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N° 1989

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 octobre 2009.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
la comitologie,

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Pierre LEQUILLER,

Député

——

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Michel Herbillon, Jérôme Lambert, Thierry Mariani, Didier Quentin, vice-présidents ; M. Jacques Desallangre, Mme Marietta Karamanli, MM. Francis Vercamer, Gérard Voisin secrétaires ; M. Alfred Almont, Mme Monique Boulestin, MM. Pierre Bourguignon, Yves Bur, François Calvet, Christophe Caresche, Philippe Cochet, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Michel Delebarre, Michel Diefenbacher, Jean Dionis du Séjour, Marc Dolez, Daniel Fasquelle, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Jean-Claude Fruteau, Jean Gaubert, Hervé Gaymard, Guy Geoffroy, Mmes Annick Girardin, Anne Grommerch, Elisabeth Guigou, Danièle Hoffman-Rispal, MM. Régis Juanico, Marc Laffineur, Mme Marylise Lebranchu, MM. Robert Lecou, Michel Lefait, Lionnel Luca, Philippe Armand Martin, Jean-Claude Mignon, Jacques Myard, Michel Piron, Franck Riester, Mmes Valérie Rosso-Debord, Odile Saugues, MM. André Schneider, Philippe Tourtelier.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LA COMITOLOGIE, UNE MODALITÉ UTILE D’EXERCICE DES COMPÉTENCES D’EXÉCUTION DES ACTES EUROPÉENS 7

A. L’ÉVOLUTION DE LA COMITOLOGIE : UN DROIT DE REGARD DU CONSEIL ET DU PARLEMENT EUROPÉEN DE PLUS EN PLUS AFFIRMÉ 7

1. Un double rôle : éclairer la Commission européenne sur les enjeux pratiques auxquels peuvent se heurter les mesures d’exécution dans chaque Etat membre et alerter les gouvernements sur les difficultés posées par les actes techniques 8

2. Les procédures de comitologie 9

B. LE MAQUIS DE LA COMITOLOGIE 10

II. UNE LOGIQUE DE FILIÈRE PARFOIS PRIVÉE DE COHÉRENCE POLITIQUE, QUI APPELLE UNE RÉNOVATION DE NOS MÉTHODES DE CONTRÔLE 13

A. LE PIRE DES SYSTÈMES À L’EXCEPTION DE TOUS LES AUTRES ? 13

B. LA QUESTION DÉCISIVE : MIEUX DIFFÉRENCIER CE QUI DOIT RELEVER DES POLITIQUES ET CE QUI PEUT ÊTRE TRANCHÉ PAR LES EXPERTS 14

1. Une compétence d’exécution souvent trop étendue 14

a) Des délégations de pouvoir trop imprécises 14

b) Les progrès induits par le traité de Lisbonne 15

c) Des recommandations pour un contrôle efficace de la frontière entre les actes législatifs et les mesures d’application 16

2. Une logique de filière technique qui échappe parfois au nécessaire contrôle politique 16

a) Les lacunes du contrôle politique 16

b) L’implication nécessaire du Parlement 17

TRAVAUX DE LA COMMISSION 19

ANNEXES 23

ANNEXE 1 : TABLEAU COMPARATIF DES DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXÉCUTION DES ACTES EUROPÉENS DANS LE TRAITÉ INSTITUANT LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET LE TRAITÉ SUR LE FONCTIONNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE DANS SA RÉDACTION ISSUE DU TRAITÉ DE LISBONNE 25

ANNEXE 2 : DÉCISION DU CONSEIL DU 28 JUIN 1999 FIXANT LES MODALITÉS DE L’EXERCICE DES COMPÉTENCES D’EXÉCUTION CONFÉRÉES À LA COMMISSION 27

ANNEXE 3 : ARRÊT KÖSTER DE LA CJCE 35

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

L’actualité a mis en lumière l’obscure et méconnue procédure que le vocabulaire européen, dans sa redoutable prédilection pour le lexique technocratique, désigne sous le terme de « comitologie ». Et de « science des comités », il en faut en effet pour trouver son chemin dans le maquis des 270 comités d’experts qui aident la Commission européenne à prendre quelque 2 022 mesures d’exécution chaque année.

Car trois fois déjà en 2009 votre Commission des affaires européennes a dû déplorer l’impéritie politique de projets sortis de la lourde machinerie de l’exécutif européen.

L’Assemblée nationale, à l’initiative de M. Hervé Gaymard, a ainsi adopté en avril dernier une résolution invitant la Commission européenne à renoncer à son projet de fixation des profils nutritionnels des denrées alimentaires, qui menaçait nos productions traditionnelles en empêchant notamment aux fromages à pâte cuite d’alléguer de leur valeur nutritionnelle(2).

Quelques jours plus tard, la proposition d’autoriser l’obtention de vins rosés par coupage de vins blancs et rouges suscita un vif débat avant qu’en juin notre Commission ne rejette une proposition fixant des conditions d’aptitude médicale pour l’obtention du permis de conduire dont la sévérité risquait d’écarter de la conduite de très nombreuses personnes âgées(3).

Ces expériences malheureuses ont nourri le fantasme prospère de l’« Europe des technocrates ».

Et il est vrai qu’elles ont en commun d’avoir été soumises à ces fameux comités d’experts avant que le filtre politique n’en dégage, avec retard, les problématiques aspérités.

I. LA COMITOLOGIE, UNE MODALITÉ UTILE D’EXERCICE DES COMPÉTENCES D’EXÉCUTION DES ACTES EUROPÉENS

La comitologie n’est pas une pratique condamnable dans son principe.

La clarté, la lisibilité et la cohérence du droit européen reposent, comme le droit national, sur une nette distinction entre ce qui relève de la loi, les principes et les directions politiques, et les mesures qu’impose leur application.

Il n’est pas souhaitable que le Conseil européen et le Parlement s’épuisent à rédiger l’équivalent de nos arrêtés ministériels. Que dirions-nous d’une directive qui fixerait la circonférence des ampoules ou détaillerait à l’infini les spécifications techniques de chaque produit vendu dans le marché commun ?

Or le traité instituant les Communautés européennes réglait la question en confiant aux seuls Etats membres le pouvoir exécutif du droit communautaire.

Ce principe dût cependant être rapidement tempéré par la nécessité d’harmoniser les conditions d’exécution des actes communautaires à l’échelle de l’Union afin de préserver la cohérence des politiques européennes.

La protection des consommateurs, la loyauté de la concurrence dans l’ensemble du marché commun, ont ainsi imposé la définition de règles dont il est vite apparu hasardeux d’en laisser l’initiative à chaque Etat membre. Dans le même temps, il est devenu manifeste que le Conseil, engoncé dans les arcanes des négociations diplomatiques, ne pouvait consacrer tout son temps et toute son énergie à arbitrer les aspects annexes des politiques européennes. C’est ce qu’a reconnu la Cour de justice des Communautés européennes en 1970 (arrêt Köster) en relevant qu’« on ne saurait exiger que tous les détails des règlements soient établis par le Conseil » (annexe 3).

A. L’évolution de la comitologie : un droit de regard du Conseil et du Parlement européen de plus en plus affirmé

Dans ce contexte et malgré le silence des traités, la Commission européenne s’est vu confier la mission de plus en plus imposante au fil des années de définir des mesures d’application harmonisées des textes européens.

Néanmoins, pour donner une base légale à cette pratique, et surtout pour permettre aux Etats membres d’exercer un meilleur contrôle sur des actes qui, pour demeurer techniques, n’en concernent pas moins bien souvent des éléments importants de la vie quotidienne de 490 millions de citoyens, l’Acte unique a organisé la « comitologie » en prévoyant que l’exercice des compétences d’exécution devait être encadré par le Conseil de l’Union et soumis à la vigilance des Gouvernements. L’alinéa 4 de l’article 202 du traité instituant les Communautés européennes dispose ainsi que « le Conseil peut soumettre l’exercice de ces compétences à certaines modalités. Il peut également se réserver, dans des cas spécifiques, d’exercer directement des compétences d’exécution. Les modalités visées ci-dessus doivent répondre aux principes et règles que le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après avis du Parlement européen, aura préalablement établis ».

Depuis la fin des années 1990, les Etats membres se sont aussi accordés pour veiller à ce que le Conseil et le Parlement européen contrôlent mieux l’ensemble des textes d’exécution. Ainsi fut posé le principe que la Commission, lorsqu’elle met en application les règlements et les directives, doit travailler avec des comités représentant tous les Etats membres.

1. Un double rôle : éclairer la Commission européenne sur les enjeux pratiques auxquels peuvent se heurter les mesures d’exécution dans chaque Etat membre et alerter les gouvernements sur les difficultés posées par les actes techniques

Les comités permettent tout d’abord d’éclairer la Commission européenne sur les difficultés que sont susceptibles de poser dans chaque Etat membre les mesures d’application projetées.

En parallèle, ils doivent alerter les gouvernements sur les questions soulevées par les actes techniques, afin de renvoyer les sujets, lorsque des majorités hostiles se nouent, aux législateurs européens.

A ces fins, les deux grands principes de la procédure se sont dégagés au cours des années 1990.

En premier lieu, la Commission européenne doit soumettre toutes les mesures d’application qu’elle projette à des comités réunissant des experts des Vingt-sept. Ces derniers les approuvent ou les rejettent, à la majorité simple.

En second lieu, la portée des avis émis par les comités est proportionnée à l’importance du sujet concerné, allant d’un simple avertissement sans frais (dans le domaine du marché intérieur) au renvoi de la décision au Conseil et au Parlement européen (pour la PAC, les décisions à forts enjeux financiers ou l’ensemble des mesures touchant à la protection de la santé et de la sécurité des personnes, ou à la confidentialité des données personnelles).

2. Les procédures de comitologie

L’actuelle décision « comitologie » (décision (1999/468/CE) du Conseil du 28 juin 1999, modifiée par la décision (2006/512) du 17 juillet 2006, annexe 2), proportionne ainsi l’autorité des comités d’experts et l’intensité de l’intervention des législateurs européens aux domaines concernés de l’activité de l’Union.

La procédure qui laisse le plus de marge de manœuvre à la Commission européenne est la procédure consultative dans laquelle cette dernière se borne à « tenir le plus grand compte » des avis émis par les comités consultatifs. Elle concerne essentiellement la mise en œuvre du marché intérieur.

Viennent ensuite des procédures donnant plus de pouvoir au Conseil et au Parlement européen.

Dans la procédure de gestion, le Conseil intervient lorsque le comité s’oppose, à la majorité qualifiée, à la proposition de la Commission. Cependant, le Conseil doit parvenir à adopter, dans les trois mois qui suivent l’avis du comité, une décision alternative. A défaut, le projet initial de la Commission l’emporte. Cette procédure règne en maître dans la politique agricole commune et la politique de la pêche où existent autant de comités de gestion que de catégories de produits. Elle s’impose aussi à toute décision mettant en œuvre des programmes ayant des incidences budgétaires notables.

La procédure de réglementation va plus loin : en cas d’avis négatif du comité, seul le Conseil peut trancher, en recueillant l’opinion du Parlement européen lorsque l’acte législatif mis en œuvre relève de la codécision. Parce qu’elle donne le dernier mot au Conseil, le recours à cette voie est obligatoire pour tout acte mettant en application un élément essentiel d’une directive ou d’un règlement. Elle concerne toutes les mesures concernant la protection de la santé ou la sécurité des personnes, des animaux ou des plantes.

La procédure de sauvegarde, plus rare, permet à chaque Etat membre de déférer au Conseil la décision de la Commission européenne.

Enfin, reflétant la montée en puissance du Parlement européen, une procédure qui tend aujourd’hui à supplanter toutes les autres, la procédure de réglementation avec contrôle (PRAC). Elle présente un double avantage.

– Même lorsque le comité approuve le projet de la Commission, le Conseil (à la majorité qualifiée) et le Parlement (à la majorité absolue) disposent d’un délai de trois mois pour s’y opposer, aux seuls motifs cependant que l’acte ne respecte pas les compétences d’exécution prévue dans l’acte de base, n’est pas compatible avec le but ou le contenu de la législation, ou enfreint les principes de subsidiarité ou de proportionnalité. Remarquons à cet égard que les deux dernières conditions sont suffisamment imprécises pour encourager un large usage de ce droit de veto.

– En cas d’avis négatif du comité, les deux législateurs reprennent la main, dans des délais néanmoins brefs (deux mois pour le Conseil et quatre mois pour le Parlement à l’issue desquels, en l’absence de décision, le projet initial l’emporte).

Cette procédure a été intégrée à l’ensemble des directives et règlements qui donnent à la Commission le pouvoir d’en définir les mesures d’exécution de portée générale en en modifiant des éléments non essentiels. Ainsi, plus de 300 textes ont été adaptés entre 2006 et 2009, organisant une spectaculaire reprise en main de la comitologie par le Parlement.

B. Le maquis de la comitologie

Le caractère souvent technique du droit communautaire explique la profusion des comités et de leurs décisions.

Ainsi, 270 comités ont adopté 2 022 actes au cours de 953 réunions en 2008. Un quart de ces décisions a relevé des 28 comités agricoles, tandis que les 17 comités de la santé et de la protection des consommateurs et les 34 comités pour l’entreprise et l’industrie s’entendaient sur chacun 15 % des décisions et que l’activité des 35 comités liés aux politiques de l’environnement montait fortement en puissance avec 5 % des actes.

Depuis avril 2008, la Commission européenne met à la disposition du public, sur Internet, un registre de la comitologie qui permet d’accéder aux ordres du jour, aux projets et aux décisions de l’ensemble des comités (4).

Elle publie aussi un rapport annuel, qui reste cependant exclusivement factuel et ne fournit guère d’indications sur les difficultés politiques auxquelles ont pu se heurter les diverses procédures.

Enfin, les mesures projetées font généralement l’objet de consultation avec les organisations professionnelles concernées. Ainsi, à titre d’exemple, la levée de l’interdiction de coupage pour le vin rosé avait été soumise dès décembre 2008 à l’instance communautaire de consultation des organisations agricoles.

L’ACTIVITÉ DES COMITÉS EN 2008

Domaine
d’intervention

Nombre de comités

Nombre de réunions

Décisions

Avis

Mesures d’exécution

Entreprises et industrie

34

57

362

307

Emploi, affaires sociales et égalité des chances

5

4

21

20

Agriculture et développement rural

28

226

456

439

Energie et transports

36

60

68

63

Environnement

35

57

78

85

Recherche

6

62

168

168

Société de l’information et médias

9

28

79

79

Pêche et affaires maritimes

4

15

39

39

Marché intérieur

14

42

26

16

Politique régionale

1

9

4

0

Fiscalité et union douanière

10

114

65

55

Education et culture

7

14

71

69

Santé et protection des consommateurs

17

123

358

311

Justice, liberté et sécurité

24

37

117

106

Relations extérieures

3

4

0

0

Commerce

12

24

11

12

Elargissement

3

6

69

69

Coopération extérieure

8

38

115

110

Aide humanitaire

1

6

47

47

Statistiques

9

16

23

20

Budget

2

5

4

6

Lutte anti-fraude

1

3

3

0

Technologie de l’information

1

3

1

1

Total

270

953

2 185

2 022

II. UNE LOGIQUE DE FILIÈRE PARFOIS PRIVÉE DE COHÉRENCE POLITIQUE, QUI APPELLE UNE RÉNOVATION DE NOS MÉTHODES DE CONTRÔLE

A. Le pire des systèmes à l’exception de tous les autres ?

Dans ce contexte, le principe de la comitologie pose moins de difficulté que son application quotidienne, dont il faut d’ailleurs relativiser les imperfections.

Il importe en effet d’en envisager les alternatives.

On pourrait ainsi imaginer que les législateurs communautaires règlent dans les moindres détails les activités de l’Union, en fixant la circonférence des ampoules soumises à autorisation dans l’Union ou en définissant au jour le jour l’évolution des prix de soutien à l’agriculture, selon la propension longtemps triomphante dans notre pays à vouloir régler dans la loi ce qui relève de l’arrêté.

Outre son inanité pratique, une telle solution tendrait sans nul doute à affaiblir la qualité de la législation en noyant les parlementaires sous un flot de dispositions exclusivement techniques qui obèrerait leur capacité à se concentrer sur leur mission : fixer les principes politiques qui doivent régir l’activité européenne.

Cette difficulté se double d’un handicap inhérent à la prise de décision européenne. Les délibérations du Conseil résultent traditionnellement de coalitions mouvantes et complexes. Dans ce contexte, il n’est pas rare de voir une majorité d’Etats membres s’entendre un jour pour avancer dans une direction pour observer le lendemain une autre majorité se nouer pour désagréger ce qui avait été décidé la veille. Il est bon que le politique fixe les principes et que, sous son contrôle, les mesures d’application cohérentes et efficaces en découlent nécessairement et rapidement.

La seule autre alternative au comité d’experts serait, selon un schéma qui a longtemps prévalu, de laisser la Commission décider seule et sans consultation des mesures d’exécution.

B. La question décisive : mieux différencier ce qui doit relever des politiques et ce qui peut être tranché par les experts

Si la comitologie ne semble pas devoir être remise en cause dans son principe, il n’en reste pas moins indispensable de veiller à sa bonne application.

A cet effet, l’opportunité du recours à cette procédure doit toujours être appréciée à l’aune de deux critères :

– les mesures d’exécution projetées relèvent-elles légitimement de simples comités d’experts ? Emerge ici la question décisive de la pertinence du tracé de la frontière européenne entre les actes législatifs et celles des actes d’application ;

– les mesures adoptées sont-elles politiquement acceptables ? Là réside la question fondamentale de la qualité du contrôle politique exercé sur l’exécutif.

1. Une compétence d’exécution souvent trop étendue

a) Des délégations de pouvoir trop imprécises

Il apparaît en effet en premier lieu que le champ d’application des mesures d’exécution fixées par certains actes législatifs est souvent trop large et insuffisamment borné par des conditions et des contrôles efficaces.

Ainsi, de nombreuses directives confient à la Commission européenne la possibilité d’en adapter, modifier voire ajouter des dispositions sous les seules réserves qu’elles soient, d’une part, de nature « non essentielles », concept que la Cour de justice de l’Union européenne tend à interpréter de façon large dès lors que les mesures d’application ne contredisent pas ouvertement le texte de base, et qu’elles soient, d’autre part, motivées par des considérations aussi générales que, par exemple, la seule « évolution des connaissances scientifiques et technologiques ».

Ce véritable abandon de compétences est souvent le fruit de la complexité des négociations européennes qui expose le législateur à la tentation de se dérober à une partie de ses responsabilités.

Ainsi le projet de règlement de la Commission relatif à l’autorisation d’obtention de vin rosé par coupage : l’honnêteté impose à ce propos de relever que le règlement (n° 479/2008) du Conseil portant OCM viticole donnait précisément à la Commission européenne un véritable blanc seing pour adapter les pratiques œnologiques autorisées afin de placer les producteurs européens en position d’affronter la concurrence mondiale.

Or, dans cet exemple, il est probable que si le Conseil avait voulu aller plus loin dans la détermination de ces règles, la France aurait été mise en minorité sur la question particulière qui fit tant de bruit une année plus tard.

Dans un même esprit, M. Gérard Voisin, membre de notre commission, mène aujourd’hui un important travail (5) pour veiller à ce que le champ d’application de la comitologie défini par la future directive organisant en Europe le déploiement de systèmes de transport intelligents soit efficacement borné afin de ne pas abandonner aux experts le pouvoir souverain de trancher des sujets aussi lourds de conséquence que l’équipement des signalisations routières ou la fixation des règles régissant la conservation des données personnelles gérées par ces réseaux.

b) Les progrès induits par le traité de Lisbonne

Le traité de Lisbonne devrait résoudre une partie du problème en opérant enfin une distinction entre l’équivalent de nos ordonnances, dont la rédaction ne pourrait être confiée à la Commission que selon des critères stricts et à la condition que le Conseil et le Parlement puisse à tout moment se ressaisir de la question, des mesures d’exécution dont le périmètre serait plus précisément borné (annexe 1).

Ainsi, les nouveaux « actes législatifs délégués » créés par l’article 290 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne pourraient seuls compléter ou modifier les actes législatifs, selon des modalités strictement encadrées. Ces textes ne pourraient ainsi concerner que les éléments « non essentiels » de la directive ou du règlement.

De manière plus décisive encore, l’acte législatif de base devrait déterminer clairement les objectifs, le contenu, la portée et la durée de cette délégation de compétence. Enfin, le Parlement et le Conseil pourraient, à tout moment et à la majorité simple, révoquer la délégation en retrouvant la plénitude de leur pouvoir législatif. Apparaîtrait ainsi dans l’ordre juridique européen l’équivalent de nos ordonnances qui aujourd’hui relève abusivement de la comitologie.

L’article 291 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne pour sa part innove en confiant au Conseil et au Parlement européen le soin d’établir conjointement les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle des mesures d’exécution qui continueront à ressortir de l’actuelle comitologie.

c) Des recommandations pour un contrôle efficace de la frontière entre les actes législatifs et les mesures d’application

Pour autant, nous devons examiner avec la plus extrême vigilance les dispositions législatives fixant le périmètre des mesures d’application des textes européens.

C’est pourquoi il convient que les rapporteurs de Commission des affaires européennes veillent à ce que les directives et les règlements délimitent avec précision les frontières de la comitologie et ne s’en remettent pas aux experts pour décider de mesures qui relèvent de l’autorité politique.

Dans cet esprit, chaque communication et chaque rapport de la Commission des affaires européennes sur une directive ou un règlement devraient utilement comporter une appréciation argumentée du champ laissé au pouvoir exécutif européen.

2. Une logique de filière technique qui échappe parfois au nécessaire contrôle politique

a) Les lacunes du contrôle politique

Le second écueil de la comitologie est mieux connu.

Il tient au fonctionnement même des comités, souvent enfermés dans une logique exclusivement technique réunissant les spécialistes d’une filière et par conséquent privée d’une impulsion et d’un contrôle proprement politique, qui conduit parfois nos représentants à adopter des positions en contradiction avec les intérêts de nos concitoyens.

Il faut d’abord rétablir quelques vérités. Il est impossible de demander aux ministres, sans parler du Premier d’entre eux, de donner une instruction formelle à nos représentants pour chacune des quelques 1 000 réunions annuelles. Ce n’est même pas souhaitable. Fort heureusement, dans 99 % des cas, les décisions restent étroitement techniques et découlent, presque naturellement, de la directive ou du règlement adopté par le Parlement européen et le Conseil.

Restent les quelques rares cas qui échappent à cette logique. Et, en la matière, d’importants progrès restent devant nous. La qualité du travail de nos représentants dans les comités, en général des fonctionnaires du niveau de chef de bureau désignés pour leur expertise par les ministères techniques concernés, est à cet égard beaucoup moins en cause que les lacunes de notre circuit administratif de coordination et de contrôle des décisions.

Le Gouvernement s’efforce, il est vrai, de palier ces difficultés.

Ainsi le Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) s’est attaché depuis quelques mois à cibler son attention sur un comité particulier, le comité « climat » chargé du chantier décisif de l’application du paquet énergie-climat, en demandant à l’ensemble des participants français de lui communiquer toutes leurs intentions et toutes leurs actions.

Cependant la lucidité commande de constater que ses moyens matériels et humains ne lui permettent pas de généraliser une telle démarche à l’ensemble des comités.

b) L’implication nécessaire du Parlement

Dans ce contexte, dans son essence très similaire à la problématique de l’application des lois nationales, le Parlement peut jouer un rôle décisif, non pas en s’astreignant à un impossible contrôle tatillon de quelques 2 000 actes d’exécution mais en faisant bénéficier le Gouvernement et les institutions européennes de sa vocation à dégager les enjeux politiques.

A cette fin, l’ensemble des rapporteurs sont incités à poursuivre leur travail très en aval du règlement ou de la directive sur lequel a porté leur mission en contrôlant les principales mesures d’exécution qui les mettent en application.

à Les rapporteurs désignés sur un acte législatif européen devraient veiller à contrôler l’élaboration des principaux actes d’exécution qui lui sont liés.

à Ils pourraient utilement auditionner, en tant que de besoin, dès la publication de l’acte concerné les principaux experts français désignés par les ministères pour siéger au sein des comités d’exécution, afin d’identifier avec eux, dans une logique d’ensemble, les principales difficultés susceptibles d’apparaître au cours du processus de comitologie.

à Ce travail pourrait déboucher, dans l’année qui suit la publication d’actes législatifs les plus importants, par une communication présentée à la Commission des affaires européennes exposant l’état du processus d’application.

à En tout état de cause, les rapporteurs pourraient effectuer ce contrôle en étroite collaboration avec leurs homologues du Parlement européen, dont les capacités d’expertise sur la comitologie, réparties dans chaque commission spécialisée, ont été substantiellement renforcées.

à Enfin, des discussions on été engagées par la Commission des affaires européennes avec le ministre de l’agriculture pour déterminer le ou les comités agricoles qui pourraient faire l’objet d’une veille particulière.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 22 septembre 2009, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

M. Jacques Myard. Ce rapport présente un sujet très important, tout à fait révélateur de l’« usine à gaz » qu’est la construction européenne. Il met le doigt utilement sur des choses qui doivent être corrigés, mais il comporte un aspect utopique.

En pratique, au quotidien, les fonctionnaires des ministères dits « techniques » se rencontrent ainsi au niveau international et font des propositions, allant même parfois jusqu’à vouloir revenir sur des dispositions votées par les parlementaires. C’est le pouvoir de la technocratie ! Il faut rappeler que c’est le politique qui commande. Le problème, c’est que dans la masse annuelle considérable de ces réunions, face à des personnes qui détiennent le pouvoir de l’expertise, nous n’y arriverons pas.

Le phénomène est quantitativement démesuré. Il serait nécessaire de reposer toute la pyramide sur ses bases, mais le combat que vous proposez est perdu d’avance. Il est impossible pour notre commission de contrôler l’ensemble des mesures et décisions prises en comitologie, au mieux on ne fera que dénoncer quelques cas. J’approuve votre rapport dans ses objectifs mais les propositions qu’il comporte ne sont malheureusement pas réalisables.

Le Président Pierre Lequiller. Si le Gouvernement lui-même prend conscience qu’il faut mieux contrôler ses experts, et si nous, parlementaires, attirons l’attention sur ce problème, cela ne suffira certes pas à empêcher tout dérapage, compte tenu des milliers de décisions qui sont prises chaque année selon la procédure de comitologie, mais cela constituera une réelle avancée.

Il convient d’ailleurs de noter qu’un problème similaire existe au niveau national, avec les décrets et arrêtés en France. Ce n’est donc pas la « machine » européenne qui est seule en cause. Les discussions techniques menées à vingt-sept sont utiles. Les solutions que je préconise ne vont pas régler le problème mais vont dans la bonne direction.

M. Michel Piron. Effectivement, il est utile que notre commission se saisisse de ce problème, et il faudra qu’elle en rappelle l’existence par la suite et qu’elle communique sur ce sujet, qui est lié à la question plus vaste des modes de gouvernance. Il n’est pas sûr que ceux-ci puissent être systématiquement identiques à tous les niveaux de gouvernement. La subsidiarité n’est pas qu’une question formelle ou technique, c’est une vraie question de fond : la gouvernance de l’Europe repose-t-elle uniquement sur une uniformisation des règles ou bien sur un partage harmonieux des responsabilités ? Comme le remarquait Spinoza, toute idée perd en compréhension ce qu’elle gagne en extension.

Au niveau national, ces problèmes peuvent déjà avoir des conséquences catastrophiques ; à l’échelle européenne, c’est encore plus grave. Trop souvent le champ de la règle s’étend exagérément tandis que son esprit n’est pas toujours servi par l’existence d’une règle unique. On fabrique ainsi du droit, mais quels droits ? L’interrogation politique doit reprendre toute sa place. Quand on veut être éclairé sur des expertises, on en est souvent réduit à faire appel à d’autres experts, à des contre-expertises. Le rôle du politique est alors d’arbitrer.

Le questionnement soulevé par ce rapport est légitime et mérite d’être décliné dans d’autres domaines.

M. Daniel Garrigue. Comme l’avait relevé M. Michel Barnier devant notre Commission, à Bruxelles les choses ne se décident pas, elles se négocient. On a tendance à appréhender la comitologie selon notre système de hiérarchie des normes, alors que dans ce processus la négociation se poursuit en permanence, à chaque niveau. La seule solution consiste, d’une part, à ce que les exécutifs nationaux rendent compte clairement à leurs parlements nationaux, et d’autre part, à ce que l’intervention des parlements nationaux ait lieu le plus en amont et le plus en aval possible dans le processus communautaire, ce qui pourrait même aller jusqu’à une forme de codécision.

M. Pierre Bourguignon. Quelle que soit la procédure d’élaboration de la règle, le contrôle est un élément essentiel de l’activité parlementaire, qui n’est d’ailleurs pas une spécificité des institutions européennes. Ainsi depuis une décennie, notre Commission des finances met en œuvre ce contrôle dans le cadre des pouvoirs dévolus aux rapporteurs spéciaux par l’article 164-IV de l’ordonnance de 1958 portant loi de finances pour 1959. J’ai eu l’occasion de l’exercer en exigeant des informations sur place à la Direction du Trésor. La base de notre contrôle est de faire dire aux experts pourquoi ils ont pris telle ou telle décision ou de quelle façon la négociation a abouti. Nos parlements nationaux doivent appliquer cette dimension du contrôle dans le cadre européen. Nous devons renforcer ce travail de contrôle selon les principes établis par la loi organique relative aux lois de finances, en demandant des explications et en procédant à des vérifications, sans d’ailleurs que cela implique un jugement.

M. Gérard Voisin. Contrairement à ce que pense M. Jacques Myard, ce contrôle n’est pas utopique mais est relativement aisé à mettre en œuvre. En fait, chacun de nous fait de la comitologie sans le savoir, par exemple dans nos mairies. Les effets négatifs de la comitologie sont faciles à renverser. Pour cela, les parlements nationaux doivent travailler en amont. S’il est compliqué, voire inopportun, de supprimer la comitologie, on peut la contrôler. Notre Parlement a en mains cette mission. Je l’ai expérimenté en matière d’ « intelligence transports systems » avec l’aide des Allemands et du ministère des transports. Il nous revient d’expliquer tant les effets bénéfiques de la comitologie que ses effets néfastes.

Le Président Pierre Lequiller. Je suis tout à fait d’accord avec ces derniers propos. Il ne s’agit pas de contrer la comitologie mais d’assurer une plus grande transparence et de la contrôler. Cette démarche peut être et doit être entreprise par le Gouvernement et par le Parlement. Quels sont les outils dont nous disposons à cet effet ? Comme l’a souligné M. Daniel Garrigue, en matière européenne, la codécision est nécessaire. Mais il est nécessaire que les parlements soient informés le plus en amont possible des textes en préparation. J’ai d’ailleurs donné des instructions en ce sens à l’antenne de notre commission à Bruxelles afin que soit assurée une veille permanente. Il serait également utile de travailler de façon plus régulière avec les députés européens. Ils sont certes invités à toutes nos réunions mais ne viennent pas, nos emplois du texte respectifs étant difficilement compatibles. Aussi allons nous allons faciliter le dialogue avec nos collègues européens en développant la visioconférence. Par ailleurs, nous les auditionnerons. L’audition de M. Alain Lamassoure est d’ores et déjà prévue et nous envisageons celles de Mmes Pervenche Berès et Eva Joly, ainsi que celle des coordonnateurs des groupes.

Cependant il est évident que le Parlement ne peut pas savoir tout ce qui se prépare dans le secret des couloirs européens ni dans celui des bureaux des ministères.

M. Michel Piron a tout à fait raison quand il dit que des progrès doivent être réalisés en matière de contrôle de subsidiarité. Nous avons déjà mis au point un tel contrôle à travers notre équipe « subsidiarité » constituée par MM. Jérôme Lambert et Didier Quentin. Nous allons nous orienter vers un système encore plus approprié dans lequel le député spécialiste du fond du sujet concerné sera chargé d’examiner le texte sous l’angle de la subsidiarité, en lien avec les rapporteurs subsidiarité. Nous avons mis en place cette procédure par anticipation du traité de Lisbonne qui, s’il entre en vigueur, mettra en place un système contraignant, permettant de prendre en compte le point de vue des parlements nationaux. M. Manuel Barroso a d’ores et déjà décidé de transmettre les textes législatifs via les parlements nationaux et de répercuter leur avis à la Commission européenne. Si un certain nombre de parlements nationaux émettent un même avis négatif sur la subsidiarité d’un texte, la Commission européenne sera obligée de revoir sa copie. A travers la COSAC, un système Intranet permet de suivre l’avis des différents parlements.

Comme l’indiquait M. Pierre Bourguignon, il est également indispensable d’exercer un contrôle a posteriori. Dans cette optique, l’amendement « Lambert » à notre nouveau règlement permet, lors des semaines de contrôle à l’Assemblée, de consacrer une journée aux questions européennes.

M. Jacques Myard. S’agissant du contrôle de subsidiarité, l’avis négatif de dix Etats est nécessaire. L’Europe s’est élargie mais elle doit maintenant rétrécir son champ d’action pour s’en tenir à l’essentiel.

ANNEXES

ANNEXE 1 :
TABLEAU COMPARATIF DES DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXÉCUTION DES ACTES EUROPÉENS DANS LE TRAITÉ INSTITUANT LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET LE TRAITÉ SUR LE FONCTIONNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE DANS SA RÉDACTION ISSUE DU TRAITÉ DE LISBONNE

Traité instituant les Communautés européennes


Article 202

Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne

Article 290

En vue d’assurer la réalisation des objets fixés par le présent traité et dans les conditions prévues par celui-ci, le Conseil […] confère à la Commission, dans les actes qu’il adopte, les compétences d’exécution des règles qu’il établit. Le Conseil peut soumettre l’exercice de ces compétences à certaines modalités. Il peut également se réserver, dans des cas spécifiques, d’exercer directement des compétences d’exécution. Les modalités visées ci-dessus doivent répondre aux principes et règles que le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après avis du Parlement européen, aura préalablement établis.

1. Un acte législatif peut déléguer à la Commission le pouvoir d’adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l’acte législatif.

Les actes législatifs délimitent explicitement les objectifs, le contenu, la portée et la durée de la délégation de pouvoir. Les éléments essentiels d’un domaine sont réservés à l’acte législatif et ne peuvent donc pas faire l’objet d’une délégation de pouvoir.

2. Les actes législatifs fixent explicitement les conditions auxquelles la délégation est soumise, qui peuvent être les suivantes:

a) le Parlement européen ou le Conseil peut décider de révoquer la délégation;

b) l’acte délégué ne peut entrer en vigueur que si, dans le délai fixé par l’acte législatif, le Parlement européen ou le Conseil n’exprime pas d’objections.

Aux fins des points a) et b), le Parlement européen statue à la majorité des membres qui le composent et le Conseil statue à la majorité qualifiée.

3. L’adjectif "délégué" ou "déléguée" est inséré dans l’intitulé des actes délégués.

 
 
 
 
 
 
 

Article 291 (inséré)

 

1. Les États membres prennent toutes les mesures de droit interne nécessaires pour la mise en œuvre des actes juridiquement contraignants de l’Union.

 

2. Lorsque des conditions uniformes d’exécution des actes juridiquement contraignants de l’Union sont nécessaires, ces actes confèrent des compétences d’exécution à la Commission ou, dans des cas spécifiques dûment justifiés et dans les cas prévus aux articles 24 et 26 du traité sur l’Union européenne, au Conseil.

 

3. Aux fins du paragraphe 2, le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire, établissent au préalable les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission.

 

4. Le mot « d’exécution » est inséré dans l’intitulé des actes d’exécution.

ANNEXE 2 :
DÉCISION DU CONSEIL DU 28 JUIN 1999 FIXANT LES MODALITÉS DE L’EXERCICE DES COMPÉTENCES D’EXÉCUTION CONFÉRÉES À LA COMMISSION

(1999/468/CE)

(JO L 184 du 17.7.1999, p. 23)

Décision du Conseil 2006/512/CE, du 17 juillet 2006 L 200 11 22.7.2006

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 202, troisième tiret,

vu la proposition de la Commission,

vu l’avis du Parlement européen,

considérant ce qui suit

(1) le Conseil, dans les actes qu’il adopte, confère à la Commission les compétences d’exécution des règles qu’il établit; il peut soumettre l’exercice de ces compétences à certaines modalités et il peut également se réserver, dans des cas spécifiques et motivés, d’exercer directement des compétences d’exécution ;

(2) le Conseil a arrêté la décision 87/373/CEE du 13 juillet 1987 fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission ; cette décision a prévu un nombre limité de types de modalités auxquelles cet exercice peut être soumis ;

(3) par la déclaration n°  31 annexée à l’acte final de la conférence intergouvernementale ayant adopté le traité d’Amsterdam, la Commission a été invitée à présenter au Conseil une proposition modifiant la décision 87/373/CEE ;

(4) pour des raisons de clarté, il a été jugé préférable de remplacer la décision 87/373/CEE par une décision nouvelle, plutôt que de la modifier, et par conséquent de l’abroger ;

(5) dans le souci d’une plus grande cohérence et prévisibilité dans le choix du type de comité, la présente décision vise en premier lieu à définir les critères applicables au choix de la procédure de comité, étant entendu que ces critères ne revêtent pas un caractère contraignant à l’exception de ceux régissant la procédure de réglementation avec contrôle ;

(6) à cet égard, il convient de recourir à la procédure de gestion pour les mesures de gestion telles que celles relatives à l’application de la politique agricole commune et de la politique commune de la pêche ou celles relatives à la mise en oeuvre de programmes ayant des incidences budgétaires notables; il convient que ces mesures de gestion soient arrêtées par la Commission selon une procédure garantissant une prise de décision dans des délais appropriés; toutefois, lorsque le Conseil est saisi dans le cas de mesures non urgentes, il appartient à la Commission d’user de son pouvoir d’appréciation pour différer l’application des mesures prises ;

(7) il convient de recourir à la procédure de réglementation pour les mesures de portée générale ayant pour objet de mettre en application les éléments essentiels d’actes de base, notamment les mesures concernant la protection de la santé ou la sécurité des personnes, des animaux ou des plantes, ainsi que pour les mesures ayant pour objet d’adapter ou de mettre à jour certaines dispositions non essentielles d’un acte de base; il convient d’arrêter ces mesures d’exécution selon une procédure efficace, dans le plein respect du droit d’initiative de la Commission en matière législative ;

(7bis) il est nécessaire de recourir à la procédure de réglementation avec contrôle pour les mesures de portée générale ayant pour objet de modifier des éléments non essentiels d’un acte adopté selon la procédure visée à l’article 251 du traité, y compris en supprimant certains de ces éléments ou en le complétant par l’ajout de nouveaux éléments non essentiels. Cette procédure doit permettre aux deux branches de l’autorité législative d’effectuer un contrôle préalable à l’adoption de telles mesures. Les éléments essentiels d’un acte législatif ne peuvent être modifiés que par le législateur sur la base du traité ;

(8) il convient de recourir à la procédure consultative dans tous les cas où elle est considérée comme la plus appropriée; la procédure consultative continuera à être utilisée dans les cas où elle est actuellement d’application ;

(9) la présente décision vise, en deuxième lieu, à simplifier les modalités d’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission ainsi qu’à assurer une plus grande participation du Parlement européen dans les cas où l’acte de base conférant des compétences d’exécution à la Commission a été adopté selon la procédure prévue à l’article 251 du traité; à cet effet, il a été jugé nécessaire de réduire le nombre des procédures et de les adapter en tenant compte des compétences respectives des institutions concernées, et notamment de permettre au Parlement européen, lorsqu’il considère, respectivement, qu’un projet de mesure soumis à un comité ou une proposition présentée au Conseil dans le cadre de la procédure de réglementation excède les compétences d’exécution prévues dans l’acte de base, de voir son avis pris en considération par la Commission ou le Conseil, selon le cas ;

(10) la présente décision vise, en troisième lieu, à assurer une meilleure information du Parlement européen en prévoyant qu’il y a lieu que la Commission informe régulièrement ce dernier des travaux des comités, qu’elle transmette au Parlement européen des documents liés aux travaux des comités et qu’elle informe le Parlement européen lorsqu’elle présente au Conseil des mesures ou des projets de mesures à prendre; une attention particulière sera portée à l’information du Parlement européen sur les travaux des comités dans le cadre de la procédure de réglementation avec contrôle, afin d’assurer qu’une décision du Parlement européen puisse être prise dans le délai prévu ;

(11) la présente décision vise, en quatrième lieu, à assurer une meilleure information du public sur les procédures de comité et, par conséquent, à rendre, en ce qui concerne l’accès du public aux documents, les principes et les conditions applicables à la Commission également applicables aux comités, à établir une liste de tous les comités qui assistent la Commission dans l’exercice des compétences d’exécution ainsi qu’un rapport annuel, destiné à être publié, sur les travaux des comités, et à prévoir la publication dans un registre de toutes les références aux documents relatifs aux comités qui ont été transmis au Parlement européen ;

(12) les procédures spécifiques de comités, créées dans le cadre de l’application de la politique commerciale commune et des règles de concurrence prévues par les traités, qui ne sont pas actuellement fondées sur la décision 87/373/CEE, ne sont en aucune façon affectées par la présente décision,

DÉCIDE :

Article premier

Les compétences d’exécution, à l’exception des cas spécifiques et motivés où l’acte de base réserve au Conseil le droit d’exercer directement certaines d’entre elles, sont conférées à la Commission conformément aux dispositions prévues à cet effet dans l’acte de base. Ces dispositions précisent les éléments essentiels des compétences ainsi conférées. Lorsque l’acte de base soumet l’adoption des mesures d’exécution à certaines modalités procédurales, ces modalités sont conformes aux procédures prévues aux articles 3, 4, 5, 5bis et 6.

Article 2

Sans préjudice du paragraphe 2, le choix des modalités procédurales pour l’adoption des mesures d’exécution s’inspire des critères suivants :

a) les mesures de gestion telles que celles relatives à l’application de la politique agricole commune et de la politique commune de la pêche ou celles relatives à la mise en oeuvre de programmes ayant des incidences budgétaires notables devraient être arrêtées selon la procédure de gestion.

b) Les mesures de portée générale visant à mettre en application les éléments essentiels d’un acte de base, y compris les mesures concernant la protection de la santé ou de la sécurité des personnes, des animaux ou des plantes, devraient être arrêtées selon la procédure de réglementation. Lorsqu’un acte de base prévoit que certains éléments non essentiels de cet acte peuvent être adaptés ou mis à jour par la voie de procédures d’exécution, ces mesures sont arrêtées selon la procédure de réglementation.

c) Sans préjudice des points a) et b), la procédure consultative est appliquée chaque fois qu’elle est considérée comme la plus appropriée.

Lorsqu’un acte de base adopté selon la procédure visée à l’article 251 du traité prévoit l’adoption de mesures de portée générale ayant pour objet de modifier des éléments non essentiels de cet acte, y compris en supprimant certains de ces éléments ou en le complétant par l’ajout de nouveaux éléments non essentiels, ces mesures sont arrêtées selon la procédure de réglementation avec contrôle.

Article 3

Procédure consultative

1. La Commission est assistée par un comité consultatif composé des représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission.

2. Le représentant de la Commission soumet au comité un projet des mesures à prendre. Le comité émet son avis sur ce projet dans un délai que le président peut fixer en fonction de l’urgence de la question en cause, le cas échéant en procédant à un vote.

3. L’avis du comité est inscrit au procès-verbal; en outre, chaque État membre a le droit de demander que sa position figure à ce procès verbal.

4. La Commission tient le plus grand compte de l’avis émis par le comité. Elle informe le comité de la façon dont elle a tenu compte de cet avis.

Article 4

Procédure de gestion

1. La Commission est assistée par un comité de gestion composé des représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission.

2. Le représentant de la Commission soumet au comité un projet des mesures à prendre. Le comité émet son avis sur ce projet dans un délai que le président peut fixer en fonction de l’urgence de la question en cause. L’avis est émis à la majorité prévue à l’article 205, paragraphes 2 et 4, du traité pour l’adoption des décisions que le Conseil est appelé à prendre sur proposition de la Commission. Lors des votes au sein du comité, les voix des représentants des États membres sont affectées de la pondération définie à l’article précité. Le président ne prend pas part au vote.

3. La Commission arrête, sans préjudice de l’article 8, des mesures qui sont immédiatement applicables. Toutefois, si elles ne sont pas conformes à l’avis émis par le comité, ces mesures sont aussitôt communiquées par la Commission au Conseil. Dans ce cas, la Commission peut différer l’application des mesures décidées par elle pour une période à préciser dans chaque acte de base, mais qui ne dépasse en aucun cas trois mois à compter de la date de cette communication.

4. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut prendre une décision différente pendant la période prévue au paragraphe 3.

Article 5

Procédure de réglementation

1. La Commission est assistée par un comité de réglementation composé des représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission.

2. Le représentant de la Commission soumet au comité un projet des mesures à prendre. Le comité émet son avis sur ce projet dans un délai que le président peut fixer en fonction de l’urgence de la question en cause. L’avis est émis à la majorité prévue à l’article 205, paragraphes 2 et 4, du traité pour l’adoption des décisions que le Conseil est appelé à prendre sur proposition de la Commission. Lors des votes au sein du comité, les voix des représentants des États membres sont affectées de la pondération définie à l’article précité. Le président ne prend pas part au vote.

3. La Commission arrête, sans préjudice de l’article 8, les mesures envisagées lorsqu’elles sont conformes à l’avis du comité.

4. Lorsque les mesures envisagées ne sont pas conformes à l’avis du comité, ou en l’absence d’avis, la Commission soumet sans tarder au Conseil une proposition relative aux mesures à prendre et en informe le Parlement européen.

5. Si le Parlement européen considère qu’une proposition présentée par la Commission en vertu d’un acte de base adopté selon la procédure prévue à l’article 251 du traité excède les compétences d’exécution prévues dans cet acte de base, il informe le Conseil de sa position.

6. Le Conseil peut, le cas échéant à la lumière de cette position éventuelle, statuer à la majorité qualifiée sur la proposition, dans un délai qui sera fixé dans chaque acte de base, mais qui ne saurait en aucun cas dépasser trois mois à compter de la saisine du Conseil.

Si, dans ce délai, le Conseil a indiqué, à la majorité qualifiée, qu’il s’oppose à la proposition, la Commission réexamine celle-ci. Elle peut soumettre au Conseil une proposition modifiée, soumettre à nouveau sa proposition ou présenter une proposition législative sur la base du traité.

Si, à l’expiration de ce délai, le Conseil n’a pas adopté les mesures d’application proposées ou s’il n’a pas indiqué qu’il s’opposait à la proposition de mesures d’application, les mesures d’application proposées sont arrêtées par la Commission.

Article 5 bis

Procédure de réglementation avec contrôle

1. La Commission est assistée par un comité de réglementation avec contrôle composé des représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission.

2. Le représentant de la Commission soumet au comité un projet des mesures à prendre. Le comité émet son avis sur ce projet dans un délai que le président peut fixer en fonction de l’urgence de la question en cause. L’avis est émis à la majorité prévue à l’article 205, paragraphes 2 et 4, du traité pour l’adoption des décisions que le Conseil est appelé à prendre sur proposition de la Commission. Lors des votes au sein du comité, les voix des représentants des Etats membres sont affectées de la pondération définie à l’article précité. Le président ne prend pas part au vote.

3. Lorsque les mesures envisagées par la Commission sont conformes à l’avis du comité, la procédure suivante s’applique :

a) la Commission soumet sans tarder le projet de mesures au Parlement européen et au Conseil pour contrôle ;

b) le Parlement européen, statuant à la majorité des membres qui le composent, ou le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peuvent s’opposer à l’adoption dudit projet par la Commission, tout en motivant leur opposition par l’indication que le projet de mesures soumis par la Commission excède les compétences d’exécution prévues dans l’acte de base, ou que ce projet n’est pas compatible avec le but ou le contenu de l’acte de base ou ne respecte pas les principes de subsidiarité ou de proportionnalité ;

c) si, dans un délai de trois mois à compter de leur saisine, le Parlement européen ou le Conseil s’opposent au projet de mesures, celles-ci ne sont pas arrêtées par la Commission. Dans ce cas, la Commission peut soumettre au comité un projet de mesures modifié ou présenter une proposition législative sur la base du traité ;

d) si, à l’expiration de ce délai, ni le Parlement européen, ni le Conseil, ne se sont opposés au projet de mesures, celles-ci sont arrêtées par la Commission.

4. Lorsque les mesures envisagées par la Commission ne sont pas conformes à l’avis du comité, ou en l’absence d’avis, la procédure suivante s’applique :

a) la Commission soumet sans tarder une proposition relative aux mesures à prendre au Conseil et la transmet en même temps au Parlement européen ;

b) le Conseil statue à la majorité qualifiée sur cette proposition dans un délai de deux mois à compter de sa saisine ;

c) si, dans ce délai, le Conseil s’oppose à la majorité qualifiée aux mesures proposées, celles-ci ne sont pas arrêtées. Dans ce cas, la Commission peut soumettre au Conseil une proposition modifiée ou présenter une proposition législative sur la base du traité ;

d) si le Conseil envisage d’adopter les mesures proposées, il les soumet sans tarder au Parlement européen. Si le Conseil ne statue pas dans le délai de deux mois précité, la Commission soumet sans tarder les mesures au Parlement européen ;

e) le Parlement européen, statuant à la majorité des membres qui le composent dans un délai de quatre mois à compter de la transmission de la proposition conformément au point a), peut s’opposer à l’adoption des mesures en cause, tout en motivant son opposition par l’indication que les mesures proposées excèdent les compétences d’exécution prévues dans l’acte de base, ou que ces mesures ne sont pas compatibles avec le but ou le contenu de l’acte de base, ou ne respectent pas les principes de subsidiarité ou de proportionnalité ;

f) si, dans ce délai, le Parlement européen s’oppose aux mesures proposées, celles-ci ne sont pas arrêtées. Dans ce cas, la Commission peut soumettre au comité un projet de mesures modifié ou présenter une proposition législative sur la base du traité ;

g) si, à l’expiration du délai précité, le Parlement européen ne s’est pas opposé aux mesures proposées, celles-ci sont arrêtées par le Conseil ou par la Commission selon le cas.

5. Par dérogation aux paragraphes 3 et 4, un acte de base peut prévoir, dans des cas exceptionnels dûment justifiés :

a) que les délais prévus aux paragraphes 3c), 4b) et 4e) sont prorogés d’un mois supplémentaire lorsque la complexité des mesures le justifie; ou

b) que les délais prévus aux paragraphes 3c), 4b) et 4e) sont abrégés lorsque des raisons d’efficacité le justifient.

6. Un acte de base peut prévoir que, dans le cas où, pour des raisons d’urgence impérieuses, les délais de la procédure de réglementation avec contrôle visés aux paragraphes 3, 4 et 5 ne peuvent pas être respectés, la procédure suivante s’applique :

a) lorsque les mesures envisagées par la Commission sont conformes à l’avis du comité, celle-ci arrête ces mesures, qui sont immédiatement mises en oeuvre. Elle les communique sans tarder au Parlement européen et au Conseil ;

b) dans un délai d’un mois à compter de ladite communication, le Parlement européen statuant à la majorité des membres qui le composent, ou le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peuvent s’opposer aux mesures arrêtées par la Commission tout en motivant leur opposition par l’indication que les mesures excèdent les compétences d’exécution prévues dans l’acte de base, ou que les mesures ne sont pas compatibles avec le but ou le contenu de l’acte de base, ou ne respectent pas les principes de subsidiarité ou de proportionnalité ;

c) en cas d’opposition du Parlement européen ou du Conseil, la Commission abroge les mesures. Elle peut cependant maintenir en vigueur les mesures à titre provisoire si des raisons de protection de la santé, de la sécurité ou de l’environnement le justifient. Dans ce cas, elle présente sans tarder au comité un projet modifié de mesures ou une proposition législative sur la base du traité. Les mesures provisoires restent en vigueur jusqu’à ce qu’elles soient remplacées par un acte définitif.

Article 6

Procédure de sauvegarde

Lorsque l’acte de base confère à la Commission le pouvoir de décider de mesures de sauvegarde, la procédure ci-après peut être appliquée :

a) la Commission communique au Conseil et aux États membres toute décision relative à des mesures de sauvegarde. Il peut être prévu que la Commission, avant d’arrêter sa décision, consulte les États membres selon des modalités à définir dans chaque cas.

b) Tout État membre peut déférer au Conseil la décision de la Commission, dans un délai à déterminer dans l’acte de base en question.

c) Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut prendre une décision différente dans un délai à déterminer dans l’acte de base en question.

Il peut également être prévu dans l’acte de base que le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut confirmer, modifier ou abroger la décision arrêtée par la Commission et que, si le Conseil n’a pas statué dans le délai précité, la décision de la Commission est réputée révoquée.

Article 7

1. Chaque comité adopte son règlement intérieur sur proposition de son président, sur la base d’un règlement intérieur type qui est publié au Journal officiel des Communautés européennes.

Les comités existants adaptent, dans la mesure nécessaire, leur règlement intérieur au règlement intérieur type.

2. Les principes et les conditions concernant l’accès du public aux documents qui sont applicables à la Commission s’appliquent aux comités.

3. Le Parlement européen est régulièrement tenu informé par la Commission des travaux des comités selon les modalités qui assurent la transparence du système de transmission et une identification des informations transmises et des différentes étapes de la procédure.

A cet effet, il reçoit les ordres du jour des réunions, les projets soumis aux comités concernant des mesures d’exécution des actes arrêtés selon la procédure visée à l’article 251 du traité, ainsi que le résultat des votes, les comptes rendus sommaires des réunions et les listes des autorités et organismes auxquels appartiennent les personnes désignées par les États membres pour les représenter. Le Parlement européen est également tenu informé de toute transmission par la Commission au Conseil de mesures ou de propositions relatives aux mesures à prendre.

4. La Commission publie au Journal officiel des Communautés européennes, dans les six mois à compter de la prise d’effet de la présente décision, une liste de tous les comités chargés d’assister la Commission dans l’exercice de ses compétences d’exécution. Cette liste précise, pour chaque comité, le ou les actes de base au titre desquels le comité est institué. À compter de l’an 2000, la Commission publiera également un rapport annuel sur les travaux des comités.

5. Les références de tous les documents transmis au Parlement européen en application du paragraphe 3 sont rendues publiques dans un registre qui sera constitué en 2001 par la Commission.

Article 8

Lorsque le Parlement européen indique, par une résolution motivée, qu’un projet de mesures d’exécution, dont l’adoption est envisagée et qui a été soumis à un comité en vertu d’un acte de base adopté selon la procédure visée à l’article 251 du traité, excéderait les compétences d’exécution prévues dans l’acte de base, la Commission réexamine ce projet. La Commission peut, compte tenu de cette résolution, dans le respect des délais de la procédure en cours, soumettre au comité un nouveau projet de mesures, poursuivre la procédure ou présenter au Parlement européen et au Conseil une proposition sur la base du traité.

La Commission informe le Parlement européen et le comité des suites qu’elle entend donner à la résolution du Parlement européen ainsi que de leurs raisons.

Article 9

La décision 87/373/CEE est abrogée.

Article 10

La présente décision prend effet le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

ANNEXE 3 :
ARRÊT KÖSTER DE LA CJCE

Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 17 décembre 1970. - Einfuhr und Vorratsstelle für Getreide und Futtermittel contre Köster et Berodt & Co. - Demande de décision préjudicielle : Hessischer Verwaltungsgerichtshof - Allemagne. - Affaire 25-70.

Sommaire

1. l’article 43, paragraphe 2, alinéa 3 est respecte des lors que les éléments essentiels des règlements agricoles sont arrêtés par le Conseil conformément à la procédure prévue par la disposition citée. Par contre, les dispositions d’exécution des règlements de base peuvent être arrêtées suivant une procédure différente de celle de l’article 43, soit par le Conseil lui-même, soit par la Commission en vertu d’une habilitation conforme a l’article 155.

2. sans fausser la structure communautaire et l’équilibre institutionnel, le mécanisme du comite de gestion permet au Conseil d’attribuer à la Commission un pouvoir d’exécution d’une étendue appréciable, sous réserve d’évoquer éventuellement la décision. La légitimité de la procédure du comité de gestion, selon les articles 25 et 26 du règlement n° 19, ne saurait des lors être contestée au regard de la structure institutionnelle de la communauté.

3. compte tenu du système et des finalités de l’article 16, paragraphe 3, du règlement n° 19, la Commission était habilitée a inclure dans le règlement n° 102/64, en ce qui concerne les certificats d’exportation, les dispositions relatives à l’obligation d’exporter et au cautionnement qui font l’objet des articles 1 et 7, toutes dispositions destinées à compléter les mesures fragmentaires prévues par ledit article 16.

4. le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour de justice assure le respect.

5. l’exigence, par les règlements agricoles de la communauté, de certificats d’importation et d’exportation comportant, pour les bénéficiaires, l’engagement d’exécuter les opérations projetées sous la garantie d’un cautionnement constitue un moyen à la fois nécessaire et approprié au sens des articles 40, paragraphe 3, et 43 du traite CEE en vue de permettre aux autorités compétentes de déterminer de la manière la plus efficace leurs interventions sur le marche des céréales. Le régime de ces certificats ne porte atteinte à aucun droit fondamental.

6. la notion de force majeure retenue par les règlements agricoles n’est pas limitée a celle d’impossibilité absolue, mais doit être entendue dans le sens de circonstances anormales, étrangères à l’importateur ou à l’exportateur, et dont les conséquences n’auraient pu être évitées qu’au prix de sacrifices excessifs, malgré toutes les diligences déployées (arrêt du 11 juillet 1968, affaire 4-68, recueil, xiv-1968, p. 563).

7. en limitant aux cas de force majeure l’annulation de l’engagement d’exporter et la libération de la caution, le législateur communautaire a pris une disposition qui, sans imposer une charge indue aux importateurs ou aux exportateurs, est appropriée en vue d’assurer le fonctionnement normal de l’organisation du marche commun des céréales, dans l’intérêt général tel que défini par l’article 39 du traité.

Parties

dans l’affaire 25-70

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l’article 177 du traité CEE, par le hessischer verwaltungsgerichtshof (Cour administrative du land de hesse) a kassel et tendant a obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre einfuhr - und vorratsstelle fuer getreide und futtermittel (office d’importation et de stockage pour les cereales et les fourrages) de francfort-sur-le-main, et koester, berodt et co. ayant son siege a Hambourg,

Objet du litige

une décision à titre préjudiciel sur la validité du règlement n° 102/64/CEE de la Commission, du 28 juillet 1964, relatif aux certificats d ‘ importation et d ‘ exportation pour les céréales, les produits transformes à base de céréales, le riz, les brisures et les produits transformes a base de riz,

Motifs de l’arrêt

1 attendu que, par ordonnance du 21 avril 1970, parvenue à la Cour le 28 mai 1970, le hessischer verwaltungsgerichtshof a demandé à la Cour, en vertu de l‘article 177 du trait2 CEE, de se prononcer 0 titre préjudiciel sur "la validité du règlement n° 102/64/CEE de la Commission, du 28 juillet 1964, relatif aux certificats d ‘ importation et d ‘ exportation pour les céréales, les produits transformés à base de céréales, le riz, les brisures et les produits transformes a base de riz (jo. 1964, p. 2125), et notamment sur la question de savoir si les articles 1 et 7 dudit règlement sont valides en tant qu ‘ ils concernent les certificats d’exportation et les cautions constituées en vue de l’obtention des certificats d’exportation" ;

2 attendu qu’il apparaît de l’ordonnance de renvoi que la question posée a été soulevée dans le cadre d’une procédure d’appel contre un jugement rendu par le verwaltungsgericht (tribunal administratif) de Francfort-sur-le-Main, portant annulation d’une décision de la einfuhr - und vorratsstelle fuer getreide und futtermittel qui avait déclaré acquise une caution à défaut, par la défenderesse, d’avoir réalisé dans les délais une exportation couverte par un certificat délivre en vertu de l’article 7 du règlement n° 102/64 ;

que, compte tenu tant que la motivation du jugement de première instance que des contestations soulevées en appel par la défenderesse au principal en ce qui concerne la régularité du régime de cautionnement fixe par les articles 1 et 7 du règlement n° 102/64, le hessischer verwaltungsgerichtshof a précisé sa question au moyen de quatre questions subordonnées qu’il convient de considérer séparément ;

1 - sur la question relative à la procédure "du comite de gestion"

3 attendu qu’il est d’abord demandé à la Cour s’il faut considérer comme contraire au traité CEE la procédure prévue a l’article 26 du règlement n° 19 du Conseil, du 4 avril 1962, portant établissement graduel d’une organisation commune des marchés dans le secteur des céréales (Jo 1962, p . 933), en application de laquelle a été arrêté le règlement n° 102/64 de la Commission et si cette procédure est notamment compatible avec les articles 43, paragraphe 2, 155, 173, 177 et 189, alinéa 1 du traite CEE ;

4 attendu que cette question concerne la légalité de la procédure dite "du comite de gestion" introduite par les articles 25 et 26 du règlement n° 19 et reprise par de nombreux autres règlements agricoles ;

que les dispositions susvisées du traité font reconnaître que la question posée concerne plus particulièrement la compatibilité de la procédure du comite de gestion avec la structure communautaire et l’équilibre institutionnel au regard tant des rapports entre institutions que de l’exercice de leurs pouvoirs respectifs ;

5 attendu qu’il est prétendu, en premier lieu, que la compétence pour arrêter le régime litigieux aurait appartenu au Conseil qui, aux termes de l’article 43, paragraphe 2, alinéa 3, du traité, aurait dû statuer sur proposition de la Commission et après consultation de l’assemblée et que des lors la procédure suivie aurait dérogé aux procédures et compétences déterminées par cette disposition du traite ;

6 attendu que tant le système législatif du traité, reflète notamment par l’article 155, dernier tiret, que la pratique constante des institutions communautaires établissent, conformément aux conceptions juridiques reçues dans tous les Etats membres, une distinction entre les mesures qui trouvent directement leur base dans le traite même et le droit dérivé destiné à assurer leur exécution ;

qu’on ne saurait donc exiger que tous les détails des règlements concernant la politique agricole commune soient établis par le Conseil selon la procédure de l’article 43 ;

qu’il est satisfait à cette disposition des lors que les éléments essentiels de la matière à régler a été arrêtés conformément à la procédure qu’elle prévoit ;

que, par contre, les dispositions d’exécution des règlements de base peuvent être arrêtées suivant une procédure différente de celle de l’article 43, soit par le Conseil lui-même, soit par la Commission en vertu d’une habilitation conforme à l’article 155 ;

7 que les mesures faisant l’objet du règlement d’application n° 102/64 de la Commission ne dépassent pas le cadre de l’exécution des principes du règlement de base n° 19 ;

que la Commission a donc pu être valablement habilitée, par le règlement n° 19, à prendre les mesures d’application en cause, dont la validité ne saurait dès lors être contestée au regard des exigences de l’article 43, paragraphe 2, du traite ;

8 attendu qu’en second lieu, la défenderesse au principal critique la procédure "du comite de gestion" du fait qu’elle constituerait une ingérence dans le droit de décision de la Commission, au point de mettre en cause l’indépendance de cette institution ;

que, pour le surplus, l’interposition, entre le Conseil et la Commission, d’un organisme non prévu par le traité aurait pour effet de fausser les rapports interinstitutionnels et l’exercice du droit de décision ;

9 attendu que l’article 155 dispose que la Commission exerce les compétences que le Conseil lui confère pour l’exécution des règles qu’il établit ;

que cette disposition, dont l’emploi est facultatif, permet au Conseil de déterminer les modalités éventuelles auxquelles il subordonne l’exercice, par la Commission, du pouvoir a elle attribue ;

que la procédure dite "du comite de gestion" fait partie des modalités auxquelles le Conseil peut, légitimement, subordonner une habilitation de la Commission ;

qu’il résulte, en effet, de l’analyse du mécanisme institue par les articles 25 et 26 du règlement n° 19 que la mission du comite de gestion est de donner des avis sur le projet des mesures envisagées par la Commission ;

que celle-ci peut arrêter des mesures immédiatement applicables, quel que soit l’avis du comité de gestion ;

qu’en cas d’avis non conforme de ce comité, la seule obligation incombant à la Commission est celle de communiquer au Conseil les mesures prises ;

que le comité de gestion a pour fonction d’assurer une consultation permanente afin d’orienter la Commission dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par le Conseil et de permettre à celui-ci de substituer son action à celle de la Commission ;

que le comité de gestion n’a donc pas le pouvoir de prendre une décision aux lieu et place de la Commission ou du Conseil ;

que, des lors, sans fausser la structure communautaire et l’équilibre institutionnel, le mécanisme du comité de gestion permet au Conseil d’attribuer à la Commission un pouvoir d’exécution d’une étendue appréciable, sous réserve d’évoquer éventuellement la décision ;

10 que la légitimité de la procédure dite "du comite de gestion", dans les termes des articles 25 et 26 du règlement n° 19, ne saurait des lors être contestée au regard de la structure institutionnelle de la communauté ;

11 attendu que la défenderesse au principal a encore critique la procédure du comite de gestion en raison du fait que, par l’institution d’un "droit de cassation" réserve au Conseil a l’égard des mesures prises par la Commission, ce mécanisme aurait privé la Cour de justice de certaines de ses attributions ;

12 attendu que cette objection repose sur une qualification erronée du droit d’évocation réservé au Conseil ;

que la procédure prévue par l’article 26 du règlement n° 19 a pour effet de permettre au Conseil de substituer sa propre action a celle de la Commission en cas d’avis négatif du comité de gestion ;

que le système est donc aménagé de telle manière que les décisions d’application adoptées en vertu du règlement de base sont prises dans tous les cas, soit par la Commission, soit, exceptionnellement, par le Conseil ;

que ces actes, quel qu’en soit l’auteur, sont de nature à donner ouverture, dans des conditions identiques, soit à la procédure d’annulation de l’article 173, soit à la procédure préjudicielle de l’article 177 du traité ;

qu’il apparaît des lors que l’exercice, par le Conseil, de son droit d’évocation ne limite en rien les compétences de la Cour de justice ;

2 - sur la question relative à l’habilitation de la Commission

13 attendu qu’il est demandé à la Cour de dire si le règlement n° 102/64 de la Commission est dépourvu de base valable d’habilitation, en tant qu’il règlemente, à son article 1, l’obligation d’exporter qu’implique le certificat d’exportation, à son article 7, paragraphe 1, la nécessité de constituer une caution pour obtenir ce certificat et, à son article 7, paragraphe 2, la perte de la caution dans le cas ou l’obligation d’exporter n’a pas été remplie, ou bien si la Commission trouve cette habilitation, soit dans le traite CEE en général, soit dans les dispositions combinées des paragraphes 2 et 3 de l’article 16 ou dans les articles 19 ou 20 du règlement n° 19 du Conseil ;

14 attendu qu’il résulte de la motivation du jugement de première instance, autant que des observations de la défenderesse au principal, que cette question concerne un doute relatif à l’habilitation de la Commission à l’effet d’étendre le régime de cautionnement tant à l’exportation de céréales qu’à l’importation ou à l’exportation de produits transformés a base de céréales ;

que ce doute ayant son origine dans la rédaction de l’article 16 du règlement n° 19, il y a lieu d’examiner si cette disposition fournit une base d’habilitation suffisante aux mesures d’application prises dans le cadre du règlement n° 102/64 au sujet des exportations et, en général, des produits transformés ;

15 attendu qu’aux termes de l’article 16, paragraphe 1, du règlement n° 19, toute importation ou exportation des produits visés à l’article 1 est soumise à la présentation d’un certificat d’importation ou d’exportation ;

qu’à cette disposition générale, le paragraphe 2 du même article ajoute diverses spécifications en ce qui concerne la durée du certificat d’importation pour les céréales, en ajoutant que "la délivrance du certificat est subordonnée à la constitution d’une caution … ;

qu’enfin, le paragraphe 3 dispose que "les modalités d’application du présent article . . . sont arrêtées suivant la procédure prévue à l’article 26", en spécifiant que cette disposition s’applique "notamment" à la détermination de la durée de validité du certificat d’importation pour les produits transformés à base de céréales ;

que la rédaction de cet article a fait naître la question de savoir si, le régime de cautionnement n’étant mentionné dans le paragraphe 2 de l’article 16 qu’en relation avec les certificats d’importation des céréales proprement dites, la Commission a pu légitimement l’étendre, par l’effet du règlement d’application n° 102/64, aux exportations et aux produits transformés ;

16 attendu que ces diverses dispositions doivent être interprétées à la lumière du système et des finalités tant de l’article 16 que du règlement n° 19 dans son ensemble ;

que le paragraphe 1 de l’article 16 traduit l’intention d’établir un régime destine à régir indistinctement les importations et les exportations de tous les produits soumis a une organisation de marche par l’effet du règlement n° 19 ;

que, dans le même esprit, le paragraphe 3 renvoie à la procédure prévue à l’article 26 la détermination de toutes modalités d’application à intervenir dans le cadre de l’article 16 ;

17 que, place entre ces deux dispositions de portée générale, le paragraphe 2 constitue une mesure d’application spéciale, destinée à mettre en oeuvre une partie des dispositions envisagées par le paragraphe 1 ;

qu’une interprétation restreignant au seul certificat d’importation, et à une partie seulement des produits qui font l’objet de l’organisation de marche, les garanties d’efficacité prévues par le règlement, aurait pour effet d’affecter le fonctionnement harmonieux du système ;

18 qu’il faut donc interpréter l’article 16 comme ayant compris dans le renvoi aux mesures d’application prévues par le paragraphe 3 toutes dispositions destinées à compléter les mesures fragmentaires prévues par le paragraphe 2, selon le modèle de cette même disposition ;

que la Commission était donc habilitée à inclure dans le règlement n° 102/64, en ce qui concerne les certificats d’exportation, les dispositions relatives à l’obligation d’exporter et au cautionnement qui font l’objet des articles 1 et 7, ainsi que celles qui concernent les produits de transformation, catégorie dans laquelle rentrent les marchandises dont la non exportation est à l’origine du litige ;

19 qu’ainsi, il n’apparaît pas nécessaire d’examiner dans quelle mesure les articles 19 et 20 du règlement n° 19 auraient pu fournir, éventuellement, une base juridique aux dispositions du règlement n° 102/64 ;

3 - sur la question relative aux principes de liberté économique et de proportionnalité

20 attendu qu’il est demandé à la Cour de dire si les dispositions du règlement n° 102/64 de la Commission relatives à l’obligation d’exporter qui est inhérente à tout certificat d’exportation ( article 1 ) ainsi qu’a la constitution et à la perte de la caution constituée en vue de l’obtention des certificats d’exportation (article 7) violent un principe obligeant l’administration à ne mettre en oeuvre que des mesures proportionnées au but à atteindre ou lui interdisant de recourir à des mesures excessives et s’il en va notamment ainsi dans le cas, visé à l’article 7, paragraphe 1, où la caution est constituée en vue de l’obtention de certificats d’exportation pour lesquels le montant de la restitution n’est pas fixé à l’avance ;

21 attendu qu’il résulte de la motivation du jugement de première instance que le tribunal administratif a considéré comme non valide l’engagement rattaché à la délivrance des certificats d’importation ou d’exportation, selon l’article 1 du règlement n° 102/64, ainsi que le cautionnement prévu par l’article 7, alinéa 1 du même règlement, à l’effet de garantir l’exécution de cet engagement, en raison d’un prétendu excès de pouvoir contraire aux principes de liberté économique et de proportionnalité ;

que, selon le tribunal, ces principes destinés à garantir le respect des droits fondamentaux feraient partie intégrante du droit international autant que de l’ordre juridique supraétatique, de manière qu’une loi communautaire contraire à ces notions devrait être considérée comme nulle ;

22 attendu que le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour de justice assure le respect ;

qu’il y a lieu dès lors d’examiner, en réponse à la question posée et en vue des principes invoqués, si le régime de cautionnement aurait porté atteinte à des droits de caractère fondamental dont le respect doit être assurée dans l’ordre juridique communautaire ;

23 attendu que le but du régime de cautionnement est exposé dans le sixième considérant du préambule du règlement n° 102/64, aux termes duquel "il convient d’éviter de mettre en circulation des certificats qui ne seraient pas suivis d’importation et d’exportation, étant donne que "ces certificats donneraient une vue erronée de la situation du marche" et qu’à cette fin, la délivrance de certificats est subordonnée à la constitution d’une caution qui restera acquise s’il n’a pas été satisfait à l’obligation d’importer ou d’exporter ;

qu’il résulte de ces considérations, autant que du système général des règlements n° 19 et 102/64, que le régime de cautionnement est destiné à garantir la réalité des importations et exportations pour lesquelles les certificats sont demandés, afin d’assurer tant à la communauté qu’aux Etats membres une connaissance exacte des transitions projetées ;

24 que cette connaissance, ensemble avec les autres renseignements disponibles sur l’état du marché, est indispensable pour permettre aux autorités compétentes une utilisation judicieuse des instruments d’intervention, ordinaires et exceptionnels, mis a leur disposition en vue de garantir le fonctionnement du régime des prix institué par le règlement, tels que les actions d’achat, de stockage et de déstockage, la fixation des primes de dénaturation, la fixation des restitutions à l’exportation, l’application de mesures de sauvegarde et le choix de mesures destinées à éviter les détournements de trafic ;

que cette nécessité est d’autant plus impérieuse que la mise en oeuvre de la politique agricole commune entraîne de lourdes responsabilités financières à charge de la communauté et des Etats membres ;

25 qu’il importe dès lors que les autorités compétentes disposent non seulement de renseignements statistiques sur l’état du marché, mais encore de prévisions précises sur les importations et les exportations à venir ;

qu’en présence de l’obligation, imposée aux Etats membres par l’article 16, paragraphe 1, du règlement n° 19, de délivrer des certificats d’importation ou d’exportation à tout intéressé, une projection d’avenir serait dénuée de signification si les certificats ne comportaient pas, pour les bénéficiaires, l’engagement d’agir en conséquence ;

qu’à son tour, cet engagement resterait sans efficacité si son observation n’était pas assurée par des moyens appropriés ;

26 qu’on ne saurait critiquer le choix, à cet effet, par le législateur communautaire, du moyen du cautionnement, compte tenu du fait que ce mécanisme est adapté au caractère volontaire des demandes de certificats et qu’il possède, sur les autres systèmes possibles, le double avantage de la simplicité et de l’efficacité ;

27 qu’un régime de simple déclaration des exportations effectuées et des certificats non utilisés, tel qu’il a été préconisé par la défenderesse au principal, serait, en raison de son caractère rétrospectif et en l’absence de toute garantie d’application, incapable de procurer aux autorités compétentes des données certaines sur l’évolution des mouvements de marchandises ;

que, de même, un système d’amendes infligées "a posteriori" entraînerait de notables complications administratives et juridictionnelles au stade tant de la décision que de l’exécution ;

28 qu’il apparaît dès lors que l’exigence de certificats d’importation et d’exportation comportant, pour les bénéficiaires, l’engagement d’exécuter les opérations projetées sous la garantie d’un cautionnement constitue un moyen à la fois nécessaire et approprié en vue de permettre aux autorités compétentes de déterminer de la manière la plus efficace leurs interventions sur le marche des céréales ;

29 que le régime de cautionnement ne saurait donc être contesté dans son principe ;

30 attendu qu’il convient cependant d’examiner si certaines modalités du régime de cautionnement ne pourraient pas être contestées au regard des principes évoqués par la question, alors d’ailleurs que la défenderesse au principal a allégué que la charge du cautionnement serait excessive pour le commerce, au point de porter atteinte aux droits fondamentaux ;

31 attendu que, pour apprécier la charge réelle du cautionnement incombant au commerce, il convient de prendre en considération non pas tant le montant du cautionnement qui est remboursé - soit 0,5 unité de compte par 1000 kg - que les frais et charges entraînés par sa constitution ;

qu’il ne saurait être tenu compte, dans l’appréciation de cette charge, de la perte de la caution elle-même, les commerçants étant protégés d’une manière adéquate par les dispositions du règlement relatives aux circonstances comme cas de force majeure ;

que les frais de cautionnement ne constituent pas un montant disproportionné à la valeur des marchandises en jeu et aux autres frais commerciaux ;

32 qu’il apparaît dès lors que les charges résultant du régime de cautionnement ne sont pas excessives et sont la conséquence normale d’un régime d’organisation des marches conçu selon les exigences de l’intérêt général, défini par l’article 39 du traité, qui vise à assurer un niveau de vie équitable à la population agricole tout en assurant des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs ;

33 attendu que la défenderesse au principal expose encore que la perte de la caution, consécutive à la non-exécution de l’engagement d’importer ou d’exporter, constituerait en réalité une amende ou une peine que le traité n’aurait pas habilité le Conseil et la Commission à instituer ;

34 attendu que cet argument repose sur une analyse erronée du régime de cautionnement, qui ne saurait être assimile à une sanction pénale puisqu’il ne constitue que la garantie d’exécution d’un engagement volontairement assumé ;

35 attendu, enfin, que manque de pertinence l’argument de la défenderesse au principal tire du fait que les services de la Commission ne seraient, techniquement, pas à même d’exploiter les renseignements fournis par le système critique qui serait, des lors, dénué de toute utilité pratique, cette contestation ne pouvant mettre en cause le principe même du régime de cautionnement ;

36 attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces considérations que le régime des certificats entraînant, pour ceux qui en font la demande, l’engagement d’importer ou d’exporter garanti par une caution, ne porte atteinte à aucun droit de caractère fondamental ;

que le mécanisme de cautionnement constitue un moyen approprié, au sens de l’article 40, paragraphe 3, du traité, de l’organisation commune des marchés agricoles, dépourvu de tout excès et, par ailleurs, conforme aux exigences de l’article 43 ;

4 - sur la question relative à la notion de force majeure

37 attendu qu’il est demandé à la Cour de dire si la disposition du règlement n° 102/64 relative à la perte de la caution (article 7, paragraphe 2) est dénuée de validité en raison du fait que, sans que le législateur se préoccupe de savoir si la non-exécution de l’obligation d’exporter est fautive, le seul cas dans lequel la caution ne reste pas acquise est, aux termes de l’article 8, celui où l’exportation ne peut être effectuée pendant la durée de validité du certificat par suite de circonstances a considéré comme cas de force majeure ;

38 attendu que la notion de force majeure retenue par les règlements agricoles tient compte de la nature particulière des rapports de droit public entre les opérateurs économiques et l’administration nationale, ainsi que des finalités de cette réglementation ;

qu’il résulte de ces finalités autant que des dispositions positives des règlements en cause que la notion de force majeure n’est pas limitée à celle d’impossibilité absolue, mais s’applique aussi a des circonstances anormales, étrangères à l’importateur ou à l’exportateur, et dont les conséquences n’auraient pu être évitées qu’au prix de sacrifices excessifs, malgré toutes les diligences déployées ;

que cette notion implique une souplesse suffisante en ce qui concerne, non seulement la nature de l’événement invoque, mais encore les diligences que l’exportateur aurait dû effectuer pour y faire face et l’étendue des sacrifices qu’il aurait, à cet effet, dû accepter ;

39 que le système établi par le règlement n° 102/64 tend à libérer les opérateurs économiques de leur engagement dans les seuls cas ou l’opération d’importation ou d’exportation n’a pu être réalisée pendant la durée de validité du certificat à la suite des événements visés par le texte cite ;

qu’en dehors de tels événements, pour lesquels ils ne sauraient assumer de responsabilité, les importateurs et exportateurs sont tenus de se conformer aux prescriptions des règlements agricoles, sans pouvoir y substituer des considérations tirées de leur propre intérêt ;

40 qu’il apparaît dès lors qu’en limitant aux cas de force majeure l’annulation de l’engagement d’exporter et la libération de la caution, le législateur communautaire a pris une disposition qui, sans imposer une charge indue aux importateurs ou aux exportateurs, est appropriée en vue d’assurer le fonctionnement normal de l’organisation du marché des céréales, dans l’intérêt général tel que défini par l’article 39 du traité ;

qu’il en résulte qu’aucun argument ne saurait être tiré, contre la validité du régime de cautionnement, des dispositions limitant la libération de la caution aux circonstances reconnues comme cas de force majeure ;

Décisions sur les dépenses

sur les dépens

41 attendu que les frais exposés par le Conseil et par la Commission des communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement ;

que la procédure revêt, à l’égard des parties en cause, le caractère d’un incident soulevé au cours du litige pendant devant le hessischer verwaltungsgerichtshof et que la décision sur les dépens appartient, dès lors, à cette juridiction ;

par ces motifs,

Dispositif

la Cour,

statuant sur la question a elle soumise par le hessischer verwaltungsgerichtshof a kassel par ordonnance du 21 avril 1970, dit pour droit :

l’examen de la question posée n’a pas révélé d’élément de nature à affecter la validité :

1) du règlement n° 102/64/CEE de la Commission, du 28 juillet 1964, relatif aux certificats d’importation et d’exportation pour les céréales, les produits transformés à base de céréales, le riz, les brisures et les produits transformés à base de riz, pris en vertu de l’article 16, paragraphe 3, du règlement n° 19 selon la procédure "du comite de gestion" instituée par l’article 26 du même règlement ;

2) des articles 1 et 7 du règlement n° 102/64/CEE de la Commission, en tant qu’ils concernent les certificats d’exportation et les cautions constituées en vue de l’obtention de ces certificats.

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 () Résolution n° 268 du 25 avril 2009.

3 () Communication de M. Gérard Voisin sur le projet de directive modifiant les conditions d’aptitude médicale pour l’obtention du permis de conduire (E 4418), au cours de la réunion de la Commission des affaires européennes du 9 juin 2009.

4 () http://ec.europa.eu/transparency/regcomitology/index_fr.htm.

5 () Communication de M. Gérard Voisin sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (E 4200) au cours de la réunion de la Commission des affaires européennes du 28 septembre 2009.