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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

     

Ministère des affaires étrangères

et européennes

     
     

NOR :

MAEJ1002160L

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et le Grand-Duché

de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles

d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts

sur le revenu et sur la fortune

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord ou convention

• Contexte des discussions

La France et le Luxembourg sont liés par une convention tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Paris le 1er avril 1958, modifiée par un avenant signé à Paris le 8 septembre 1970 et par un avenant signé à Luxembourg le 24 novembre 2006.

Les stipulations relatives à la clause d’échange de renseignements de la convention actuelle sont très restrictives dès lors que l’échange de renseignements qu’elles prévoient est limité à la seule application de la convention, et sont insuffisantes pour obtenir les renseignements nécessaires à l’application de la législation française. Elles prohibent de surcroît tout échange qui révèlerait un secret bancaire.

Le Luxembourg avait été inscrit sur la liste grise publiée par l’OCDE à l’issue du G20 qui s’est tenu à Londres le 2 avril 2009, c’est à dire la liste des Etats ou territoires qui se sont engagés à respecter les standards internationaux mais qui avaient alors signés moins de douze accords.

Dans le contexte international où la transparence et l’échange d’informations fiscales se sont révélés être les contreparties indispensables à la mondialisation, la France a fait de la lutte contre l’évasion fiscale internationale un axe majeur de sa politique conventionnelle.

Les stipulations relatives à l’échange de renseignements contenues dans l’actuelle convention franco-luxembourgeoise, non conformes aux standards internationaux, ne sont pas en adéquation avec cette politique, et sont d’autant moins acceptables pour la France qu’elles concernent l’un de ses partenaires européens.

La France s’est donc engagée dans des discussions avec le Luxembourg, comme elle l’a fait avec l’ensemble des Etats figurant sur la liste de l’OCDE (y compris avec d’autres partenaires européens tels que la Belgique et l’Autriche), en lui proposant des dispositions relatives à l’échange de renseignements conformes au standards du Modèle de convention de l’OCDE.

Cette signature s’inscrit dans le contexte de la conférence de Berlin du 21 octobre 2008 et traduit la volonté manifestée par les Etats du G20, le 2 avril 2009, d’améliorer la coopération en matière d’échange d’informations fiscales aux fins de lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales, dès lors que l’avenant crée un cadre favorable au renforcement d’une telle coopération.

• Différence avec la clause d’échange de renseignements figurant au Modèle de l’OCDE

Cet article a pour objet de modifier l’article 22 de la convention actuelle relatif à l’échange de renseignements entre les Etats contractants, trop limité par rapport aux derniers standards de l’OCDE.

La nouvelle rédaction proposée est celle de l’article 26 du Modèle de convention de l’OCDE à jour en juillet 2008.

Ainsi, notamment en application de son paragraphe 5, l’article 22 tel que modifié ne permettra pas au Luxembourg d’opposer sa législation sur le secret bancaire pour refuser de communiquer à la France des renseignements.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de cet avenant

• Conséquences économiques et financières

Dans son rapport annuel de 2007, le Conseil des prélèvements obligatoires estimait le montant de la fraude fiscale et sociale annuelle entre 29 et 40 milliards d’euros. Il n’est cependant pas possible d’estimer, même en termes d’ordre de grandeur, la part de la fraude et de l’évasion fiscales qui impliquerait des opérateurs profitant de l’absence d’échange de renseignements existant avec le Luxembourg.

Toutefois, la structure économique de ce territoire, sa proximité géographique avec la France, son attractivité fiscale ainsi qu’une loi protégeant le secret bancaire sont autant d’éléments qui permettent de considérer que le risque de fraude et d’évasion fiscales sur les transactions opérées avec cet Etat est avéré.

Les services financiers (banques, auxiliaires financiers) constituent l’élément porteur de l’économie luxembourgeoise, la place financière contribuant pour plus de 30 % au PIB.

La présence économique française s’illustre par un grand nombre d’implantations d’entreprises, plus particulièrement dans le secteur financier. Les produits français y sont également largement distribués.

Les mouvements de capitaux entre la France et le Luxembourg sont plus particulièrement facilités par le cadre européen.

Par ailleurs, plus de 64 000 travailleurs frontaliers se rendent chaque jour au Luxembourg et 26 000 environ y résident.

Dans un tel contexte, l’absence d’un cadre de coopération efficace entre les administrations fiscales française et luxembourgeoise accroît considérablement le risque de fraude et d’évasion fiscales.

L’avenant permet désormais à la France d’obtenir des renseignements de la part des autorités luxembourgeoises sans limitation quant à la nature des impôts, des personnes et des renseignements visés par la demande de renseignements. Il interdit désormais au Luxembourg d’opposer sa législation sur le secret bancaire pour refuser de communiquer à la France des renseignements.

L’extension du champ de l’échange de renseignements prévu par la convention favorisera donc la lutte contre les schémas de fraude et d’évasion fiscales.

• Conséquences juridiques

L’ordonnancement juridique n’est pas affecté par cet avenant.

Toutefois, l’introduction dans la convention de la clause d’échange de renseignements offre la possibilité à la France de demander aux autorités de l’autre Partie contractante toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne et de transmettre ces informations aux autorités concernées, y compris les autorités juridictionnelles et administratives.

Pourront être requis tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts, pour le recouvrement et l’exécution des créances fiscales sur les personnes soumises à ces impôts, ou pour les enquêtes ou les poursuites en matière fiscale et pénale à l’encontre de ces personnes. Les demandes pourront concerner toute personne ou entité, y compris les trusts et les fondations. De plus, le Luxembourg ne pourra pas opposer son secret bancaire, ni subordonner la délivrance de l’information à l’existence d’un intérêt pour l’application de sa propre législation fiscale. Ainsi, la capacité de la France dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale se trouve renforcée.

• Conséquences administratives

La mise en œuvre de l’échange de renseignements sera gérée par la Sous-direction du Contrôle fiscal de la Direction générale des finances publiques et par les Directions de contrôle fiscal nationales et interrégionales au niveau déconcentré. Ces services sont déjà en charge de la mise en œuvre de l’assistance administrative dans le cadre communautaire ou en application des conventions fiscales existantes. Au regard des volumes d’informations déjà échangés et dès lors que, bien que plus restrictive, une clause d’échange de renseignements existe déjà dans la convention actuelle, l’entrée en vigueur de l’avenant à la convention fiscale entre la France et le Luxembourg ne devrait pas entraîner de surcharge administrative substantielle.

III. - Historique des négociations

Les négociations ont été entamées avec le Luxembourg, par l’envoi, dès le mois de février 2009, d’une proposition d’avenant proposant l’insertion dans la convention des modalités d’échange de renseignements conformes aux derniers standards de l’OCDE

Des échanges écrits se sont poursuivies et ont abouti au paraphe d’un projet d’avenant en mai 2009, introduisant dans la convention un article échange de renseignements conforme à l’article 26 du modèle de convention de l’OCDE.

VI. - Etat des signatures et ratifications

L’avenant a été signé à Paris le 3 juin 2009 par Monsieur Luc FRIEDEN, ministre du Trésor et du budget, Ministre de la justice du Grand-Duché de Luxembourg, et Madame Christine LAGARDE, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.


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