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21/10/2009 - Séance rendant hommage à la France à la Chambre des députés du Brésil

Senhor Presidente,

Senhoras et Senhores deputados

Caros colegas,

Senhoras et Senhores,

Monsieur le Président, Cher Michel Temer, c’est un grand honneur pour moi d’être accueilli dans votre hémicycle et je tiens à vous remercier non seulement pour votre invitation, mais pour la chaleur de votre accueil qui me va droit au cœur. J’ai été heureux, bien sûr, de vous recevoir en juillet dernier à Paris, avec votre délégation ; mais découvrir votre grand et splendide pays est pour moi un véritable bonheur.

Il faut que vous le sachiez : le Brésil, vu de France, c’est d’abord un rêve. Et je ne dis pas cela parce que mon épouse est d’origine brésilienne… Je pense à l’Histoire, je pense à ce grand rêve d’or et de mystère qui mena sur vos côtes, dans vos villes, et jusqu’aux tréfonds de l’Amazonie, tant de Français en quête d’une nouvelle vie et d’un nouvel horizon. Je pense à l’Art aussi et à Edouard Manet, qui a dit que « le contact avec le Brésil a été son seul maître en peinture ».

Et je me dis que peut-être, à sa manière, la France vue du Brésil a pu être un rêve aussi : la France des Lumières, la France de la révolution de 1789, la France républicaine dont je retrouve le bonnet phrygien sur vos pièces de monnaie. La France de Victor Hugo, le grand poète, mais aussi le député abolitionniste qu’admirait tant Pedro II, l’empereur qui chez vous abolit l’esclavage. La France d’Auguste Comte enfin, puisque au fronton de vos monuments, sur votre drapeau même, c’est la formule d’un grand philosophe français qui est devenue la devise même du Brésil.

« Ordre et progrès », quel beau programme ! N’est-ce pas celui de tous les républicains du monde, de tous ceux qui s’efforcent au quotidien de faire vivre la démocratie ? L’ordre sans le progrès, c’est l’immobilisme et la dictature, mais un progrès qui se rirait des institutions et des lois n’aboutirait qu’au chaos. Au Brésil comme en France, notre tâche de députés consiste précisément à concilier ordre et progrès, dans chacun de nos textes, dans chacune de nos décisions.

Et c’est pourquoi le partenariat stratégique, conclu en 2006 entre nos deux pays, a cette force toute particulière. Il ne s’agit pas d’un banal accord commercial, il ne s’agit pas d’un traité de plus dans la routine des relations internationales : c’est d’un véritable pacte dont nous parlons, un pacte qui concrétise enfin, au niveau qu’elle méritait d’atteindre, une amitié cordiale et solide.

Le Brésil est un ami de la France comme la France est une amie du Brésil. Je n’oublie pas qu’aux heures les plus douloureuses de l’histoire de France, quand les armées hitlériennes occupaient notre sol, votre pays a ouvert ses frontières à nos réfugiés et, plus que cela, a apporté son soutien à la France libre du général de Gaulle. Juste retour des choses, puisque la France, en 1823, avait eu l’honneur d’accueillir José Bonifacio de Andrada, alors en exil – tout comme elle accueillit, pendant la dictature, les démocrates brésiliens qui lui demandèrent l’asile.

Nous avons aussi eu nos contentieux, pourquoi le nier ? Mais ce que je veux retenir, ce que l’Histoire retiendra, c’est que nous avons su les surmonter.

Ainsi, la France est présente en Guyane et je sais que ce voisinage, à certaines périodes de l’Histoire, a pu se révéler complexe. Les diplomates hésitèrent longtemps sur le choix du fleuve frontière. Des aventuriers français et brésiliens tentèrent d’instituer de fragiles Etats-tampons, suscitant des heurts qui peuvent intéresser les historiens ; mais nous, parlementaires des deux rivages de l’Atlantique, ce que nous devons retenir, c’est que la frontière résulta non d’une guerre, non d’un affrontement, mais d’un arbitrage conduit par le Président de la Confédération helvétique. La paix est le plus précieux des territoires, c’est cela que le Brésil et la France sont fondés à dire aux autres nations du monde. Bientôt un grand pont enjambera l’Oyapock et ce pont ne sera pas seulement un ouvrage d’art audacieux, il manifestera concrètement cette amitié franco-brésilienne (qui a pour ciment l’humanisme).

Ensemble, bâtissons d’autres ponts, dans tous les domaines. C’est tout le sens du partenariat stratégique de 2006 et c’est l’objet même du plan d’action mis au point par les Présidents Lula et Sarkozy en 2008. Je pense d’abord à l’immense enjeu écologique, qui nous invite à trouver les solutions dont notre siècle a besoin. Je ne suis pas de ceux qui reprochent au Brésil de se développer, de s’enrichir, de s’équiper. Je sais que votre pays, dans le domaine des biocarburants, s’est montré pionnier en matière de développement durable. Continuons à réfléchir, à inventer, unissons nos forces pour préserver certes la biodiversité, mais pas la biodiversité qui s’accommoderait de la pauvreté : la biodiversité dans le cadre du développement durable, seul gage d’émancipation pour  les nations et les Hommes.

Le partenariat stratégique permettra justement à nos deux pays de parler d’une même voix dans les grands rendez-vous internationaux. Ensemble, continuons de militer en faveur d’une mondialisation plus juste, plus humaine. En prévision du sommet de Copenhague, qui doit définir l’avenir du protocole de Kyoto, le Brésil et la France sont sur le point de s’accorder sur une position commune. Poursuivons dans cette voie, sans hésiter à poser les questions cruciales. Pour ma part, comme le Président Sarkozy et comme le gouvernement français, je suis favorable à l’entrée du Brésil comme membre permanent au Conseil de sécurité des Nations-Unies.

Notre partenariat comporte un important volet aéronautique, ce qui au fond est logique entre les deux patries de Santos-Dumont.

Au cœur de notre partenariat, enfin, nous célébrons maintenant l’Année de la France au Brésil. Le nombre et la richesse des manifestations culturelles programmées illustrent, mieux que je peux le faire, la force du lien qui unit nos deux pays.

L’océan Atlantique, trop longtemps, a été cette étendue hostile qui nous a séparés. Mais à l’heure de la mondialisation, à l’heure du multilatéralisme culturel, l’obstacle a disparu pour devenir au contraire une des voies de communication du monde. Cette grande route de l’Atlantique, sillonnons-la, pour construire ensemble notre destin partagé.

Viva o Brasil ! Viva a Franca ! Viva a amizade franco-brasileira !