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le 2 mars 2009


N° 1489

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 février 2009.

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre,

par M. Bernard KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes
.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En dehors des États appartenant à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les investisseurs français ne bénéficient d’aucune protection juridique contre les risques de nature politique qu’ils encourent, résultant de la situation locale ou de décisions politiques arbitraires de l’État d’accueil. La France a par conséquent été amenée à multiplier depuis les années 1970 les accords bilatéraux d’encouragement et de protection réciproques des investissements.

C’est dans ce cadre que la France a signé le 10 juillet 2007 un tel accord avec la République du Sénégal, proche des quatre-vingt-onze accords du même type actuellement en vigueur. Il contient les clauses classiques du droit international de la protection de l’investissement étranger, et offre ainsi aux investisseurs français au Sénégal une protection complète et cohérente contre le risque politique.

L’accord, signé à Dakar, est conclu pour une durée initiale de dix ans et il reste en vigueur au-delà de cette période, tant qu’il n’a pas été dénoncé. Ses caractéristiques essentielles sont les suivantes : chaque Partie accorde aux investisseurs de l’autre Partie un traitement juste et équitable, conformément aux principes du droit international et, en particulier, un traitement non moins favorable que celui qu’elle accorde à ses investisseurs ou à ceux de la Nation la plus favorisée s’il est plus avantageux. L’accord prévoit notamment la liberté des transferts des revenus tirés des investissements, le principe d’une indemnisation prompte et adéquate en cas de dépossession et la possibilité de recourir à une procédure d’arbitrage international en cas de différend entre un investisseur et les autorités du pays hôte, ou entre les Parties contractantes.

La France entretient avec le Sénégal des relations étroites et multiformes. Les visites bilatérales à haut niveau sont fréquentes, comme en témoigne la visite du président de la République à Dakar, lors de son premier déplacement en Afrique subsaharienne. La communauté française inscrite au registre des Français établis hors de France au Sénégal avoisine 17 000 personnes. La France est le premier investisseur au Sénégal. Notre stock d’investissements directs étrangers (IDE) s’élevait fin 2006 à 259 millions d’euros. Le Sénégal se trouve au 72e rang des pays d’accueil de nos investissements. Les flux d’IDE français ont atteint 23 millions d’euros en 2007. Fin 2006, le Sénégal accueillait 750 millions d’euros de stock d’IDE (source : CNUCED) et les flux d’IDE ont atteint 40 millions d’euros en 2006 (32 millions d’euros en 2005). Les versements nets d’aide publique au développement française ont atteint 129 millions d’euros en 2007 (source : DGTPE).

L’investissement français n’est pas l’apanage des seuls grands groupes : de nombreux investisseurs individuels sont à l’origine d’implantations nouvelles. Les quelque 300 entreprises à participation française au Sénégal emploient une main-d’œuvre locale à plus de 95 %, ce qui représente un total d’environ 16 000 emplois permanents (20 % des emplois du secteur privé formel). Le chiffre d’affaires des entreprises françaises au Sénégal représente près du quart du produit intérieur brut. Les entreprises françaises y sont solidement implantées, dans tous les secteurs. Les exportations françaises, constituées de biens d’équipement professionnels, de produits agricoles et alimentaires, de biens intermédiaires et de biens de consommation, se sont élevées en 2007 à 731 millions d’euros (+ 9,5 % par rapport à 2006). Les importations françaises, dominées par les produits agroalimentaires, ont atteint 109 millions d’euros (+ 7,7 % par rapport à 2006). Notre aide compte pour plus de 20 % de l’aide totale au Sénégal, hors part française du financement du Fonds européen de développement. Le Sénégal est ainsi le troisième bénéficiaire de notre aide publique au développement dans le monde et le premier en Afrique au sud du Sahara.

*

Le préambule de l’accord souligne la volonté des deux pays d’intensifier leurs relations économiques bilatérales par le biais de la création de conditions favorables à l’accueil des investissements.

L’article 1er est consacré à la définition des principaux termes utilisés dans l’accord, notamment les « investissements », les « investisseurs » et les « revenus ». La définition retenue pour les investissements n’a pas un caractère exhaustif, mais s’avère suffisamment large pour permettre d’étendre le champ d’application de l’accord à tous les investissements réalisés par les nationaux ou sociétés de chaque Partie. En particulier, elle vise les droits de la propriété intellectuelle. Le champ géographique de l’accord concerne les investissements réalisés sur le territoire de chaque Partie, ainsi que dans sa zone maritime. Enfin, le paragraphe 5 de l’article précise que l’accord n’empêche pas les Parties de prendre des mesures de nature à préserver et à encourager la diversité culturelle et linguistique.

Les questions fiscales sont exclues du champ de l’accord (article 2). Tous les investissements sont couverts par l’accord, qu’ils aient été réalisés avant ou après son entrée en vigueur. En revanche, les différends survenus avant son entrée en vigueur ne bénéficient pas de ses dispositions.

L’article 3 prévoit l’encouragement et l’admission des investissements sur le territoire des Parties contractantes.

Conformément à l’article 4, chaque Partie contractante accorde aux investissements de l’autre Partie un traitement juste et équitable, conforme aux principes du droit international. Cet article prévoit également que chaque Partie examinera de façon bienveillante dans le cadre de sa législation, l’entrée sur son territoire, en lien avec des investissements, de nationaux de l’autre Partie.

L’article 5 expose les clauses classiques de traitement national et du traitement de la nation la plus favorisée. Ainsi, les investisseurs de l’autre Partie ne seront pas traités moins favorablement que les investisseurs nationaux, et, en vertu du traitement de la nation la plus favorisée, recevront également un traitement au moins aussi favorable que celui accordé aux investisseurs étrangers les plus favorisés. Des exceptions sont prévues pour les avantages résultant d’accords économiques régionaux, tels que l’Union européenne pour la France. Les principes visés à cet article ne sont pas applicables pour ce qui concerne les avantages particuliers accordés aux institutions financières de développement.

L’article 6 pose le principe de la protection des investissements effectués par les investisseurs de chaque Partie sur le territoire de l’autre Partie. Les mesures d’expropriation, de nationalisation ou de dépossession sont interdites. Dans l’éventualité d’une expropriation motivée par l’utilité publique et non discriminatoire, l’accord établit le droit au versement d’une indemnité prompte et adéquate dont il fixe en détail les modalités de calcul. L’indemnité est librement réalisable et transférable. Enfin, en cas de sinistre ou de dommages provoqués par les événements politiques (guerre, conflit armé, révolution...), il est prévu que les investisseurs de chacune des deux Parties devront pouvoir bénéficier d’un traitement non moins favorable que celui qu’applique l’autre Partie à ses propres investisseurs ou à ceux de la Nation la plus favorisée.

Le libre transfert des diverses formes de revenus que peut engendrer l’investissement est prévu à l’article 7, sous une réserve de déséquilibres exceptionnels de la balance des paiements d’une des Parties ou dans le respect de leurs obligations internationales.

L’article 8 porte sur les modalités de règlement des différends entre un investisseur et l’État accueillant son investissement. Si le différend n’a pu être réglé à l’amiable dans un délai de six mois, il est soumis à l’arbitrage d’un tribunal arbitral ad hoc, du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements, du Groupe de la Banque mondiale (CIRDI) ou de la Cour commune de justice et d’arbitrage créée par le traité de l’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires (OHADA).

La subrogation des États ayant garanti des investissements, dans les droits et actions des investisseurs, est prévue à l’article 9.

L’article 10 prévoit, sans préjudice de l’accord, que les investissements des nationaux de l’autre Partie peuvent faire l’objet d’un engagement particulier plus favorable de la part d’une des Parties.

Suivant des principes classiques en la matière, la procédure de règlement des différends pouvant survenir entre les Parties contractantes pour l’interprétation et l’application de l’accord s’effectue par la voie diplomatique ou, à défaut, par le recours à un tribunal d’arbitrage, si la voie diplomatique est restée infructueuse pendant au moins six mois (article 11).

L’article 12 prévoit que lorsque les Parties apportent des modifications législatives ou réglementaires, des mesures pour protéger l’environnement peuvent être adoptées, à condition qu’elles n’entravent pas l’application des dispositions de l’accord.

Enfin, les dispositions finales de l’article 13 précisent les conditions d’entrée en vigueur, la dénonciation et la durée de validité de l’accord.

Telles sont les principales observations qu’appelle l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements et qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement en vertu de l’article 53 de la Constitution.


PROJET DE LOI

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la promotion et la protection réciproques des investissements, signé à Dakar le 26 juillet 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 25 février 2009.

Signé : François FILLON

Par le Premier ministre :
Le ministre
des affaires étrangères et européennes,


Signé :
Bernard KOUCHNER


© Assemblée nationale