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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

     

Ministère des affaires étrangères

et européennes

     
     

NOR :

MAEJ1100807L/Bleue-1

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation du protocole d’amendement et d’adhésion de la Principauté d’Andorre au traité entre la République française et le Royaume d’Espagne relatif à la coopération transfrontalière entre collectivités territoriales

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ÉTUDE D’IMPACT

I - Situation de référence et objectifs de l’accord ou convention

A. - Situation de référence

La principale difficulté à laquelle se trouve confrontée la Principauté d’Andorre dans le domaine de la coopération transfrontalière est l'absence de structures institutionnelles et juridiques entre l’Etat et les communes.

En raison de cet état de fait, la Principauté n’a pas pu participer, jusqu’à ce jour, aux opérations de coopération menées par ses deux voisins, la France et l’Espagne, dans le cadre du Traité de Bayonne, qui constitue le cadre juridique de la coopération décentralisée transpyrénéenne.

♦ Le Traité de Bayonne, instrument de base de la coopération décentralisée transpyrénéenne.

Conclu le 10 mars 1995 par la France et l’Espagne, le Traité de Bayonne a pour objet de « faciliter et de promouvoir la coopération transfrontalière entre collectivités territoriales françaises et espagnoles ». Son champ d’application géographique concerne, du côté français, les régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, et du côté espagnol, les quatre régions communautés autonomes du Pays Basque, de Navarre, d’Aragon et de Catalogne.

Le Traité de Bayonne permet, en effet, aux collectivités incluses dans les trois régions françaises et les quatre communautés autonomes espagnoles frontalières (ce qui couvre une zone de près de 250 kilomètres de part et d'autre des Pyrénées) de :

- conclure entre elles des conventions de coopérations transfrontalières prévoyant, en particulier, la création d’organismes de coopération dotés ou non de la personnalité juridique ;

- participer à des organismes de coopération relevant du pays voisin (côté français : Groupement d'intérêt public [GIP] et Société d'économie mixte [SEM]/ côté espagnol : « consorcio ») dotés de la personnalité juridique et de l'autonomie financière pouvant assurer la maîtrise d’ouvrage pour la réalisation d'opérations communes.

Ce Traité a donné lieu à la création de nombreux dispositifs de coopération entre collectivités et a été l’occasion de donner un nouvel élan au plus important d’entre eux, la Communauté de Travail des Pyrénées (CTP), notamment à travers la création d’un « consorcio ».

♦ La Communauté de Travail des Pyrénées (CTP).

Cet organisme interrégional de coopération transfrontalière, créé en 1983, réunissait déjà les huit collectivités territoriales situées le long de la chaîne des Pyrénées : les sept citées ci-dessus (les régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées en France, les communautés autonomes d'Aragon, de Catalogne, du Pays Basque, et de Navarre en Espagne), plus la Principauté d'Andorre.

Le territoire représenté s’étend sur plus de 210 000 km2 et concerne environ 7,8 millions d'habitants.

La CTP a créé en 2005 le « consorcio », organisme de droit public espagnol, auquel l’Union européenne a délégué 168 millions d’euros du FEDER [Fonds européen de développement régional] au titre du programme INTERREG IV, dit « programme européen de coopération territoriale France Espagne Andorre 2007-2013 »1.

♦ Situation paradoxale de la Principauté d’Andorre

Alors qu’Andorre est membre, depuis 1983, de la Communauté de travail des Pyrénées (CTP), elle n’a pas pu participer au « consorcio » créé en 2005.

En effet, le paragraphe 1 de l’article 5 du Traité de Bayonne de 1995 prévoit uniquement la participation des collectivités territoriales françaises et espagnoles à des « consorcio » ou à des organismes de coopération de droit français.

D’autre part le statut du « consorcio » de la CTP n’autorise que l’adhésion éventuelle de nouvelles collectivités territoriales françaises et espagnoles, alors qu’Andorre est un Etat.

B. - Objectifs du Protocole

L’objectif de la mise en vigueur de ce protocole est de permettre à la Principauté d’Andorre d’adhérer au Traité de Bayonne entre la République française et le Royaume d’Espagne relatif à la coopération transfrontalière entre collectivités territoriales, signé à Bayonne le 10 mars 1995.

En permettant à Andorre d’adhérer au Traité de Bayonne, ce protocole l’autorise, à travers un organisme de coopération andorran, à participer à des actions de coopération transfrontalière menées entre les collectivités territoriales françaises et espagnoles.

La Principauté sera ainsi en mesure de collaborer aux diverses études envisagées dans ce cadre, notamment en matière de transports et de signer des accords avec les collectivités territoriales françaises et espagnoles.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord ou convention

- Conséquences économiques

Grâce à ce Protocole d’adhésion de la Principauté d’Andorre au Traité de Bayonne, les projets de coopération transfrontaliers entre la France et Andorre, qui sont actuellement centrés essentiellement sur le désenclavement de la Principauté (infrastructures de transports) et sur les questions environnementales (biodiversité, pollution de l’Ariège, réintroduction de l’ours brun), vont être amenés à se diversifier et à se renforcer.

Des retombées économiques, encore difficiles à évaluer, sont prévisibles. En effet, Andorre, qui pourra dorénavant participer aux organismes des collectivités territoriales françaises, notamment aux groupements d’intérêt public de coopération transfrontalière et aux sociétés d’économie mixte locales va, dans une certaine mesure, contribuer à accroître les échanges commerciaux bilatéraux (en 2009 : exportations de la France vers Andorre : 255 M.euros ; importations françaises en provenance d’Andorre : 10 M.euros).

- Conséquences environnementales

Le présent Protocole sera un levier puissant pour permettre à la Principauté d’Andorre d’être partie prenante des actions de coopération en matière environnementale déjà engagées par la France et l’Espagne : réintroduction de l’ours brun dans les Pyrénées ; préservation du bouquetin ibérique, de la gelinotte des bois et des vautours.

Dans le cadre des projets portés par les fonds FEDER-INTERREG, la Principauté pourra, à titre d’exemple, participer aux opérations de coopération transfrontalière suivantes :

- l’action GALLIPYR, portée par le GEIE [groupement européen d'intérêt économique] FORESPIR qui vise à créer un réseau pyrénéen relatif aux galliformes de montagne.

- l’action NECROPYR cherche à structurer les initiatives autour de la biodiversité pyrénéenne en s’appuyant principalement sur les rapaces nécrophages. Des réseaux d’acteurs de l’environnement sont ainsi constitués, l’un autour du suivi du gypaète regroupant 31 structures françaises, l’autre autour de l’éducation à l’environnement en montagne regroupant 43 structures françaises et espagnoles.

- l’action MICOSYLVA vise à développer une gestion sylvicole de montagnes productrices de champignons sylvestres. L’objectif de ce projet réunissant 32 partenaires (France, Espagne, Portugal) est de développer la prise en compte de la diversité fongique (mais pas uniquement) dans la gestion des milieux forestiers tout en soutenant le développement local.

Enfin, la France qui entend développer une stratégie pour la préservation et la valorisation de la biodiversité dans les Pyrénées, dans le but de développer la coopération transfrontalière de nombreuses espèces, pourra bénéficier de la collaboration d’Andorre pour parvenir à ses fins.

- Conséquences juridiques

Avant l’entrée en vigueur du Traité de Bayonne, les collectivités territoriales frontalières franco-espagnoles pouvaient uniquement coopérer dans le cadre de structures de concertation non dotées de la personnalité juridique.

En permettant aux collectivités territoriales frontalières, de part et d’autre des Pyrénées, de participer à des organismes de coopération relevant du pays voisin, dotés de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, le Traité de Bayonne lève un certain nombre d’obstacles juridiques qui entravaient la mise en œuvre concrète de projets transfrontaliers.

Le présent protocole est compatible avec le droit européen. Il s’inscrit dans le cadre des dispositions contenues dans le Traité de Bayonne qui font état de la volonté des rédacteurs de faciliter l’application de la convention-cadre (Conseil de l’Europe) du 21 mai 1980 sur la coopération transfrontalière des collectivités territoriales ou autorités territoriales, dont les principes essentiels inspirent la coopération instituée par ledit Traité.

C’est dans ce but que pour éliminer la différence des structures politiques et administratives des deux Etats et de leur législation en matière de coopération transfrontalière, un cadre juridique approprié permettant l’application des principes contenus dans la convention-cadre susvisée, a été institué à travers le Traité de Bayonne.

Le dispositif couvert par le présent protocole est compatible avec le nouvel instrument européen institué par le règlement (CE) n° 1082/2006 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relatif à un groupement européen de coopération territoriale (GECT). Cet instrument permet d’associer au sein d’une même structure des collectivités de différents niveaux et des Etats, gommant ainsi les difficultés liées à des répartitions distinctes de compétences de part et d’autre de la frontière. Il s’agit d’une structure dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière capable de gérer des fonds européens.

Le règlement européen relatif au GECT a donné lieu à une adaptation des droits internes français (loi du 16 avril 2008) et espagnol (décret royal du 18 janvier 2008). Il est applicable pour la coopération décentralisée transfrontalière franco-espagnole et vient compléter le cadre juridique fixé par le Traité de Bayonne du 10 mars 1995.

Il est actuellement question de transformer le « consorcio » de la Communauté de Travail des Pyrénées (CTP) en GECT.

- Conséquences pour la coopération transfrontalière des collectivités locales.

Conformément à l’article 2 du Protocole (d’adhésion de la Principauté d’Andorre au Traité entre la République française et le Royaume d’Espagne relatif à la coopération transfrontalière entre collectivités territoriales), les autorités andorranes devront, dans un délai de six mois à compter de l’entrée en vigueur du Protocole, constituer un organisme permettant la coopération entre les collectivités territoriales.

La création d’un organisme permettant la coopération entre entités d’un niveau infra-étatique est une condition de la mise en œuvre de la coopération transfrontalière entre les collectivités locales.

La constitution d’une telle structure est bien envisagée par la gouvernance de la Communauté de Travail des Pyrénées (CTP) dont la Principauté d’Andorre est membre.

III. - Historique des négociations

La Principauté d’Andorre, membre depuis 1983 de la Communauté de Travail des Pyrénées (CTP), mais qui ne peut participer au « consorcio », organisme de droit public espagnol créé par le Traité de Bayonne en 2005, a fait connaître en septembre 2007 aux autorités françaises et espagnoles son souhait d’adhérer au Traité de Bayonne.

En juin 2008, après de longues négociations, la France, en accord avec les autorités espagnoles, accepte de donner suite à la demande andorrane. L’intégration est prévue sous la forme d’une révision du Traité de Bayonne.

Le 16 février 2010 a eu lieu à Andorre la Vieille la signature par le chef de la diplomatie andorrane, M. Xavier Espot, et les Ambassadeurs d’Espagne et de France, du Protocole d’amendement et d’adhésion de la Principauté d’Andorre au Traité de Bayonne.

A noter qu’il n’existe pas d’autres accords du même type signés avec Andorre.

IV. - Etat des signatures et ratifications

Par note verbale en date du 20 mai 2010 le ministère andorran des affaires étrangères et des relations institutionnelles a notifié l’accomplissement des formalités internes requises par la législation andorrane aux fins de l’entrée en vigueur du Protocole.

S’agissant de l’Espagne, le protocole a été transmis au Parlement espagnol. Aucune date n’a été encore retenue pour la ratification.

1 http://www.poctefa.eu/FCKeditor/UserFiles/File/PO%20POCTEFA%20VF%20modifiee%20approuvee%2001.10.08.pdf


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