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le 1er décembre 2008


N° 1272

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2008.

PROJET DE LOI

autorisant la ratification des protocoles au traité de lAtlantique Nord sur laccession de la République d’Albanie et de la République de Croatie,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre,

par M. Bernard KOUCHNER,

ministre des affaires étrangères et européennes.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Avec les autres pays membres de l’Alliance atlantique, la France a signé à Bruxelles le 9 juillet 2008 les protocoles au traité de l’Atlantique Nord sur l’adhésion des Républiques d’Albanie et de Croatie, à la suite de l’invitation faite lors du sommet de Bucarest en avril 2008.

Après l’effondrement du bloc soviétique, l’OTAN avait réaffirmé la validité de l’article 10 du traité de l’Atlantique Nord, qui prévoit que les Alliés peuvent « par accord unanime, inviter à accéder au traité tout autre Etat européen susceptible de favoriser le développement des principes du présent traité et de contribuer à la sécurité de la région de l’Atlantique Nord ». L’OTAN rappelait sa disposition à accueillir de nouveaux membres (principe dit de la « porte ouverte »). La France a toujours soutenu cette approche.

Cette politique s’est, depuis, traduite par deux élargissements successifs, qui ont fait passer l’OTAN de seize à dix-neuf membres en 1999, puis à vingt-six membres en 2004. L’adhésion de l’Albanie et de la Croatie à l’OTAN constituera donc la troisième vague d’élargissement depuis la fin de la guerre froide.

Ces élargissements ont été concomitants au renforcement des relations avec la Russie, qui s’est traduite par l’établissement en 1997 d’un partenariat stratégique avec la Russie (« Acte fondateur »), puis par la création en 2002 du Conseil OTAN-Russie à vingt-sept.

Avec l’apaisement des tensions dans les Balkans, les pays de la région ont fait de leur intégration dans les structures européennes et euro-atlantiques une priorité politique. Il s’agissait à la fois d’une demande de sécurité et de stabilité (notamment après les conflits des années 1990), mais également d’une manifestation de leur adhésion aux principes politiques de l’Alliance atlantique.

C’est au sommet de Bucarest, du 2 au 4 avril 2008, qu’ont été lancées les invitations à rejoindre l’Alliance pour l’Albanie et la Croatie. Les pays invités devraient devenir membres de l’Alliance dès le printemps 2009, à l’occasion du prochain sommet que la France organisera conjointement avec l’Allemagne à Strasbourg-Kehl. Les garanties de défense collective qu’offre l’Alliance (article 5 du traité de l’Atlantique Nord) seront ainsi étendues à ces nouveaux membres.

En l’absence de règlement de la question du nom de l’Ancienne République Yougoslave de Macédoine (ARYM), ce pays n’a pu être invité, aux côtés de l’Albanie et de la Croatie, à rejoindre l’Alliance. Au sommet de Bucarest, les Alliés ont toutefois reconnu que l’ARYM remplissait d’ores et déjà tous les critères politiques et militaires de l’adhésion, et qu’elle pourrait rejoindre l’Alliance, sans autre décision, dès qu’une solution mutuellement acceptable sur le nom serait trouvée. La France est favorable à l’entrée de l’ARYM dans l’OTAN dès lors qu’une solution aura pu être trouvée sur le nom.

Ce troisième élargissement de l’Alliance atlantique depuis la fin de la guerre froide représente une priorité politique pour la France. En effet, si le potentiel militaire de l’Albanie et de la Croatie demeure modeste, leur entrée dans l’OTAN permettra de poursuivre la démarche de réunification de la famille des États européens, et de contribuer à la stabilisation du continent en étendant les garanties de sécurité de l’Alliance aux pays des Balkans.

L’adhésion de l’Albanie et de la Croatie a été préparée dans le cadre du Partenariat pour la paix, créé en 1994, qui avait pour objectif de contribuer à la stabilisation du continent européen et à l’instauration de relations de confiance entre l’OTAN et ses partenaires. Ce Partenariat a également bénéficié aux pays candidats à l’adhésion à l’OTAN pour procéder aux réformes nécessaires à une adhésion future.

L’Albanie a rejoint le Partenariat pour la paix dès 1994, la Croatie y a adhéré en 2000. Ces deux pays ont participé activement aux activités du Partenariat pour la paix (formation, exercices conjoints, conseil pour les réformes). Depuis 1999 pour l’Albanie et 2002 pour la Croatie, leurs relations avec l’OTAN se déroulent dans le cadre du Plan d’action pour l’adhésion (Membership Action Plan – MAP). Ce programme est destiné à fournir des avis, une aide et un soutien pratique aux pays souhaitant rejoindre l’Alliance. Il se concrétise par la présentation, par les pays, d’un programme national annuel portant sur l’ensemble des questions relations à l’adhésion (politiques, économiques, de défense, de ressources, de sécurité et juridiques), et par une évaluation annuelle des Alliés sur les progrès réalisés.

Les deux pays invités lors du Sommet de Bucarest ont fait les efforts requis pour respecter les critères politiques et militaires nécessaires pour rejoindre l’Alliance.

Au niveau politique, ils se sont engagés à respecter l’ensemble des principes de l’Alliance (démocratie, liberté individuelle, État de droit), et à régler les différends avec leurs voisins avec des moyens pacifiques. Ils ont également accepté de modifier leurs législations pour respecter les critères de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en matière de protection des minorités.

La volonté de rapprochement avec l’Union européenne (UE) de l’Albanie et de la Croatie, parallèle à leur engagement à l’OTAN, a également contribué à l’amélioration de l’état de préparation de ses pays, au travers pour l’une de l’accord de stabilisation et d’association et, pour l’autre, des négociations d’adhésion. Dans ce cadre, les exigences relatives à la pleine coopération de la Croatie avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ont été remplies. De même, des progrès importants ont été accomplis par les deux pays en matière de renforcement de l’Etat de droit et de lutte contre la corruption.

Sur le plan militaire, grâce à leur participation au Partenariat pour la Paix et au plan d’action pour l’adhésion (Membership Action Plan – MAP) évoqués ci-dessus, l’Albanie et la Croatie ont amélioré leur connaissance de l’OTAN, leur interopérabilité avec l’Alliance et ont pu durablement, avec l’aide des experts de l’OTAN, réformer profondément leur armée, renouveler leurs équipements et adapter leurs doctrines (notamment en matière de contrôle démocratique des forces armées). Les engagements requis ont eu d’importantes conséquences financières (relèvement progressif des budgets de défense pour approcher l’objectif de 2 % de leur PIB, financement des réformes) et humaines (réductions de 70 à 80 % des effectifs militaires). Ces réformes se poursuivront jusqu’à l’entrée effective des ces pays dans l’OTAN et, si nécessaire, au-delà.

Les pays candidats ont financé eux-mêmes leur mise à niveau militaire et administrative. L’élargissement à l’Albanie et la Croatie n’entraînera pas d’augmentation des budgets de l’Alliance. L’adhésion de deux nouveaux pays va conduire mécaniquement à une réduction, bien que limitée, de la quote-part française aux budgets de l’Alliance. Dès leur entrée dans l’OTAN, ces pays prendront en charge 0,32 % des budgets civil et militaire de l’OTAN (0.0685 % pour l’Albanie et 0.255 % pour la Croatie).

Les nouveaux membres de l’Alliance sont des pays avec lesquels la France a des relations de coopération militaire bilatérale approfondies. À ce titre, notre pays les a aidés dans la restructuration et la professionnalisation de leurs armées et conseillés pour le renouvellement de leurs équipements. Enfin, l’apprentissage du français, langue officielle de l’Alliance, a été promu auprès des officiers des pays candidats.

Il convient de souligner que les pays candidats ont dès à présent pris leur part du fardeau en participant aux opérations de l’Alliance, principalement en Afghanistan, où ils ont près de quatre cent cinquante hommes sur le terrain (cent trente-huit personnels pour l’Albanie, trois cent pour la Croatie, qui a déjà annoncé sa volonté d’augmenter son contingent à l’automne 2008).

La Croatie et l’Albanie manifestent également leur intérêt pour la politique européenne de sécurité et de défense, et partagent notre conception d’une complémentarité et d’un renforcement mutuel de l’UE et de l’OTAN, au service de notre sécurité et de la paix et de la stabilité internationales. La Croatie, dont les négociations d’adhésion avec l’UE sont bien avancées, contribue d’ores et déjà aux missions de l’UE (EULEX Kosovo, EUFOR Tchad/RCA, EUPOL Afghanistan notamment). L’Albanie, qui n’a pas soumis de candidature officielle à l’adhésion à l’UE, participe néanmoins à l’effort des Européens en contribuant comme État tiers à des opérations de l’UE (Bosnie-Herzégovine, EUFOR Tchad/RCA).

Telles sont les principales observations qu’appellent les protocoles au traité de l’Atlantique Nord sur l’adhésion des Républiques d’Albanie et de Croatie et qui sont soumis au Parlement en vertu de l’article 53 de la Constitution.

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification des protocoles au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession de la République d’Albanie et de la République de Croatie, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article 1er

Est autorisée la ratification du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession de la République d’Albanie, signé à Bruxelles le 9 juillet 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Article 2

Est autorisée la ratification du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession de la République de Croatie, signé à Bruxelles le 9 juillet 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 26 novembre 2008.

Signé : François FILLON

Par le Premier ministre :
Le ministre
des affaires étrangères et européennes,

Signé :
Bernard KOUCHNER


© Assemblée nationale