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mis en distribution

le 7 novembre 2007


N° 315

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 octobre 2007.

PROPOSITION DE LOI

portant amnistie des délits et contraventions
pour
téléchargements illégaux,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR MM. Marc LE FUR et Alain SUGUENOT,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Au cours des débats sur la loi du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, une majorité de députés avait initialement choisi, pour mettre fin à la répression excessive des actes de téléchargement, de mettre en place un système de licence globale. Ce système visait à rémunérer équitablement les ayants droit de la diffusion de leurs œuvres, tout en clarifiant juridiquement la situation du téléchargement par protocole de pair à pair.

La loi sur les droits d’auteurs et les droits voisins dans la société de l’information avait tenté d’apporter une solution à la situation des internautes qui téléchargent des fichiers par le biais des systèmes de peer-to-peer en transformant le délit de « téléchargement simple » en contravention. L’article 24 ne punissait que d’une contravention (entre 38 et 150 euros d’amende) l’échange de fichiers protégés sur les réseaux peer-to-peer.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 27 juillet 2006, a annulé cette disposition, remettant de fait en vigueur l’ancien système de répression (trois ans de prison et 300 000 euros d’amende pour un délit de contrefaçon), que tout le monde s’accordait à trouver disproportionné. Vont donc continuer à s’appliquer des dispositions que le législateur a explicitement voulu réformer.

Plusieurs millions d’internautes, notamment les jeunes, sont ainsi sous la menace de poursuites pénales pour des faits que la très grande majorité ne considère pas comme graves. Cela pourrait donner une mauvaise image de la justice, occupée à réprimer des faits jugés mineurs par la population, au détriment de la poursuite de faits bien plus graves.

En 2006, un milliard de fichiers piratés, dont une majorité de films et de musiques, ont été échangés en France.

Il est évident que cette question devra être réexaminée par le Parlement, d’autant plus que la jurisprudence est partagée sur ce point. Par un arrêt du 28 février 2006, la première chambre civile confirme la condamnation d’un internaute ayant téléchargé et gravé un film. Quelques mois plus tard, par un arrêt du 30 mai 2006, la chambre criminelle a confirmé cette position.

Cet arrêt du 30 mai vient d’être confirmé le 5 septembre 2007 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence. Cette dernière a en effet condamné l’internaute, pour la reproduction de ces films, à 15 000 euros d’amende, dont 12 000 euros avec sursis.

Ces trois décisions font suite à d’autres décisions où, selon le lieu, on est condamné ou relaxé pour la même chose : avoir téléchargé des films ou de la musique.

La ministre de la culture, consciente des difficultés d’application de la loi, a confié au président-directeur général de la FNAC, M. Denis Olivennes, une mission de réflexion sur le téléchargement afin d’établir un véritable dialogue entre les acteurs et développer l’offre légale de téléchargement. Parallèlement, des fournisseurs de services numériques proposent déjà à leurs clients des services leur permettant de télécharger de manière illimitée des morceaux issus de leur catalogue dans le cadre de leurs offres d’abonnements à l’internet et à la télévision par ADSL et au téléphone fixe illimité. Le prix moyen de ces abonnements est compris entre 20 et 30 euros.

En attendant les conclusions de la mission Olivennes et que l’élaboration d’une nouvelle solution législative soit apportée, il convient de suspendre les poursuites et d’amnistier les internautes qui auraient été condamnés pour de simples téléchargements. L’insécurité juridique est trop forte et de tels revirements peuvent être préjudiciables pour l’autorité de la loi et de la justice.

Bien entendu, cette amnistie doit être limitée à de simples utilisateurs de pair à pair et ne concerne en aucun cas les contrefacteurs qui se livrent à un commerce parallèle d’œuvres protégées par le droit d’auteur. À défaut d’adopter une telle cyber-amnistie, nous risquerions de placer des millions de jeunes dans la position absurde d’être considérés comme des délinquants passibles de la correctionnelle.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

I. – Sont amnistiées les contraventions dressées en vertu des articles R. 335-3 et R. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, lorsqu’elles ont été commises avant le 1er novembre 2007.

II. – Sont amnistiés les faits délictueux et les condamnations qui auraient été prononcées en application de l’article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle pour des téléchargements d’œuvres protégées par le biais du réseau internet, lorsqu’ils ont été commis avant le 1er novembre 2007.


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