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09/12/2009 – Remise des prix – Action entreprise et diversité

Mesdames Claude Suquet et Nora Barsali,

Mesdames, Messieurs les présidents,

Mes chers collègues,

Chers amis,

Je suis heureux de vous recevoir, ici, à la Présidence de l’Assemblée nationale, pour la remise des prix « Entreprise et diversité ». Car la question que pose le prix « Entreprise et diversités », comme les réponses apportées par les lauréats, s’inscrivent au cœur de la définition contemporaine que nous pouvons, que nous devons, donner à la République.

Je tiens à remercier ceux qui sont à l’origine de ce prix, qui l’ont porté, vous tous qui êtes ici aujourd’hui, vous tous qui marquez par votre engagement, que la France est une réalité, qu’elle aussi un projet qui doit accueillir et rassembler tous les citoyens.

Liberté, égalité, fraternité. Devise à laquelle il n’y a rien à ajouter, rien à retrancher. Devise impeccable, magnifique, généreuse et juste. Mais combien difficile, hélas ! à toujours honorer.

Ce soir, c’est d’égalité qu’il s’agit. L’égalité, ce n’est pas une France où tout se vaut, c’est une société qui distingue, mais selon le seul mérite. C’est une République sans privilège, sans discrimination, égale d’accès, ouverte, dans les mêmes conditions, à tous ses citoyens. Voilà l’idéal. Il y a la réalité. Et puis il y a la politique, c’est-à-dire, précisément ce qui, même imparfaitement, tente de ramener la réalité à l’idéal. L’idéal français d’égalité est plus qu’un modèle, il est un projet de société, il est l’un des ciments, l’un des moteurs, de notre pays. L’égalité est ce qui nous permet aujourd’hui d’envisager un avenir commun. L’Égalité rassemble, et nous porte vers l’avenir, en brassant les Français de toutes origines, en intégrant les nouveaux venus.

Mais en matière d’égalité, il nous faut bien reconnaître que nous avons encore beaucoup à faire.

Nul ne peut prétendre qu’en France les discriminations aient disparu. Le dernier rapport d’activité de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité, la HALDE, prouve que ces discriminations sont encore très nombreuses, trop nombreuses.

Comment faire comprendre le modèle républicain à l’école quand les enfants se sentent enfermés dans leurs quartiers, otages de leurs origines, prisonnier de leurs milieux ? Il existe des quartiers où le taux de chômage est plus élevé qu’ailleurs. Il existe des banlieues où la jeunesse a perdu l’espoir. Quelle adhésion à notre modèle républicain peut-on attendre quand ce modèle n’est pas le même pour tous ?

Il n’y a pas de République sans un véritable volontarisme, sans des actions concrètes, sans une volonté farouche de corriger les inégalités. On s’est trop souvent contenté d’une bonne conscience républicaine plutôt que s’engager dans un véritable volontarisme républicain.

C’est pour ces raisons que le débat sur l’identité nationale a tout son sens. Le ressenti de cette identité passe par l’adhésion aux valeurs de notre république et il ne peut y avoir adhésion sans envie. Le modèle républicain doit faire envie par le sens qu’il porte, par les valeurs qu’il véhicule, par les espoirs qu’il suscite par les réponses qu’il apporte.

Les principes de ce modèle sont sacrés. Je le répète, celui de l’égalité est primordial.

« C’est avec de justes principes, mal appliqués, que l’on fait crouler les régimes, ou ce qui est pire, qu’on les dégrade. » disait Clemenceau. Alors appliquons bien celui de l’égalité. Je ne parle pas de l’égalité absolue. S’il y a des grands et des petits, on ne doit pas imposer à tous de devenir petits mais leur permettre d’aspirer à devenir grand. Le premier c’est l’égalitarisme. L’autre, c’est l’égalité des chances, c’est l’égale dignité des personnes, c’est l’égalité des droits autant que celle des devoirs, c’est la juste récompense du mérite et du travail. C’est l’esprit républicain. C’est l’égalité des chances qui fera le droit à la diversité.

L’égalité des chances c’est donner à chacun l’accès aux outils de la connaissance, du savoir, de l’excellence.

Ces dernières années, on a fait preuve de ce volontarisme républicain, on a changé la donne, on a innové. Quel tollé de tout bord quand cela a été annoncé ! Vous savez de quoi je veux parler.

Je pense notamment à l’Institut d’Études Politiques de Paris, à Sciences-Po, qui a instauré une voie d’accès à des lycéens méritants de l’éducation prioritaire. On a tout entendu sur la prétendue dévalorisation de l’enseignement, sur des diplômes qui seraient désormais au rabais. Qui aujourd’hui reviendrait sur ces mesures ? Les étudiants ont montré qu’ils étaient dignes de confiance, Sciences-Po s’est enrichie de leur diversité.

Je pense aussi à certaines écoles de commerce ou à Polytechnique, qui ont mis en place des tutorats pour apporter aux jeunes de banlieues le soutien de ceux qui réussissent.

Je pense aussi au Lycée Henri IV avec ses classes préparatoires de mise à niveau pour les bons élèves d’établissement en zones d’éducation prioritaire.

Je pense enfin à l’École nationale d’administration, l’ENA, symbole s’il en est de la République, de la noblesse « sécularisée » de grands serviteurs de l’État, de la promotion au mérite que l’École doit incarner et de la promesse qu’elle doit porter. L’ENA, donc, qui devrait s’ouvrir plus largement, comme c’est aussi sa mission, grâce à la création cette année d’une classe préparatoire spécialement réservée aux « publics défavorisés ».

Nous avons besoin d’une République qui donne sa chance et fasse une place à chacun.

Ce prix, de l’action « Entreprise et diversité » est l’occasion de rappeler que la République n’est pas qu’un concept, qu’une formule. Ce prix de l’action « Entreprise et diversité » a pour objectif de récompenser les dirigeants d’entreprises qui développent des actions originales et audacieuses pour lutter contre les discriminations.

En 2006, la loi sur l’égalité des chances créait le CV anonyme pour les entreprises de plus de 50 salariés. Pour l’heure, les entreprises qui l’ont mis en place ne sont pas légion. Depuis 2006, il en existait le principe mais pas l’application. C’est le Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui a voulu que l’expérimentation débute. Je pense à l’institut Montaigne, animée par Claude Bébéar qui a mobilisé plus de 2000 entreprises dans le cadre de la charte sur la diversité.

Des CV sans le nom, l'âge et l'adresse des candidats, et ne faisant mention que de leur formation et de leur parcours professionnel, afin de leur permettre de franchir la barrière du premier entretien. Le CV anonyme n'est pas une fin en soi, mais, c'est une mesure utile pour casser le mur du premier entretien en permettant de neutraliser les préjugés. Pour une entreprise, c'est symboliquement fort, pour la République, aussi.

C’est un premier pas, mais ce n’est qu’un premier pas. Ce soir, je vous le dis, nous avons besoin de vous pour aller plus loin, pour imaginer les autres pas, pour faire avancer l’esprit républicain, pour que l’égalité des chances ne soit pas un vain mot.

Je vous remercie.