 et 160 millions d’euros par an depuis 2008. Enfin, celle relative à la branche Vieillesse a quasiment triplé, passant de 3,4 à 10,1 millions d’euros entre 2009 et 2010.

Cela étant, une chose est de détecter la fraude, une autre est de se faire rembourser. Il faut en finir avec l’idée que les fraudeurs peuvent passer entre les mailles du filet et que la fraude est un jeu à somme nulle ! Avant, si l’on fraudait, on risquait au pire de devoir rembourser les sommes indûment perçues. Il faut casser cette logique : non seulement on doit avoir l’assurance de récupérer ces sommes mais il faut aussi que le fraudeur ait conscience qu’avec les moyens informatiques et humains mis en place et la volonté politique qui les sous-tend, il se fera forcément prendre et que la fraude risque de lui coûter plus cher. C’est l’objectif poursuivi par les pénalités financières et les sanctions administratives.

Sur le montant réel de la fraude, il faut convenir qu’il doit être très supérieur à celui des fraudes détectées mais il faut éviter certaines confusions, par exemple avec les chiffres sur l’économie souterraine dans certains pays.

M. Pierre Morange, coprésident. Pouvez-vous être plus précis ? Ce montant correspond-il aux ordres de grandeur évoqués par M. Dominique Tian ?

M. le ministre. J’estime la fraude sociale au sens large à plusieurs milliards d’euros par an, sans parler naturellement des gaspillages !

Nous devrions donc pouvoir récupérer des sommes beaucoup plus importantes auprès des fraudeurs dans les années à venir. L’efficacité de nos services sur le terrain est essentielle : elle ne passe pas nécessairement par une augmentation démesurée des effectifs des corps de contrôle, mais par une mutualisation des informations et la garantie de sanctions rapides et dissuasives à l’encontre des fraudeurs.

S’agissant des arrêts de travail des fonctionnaires, il est légitime que tout salarié soit contrôlé. Il n’y a pas lieu d’en faire un débat passionnel. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a prévu de lancer une expérimentation sur le contrôle des arrêts de travail des fonctionnaires de l’État dans six départements depuis octobre 2010. Cette mesure devrait être étendue aux fonctions publiques territoriale et hospitalière dès l’automne prochain ; je veillerai à ce que ce soit le cas le plus tôt possible.

Nous avons de larges marges de progression. Dans 80 % des cas, les informations sur les arrêts de travail parviennent aux services de contrôle lorsque ceux-là sont terminés ! Il faut davantage mobiliser les administrations et les rendre plus réactives, ce qui n’est vraiment pas insurmontable. En outre, dans bien des cas, les adresses dont disposent les services sont incomplètes. Il faut donc améliorer les conditions de contrôle ; nous y travaillons avec M. François Baroin, ministre chargé du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État.

Le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) sera opérationnel fin 2011. C’est un outil très important, réclamé par tous les acteurs. Il conditionne l’efficacité de la lutte contre la fraude sociale, qui, comme je l’ai dit, a un caractère transversal.

La mise en place de cet outil a tardé, car elle est très compliquée, ne correspondait pas aux habitudes ou à la culture des services et a exigé un énorme travail. Le répertoire national commun de la protection sociale devrait permettre de disposer d’une information complète sur la situation de l’assuré – c’est-à-dire le régime, la caisse d’affiliation et l’ensemble des prestations versées –, dans le respect des règles fixées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). On pourra alors immédiatement constater certaines prestations indues, soit qu’elles aient été versées deux fois, soit qu’elles soient incompatibles entre elles, comme l’allocation pour adulte handicapé (AAH) et la pension d’invalidité.

M. Pierre Morange, coprésident. L’interconnexion des fichiers, qui a mis du temps à se mettre en place, ne permet pas de connaître le montant des prestations. Or il est nécessaire de vérifier non seulement l’éligibilité d’un assuré à telle ou telle prestation, mais aussi le montant des droits obtenus. Cela est complexe à réaliser, d’autant que les prestations évoluent au fil du temps. Mais il est important d’y parvenir – dans le cadre de l’automaticité du croisement des fichiers, notamment avec ceux des services fiscaux – pour faire en sorte que le décloisonnement que vous appelez de vos vœux soit pleinement opérationnel.

M. le ministre. Lorsque je me suis rendu au comité opérationnel départemental anti-fraude de Rennes, j’ai vu le cas d’une fraude détectée en raison d’un cumul d’indemnités versées notamment pour une garde d’enfant alors que les revenus de l’assuré étaient supérieurs à 12 000 euros ou 14 000 euros par mois !

Si l’on a bien raison de vouloir respecter les règles touchant à la vie privée et à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, nous devons, pour faciliter la lutte contre la fraude, pouvoir avoir accès à certaines informations, d’autant que de nombreuses données personnelles figurent déjà sur internet et les réseaux sociaux.

M. Pierre Morange, coprésident. Sur la question de la communication du montant des prestations, la Commission nationale de l’informatique et des libertés n’a guère de réserves : le problème tient davantage à la complexité technique de la mise en œuvre des échanges d’informations.

M. le rapporteur. Il faut aussi tenir compte des réticences des services fiscaux ou de La Poste à fournir certains documents.

M. le ministre. S’agissant des services fiscaux, la situation est en train de changer, mais le problème de l’agrément de la Commission nationale de l’informatique et des libertés se pose dans certains cas. Les réticences que vous évoquez me paraissent davantage relever du passé.

Concernant La Poste, j’ai vu des conventions locales apporter de très bons résultats, notamment pour le cas de personnes déclarant résider en France et faisant suivre leur courrier à l’étranger. Il n’y a pas lieu de mettre en cause le secret des correspondances, mais si un assuré fait suivre son courrier à l’étranger, il est légitime de lui poser quelques questions pour vérifier la réalité de sa domiciliation.

Faites-vous également allusion à la Banque postale ?

M. le rapporteur. Oui : au-delà des réticences de La Poste dans certains cas, la Banque postale refuse très souvent de fournir des documents alors que les autres banques le font très rapidement.

M. le ministre. Pour régler ce type de problème, il faut voir tous les acteurs concernés et placer chacun en face de ses responsabilités. Chacun doit être sur la même ligne pour se mobiliser contre la fraude.

Jusqu’ici, les agents recouraient souvent au système « D », ce qui leur prenait beaucoup de temps. Avec les nouveaux outils de contrôle, ils devraient plus facilement avoir accès aux informations et être plus efficaces.

Quant à l’application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France, qui devrait être opérationnelle à l’automne prochain, elle permettra aux organismes de sécurité sociale de mieux contrôler que les assurés qui reçoivent des prestations ont un titre de séjour régulier.

L’accès de ces organismes au fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA) sera aussi bientôt possible. Cela étant, les échanges entre la direction générale des finances publiques et la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés permettent d’ores et déjà de mieux contrôler les revenus des bénéficiaires de la couverture maladie universelle de base et complémentaire. Nous nous attachons à vérifier le caractère opérationnel de ces dispositifs.

S’agissant des prestations servies à l’étranger, j’ai déjà apporté des précisions en réponse à une question que m’a posée M. Jean-Michel Ferrand lors d’une récente séance de questions au Gouvernement.

La Caisse nationale d’assurance vieillesse verse plus de 3 milliards d’euros par an de pensions à des personnes résidant à l’étranger, lesquels représentent environ 10 % des bénéficiaires du régime général. La moitié des retraités concernés résident dans d’autres pays que l’Union européenne. Il s’agit de personnes ayant travaillé et cotisé en France.

Il y a lieu de s’assurer que lorsqu’une personne décède, les caisses de retraite en soient informées. Force est de reconnaître que l’on doit renforcer les informations dont on dispose dans ce domaine.

Différentes expériences ont été tentées, par exemple en Tunisie avec un assureur local ; mais le dispositif, qui n’en est qu’à ses débuts, n’a pas encore fait la preuve de son efficacité.

Pour un certain nombre d’États tiers, le contrôle repose sur trois leviers : l’entraide administrative, si les conditions de protection des données du pays sont équivalentes à celles prévalant en France – nous avons ainsi une convention avec le Canada par exemple – ; la constatation sur place de la situation de fait des assurés sociaux par des sociétés agréées par les autorités consulaires – tel l’assureur que j’évoquais pour la Tunisie – ; enfin, nous travaillons avec le ministère des affaires étrangères à un dispositif de vérification ciblé en cas de présomption de fraude sur des documents délivrés par des autorités civiles.

Se pose à cet égard la question de savoir s’il y a lieu de contrôler tout le monde. Certains parlementaires pensent que tous les assurés devraient venir au consulat ou à l’ambassade, ce qui risque de ne pas être simple à organiser dans certains cas, au regard du nombre de personnes concernées. Il y a lieu de se demander si l’on ne devrait pas plutôt opérer des contrôles en fonction de l’âge des assurés, pour s’assurer qu’ils sont bien en vie.

M. le rapporteur. Il s’agit là pour nous d’un sujet important. Nous sommes partis de l’enquête de la Cour des comptes, qui indique qu’il existe plus de centenaires recevant des prestations en Algérie que ce pays n’en recense. Cette question mérite un débat. Or vous avez déclaré que les certificats de vie étaient aisément falsifiables : il faudra mettre en place un dispositif de validation de ces documents…

M. le ministre. … et une formation des agents ayant accès à ces données, pour leur permettre de déceler les risques de falsification !

En Algérie, le nombre de nos retraités centenaires est de 539, soit 0,12 % des retraités. En France, ils sont 13 072, soit 0,11 % des retraités.

Le contrôle des fraudes dans ce domaine est pour moi un sujet important, quels que soient les pays dans lesquels résident nos affiliés.

M. le rapporteur. La MECSS fera des propositions en ce sens.

M. Jean Mallot, coprésident. Nous devons nous appuyer sur des chiffres précis, afin d’éviter toute exagération.

La problématique des prestations servies à l’étranger se pose pour tous les pays. Mais s’il est difficile de négocier des conventions de sécurité sociale avec des pays dont l’organisation est très différente de la nôtre, ne pourrions nous pas trouver avec les autres États de l’Union européenne des moyens de contrôle plus efficaces et plus simples ?

Nous sommes tous d’accord ici pour lutter contre la fraude sociale : c’est une question d’éthique républicaine. La règle doit être respectée par tout le monde et, lorsqu’elle ne l’est pas, cela doit donner lieu à des sanctions. Mais il faut savoir de quoi on parle : de la fraude estimée ou de la fraude détectée ? De la fraude aux prélèvements ou aux prestations ? Il faut également avoir à l’esprit ce que représente par comparaison la fraude fiscale, qui elle porte sur plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Quelle définition donnez-vous de la fraude ? Retenez-vous, à côté des critères de l’infraction et du dommage, celui de la démarche intentionnelle ?

Par ailleurs, certaines formes de fraudes sont plus coûteuses que d’autres. Quelles sont les plus importantes auxquelles il conviendrait prioritairement de s’attaquer ?

M. le ministre. Au sein de l’Union européenne, les directives et règlements relatifs à la sécurité sociale harmonisent les exigences en matière de contrôle et les renseignements à demander. Nous n’avons pas le même type de relations avec les États tiers, même si certains accords existent, notamment avec le Canada. Je solliciterai le ministère des affaires étrangères afin de mener dans ce domaine une action efficace.

Pour distinguer la fraude de l’erreur, il faut prendre en compte la bonne foi de l’intéressé et la présence ou non d’un élément intentionnel.

Au lieu d’isoler les principaux types de fraude en matière de lutte contre la fraude, nous devons mener une action tous azimuts contre toutes les formes d’abus, car un fraudeur agit rarement une seule fois. Un groupe d’intervention régional (GIR), qui a décloisonné l’action des services, a arrêté récemment à Rennes les auteurs d’un vol de cuivre et de métaux. En vérifiant leur activité et les prestations sociales qu’ils percevaient, il a découvert une fraude au revenu de solidarité active.

En ce qui concerne les arrêts de travail, la culture française incite à contrôler potentiellement tout le monde. Mieux vaut se concentrer sur les surprescripteurs ou les surconsommateurs, abstraction faite des personnes atteintes d’une maladie professionnelle, qui s’absentent fréquemment. Les données informatiques montrent que certains médecins prescrivent cinq fois plus d’arrêts que leurs confrères, ce qui justifie tout de même une demande d’explications de la part de l’administration.

La fraude à l’allocation de parent isolé, qui ne portait que sur quelques euros par mois, a aussi été une des plus répandues, de sorte qu’elle a occasionné des détournements considérables. Elle décourageait le retour vers l’emploi. En outre, il était particulièrement injuste que deux personnes percevant le revenu de solidarité active, vivant ensemble, dont l’une touchait indûment le revenu de solidarité active majoré, bénéficient d’un contrat aidé.

Le travail clandestin est un vol à double titre, puisque non seulement l’employeur ne verse pas les prestations sociales, ce qui constitue une fraude aux prélèvements, mais que les employés ne perçoivent aucune protection sociale.

Les contrôles relatifs au revenu de solidarité active relèvent de la responsabilité de Mme Roseline Bachelot-Narquin, qui a eu raison de lancer une expérimentation à ce sujet. L’initiative de M. Éric Ciotti dans les Alpes-Maritimes me semble également légitime, dès lors que le conseil général est concerné par le financement du revenu de solidarité active.

Pour les arrêts de travail, j’ai fait adopter en 2004, dans le cadre de la loi portant réforme de l’assurance maladie, la mise sous accord préalable, qui a permis une économie estimée à 9 millions d’euros. Cette procédure assez lourde n’a concerné qu’une centaine de médecins dont l’activité était particulièrement déviante. L’article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a introduit un dispositif alternatif plus souple, qui permet au directeur de caisse de proposer aux médecins concernés de réduire leurs prescriptions dans un délai déterminé. Le décret d’application a été publié le 19 mai. La contre-visite à la demande de l’employeur constitue un autre instrument efficace. Le plan d’ensemble que je présenterai en juin comprendra d’autres mesures. Enfin, même si les investigations concernent plus souvent les arrêts de longue durée, plus faciles à contrôler et représentant des montants importants, il faut considérer qu’en matière de fraude, il n’y a pas de petites sommes en jeu.

Mme Bérengère Poletti. J’apprécie que vous présentiez la lutte contre la fraude comme une mesure de justice sociale. À l’heure où nous débattons du cinquième risque et où l’on envisage de demander aux Français un effort supplémentaire, ils attendent que les décideurs fassent un effort pour mieux gérer l’argent de leurs cotisations.

Est-il vrai que certains départements comptent jusqu’à cinq fois plus de bénéficiaires de l’allocation pour adulte handicapé que d’autres ? Que représente, pour les caisses, le manque à gagner induit par le travail clandestin ? Ce phénomène lié au problème de l’immigration clandestine donne lieu à une nouvelle forme d’esclavagisme.

M. le ministre. L’allocation pour adulte handicapé relève des attributions de Mme Roselyne Bachelot-Narquin. Cependant, pour avoir été ministre de la santé et des solidarités, je peux confirmer qu’il existe des disparités entre les départements. Elles s’expliquent par l’existence de certaines passerelles vers l’emploi destinées aux travailleurs handicapés, ainsi que par l’action des associations. Il est logique que l’AAH soit versée plus largement dans les départements où le taux d’emploi des personnes handicapées est plus faible, mais il n’est pas interdit d’effectuer des contrôles dans ce domaine.

Comme vous, je considère comme des délinquants et des exploiteurs ceux qui organisent leur entreprise autour du travail clandestin. Le dernier projet de loi sur l’immigration permet de prononcer la fermeture administrative des sociétés qui emploient exclusivement des clandestins, ce qui se rencontre dans tous les secteurs. Une agence de travail temporaire de ce type, coupable de multiples fraudes sociales et fiscales, a été signalée dans l’Oise. Dans ce cas, la fermeture s’impose, la société n’ayant ni existence légale ni justification sociale. Nous devons combattre tous les fraudeurs, quelle que soit leur situation. Cette année, notre objectif est de récupérer 190 millions d’euros de fraude aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, contre un total de 170 millions d’euros l’an dernier, qui intégrait pourtant une récupération exceptionnelle de 15 millions. Nous avons considérablement augmenté notre objectif et, compte tenu des nouveaux moyens engagés, je pense même que nous pourrons le dépasser.

Mme Catherine Génisson. Il est nécessaire de lutter contre la fraude sociale, qui représente une atteinte à l’éthique républicaine comme à la justice sociale, et qui, en confisquant des sommes importantes, risque de remettre en cause certaines prestations. Cependant, soyons conscients que les mesures qui seront prises dans ce sens ne suffiront pas à résorber le déficit de la sécurité sociale.

L’étude que vous avez eu raison de commander sur les arrêts de travail abusifs concerne-t-elle aussi les salariés du secteur privé ? Si l’on observe un nombre élevé d’arrêts dans un secteur d’activité, n’excluons pas, à l’heure où l’on met en évidence les risques psychosociaux, l’éventualité d’un dysfonctionnement du service lui-même. Étudiez-vous la sous-déclaration d’accidents du travail déguisés en arrêts-maladie ? Peut-on vraiment, compte tenu de la complexité des prestations sociales et de la diversité des situations administratives, distinguer la fraude, l’erreur et les dysfonctionnements ? Je m’étonne enfin des chiffres particulièrement élevés que vous avez cités, en matière de fraude sur la branche Vieillesse.

M. le ministre. Ils sont très faibles : elle ne porte que sur 10 millions d’euros !

Mme Catherine Génisson. Si les chiffres sont bas, leur augmentation est considérable. Comment l’expliquer ? Est-elle seulement imputable aux Français qui vivent à l’étranger ?

M. Jean-Pierre Door. Il me semble essentiel de distinguer les excès ou les abus, de la fraude elle-même.

Le Parlement et le Gouvernement doivent tout faire pour lutter contre les premiers, notamment dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale. Un ancien directeur de la sécurité sociale a évalué à près de 10 milliards les dépenses imputables à l’abus de prescriptions, aux transports inutiles ou aux examens redondants. À en croire les acteurs des fédérations hospitalières, ce montant n’a pas diminué, alors qu’il représente 8 % à 10 % du budget global de la sécurité sociale, qui serait bénéficiaire si nous partagions le civisme des Allemands. Nous avons le devoir d’ouvrir le débat. Dans ma circonscription, j’ai souvent entendu des personnes logées dans une logement social se plaindre qu’un de leurs voisins vivant en couple percevait indûment l’allocation de parent isolé.

Quant à la fraude, qui constitue un acte de délinquance, l’État doit non seulement la sanctionner, mais aussi la prévenir. Lors d’une précédente MECSS consacrée à la gestion des caisses sociales, nous avions évoqué la possibilité de mettre en place un guichet unique, qui offrirait une meilleure visibilité des prestations sociales et permettrait de croiser les données. Où en est-on à cet égard ?

M. Pierre Méhaignerie. Dans nos villes, nous voyons tous des familles monoparentales victimes de la pauvreté. Quand elles se recomposent, leur situation reste difficile, et leur tentation est grande de conserver une prestation de près de 600 euros, d’autant que la Caisse d’allocations familiales est tenue d’annoncer toute visite de contrôle et que les intéressés sont assez prudents pour ne pas mettre leur nom sur la boîte aux lettres. Peut-on mettre fin à cette situation qui crée disparités et jalousies ?

Pouvez-vous nous communiquer le coût des vingt-quatre prestations par département ? L’allocation pour adulte handicapé n’est sans doute pas la seule dont le nombre de bénéficiaires varie d’un à cinq. Si l’on veut que la collectivité comprenne qu’elle pâtit collectivement de la mauvaise gestion des dépenses sociales, on doit porter ces chiffres à sa connaissance.

Enfin, il résulte d’une étude récente que le taux de performance économique et sociale des régions françaises coïncide avec un niveau plus bas de dépenses de santé et avec un versement de prestations moins important. Ces données doivent être exploitées dans un but pédagogique, puisque les valeurs civiques varient d’une région à l’autre.

M. le ministre. Je m’en tiendrai à la lutte contre la fraude, sans m’aventurer sur le vaste sujet de la justice sociale, qui comprend bien des aspects.

Le premier point à considérer est le mode d’attribution des aides. Les bourses, par exemple, sont versées au-dessous d’un certain seuil de revenus, et disparaissent totalement au-delà. Cet effet de seuil provoque des situations absurdes. L’absence de progressivité explique que des personnes de bonne foi puissent se retrouver en situation de fraude.

Dans mon ministère, j’ai trois priorités : faire baisser le chômage, réintroduire de la confiance dans notre système de santé et faire de la lutte contre les fraudes une réalité gouvernementale. Ramener une population vers l’emploi et lutter contre les fraudes sont des missions de justice sociale. Le mode d’attribution des aides est un autre débat. Cela dit, je souscris à l’analyse de M. Jean-Pierre Door. Il l’avait d’ailleurs présentée dans sa circonscription lors d’une réunion à laquelle j’ai assisté.

Monsieur Pierre Méhaignerie, nous vous fournirons facilement, Mme Roseline Bachelot-Narquin et moi, les statistiques que vous me demandez, mais on ne peut les exploiter qu’en prenant en compte la réalité sociologique des départements. Elle explique par exemple que, dans deux collectivités territoriales voisines, l’Aisne et l’Oise, le taux de bénéficiaires du revenu de solidarité active soit extrêmement différent.

Dans un autre domaine, une piste intéressante consisterait à établir une cartographie des suites pénales engagées, une fois qu’une action pénale a été décelée.

M. Pierre Morange, coprésident. C’est un sujet que j’ai souvent évoqué au sein de la MECSS. Dès lors qu’une cartographie a été envisagée pour les hôpitaux, pourquoi ne pas en prévoir une pour les tribunaux, tout en respectant bien entendu le principe constitutionnel de l’indépendance de la justice ?

M. le ministre. Madame Catherine Génisson, un contrôle des arrêts de travail pour les salariés du régime général a déjà été mis en place : 2,4 millions de contrôles ont été réalisés en 2009, contre 2,2 en 2008, ce qui représente une forte augmentation. Ils peuvent être aléatoires ou ciblés, mais concernent principalement les arrêts de travail de longue durée.

La direction générale du travail et le Conseil d’orientation sur les conditions de travail examinent la question de la sous-déclaration des accidents de travail. Comme les partenaires sociaux, je suis conscient du problème, qui pose celui de la santé au travail dans certains secteurs.

Nous considérons que, dès qu’un chiffre paraît trop important, on doit interroger l’intéressé. Ainsi, une surprescription, qui ne constitue pas une fraude, justifie une demande d’explication. Nous devons aussi travailler sur la charge de la preuve et envisager des sanctions administratives et financières, qui ne sont en rien une alternative aux sanctions pénales. Autant de sujets que je ne demande qu’à évoquer lors d’une prochaine réunion. Sachez que mon implication est sans défaut, comme l’a été celle de M. Éric Woerth, mais la réussite de l’action contre les fraudes ne doit pas dépendre de l’implication des ministres.

Mme Cécile Dumoulin. Comment expliquer que le secteur public souffre d’un absentéisme plus important que le privé ? Les conditions de travail sont-elles plus dures ou les contrôles moins vigilants ? Peut-être existe-t-il dans ce secteur une marge de progression.

La distinction que Mme Catherine Génisson propose d’établir pour les particuliers entre l’erreur et la fraude doit valoir aussi pour les entreprises. Si certaines pratiquent une fraude massive, d’autres commettent peut-être des erreurs involontaires.

Quelles mesures comptez-vous mettre en place pour contrôler les fraudes au revenu de solidarité active majoré ? Puisque nous avons souhaité une coopération plus importante entre l’administration fiscale et les caisses d’allocations familiales, celles-ci ne pourraient-elles pas indiquer aux services fiscaux les sommes versées, ce qui constituerait un premier contrôle ?

M. le rapporteur. Une des demandes les plus fortes des inspecteurs de la Caisse d’allocations familiales est l’inversion de la charge de la preuve en matière d’isolement.

M. le ministre. Vous savez que nous y travaillons.

M. le rapporteur. Il n’est pas facile de vérifier les conditions d’isolement. Depuis peu, certains couples, qui continuent à habiter sous le même toit, déclarent entamer une procédure de divorce, ce qui leur permet de toucher le revenu de solidarité active majoré ou l’aide personnalisée au logement (APL). Mieux vaudrait recourir à la notion d’isolement économique, qui sera plus facile à prouver. Ce sera sans doute l’une des préconisations de la MECSS.

M. le ministre. Nous avons déjà mis fin à certaines absurdités. Il y a un an et demi, les contrôleurs des caisses d’allocations familiales chargés de vérifier les conditions d’obtention du revenu de solidarité active majoré étaient encore tenus d’annoncer leur visite. Ce n’est plus le cas. Les contrôles sont désormais inopinés.

Mme Cécile Dumoulin, depuis 2008, le flux d’informations nécessaires à la détermination des montants à verser se fait des services fiscaux vers les caisses d’allocations familiales. Je comprends votre proposition, mais le caractère non imposable des prestations ne permettrait sans doute pas aux caisses, sur le plan juridique, de transmettre leur montant aux services fiscaux. La question doit être posée à M. François Baroin.

Les fraudes aux retraites portent généralement sur des sommes peu importantes, mais, du fait que le versement des prestations intervient longtemps après la fraude, les contrôles et les vérifications sont complexes. Nous avons mené une action exemplaire, en terme d’efficacité, concernant les carrières longues. Les poursuites sont allées très loin. Cela dit, on ne compte que 10 millions d’euros de fraude pour la branche Vieillesse contre 160 millions d’euros pour la branche Maladie, alors que le montant des sommes perçues indûment n’est pas moindre.

Mme Catherine Génisson. S’il est essentiel de lutter contre la fraude au revenu de solidarité active majoré, veillons à ne pas confier des charges trop lourdes au personnel des caisses d’allocations familiales. Par ailleurs, les contrôles, si justifiés qu’ils soient, sont souvent vécus comme une humiliation. La traque à la fraude doit être menée de manière stricte, mais dans le respect de la dignité de chacun.

M. Jean Mallot, coprésident. Le travail clandestin ne doit pas être confondu avec l’immigration, puisqu’il n’est effectué qu’à 13 % par des étrangers en situation irrégulière.

M. le ministre. Certes, mais tout immigré sans papier est une proie pour les exploiteurs qui recourent à la main-d’œuvre clandestine.

M. Jean Mallot, coprésident. Un Français en situation de précarité ne l’est pas moins. Ce n’est pas en agissant sur l’immigration qu’on résoudra le problème du travail clandestin.

M. le ministre. Je vous laisse avoir le dernier mot sur ce sujet.

Madame Catherine Génisson, les contrôleurs, qui souhaitent avant tout disposer de véritables moyens pour travailler efficacement, sont très respectueux de notre système de sécurité sociale, dont ils sont les premiers défenseurs. Je les ai rencontrés dans ma ville de Saint-Quentin, comme dans les différents comités opérationnels départementaux anti-fraude. Ils connaissent parfaitement les dossiers, savent repérer les faisceaux d’indices et n’interviennent qu’en cas de forte suspicion.

Quand une personne demande à faire valoir ses droits à la retraite, on doit rechercher dans son dossier d’éventuelles incohérences. Il s’agit non de changer d’optique ou d’imposer une nouvelle conduite aux agents, mais de les amener à vérifier les informations, ce qu’on fait dans toute profession.

M. Pierre Morange, coprésident. Au cours des auditions, plusieurs intervenants ont réclamé l’établissement d’un corps de doctrine en matière de lutte contre la fraude. Ils souhaitent que l’on définisse des principes et des critères standardisés, applicables sur le terrain. La Délégation nationale à la lutte contre la fraude semble toute désignée pour le faire. Ils réclament par ailleurs la fin du cloisonnement et l’échange systématique des informations.

La séance est levée à treize heures quinze