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le 2008


N° 1374

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 janvier 2009.

PROJET DE LOI

autorisant la ratification de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre,

par M. Bernard KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’Union européenne (UE) a lancé en juin 19991 le processus de stabilisation et d’association, cadre d’une politique ambitieuse et à long terme vis-à-vis des pays des Balkans occidentaux (Albanie, ancienne République yougoslave de Macédoine, Bosnie-Herzégovine, Croatie, République fédérale de Yougoslavie). Cette politique se fonde sur les éléments suivants :

– l’idée qu’une perspective européenne crédible, une fois les conditions remplies, est le meilleur levier pour inciter ces pays à réaliser les réformes nécessaires. Conformément aux conclusions du Conseil européen de juin et décembre 2006, le rythme de l’élargissement devra aussi tenir compte de la capacité d’absorption de l’UE à intégrer de nouveaux États membres ;

– la nécessité que les pays de la région établissent entre eux des relations normales, afin de contribuer à la stabilité politique et économique de la région ;

– le désir d’adopter une approche fondée sur des éléments communs (conditions politiques et économiques définies précisément dans l'accord), tout en permettant à chaque pays de progresser à son rythme et selon ses mérites.

Le processus de stabilisation et d’association représente un engagement à long terme de l’UE vis-à-vis de cette région, tant sur le plan des efforts politiques que sur celui des ressources financières et humaines. Il constitue un cadre général, qui s’appuie sur trois éléments :

– un nouveau type de relation contractuelle, les accords de stabilisation et d’association, pierre angulaire du processus et étape fondamentale dans sa réalisation : la conclusion de ces accords, fortement inspirés des accords européens, marque l’engagement des signataires de parvenir, au terme d’une période de transition, à une pleine association avec l’UE, l’accent étant mis sur le respect des principes démocratiques essentiels et sur la reprise des éléments fondamentaux de l’acquis communautaire ;

– un programme unique d’assistance à la région, le programme « communautaire d'assistance à la reconstruction, au développement et à la stabilisation » (CARDS)2, doté d’un montant de référence financière indicatif de 4,65 milliards d’euros pour la période 2000-2006. Ce programme visait à accompagner et conforter le processus de réformes démocratiques, économiques et institutionnelles dans les pays de la région. Dans le cadre des perspectives financières 2007-2013, le nouvel instrument de pré-adhésion (IPA)3 s’y est substitué depuis le 1er janvier 2007. Le document de planification pluriannuelle pour le Monténégro prévoit une enveloppe de 294 millions d’euros pour la période 2007-2010 ;

– des préférences commerciales asymétriques exceptionnelles, destinées à favoriser l’accès au marché communautaire des produits industriels et agricoles des Balkans, de façon à contribuer au redémarrage de leurs économies par une stimulation de leurs exportations4.

La République du Monténégro est, après l'ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), la Croatie et l’Albanie, le quatrième pays de la région à avoir signé un accord de stabilisation et d’association (ASA). Sur la base des conclusions favorables de l’étude de faisabilité de la commission, le Conseil affaires générales d’octobre 2005 a adopté les directives de négociation en vue d'établir un accord de stabilisation et d'association avec l’Union de Serbie et Monténégro. Suite à l’indépendance du pays, reconnue le 12 juin 2006 par l’ensemble des États membres, un nouveau mandat de négociation de l’ASA a été adopté par le Conseil le 24 juillet 2006.

Les négociations, qui jusqu’à la dissolution de l’Union de Serbie-et-Monténégro, se déroulaient en parallèle avec la Serbie selon la « double approche », ont continué avec le Monténégro seul le 25 septembre 2006. L’accord a été paraphé par le Commissaire Rehn et le Premier ministre du Monténégro le 15 mars 2007. Il a été signé à Luxembourg le 15 octobre 2007, entre les représentants de la communauté et des États membres d’une part, et de la République du Monténégro, d’autre part (accord mixte, sur la base de l’article 310 du traité constitutionnel européen (TCE)).

*

* *

L’accord comprend un préambule et cent trente-neuf articles répartis en dix titres. Y sont joints sept annexes, huit protocoles et deux déclarations communes ou unilatérales.

1° Le préambule contient une « clause évolutive » alignée sur les conclusions des Conseils européens de Cologne et Feira, qui confirme à la République du Monténégro sa qualité de candidat potentiel à l’adhésion : « rappelant la volonté de l’Union européenne d’intégrer dans la plus large mesure possible le Monténégro dans le courant politique et économique général de l’Europe et le statut de candidat potentiel à l’adhésion à l’Union européenne de ce pays, sur la base du traité sur l’Union européenne et du respect des critères définis par le Conseil européen de juin 1993, sous réserve de la bonne mise en oeuvre du présent accord, notamment en ce qui concerne la coopération régionale. » Cette clause évolutive est similaire à celle qui avait été adoptée pour les ASA ARYM, Croatie et Albanie ;

2° L’article 1er énonce les objectifs de l’association : le renforcement du dialogue politique, un rapprochement de la législation du Monténégro avec celle de la Communauté, l'achèvement de la transition vers une économie de marché, l’établissement progressif d'une zone de libre-échange avec la Communauté, le développement de la coopération régionale ;

3° Le titre Ier (articles 2 à 9) porte sur les principes généraux de l’accord. Outre le respect des principes démocratiques, des droits de l’homme et de l’économie de marché, qui constituent des éléments essentiels de l'accord, sont également citées les conditionnalités politiques et économiques de l’approche régionale de l’UE (telles qu’énoncées dans les conclusions du Conseil du 29 avril 1997), ainsi que le développement de la coopération régionale et de relations de bon voisinage. L’association sera entièrement réalisée au terme d’une période transitoire maximale de cinq ans, divisée en deux périodes successives : trois ans après l’entrée en vigueur de l’accord, le conseil de stabilisation et d’association évalue les progrès accomplis et décide du passage à la seconde phase et de la durée de celle-ci. Cette division vise à permettre la mise en œuvre progressive des dispositions de l’accord et à se concentrer pendant la première phase sur les domaines décrits au titre VI de l’accord : marché intérieur, concurrence, droits de la propriété intellectuelle, industrielle et commerciale, marchés publics, normes et certification, services financiers, transports terrestres et maritimes, droit des sociétés, comptabilité, protection des consommateurs, protection des données, santé et sécurité sur les lieux de travail ainsi que l’égalité des chances. Pendant la seconde phase, le Monténégro est invité à se concentrer sur les autres parties de l’acquis. Les deux phases ne s’appliquent pas au titre IV (libre-circulation des marchandises). Le conseil de stabilisation et d'association est chargé d'examiner régulièrement l'application de l'accord et la mise en oeuvre par le Monténégro des réformes juridiques, institutionnelles et économiques (article 8) ;

4° Le titre II (articles 10 à 13) porte sur le dialogue politique entre le Monténégro et l’UE. Le dialogue politique est appelé à se dérouler, au niveau ministériel, au sein du conseil de stabilisation et d’association, et au niveau parlementaire, au sein de la commission parlementaire de stabilisation et d’association. Il peut prendre d’autres formes appropriées à la demande des Parties (réunions de hauts fonctionnaires notamment) ;

5° Le titre III (articles 14 à 17) porte sur la coopération régionale. Il s’agit d’une spécificité des accords de stabilisation et d’association. Le Monténégro doit s’engager dans une coopération régionale avec les autres pays du processus de stabilisation et d’association. Conformément aux conclusions du sommet de Zagreb (lors duquel les pays de la région s’étaient engagés à conclure entre eux des conventions de coopération régionale), l’accord porte obligation pour le Monténégro de conclure des conventions de coopération régionale avec les autres pays de la région qui concluront un ASA avec l'UE (obligation d’entamer les discussions dès la signature de l’ASA par le pays concerné et de conclure une convention de coopération régionale dans les deux ans suivants l’entrée en vigueur de cet ASA). La volonté du Monténégro de conclure une telle convention constituera l’un des facteurs déterminants du développement de ses relations avec l’UE. Ces conventions devront porter sur le dialogue politique, l’établissement d’une zone de libre-échange entre les Parties, conformément aux dispositions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), des dispositions mutuelles concernant la libre circulation des travailleurs, des capitaux et des personnes. L’accord offre également la possibilité de conclure de telles conventions avec des pays candidats à l’UE ;

6° Le titre IV (articles 18 à 48) porte sur la libre circulation des marchandises. L’article 18 prévoit la constitution progressive d’une zone de libre-échange, pendant une période transitoire maximale de cinq ans, dès l'entrée en vigueur de l'accord.

Concernant le Monténégro, le détail et le calendrier de libéralisation sont précisés dans les annexes.

Les pays balkaniques ont bénéficié d’une procédure originale de la part de l'UE : le Conseil européen de Lisbonne avait en effet conclu que les ASA devaient être précédés d’une libéralisation asymétrique des échanges. Sur cette base, le Conseil affaires générales du 18 septembre 2000 a adopté le règlement (CE) 2007/00 offrant à ces pays de façon unilatérale et temporaire (deux ans, étendues à cinq ans renouvelables) des préférences commerciales asymétriques exceptionnelles, permettant à leurs produits industriels et à la quasi-totalité de leurs produits agricoles (à l’exception de la viande bovine, du vin et des conserves de poisson) d’accéder au marché communautaire sans quota et à droit zéro.

L’articulation entre ces préférences asymétriques et le volet commercial des ASA avait constitué l’un des points les plus durs des discussions à quinze. Tout en acceptant l’abandon des prix d’entrée pour les fruits et légumes5 dans le cadre des préférences asymétriques (en raison de leur caractère unilatéral, exceptionnel et temporaire), plusieurs délégations s’opposaient à ce que cet abandon soit contractualisé dans l’ASA, soulignant qu’une telle contractualisation ne pourrait que susciter des demandes reconventionnelles de la part d’autres pays tiers liés à l’UE par des accords. L’UE serait obligée de leur accorder les mêmes préférences contractuelles conformément aux règles de l’OMC, ce qui remettrait en cause le fonctionnement de l’une des organisations communes du marché (OCM) les plus sensibles de la politique agricole commune (PAC). Les dispositions prévues par l’ASA ARYM, conclu à l'automne 2000, et qui repose sur trois éléments, ont finalement été reconduites pour l’Albanie en 2006 et pour le Monténégro, à savoir :

– l’insertion, dans les décisions du Conseil concernant la signature et la conclusion du l’ASA, d’un article de non-précédent (indiquant que « les dispositions commerciales contenues dans l'accord ont un caractère exceptionnel, lié à la politique mise en oeuvre dans le cadre du processus de stabilisation et d’association, et ne feront pas, pour l’UE, figure de précédent à l’égard de pays tiers autres que les pays des Balkans occidentaux ») ;

– Le renforcement des clauses de sauvegarde dans l’ASA : outre la clause de sauvegarde générale (article 41) prévoyant la possibilité pour les Parties de prendre les meures appropriées en cas de dommages graves causés par l’importation d’un produit, une clause de sauvegarde spécifique est prévue au cas où l’importation de produits agricoles transformés, de produits agricoles et de produits de la pêche de l’une des Parties entraînerait « une perturbation grave des marchés ou des mécanismes de régulation de l’autre partie » (article 32) ;

– le maintien dans l’ASA du système des prix d’entrée pour les fruits et légumes, sachant que les mesures commerciales exceptionnelles6 prévoient un dispositif plus favorable (sans prix d’entrée), accordé sur une base unilatérale. Il est ainsi indiqué que, pour les fruits et légumes, pour lesquels le tarif douanier commun prévoit l’application de droits de douane ad valorem et d’un droit de douane spécifique (prix d’entrée), la suppression ne s’applique qu’au droit ad valorem (article 26). Mais dans le même temps, il est précisé que le dispositif plus favorable mis en place dans le cadre des préférences commerciales prévaut sur les dispositions de l’accord : l’article 35 prévoit que « les dispositions du présent chapitre n'affectent en rien l’application, sur une base unilatérale, de mesures plus favorables par l’une ou l’autre des parties ». Par ailleurs, une déclaration unilatérale de la Communauté et des États membres annexée à l’accord ajoute que « les mesures commerciales autonomes unilatérales les plus favorables s’appliquent en plus des concessions commerciales contractuelles offertes par la Communauté dans le présent accord », et que, pour les fruits et légumes, « la réduction s’applique également au droit de douane spécifique [prix d’entrée], par dérogation à la disposition correspondante de l’article 26-2 ». Ce dispositif permet de conserver aux pays des Balkans le bénéfice intégral des préférences commerciales, sans créer juridiquement de précédent vis-à-vis des pays tiers.

Le Monténégro obtient un accès en franchise de droits aux importations dans la Communauté du sucre et de certains produits à base de sucre (n° 1701 et 1702 de la nomenclature combinée), dans les limites d’un contingent tarifaire annuel de 1 000 tonnes.

Le régime applicable aux produits textiles et aux produits sidérurgiques est précisé dans des protocoles annexés à l'accord. Le régime applicable aux vins et spiritueux est défini dans le protocole n° 2. Nous avons obtenu l’adjonction dans ce protocole d’une clause de « phasing out » sur les marques usurpant des indications géographiques européennes. Le régime applicable aux produits agricoles transformés est déterminé par un protocole annexé à l’accord. L’article 31 prévoit une clause de rendez-vous : au plus tard trois ans après l’entrée en vigueur de l’accord, la Communauté et le Monténégro devront examiner, au sein du conseil de stabilisation et d’association, la possibilité de s’accorder de nouvelles concessions, produit par produit, pour les produits agricoles et de la pêche.

Le chapitre III du titre IV définit les dispositions communes: clause de statu quo (article 33, interdisant l’introduction, après l’entrée en vigueur de l’accord, de mesures plus restrictives dans les relations commerciales), interdiction de discrimination fiscale (article 36), clause antidumping (article 40), clause de sauvegarde générale (article 41), permettant à une Partie de suspendre les réductions tarifaires ou d’augmenter les taux pour une durée limitée, sous réserve d’une notification au comité de stabilisation et d’association, et en cas de dommage grave à la production nationale ou de perturbations sérieuses dans un secteur de l’économie causé par l’importation d’un produit. Ces mesures font l’objet de consultations au sein du comité de stabilisation et d’association, en vue d’arrêter un calendrier pour leur suppression), clause de pénurie (article 42, permettant à la Partie exportatrice de prendre les mesures appropriées lorsque l’exportation d’un produit conduit à une situation ou à un risque de pénurie grave de produits alimentaires ou essentiels, ou risque de provoquer chez elle des difficultés majeures), clause anti-fraude (article 43). Il est par ailleurs précisé que l’accord ne fait pas obstacle au maintien ou à l’établissement d’unions douanières, de zones de libre-échange ou de régimes de trafic frontalier, dans la mesure où ils n’ont pas pour effet de modifier le régime des échanges prévu par l’accord (article 39) ;

7° Le titre V (articles 49 à 71) porte sur la circulation des travailleurs, le droit d’établissement, la prestation de services et la libre circulation des capitaux :

– la circulation des travailleurs (chapitre Ier) : l’article 49 fixe le principe de non discrimination en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération et de licenciement dans le traitement des travailleurs ressortissants du Monténégro légalement employés sur le territoire d’un État membre, ainsi que du conjoint et des enfants résidant légalement dans ce pays. Le même traitement est applicable aux travailleurs ressortissants d’un État membre, ainsi qu’à leurs conjoint et enfants, légalement employés sur le territoire du Monténégro. L’article 50 prévoit que les États membres doivent préserver et si possible améliorer les possibilités d’accès à l’emploi accordées aux travailleurs monténégrins en vertu d’accords bilatéraux, et examiner la possibilité de conclure de tels accords s’ils n’en disposent pas. Le conseil de stabilisation et d’association devra adopter un certain nombre de dispositions afin d’établir la coordination des régimes de sécurité sociale de travailleurs monténégrins employés dans un État membre (article 51) ;

– le droit d’établissement (chapitre II) : l’article 52 fixe le principe de non discrimination entre l’UE et le Monténégro en ce qui concerne l’établissement des sociétés ainsi que l’activité des filiales et succursales de ces sociétés (exception faite des services de transport aérien, de navigation intérieure et de cabotage maritime, cf. article 53). Il ne reconnaît pas de droit d’établissement pour les travailleurs indépendants, mais prévoit que le conseil de stabilisation et d’association devra revenir sur la question (article 53-4 : « quatre ans après l’entrée en vigueur du présent accord, le conseil de stabilisation et d’association examinera les modalités permettant d'étendre les dispositions ci-dessus à l’établissement de ressortissants des deux Parties au présent accord, leur conférant le droit d’exercer des activités économiques en tant qu’indépendants »). Le conseil de stabilisation et d’association examine les dispositions qu'il est nécessaire de prendre pour une reconnaissance mutuelle des qualifications (article 57), afin de faciliter l’accès réciproques aux activités professionnelles réglementées. Le Monténégro peut toutefois déroger à ces dispositions pendant les trois ans suivants l’entrée en vigueur de l'accord pour protéger certaines industries (article 56) ;

– les prestations de services (chapitre III) : les Parties s’engagent à prendre les mesures nécessaires pour libéraliser progressivement les activités de prestation de services. Les prestations de services de transport font l’objet de dispositions particulières (article 61) ;

– les paiements courants et mouvements de capitaux (chapitre IV) : l’accord instaure, à partir de son entrée en vigueur, la libre circulation des investissements directs effectués dans des sociétés, ainsi que des capitaux concernant les crédits liés à des transactions commerciales ou la prestation de services, et des prêts et crédits financiers d’une échéance supérieure à un an (les investissements de portefeuille, emprunts financiers et crédits d’une échéance inférieure à un an étant libéralisés dès la cinquième année suivant l'entrée en vigueur de l'accord). L’article 64 prévoit qu'à la fin de la deuxième année suivant l'entrée en vigueur de l'accord, le conseil de stabilisation et d’association examine les moyens permettant l’application intégrale de la réglementation communautaire relative à la circulation des capitaux. Des mesures de sauvegarde sont prévues lorsque les mouvements de capitaux causent ou risquent de causer de graves difficultés dans le fonctionnement de la politique des changes ou de la politique monétaire ;

8° Le titre VI (articles 72 à 79) porte sur le rapprochement des dispositions législatives : il n’est pas demandé au Monténégro de reprendre l’ensemble de l’acquis communautaire, mais de s’en « rapprocher », en donnant la priorité dans un premier temps aux éléments « fondamentaux » de l’acquis. Les Parties reconnaissent l’importance du rapprochement de la législation existante du Monténégro avec celle de la Communauté. Le Monténégro veille à ce que sa législation actuelle et future soit rendue progressivement compatible avec la législation de la Communauté. A compter de la date de signature de l'accord et dans une première phase, le rapprochement législatif se concentrera sur certains éléments fondamentaux de l’acquis dans le domaine du marché intérieur et dans d’autres domaines liés au commerce, conformément à un programme qui devra être établi avec la Commission. Des principes et des dates limites sont fixées pour la législation sur la concurrence (délai de quatre ans pour supprimer toute mesure susceptible de fausser le jeu de la concurrence et assurer la transparence des aides publiques, article 73), la propriété intellectuelle (délai de cinq ans pour garantir une protection d’un niveau comparable au niveau atteint dans la Communauté, assortie de moyens réels d’application, article 75), les normes et la certification (article 77), les marchés publics (article 76 : dès l’entrée en vigueur, égalité d’accès aux marchés publics de l’UE pour les entreprises monténégrines, et égalité d’accès aux marchés publics au Monténégro pour les sociétés de la Communauté établies au Monténégro ; pour les sociétés de l’UE non établies au Monténégro : délai maximal de quatre ans pour mettre en œuvre l’égalité d’accès), ainsi que la protection des données ;

9° Le titre VII (articles 80 à 87) porte sur le domaine justice, liberté et sécurité. Il prévoit la mise en place d’une coopération étroite entre l’UE et le Monténégro, sur un grand nombre de secteurs :

– renforcement des institutions à tous les niveaux, dans les domaines de l’administration en général, et de la mise en application de la loi et de l’appareil judiciaire (article 80), auquel doit être donnée une importance particulière. La coopération en matière de justice portera en particulier sur l’indépendance de la justice, l’amélioration de son efficacité et la formation des professions judiciaires ;

– visas, contrôle des frontières, droit d’asile et de migration. Les Parties établissent un cadre de coopération, y compris au niveau régional (article 82), qui se fonde sur la consultation mutuelle et une coordination étroite et comporte la fourniture d’une assistance technique et administrative ;

– prévention et contrôle de l’immigration clandestine. Les Parties s’engagent à réadmettre leurs ressortissants présents illégalement sur le territoire de l’autre Partie, à la demande de cette dernière et sans autre formalité, et à leur fournir les documents d’identité appropriés. Les procédures relatives à la réadmission des ressortissants, des ressortissants des pays tiers et des apatrides ont été fixées par l’accord entre la Communauté européenne et le Monténégro sur la réadmission des personnes résidant sans autorisation, signé le 18 septembre 2007 et en vigueur depuis le 1er janvier 2008 ;

– lutte contre le blanchiment de capitaux (article 84) ;

– prévention et lutte contre la criminalité et autres activités illégales (article 86) ;

– lutte contre le terrorisme (article 87) ;

– lutte contre la drogue (article 85) ;

10° Le titre VIII (articles 88 à 114) concerne les politiques de coopération. Il est indiqué que la Communauté et le Monténégro instaurent une coopération étroite visant à promouvoir le développement et la croissance du Monténégro, par le renforcement des liens économiques. Les politiques de coopération s’inscriront dans un cadre régional, une attention particulière devant être donnée aux mesures susceptibles d’encourager la coopération entre le Monténégro et les pays limitrophes (article 88). Les articles 89 à 114 définissent les modalités de la coopération dans les domaines suivants : politique économique et commerciale, pêche, douane, fiscalité, coopération sociale, éducation et formation, culture, audiovisuel, société de l’information, réseaux et services de communication électronique, information et communication, transports, énergie, environnement, recherche et développement technologique, développement régional et local, administration publique ;

11° Le titre IX (articles 115 à 118) concerne la coopération financière : il détaille les aides financières que l’UE peut accorder au Monténégro :

– afin de réaliser les objectifs de l’accord, le Monténégro peut recevoir une assistance sous forme d’aides non remboursables et de prêts, notamment de prêts de la Banque européenne d’investissement (BEI) (article 115). L’article 116 précise que les aides non remboursables seront couvertes par les mesures de coopération prévues dans le règlement du Conseil correspondant sur la base pluriannuelle indicative établie par la Communauté à l’issue de consultations avec le Monténégro7 ;

– à la demande du Monténégro, et en cas de besoin particulier, la Communauté peut examiner, en liaison avec les institutions financières internationales, la possibilité d’accorder à titre exceptionnel une aide financière macro-économique soumise à certaines conditions (article 117) ;

– afin d’assurer une utilisation optimale des ressources, les Parties veillent à ce qu’il y ait une coordination étroite entre les différents donateurs (article 118) ;

12° Le titre X (articles 119 à 139) porte sur les dispositions institutionnelles, générales et finales.

Les articles 119 à 125 décrivent les institutions conjointes mises en place par l'accord :

– le conseil de stabilisation et d’association supervise l’application et la mise en œuvre de l'accord. Il se réunit régulièrement au niveau approprié, et lorsque les circonstances l’exigent. Chaque Partie peut le saisir de tout différend relatif à l’application et à l’interprétation de l’accord. Il est composé, d’une part de membres du Conseil de l’UE et de la Commission, d’autre part de membres du gouvernement du Monténégro. La présidence est exercée à tour de rôle par un représentant de la Communauté et un représentant du Monténégro. La BEI participe aux travaux du Conseil comme observateur, pour les questions relevant de sa compétence. Le Conseil dispose d’un pouvoir de décision, et les décisions prises sont obligatoires pour les Parties. Il réexamine régulièrement l'application de l'accord et sa mise en oeuvre par le Monténégro (cf. article 6) ;

– le comité de stabilisation et d’association assiste le Conseil dans l’accomplissement de sa mission. Il est notamment chargé de préparer les réunions du Conseil, qui peut lui déléguer tout pouvoir. Ses tâches et son mode de fonctionnement sont déterminés dans le règlement intérieur du Conseil. Il est composé, d’une part de représentants du Conseil et de la Commission, d’autre part de représentants du Monténégro. Le comité de stabilisation et d’association peut créer des sous-comités ;

– la commission parlementaire de stabilisation et d’association constitue une enceinte de rencontre et de dialogue entre les membres du Parlement monténégrin et ceux du Parlement européen. Elle se réunit selon une périodicité qu’elle détermine, et est présidée à tour de rôle par le Parlement européen et le Parlement monténégrin.

L’article 127 préserve le droit des Parties de prendre des mesures nécessaires pour assurer leur sécurité ou leur défense et satisfaire à leurs obligations en vue d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.

L’article 128 pose le principe de non discrimination (dans le régime appliqué par le Monténégro : entre les États membres, leurs ressortissants ou leurs sociétés et dans le régime appliqué par la Communauté : entre les ressortissants du Monténégro ou leurs sociétés).

L’article 129 oblige les Parties à prendre toute mesure générale ou particulière nécessaire pour s’acquitter de leurs obligations au titre de l'accord. Elles veillent à ce que les objectifs définis par l’accord soient atteints. Si l’une des Parties considère que l’autre Partie n’a pas satisfait à l’une de ses obligations, elle peut prendre les mesures appropriées. Auparavant, elle doit, sauf urgence spéciale, fournir au conseil de stabilisation et d’association toutes les informations pertinentes nécessaires en vue de rechercher une solution acceptable. Le choix doit porter en priorité sur les mesures qui perturbent le moins le fonctionnement de l’accord, elles sont notifiées au Conseil et font l’objet de consultations au sein de celui-ci, à la demande de l’autre Partie.

L’accord est conclu pour une durée illimitée. Chacune des Parties peut le dénoncer en notifiant son intention à l’autre Partie et il cesse alors d’être applicable six mois après cette notification (article 133).

Il entre en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la date à laquelle les Parties se notifient l’accomplissement des procédures d’approbation. Pour les dispositions, notamment celles relatives à la libre circulation des marchandises et celles pertinentes, concernant les transports, qui seront mises en application avant l’entrée en vigueur de l'accord par un accord intérimaire entre la Communauté et le Monténégro, la date d’entrée en vigueur des obligations correspondantes est la date de l’entrée en vigueur de l'accord intérimaire (article 139).8

Telles sont les principales observations qu’appelle l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la République du Monténégro, d'autre part qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement conformément à l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui est chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part (ensemble sept annexes, huit protocoles et deux déclarations), signé à Luxembourg le 15 octobre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 7 janvier 2009.

Signé : François FILLON

Par le Premier ministre :
Le ministre des affaires étrangères et européennes,

Signé :
Bernard KOUCHNER

1 Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 26 mai 1999 et conclusions du Conseil du 21 juin 1999.

2 Règlement (CE) n° 2666/2000 du Conseil du 5 décembre 2000

3 Règlement (CE) n° 1085/2006 du Conseil du 17 juillet 2006

4 Règlements (CE) n° 2007/00 du Conseil du 18 septembre 2000 et n° 2563/00 du Conseil du 20 novembre 2000.

5 Le système de prix d’entrée, spécifique à l’organisation de marché fruits et légumes, permet de fixer un prix de référence communautaire et d’imposer aux pays exportant des produits vers la communauté un « équivalent tarifaire » compensant la différence de prix si leurs produits entrent sur le marché communautaire à un prix inférieur au prix d’entrée.

6 Le règlement (CE) n° 2007/00 du 18 septembre 2000 introduit des mesures commerciales exceptionnelles (mesures préférentielles, concessions, contingents tarifaires…) en faveur des pays et des territoires participant ou liés au processus de stabilisation et d’association.

7 Il s’agit en l’occurrence du règlement créant le programme CARDS (CE 2666/2000).

8


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