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mis en distribution

le 7 décembre 2007


N° 480

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 décembre 2007.

PROPOSITION DE LOI

sur l’organisation du temps de travail dans l’entreprise

et en faveur du pouvoir d’achat,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR MM. Pierre MÉHAIGNERIE, Gilles CARREZ, Frédéric LEFEBVRE, Jérôme CHARTIER et Mme Pascale GRUNY,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Pour développer le pouvoir d’achat des ménages de manière pérenne, donc sans dégrader nos comptes publics, il est nécessaire de créer davantage de richesses donc de travailler plus. C’est pourquoi la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a notamment prévu des mesures fiscales et sociales très puissantes pour inciter à la réalisation d’heures supplémentaires. Compte tenu de ces dispositions, les salariés réalisant des heures supplémentaires ou un travail additionnel comparable bénéficieront d’un revenu net très fortement accru puisque les revenus correspondants seront exonérés des 21,5 % de cotisations et contributions sociales supportées par les autres salaires et qu’ils seront, en outre, exonérés de l’impôt sur le revenu.

Bien qu’extrêmement incitatives, ces dispositions ne peuvent pas encore produire partout leur plein effet. La loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat n’a, en effet, pas modifié les dispositions du droit du travail encadrant les conditions de réalisation des heures supplémentaires.

Or celles-ci posent des difficultés qui sont connues, telles l’impossibilité pour un salarié de décider à sa convenance d’effectuer des heures choisies ou l’existence de rigidités dans la mise en œuvre des dispositions relatives aux heures supplémentaires.

Il est donc aujourd’hui nécessaire de prolonger les dispositions fiscales et sociales adoptées dans le cadre de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat par des adaptations du droit du travail afin de permettre à un plus grand nombre de salariés d’en bénéficier comme le Président de la République l’a clairement annoncé dès le mois de septembre, lors de son allocution à l’occasion du quarantième anniversaire de l’Association des journalistes de l’information sociale : l’État a fait « un premier pas » sur la question du temps de travail avec les mesures fiscales et sociales sur les heures supplémentaires ; il faut « aller plus loin » et permettre aux salariés qui le souhaitent de préférer la rémunération au temps libre. Il a confirmé cette orientation lors de son intervention du jeudi 29 novembre 2007.

Les attentes des Français sont grandes et nombreux sont les salariés souhaitant pouvoir bénéficier des mesures d’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires.

Aussi la présente proposition de loi contient une mesure pragmatique, à même de répondre aux préoccupations des employeurs et aux attentes des salariés. Ciblée sur un thème précis aujourd’hui bien identifié grâce aux remontées du terrain, cette disposition, de nature expérimentale et temporaire, constitue un nouveau pas dans la voie de la réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, au service d’une amélioration du pouvoir d’achat.

Elle vise en effet à répondre à une difficulté que rencontrent de très nombreux salariés et entreprises, désireux de recourir aux heures supplémentaires mais en pratique bloqués par le niveau du contingent d’heures supplémentaires applicable dans l’entreprise, fixé conventionnellement à un niveau inférieur au niveau du contingent établi par décret et ce, que l’entreprise soit ou non soumise par ailleurs à un régime de modulation du temps de travail.

L’article 3 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise a apporté une première réponse à cette difficulté en instituant, à l’article L. 212-6-1 du code du travail, un régime d’« heures choisies » pouvant être effectuées au-delà du contingent d’heures supplémentaires, à l’initiative du salarié et en accord avec l’employeur.

Plus de deux ans après l’entrée en vigueur de cette loi, force est de constater qu’elle n’a pu porter tous ses fruits. En effet, la mise en œuvre des heures choisies est subordonnée à la conclusion d’un accord collectif de branche ou d’entreprise : dans les faits, les accords de branche sont rares, mais concernent des secteurs importants (promotion-construction, tracteurs, métallurgie, assainissement et maintenance industrielle) ; de plus, les petites entreprises, souvent dépourvues de représentation syndicale pour négocier, se trouvent de ce fait dans l’impossibilité pratique de recourir aux heures choisies.

L’article 1er propose donc d’expérimenter un régime semblable à celui des heures choisies, pouvant être mis en place à l’initiative du salarié, en accord avec son employeur, dans l’attente de la conclusion d’un accord collectif de travail sur les heures choisies. Ce régime ne peut être mis en œuvre si les représentants du personnel s’y opposent.

Un certain nombre de garanties encadrent la procédure : les conditions de réalisation de ces heures et, le cas échéant, les contreparties auxquelles elles donnent lieu, sont fixées par écrit entre l’employeur et le salarié ; leur rémunération doit être au moins égale à celle des heures supplémentaires telle qu’elle s’applique dans l’entreprise ; le nombre de ces heures ne peut porter la durée du travail au-delà de la limite résultant de l’application du contingent légal d’heures supplémentaires ; les règles relatives aux durées maximales hebdomadaires du travail doivent être respectées ; naturellement, le régime d’exonérations fiscales et sociales établi par la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat prévaut.

Un bilan de cette expérimentation, établie pour une durée limitée à deux ans à compter du 1er janvier 2008, est prévu avant le 31 décembre 2009.

L’article 2 gage cette proposition de loi pour répondre aux contraintes formelles résultant de l’application de l’article 40 de la Constitution. D’un point de vue économique, l’adoption de ce dispositif n’aura toutefois pas pour effet de peser sur les ressources publiques puisqu’il rendra possible la réalisation d’heures de travail qui ne sont, aujourd’hui, pas réalisées et qui généreront, au contraire, un produit fiscal et social supplémentaire.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

À titre expérimental, et pour une durée de deux ans à compter du 1er janvier 2008, dans l’attente d’une convention ou d’un accord collectif de travail conclu en application de l’article L. 212-6-1 du code du travail ou L. 713-11-1 du code rural, en l’absence d’opposition du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, effectuer des heures de travail au-delà du contingent d’heures supplémentaires applicable dans l’entreprise ou dans l’établissement en vertu du deuxième alinéa de l’article L. 212-6 du code du travail ou du deuxième alinéa de l’article L. 713-11 du code rural.

Cette possibilité n’est ouverte que si le contingent visé à l’alinéa précédent est inférieur au contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l’article L. 212-6 du code du travail ou au premier alinéa de l’article L. 713-11 du code rural. Ces heures ne peuvent être réalisées au-delà du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l’article L. 212-6 du code du travail ou au premier alinéa de l’article L. 713-11 du code rural.

Le taux de la majoration ne peut être inférieur au taux applicable pour la rémunération des heures supplémentaires dans l’entreprise ou l’établissement conformément au I de l’article L. 212-5 du code du travail ou au I de l’article L. 713-6 du code rural.

Les I à IX, XII et XIII de l’article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat s’appliquent aux rémunérations accordées au titre des heures ainsi réalisées.

Les dispositions de l’article L. 212-5-1 et du premier alinéa de l’article L. 212-7 du code du travail, ainsi que celles des articles L. 713-9 et L. 713-12 du code rural, ne sont pas applicables.

Le nombre de ces heures ne peut avoir pour effet de porter la durée hebdomadaire du travail au-delà des limites définies au deuxième alinéa de l’article L. 212-7 du code du travail ou au premier alinéa de l’article L. 713-13 du code rural.

Cette expérimentation fait l’objet d’un bilan avant le 31 décembre 2009.

Article 2

I. – Les pertes de recettes pour les régimes de sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – Les pertes de recettes pour l’État sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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