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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

     

Ministère des affaires étrangères

et européennes

     

NOR :

MAEJ1013565L

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord de coopération en matière militaire entre

le Gouvernement de la République française et le Gouvernement

de la République du Kazakhstan

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord ou convention

A) Situation de référence

Les gouvernements français et kazakhstanais ont signé, le 6 octobre 2009, un accord dans le domaine militaire qui parachève l’édifice de coopération en matière de défense constitué des textes suivants et signés le même jour :

- accord relatif à la coopération en matière d’armement, signé le 6 octobre 2009 ;

- accord relatif au transit de matériel militaire et de personnel par le territoire de la République du Kazakhstan en rapport avec la participation des forces armées de la République française aux efforts de stabilisation et de rétablissement de la République islamique d’Afghanistan, signé le 6 octobre 2009 ;

- accord entre le Gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Kazakhstan relatif aux conditions d’emploi d’un satellite optique de résolution métrique signé le 6 octobre 2009.

Les précédents jalons de cette coopération renforcée avaient été posés par l’accord sur la protection réciproque des informations classifiées signé le 8 février 2008 qui permet des échanges approfondis d’informations sensibles grâce à la reconnaissance mutuelle des dispositifs de protection de nos deux pays.

Au-delà de la défense, la relation privilégiée entre la France et le Kazakhstan s’est concrétisée par la signature de textes de plus large portée :

- le traité d’entente, d’amitié et de coopération du 23 septembre 1992. Cet engagement pose les fondements d’une coopération entre les deux Etats « dans tous les domaines » (article 1er). Les questions ayant trait à la coopération en matière de défense sont visées aux articles 9 et 10. L’article 10 stipule en particulier que les parties « développent et approfondissent leurs contacts dans le domaine militaire » et, à cette fin, « procèdent (…) de manière régulière, à des échanges de vues sur leurs concepts de défense » ;

- le traité de partenariat stratégique signé le 11 juin 2008 prolonge la volonté exprimée par le texte ci-dessus et prévoit, en son article 7, une coopération dans le domaine militaire et l’établissement de contacts entre les services compétents sur la base d’accords spécifiques.

Enfin, il convient de rappeler que le Kazakhstan est membre du Partenariat pour la Paix, programme de coopération mis en place au sein de l’OTAN et, à ce titre, applique l’accord entre les Etats parties au Traité de l’Atlantique Nord et les membres du PpP relatif au statut de leurs forces (Accord SOFA (status of forces agreement) PpP) depuis le 6 novembre 1997 (voir infra).

B) Objectifs de l’accord de coopération dans le domaine militaire du 6 octobre 2009

Dans le cadre ainsi décrit, l’accord de coopération en matière militaire prévoit, en son article 4, que les domaines suivants sont éligibles à la conduite d’actions communes :

- évolution et réforme des forces armées ;

- enseignement de la langue française aux personnels militaires ;

- formation des personnels ;

- échanges d’expérience en matière d’organisation des forces armées, d’utilisation des forces et de doctrine militaire ;

- organisation d’exercices conjoints ;

- coopération en matière d’armement ;

- échanges d’expérience en matière de maîtrise des armements ;

- médecine militaire ;

- coopération dans le cadre des activités d’organisations internationales ;

- échanges d’informations et d’expérience en matière de contrôle et d’exploitation de l’espace aérien ;

- d’autres domaines arrêtés d’un commun accord des Parties.

En vertu de l’article 5, ces actions prendront l’une des formes suivantes :

- visites officielles et réunions de travail entre représentants des autorités habilitées des Parties ;

- échanges réciproques de spécialistes et d’experts des questions militaires ;

- participation à des consultations, conférences, pourparlers, colloques et séminaires ;

- organisation d’exercices et entraînements conjoints ;

- stages d’études dans les établissements d’enseignement militaire des Parties ;

- enseignement des langues ;

- organisation de manifestations culturelles et sportives ;

- autres formes définies d’un commun accord.

Cette architecture de coopération est classique en ce qu’elle reprend des dispositifs d’ores et déjà mis en œuvre avec d’autres pays. Elle vise surtout à marquer notre volonté d’ériger le Kazakhstan en partenaire privilégié en lui reconnaissant la place qu’il joue dans le domaine de la sécurité dans la région de l’Asie centrale.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord ou convention

Conséquences économiques et industrielles

L’objectif principal de l’accord est d’intensifier nos échanges en matière militaire, notamment par le biais d’une meilleure prise en compte de nos traditions et modes d’action. L’approfondissement de nos relations dans ce domaine est susceptible de rejaillir sur l’ensemble de la coopération franco-kazakhstanaise et d’accroître la confiance mutuelle propice à d’autres activités bilatérales et in fine au développement de nos échanges commerciaux. A ce titre, méritent d’être évoquées les retombées positives susceptibles d’en résulter pour l’industrie française d’armement. Si, dans ce domaine, le principal support de l’influence que l’Etat français peut exercer consiste en l’accord de coopération signé le même jour, on peut escompter que la conduite d’exercices communs fournira aux forces armées kazakhstanaises l’occasion d’observer l’utilisation en conditions réelles des équipements français utilisés par nos armées.

Il convient de rappeler qu’un premier jalon de la pénétration du marché kazakhstanais par les industriels français a été posé avec la signature, en 2009, de deux contrats majeurs par les sociétés THALES et EADS ASTRIUM pour un montant total de 320 millions d’euros.

Conséquences juridiques

1. Cet accord n’affecte pas les droits et obligations résultant pour les Parties d’autres engagements internationaux. Il ne nécessite pas non plus l’adaptation de notre législation, conformément à l’article 1er alinéa 2.

2. Dans la mesure où il a pour but d’intensifier nos relations en matière de défense, en particulier sous la forme d’échanges de personnels dans le cadre de missions de plus ou moins longue durée, l’octroi d’un statut juridique protecteur à leur profit s’avérait nécessaire. Celui-ci reposera sur le dispositif mis en place par l’accord entre les Etats membres de l’OTAN et les Etats du Partenariat pour la Paix (PpP) relatif au statut de leurs forces (voir supra). Cet accord, qui renvoie au SOFA OTAN et notamment à son article VII, en vigueur depuis 1951 pour les Etats membres de l’OTAN, répartit entre les juridictions de l’Etat d’envoi et de l’Etat de séjour la connaissance des infractions commises par les membres du personnel militaire et civil d’une partie qui séjournent sur le territoire de l’autre partie. Ainsi, à l’égard des membres du personnel militaire et civil français se trouvant sur le territoire du Kazakhstan pour l’exécution de l’accord de coopération, les juges français peuvent exercer :

- une juridiction exclusive en ce qui concerne les infractions portant à la sûreté de l’Etat français qui ne tombent pas sous le coup de la législation de l’Etat kazahkstanais;

- par priorité sur celle des juges kazakhstanais, leur juridiction en ce qui concerne :

- les infractions portant atteinte uniquement à sûreté ou la propriété de l’Etat français ou les infractions portant atteinte uniquement à la personne ou à la propriété d’un membre des forces ou d’un élément civil français ainsi que d’une personne à charge ;

- les infractions résultant de tout acte ou négligence accomplis dans l’exécution du service.

Les juridictions kazakhstanaises ont le droit de juger les autres infractions pouvant être commises par le personnel français. Il convient de souligner que dans ces cas, les autorités françaises gardent la possibilité de demander aux autorités kazakhstanaises de renoncer à ce droit.

3. Le présent accord ne prévoit pas de clause d’assistance en cas d’exercice de la légitime défense par la République du Kazakhstan. Ses dispositions sont pleinement compatibles avec, d’une part, les engagements de la France dans le cadre des Nations Unies (articles 2 et 51 de la charte des Nations Unies), et d’autre part ses engagements dans le cadre de l’OTAN et de l’UE. Le Traité de Washington du 4 avril 1949 n’exclut pas la possibilité pour un Etat Partie au traité de Washington de conclure des accords avec des Etats tiers, pour autant qu’ils ne soient pas en contradiction avec ledit Traité (article 8). Le Traité sur l’Union européenne (article 42.7) renvoie aux engagements souscrits par les Etats membres dans le cadre de l’OTAN. Plus fondamentalement, il faut constater que l’article 1er, alinéa 2 stipule que les parties mettent en œuvre cette coopération conformément au droit international et à leurs législations nationales. Cet article doit être lu à la lumière de l’intention exprimée dans le préambule de tenir compte de leurs engagements internationaux respectifs.

Conséquences administratives et financières

Sur le plan administratif, l’accord n’entraîne pas de modification de l’organisation du ministère de la défense. Il a pour effet, conformément à l’article 6, d’instituer une Commission mixte militaire franco-kazakhstanaise à laquelle il revient de définir, d’organiser et de coordonner les actions en matière de défense mentionnées à l’article 4 de l’accord. La Commission est coprésidée par des représentants de grade équivalent de chacune des Parties. Participent à ses travaux les attachés de défense des deux Parties et/ou leurs représentants habilités et, en fonction des sujets abordés, des officiers et/ou des représentants civils des autorités habilitées des Parties. Elle se réunit une fois par an, alternativement en France et au Kazakhstan et dresse à cette occasion le bilan de la coopération réalisée au cours de l’année écoulée. La gestion des relations franco-kazakhstanaises dans le cadre ainsi définit n’entraînera s’effectuera à effectifs constants.

Sur ce plan également, on rappellera que la coopération en matière militaire entre la France et le Kazakhstan a été inaugurée en 2002 avec l’ouverture d’une mission militaire à Almaty et la création d’un poste permanent d’attaché de défense (transféré à Astana en 2008).

Sur le plan financier, l’accord pose, à l’article 11, que chaque partie assumera, pour ce qui la concerne, les charges financières qu’entraîne l’exécution de l’accord. A ce stade, les seules dépenses qui découleront directement de l’accord sont relatives aux frais de mission que devront supporter les services participant à la commission mixte (quelques milliers d’euros par an). Les actions de coopération donneront lieu à la conclusion d’arrangements ministériels qui préciseront, dans le cadre des disponibilités financières annuelles des parties, la répartition des coûts de la coopération. Il n’est pas possible d’en donner une évaluation aujourd’hui.

III. - Historique des négociations

Les discussions en vue de la conclusion de cet accord ont débuté en 2004. Si, initialement, il était envisagé de formaliser cette coopération sous la forme d’un arrangement administratif de niveau ministériel, il est finalement apparu nécessaire, tant en raison de la portée du texte que de nos contraintes constitutionnelles respectives, de retenir le principe de la conclusion d’un accord intergouvernemental. Le texte a fait l’objet d’une séance de travail lors de la commission mixte qui s’est tenue à Paris en décembre de la même année. L’accord a été signé par le ministre des affaires étrangères et européennes, M. Kouchner, lors de la visite du Président de la République à Astana le 6 octobre 2009.

IV. - Etat des signatures et ratifications

La procédure de ratification est actuellement en cours au Kazakhstan.

V. - Déclarations ou réserves

Néant.


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