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le 31 juillet 2008


N° 1060

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 juillet 2008.

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Géorgie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre,

par M. Bernard KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes
.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La convention fiscale franco-géorgienne en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune a été signée à Paris le 7 mars 2007.

Ce projet est conforme dans ses grandes lignes au modèle de convention de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sous réserve des aménagements habituellement retenus dans les conventions conclues par la France.

Les principales dispositions du projet sont les suivantes.

L’article 1er précise que la convention s’applique aux résidents d’un État contractant ou des deux États contractants.

L’article 2 énumère les impôts couverts par la convention.

La taxe sur les salaires, les contributions sociales généralisées et les contributions pour le remboursement de la dette sociale sont visées par la convention.

Le point 2 du protocole précise que la taxe sur les salaires est régie par l’article relatif aux bénéfices des entreprises ou aux revenus des professions indépendantes.

L’article 3 énonce, selon l’usage, les définitions nécessaires à l’interprétation des termes utilisés dans la convention.

S’agissant de la définition territoriale de la Géorgie, la partie géorgienne a accepté la définition proposée par le ministère des affaires étrangères et européennes français qui, plutôt que de viser expressément la convention des Nations unies sur le droit de la mer, fait seulement référence au droit international s’agissant de l’exploitation des ressources de la Mer Noire dont la Géorgie est un État riverain.

Il est, en outre, précisé au paragraphe 2 que le droit fiscal prévaut sur les autres branches du droit pour l’interprétation des termes non définis par ailleurs dans la convention.

L’article 4 définit la notion de résidence conformément au modèle de l’OCDE.

Le point 4 du protocole précise que sont des résidents de France les sociétés de personnes et les groupements de personnes dont le siège de direction est situé en France et dont les actionnaires, associés et autres partenaires y sont personnellement soumis à l’impôt au titre de leur participation aux bénéfices, en application du droit interne français.

L’article 5 reprend la notion d’établissement stable conformément au modèle de l’OCDE.

Toutefois, s’agissant des chantiers de construction et de montage, la durée nécessaire à la constitution d’un établissement stable est réduite à six mois.

La partie géorgienne a renoncé en définitive à inclure les activités de supervision dans la définition de l’établissement stable.

Le point 5 du protocole définit les conditions dans lesquelles la livraison, à partir d’un stock de marchandises situé dans un État, peut conduire à l’existence d’un établissement stable selon que cette activité présente ou non un caractère préparatoire ou auxiliaire.

L’article 6 prévoit, comme il est d’usage, l’imposition des revenus de biens immobiliers au lieu de situation de ces biens. Les biens immobiliers sont définis par rapport à la législation de l’État où ils sont situés.

En outre, le paragraphe 5 précise que les revenus des parts ou actions conférant à leur détenteur la jouissance de biens immobiliers situés dans un État contractant sont imposables dans cet État. Cette précision, qui constitue un ajout par rapport au modèle de l’OCDE, permet à la France d’appliquer les dispositions particulières de sa législation fiscale en ce qui concerne les revenus des sociétés immobilières.

Le point 6 du protocole précise la notion de « biens immobiliers » en y incluant les options, les promesses de ventes et les droits similaires relatifs à ces biens.

L’article 7 reprend les règles, conformes au modèle de l’OCDE, d’attribution et de détermination des bénéfices des entreprises.

Il est ainsi prévu qu’une entreprise d’un État qui exerce une activité dans l’autre État contractant n’est imposable dans cet autre État que si l’activité y est exercée par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y est situé et uniquement à raison des bénéfices dégagés par celui-ci. En outre, en ce qui concerne la détermination des bénéfices imputables aux établissements stables, les dépenses qui ne seraient pas déductibles si l’établissement stable constituait une entreprise séparée ne sont pas admises en déduction.

Le point 7 du protocole précise les règles de détermination des bénéfices imputables à un établissement stable dans le cadre de certaines activités (vente de marchandises, études, fourniture, installation ou construction d’équipements ou d’établissements industriels, commerciaux ou scientifiques, ou d’ouvrages publics).

L’article 8 prévoit, conformément au modèle OCDE, que les bénéfices d’une entreprise d’un État contractant provenant de l’exploitation en trafic international de navires ou d’aéronefs ne sont imposables que dans cet État.

L’article 9 règle, conformément au principe de pleine concurrence posé par le modèle de l’OCDE, le cas des transferts de bénéfices entre entreprises associées.

L’article 10 pose le principe de l’imposition des dividendes dans l’État de résidence de leur bénéficiaire. Néanmoins, l’État de la source peut imposer les dividendes, selon deux taux :

- 5 % du montant brut des dividendes lorsque le bénéficiaire effectif est une société qui détient directement ou indirectement au moins 10 % du capital de la société distributrice des dividendes, et qui a investi dans le capital de cette société au moins 100 000 € ou l’équivalent en autre devise ;

- 10 % du montant brut des dividendes dans les autres cas.

En outre, les dividendes payés par une société résidente d’un État contractant, et dont le bénéficiaire effectif est une société résidente de l’autre État contractant et qui détient, directement ou indirectement, au moins 50 % du capital de la société qui paie les dividendes, sont exonérés de retenue à la source.

La définition des dividendes est reprise du modèle de l’OCDE, mais comprend également tous les revenus soumis au régime fiscal des distributions par la législation fiscale de l’État dont la société distributrice est un résident, afin de s’appliquer aux distributions occultes ou déguisées.

L’article 11 dispose que les intérêts provenant d’un État contractant et payés à un résident de l’autre État contractant sont imposables exclusivement dans cet autre État.

L’article 12 prévoit, conformément au modèle de l’OCDE, l’imposition exclusive des redevances dans l’État contractant dont le bénéficiaire effectif est un résident.

Le point 9 du protocole exclut explicitement certaines catégories de paiements (pour services techniques, travaux d’ingénierie, service de consultation et de surveillance) de la définition des redevances.

L’article 13 définit le régime applicable aux gains en capital.

Cet article se distingue du modèle de l’OCDE par le paragraphe 1 b qui permet à la France, conformément à sa pratique habituelle, d’appliquer sa législation pour l’imposition des plus-values provenant de l’aliénation d’actions, parts ou droits dans des sociétés ou entités à prépondérance immobilière. La partie géorgienne a donné son accord à l’insertion de cette clause.

L’article 14 attribue l’imposition des revenus tirés de l’exercice d’une profession libérale à l’État de résidence, sauf si la profession est exercée dans l’autre État par le biais d’une base fixe qui y est située.

L’article 15 reprend les règles traditionnelles du modèle de l’OCDE pour l’imposition des salaires du secteur privé. Ainsi, il retient le principe de l’imposition des salaires dans l’État d’exercice de l’activité mais prévoit également une exception pour le cas des missions temporaires effectuées dans un État par un résident de l’autre État.

L’article 16 traite de manière classique les rémunérations des administrateurs de sociétés.

L’article 17 relatif aux artistes et aux sportifs, attribue à l’État où se produisent les intéressés le droit d’imposer les revenus provenant des services rendus dans cet État.

Cet article déroge au modèle de l’OCDE en prévoyant que, conformément à la pratique conventionnelle de la France, lorsque les activités des intéressés sont financées principalement par des fonds publics d’un État, de ses collectivités locales ou de leurs personnes morales de droit public, les revenus correspondants ne sont imposables que dans cet État.

L’article 18 concerne les pensions et rémunérations similaires du secteur privé. Conformément au modèle de l’OCDE, il retient le principe de l’imposition exclusive dans l’État de résidence de leur bénéficiaire.

L’article 19 définit le régime d’imposition des rémunérations et pensions publiques. Il retient le principe d’imposition exclusive de ces revenus dans l’État de la source, conformément à la règle préconisée par l’OCDE.

Toutefois, l’imposition est réservée à l’État de la résidence lorsque les services sont rendus dans cet État et que le bénéficiaire en est un résident et en possède la nationalité.

L’article 20 permet, conformément au modèle de l’OCDE, d’exonérer les étudiants et les stagiaires dans l’État où ils séjournent, et sous certaines conditions.

L’article 21 traite de l’imposition des rémunérations perçues par les enseignants et chercheurs qui exercent leurs fonctions à l’étranger.

Il maintient, sous certaines conditions, le droit d’imposer les professeurs et chercheurs dans leur État d’origine pendant une période ne pouvant excéder vingt-quatre mois, à compter de la date d’arrivée de l’enseignant ou du chercheur dans le pays d’accueil. Les Parties française et géorgienne sont convenues d’exclure du bénéfice de cet article les revenus tirés d’activités à caractère principalement privé.

L’article 22 détermine le régime fiscal des revenus non expressément visés dans les autres articles de la convention. À l’instar du modèle de l’OCDE, il prévoit l’imposition exclusive de ces revenus dans l’État de résidence de leur bénéficiaire effectif, à moins qu’ils ne puissent être rattachés à un établissement stable ou une base fixe dont celui-ci dispose dans l’autre État.

Toutefois, le point 11 du protocole exclut expressément de ce régime les gains provenant des jeux.

L’article 23 fixe les modalités d’imposition de la fortune.

Il déroge au modèle de l’OCDE en prévoyant, conformément à la pratique conventionnelle française, que la fortune constituée par la détention d’actions, parts ou droits dans une société à prépondérance immobilière est imposée dans l’État de situation des biens immobiliers concernés.

L’article 24 traite des modalités d’élimination des doubles impositions par les deux États.

En ce qui concerne la France, le dispositif retenu consiste en une combinaison des deux méthodes couramment utilisées pour l’élimination des doubles impositions.

S’agissant des revenus des sociétés, la convention maintient le principe de l’exonération en France des revenus imposables ou imposables uniquement en Géorgie, dès lors qu’ils sont exemptés d’impôt sur les sociétés en application de la législation française.

Dans les autres cas, la double imposition des revenus provenant de Géorgie et perçus par des personnes résidentes de France est éliminée par l’imputation sur l’impôt français d’un crédit d’impôt dont le montant dépend du type de revenu considéré. Le crédit est calculé de façon différente selon les revenus :

1° Pour les revenus suivants, le crédit d’impôt est égal au montant de l’impôt géorgien effectivement payé à titre définitif, dans la limite du montant de l’impôt français correspondant à ces revenus :

- bénéfices des entreprises et plus-values mobilières réalisées lors de la cession d’un bien inscrit à l’actif d’un établissement stable ;

- dividendes ;

- plus-values provenant de l’aliénation de biens immobiliers, de parts ou actions de sociétés à prépondérance immobilière ;

- rémunérations perçues au titre d’un emploi salarié à bord d’un navire ou d’un aéronef exploités en trafic international ;

- jetons de présence ;

- revenus des artistes et sportifs dont l’activité n’est pas financée par des fonds publics ;

2° Pour les autres revenus non énumérés au 1° : le crédit d’impôt est égal au montant de l’impôt français correspondant à ces revenus, à condition que leur bénéficiaire soit soumis à l’impôt géorgien à raison de ceux-ci.

La rédaction de la clause française d’élimination des doubles impositions confirme notamment la possibilité pour la France d’appliquer sa législation interne destinée à lutter contre la délocalisation des bénéfices des sociétés (article 209 B du code général des impôts) et des revenus de placement des personnes physiques (article 123 bis du même code). Elle permet également à la France de préserver la possibilité de changer ses règles de territorialité.

La Géorgie élimine la double imposition par imputation d’un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt payé en France dans la limite de l’impôt géorgien correspondant à ces revenus.

Cet article précise également les règles d’élimination de la double imposition pour l’imposition de la fortune.

L’article 25 comporte les clauses habituelles de non-discrimination. Il prévoit également des dispositions particulières :

- le paragraphe 5 prévoit l’application des avantages fiscaux prévus par chaque État au profit de ses entités publiques aux entités publiques de l’autre État ;

- le paragraphe 7 enlève toute portée fiscale aux clauses générales de non-discrimination ou de la Nation la plus favorisée qui seraient contenues dans d’autres traités ou accords bilatéraux auxquels sont Parties les deux États.

Le point 10 du protocole précise que, lorsqu’une personne physique exerce un emploi dans un État contractant, ses cotisations à un régime de retraite, établi et reconnu aux fins d’imposition dans l’autre État, sont déductibles dans le premier État. Ces cotisations sont par ailleurs soumises, sous certaines conditions, au même traitement fiscal que les cotisations de retraite reconnu aux fins d’imposition dans ce premier État.

L’article 26 relatif à la procédure amiable est conforme dans ses grandes lignes à l’article correspondant du modèle de l’OCDE. Le délai de saisine de l’autorité compétente est de trois ans, à compter de la notification qui révèle une imposition non conforme à la convention.

L’article 27 autorise, avec les restrictions d’usage, les échanges de renseignements nécessaires pour l’application des dispositions de la convention et de la législation interne des deux États relative aux impôts visés par la convention.

L’article 28 reprend les règles applicables aux membres des missions diplomatiques, des postes consulaires et des délégations permanentes auprès d’organisations internationales, habituellement retenues dans les conventions conclues par la France.

L’article 29 précise que les États contractants peuvent régler les modalités d’application de la convention.

L’article 30 précise la date d’entrée en vigueur de la convention et les dates de prise d’effet des dispositions conventionnelles pour les différents impôts.

Il est précisé que toutes autres dispositions fiscales contenues dans tout traité ou accord entre la France et la Géorgie cessent de produire effet, à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente convention.

L’article 31 arrête les modalités selon lesquelles la convention pourra être dénoncée.

La convention est complétée par un protocole dont les principales dispositions ont été commentées avec les articles auxquels il se réfère.

En outre, les points 1 et 3 de ce protocole définissent respectivement les termes de « subdivisions politico-administratives » et de « société » au sens de la législation géorgienne.

De plus, le point 8 du protocole introduit une clause anti-abus supplémentaire qui concerne les revenus passifs (dividendes, intérêts et redevances) et les revenus non expressément visés par les dispositions de la convention. Les opérations les concernant, faites dans le seul (ou principal) objectif de tirer avantage des dispositions conventionnelles, sont privées du bénéfice de la convention.

Enfin, la France a précisé au point 12 du protocole qu’elle se réservait le droit d’appliquer les dispositifs anti-abus de sa législation interne tel que l’article 212 du code général des impôts relatif à la sous-capitalisation ou toutes dispositions analogues, afin de prévenir l’évasion fiscale internationale.

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Telles sont les principales observations qu’appelle la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Géorgie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, et qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement en vertu de l’article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Géorgie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui est chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Géorgie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à Paris le 7 mars 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.


© Assemblée nationale